Nations Unies

CERD/C/MDV/CO/5-12

Convention internationale surl’élimination de toutes les formesde discrimination raciale

Distr. générale

14 septembre 2011

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante-dix-neuvième session

8 août-2 septembre 2011

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination raciale

Maldives

1.Le Comité a examiné les cinquième à douzième rapports périodiques des Maldives (CERD/C/MDV/5-12), présentés en un seul document, à ses 2096e et 2097e séances (CERD/C/SR.2096 et CERD/C/SR.2097), tenues les 11 et 12 août 2011. À sa 2117e séance (CERD/C/SR.2117), tenue le 26 août 2011, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du rapport périodique et de la reprise du dialogue avec les Maldives après une interruption de près de vingt ans. Il se déclare satisfait du dialogue franc et constructif instauré avec la délégation de haut niveau de l’État partie, dirigée par l’Attorney général.

3.Tout en notant avec satisfaction que les Maldives ont donné suite à sa précédente recommandation et bénéficié de l’assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pour établir la version finale du document de base commun (HRI/CORE/MDV/2010), le Comité regrette que le rapport périodique n’ait pas été établi conformément aux directives révisées pour l’établissement des rapports (CERD/C/2007/1) et ne contienne pas suffisamment d’informations sur la mise en œuvre de la Convention. Il invite l’État partie à soumettre ses prochains rapports périodiques dans les délais conformément aux directives révisées pour l’établissement des rapports et aux recommandations du Comité.

B.Aspects positifs

4.Le Comité se félicite des faits nouveaux positifs enregistrés aux Maldives, y compris:

a)L’adoption de la Constitution de 2008, dont l’article 17 a) interdit expressément la discrimination raciale;

b)L’adoption de la loi sur l’emploi de 2008 qui interdit la discrimination entre les personnes effectuant un travail de valeur égale;

c)L’entrée en vigueur du Règlement relatif à l’emploi des étrangers de 2009 qui protège les droits des travailleurs migrants;

d)La collaboration avec cinq titulaires de mandat au titre des procédures spéciales qui se sont rendus dans le pays entre 2006 et 2011.

5.Le Comité se félicite également de la ratification d’un certain nombre d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme depuis 1999, y compris:

a)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, en 2006;

b)Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en 2006;

c)La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2004;

d)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2010; et

e)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2007.

6.Le Comité prend note de l’intention de l’État partie de lever certaines réserves aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’il a émises et l’encourage à le faire conformément aux normes internationales de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

C.Sujets de préoccupation et recommandations

7.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni de données ventilées sur la composition de la population permettant d’évaluer les progrès réalisés sur la voie de l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

À la lumière de sa Recommandation généraleno 4 (1973) sur la composition démographique de la population et des paragraphes 10 et 12 des directives révisées concernant l’établissement des rapports (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données démographiques ventilées sur la composition ethnique de sa population.

8.Tout en accueillant avec satisfaction l’information communiquée par l’État partie, selon laquelle une loi antidiscrimination est en cours d’élaboration pour 2012, le Comité se déclare préoccupé par l’absence d’une législation complète pour prévenir et interdire la discrimination raciale (art. 1er et 4).

Dans sa Recommandation générale no 1 (1972) concernant les obligations des États parties, le Comité invite les États parties à examiner la possibilité de compléter leur législation, conformément à leur procédure législative, en y ajoutant des dispositions conformes aux normes prévues à l’article premier et aux alinéas a et b de l’article 4 de la Convention. À cet égard, le Comité recommande à l’État partie d’adopter dans les meilleurs délais la loi antidiscrimination prévue, conformément aux articles 1er et 4 de la Convention. Le Comité invite également l’État partie à tenir pleinement compte de la Convention et des autres recommandations générales du Comité en établissant cette loi.

9.Le Comité prend note avec préoccupation de la disposition de la loi sur la Commission des droits de l’homme selon laquelle seuls des musulmans peuvent être membres de ladite Commission (art. 2, 4 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour garantir que la Commission des droits de l’homme représente tous les groupes du pays et soit pleinement conforme aux Principes de Paris. Il encourage aussi l’État partie à doter la Commission de ressources humaines et financières suffisantes pour lui permettre de s’acquitter pleinement de son mandat.

10.Le Comité est particulièrement préoccupé par les dispositions discriminatoires de la Constitution stipulant que tous les Maldiviens doivent être musulmans, ce qui exclut les non-musulmans de l’accès à la citoyenneté et à des fonctions publiques et touche principalement les personnes ayant une origine nationale ou ethnique différente (art. 2, 4 et 5).

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la Recommandation générale no 30 (2005) concernant la discrimination à l’égard des non-ressortissants, dans laquelle le Comité demande aux États parties de veiller à ce que des groupes particuliers de non‑ressortissants ne subissent pas de discrimination en matière d’accès à la citoyenneté ou de naturalisation. Par ailleurs, l’État partie est tenu, en vertu de l’article 5 d) vii) de la Convention, de garantir le droit de chacun à la liberté de religion sans discrimination fondée sur des motifs raciaux ou ethniques. Le Comité demande à l’État partie d’envisager de modifier les dispositions constitutionnelles discriminatoires dans le respect de la Convention.

11.Tout en relevant avec satisfaction que l’État partie est membre de l’Organisation internationale du Travail (OIT) depuis 2009, le Comité se déclare préoccupé par les informations faisant état de l’hostilité à laquelle les non-ressortissants sont en butte et de la maltraitance dont les travailleurs migrants sont victimes de la part de leurs employeurs. Il déplore en outre le manque d’informations sur les réfugiés et les demandeurs d’asile dans le rapport de l’État partie (art. 2, 5 et 6).

Le Comité demande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les mesures prises pour empêcher les manifestations d’hostilité et prévenir la maltraitance dont les travailleurs migrants sont victimes ainsi que sur les mesures de réparation prévues et sur la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile. Conformément à la Recommandation générale no 30 (2005) concernant la discrimination à l’égard des non-ressortissants, l’État partie devrait continuer à prendre des mesures en vue d’éliminer la discrimination à l’encontre des non‑ressortissants dans le domaine des conditions de travail et des exigences professionnelles, en ce qui concerne notamment les règles et pratiques relatives à l’emploi qui ont des effets discriminatoires.

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention internationale de 1990 sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole de 1967 s’y rapportant, la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

12.Le Comité constate avec préoccupation que les Maldives sont un pays de destination possible pour les travailleurs migrants victimes de la traite sur le marché du travail et les femmes victimes de la traite liée à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales (art. 2, 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier les efforts qu’il déploie pour prévenir et combattre la traite des êtres humains, et l’encourage à adopter dans les meilleurs délais le projet de loi antitraite en cours d’élaboration et de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur tout progrès réalisé dans ce domaine.

Le Comité recommande également à l’État partie d’envisager de ratifier le Protocole additionnel de 2000 à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

13.Le Comité est préoccupé par les limitations actuelles, en vertu desquelles les travailleurs migrants et d’autres étrangers ne peuvent exercer leur droit de manifester leur religion ou leur croyance qu’en privé (art. 2, 5 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place des moyens de promouvoir la compréhension mutuelle, la tolérance et le dialogue interreligieux dans la société maldivienne pour lutter contre l’extrémisme religieux et accroître la diversité culturelle.

14.Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui ne l’ont pas encore été, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la question de la discrimination raciale.

15.À la lumière de sa Recommandation générale no 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Il prie l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur les plans d’action et autres mesures prises pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

16.Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place et de faire connaître un programme d’activités approprié pour célébrer l’année 2011, proclamée Année internationale des personnes d’ascendance africaine par l’Assemblée générale dans sa résolution 64/169.

17.Le Comité recommande à l’État partie, lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique, de poursuivre le dialogue avec la Commission des droits de l’homme des Maldives et de collaborer avec les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, et notamment de la lutte contre la discrimination raciale.

18.Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles.

19.Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité rappelle les résolutions 61/148, 63/243 et 65/200, dans lesquelles l’Assemblée générale a demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de l’amendement à la Convention concernant le financement du Comité et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement.

20.Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ces rapports soient facilement accessibles au public au moment de leur soumission et que les observations du Comité s’y rapportant soient également diffusées dans la langue officielle de l’État et les autres langues communément utilisées, selon qu’il convient.

21.Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son Règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de lui communiquer, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 8 et 12 ci-dessus.

22.Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations 7, 10, 11 et 13 et l’invite à fournir des informations détaillées dans son prochain rapport périodique sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

23.Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses treizième à quinzième rapports périodiques en un seul document d’ici au 24 mai 2015, en tenant compte des directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité l’engage également à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports présentés au titre d’un instrument et la limite de 60 à 80 pages pour le document de base commun (voir les directives harmonisées figurant dans le document HRI/GEN.2/Rev.6, par. 19).