Nations Unies

CMW/C/MAR/CO/1

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

8 octobre 2013

Original: français

Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant le rapport initial du Maroc, adoptées par le Comité à sa dix-neuvième session (9-13 septembre 2013)

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Maroc (CMW/C/MAR/1) à ses 235e et 236e séances (CMW/C/SR.235 et 236), tenues les 10 et 11 septembre 2013, et a adopté les observations finales ci-après à sa 241e séance (CMW/C/SR.241), le 13 septembre 2013.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du rapport initial de l’État partie et le remercie des réponses écrites (CMW/C/MAR/Q/1/Add.1) qu’il a apportées à la liste des points à traiter, même s’il regrette que le rapport ait été soumis avec retard.

3.Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau, qui était dirigée par le Ministre de l’emploi et de la formation professionnelle, M. Abdelouahad Souhail et le Délégué interministériel aux droits de l’homme, M. Mahjoub El Haiba, et était composée du Représentant permanent du Royaume du Maroc auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et des représentants de divers ministères et de la Mission permanente. Le Comité apprécie le dialogue qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité, même si de nombreuses réponses étaient incomplètes et pas suffisamment précises et claires.

4.Le Comité constate que certains pays où sont employés un grand nombre de travailleurs migrants marocains ne sont pas encore parties à la Convention, ce qui constitue un obstacle à l’exercice par ces travailleurs des droits que leur reconnaît la Convention.

B.Aspects positifs

5.Le Comité note avec satisfaction les mesures législatives et politiques ci-après:

a)L’adoption d’une nouvelle Constitution, en juillet 2011, laquelle donne la primauté aux traités internationaux dûment ratifiés sur le droit national interne et prévoit l’harmonisation de la législation nationale;

b)La création en 2011 du nouveau Conseil national des droits de l’homme en tant qu’institution nationale des droits de l’homme, en conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris);

c)La création d’un département ministériel chargé de la communauté marocaine résidant à l’étranger, du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger et de la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l’étranger;

d)La mise en œuvre des programmes et mesures de coopération avec des organismes internationaux spécialisés, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), tel que le mémorandum d’entente en matière de coopération pour les retours volontaires des migrants irréguliers, ainsi que les nombreux séminaires sur les droits des travailleurs migrants, y compris le séminaire régional «Gouvernance des migrations et droits de l’homme» qui a eu lieu à Rabat le 5 juillet 2013.

6.Le Comité salue hautement l’initiative de S. M. le Roi Mohammed VI prônant une nouvelle gouvernance en matière de gestion des questions migratoires, fondée sur une approche humaniste, les engagements internationaux de l’État partie et des partenariats rénovés.

7.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Conseil national des droits de l’homme, institution nationale des droits de l’homme, contenant des recommandations pertinentes pour des réformes structurelles en matière de gestion migratoire.

8.Outre les instruments internationaux de droits de l’homme déjà ratifiés, le Comité note avec satisfaction que l’État partie a récemment ratifié les suivants:

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2013;

b)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2011;

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif, en 2009.

C.Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations

1.Mesures d’application générales (art. 73 et 84)

Législation et application

9.Le Comité prend note avec satisfaction de l’engagement exprimé par l’État partie de veiller à une harmonisation de la législation nationale avec la Convention et au développement d’une politique migratoire globale, comprenant les requérants d’asile et les réfugiés. Le Comité est toutefois préoccupé du fait que la loi no 02-03 du 11 novembre 2003 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières (ci-après la loi no 02-03) contient des dispositions qui ne sont pas en conformité avec les obligations internationales en matière de droits de l’homme, et en particulier avec les dispositions de la Convention.

10.  Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures pour mettre en harmonie la loi n o 02-03 avec les dispositions de la Convention, en vue d’étendre la protection des droits consacrés dans la Convention à tous les travailleurs migrants et aux membres de leur famille dans l’État partie . Le Comité recommande également à l’État partie de veiller à ce que la politique globale migratoire en cours d ’élaboration se réfère aux différents instruments internationaux de s droits de l’homme et plus particulièrement à la Convention . Par la suite, le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à surveiller l’application de la législation relative aux travailleurs migrants, ainsi que celle de la Convention.

11.Le Comité salue les démarches initiées par l’État partie pour faire la déclaration prévue à l’article 77 de la Convention et reconnaître la compétence du Comité pour recevoir des communications présentées par des particuliers. Cependant, le Comité regrette qu’aucune démarche n’ait été initiée pour faire la déclaration prévue à l’article 76.

12. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les actions pour faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention.

13.Le Comité salue les mesures prises par l’État partie en vue de la ratification des Conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) no 143 (1975) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) et no 189 (2011) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, ainsi que son engagement dans la procédure de ratification de la Convention no 97 (1949) sur les travailleurs migrants (révisée).

14. Le Comité invite l’État partie à poursuivre les actions allant dans le sens de la ratification des Conventions n os 97, 143 et 189 de l’OIT.

Collecte de données

15.Le Comité regrette le manque de données et statistiques précises et fiables sur la plupart des questions liées aux migrations. Il rappelle que ces informations sont indispensables pour comprendre la situation migratoire dans l’État partie et pour évaluer le niveau de mise en œuvre de la Convention. Le Comité regrette également que, selon les informations reçues, il existe des chiffres contradictoires concernant les travailleurs migrants marocains et les membres de leur famille qui se trouvent à l’étranger, y compris ceux qui sont en situation irrégulière.

16.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données ventilées sur les domaines et les conditions dans lesquels les travailleurs migrants sont employés, y compris ceux en situation irrégulière, ainsi que sur leur jouissance des droits qui leur sont reconnus par la Convention. Le Comité demande aussi des renseignements sur le nombre de travailleurs migrants marocains et de membres de leur famille se trouvant à l’étranger, y compris ceux qui sont en situation irrégulière. En l’absence d’informations précises, le Comité souhaiterait obtenir des données fiables, fondées sur des sondages ou des estimations crédibles.

Formation et diffusion de la Convention

17.Le Comité note les efforts faits par l’État partie pour la diffusion et la publication de la Convention. Cependant, le Comité est préoccupé par l’absence de programmes spécifiques de formation sur le contenu de la Convention destinés aux fonctionnaires concernés, en particulier les juges, les fonctionnaires de police, les agents d’immigration, les inspecteurs de travail, les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé, les acteurs au niveau local et les organisations de la société civile, ainsi que par l’absence de mesures concrètes visant à diffuser la Convention au public en général.

18. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’intensifier de manière concrète la formation de tous les fonctionnaires qui travaillent dans le domaine des migrations d e travail , en particulier les fonctionnaires de police et les agents de contrôle aux frontières, ainsi que les fonctionnaires s’occupant des travailleurs migrants au niveau local et les agents consulaires;

b) D ’adopter les mesures pratiques pour garantir l’accès des travailleurs migrants à l’information et l eur fournir une orientation sur les droits que leur reconnaît la Convention;

c) De poursuivre la collaboration avec les organisations de la société civile pour diffuser et promouvoir la Convention.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

19.Le Comité est profondément préoccupé des informations reçues concernant la discrimination dont sont victimes les travailleurs migrants dans l’État partie. Le Comité regrette notamment les informations reçues indiquant que les travailleurs migrants d’origine subsaharienne sont victimes de discrimination raciale et souffrent de représentations racistes dans les médias.

20. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille se trouvant sur son territoire ou relevant de sa juridiction jouissent sans discrimination aucune des droits reconnus par la Convention, conformément à l’article 7. Le Comité recommande également à l’État partie de prendre sans délai des mesures efficaces pour lutter contre la stigmatisation sociale et raciale envers les travailleurs migrants, particulièrement les travailleurs migrants subsahariens. Le Comité invite l’État partie à adopter une loi contre le racisme et toute discrimination raciale, ainsi qu’à mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation à ce sujet.

Droit à un recours utile

21.Le Comité note, d’après les informations fournies par l’État partie, que les travailleurs migrants et les membres de leur famille disposent de toutes les voies de recours face à un abus de pouvoir ou une violation de leurs droits. Cependant, le Comité est fortement préoccupé par l’absence d’information sur les cas de plainte pour des violations des droits des travailleurs migrants, ce qui reflète les difficultés auxquelles les travailleurs migrants et les membres de leur famille se heurtent lorsqu’ils souhaitent exercer un recours pour la violation de leurs droits fondamentaux.

22. Le Comité rappelle à l’État partie que la simple absence de plaintes ou d’actions en justice de la part de travailleurs migrants dont les droits ont été violés peut être, en grande partie, le reflet d’une insuffisance de la législation s’y rapportant, d’une ignorance des recours existants ou du manque de volonté des autorités d’engager des poursuites. Il recommande à l’État partie de diffuser de l’information auprès des travailleurs migrants et des membres de leur famille, y compris ceux en situation irrégulière, de les informer des recours judiciaires ou autres qui leur sont ouverts et de traiter leurs plaintes le plus efficacement possible. Il recommande aussi à l’État partie de garantir que les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux en situation irrégulière, aient les mêmes possibilités que les nationaux de porter plainte et d’exercer un recours utile devant les tribunaux s’ils ont été atteints dans les droits que leur reconnaît la Convention.

3.Droits de l’homme de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 35)

23.Le Comité note avec préoccupation que la loi no 02-03 punit d’amende ou d’emprisonnement toute personne qui quitte le territoire marocain de façon clandestine. La loi dispose également que tout étranger résidant au Maroc, quelle que soit la nature de son titre de séjour, peut quitter librement le territoire national à l’exception de l’étranger à l’encontre duquel est prononcée une décision administrative l’obligeant à déclarer à l’autorité administrative son intention de quitter le territoire marocain.

24. C ompte tenu de l’article 8 de la Convention, le Comité recommande à l’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille puissent librement quitter l’ État partie, y compris les travailleurs migrants marocains et les membres de leur famille.

25.Le Comité déplore que la loi no 02-03 (chapitres VII et VIII)érige en infraction pénale la migration irrégulière et que des sanctions d’emprisonnement et des amendes soient prévues pour les travailleurs migrants marocains et étrangers en situation irrégulière. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni les informations sur l’application de ces dispositions légales dans la pratique ni sur le nombre de travailleurs migrants placés en rétention administrative ou en détention judiciaire.

26. C ompte tenu de son o bservation générale n o 2 (2013) sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et d es membres de leur famille, le Comité considère que l’entrée ou la sortie d’un travailleur migrant de l’ État partie , sans la documentation requise, ainsi que le séjour au-delà de la durée de validité d’un permis de séjour ne peu vent être considéré s comme des infraction s pénale s . Par conséquent, le Comité recommande à l’État partie de dé pénaliser la migration irrégulière et de prévoir des sanctions administratives adéquates .

27.Tout en notant que l’État partie a criminalisé tous les actes de torture dans les articles 231 et suivants de la loi no 43-04 du 14 février 2006, le Comité est extrêmement préoccupé des informations reçues selon lesquelles les travailleurs migrants en situation irrégulière sont victimes de violences physique et morale, y compris de violence sexuelle, de violence extrême, pouvant même entraîner la mort, ainsi que de divers mauvais traitements de la part de certains services de sécurité, ainsi que des groupes criminels dans l’État partie. D’après ces informations, le Comité note que parmi les victimes de la violence se trouvent des mineurs non accompagnés et des femmes enceintes. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné d’informations sur les mesures prises pour redresser cette situation et fournir la protection nécessaire aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille.

28. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures et d’intensifier ses efforts visant à remédier d’urgence aux problèmes des mauvais traitements et autres actes de violence commis contre les travailleurs migrants et les membres de leur famille, quels que soient les auteurs de ces actes. En particulier, le Comité recommande à l’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Veiller à ce que les travailleurs migrants et les membres de leur famille aient accès à des mécanismes de plaintes indépendants, ainsi qu’ à des services de conseils légaux et à des interprètes ;

b) Veiller à ce que tout acte de torture ou traitement cruel, inhumain ou dégradant , ainsi que toute atteinte à la vie des travailleurs migrants fasse nt l’objet d’enquêtes et d’ investigations ;

c) Veiller à ce que les responsables soient jugés et condamnés de façon appropriée ;

d) Organiser , pour les fonctionnaires de police et l es agents de contrôle aux frontières , des formations sur le respect des droits de l’homme, le non - usage de la violence et plus particulièrement sur le contenu de la Convention.

29.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour garantir un accès aux services de santé à tous les travailleurs migrants quel que soit leur statut, dans les mêmes conditions que les nationaux. Cependant, le Comité déplore les informations indiquant que la plupart des travailleurs migrants, surtout ceux en situation irrégulière, rencontrent des difficultés de prise en charge ou de traitement en cas d’urgence et que la plupart d’entre eux ont peur d’être arrêtés par les autorités s’ils demandent de l’aide médicale. Le Comité regrette également que les travailleurs migrants, surtout ceux, en situation irrégulière aient souvent des conditions de vie précaires, sans accès aux services sanitaires de base.

30. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place des mesures effectives qui assurent aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille, y compris ceux en situation irrégulière, l’accès aux soins médicaux d’urgence , ainsi qu’aux services sanitaires de base . Le Comité recommande également de mener des campagnes de sensibilisation auprès des praticiens de la santé sur les droits des travailleurs migrants.

31.Le Comité note avec préoccupation des informations reçues selon lesquelles l’État partie mène des expulsions collectives de travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille vers l’Algérie et la Mauritanie et que souvent les migrants, notamment des femmes enceintes et des mineurs non accompagnés, sont abandonnés dans des zones désertiques y compris dans des zones minées et des zones où ils sont susceptibles d’être victimes de violences, y compris, pour les femmes, de violences sexuelles, dans des conditions de précarité qui les rendent plus vulnérables à des agressions et à l’exploitation. Tout en notant que l’État partie a fait des efforts pour mettre en place des mécanismes de surveillance, le Comité note que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour assurer l’application des dispositions légales concernant l’expulsion ou le refoulement.

32. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures appropriées pour mettre en place un cadre juridique régissant les procédures d’expulsion/de renvoi conformément aux dispositions de la Convention et de prendre en compte l’ o bservation g énérale n o 2 du Comité qui énonce en particulier que les intéressés ont le droit de faire valoir les raisons pour lesquelles ils ne devraient pas être expulsés et de faire examiner leur cas par une autorité compétente. Le Comité recommande également à l’État partie de créer des mécanismes de surveillance qui garantissent que les reconduites à la frontière des migrants sont faites dans le strict respect des normes internationales relatives aux migrants.

33.Le Comité note que l’article 19 de la loi no 02-03 établit dans quels cas le titre de séjour peut être retiré aux étrangers. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les autorités marocaines confisquent et détruisent de manière systématique et arbitraire les documents des travailleurs migrants refoulés à la frontière, lorsqu’ils essayent de faire valoir leurs droits.

34. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures adéquates pour mettre un terme aux abus et aux violations dont sont victimes les travailleurs migrants et les membres de leur famille. En particulier, il prie instamment l’État partie de créer un mécanisme de surveillance des activités des autorités marocaines chargées d es procédures de migration ou impliquées dans ces procédures afin de garantir que les abus et les violations commis à l’encontre de travailleurs migrants et des membres de leur famille, tels que la confiscation et la destruction de leurs documents d’identité, fassent l’objet d’une enquête et que les responsables soient poursuivis et sanctionnés, conformément à l’article 21 de la Convention.

35.Tout en notant qu’un projet de loi sur les travailleurs domestiques a été adopté par le Conseil du gouvernement de l’État partie, le 2 mai 2013 et soumis au Parlement, le 8 août 2013, le Comité note avec préoccupation que les travailleurs domestiques migrants, y compris ceux en situation irrégulière, et en particulier les femmes, sont particulièrement exposés à différentes formes d’exploitation.

36. Le Comité recommande à l’ État partie de se conformer, dans son projet de loi sur les travailleurs domestiques , aux dispositions de la Convention, et de prendre en compte les éléments prévus dans l’ o bservation générale n o 1 (2010) du Comité sur les travailleurs domestiques migrants, à savoir:

a) Des inspections d u travail pour surveille r les conditions de travail des travailleurs domestiques migrants ;

b) L’imposition de sanctions et autres pénalités aux employeurs qui exploitent des travailleurs domestiques migrants ou qui les soumettent au travail forcé et leur infligent des sévices, en particulier dans le cadre de l’économie informelle ;

c) L’accès à des mécanismes efficaces pour porter plainte contre les employeurs et obtenir que ceux qui sont responsables de pratiques abusives soient poursuiv is et sanctionn és .

37.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour donner accès à tous les travailleurs migrants à l’enregistrement des naissances. Cependant, le Comité note avec préoccupation que, dans la pratique, les travailleurs migrants, surtout ceux en situation irrégulière, se heurtent à des obstacles administratifs lorsqu’ils veulent faire enregistrer une naissance.

38. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour assurer à tout enfant de travailleur migrant, y compris ceux en situation irrégulière , l’enregistrement de sa naissance.

39.Le Comité note avec préoccupation que les enfants des travailleurs migrants font face à des difficultés pour accéder à l’éducation du fait des conditions requises comme la présentation d’un acte de naissance, le certificat de résidence, l’attestation de travail des parents, l’attestation de scolarité ou certificat d’équivalence, si l’enfant a déjà bénéficié d’un enseignement dans son pays d’origine, ainsi que l’âge limite pour l’inscription et la maîtrise de la langue arabe comme condition préalable à l’inscription.

40. Le Comité recommande à l’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les enfants des travailleurs migrants , y compris ceux en situation irrégulière , aient accès à l’éducation sur la base de l’égalité de traitement. Le Comité recommande également à l’ État partie de mettre en place des programmes, politiques et des mécanismes pour prévenir la discrimination dans le système scolaire. Le Comité invite l’ État partie à prendre toutes les dispositions nécessaires pour faire figurer dans son prochain rapport périodique des données ventilées par sexe, âge et nationalité sur le nombre d ’enfants d e travailleurs migrants dans les établissements primaires et secondaires, y compris lorsque les enfants ou leurs parents sont en situation irrégulière.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou en situation régulière (art. 36 à 56)

41.Le Comité note avec satisfaction que la Constitution marocaine reconnaît aux Marocains résidant à l’étranger le droit d’être électeurs et éligibles. Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour permettre aux travailleurs migrants marocains résidant à l’étranger de participer au référendum constitutionnel de 2011 mais regrette qu’il n’existe pas encore de moyens pour assurer leur participation dans des élections.

42. Le Comité encourage l’État partie à prendre des mesures pour assurer l’exercice du droit de vote à tous les travailleurs migrants marocains qui vivent à l’étranger.

5.Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

43.Le Comité prend note des mécanismes mis en place par l’État partie en collaboration avec l’OIM pour assurer une réinsertion économique et sociale des travailleurs migrants marocains retournés volontairement dans l’État partie. Cependant, le Comité regrette de ne pas avoir d’informations précises sur la mise en œuvre de ces mécanismes. Vu les informations fournies, le Comité note l’insuffisance des mesures qui, tenant compte des préoccupations des travailleurs migrants marocains expulsés du territoire algérien par le passé, visent à promouvoir des conditions économiques adéquates pour leur réinstallation et à faciliter leur réintégration sociale et culturelle durable dans l’État partie, en application de l’article 67 de la Convention.

44. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour assurer la réinsertion des M arocains qui sont revenus dans l’État partie. Le Comité recommande également à l’État partie de prendre , conformément à l’article 67 de la Convention, des mesures effectives à l’égard des M arocains expulsés du territoire algérien . Le Comité invite l’État partie à fournir des informations sur ce sujet dans son prochain rapport périodique . Le Comité invite également l’État partie à fournir des informations sur les efforts de coopération internationale menés en application de l’article 64 de la Convention.

45.Le Comité prend note de l’aide fournie par l’État partie aux travailleurs migrants marocains à l’étranger, par des programmes d’appui juridique, d’assistance administrative et sociale et d’autres programmes culturels et éducatifs, ainsi que par le renforcement des postes consulaires. Cependant, le Comité regrette l’absence d’information sur l’influence de ces programmes et sur la façon dont les travailleurs migrants marocains résidant à l’étranger en bénéficient.

46. Le Comité recommande à l’ État partie de s’assurer que ses autorités consulaires ou diplomatiques fournissent des renseignements et une aide appropriée aux travailleurs migrants marocains et aux membres de leurs familles vivant à l’étranger , y compris ceux en situation irrégulière .

47.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, notamment la stratégie nationale de lutte contre le trafic des êtres humains de 2007, mais noteavec préoccupation,suite à la prise en compte des informations reçues,qu’au sein de l’État partie certaines femmes migrantes sont soumises de force à la prostitution et des migrants sont soumis au travail forcé. Le Comité note également que des hommes, des femmes et des enfants marocains sont soumis à la prostitution et au travail forcé en Europe et au Moyen-Orient. Le Comité note avec préoccupation que les victimes de la traite craignent de porter plainte de peur d’être expulsés et que peu de trafiquants sont jugés et condamnés. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni des données précises qui permettraient de connaître l’ampleur de cette pratique dans le pays, en particulier sur le nombre de victimes. Le Comité regrette également l’absence de loi et de politique de lutte contre la traite des êtres humains, ainsi que le caractère limité des mesures mises en œuvre pour prévenir la traite, pour protéger et pour aider les victimes.

48. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que sa stratégie nationale de lutte contre l e trafic des êtres humains compren ne notamment les mesures suivantes:

a) Adopter une loi relative à la lutte contre la traite des personnes et à la protection des victimes de la traite;

b) Collecter systématiquement des données ventilées sur la traite des personnes;

c) Intensifier les campagnes de prévention, en particulier dans les zones frontalières où les victimes de la traite sont les plus nombreuses;

d) Mettre en place des mécanismes efficaces d ’identification, d e protection et d’ assistance à toutes les victimes de la traite, en particulier en leur offrant des centres d’ accueil et en lançant des projets pour les aider à reconstruire leur vie;

e) Renforcer la formation des policiers et autres membres des forces de l’ordre, des juges et des procureurs, des inspecteurs du travail, des enseignants ainsi que du personnel des services de santé, des ambassades et des consulats de l’État partie .

6.Suivi et diffusion

Suivi

49.Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son deuxième rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de prendre toutes les dispositions voulues pour que lesdites recommandations soient appliquées.

50. Le Comité prie l’État partie d’associer à l’élaboration de son deuxième rapport périodique les organisations de la société civile travaillant dans le domaine de la migration au niveau national.

Diffusion

51. Le Comité prie également l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organismes publics et du pouvoir judiciaire, des organisations non gouvernementales et autres membres de la société civile, et de prendre des mesures pour les faire connaître aux migrants marocains à l’étranger ainsi qu’aux travailleurs migrants étrangers en transit ou résidant au Maroc.

7Prochain rapport périodique

52. Le Comité invite l’État partie à soumettre son deuxième rapport périodique le  13  septembre 2018 au plus tard. L’État partie peut par ailleurs opter pour la procédure simplifiée de soumission de rapports, suivant laquelle le Comité établit à l’intention de l’État partie une liste de points à traiter. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport aux fins de l’article 73 de la Convention et le dispensent de soumettre son rapport selon la formule classique . Cette nouvelle procédure facultative a été adoptée par le Comité à sa quatorzième session, en avril 2011 (voir A/66/48, par. 26).

53. Le Comité prie l’État partie d’assurer une large participation de tous les ministères et organismes publics à l’établissement du prochain rapport et de consulter à cette occasion diverses organisations de défense des droits des travailleurs migrants et des droits de l’homme.

54. Le Comité invite l’État partie à suivre les d irectives harmonisées concernant l’établissement de s rapports destinés aux organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/2/Rev.6) , notamment les directives portant sur le document de base commun et les rapports propres à chaque instrument. Le document propre à la Convention ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun mis à jour ne devrait pas dépasser 80 pages.