Présentées par:

M. Welvidanelage Don Hugh Joseph Francis Silva (825/1998), M. Don Clarence Godwin (826/1998), M. Sunil Randombage de Silva (827/1998), M. T.J.A. Perera (828/1998)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

Zambie

Date des communications:

28 octobre 1997 (825/1998), 27 novembre 1997 (826/1998), 28 octobre 1997 (827/1998), 25 octobre 1997 (828/1998) (communications initiales)

Décisions antérieures:

Décision prise par le Rapporteur spécial conformément à l’article 91 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 14 août 1998 (non publiée sous forme de document)

Date de la présente décision:

25 Juillet 2002

[ANNEXE]

ANNEXE

CONSTATATIONS ADOPTÉES PAR LE COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME EN VERTU DU PARAGRAPHE 4 DE L’ARTICLE 5 DU PROTOCOLE FACULTATIF SE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL RELATIF

AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

Soixante ‑quinzième session

concernant les

Communications n os  825 à 828/1998 * * *

Présentées par:

Welvidanelage Don Hugh Joseph Francis Silva (825/1998), Don Clarence Godwin (826/1998), Sunil Randombage de Silva (827/1998), T.J.A. Perera (828/1998)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

Zambie

Date des communications:

28 octobre 1997 (825/1998), 27 novembre 1997 (826/1998), 28 octobre 1997 (827/1998), 25 octobre 1997 (828/1998) (communications initiales)

Le Comité des droits de l’homme, institué en application de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 25 juillet 2002,

Adopte ce qui suit:

Décision CONCERNANT la recevabilité

1.Les auteurs des communications sont MM. Welvidanelage Don Hugh Joseph Francis Silva, Don Clarence Godwin, Sunil Randombage de Silva et T.J.A. Perera, citoyens sri‑lankais. Ils affirment avoir été victimes d’une violation par la Zambie du paragraphe 3 a) de l’article 8 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (le Pacte). Ils ne sont pas représentés par un conseil.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Les auteurs, tous quatre avocats, affirment qu’entre le 21 août et le 3 septembre 1991 le Gouvernement zambien leur a proposé à chacun un poste de défenseur commis d’office vacataire. L’offre qui leur a été faite comprenait un traitement en monnaie locale et une indemnité d’expatriation, d’un montant allant de 4 260 à 7 080 dollars des États‑Unis par an, qui leur serait versée mensuellement à Sri Lanka. Le voyage aller et retour devait être payé par le Gouvernement zambien, à condition que les auteurs accomplissent une période de service d’au moins 24 mois.

2.2Les auteurs ont accepté cette offre et se sont rendus en Zambie. M. Silva est entré en fonctions le 1er juillet 1992, MM. Godwin et de Silva le 6 mai 1992, et M. Perera le 8 avril 1992.

2.3Les auteurs affirment que l’indemnité leur a été versée avec beaucoup de retard et qu’à partir du 1er avril 1993, soit neuf mois à un an après leur entrée en fonctions en Zambie, un impôt de 35 % a été retenu sur celle‑ci. Estimant que cette imposition constituait une violation flagrante de leur accord avec le Gouvernement zambien, ils ont demandé à ce dernier soit de rembourser les sommes prélevées, soit de résilier leur contrat et de prendre les dispositions nécessaires en vue de leur retour à Sri Lanka.

2.4D’après les auteurs, le Gouvernement n’aurait pas répondu à leur demande. En conséquence, et parce qu’ils ne disposaient pas de suffisamment d’argent, les auteurs ont été tenus d’accomplir 24 mois de service avant de pouvoir retourner à Sri Lanka comme le disposait leur contrat. Ils ont donc été contraints de travailler dans des conditions auxquelles ils n’avaient pas consenti. Tous ont démissionné entre avril et décembre 1994 et sont retournés à Sri Lanka.

2.5Pour ce qui est de l’épuisement des recours internes, les auteurs signalent que M. de Silva a tenté de saisir la Haute Cour de Zambie, à Lusaka, le 4 août 1994. La Haute Cour a recommandé aux parties de régler l’affaire à l’amiable mais le Gouvernement zambien n’aurait proposé aucune réparation à M. de Silva ni aux autres auteurs. Ceux‑ci affirment avoir invoqué la clause contractuelle relative à la résiliation de leur contrat et à la prise en charge de leur retour à Sri Lanka avant d’avoir pu exercer tout autre recours.

Teneur de la plainte

3.1Les auteurs affirment qu’en raison du prélèvement fiscal de 35 % sur le montant de leur indemnité ils n’ont pas été en mesure de retourner à Sri Lanka avant d’avoir accompli 24 mois de service, ce qui était la condition à remplir pour que leur voyage de retour soit pris en charge. Si l’État partie avait souhaité modifier les termes du contrat, ils auraient pu résilier celui‑ci tout en conservant la possibilité de retourner à Sri Lanka, puis formuler des propositions pour un nouveau contrat. Toutefois, le Gouvernement n’aurait fait aucune proposition dans ce sens parce qu’il avait besoin des services des auteurs. Ces derniers considèrent donc qu’ils ont été astreints à un travail forcé, ce qui constitue une violation du paragraphe 3 a) de l’article 8 du Pacte.

3.2Outre le remboursement des sommes prélevées à titre d’imposition, M. Perera demande le versement de l’intégralité de l’indemnité d’expatriation pour la troisième année de contrat, qu’il n’a pas pu achever parce qu’il a été contraint de quitter la Zambie, et de la prime prévue dans le contrat.

Observations de l’État partie quant à la recevabilité et quant au fond des communications

4.1L’État partie a communiqué ses observations quant à la recevabilité et au fond des communications par note verbale les 26 avril 2000 et 26 mars 2001.

4.2En ce qui concerne la recevabilité, l’État partie affirme que les auteurs des communications n’ont pas épuisé les recours internes. Il fait valoir que même si la Haute Cour a recommandé à M. de Silva de régler l’affaire à l’amiable avec le Gouvernement, ceci ne compromettait pas l’issue de toute procédure judiciaire engagée et n’excluait pas la possibilité de se pourvoir devant la Cour suprême de l’État partie. Il fait également observer que les auteurs ont décidé librement d’invoquer la clause leur donnant droit à la prise en charge de leur voyage de retour à Sri Lanka, ce qui rendait difficile l’exercice des recours internes et exonère donc le Gouvernement zambien.

4.3En outre, les problèmes soulevés par les auteurs auraient pu être réglés par le ministère compétent, dans la mesure où les intéressés avaient été informés à plusieurs reprises des procédures appliquées par le Gouvernement et s’en étaient prévalus en matière de réévaluation des traitements, de voyage des membres de leur famille et de logement.

4.4En ce qui concerne le fond des communications, l’État partie fait valoir qu’en 1990‑1991 le Gouvernement zambien a recruté un certain nombre de nationaux sri‑lankais pour travailler au Ministère de la justice en raison d’une pénurie de juristes qualifiés au sein de la fonction publique.

4.5L’État partie fait observer que les auteurs ont signé en juin 1992 un avenant au contrat initial, qui en modifiait légèrement les termes compte tenu des nouveaux régimes de taux de change établis par la Banque de Zambie. En effet, à l’époque, le Gouvernement cherchait à contrôler la circulation des devises étrangères dans le pays étant donné le peu de ressources financières dont il disposait. Il n’était pas toujours possible d’obtenir des devises, ce qui explique que l’indemnité n’a malheureusement pas pu être versée avec régularité. Enfin, l’État partie fait observer que si le taux d’imposition appliqué au traitement local a augmenté, la prime et l’indemnité n’ont, en revanche, pas été modifiées par cet avenant puisqu’elles sont restées non imposables.

4.6Pour ce qui est des retards dans le versement de l’indemnité, l’État partie considère que ceux‑ci constituent une circonstance imprévue au moment du recrutement mais réaffirme que, d’après ses archives, le montant dû a été versé dans son intégralité.

4.7En ce qui concerne la prime prévue dans le contrat d’engagement, l’État partie souligne que la condition pour en bénéficier était d’avoir accompli 30 mois de service ayant donné satisfaction.

4.8Pour ce qui est du logement l’État partie explique que le contrat prévoyait la possibilité de fournir un logement aux intéressés, auquel cas une contribution, dont le montant variait d’un employé à l’autre en fonction de sa rémunération, serait déduite du traitement.

4.9En ce qui concerne les permis de travail, l’État partie souligne que leur délivrance est régie par la loi sur l’immigration et qu’ils n’ont pas tous la même durée de validité.

4.10L’État partie appelle également l’attention du Comité sur le fait qu’un mois avant leur entrée en fonctions, les auteurs ont demandé une réévaluation de leur traitement entraînant une modification de leurs conditions d’emploi et supposant une promotion d’un échelon. Le Gouvernement zambien leur a finalement accordé cette réévaluation même s’ils ne remplissaient pas tous les critères. Par ailleurs, les auteurs ont demandé le remboursement de certaines dépenses personnelles (appels téléphoniques, courses de taxi, frais supplémentaires d’alimentation), ce qui a été également accepté par le Gouvernement zambien.

4.11L’État partie conteste l’allégation des auteurs selon laquelle leur démission les aurait empêchés d’user des voies de recours interne. Il fait observer que leur permis de travail ne constituait pas un obstacle à cet égard et qu’ils auraient eu amplement le temps de régler l’affaire à l’amiable. Il conteste également les allégations des auteurs selon lesquelles, du fait de la réduction unilatérale de leur rémunération, ils n’ont pas pu financer leur séjour en Zambie et poursuivre leur action en justice contre un gouvernement réticent et hostile.

4.12Enfin, l’État partie tient à préciser que, contrairement à ce que soutiennent les auteurs, seul le traitement local a été touché par la hausse du taux d’imposition, ce qui était clairement indiqué dans l’avenant signé par eux.

Commentaires des auteurs

5.1Par lettre des 16 et 28 juillet 2001, les auteurs ont répondu aux observations de l’État partie.

5.2En ce qui concerne l’épuisement des voies de recours interne, les auteurs affirment que la Haute Cour leur a recommandé de régler l’affaire à l’amiable parce qu’elle voulait éviter de placer le Gouvernement dans une position délicate mais qu’aucune mesure n’a été prise par ce dernier pour corriger la situation. La Haute Cour n’ayant pas statué, les auteurs n’ont donc pas pu saisir la Cour suprême. En outre, ils n’ont été informés de l’impossibilité de parvenir à un règlement à l’amiable que peu de temps avant leur départ pour Sri Lanka, ce qui ne leur laissait guère le temps d’explorer d’autres voies de recours. Par conséquent, ils considèrent avoir fait leur possible pour épuiser les voies de recours disponibles.

5.3En ce qui concerne leur situation contractuelle, les auteurs soulignent que l’imposition du traitement local ne leur pose aucunement problème mais maintiennent qu’un impôt de 35 % a été prélevé sur leur indemnité et demandent que les sommes correspondantes leur soient remboursées. À cet égard, ils font référence à une lettre du Procureur général, en date du 31 octobre 1994, contredisant les observations communiquées par l’État partie le 26 mars 2001, dans laquelle il est dit que les auteurs ne pouvaient pas recevoir d’indemnité d’expatriation sans que celle‑ci soit soumise à l’impôt et qu’ils avaient droit au versement d’une indemnité, après déduction de l’impôt sur le revenu.

Délibérations du Comité

6.1Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 87 de son Règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2Le Comité s’est assuré que la même question n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement aux fins du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif.

6.3Le Comité considère qu’aux fins de l’article 2 du Protocole facultatif les auteurs n’ont pas suffisamment étayé, aux fins de la recevabilité, l’allégation selon laquelle le prélèvement d’un impôt sur l’indemnité qui leur était versée pouvait être considéré comme ayant entraîné un travail forcé au sens du paragraphe 3 a) de l’article 8 du Pacte.

6.4Étant parvenu à la conclusion ci‑dessus, le Comité estime qu’il n’a pas à examiner la question de l’épuisement des recours internes au regard du paragraphe 2 de l’article 5 du Protocole facultatif.

7.En conséquence, le Comité décide:

a)Que les communications sont irrecevables en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif;

b)Que la présente décision sera communiquée aux auteurs des communications et à l’État partie.

[Fait en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement aussi en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel présenté par le Comité à l’Assemblée générale.]

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