Nations Unies

CRC/C/86/D/113/2020

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

24 février 2021

Français

Original : espagnol

Comité des droits de l’enfant

Décision adoptée par le Comité au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant uneprocédure de présentation de communications, concernant la communication no113/2020 * , **

Communication présentée par :

B. B. (représentée par José Luis Rodríguez Candela)

Victime(s) présumée(s) :

L. B., A. B., N. B. et K. B.

État partie :

Espagne

Date de la communication :

18 février 2020

Objet :

Droit à l’éducation d’enfants de nationalité marocaine nés à Melilla

1.L’auteure de la communication, B. B., de nationalité marocaine, vit à Melilla, semi‑enclave espagnole sur la côte méditerranéenne du Maroc. Elle soumet la communication au nom de ses quatre enfants, L. B., A. B., N. B. et K. B., âgés respectivement de 11, 9, 7 et 4 ans, au moment de la présentation de la communication. Bien qu’ils soient nés et aient vécu toute leur vie à Melilla, les enfants de l’auteure sont de nationalité marocaine et sont considérés comme des « résidents en situation irrégulière » à Melilla. L’auteure affirme que les droits que tiennent ses enfants des articles 2, 3, 28 et 29 de la Convention ont été violés. Elle est représentée par un avocat.

2.L’auteure a déposé une demande d’inscription de ses enfants à l’école primaire auprès de la direction provinciale de Melilla du Ministère de l’éducation et de la formation professionnelle le 8 mai 2019. Elle a fourni, entre autres documents, les actes de naissance de ses enfants, leurs passeports et leurs cartes d’assurance maladie délivrées à Melilla, et un rapport sur l’intégration sociale de la famille, établi par le Département de la protection sociale. Elle explique qu’elle essaie depuis des années d’inscrire ses enfants à l’école primaire. Cependant, jusqu’à présent, les autorités ne l’avaient jamais autorisée à soumettre une demande officielle.

3.Le 18 septembre 2019, la liste de tous les élèves admis pour l’année scolaire a été publiée. Il y était indiqué que les enfants de l’auteur n’étaient pas admis parce que tous les documents demandés n’avaient pas été fournis. Le 23 septembre 2019, l’auteure a pris contact avec les autorités pour savoir quels étaient les documents manquants, mais n’a reçu aucune réponse.

4.Le 8 novembre 2019, l’auteure a déposé un recours auprès du tribunal administratif no 3 de Melilla pour demander que ses enfants soient scolarisés ; elle a joint une demande de mesures de protection visant à éviter le préjudice irréparable que constituerait la perte de temps scolaire subie pendant le déroulement de la procédure. Le 6 février 2019, le tribunal a rejeté la demande de mesures de protection au motif qu’à ce stade de la procédure, l’octroi de telles mesures reviendrait à préjuger du fond de l’affaire. Le 12 février 2019, l’auteure a formé un recours contre le refus des mesures de protection auprès de la Cour supérieure de justice de Malaga. Au moment de la soumission de la présente communication au Comité, aucune décision n’avait encore été rendue.

5.L’auteure explique que ses enfants fréquentent le Foyer des étudiants marocains musulmans de Melilla. Cet établissement n’est pas reconnu comme un établissement d’enseignement officiel. Par conséquent, les enfants ne recevront pas de diplôme reconnu qui leur permettrait de trouver un emploi approprié dans leur lieu de résidence, ce qui les expose à un risque d’exclusion sociale et de stigmatisation. En outre, il s’agit d’un établissement religieux et les enfants sont contraints « de se former à la religion musulmane, […] ce qui viole le droit des mineurs et de leurs parents à la liberté de religion », consacré à l’article 14 de la Convention.

6.Le 25 février 2020, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son Groupe de travail des communications, a décidé d’enregistrer la communication et d’accorder des mesures provisoires, en demandant à l’État partie de veiller, avec effet immédiat, à ce que les enfants de l’auteure soient scolarisés tant que la communication serait à l’examen.

7.Au cours des mois suivants, les autorités judiciaires et administratives nationales ont continué à refuser d’inscrire les enfants de l’auteure à l’école, en faisant valoir que la demande de mesures provisoires du Comité n’était pas contraignante. Le 12 mars et le 22 avril 2020, le Comité a réitéré sa demande de mesures provisoires en rappelant le caractère obligatoire des mesures provisoires prévues à l’article 6 du Protocole facultatif.

8.Le 3 novembre 2020, l’auteure a informé le Comité que le père des enfants avait obtenu un permis de séjour dans la ville et avait pu inscrire les enfants sur les registres municipaux. Une fois enregistrés, les enfants ont été inscrits de manière permanente à l’école publique locale. L’auteur demande qu’il soit mis fin à l’examen de la communication, mais souligne que le fait de lier la scolarisation à l’inscription sur les registres municipaux, qui est presque impossible à obtenir à Melilla car de nombreux parents d’enfants marocains nés à Melilla sont en situation irrégulière, exclut un grand nombre d’enfants du système éducatif.

9.Réuni le 4 février 2021, le Comité des droits de l’enfant, après avoir examiné la demande de l’auteure tendant à ce qu’il soit mis fin à l’examen de la communication, constate que les enfants de l’auteure sont scolarisés. Même si cela ne constitue pas en soi une pleine réparation du préjudice subi du fait des violations alléguées de la Convention, il considère que la scolarisation des enfants rend la communication sans objet et décide de mettre fin à l’examen de la communication no 113/2020, conformément à l’article 26 de son règlement intérieur au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.