Nations Unies

CRPD/C/10/3

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

7 novembre 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Rapport intérimaire de suivi soumis au titre de l’article 5du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, adopté par le Comité des droits des personnes handicapées à sa dixième session (2‑13 septembre 2013)

A.Introduction

Le présent rapport est soumis en application de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du paragraphe 7 de l’article 75 du Règlement intérieur du Comité des droits des personnes handicapées. L’article 5 du Protocole facultatif se lit comme suit: «Le Comité examine à huis clos les communications qui lui sont adressées en vertu du présent Protocole. Après avoir examiné une communication, le Comité transmet ses suggestions et recommandations éventuelles à l’État Partie intéressé et au pétitionnaire.». Le paragraphe 7 de l’article 75 du Règlement intérieur du Comité se lit comme suit: «Le Rapporteur spécial ou le groupe de travail fait périodiquement rapport au Comité sur ses activités de suivi.».

Le présent rapport rend compte des renseignements reçus par le Rapporteur spécial chargé du suivi des constatations du Comité entre la neuvième et la dixième session conformément au Règlement intérieur du Comité ainsi que des analyses et décisions adoptées par le Comité au cours de sa dixième session. Les critères d’évaluation ont été les suivants:

Critères d’évaluation

Réponse ou mesure satisfaisante

A

Réponse satisfaisante dans l’ensemble

Réponse ou mesure partiellement satisfaisante

B1

Des mesures concrètes ont été prises, mais des renseignements supplémentaires sont nécessaires

B2

Des mesures initiales ont été prises, mais des renseignements supplémentaires sont nécessaires

Réponse ou mesure insatisfaisante

C1

Une réponse a été reçue, mais les mesures prises ne permettent pas de mettre en œuvre les constatations ou recommandations

C2

Une réponse a été reçue, mais elle est sans rapport avec les constatationsou recommandations

Absence de coopération avec le Comité

D1

Aucune réponse n’a été reçue à une ou plusieurs recommandationsou à une partie d’une recommandation

D2

Aucune réponse reçue après un ou plusieurs rappels

Les mesures prises vont à l ’ encontre des recommandations du Comité

E

La réponse indique que les mesures prises vont à l’encontre des constatations ou recommandations du Comité

B.Communications

Communication no 3/2011, H. M. c. Suède

Les constatations du Comité ont été adoptées le 19 avril 2012 et la réponse que l’État Partie a fournie, au titre du suivi, sur les mesures qu’il a prises pour donner suite aux constatations et aux recommandations du Comité, a été reçue le 26 octobre 2012. Les commentaires du conseil de l’auteure au sujet de la réponse que l’État partie a fournie au titre du suivi ont été reçus le 1er février 2013.

H. M. c.  Suède

N o  3/2011

Constatations

19 avril 2012

Première réponse de l ’ État partie

Attendue le 19 avril 2013 − reçue le 26 octobre 2012

Commentaires du conseil de l ’ auteur

1er février 2013

Paragraphe 9 1)

L ’État partie est tenu d’assurer à l’auteure une réparation pour la violation des droits qu’elle tient de la Convention consistant à faire en sorte que sa demande de permis de construire pour une piscine d’hydrothérapie soit réexaminée en tenant compte des constatations du Comité. L’État partie devrait également offrir à l’auteure une indemnisation appropriée pour les dépenses engagées pour soumettre la présente communication.

Résumé de la réponse de l ’ État partie

En 2011, le Gouvernement a adopté une stratégie nationale définissant sa politique en faveur des handicapés, en vue de mettre en œuvre la Convention. La Suède a soumis son rapport initial au Comité en 2011.

Selon la Constitution de la Suède, les questions locales et régionales d’intérêt public sont du ressort des autorités locales, en vertu du principe d’autonomie des collectivités locales (chap. 14, art. 2). Les tribunaux suédois sont indépendants à l’égard du Riksdag (leParlement suédois), duGouvernement et des autres autorités. Ni le Riksdag ni les autorités publiques (ni le Gouvernement, par conséquent) ne peuvent influer sur la décision d’un tribunal dans un cas d’espèce. LeGouvernement ne peut donc pas intervenir dans la prise de décisions concernant des cas particuliers d’octroi de permisde construire.

H. M. peut soumettre une nouvelle demande de permis de construire ou demander à la municipalité une notification des plans visant à modifier le plan de développement détaillé, qui serait examinée conformément à la loi sur la planification et la construction (2010:900) de mai 2011. Le principe de proportionnalité suppose de mettre en balance les avantages d’une décision donnée et les conséquences que cette décision peut avoir pour des intérêts privés contraires.

D’après la loi sur les autorisations d’adaptation des logements, il est possible d’obtenir l’autorisation de procéder à des travaux onéreux en cas d’achat d’un logement ou de déménagement, mais pour des motifs spécifiques. Ces motifs peuvent être la nécessité pour une personne handicapée de vivre à proximité d’un établissement de soins auquel elle doit avoir accès, ou l’impossibilité de trouver un autre logement adapté à ses besoins.

Quant à la recommandation du Comité invitant le Gouvernement à offrir à l’auteure une indemnisation appropriée au titre des dépenses encourues pour soumettre la présente communication, aucun engagement international ne contraint l’État partie à indemniser l’auteure pour les coûts induits par la procédure de plainte.

Résumé des commentaires du conseil de l ’ auteur

En invoquant la stratégie nationale en faveur des personnes handicapées eten faisantvaloir que la Constitution lui interdit d’intervenir contre une décision de justice, le Gouvernement laisse H. M. démunie de tout soutien pour faire appliquer la décisiondu Comité. LeGouvernement suédois doit trancher en dernier ressort, et intervenir quandil est démontré qu’une personne handicapée ne peut pas faire respecter les droits que lui reconnaît la loi.

Le Gouvernement invite H. M. à déposer une nouvelle demande de permis de construire, alors que le président du comité local chargé de la délivrance des permis de construire a précisé que le comité ne pouvait pas approuver une demande fondée sur le handicap de son auteur. Le comité considéré ne peut pas prendre de décision objective tenant compte des intérêts de la personne handicapée au regard du droit d’obtenir un permis de construire, alors qu’il existe un plan détaillé.

Quant au projet de modification du plan détaillé, le responsable local a expliqué personnellement que les besoins d’une personne handicapée ne pouvaient pas justifier l’introduction de modifications dans un plan de cette nature. En outre, l’élaboration et la modification d’un plan détaillé est un processus complexe et très long, qui fait intervenir plusieurs parties, et il n’est pas du tout certain que la question serait tranchée en faveur de H. M.

Le Gouvernement et les autorités nationales ont refusé de se saisir de l’affaire et ont donc fait preuve de discrimination à l’égard de la personne handicapée.

Au moment de s’installer, il y a plusieurs années, H. M. avait obtenu de la municipalité l’autorisation de modifier le logement. Depuis, sa santé s’est fortement détériorée et elle ne peut recevoir de soins et suivre un traitement de rééducation qu’à domicile pour éviter que son état s’aggrave. Le Gouvernement dit que H. M. pourrait faire une nouvelle demande de permis de construire si elle déménage pour des «motifs spécifiques», comme la nécessité d’habiter à proximité d’un centre de soins. Mais une nouvelle modification du bâtiment n’aurait aucun intérêt pour l’auteure, sauf à s’accompagner de l’autorisation de construirela piscine qui est nécessaire pour son traitement. Si rien n’est fait, H. M. n’aura d’autre choix que d’intégrer un établissement médicalisé. Elle ne devrait pas être contrainte de quitter sa maison à cause de l’incapacité des autorités à prendre des mesures adaptées enfaveur des personnes handicapées.

Les coûts induits par les procédures engagées s’élèvent à 35 000 couronnes suédoises (environ 4 035 euros). Le refus du Gouvernement d’offrir à l’auteure une indemnisation adéquate à ce titre constitue une nouvelle violation des droits de H. M., alorsmême qu’elle doit assumer le coût de ses soins médicaux et de l’adaptation de sa maison àses besoins. Enoutre, elle devrait aussi faire face à des dépenses supplémentaires si elle faisait une nouvelle demande de permis de construire, car les coûts correspondants ont beaucoup augmenté depuis sa première demande. Une personne handicapée ne devrait pas être pénalisée financièrement parce que les autorités ont pris des décisions déraisonnables.

Le Gouvernement n’a pas cherché à régler le problème rapidement, alors que la nature de l’affaire et les besoins particuliers de l’auteure de la communication appelaient une prompte réponse. Malheureusement, la stratégie nationale en faveur des personnes handicapées ne prend pas en compte les personnes handicapées qui ont besoin d’aide etde soutien. L’Étatpartie continue de violer la Convention.

Appréciation du Comité

[C1]: Les mesures prises n ’ ont pas permis de remédier à la situation.

Le Comité va demander à rencontrer un membre de la Mission permanente de l’État partie pour obtenir des précisions sur la position de la Suède au sujet des constatations du Comité, en faisant ressortir que la réponse qui a été apportée n’est pas satisfaisante. Une lettre réitérant la demande d’informations concernant les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité va être adressée à cette fin à l’État partie.

Paragraphe 9 2)

L ’État partie est tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir, en faisant notamment le nécessaire pour que la législation et la façon dont elle est appliquée par les juridictions nationales soient conformes aux obligations de l’État partie, qui lui imposent de veiller à ce que la législation n’ait pas pour objet ou pour effet d e compromettre ou réduire à néant la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, des droits des personnes handicapées.

Résumé de la réponse de l ’ État partie

L’examen des plaintes au titre du Protocole facultatif de la Convention devrait notamment reposer sur le principe qu’en cas d’allégation de violation la charge de la preuve incombe, au moins au début, à l’auteur. Les constatations du Comité n’abordent pas la question, qui a été soulevée par l’État partie dans ses observations.

L’auteure de la communication n’a pas pu apporter de preuve des circonstances factuelles sur lesquelles sa plainte est fondée. Elle n’a pas démontré que son droit à des soins médicaux et de réadaptation n’avait pas été respecté par le conseil de comté.

La législation suédoise est conforme aux articles de la Convention invoquéspar l’auteurede la communication. La compatibilité de la législation de la Suède avecles articles de laConvention ne peut pas être appréciée au regard de la seule loi sur la planification et laconstruction, qui n’a pas pour objet de faire respecter les droits des personnes handicapées. D’autres lois plus pertinentes doivent être prises en compte,comme la loi sur les soins de santé et les services médicaux. La législation suédoisedans son ensemble est compatible avec les articles invoqués par l’auteure de la plainte. Lesconstatations du Comité ne donnent pas matière à modifier la législation suédoise.

La Constitution de la Suède ne permet pas au Gouvernement d’influer sur les décisions prises dans des cas particuliers de demande de permis de construire.

Résumé des commentaires du conseil de l ’ auteur

Pas de commentaire.

Appréciation du Comité

[C1 ]: Les renseignements communiqués ne permettent pas de remédier à la situation .

Le Comité rappelle à l’État partie que les dispositions de la Convention ont force obligatoire pour chaque État partie pris dans sa globalité. Tous les organes du pouvoir (exécutif, législatif et judiciaire), de même que les autres autorités publiques ou gouvernementales, àtous les niveaux − national, régional ou local − peuvent engager la responsabilité de l’État partie. L’organe exécutif, qui représente généralement l’État partieà l’échelon international, ycompris devant le Comité, ne peut pas prendre argument du fait qu’une décision incompatible avec les dispositions de la Convention a été prise parun autre organe du Gouvernement pour soutenir que l’État partie n’est pas responsablede ladite décision et de l’incompatibilité qui en découle. Cette interprétation procède directementdu principe énoncé à l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, selon lequel un État partie «ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non‑exécution d’untraité».

S’agissant de la position de l’État partie au sujet de la conformité de la loi sur la planification et la construction avec la Convention, le Comité rappelle à l’État partie que tous les textes législatifs, quel qu’en soit l’objet, doivent être appliqués d’une manière compatible avec les normes internationales relatives aux droits de l’homme, et que toutes les modifications et tous les ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas à l’État partie de charges disproportionnées ou indues doivent être apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales.

Le Comité prie l’État partie de bien vouloir donner des renseignements complémentaires sur: a) les mesures prises pour donner suite à ses constatations et à sa recommandationdans l’affaire H. M.  c. Suède; et b) la possibilité, selon la législation nationale et locale applicable, d’accorder un permis de construire à titre exceptionnel en vertu du principe de l’aménagement raisonnable.

Paragraphe 10

Conformément à l’article 5 du Protocole facultatif et à l’article 75 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie est invité à transmettre au Comité, dans un délai de six mois, une réponse écrite dans laquelle il indiquera toute mesure qu’il aura pu prendre à la lumière des constatations et recommandations du Comité. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations, à les faire traduire dans la langue officielle et à les diffuser largement, sous des formes accessibles, auprès de tous les secteurs de la population.

Résumé de la réponse de l ’ État partie

Les recommandations du Comité ont été traduites en suédois et envoyées au représentantde l’auteure de la communication et aux représentants des associations de handicapés. LeGouvernement a présenté oralement les constatations du Comité lors d’une réunionde concertation sur la Convention, le 31 août 2012. Les constatations du Comité (version originale et traduction) sont disponibles en ligne sur le site gouvernemental consacré aux droits de l’homme depuis le 10 septembre 2012, et seront prochainement accessibles sous forme de documents au format PDF et Word.

La traduction des recommandations en suédois sera aussi retranscrite dans des termesà la portée de tous. Un résumé des constatations du Comité est actuellement en cours d’élaboration au Ministère des affaires étrangères. Il sera lui aussi publié sur le site Internet gouvernemental consacré aux droits de l’homme à des formats accessibles. Lesdocuments peuvent aussi être convertis sur demande à un autre format accessible.

Résumé des commentaires du conseil de l ’ auteur

Pas de commentaire.

Appréciation du Comité

[B2]: Une première série de mesures a été prise, mais des mesures supplémentaires et un complément d’information sont nécessairespour garantir la pleine mise en œuvre des mesures annoncées par l’État partie.

Recommandations de suivi

Poursuivre le dialogue, compte tenu des constatations C1/C1/B2 (mesures initiales insatisfaisantes).

Une lettre rendant compte de l’analyse du Comité sera adressée à l’État partie pour inviter la Mission permanente à une réunion avec le Rapporteur spécial chargé du suivi des constatations, le Rapporteur spécial sur les nouvelles communications et le Président du Comité.