Nations Unies

CAT/C/BDI/3

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

14 février 2022

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Troisième rapport périodique soumis par le Burundi en application de l’article 19 de la Convention, attendu en 2018 *

[Date de réception : 14 septembre 2020]

Sigles et abréviations

Art Article

BNUBBureau des Nations Unies au Burundi

CDHConseil des Droits de l’Homme

CDEConvention relative aux Droits de l’Enfant

CNIDHCommission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme

CNDD-FDDConseil National de Défense de la Démocratie- Force de Défense de la Démocratie

CPGLCommunauté des Pays des Grands Lacs

CPPCode de Procédure Pénale

CPDHPGCentre de Promotion des Droits de l’Homme et de Prévention du Génocide

CVRCommission Vérité et Réconciliation

FENADEBFédération Nationale des Associations Engagées dans le Domaine de L’Enfance au Burundi

FDN Force de Défense Nationale

GAVGarde à Vue

ISTEEBUInstitut des Statistiques et d’Etudes Economiques du Burundi

ONGOrganisations Non Gouvernementales

OMPOfficier du Ministère Public

OPJ Officier de Police Judiciaire

MDPHASGMinistère des Droits de la Personne Humaines, des Affaires Sociales et du Genre

PNDHPolitique Nationale des Droits de l’Homme

PNBPolice Nationale du Burundi

PVProcès-Verbal

SNR Service National de Renseignement

MUL Ménage en Union Libre

Introduction

1.Le Burundi a ratifié la Convention contre la torture le 31 décembre 1992. En réponse à l’article 19 de la Convention, le Pays a soumis le rapport initial en 2006 et le rapport périodique en 2013. Le présent rapport en est donc le troisième.

2.Il est le résultat d’un travail ardu de recherche des membres du Comité Permanent chargé de la rédaction des rapports initiaux et périodiques nommés par l’Ordonnance du Ministre en charge des droits humains, no 225/177 du 3 février 2016. Il est en outre, une preuve de la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre des engagements auxquels il a souscrit, conformément aux recommandations issues de la présentation du premier rapport périodique.

3.Dans l’élaboration du rapport, le Burundi continue à capitaliser les acquis en matière de rédaction des rapports. Le Comité Permanent chargé de la rédaction des rapports initiaux et périodiques a procédé à la récolte des données, à la rédaction et a respecté le processus de validation de ce rapport en impliquant toutes les parties prenantes à la prévention et la répression des actes de torture.

I.Renseignements généraux

A.Présentation du Burundi

4.Le Burundi est un Pays d’Afrique de l’Est enclavé, d’une superficie de 27 834 km2 dont 2 700 km2 de terre émergée. Au Nord se trouve le Rwanda ; au Sud et à l’Est, la Tanzanie ; à l’Ouest, la République Démocratique du Congo.

5.Il est divisé en 18 provinces, 119 communes et 2 908 collines dont 97 quartiers de la Mairie de Bujumbura. La langue nationale est le Kirundi. La langue officielle la plus utilisée dans l’administration est le Français. D’autres langues comme l’Anglais et le Kiswahili sont apprises à l’école et parlées par une partie de la population.

6.Le dernier Recensement Général de la Population et de l’Habitat de 2008 (RGPH-2008) a dénombré 8 053 574 habitants dont 51 % de sexe féminin et 49 % de sexe masculin. Avec un taux d’accroissement annuel de 2,4 % et une taille moyenne de 4,7 personnes par ménage, la population burundaise est marquée par une extrême jeunesse. Selon la pyramide des âges, les jeunes et les enfants dépassent 60 %. La densité de la population était de 310 habitants au km².

7.Selon les projections de l’Institut des Statistiques et d’Etudes Economiques du Burundi (ISTEEBU) tenant compte des résultats de ce Recensement susmentionné, la population du Burundi est estimée actuellement à 10 114 505 habitants, avec une densité de 379 habitants au km².

8.La population est inégalement répartie sur le territoire national, présentant ainsi un déséquilibre entre les provinces, variant entre 116,5 et 474,7 habitants/km² pour les provinces respectives de Cankuzo et de Kayanza. Selon la même source, seuls 10 % de la population résident en milieu urbain. Bujumbura, la capitale du Burundi, est la ville la plus peuplée. La population burundaise est très jeune : les jeunes et les enfants dépassent 60 %. La densité de la population est de 297 habitants/km2 avec un taux annuel de croissance démographique de 3 %.

9.Le processus de paix marqué par les élections de 2005, a continué en 2010 et en 2015 lors de l’organisation des élections présidentielles, communales, législatives, sénatoriales et collinaires. Celles-ci ont abouti à un score significatif concernant la participation accrue des femmes. En 2016, la représentativité des femmes aux instances électives est 44 % au Sénat, 36 % à l’Assemblée Nationale, 32 % aux Conseils Communaux et 6 % de chefs collinaires.

10.Toutefois, le Burundi vient de traverser depuis avril 2015, une situation socio politique caractérisée par un climat d’insécurité dans certaines localités du pays. Cette situation a un impact négatif sur la jouissance des droits humains proclamés par la Convention qui fait objet de l’étude. Certaines personnes ont vu leurs droits fondamentaux violés dont quelques cas de torture et de traitements Inhumains. En plus, un certain nombre de burundais ont fui le pays. En vue de la stabilisation, un dialogue inter - burundais a été initié au niveau interne et externe et un médiateur désigné par la sous-région est à l’œuvre pour rapprocher les positions des protagonistes.

B.Cadre normatif et institutionnel en matière des droits de l’homme

1.Dispositif gouvernemental de promotion et de protection des droits de l’homme

11.La structure gouvernementale comprend un Ministère ayant en charge les Droits de l’Homme. Il a pour missions de :

•Concevoir et coordonner la politique nationale en matière des droits de la personne humaine et du genre et de veiller à son exécution ;

•Promouvoir et protéger les droits de la personne humaine, en collaboration avec les autres ministères et organisations publiques et privées concernés ;

•Concevoir et mettre en œuvre avec les autres partenaires un programme pour la prévention et l’éradication du génocide et des crimes contre l’humanité ;

•Concevoir et mettre en œuvre un vaste programme d’éducation à la paix, à la réconciliation nationale, à la démocratie et à la citoyenneté en collaboration avec les autres ministères concernés ;

•Coordonner les interventions dans les différents secteurs d’action des structures et des activités de promotion et de protection des droits de la personne humaine et développer une stratégie de communication conséquente ;

•Etablir régulièrement l’évolution de la situation des droits de la personne humaine et développer une stratégie de communication conséquente ;

•Assurer le plaidoyer pour la mobilisation des ressources en vue de la mise en œuvre de la politique nationale en matière des droits de la personne humaine ;

•Promouvoir des systèmes d’assurances maladies ou de mutualités-santé universelles pour les travailleurs publics et privés ainsi que pour la population ;

•Assurer l’amélioration progressive de la couverture des risques sociaux, particulièrement dans le secteur privé structuré, par la mise en place d’un système efficace de sécurité sociale ;

•Assurer le contrôle de l’application de la législation de la sécurité sociale ;

•Elaborer et coordonner les stratégies de mobilisation pour le secours des sinistrés en cas de catastrophes naturelles en collaboration avec les autres ministères concernés ;

•Promouvoir l’équité dans la distribution des ressources nationales en faveur des groupes sociaux vulnérables ;

•Coordonner les interventions dans les différents secteurs d’action en faveur des personnes nécessiteuses et vulnérables, les structures et les activités de promotion et de protection des droits de la personne humaine ainsi que dans les secteurs de promotion de l’égalité de genre ;

•Contribuer à l’élaboration, à l’application et au respect des lois, pactes et plates –formes d’action qui protègent les droits de la personne en général, les droits des personnes vulnérables, des femmes, des enfants et des personnes âgées en particulier ainsi qu’à l’équilibre du genre ;

•Elaborer et assurer le suivi des projets d’investissement du Ministère.

2.Institutionnel et législatif

12.Le Burundi est partie à un bon nombre d’instruments régionaux et internationaux de promotion et de protection des droits de l’homme. En vertu de l’article 19 de la Constitution promulguée le 07/06/2018, les droits et devoirs proclamés et garantis par les textes internationaux relatifs aux droits de l’homme régulièrement ratifiés par le Burundi font partie intégrante de la Constitution. La soumission à la torture, aux peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est absolument proscrite.

13.En matière législative et juridique, le Gouvernement du Burundi a mis en place, depuis 2013, plusieurs textes visant à renforcer la promotion, la protection et la défense des droits de l’homme dans le cadre de lutte contre la torture. Il s’agit, entre autres, de :

•La loi no 1/28 du 5 décembre 2013 portant réglementation des manifestations sur la voie publique et réunions publiques ;

•La loi no 1/33 du 28 novembre 2014 portant révision de la loi no 1/12 du 20 avril 2010 portant organisation de l’Administration Communale (Entité Communale) ;

•Une procédure d’assistance judiciaire et d’indemnisation des victimes des actes de torture est instituée ;

•La loi no 1/18 du 15 mai 2014 portant création, mandat, composition, organisation et fonctionnement de la Commission Vérité et Réconciliation ;

•La loi no 1/56 du 4 juin 2014 portant code électoral ;

•La loi no 1/26 du 15 septembre 2014 portant création, organisation, composition, fonctionnement et compétence de la Cour Spéciale des Terres et Autres Biens ;

•La loi no 1/22 du 25 juillet 2014 portant réglementation de l’action récursoire et directe de l’Etat et des communes contre leurs mandataires et leurs préposés ;

•La loi no 1/28 du 29 octobre 2014 portant prévention et répression de la traite des personnes et protection des victimes de la traite ;

•La loi no 1/04 du 27 juin 2016 portant protection des victimes, des témoins et d’autres personnes en situation de risque ;

•La loi no 1/13 du 22 septembre 2016 portant prévention, protection des victimes et répression des violences basées sur le genre ;

•La loi no 1/02 du 27 janvier 2017 portant cadre organique des associations sans but lucratif ;

•La loi no 1/25 du 23 décembre 2017 portant Missions, Composition et Fonctionnement de l’Observatoire National pour la Prévention et l’Eradication du Génocide, des crimes de Guerre et Autres Crimes contre l’Humanité ;

•La loi no 1/27 du 29 décembre 2017 portant révision du Code pénal. Depuis 2009, la torture est incriminée. Le Code pénal révisé de 2017 prévoit des peines y relatives plus lourdes ;

•La loi no 1/09 du 11 mai 2018 portant révision du Code de procédure pénale ;

•La loi no 1/03 du 10 janvier 2018 portant promotion et protection des droits des personnes handicapées ;

•La loi no 1/19 du 14 septembre 2018 portant modification de la loi no 1/15 du 9 mai 2015 régissant la presse au Burundi.

14.Sur le plan institutionnel, quelques avancées significatives ont été enregistrées. Un cadre institutionnel favorable au respect des droits de l’homme a été renforcé depuis 2013. Il y a lieu de relever notamment :

•La mise en place de la Commission Vérité et Réconciliation par la loi no 1/18 du 15 mai 2014 ;

•La Commission Nationale de Dialogue inter-Burundais (CNDI) mise en place par le Décret no 100/34 du 23 septembre 2015 portant création, mandat, composition, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale de Dialogue Inter-burundais ;

•La création de l’Inspection Générale au Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre ;

•La mise en place de l’Observatoire National pour la Prévention et l’Eradication du Génocide, des Crimes de Guerre et Autres Crimes contre l’Humanité par la loi no 1/25 du 23 décembre 2017 ;

•La mise en place du Conseil National pour l’Unité Nationale et la Réconciliation par le Décret no 100/0258 du 29 décembre 2017 portant nomination des membres du Conseil National pour l’Unité Nationale et la Réconciliation.

C.Etat de ratification des instruments juridiques internationaux par le Burundi et soumission des rapports

1.Cycle des rapports sur les conventions africaines

Instruments

Date de signature

Date de r atification

Rapports s oumis

Acte constitutif de l’Union Africaine, Lomé Togo, 11 juillet 2000

10/07/2000

28/02/2001

-

Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique, Addis-Abeba, 6-10 septembre 1969

10/9/1969

31/10/1975

-

Charte Culturelle de l’Afrique, Port Louis, Maurice, 5 juillet 1977

---

02/03/1990

-

Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, Nairobi, Kenya, 1981

28/06/1989

28/07/1989

2000

2011

Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant

21/05/2004

28/06/2004

2018

Protocole relatif à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples portant création d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, Ouagadougou, Burkina Faso, 10 juin 1998

09/06/1998

02/04/2003

-

Convention de l’OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, Alger, Algérie, 1er juillet 1999

14/07/1999

04/11/2003

Protocole au Traité instituant la Communauté Economique Africaine, relatif au Parlement Panafricain, Sirte, Libye, 2 mars 1969

29/11/2002

04/11/2003

Protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine, Durban, Afrique du Sud, juillet 2002

09/07/2002

04/11/2003

Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux Droits des Femmes, Maputo, 10-12 juillet 2003

03/12/2003

---

Protocole de la Cour de justice de l’Union Africaine, Maputo, 10-12 juillet 2003

03/12/2003

---

Protocole sur les amendements à l’Acte constitutif de l’Union Africaine, Maputo, 10-12 juillet 2003

02/12/2003

12/12/2006

Convention de l’Union Africaine sur la Prévention et la Lutte contre la Corruption, Maputo, 10-12 juillet 2003

03/12/2003

18/01/2005

Protocole à la Convention de l’OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, Addis-Abeba, 8 juillet 2004

14/07/1999

04/11/2003

Charte Africaine de la démocratie, les élections et la gouvernance, Addis-Abeba, 30 janvier 2007

20/06/2007

---

Charte de la reconnaissance culturelle africaine, Khartoum, 24 janvier 2006

---

02/03/1990

Protocole portant Statut de la Cour Africaine de justice et des droits de l’homme adopté par la onzième session ordinaire de la conférence tenue le 1er juillet 2008 à Sham EL-Sheik (Egypte)

03/12/2003

---

Convention de l’Union Africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala) adopté par le Sommet spécial de l’Union tenu à Kampala (Uganda) du 22 au 23 octobre 2009

23/10/2009

---

Traité portant création de la Communauté Est-Africaine

30/11/1999

18/06/2007

Pacte sur la paix, la sécurité, la stabilité et le développement dans la Région des Grands-Lacs (CIRGL)

15/12/2006

06/2008

2.Cycle des rapports aux organes des traités

Instruments

Date de signature

Date de ratification ou d’accession

Rapports soumis

Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

---

09/05/1990

--- 1993

2014

Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

_

_

_

Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

_

_

_

Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels

09/05/1990

2015

Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels

-

-

-- -

Convention internationale sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination Raciale

01/02/1967

27/10/1977

--- 1999

Convention sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination à l’égard des Femmes

17/06/1980

08/01/1992

2001

2005

2016

Protocole facultatif à la Convention sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination à l’égard des Femmes

-

-

-

Convention relative aux Droits de l’Enfant

08/05/1990

19/10/1990

2000

2008

Protocole facultatif à la Convention relative aux Droits de l’Enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

13/11/2001

24/06/2008

_

Protocole facultatif à la Convention relative aux Droits de l’Enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

_

06/11/2007

_

Convention contre la Torture et Autres Peines ou Traitements Cruels, Inhumains ou Dégradants

18/02/1993

2006

2013

Protocole facultatif à la Convention contre la Torture et Autres Peines ou Traitements Cruels, Inhumains ou Dégradants

2013

---

Convention pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide

-

06/01/1997

-

Convention contre la Criminalité Transnationale Organisée

14/12/2000

24/05/2012

_

Convention relative au Statut des Réfugiés

-

19/07/1963

-

Protocole relatif au Statut des Réfugiés

-

15/03/1971

-

Convention sur l’âge minimum d’admission à l’emploi et au travail, 1973 (no 138) de l’OIT

-

19/07/2000

-

Convention sur les pires formes de travail des enfants, 1999 (no 182) de l’OIT

-

11/06/2002

-

Convention relative aux Droits des Personnes Handicapées

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2014

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Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux Droits des Personnes Handicapées

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2014

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Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité

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Convention Internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

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Convention (de l’UNESCO) sur la promotion et la protection de la diversité des expressions culturelles

14/01/2009

14/01/2009

Convention relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 (no 169) de l’OIT

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Convention relative au statut des apatrides

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Convention sur la réduction des cas d’apatridie

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3.Etat de diffusion de la Convention contre la torture et la méthodologie d’élaboration du rapport

15.Par la ratification de la Convention contre la Torture, le Burundi a pris l’engagement de veiller à l’interdiction de la torture notamment par son introduction dans les modules ou programmes de formation dispensés en faveur des agents étatiques (policiers, militaires, magistrats, médecins, …) qui ont un rôle à jouer lors de la procédure liée à l’enquête. Le pays s’est également engagé à incorporer les lois et règlements interdisant la torture dans sa législation.

16.La Constitution reconnaît la dignité inhérente à la personne humaine et proscrit la soumission de tout être humain à la torture, à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

17.Le Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre organise chaque année des séminaires de diffusion du prescrit de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du protocole s’y rapportant.

18.Au niveau de la Police Nationale du Burundi, il existe un service chargé de la formation des policiers notamment en droits de l’homme et l’usage légal de la force.

19.Le Centre de Promotion des Droits de la Personne Humaine et de Prévention du Génocide.

II.Etat de la mise en application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants

Article 1 : De la définition de la torture

20.Le Code pénal burundais de 2009 et repris en 2017 reprend intégralement la définition de la torture telle qu’énoncée par la Convention contre la torture : « Est considéré comme torture tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aigues, physiques ou mentales sont intentionnellement infligées à une personne aux finsnotamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux , de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis , de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit ,lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent public ou tout autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture ».

Article 2 : Des mesures législatives, administratives et judiciaires

21.Le Code de procédure pénale, en ses articles 289 et 290, prescrit la création d’un fonds d’indemnisation des victimes de la torture. Les auteurs étant des agents de l’Etat, celui-ci doit indemniser les victimes, quitte à se retourner contre eux par une action récursoire.

22.L’article 64 al 5 du Code de procédure pénale porte sur la protection des victimes des atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité physique de toute personne, en l’occurrence les mauvais traitements et les actes de torture. La loi autorise toute association agréée à se joindre à la victime des faits ou porter plainte en lieu et place de cette dernière.

23.En outre, le Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre, à travers la Direction Générale des Droits de la Personne Humaine, de l’Education à la Paix et à la Réconciliation Nationale, a multiplié des visites des lieux de détention de toutes les provinces du pays en vue de constater les irrégularités qui sont à l’origine des violations des droits de l’homme. Ainsi, de 2017 à 2018, 145 lieux de détention dont 9 prisons et 136 cachots ont été visités. 

Article 3 : De l’expulsion, du refoulement et de l’extradition

24.Les dispositions juridiques relatives à l’expulsion, au refoulement et à l’extradition sont prévues dans la législation burundaise. Il convient de signaler d’emblée que le Gouvernement du Burundi n’a pas une loi spécifique régissant l’extradition. En effet, l’extradition n’est autorisée que dans les limites prévues par la loi, et aucun Burundaisne peut être extradé.

25.Tout délit ou crime commis hors du territoire national par un Burundais ou un étranger est, sous réserve des conventions sur l’extradition, puni par la loi pénale du Burundi si l’auteur se trouve au Burundi ou si la victime a la nationalité burundaise et que le fait est puni par la législation du pays où l’infraction a été commise.

26.En outre, le Burundi a signé au niveau de la coopération bilatérale et multilatérale deux conventions d’extradition, l’une avec la Tanzanie signée le 27 avril 1988, l’autre avec les pays de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL).

27.Dans cette convention signée avec la Tanzanie, il est prévu en matière pénale, que les pays s’engagent à accorder l’extradition de toute personne accusée ou condamnée comme auteur principal ou comme complice d’un des trente délits mentionnés dans l’accord, y compris la torture. La demande de l’extradition est faite par le Ministère des Affaires Etrangères de l’Etat requérant.

28.Concernant le refoulement et l’expulsion, la loi no 1/03 du 4 février 2008 telle que revue par la loi no 1/32 du 13 novembre 2008 sur l’asile et la protection des réfugiés au Burundi et l’ordonnance no 530/443 du 4 avril 2009 d’application de cette dernière répond aux préoccupations des demandeurs d’asile y compris les apatrides.Notons à toutes fins utiles qu’une loi sur les apatrides a été adoptée par le Parlement en 2018.

29.Les articles 19, 78, et 79 de la loi sur les demandeurs d’asile interdisent le refoulement et l’expulsion d’un demandeur d’asile sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques.

Article 4 : De l’incrimination des actes de torture

30.La Constitution de la République du Burundi du 7 juin 2018 en son article 21 dispose que : « La dignité humaine est respectée et protégée. Toute atteinte à la dignité humaine est réprimée par le Code pénal ».

31.Ce dernier prévoit des sanctions contre les actes de torture en ses articles 207, 208 et 209. En effet, quiconque soumet une personne à la torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants est puni de la servitude pénale de dix ans et à une amende de cent mille à un million de francs burundais. L’infraction est punie de la servitude pénale de vingt ans lorsqu’elle est commise :

a)Sur un mineur de moins de dix-huit ans ;

b)Sur une personne vulnérable en raison de son âge, de son état de santé, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse ;

c)Sur un témoin, une victime ou partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

d)Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complices ;

e)Avec usage ou menace d’une arme.

32.Le coupable est puni de vingt ans de servitude pénale lorsque la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ont entrainé une mutilation ou une infirmité permanente ou lorsqu’elle est accompagnée d’agression sexuelle. Il est puni de la servitude pénale à perpétuité lorsqu’elle a entrainé la mort de la victime.

33.À titre illustratif, les dossiers en rapport avec la torture en cours devant les instances judiciaires sont : le RMP 152724, RMP 155353, RMP 155357, RMP 155358 et RMP 155366.

Article 5 : De la compétence territoriale

34.Les articles 8 et 9 du Code de procédure pénale précisent l’étendue de la compétence territoriale sous réserve des conventions internationales sur les immunités diplomatiques et consulaires.

35.De même, l’article 10 du Code pénal du Burundi dispose que « Tout délit ou crime commis hors du territoire national par un burundais ou étranger est, sous réserve des conventions sur l’extradition, puni par la loi pénale du Burundi, si l’auteur se trouve au Burundi ou la victime a la nationalité burundaise et que le fait est puni par la législation du pays où l’infraction a été commise ».

Article 6 : De l’arrestation et détention des personnes inculpées des actes de torture

36.Le Burundi a déjà enregistré des avancées significatives en intégrant dans sa législation des dispositions pertinentes de la Convention contre la torture.

37.Aussi, la Constitution de la République du Burundi du 7 juin 2018 prévoit en son article 39, alinéas 1 et 2, que « Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est conformément à la loi. Nul ne peut être inculpé, arrêté, détenu ou jugé que dans les cas déterminés par la loi promulguée antérieurement aux faits qui lui sont reprochés. »

38.En outre, l’article 40 de la même Constitution dispose que : « Toute personne accusée d’un acte délictueux est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public durant lequel toutes les garanties nécessaires à sa libre défense lui auront été assurées. ».

39.L’article 154 du Code de procédure pénale de 2018 dispose en son alinéa 1er que « La liberté étant la règle et la détention l’exception, l’inculpé ne peut être mis en détention préventive que s’il existe contre lui des indices suffisants de culpabilité et que si les faits qui lui sont reprochés paraissent constituer une infraction que la loi réprime d’une peine d’au moins une année de servitude pénale. ».

40.La loi no 1/09 du 11 mai 2018 portant révision du Code de procédure pénale prévoit les délais d’enquête et de garde à vue tel que stipulé àl’article 34.

Article 7 : Du jugement ou extradition des personnes soupçonnées d’avoir commis des actes de torture 

41.Pour ce qui est du jugement, il n’y a pas de traitement particulier. Les auteurs des actes de torture sont poursuivis et jugés conformément aux règles de procédures de droit commun. En effet, toute personne accusée de crime de torture est jugée selon les dispositions 8, 9 et 10 du Code pénal en vigueur sous réserves de conventions sur l’extradition que le Burundi a signées avec d’autres pays.

Article 8 : De l’incrimination des actes de torture dans les traités d’extradition

42.La recommandation suivante a été dégagée au niveau de l’article 8 de la Convention.

43.L’Etat partie devrait prendre des mesures législatives et administratives pour que la présente convention puisse être invoquée comme constituant une base juridique de l’extradition, en ce qui concerne les infractions visées à l’article 4 de la convention, lorsqu’il est saisi d’une demande d’extradition émanant d’un autre Etat partie avec lequel il n’est pas lié par un traité d’extradition, tout en respectant les dispositions de l’article 3 de la convention.

44.Il existe deux conventions d’extradition : l’une avec la Tanzanie et l’autre avec les Pays de la communauté Economique des pays des grands lacs (CEPGL) composée du Rwanda, de la RDC et du Burundi.

45.Le Code pénal de 2017, en son article 10, étaye le contenu de la Convention sur l’extradition en matière de torture.

46.En ce qui concerne la pratique, les investigations menées jusque-là ne font état d’aucun cas d’extradition déjà opéré par rapport à l’infraction de torture si on s’en tient à la définition de ce concept.

Article 9 : Entraide judiciaire entre Etats parties

47.Le Burundi subordonne l’extradition à l’existence d’un traité d’extradition avec celui qui en fait la demande. Il lui est recommandé de prendre des mesures législatives et administratives pour que la Convention puisse être invoquée comme constituant une base juridique d’extradition.

Article 10 : Enseignement et information concernant l’interdiction de la torture

48.Le Gouvernement du Burundi à travers le Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre organise régulièrement des sessions de formation ou ateliers de sensibilisation et d’information de lutte contre la torture à l’endroit des magistrats, des officiers de police judiciaire et autres dans le but d’éradiquer ce crime contre l’humanité. Des ateliers de sensibilisation ont été organisés à l’endroit des Magistrats et des Corps de police, sur les droits de la personne humaine dans le cadre du monitoring des droits de l’homme en 2017.Dans cette même optique, des ateliers de vulgarisation de la Politique Nationale des Droits de l’Homme (PNDH) ont été organisés à l’intention des Jeunes affiliés ou non aux partis politiques, aux juges et greffiers des Tribunaux de Résidence, en 2017.Le Centre de Promotion des Droits de la Personne Humaine et de Prévention du Génocide dispense des formations au profit des conseils collinaires et des chefs de zone sur la promotion et la protection des droits de l’homme en général et sur la Convention contre la torture et la répression des actes de torture et de mauvais traitements en particulier. La même formation est dispensée à l’endroit des encadreurs des clubs des droits de l’homme en milieu scolaire.

49.En plus de ces initiatives ci-dessus, d’autres acteurs étatiques et non étatiques contribuent à vulgariser largement les principes relatifs à l’interdiction des actes de torture.

Article 11 : Mesures de contrôle des interrogatoires, des détentions et des emprisonnements

50.Le Code de procédure pénale de 2018 a pris toutes les mesures qui s’imposent, afin d’éviter l’arbitraire et partant la torture sous toutes ses formes et à toutesles étapes de la procédure. Ces mesures apportent d’ailleurs une réponse aux préoccupations du Comité contre la Torture.

De la garde à vue et de l’interrogatoire

51.Lors de la garde à vue, l’Officier de Police Judiciaire doit absolument dresser un procès-verbal de garde à vue avec comme mention, l’identification de la personne gardée à vue, la nature et les motifs de la garde à vue et les conditions dans lesquelles la personne est gardée à vue (si elle a été torturée ou pas), ainsi que le lieu où s’est effectuée la garde à vue. Dans ce cas, le procès-verbal est non seulement signé par la personne retenue, mais aussi une copie est laissée à cette personne.

52.Notons également qu’une femme enceinte de plus de six mois ou qui allaite un nourrisson de moins de six mois ne peut pas être mis en garde à vue, sauf pour les cas des crimes et sur autorisation du Procureur de la République (article 32, 3). La raison de la garde à vue dans ce cas de crime est d’éviter qu’elle ne puisse prendre le large ou s’échapper avant que son dossier ne soit confectionné. De même, le Code de procédure pénale prescrit que la garde à vue doit être organisée de telle sorte que les personnes de sexe féminin et celles de sexe masculin soient détenues dans des lieux différents et que la surveillance des uns et des autres soit assurée par des policiers de même sexe (article 32, 4).

53.Il importe néanmoins de souligner que le Code de procédure pénale a introduit une restriction à la liberté de communiquer en cas de garde à vue de peur d’éviter des communications pouvant faire disparaître ou effacer les indices ou pièces à conviction de l’infraction commise. Cependant, le même Code de procédure pénale indique que l’Officier de la Police Judiciaire responsable de la garde à vue (GAV) doit ipso facto informer la famille de la personne gardée à vue ou toute autre personne intéressée de la mesure dont elle est l’objet et du lieu de garde à vue.

54.Concernant les délais de garde à vue, ceux-là ne peuvent pas excéder sept jours francs, sauf dérogation décidée par l’Officier du Ministère Public ayant comme limite maximale le double de ce délai (article 34). Cette dérogation est justifiée par le fait que lors du transfert des détenus et leurs dossiers aux parquets de leurs ressorts, les Officiers de Police Judiciaire étant dans des Commissariats Communaux éloignés des chefs-lieux des communes éprouvent des difficultés de trouver des moyens de déplacement. Ils sont, des fois, obligésd’utiliser le déplacement de l’Administrateur communal, du commissariat provincial de son ressort ou du parquet lui-même. N’empêche que les ONG puissent aider les OPJ au transfert des détenus vers le parquet, dans le cadre de la coopération.

De la surveillance des lieux de détention

55.Le seul mécanisme de surveillance des lieux de détention existant au Burundi est purement judiciaire. En effet, les Magistrats du Ministère Public sont chargés d’inspecter régulièrement les lieux de détention à la police et dans les établissements pénitentiaires. Il n’existe pas non plus de médecins légistes formés à l’identification des séquelles de la torture ; les Officiers de Police Judiciaire et les Officiers du Ministère Public font recours aux médecins généralistes du Gouvernement pour pouvoir apprécier les séquelles de la torture.

56.Les organisations de défense des droits de l’homme affirment qu’elles effectuent des visites régulières dans les lieux de détention. C’est l’exemple du Comité International de la Croix Rouge.

57.Pour ce qui est de l’interrogatoire, avant de procéder à cette dernière, la personne interrogée est informée de ses droits, notamment le droit de garder le silence en l’absence de son Conseil (article 10, alinéa 5).

58.Afin d’éviter la torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Code de procédure pénale mentionne que tout interrogatoire doit faire objet d’un procès-verbal dûment signé par l’Officier de la Police Judiciaire verbalisant sous forme de serment, de même que la personne entendue.

59.Par ailleurs, ils doivent conjointement parapher chaque page pour éviter des glissements de papiers ou de mots dans le dossier constitué. Avant qu’il ne puisse signer ce PV ou apposer son empreinte digitale, la personne entendue doit d’abord lire et relire le PV et s’il ne sait pas lire, lecture lui est donnée par une personne de son choix. Il reste en droit de refuser de signer si l’interrogatoire n’a pas été bien diligenté ou si mention n’est pas conforme à ses déclarations.

60.Cela est également valable pour l’Officier du Ministère Public qui fait comparaître un inculpé afin qu’il fournisse des explications sur les faits qui lui sont reprochés. L’article 111 prescrit que sous peine de nullité, l’inculpé doit être informé de ses droits dans les mêmes conditions que lors de l’interrogatoire de l’OPJ.

61.Il en est de même de l’article 137sur les objets saisis où il doit y avoir un PV de saisie qui doit être signé par le détenteur, les autorités administratives locales et ou les témoins.

62.La saisie, s’il y a lieu, doit se faire en présence du suspect, s’il est présent,à l’effet de les reconnaître et, s’il y a lieu,de les parapher ou de les marquer. S’il est absent et ne peut pas être trouvé, mention en est faite sur le procès-verbal. En plus de cela, le CPP mentionne que sous peine de nullité de l’interrogatoire, l’inculpé a le droit de ne pas être forcé à témoigner contre lui-même ou de s’avouer coupable.

63.Le Code reconnait à l’auteur présumé de l’infraction, certaines garanties pour pouvoir exercer son droit à la défense, notamment le droit de se faire assister de son Conseil au cours des actes d’instruction et de garder le silence en l’absence de son Conseil.

64.Il en est de même lors de l’audience publique où chacune des parties peut se faire assister d’un avocat ou d’une personne agréée spécialement dans chaque cas par le tribunal pour prendre la parole en son nom. Sauf si le prévenu s’y oppose, le juge peut demander au Bâtonnier de lui désigner un avocat inscrit au Barreau.

65.Toutefois, l’assistance d’un défenseur est obligatoire pour les prévenus mineurs (article 222).

66.Afin de pouvoir contrecarrer le problème d’exiguïté et de manque des prisons pour la détention des présumés coupables, le Gouvernement a recommandé, à travers le CPP en son article 154, que « l’inculpé ne peut être mis en état de détention préventive que s’il existe contre lui des indices suffisants de culpabilité et que les faits lui reprochés paraissent constituer une infraction que la loi réprime d’une peine d’au moins une année de servitude pénale ».

67.Il est également précisé à l’article 159 que « l’ordonnance autorisant la mise en état de détention préventive est valable pour 30 jours, y compris le jour où elle est rendue. À l’expiration de ce délai, la détention préventive peut être prorogée par décision motivée pour un mois et ainsi de suite, de mois en mois, aussi longtemps que l’intérêt public l’exige. Toutefois, la détention préventive ne peut dépasser douze mois, si le fait parait ne constituer qu’une infraction à l’égard de laquelle la peine prévue par la loi n’est pas supérieure à 5 ans de servitude pénale. À l’expiration de ce délai (12 mois), l’autorité hiérarchique du Magistrat qui a le dossier en charge ordonne la liberté provisoire à la diligence soit de l’intéressé, soit du responsable de l’établissement pénitentiaire. Lorsquesans excuses valables, le Magistrat instructeur omet de présenter un inculpé devant le juge de la détention préventive, il s’expose à des sanctions disciplinaires et éventuellement pénales. Les ordonnances de prorogation sont rendues en observant les formes et les délais prévus à l’article 156 et 158. ».

68.Il importe de signaler que le Président de la République accorde une grâce présidentielle aux personnes déjà condamnées ce qui contribue au désengorgement des prisons.

69.Concernant les mesures prises en faveur des personnes détenues, depuis de nombreuses années, le Burundi a déjà mis en place, à travers le Ministère de la Justice et de la Protection Civique, une commission permanente chargée du suivi des dossiers pénitentiaires et judiciaires des détenus par l’ordonnance no 550/2083 du 11 novembre 2016 du Ministre en charge de la justice dans ses attributions.

70.Signalons à toutes fins utiles qu’en 2016, à travers la mesure de Grâce, 1 357 condamnés détenus ont vu leurs peines remises totalement et sortis des prisons tandis que 498 ont bénéficié de la remise partielle de leurs peines et 12 ont vu leurs peines commuées (c’est-à-dire qu’ils étaient condamnés à perpétuité mais que leur peine a été réduite jusqu’à 20 ans de prison).

71.En ce qui est de l’année 2017, on a enregistré 2 576 condamnés détenus qui ont bénéficié de la remise totale des peines, 576 qui ont bénéficié de la remise partielle des peines tandis que 16 ont vu leurs peines commuées et 123 qui ont joui de la libération conditionnelle.

72.Pour l’année 2018, on enregistre 1 365 détenus bénéficiaires de la libération partielle et de la commutation et 2 979 bénéficiaires de la remise totale.

73.Il faut signaler d’autres mesures qui sont prises par les Juridictions et Parquets chaque fois qu’ils constatent une détention prolongée.

74.Dans les provinces où les postes de police sont nouvellement construits avec l’appui financier du BNUB, les conditions de détention sont bonnes ainsi que les conditions de travail des agents policiers (cas des Provinces Rutana et Makamba).

De la violence sexuelle généralisée contre les femmes et les enfants dans les lieux de détention

75.Les responsables de la prison ont mis en place un système de traitement de dossiers en rapport avec les éventuelles violences sexuelles basées sur le genre : les délégués des prisonniers reçoivent les plaintes des victimes, écoutent les auteurs et en font rapport aux responsables de la prison. Ces derniers prennent à leur tour la décision de mettre les auteurs au cachot. Cela est renforcé par les acteurs étatiques et non étatiques intervenant en matière des droits de l’homme à travers l’organisation régulière des visites dans les lieux de détention par les ONGs et les institutions des droits de l’homme.

Article 12 : De l’enquête au sujet de la commission d’un acte de torture

76.Le Code de procédure pénale de 2018 est plus sévère pour ce qui est des cas de torture. L’article 349 du même code prescrit qu’« En cas de torture par un préposé de l’Etat dans l’exercice de ses fonctions dûment constaté, et si la victime s’est régulièrement constituée partie civile, la réparation intégrale du préjudice est supportée par l’Etat ».

77.L’Etat peut exercer une action récursoire contre l’agent tortionnaire, ses coauteurs et ses complices en cas d’indemnisation de la victime de la torture.

78.En cas de la commission d’un acte de torture, le Code de procédure pénale prévoit des enquêtes promptes, impartiales et exhaustives. Malheureusement, il n’existe pas de médecins légistes formés à l’identification des séquelles de la torture. En cas de plainte contre la torture, les Officiers de Police Judiciaire et les Officiers du Ministère Public font recours aux médecins généralistes pour pouvoir apprécier les séquelles de la torture.

79.Une fois l’infraction de torture établie, le Code pénal qui l’a érigée en infraction réprime sévèrement quiconque soumet une personne à des tortures ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants à une peine de servitude pénale de 10 ans à 15 ans et à une amende de cent mille à un million de francs burundais.

80.Cependant, cette peine peut passer de 15 ans à 20 ans si la torture a été exercée contre un mineur de moins de 18 ans, sur une personne vulnérable en raison de son âge, de son état de santé, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, sur un témoin, une victime ou une partie civile soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation de sa plainte ou de sa déposition, mais aussi avec usage ou menace d’une arme.

81.La peine de 20 ans est également prononcée lorsque la torture a entrainé une mutilation ou une infirmité permanente ou lorsqu’elle est accompagnée d’agression sexuelle.

82.La servitude pénale à perpétuité est prononcée lorsque la torture a entrainé la mort de la victime. Le Code pénal de 2017 renforce ces sanctions pénales en précisant qu’aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

83.Les agents de l’Etat ne peuvent non plus invoquer l’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique pour justifier la torture.

84.Il importe de préciser que ces peines sont incompressibles. Par ailleurs, d’autres sanctions complémentaires ont été prévues par le Code pénal pour décourager ces actes de barbarie.

85.En plus de ces actes de torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants, d’autres infractions ou actes de violences ont été prévus dans ce code, notamment l’homicide volontaire.

86.Le Code pénal prévoit également des sanctions très sévères pour le cas d’homicide volontaire, allant jusqu’à la peine d’une servitude pénale à perpétuité, quels que soient le mobile, les conditions et les moyens de la commission de l’infraction.

87.L’article 220 de ce code mentionne qu’elles sont incompressibles et que le juge, en même temps qu’il condamne à une peine principale, prononce une mesure de suivi socio-judiciaire sans préjudice des autres sanctions complémentaires prévues par ce même code.

88.D’autres infractions ou actes de violences pouvant être liés aux actes de torture et prévus par ce code sont notamment : les lésions corporelles volontaires, les voies de fait, l’enlèvement, le viol, les infractions contre l’ordre des familles particulièrement l’avortement et les infractions contre l’enfant.

89.Spécialement pour ce qui est des infractions contre l’enfant, le Code pénal punit de 10 ans de servitude pénale quiconque expose ou délaisse un enfant et que cela a entrainé une mutilation ou une infirmité et à 20 ans si cette exposition ou ce délaissement a été suivi de mort.

90.L’enlèvement d’unenfant exécuté dans le but de se faire une rançon est également puni de 10 à 20 ans de servitude pénale et si cet enlèvement a été suivi de mort de l’enfant. Dans ce cas, les coupables sont punis de servitude pénale à perpétuité.

91.Le Code a également prévu des sanctions pénales contre d’autres faits répréhensifs contre l’enfant comme le fait d’obtenir frauduleusement une adoption de l’enfant, le fait d’inciter directement un enfant à commettre un acte illicite ou susceptible de compromettre sa santé, sa moralité ou son développement, le fait d’utiliser, recruter ou offrir un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel ou de spectacles pornographiques, le fait de se rendre coupable d’un acte ou d’une transaction portant sur le transfert d’un enfant à quelqu’un contre une rémunération ou tout autre avantage, ainsi que le fait d’utiliser un enfant à des activités sexuelles contre une rémunération ou toute autre forme d’avantage.

92.Concernant les infractions contre l’ordre des familles, le Code pénal insiste particulièrement sur l’avortement, en précisant que celui qui, par aliments, breuvage, médicaments, a, à dessein, fait avorter une femme, en dehors des cas prévus par la loi, est puni d’une servitude pénale d’un an à deux ans et d’une amende de 20 000 FBU à 50 000 FBU. Il punit de 5 à 10 ans et d’une amende de 50 000 FBU à 100 000 FBU quiconque aurait exercé des violences contre une femme enceinte avec préméditation et avec connaissance de l’état de la victime. Et si cela a provoqué la mort de la femme, la peine est portée à 20 ans de servitude pénale.

93.Il en est de même des violences domestiques (article 558). Le Code pénal punit d’une Servitude Pénale (SP) de 3 à 5 ans et d’une amende de 50 000 FBU quiconque soumet son conjoint, son enfant ou toute autre personne habitant le même toit à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.

94.Le Burundi informe le Comité que les dispositions du Code pénal relatives aux violences conjugales sont toutes appliquées et que la loi spécifique portant prévention et répression des violences basées sur le genre a été promulguée en2016 (voir la loi no 1/013 du 22 septembre 2016 portant prévention, protection des victimes et répression des violences basées sur le genre).

95.La mise en application de cette loi permet de protéger les femmes contre toutes représailles et toute réprobation sociale, de garantir que les cas de violence conjugale fassent l’objet d’une enquête approfondie et que les auteurs soient traduits en justice à travers la mises en place des Chambres spécialisées au sein des Cours et Tribunaux, la mise en place d’une unité de police des mineurs et de protection des mœurs, l’implantation des comités de lutte contre les VSBGs à tous les niveaux (niveau provincial, communal et collinaire). Afin de faire en sorte que les responsables de l’application des lois reçoivent une formation suffisante pour pouvoir prendre en charge les cas de violence conjugale, des formations ont été organisées à l’intention des Magistrats des chambres spécialisées et des unités de police des mineurs et protection des mœurs par des acteurs étatiques et non étatiques.

96.En outre, le Burundi poursuit ses efforts en matière de lutte contre les VSBG, y compris les violences conjugales. En effet, il est à noter la mise en place d’une cellule d’aide légale au Ministère de la Justice et de la Protection Civique dotéed’un budget d’assistance judicaire destiné à payer les honoraires d’avocats pour les vulnérables. Signalons que les Centres de Développement Familial et Communautaire (CDFC), services déconcentrés du Ministère en charge des droits de l’homme et du genre sont fortement impliqués dans la vulgarisation de la loi spécifique sur les VSBG et dans l’écoute, l’orientation et l’accompagnement des victimes des VSBG.

97.En vue d’accroitre l’assistance aux victimes non seulement des violences conjugales, mais aussi de celles des VSBG, de nouveaux centres de prise en charge intégrée ont été mis en place dans les Provinces de MAKAMBA, MUYINGA, CIBITOKE, en 2017, en plus des Centres HUMURA (étatique), SERUKA et NTURENGAHO (privés). Au sein de chacun de ces centres, il est organisé un service d’accompagnement juridique et judiciaire aux victimes.

98.Enfin, dans les activités menées par ces centres, les campagnes de sensibilisation de la population sur les effets néfastes de la violence faite aux femmes constituent un des axes prioritaires de leurs interventions.

99.Toutes ces mesures ont eu comme effet la régularisation des unions libres comme le montre le tableau ci-dessous.

Tableau sur la régularisation des ménages en unions libres dans le cadre de l’application de la loi spécifique portant Prévention et Protection des victimes sur les répressions des VSBG

N° d’ordre

Provinces

MUL

Régularisés au 30 octobre 2018

Reste

1

Bubanza

12 048

11 746

302

2

Bujumbura

13 254

12 952

302

3

Bururi

4 473

4 179

294

4

Cankuzo

9 506

9 185

321

5

Cibitoke

26 140

26 078

62

6

Gitega

13 563

13 538

25

7

Karusi

9 892

7 978

1 914

8

Kirundo

Non disponibles

-

-

9

Kayanza

7 607

7 565

42

10

Makamba

25 314

15 560

9 754

11

Muramvya

3 442

2 878

564

12

Muyinga

20 348

19 497

851

13

Mwaro

1 962

1 913

49

14

Ngozi

49 125

46 305

2 820

15

Rumonge

7 456

Données non disponibles

7 456

16

Rutana

7 638

5 323

2 315

17

Ruyigi

7 706

5 918

1 788

18

Mairie Bujumbura

19 098

Données non disponibles

19 098

Total

234 629

190 615

47 957

Source  : Données recueillies au Ministère de l’Intérieur, de la Formation Patriotique et du Développement Local, octobre 2018.

100.Enfin pour ce qui est du viol (article 577-585), cet acte barbare est sanctionné de 15 à 25 ans de servitude pénale et d’une amende de 50 000 FBU à 200 000 FBU, particulièrement lorsqu’il est commis sur un enfant mineur de 15 à 18 ans, sur une personne vulnérable en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou mentale ou d’un état de grossesse apparente ou connue de l’auteur, mais aussi commis par un éducateur, un ministre de culte, un médecin, chirurgien, accoucheur ou autre personnel médical envers les personnes confiées à leurs soins, etc.

101.Lorsque l’auteur a commis le viol avec usage ou menace d’une arme, ou sur un enfant de 12 à 15 ans ou lorsque le viol a été commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice, ou encore lorsqu’il a causé à la victime une altération grave de sa santé et/ou laissé des séquelles physiques graves notamment une mutilation, une infirmité permanente ou la transmission d’une maladie, la peine est portée de 20 à 30 ans de servitude pénale.

102.Il faut noter cependant qu’il existe des défis liés à la répression de violences sexuelles. C’est notamment le problème d’administration des preuves, la lenteur des expertises médico-légales renseignant sur l’état de la victime bloquant ainsi l’instruction du dossier etc.

103.Dans le cadre de la lutte effective des violences sexuelles et celles basées sur le genre, des progrès énormes ont été enregistrés. Ainsi, du point de vue législatif et réglementaire, le Burundi a adopté (i) la loi no 1/13 du 22 septembre 2016 portant Prévention, Protection des victimes et répression des Violences Basées sur le Genre (VBG), (ii) l’élaboration du Plan d’Action National de la Résolution 1325 (2017-2021), (iii) le plan d’action nationale Genre 2017-2021, en vue de conscientiser tous les acteurs sur les impératifs de la prévention des effets des conflits sur les femmes et les filles, de protection des femmes et des filles des violences sexuelles et celles basées sur le genre et d’autres multiples conséquences néfastes.

104.En outre, il y a eu signature de l’Ordonnance Ministérielle no 550/1622 du 19 novembre 2013 portant Mission, Composition et Fonctionnement des Chambres Spéciales pour Mineurs et Victimes des Violences Sexuelles au Burundi par le Ministère de la Justice et de la Protection Civique et Gardes des Sceaux, particulièrement en ses articles 3 et 4. L’article 3 stipule que « la Chambre des Mineurs et victimes des violences sexuelles du Tribunal de Grande Instance comprend un Président et deux juges, assistés d’un Officier du Ministère Public et d’un Greffier ». L’article 4 quant à lui dispose que « la Cour d’Appel siégeant en Chambre des Mineurs et Victimes des violences sexuelles comprend un Président et deux Conseillers assistés d’un Officier du Ministère Public et d’un Greffier ».

105.La mise en place des cellules genre au niveau des Ministères clés dont celui de la Justice et Protection Civique et Gardes des Sceaux, la Sécurité Publique et Gestion des Catastrophes, la Défense Nationale et des Anciens Combattants, y compris le Ministère en charge les droits de l’homme.

106.La Décentralisation progressive de l’Unité de Police de la Protection des Mineurs et des Mœurs dans les différentes provinces du pays (dans 6 provinces sur les 18 dans un premier temps). 

107.Le renforcement des capacités des points focaux VBGs sur le guide de conduite en cas de VBGs et du Protocole de prise en charge des victimes des VBGs.

108.Les formations des Officiers de Police Judiciaire et tous les policiers en matière de lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genre, ainsi que l’intégration des modules de lutte contre ces violences dans les écoles et institut de Police, y compris la signature, par le MSPGC, d’un Protocole de la Police Nationale sur la Lutte contre les VBGs et la Prise en charge des Victimes des VBGs, au mois de juillet 2016.

109.De surcroit, plusieurs séances de sensibilisations, formations et informations sur la lutte contre ces violences ont été organisées à l’intention des leaders d’opinion, des agents de santé communautaire et autres prestataires de santé, des agents prestataires des CDFC (Centres de Développement Familial et Communautaire), des membres des associations, des élèves, des enseignants, des Magistrats, des prisonniers par le Burundi, en collaboration avec des agences du système des Nations Unies comme le PNUD, ONU FEMMES, OHCDH, Banque Mondiale, UNICEF, etc.

110.Le Burundi organise également des campagnes régulières de sensibilisation, des sessions spéciales pour le traitement avec célérité des dossiers judiciaires en rapport avec les VSBG. Ces organisations partenaires n’ont jusqu’ici rapporté de cas de viols utilisés comme moyen de répression des opposants politiques.

111.Dans le cadre du projet d’urgence relatif aux violences sexuelles et basées sur le genre et la santé des femmes dans la région de Grands Lacs, trois Centres intégrés de prise en charge des VBGs ont été créés au sein des hôpitaux de Cibitoke, Makamba et Muyinga. Ils sont opérationnels depuis le 20 février 2017.

112.Par ailleurs, les prestations des trois Centres de prise en charge médicale, juridique, psycho-sociale et réinsertion des victimes des Violences sexuelles et celles basées sur le genre dont les Centres de HUMURA, SERUKA et NTURENGAHO sont améliorés, dans le cadre du renforcement de la prévention, l’accès aux services de traitement et l’accompagnement des victimes.

113.Concernant la préoccupation du Comité sur l’absence d’informations sur les statistiques pouvant permettre de mesurer l’ampleur de la violence faite aux femmes, le Burundi s’est doté, au sein du Ministère de la Justice et de la Protection Civique, d’un logiciel permettant d’avoir une base de données renseignant sur les plaintes déposées, les enquêtes, les poursuites, les condamnations et les sanctions infligées aux responsables. Ce logiciel est installé dans tous les Tribunaux de Grande Instance du Burundi.

114.Enfin, sur les mille deux cent et un (1 201) cas de viol dont la Chambre Spéciale pour Mineurs et Victimes des Violences Sexuelles au Burundis’est saisi jusqu’au 1er semestre de l’année 2018, les dossiers ont été clôturés et les auteurs condamnés conformément au Code pénal burundais.

Article 13 : Du droit pour la victime de porter plainte

115.Le Code de procédure pénale de 2018 enjoint à l’Officier de Police Judiciaire de recevoir les dénonciations, les plaintes et rapports relatifs aux infractions qu’ils ont mission de rechercher.

116.Toujours dans le cadre des plaintes des victimes aux infractions pénales, il revient à l’Officier de Police Judiciaire de rechercher les auteurs de ces infractions, en réunir les indices à leur charge afin de les mettre à la disposition du Ministère Public.

117.Toutefois, lorsque l’Officier de Police Judiciaire, de même que l’Officier du Ministère Public constatent que la victime a porté plainte surtout pour des infractions contre la personne ou portant sur la moralité de la personne comme la torture, le traitement cruel, inhumain ou dégradant ou les violences sexuelles, ils ont le devoir de ne pas la confronter avec le présumé auteur, mais plutôt d’assurer sa protection.

118.Le Burundi a connu des avancées significatives et louables en mettant sur pied la loi no 1/04 du 27 juin 2016 portant Protection des victimes, des témoins et d’autres personnes en situation de risque. Cette loi vise ainsi la protection des personnes intervenant dans une procédure pénale (les enquêteurs, les Officiers du Ministère Public, les Juges, les Avocats ou tout autre agent impliqué dans les procédures en matière pénale) ou dans les commissions chargées de faire des enquêtes telle que la Commission Vérité et Réconciliation (CVR) et qui, de ce fait, sont en situation de risque.

119.Les mesures de protection ainsi prises, visent à préserver leur sécurité, le bien-être physique et psychologique, la dignité et le respect de la vie privée des victimes, des témoins et des autres personnes en situation de risque sérieux. Il s’agit ainsi des mesures à caractère juridictionnel comme l’autorisation d’une déposition anonyme et la non-divulgation de l’identité du témoin, de celle de la victime ou de celle de toute autre personne à risque, l’autorisation à la victime ou le témoin de dissimuler son visage ou déformer sa voix, les mettre à l’abri du public et du prévenu, tenir l’audience à huis clos, et autres.

120.Les mesures à caractère non juridictionnel concernent particulièrement des mesures prises par les autorités ou les commissions d’enquête, mais aussi les OPJ et les OMP telles que :

•Garantir la confidentialité de la déposition des victimes ou des témoins ;

•Informer les victimes et les témoins des mesures de protection dont ils peuvent bénéficier et des structures de prise en charge en cas de danger imminent ;

•Veiller à ce que toute intimidation présumée à l’égard d’une victime ou d’un témoin soit signalée et fasse l’objet d’une enquête ;

•Aider les témoins en situation de risque à comparaître en justice dans des conditions sûres, etc.

121.Il importe de signaler que la loi portant protection des victimes et témoins a prévu une unité de protection des victimes, des témoins et d’autres personnes en situation de risque, qui n’est pas encore mis en place malheureusement faute de moyens.

Article 14 : Du droit de la victime d’obtenir réparation

122.La Constitution de la République du Burundi de 2018 garantit le droit de la victime d’obtenir la réparation. En effet, l’Etat a l’obligation d’indemniser toute personne victime de traitement arbitraire de son fait ou du fait de ses organes ».

123.Le Code de procédure pénale de 2018, dans la 2ème section du chapitre XII sur l’exécution des jugements, a prévu une partie sur l’indemnisation des victimes de la torture. Ce qui est une innovation par rapport à l’ancien Code de procédure pénale du 3 avril 2013 qui ignorait la réparation des dommages causés par les auteurs de la torture.

124.À cet effet, en cas de torturepar un préposé de l’Etat dans l’exercice de ses fonctions, dûment constatée, et si la victime s’est régulièrement constituée partie civile, la réparation intégrale du préjudice est supportée par l’Etat.

125.Cependant, même si la victime est indemnisée par l’Etat, le même code prévoit que l’Etat peut exercer une action récursoire contre l’agent tortionnaire, ses coauteurs ou ses complices.

126.En exécution de cette réparation, l’Etat, ses démembrements ou la Commune doivent exercer une action récursoire en se retournant contre l’auteur de la faute à l’occasion de laquelle la réparation a été prononcée en vue de le contraindre à rembourser tout ou une partie des montants supportés par ces institutions».

Article 15 : De la valeur des aveux obtenus par la torture

127.Conformément à l’article 15 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui stipule que « Tout Etat partie veille à ce que toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne puisse être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture pour établir qu’une déclaration a été faite », le Code de procédure pénale de 2018 a été plus clair en précisant, en son article 90 alinéa 3, que « lorsqu’il est constaté ou prouvé que des aveux de culpabilité ou toute autre information ont été obtenus par la torture, par contrainte par corps ou par tout autre moyen déloyal, ils sont frappés de nullité ainsi que les preuves qui en découlent ».

128.Le même article donne la prérogative au juge de prononcer, en plus de ces peines principales, l’interdiction d’exercer la fonction à l’occasion de laquelle la torture a été pratiquée, sans préjudice d’autres peines complémentaires prévues par ce même code.

129.Pour ce qui est du rejet systématiquepar les Tribunaux, des aveux reçus sous la torture, l’Etat du Burundi informe le Comité que le Code de procédure pénale frappe de nullité tous aveux et/ou informations obtenus par torture, par contrainte ou par tout autre moyen déloyal ainsi que toutes les preuves qui en découlent.

130.En effet l’article 90 du nouveau Code de procédure (article 90, alinéa 3) dispose que « lorsqu’il est constaté ou prouvé que des aveux de culpabilité ou toute autre information ont été obtenus par torture, par contrainte ou par tout autre moyen déloyal, ils sont frappés de nullité ainsi que les preuves qui en découlent ».

131.Il est donc inadmissible que des aveux extorqués par le moyen de torture soient admis par les juridictions. Si des cas auraient été rapportés au Comité, il serait mieux de nous les communiquer pour les analyser au cas par cas.

Article 16 : De l’interdiction d’autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

132.Le Burundi a connu en 2015 des manifestations violentes qui étaient dues aux contestations contre les élections présidentielles, suivies de la tentative de coup d’Etat du 13 mai de la même année.

133.Dès lors, certains médias burundais et certaines organisations de la Société Civile qui étaient censés défendre les droits humains et dénoncer les actes de torture ou mauvais traitements contre les actes d’intimidation, représailles et menaces ont été impliqués dans ce mouvement contestataire, jusqu’à ce que des mesures administratives et judiciaires soient prises à leur encontre.

134.C’est notamment la mesure gouvernementale portant interdiction temporaire d’accéder à certains sites des stations des radios privées ayant trempé dans ces mouvements, surtout pour des besoins d’enquêtes, mais aussi pour sauvegarder les droits des stations, les droits d’autrui et les droits de la communauté. Il sied de noter que certaines stations ont continué à fonctionner tandis certaines autres parmi celles qui avaient été suspendues ont été réouvertes et fonctionnent normalement.

135.D’autre part, certaines organisations de la Société civile ont été également suspendues, de par plusieurs actes répréhensibles eu égard au droit pénal burundais commis par les membres de ces organisations et leurs leaders. Pour ces derniers, des enquêtes ont été menées soit à travers des commissions d’enquêtes ou, comme à l’accoutumée, par l’ouverture d’un dossier sur les faits portés à la connaissance de la justice et un mandat d’arrêt international a été livré pour qu’ils soient appréhendés et poursuivis par la justice.

III.Etat de la mise en application des recommandations du Comité sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

1.Applicabilité de la Convention par les juridictions nationales

136.Conformément à l’article 15 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui stipule que « Tout Etat partie veille à ce que toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne puisse être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture pour établir qu’une déclaration a été faite », le Code de procédure pénale de 2018 a été plus clair en précisant, en son article 90 alinéa 3, que « lorsqu’il est constaté ou prouvé que des aveux de culpabilité ou toute autre information ont été obtenus par la torture, par contrainte par corps ou par tout autre moyen déloyal, ils sont frappés de nullité ainsi que les preuves qui en découlent ».

137.À cet effet, le Code pénal de 2017 punit sévèrement quiconque soumet une personne à la torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants par une peine de servitude pénale de dix ans et à une amende de cent mille à un million de francs burundais. Le coupable est également puni de vingt ans de servitude pénale lorsque la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ont entrainé une mutilation ou une infirmité permanente ou lorsqu’elle est accompagnée d’agression sexuelle. Elle est punie de la servitude pénale à perpétuité lorsqu’elle a entrainé la mort de la victime.

2.Mesures législatives de prévention de la torture

138.La Constitution de la République du Burundi de 2018 précise en ses articles 254 et 258 que les lois organiques déterminent les missions, l’organisation, l’instruction, les conditions de service et le fonctionnement de la Force de Défense Nationale, de la Police Nationale et du Service National de Renseignement. L’Etat du Burundi enregistre à cet effet une avancée significative.

139.Nous citerons notamment (i) la Loi organique no 1/03 du 20 février 2017 portant Mission, organisation, composition et fonctionnement de la Police Nationale du Burundi (ii) la Loi organique no 1/04 du 20 février 2017 portant Missions, organisation, composition, instructions, conditions de service et fonctionnement de la Force de Défense Nationale du Burundi, (iii) la Loi organique no 1/06 du 2 mars 2006 portant statut du personnel du Service National de Renseignement.

140.Notons, qu’un code de déontologie du personnel du SNR a été élaboré avec l’aide du BNUB et est opérationnel.

141.Le Gouvernement du Burundi a également ratifié en septembre 2013 le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

142.Par ailleurs, les lois nos 1/16,17 et 18 du 31 décembre 2010 portant respectivement Statuts des Agents, des Brigadiers et des Officiers de la Police Nationale du Burundi interdisent formellement le personnel policier de soumettre les gens à la torture et aux traitements cruels, inhumains ou dégradants, tout comme il l’autorise à ne pas exécuter les ordres d’un supérieur qui seraient incompatibles avec l’honneur du service, en l’occurrence la torture.

3.Interdiction absolue de la torture

143.Le Burundi est en conformité avec les normes Internationales en matière de lutte contre les actes de torture imputables aux militaires.

144.En effet, le Code pénal militaire est un code pénal spécial applicable aux militaires et incrimine les actes répréhensibles commis dans l’exercice de la profession militaire. Il coexiste par ailleurs avec le Code pénal ordinaire qui réprime les actes de torture. Dès lors, les militaires coupables d’actes de torture encourent les peines prévues par le Code pénal ordinaire et selon les mêmes modalités (imprescriptibilité et incompressibilité des peines).

145.Le Burundi a en outre amélioré le mécanisme de prévention de la torture en renforçant les capacités des Officiers de Police Judiciaire, des Officiers du Ministère Public et des Magistrats assis à travers des séances de formation organisées à leur endroit. En plus, le Burundi a révisé son Code pénal en date du 29/12/2017 qui incrimine toujours la torture (article 206) et les peines prévues sont dissuasives. Elles varient, selon les circonstances, de la servitude pénale de dix ans à la perpétuité (articles 206-211). Ces peines sont aussi incompressibles, aucune mesure d’allègement ne peut être prise. Ces peines peuvent aussi être assorties de peines complémentaires.

4.Garde à vue, détention préventive et garanties juridiques fondamentales

146.Le Code de procédure pénale en vigueur organise la procédure de la garde à vue et de la détention préventive. 

147.Le Burundi a revu le Code de procédure pénale le 11 mai 2018 qui prévoit en ses articles 41, 43 et 44 les délais de vingt-quatre heures au maximum de la rétention pour état d’ivresse manifeste, pour contrôle ou vérification d’identité et pour état mental dangereux. Pour les autres cas qui nécessitent une enquête approfondie, la durée de garde à vue est restée à 7 jours renouvelables une fois par le Procureur.

148.S’agissant de la durée de la détention préventive, le Code de procédure pénale prévoit une durée de 15 jours pour le Mandat d’arrêt provisoire signé par le Magistrat instructeur. Avant l’expiration de ce délai, le Magistrat instructeur doit présenter l’inculpé en chambre de Conseil pour contrôle de la régularité de cette détention. L’ordonnance du Juge qui confirme la détention préventive a une durée de 30 jours renouvelable de mois en mois sans dépasser 12 mois selon la nature et la gravité de l’infraction.

149.En effet, l’article 159 du Code de procédure pénale prévoit aux alinéas 2 et 3 les délais maximum d’une année pour une infraction à l’égard de laquelle la peine prévue n’est pas supérieure à cinq ans et de trois ans si la peine prévue pour l’infraction est supérieure à cinq ans de servitude pénale.

150.Eu égard aux droits garantis aux personnes en garde à vue ou en détention préventive, l’article 138 du Code de procédure pénale prévoit qu’avant tout interrogatoire, l’inculpé est informé de ses droits, sous peine de nullité de la procédure. En effet, l’inculpé est informé de son droit de se choisir un Conseil, de communiquer librement avec lui, de garder silence en l’absence de son conseil, etc.

151.Pour garantir de manière systématique aux personnes détenues en garde à vue ou en détention préventive, l’information de leurs droits et l’application de garanties juridiques fondamentales mentionnées, l’article 155 alinéa 3 du Code de procédure pénale prévoit des sanctions disciplinaires à l’encontre d’un Magistrat instructeur qui ne saisit pas le juge compétent du contrôle de la détention dans un délai de quinze jours au maximum.

152.L’alinéa 4 de cet article prévoit aussi de telles sanctions à l’encontre d’un juge-président qui n’organise pas une audience du contrôle de la détention préventive dans un délai de quinze jours au maximum comptant du jour de sa saisine par le Ministère Public ou par l’inculpé.

153.Quant à l’article 156 du même code, la mainlevée de la détention préventive est d’office prononcée par le juge en cas d’irrégularité de la détention.

154.Cependant, le même Code de procédure pénale indique que l’Officier de la Police Judiciaire responsable de la garde à vue (GAV) doit ipso facto informer la famille de la personne gardée à vue ou toute autre personne intéressée de la mesure dont elle est l’objet et du lieu de garde à vue.

155.De plus, le Code de procédure pénale reconnait à l’auteur présumé de l’infraction, certaines garanties pour pouvoir exercer son droit à la défense, notamment le droit de se faire assister de son Conseil au cours des actes d’instruction et de garder le silence en l’absence de son Conseil.

156.Il en est de même lors de l’audience publique où chacune des parties peut se faire assister d’un avocat ou d’une personne agréée spécialement dans chaque cas par le tribunal pour prendre la parole en son nom. Sauf si le prévenu s’y oppose, le juge peut demander au Bâtonnier de lui désigner un avocat inscrit au Barreau.

157.Toutefois, l’assistance d’un défenseur est obligatoire pour les prévenus mineurs.

5.Allégations de torture et d’exécutions extrajudiciaires

158.Pour faire face à l’impunité, les coupables des actes de torture sont punis conformément à la loi. En effet, durant l’année 2015, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) a enregistré au total 27 cas d’allégation de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

159.Concernant la protection des victimes ayant porté plainte, l’Etat du Burundi a connu des avancées significatives en mettant sur pied la loi no 1/04 du 27 juin 2016 portant protection des victimes, des témoins et d’autres personnes en situation de risque.

160.En ce qui concerne le dépôt des plaintes par les victimes de la torture, l’Etat du Burundi informe le Comité que le Code de procédure pénale prévoit trois modes de saisine des organes d’enquête : la plainte, la dénonciation et la saisine d’office. Dans tous ces cas, l’audition de la victime reste une priorité des organes poursuivants pour éclairer l’enquêteur.

161.Cependant, l’Etat du Burundi déplore certains cas où les victimes ne comparaissent pas devant les autorités judiciaires pour déposer plainte ou dénoncer préférant fuir ou dénoncer aux médias, ce qui handicape la procédure. C’est pourquoi, beaucoup de cas sont rapportés par les médias mais les victimes n’osent pas dénoncer ou porter plainte aux autorités judiciaires.

6. Personnes atteintes d’albinisme

162.Au Burundi, des campagnes de sensibilisation de la population ont été entreprises pour assurer la protection des personnes albinos et en particulier des enfants. Une police de proximité a même été mobilisée pour assurer la protection spéciale des personnes albinos.

163.Le Gouvernement a également agréé les associations de défense des droits des personnes albinos notamment « Albinos sans frontières »et « OPA- Burundi » qui ont pour objectifs d’aider les personnes souffrant d’albinisme à défendre leurs droits.

164.De son côté, le MDPHASG continue d’octroyer chaque année des moyens financiers à ces associations destinés à pourvoir aux besoins d’alimentation, d’éducation et de santé des Albinos.

165.Néanmoins, il subsiste des difficultés liées aux maladies affectant leurs yeux et leurs peaux qui nécessitent des médicaments coûteux.

7. Indépendance de la justice

166.L’indépendance de la justice est garantie par la Constitution de la République du Burundi de 2018. En plus, la politique sectorielle du Ministère de la justice 2016-2020 vient mettre en œuvre cette indépendance. En effet, cette politique tourne autour de trois axes stratégiques :

•La justice indépendante ; 

•La justice pour tous ;

•La justice pénale respectueuse des droits humains.

167.Sa vision est de stimuler, sur le territoire burundais, le renforcement d’une justice indépendante, équitable, modernisée et accessible à tous.

168.Cette vision garantissant le droit individuel à une justice équitable s’articule autour des sept (7) principes directeurs : (i) l’indépendance du juge ;(ii) l’accès à la justice ; (iii) l’égalité des citoyens devant la loi ; (iv) le respect des droits de la défense ;(v) la collaboration et la coopération ; (vi) le renforcement du capital humain ; (vii) la promotion des technologies de l’information et de la communication.

8. Formation

169.Par rapport au renforcement des capacités des intervenants dans la prévention et la répression de la torture, le Burundi a poursuivi ses efforts dans la formation des Magistrats assiset des Policiers à travers des séances de formation organisées à leur endroit. D’autres intervenants étatiques et non étatiques ont bénéficié des formations en matière de lutte contre la torture dispensée par le Ministère ayant les droits humains dans ses attributions. Ces efforts sont hélas présentement contrariés par le retrait et le désengagement de certains partenaires techniques et financiers traditionnels du Burundi.

9. Conditions de détention

170.Le Burundi a révisé le Code de procédure pénale le 11 mai 2018 qui prévoit en ses articles 41, 43 et 44 les délais de vingt-quatre heures au maximum de la rétention pour état d’ivresse manifeste, pour contrôle ou vérification d’identité et pour état mental dangereux. Pour les autres cas qui nécessitent une enquête approfondie, la durée de garde à vue est restée à 7 jours renouvelables une fois par le Procureur.

171.S’agissant de la durée de la détention préventive, le Code de procédure pénale prévoit une durée de 15 jours pour le Mandat d’arrêt provisoire signé par le Magistrat instructeur. Avant l’expiration de ce délai, le Magistrat instructeur doit présenter l’inculpé en chambre de Conseil pour contrôle de la régularité de cette détention. L’ordonnance du Juge qui confirme la détention préventive a une durée de 30 jours renouvelable de mois en mois sans dépasser 12 mois selon la nature et la gravité de l’infraction. En effet, l’article 159 du Code de procédure pénale prévoit aux alinéas 2 et 3 les délais maximum d’une année pour une infraction à l’égard de laquelle la peine prévue n’est pas supérieure à cinq ans et de trois ans si la peine prévue pour l’infraction est supérieure à cinq ans de servitude pénale.

172.Concernant les mesures prises en faveur des personnes détenues depuis de nombreuses années, le Burundi a déjà mis en place, à travers le Ministère de la Justice et de la Protection Civique et Garde des Sceaux, une Commission permanente chargée du suivi des dossiers pénitentiaires et judiciaires des détenus par l’ordonnance no 550/2083 du 11 novembre 2016 du Ministre en charge de la justice dans ses attributions.

173.En outre, le Ministre des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre, à travers la Direction Générale des Droits de la Personne Humaine, de l’Education à la Paix et à la Réconciliation Nationale, multiplie des descentes sur terrain dans des cachots et prisons de toutes les provinces du pays en vue de constater les irrégularités et les conditions de détention qui sont à l’origine des violations des droits de l’homme.

174.Ainsi en 2017, durant ces descentes, 107 lieux de détention dont 9 prisons et 98 cachots ont été visités : 368 personnes ont été libérées dont 52 détenus dans les différentes prisons après avoir régularisé leurs dossiers et 316 retenues dans les cachots après avoir constaté des irrégularités.

175.Concernant les besoins vitaux, les personnes en situation de détention ou d’emprisonnement ont accès aux services de santé et aux activités ludiques.

176.Ainsi, le Gouvernement autorise les visites demandées par les défenseurs nationaux et internationaux des droits de l’homme qui veulent s’enquérir des conditions carcérales dans les prisons et les centres de détention

10.Situation des réfugiés et demandeurs d’asile

177.La Constitution de la République du Burundi de 2018 en son article 50 dispose que « le droit d’asile est reconnu dans les conditions définies par la loi ». Cela a été concrétisé par la promulgation de la loi no 1/32 du 13 novembre 2008 sur l’asile et la protection des réfugiés au Burundi qui est en vigueur. Cette loi a été mise en œuvre à travers trois ordonnances ministérielles concernant l’asile, à savoir :

•L’Ordonnance Ministérielle no 530/442 du 7 avril 2009 sur les mesures d’application de la loi susmentionnée ;

•L’Ordonnance Ministérielle no 530/443 du 7 avril 2009 portant mesures d’application de la même loi portant composition, organisation et fonctionnement de la Commission Consultative pour les Etrangers et Réfugiés et du Comité de Recours ;

•L’Ordonnance Ministérielle no 530/881 du 6 juillet 2009 portant nomination des membres de la Commission Consultative pour les Etrangers et Réfugiés (CCER) et du Comité de Recours (CR). L’adoption et la promulgation de cette loi ont été suivies par la création de l’Office National chargé de la Protection des Réfugiés et des Apatrides (ONPRA) en mai 2009.

178.Cet organe constitue le Secrétariat de la CCER et est chargé de la coordination et du suivi des questions relatives à l’asile.

179.Les articles 19, 78, et 79 de laditeloi interdisent le refoulement et l’expulsion d’un demandeur d’asile sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques.

180.Durant le mois d’août 2018, le rapport de l’Office National de Protection de Réfugiés et des Apatrides (ONPRA) au Burundi précise que la situation est de :

•882 nouveaux demandeurs d’asile dont 778 congolais (RDC) ont été enregistrés ; parmi lesquels, 446 ont déclaré être arrivés au Burundi durant le mois sous revue ;

•Le statut de réfugié a été reconnu à 546 anciens demandeurs d’asile ;

•136 réfugiés sont partis pour la réinstallation dans un pays tiers ;

•Pour les déplacés internes, le chiffre de 159,152 est tiré de la DTM (Matrice de suivi des Déplacements) de l’OIM publiée pour le mois de juin 2018 pour tout le territoire national.

181.Il y a aussi des réfugiés burundais se trouvant dans les pays limitrophes. C’est entre autres 45 886 rapatriés dans le cadre du rapatriement volontaire organisé des réfugiés burundais de la Tanzanie, 77 rapatriés du camp de Lusenda en RDC et 191 du camp de Kakuma au Kenya.

182.Signalons quel’Assemble Nationale du Burundi a également analysé et adopté, au mois deseptembre 2018, deux projets de loi, l’un portant adhésion du Burundi à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et l’autre portant adhésion à la Convention de 1961 relative à la réduction des cas d’apatridie.

11.Compétence universelle

183.Aux termes de l’article 10 du Code pénal du Burundi, tout délit ou crime commis hors du territoire national par un Burundais ou étranger est, sous réserve des conventions sur l’extradition, puni par la loi pénale du Burundi, si l’auteur se trouve au Burundi ou la victime a la nationalité burundaise et que le fait est puni par la législation du pays où l’infraction a été commise.

12. Réparation et réhabilitation des victimes de torture

184.Concernant la réparation due aux victimes, le Code de procédure pénale du 11 mai 2018 met à charge de l’Etat la réparation intégrale du préjudice résultant de la torture commise par un préposé de l’Etat dans l’exercice de ses fonctions.

185.Lorsque l’Etat indemnise la victime de la torture, il a la faculté d’exercer une action récursoire contre l’agent tortionnaire, ses auteurs et ses complices (article 350).

186.La même loi étend le droit de constitution de partie civile à toute association régulièrement agréée ayant pour objet la lutte contre les violences sexuelles ou toute autre atteinte volontaire à la vie et à l’intégrité de la personne (sous-entendu la torture).

187.Notons àtoutes fins utiles, que l’action récursoire en faveur de l’Etat est aujourd’hui régie par la loi no 1/22 du 25/7/2014 portant réglementation de l’action récursoire et directe de l’Etat et des communes contre leurs mandataires et leurs préposés.

13. Mécanisme de surveillance des lieux de privation de liberté

188.Le Gouvernement du Burundi a ratifié, en septembre2013, le Protocole facultatif à laConvention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

189.Cependant, il n’a pas encore mis sur pied le Mécanisme National de Prévention de la Torture comme celadécoule de la ratification du protocole.

190.S’agissant du mécanisme indépendant chargé d’enquêter sur les plaintes pour les faits de torture et de mauvais traitement, le Burundi estime que les organes en charge d’enquête et de poursuite des infractions mis en place depuis les postes de police au niveau de chaque commune et des parquets au niveau de chaque province sont suffisants.

191.Il importe de signaler aussi qu’à chaque fois que de besoin, le Procureur Général de la République peut mettre en place des commissions ad-hoc pour enquêter sur les violations alléguées. C’est notamment le cas de la mise en place de la Commission d’enquête sur le mouvement insurrectionnel déclenché le 26 avril 2015, la Commission d’enquête sur les allégations d’exécutions extrajudiciaires lors des combats qui ont suivi l’attaque de quatre camps militaires du 11 décembre 2015, la Commission d’enquête sur les massacres de RUHAGARIKA en commune BUGANDA de la Province de Cibitoke du 14 mai 2018, etc.

14.Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme

192.L’indépendance de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme du Burundi est consacrée dans plusieurs dispositions de la loi no 1/04 du 5 janvier 2011 portant création de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme. Dans son fonctionnement, la Commission n’est soumise qu’à la loi.

193.En vue de préserver son indépendance et sa crédibilité, aucun organe étatique ne peut lui donner des injonctions dans l’accomplissement de ses missions. Tous les services de l’État lui accordent l’assistance et le soutien dont elle a besoin.

194.Cette Commission est composée de personnalités reconnues pour leur probité, leur intégrité, leur sens élevé de responsabilité et d’écoute, leur attachement à la cause des droits de l’homme, leur dynamisme, leur esprit d’indépendance et d’impartialité dans la prise des décisions. Ainsi, Durant l’année 2015, la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) a enregistré au total 27 cas d’allégations de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

195.Il ressort des investigations menées par la CNIDH que ces actes se commettent généralement dans le cadre des opérations d’arrestation ou pendant la procédure de garde à vue.

15. Justice transitionnelle

196.Le Gouvernement du Burundi a mis en place la Commission, Vérité et Réconciliation (CVR) par la loi no 1/18 du 15 mai 2014 portant création, mandat, composition, organisation et fonctionnement de la Commission Vérité et Réconciliation.

197.Cette Commission a pour mission d’enquêter et d’établir la vérité sur les violations graves des droits de l’homme qui se sont commises depuis le 1erjuillet 1962 jusqu’en 2008, date de la fin des hostilités. 

198.En vue d’appuyer la mission de la CVR, la loi no 1/04 du 27 juin 2016 portant protection des victimes, des témoins et d’autres personnes en situation de risque a été promulguée.

199.Selon le rapport de la CVR présenté en octobre 2018 devant l’Assemblée Nationale en vue du renouvellement de son mandat, la réalisation des activités du 25 avril au 6 mai 2018, effectuées sous la supervision d’au moins un commissaire par province a permis de montrer que des descentes pour recueillir les dépositions ont été organisées dans toutes les provinces du Burundi. Le résultat provisoire a fait état de 72 961 déposants, 100 024 personnes assassinées ou disparues, 21 671 présumés auteurs des violations, 4 163 fosses communes identifiées et 11 378 personnes qui se sont distinguées dans la protection des vies humaines.

16. Violences politiques

200.Concernant les violences politiques, il convient de signaler que pour des cas infractionnels y compris des cas de violations des droits de l’homme ainsi que celles basées sur le genre ou violences faites aux femmes, les présumés auteurs sont directement acheminés vers la Police Judiciaire et aux instances judiciaires pour la confection des dossiers pénaux. Cela concerne ainsi tout citoyen sans exception, y compris les membres de la Ligue desJeunes IMBONERAKURE et tout le personnel des Forces de Défense et de Sécurité en conflit avec la loi, pour n’importe quelle infraction, du moment qu’aucune personne n’est au-dessus de la loi.

17. Discrimination basée sur l’orientation sexuelle

201.Concernant la dépénalisation de l’homosexualité, le Code pénal burundais de 2017 érige en infraction l’homosexualité en son article 590 car ce comportement est contraire à la coutume et aux bonnes mœursburundaises.

202.Néanmoins, l’État du Burundi assure la protection de tous de manière effective, les personnes homosexuelles comme tant d’autres citoyens burundais contre toutes menaces, violences et atteinte à leur intégrité physique selon la loi nationale.

18. Coopération avec les mécanismes des Nations Unies

203.Le Gouvernement du Burundi a mis en place le Département des Organes de Traités, Procédures Spéciales et Examen Périodique Universel des Nations Unies et autres mécanismes par le décret no 100/57 du 4 avril 2016 portant missions organisation et fonctionnement du Ministère des Droits de la Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre. Il est chargé de :

•Faire un état de ratification des Traités ;

•Identifier les rapports à soumettre et planifier leur élaboration ;

•Rédiger les rapports initiaux et périodiques des Organes des Traités ;

•Assurer le suivi des recommandations des Organes des traités ;

•Assurer le suivi des observations finales des Procédures Spéciales ;

•Préparer et rédiger les rapports pour l’Examen Périodique Universel ;

•Assurer le suivi des recommandations de l’Examen Périodique Universel ;

•Elaborer les réponses aux différents questionnaires et correspondances des mandats thématiques ;

•Initier des activités de sensibilisation et d’information sur les Traités, leur mise en œuvre à l’intention des institutions étatiques et non étatiques ainsi que la population ;

•Identifier les actions pertinentes et synergies possibles pour une plus grande collaboration avec les organes de surveillance de Traités.

204.En outre, toutes ces missions sont effectuées sous la supervision du comité permanent de rédaction des rapports initiaux et périodiques.

Conclusion

205.Il ressort de ce rapport que des réformes importantes ont été réalisées dans l’exécutif et dans le législatif par rapport à la situation qui prévalait au moment de la production du dernier rapport en 2013.

206.En effet, les cadres juridiques et institutionnels des droits de l’homme ont également positivement évolué. C’est notamment la mise en place des différentes commissions dont la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), la Commission Nationale de Dialogue Inter-Burundais (CNDI), etc.

207.Le Gouvernement de la République du Burundi a en outre promulgué le Code pénal de 2017 dans lequel il est incorporé la définition de la torture telle que consacrée par la Convention contre la torture. Il y a eu également la révision du Code de procédure pénale de 2018 et la promulgation de la loi spécifique sur les VBGs, etc.

208.En sus, le Gouvernement du Burundi a organisé, parle biais du Ministère des Droits Personne Humaine, des Affaires Sociales et du Genre,une sériede formations et de sensibilisations en droits humains à l’endroit des Juges des tribunaux de résidence, des Officiers de Police Judiciaire (OPJ) et desjeunes dans le but de rappeler le respect des droits et libertés individuelles et collectives, l’interdiction de la torture, l’éradication de cette pratique de torture sous toutes ses formes etc.

209.Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’affirmer que le pas déjà franchi dans la mise en œuvre de la Convention contre la Torture et autres Peines ouTraitements Cruels, Inhumains ou Dégradants par le Burundi est satisfaisant.

210.Le Gouvernement réitère son attachement à la cause des droits de l’homme, à la justice, à la paix et au développement pour tous.