Nations Unies

CCPR/C/IRN/CO/3

Pacte international relatifaux droits civils et politiques

Distr. générale

29 novembre 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

103esession

17 octobre-4 novembre 2011

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

République islamique d’Iran

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le troisième rapport périodique de la République islamique d’Iran (CCPR/C/IRN/3) à ses 2834e, 2835e et 2836e séances (CCPR/C/SR.2834, 2835 et 2836), les 17 et 18 octobre 2011. À ses 2857e et 2858e séances (CCPR/C/SR.2857 et 2858), le 2 novembre 2011, il a adopté les observations finales ci‑après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de la République islamique d’Iran. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte de renouer le dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures prises pendant la période considérée pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte. Le Comité remercie l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/IRN/Q/3/Add.1) qu’il a apportées à la liste de points à traiter (CCPR/C/IRN/Q/3) et qui ont été complétées oralement par la délégation.

3.Le Comité note avec regret toutefois qu’il s’est écoulé dix-huit ans entre l’examen du deuxième et l’examen du troisième rapport périodique et il espère que l’engagement constructif de l’État partie avec le Comité à sa 103e session se poursuivra par une application effective des recommandations faites et par la soumission dans les délais du quatrième rapport périodique.

B.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction:

a)La signature du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en septembre 2010;

b)L’adhésion à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, en octobre 2009;

c)L’adhésion au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en septembre 2007;

d)La ratification de la Convention relative aux droits de l’enfant, en juillet 1994.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité note avec préoccupation que le système juridique de l’État partie fait référence à certains préceptes religieux en tant que normes primaires.

L’État partie devrait faire en sorte que toutes les obligations énoncées dans le Pacte soient entièrement respectées et que les dispositions des normes internes ne soient pas invoquées pour justifier la non-exécution des obligations qui lui incombent en vertu du Pacte.

6.Le Comité note avec préoccupation que la place des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme dans le droit interne n’est pas précisée dans le système juridique, ce qui entrave la pleine réalisation des droits protégés par le Pacte.

L’État partie devrait assurer la mise en œuvre et l’application effectives des dispositions du Pacte, indépendamment de la place qu’a le Pacte dans le droit interne.

7.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore mis en place une institution nationale compétente dans le domaine des droits de l’homme, conformément aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale) (art. 2).

L’État partie devrait envisager de mettre en place une institution nationale des droits de l’homme ayant un mandat étendu dans le domaine des droits de l’homme et la doter de ressources humaines et financières suffisantes, conformément aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe).

8.En dépit des progrès réalisés dans le domaine de l’éducation des femmes, le Comité relève avec préoccupation le faible nombre de femmes qui occupent des postes de décision dans le secteur public. Il est également préoccupé par le fait qu’un certain nombre de postes publics n’ont jamais été occupés par des femmes, par exemple au Conseil des gardiens ou à des échelons élevés du Conseil de discernement, et que les femmes sont exclues de certaines fonctions publiques, comme la charge de juge (art. 2 et 26).

L’État partie devrait prendre des mesures pour augmenter le nombre de femmes dans les organes de prise de décisions et les organes judiciaires à tous les niveaux et dans tous les domaines. Il devrait également organiser des programmes spéciaux de formation à l’intention des femmes et des campagnes régulières de sensibilisation dans ce domaine.

9.Le Comité note avec préoccupation l’inégalité de traitement dont les femmes continuent de faire l’objet en ce qui concerne le mariage et l’héritage (art. 2 et 26).

L’État partie devrait modifier le Code civil et apporter d’autres modifications au projet de loi sur la protection de la famille de façon à a)supprimer l’obligation d’obtenir l’approbation du père ou du grand-père paternel pour légaliser un mariage; b)accorder à la femme les mêmes droits qu’à l’homme en matière de divorce; c)donner à la mère des droits égaux en matière de garde de l’enfant, même quand celui-ci a atteint l’âge de 7 ans ou si la mère se remarie; d) accorder la garde de l’enfant à la mère en cas de décès du père; e)accorder aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes en matière d’héritage; f) supprimer l’obligation faite par la loi à la femme d’obéir à son mari; g) supprimer l’obligation faite à toute femme qui souhaite sortir du pays d’obtenir le consentement de son mari; h)interdire la polygamie; i)abolir le pouvoir conféré à l’homme d’interdire à sa femme de travailler. L’État partie devrait également adopter un texte de loi pour donner aux Iraniennes le droit de transmettre leur nationalité à leurs enfants.

10.Le Comité est préoccupé par le fait que les homosexuels, bisexuels et transgenres sont victimes de harcèlement, de persécution et de peines cruelles et risquent même la peine de mort. Il s’inquiète également de ce que ces personnes soient l’objet d’une discrimination fondée sur leur orientation sexuelle, notamment dans l’accès à l’emploi, au logement, à l’éducation et aux soins de santé, ainsi que d’une exclusion sociale dans la collectivité (art. 2 et 26).

L’État partie devrait abroger ou modifier tout texte législatif qui prévoit ou peut entraîner une discrimination, des poursuites et des peines à l’encontre de personnes du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Il devrait faire en sorte que quiconque se trouve en détention uniquement au motif de relations sexuelles librement et mutuellement consenties ou de son orientation sexuelle soit remis en liberté immédiatement et sans condition. L’État partie devrait également prendre toutes les mesures d’ordre législatif, administratif et autre nécessaires pour faire disparaître et interdire la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, notamment en ce qui concerne l’accès à l’emploi, au logement, à l’éducation et aux soins de santé, et pour garantir que les personnes ayant une orientation sexuelle ou une identité de genre différente soient protégées contre la violence et l’exclusion sociale au sein de la collectivité. Le Comité réaffirme que toutes ces questions entrent entièrement dans le champ des droits consacrés par le Pacte et relèvent donc de son mandat. Il engage instamment l’État partie à faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur l’exercice par les homosexuels, bisexuels et transgenres des droits contenus dans le Pacte.

11.Le Comité est préoccupé par l’absence dans le Code pénal de dispositions spécifiques relatives à la violence au foyer ainsi que par le fait que les cas de violence au foyer ne font pas l’objet d’enquêtes, et que les responsables ne sont pas poursuivis ni punis. Il s’inquiète également de ce que le mari est dispensé de la peine fixée pour homicide volontaire dans le cas où il tue sa femme qu’il soupçonne d’adultère (art. 2 et 26).

L’État partie devrait adopter un texte législatif criminalisant la violence au foyer et prendre des mesures pour lutter efficacement contre la violence au foyer. Il devrait faire en sorte que les victimes aient immédiatement accès à des moyens de réparation et de protection, notamment en mettant en place un nombre suffisant de refuges pour les victimes. L’État partie devrait veiller à ce que les actes de violence au foyer fassent l’objet d’enquêtes effectives et que les auteurs soient poursuivis et punis. Il devrait faire en sorte que le mari ne soit pas dispensé de la peine fixée pour homicide volontaire dans le cas où il tue sa femme qu’il soupçonne d’adultère.

12.Le Comité est toujours profondément préoccupé par le nombre extrêmement élevé, et en augmentation, des condamnations à mort prononcées et exécutées dans l’État partie, par la liste étendue des infractions pour lesquelles la peine capitale est appliquée et leur définition souvent vague ainsi que par le grand nombre de crimes emportant la peine de mort et par les méthodes d’exécution. Le Comité est également préoccupé par le fait que les exécutions sont toujours publiques et que la lapidation continue d’être employée comme méthode d’exécution. Il note aussi avec préoccupation le nombre élevé d’exécutions dans les régions où vivent des minorités ethniques (art. 6 et 7).

L’État partie devrait envisager d’abolir la peine de mort ou à tout le moins de réviser le Code pénal de façon à limiter la peine capitale exclusivement aux «crimes les plus graves» au sens du paragraphe2 de l’article6 du Pacte et de l’Observation générale no6 (1982) du Comité relative au droit à la vie. Il devrait veiller à ce que, chaque fois que la peine capitale est prononcée, les prescriptions des articles 6 et 14 du Pacte soient entièrement respectées. Il devrait également veiller à ce que toute personne condamnée à mort, après avoir épuisé toutes les voies de recours légales, ait effectivement la possibilité d’exercer le droit de solliciter la grâce ou la commutation de peine auprès des autorités compétentes. L’État partie devrait en outre interdire les exécutions publiques ainsi que la lapidation comme méthode d’exécution.

13.Le Comité est profondément préoccupé par le fait que des mineurs continuent d’être exécutés et que la peine de mort continue d’être prononcée dans le cas de personnes dont il est établi qu’elles ont commis l’infraction alors qu’elles n’avaient pas 18 ans, ce qui est interdit par le paragraphe 5 de l’article 6 du Pacte (art. 6).

L’État partie devrait immédiatement mettre un terme aux exécutions de mineurs et apporter de nouvelles modifications au projet de loi relatif aux enquêtes sur les infractions commises par des mineurs et au projet de Code pénal islamique de façon à abolir la peine de mort pour les crimes commis par des mineurs.Il devrait également commuer la peine capitale dans tous les cas où le condamné a commis le crime alors qu’il avait moins de 18ans.

14.Le Comité est profondément préoccupé par les informations faisant état de l’utilisation généralisée de la torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de détention, en particulier sur des personnes accusées d’atteinte à la sécurité nationale ou jugées par des tribunaux révolutionnaires, traitements qui dans certains cas ont causé la mort du détenu. Le Comité est également préoccupé par le fait que des aveux forcés ont été utilisés comme preuve principale pour obtenir la condamnation des accusés (art. 7).

L’État partie devrait veiller à ce qu’une enquête soit ouverte dans tous les cas où il est signalé que dans des lieux de détention des tortures et des traitements cruels, inhumains ou dégradants ont été appliqués et à ce que les auteurs de ces actes soient poursuivis et punis comme il convient. Il devrait faire en sorte que des moyens effectifs de réparation, notamment une indemnisation adéquate, soient accordés à chaque victime. L’État partie devrait également garantir qu’aucune personne ne soit contrainte de témoigner contre elle-même ou d’autres ou de s’avouer coupable et que ces «aveux» ne soient en aucun cas acceptés comme preuve par un tribunal, si ce n’est contre la personne accusée de torture ou d’autres mauvais traitements pour établir que des «aveux» ou une autre déclaration ont été faits.

15.Le Comité est préoccupé par le fait qu’aucune enquête complète, impartiale et indépendante n’a été menée sur les allégations d’homicide, de torture et autres mauvais traitements commis pendant et après les élections présidentielles du 12 juin 2009 et que les agents de l’État de rang élevé qui étaient responsables n’ont pas été tenus de rendre compte de leurs actes (art. 6 et 7).

L’État partie devrait ouvrir d’urgence une enquête complète, impartiale et indépendante sur les allégations d’homicide, de torture et autres mauvais traitementscommis pendant et après les élections présidentielles du 12juin 2009, et engager des poursuites contre les agents de l’État dont la responsabilité est établie.

16.Le Comité est préoccupé par le fait que les châtiments corporels continuent d’être imposés par les autorités judiciaires et administratives, en particulier des peines d’amputation et de flagellation pour diverses infractions comme le vol, l’inimitié envers Dieu (mohareb) et certaines pratiques sexuelles. Il s’inquiète également de ce que les châtiments corporels sur les enfants soient une pratique légale à la maison, à titre de décision judiciaire et dans les structures de protection de remplacement (art. 7).

L’État partie devrait modifier le Code pénal de façon à supprimer la possibilité pour les autorités administratives et judiciaires d’imposer des châtiments corporels. Il devrait également interdire explicitement toutes les formes de châtiments corporels sur les enfants à la maison et dans les structures d’éducation, notamment en abrogeant les moyens de défense qui peuvent être invoqués pour justifier ces châtiments et qui sont prévus à l’article 1179 du Code civil, aux articles 49 et 59 du Code pénal et à l’article 7 de la loi relative à la protection des enfants.

17.Le Comité est préoccupé par les informations signalant l’utilisation de mandats d’arrestation génériques et en blanc qui ne portent pas le nom de l’intéressé et ne sont pas fondés sur l’examen des preuves par un juge (art. 9).

L’État partie devrait veiller à ce que les mandats d’arrestation mentionnent le nom de la personne à arrêter et soient fondés sur l’examen des preuves matérielles par le juge. Il devrait également remettre en liberté les personnes qui ont été placées en détention sur le fondement de mandats d’arrestation génériques et en blanc, en l’absence de preuve.

18.Le Comité est préoccupé par la durée moyenne de la détention avant jugement et par le fait que l’article 33 du Code de procédure pénale ne fixe pas de limite à la durée pour laquelle un tribunal peut ordonner le maintien en détention par les agents de la force publique. Il s’inquiète également des informations signalant que des individus sont maintenus au secret dans des centres de détention non reconnus (art. 7 et 9).

L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que la détention avant jugement ne soit pas d’une durée excessive, dans la loi et dans la pratique, en particulier en assurant une surveillance judiciaire indépendante et l’accès sans délai à un avocat, de façon entièrement conforme à l’article 9 du Pacte. Il devrait aussi prendre des mesures immédiates pour supprimer la pratique de la détention au secret, en veillant à garantir que cette interdiction soit dûment respectée dans les faits.

19.Le Comité est préoccupé par les mauvaises conditions qui règnent dans les lieux de détention, en particulier à la prison d’Evin, dans les quartiers 350, 2A, 209 et 240. Il est également préoccupé par la pratique de la mise à l’isolement, les limites déraisonnables imposées aux visites des familles et le fait que des traitements médicaux seraient refusés à de nombreux prisonniers du quartier 350 dans la section no 3 de la prison d’Evin (art. 7 et 10).

L’État partie devrait prendre immédiatement des mesures pour mettre en place un système de surveillance régulière et authentiquement indépendante des lieux de détention et faire en sorte que les conditions de détention soient compatibles avec les articles 7 et 10 du Pacte, ainsi qu’avec l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. Il devrait aussi inclure systématiquement dans le programme ordinaire de la formation dispensée aux membres des forces de l’ordre, aux personnels pénitentiaires et aux personnels judiciaires une formation aux droits de l’homme qui traite de l’interdiction de la torture, des techniques d’interrogatoire efficaces, des conditions de détention et du traitement des détenus.

20.Le Comité est préoccupé par la persistance de la traite des femmes et des enfants, en particulier des jeunes filles des régions rurales, pratique souvent facilitée par l’institution du mariage temporaire (siqeh) (art. 8).

L’État partie devrait prendre des mesures pour combattre et prévenir la traite et la vente de mineurs de 18 ans. Il lui est en outre demandé de faire figurer dans son prochain rapport périodique des statistiques, rassemblées sur une base annuelle, montrant le nombre d’arrestations et de condamnations prononcées en vertu de la loi de 2004 relative à la lutte contre la traite.

21.Le Comité est profondément préoccupé par les violations fréquentes des garanties d’un procès équitable énoncées dans le Pacte, en particulier par les tribunaux révolutionnaires et le tribunal de la prison d’Evin. Il s’inquiète également de ce que les personnels judiciaires invoquent la qualification mahdoor-ol-dam (méritant la mort) dans leurs décisions (art. 14 et 6).

L’État partie devrait veiller à ce que toutes les procédures judiciaires soient menées dans le strict respect de l’article 14 du Pacte, en garantissant a)le droit de bénéficier de l’assistance d’un défenseur de son choix, y compris pour les prévenus; b)le droit d’être informé dans le plus court délai de la nature et des motifs de l’accusation; c)l’intervention et la présence d’un avocat dans tous les cas, y compris pendant la phase d’enquête; d)la présomption d’innocence; e)le droit à un procès public; f)le droit de faire appel d’une décision de justice. L’État partie devrait supprimer la qualification mahdoor-ol-dam (méritant la mort), appliquée aux victimes, de façon à garantir que les responsables soient poursuivis et traduits en justice pour leurs crimes. Le Comité rappelle à l’État partie son Observation générale no32 (2007) sur le droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable.

22.Le Comité note avec préoccupation que l’indépendance du pouvoir judiciaire n’est pas pleinement garantie et qu’elle est compromise par les pressions indues exercées avant le début des procès par le pouvoir exécutif, en particulier par le Bureau chargé de la supervision et de l’évaluation des juges, ainsi que par des dignitaires religieux et des représentants de haut rang du Gouvernement. Le Comité est également préoccupé par le fait que des juges ont prononcé un verdict contraire aux droits et aux principes énoncés dans le Pacte en se fondant sur la charia et des fatwas (art. 14).

L’État partie devrait prendre sans délai des mesures pour garantir et protéger l’indépendance et l’impartialité entières de la magistrature, et faire en sorte qu’elle puisse agir sans subir de pression ni d’ingérence de la part du pouvoir exécutif et des autorités religieuses. L’État partie devrait également veiller à ce que les juges, lorsqu’ils interprètent la législation et qu’ils appliquent les principes religieux, ne prononcent pas des verdicts contraires aux droits et principes énoncés dans le Pacte.

23.Le Comité est préoccupé par la discrimination exercée à l’égard des personnes appartenant à la minorité chrétienne, notamment les arrestations pour prosélytisme et l’interdiction de célébrer les offices chrétiens en farsi. Il note également avec inquiétude que des musulmans qui se sont convertis à une autre religion ont été arrêtés et que l’article 225 du projet de code pénal rendrait la peine de mort obligatoire pour les hommes reconnus coupables d’apostasie (art. 18).

L’État partie devrait prendre des mesures pour assurer le plein respect du droit à la liberté de religion ou de conviction, notamment en faisant en sorte que la législation et la pratique soient entièrement conformes à l’article18 du Pacte. Cela suppose également que le droit de chacun de se convertir à la religion de son choix soit garanti sans réserve et sans condition. Le Comité invite aussi instamment l’État partie à supprimer l’article 225 du projet de code pénal. Il rappelle son Observation générale no22(1993) relative au droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.

24.Le Comité est préoccupé par le fait que les membres de la communauté bahaïe continuent d’être privés du droit à la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction. Il est également préoccupé par le fait que les membres de cette communauté continuent de subir de nombreuses atteintes à leurs droits, notamment la détention arbitraire, la séquestration, la confiscation et la destruction de biens, le refus d’emploi et de prestations de l’État et le déni d’accès à l’enseignement supérieur (art. 18, 19, 20 et 27).

L’Étatpartie devraitassurer le plein respect de la liberté de toute personne, y compris des membres de la communauté bahaïe, d’avoir ou d’adopter la religion ou la conviction de son choix, et la liberté de manifester cette religion ou cette conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé, par le culte et l’accomplissement des rites, les pratiques et l’enseignement. Il devrait prendre sans délai des mesures pour que les membres de la communauté bahaïe soient protégés contre la discrimination dans tous les domaines, que les violations de leurs droits donnent lieu à l’ouverture immédiate d’une enquête, que les responsables soient poursuivis et que des recours utiles soient ouverts aux victimes.

25.Le Comité est préoccupé par le fait que les musulmans sunnites continuent de faire l’objet d’une discrimination, en droit et dans les faits, et ne peuvent pas exercer pleinement le droit à la liberté de manifester leur religion (art. 18 et 19).

L’État partie devrait garantir la liberté de manifester une religion ou une conviction et faire en sorte que celle-ci puisse être exercée individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé. Le Comité rappelle à l’État partie que ce droit comprend également la construction de lieux de culte.

26.Le Comité est préoccupé par le fait que le droit à la liberté de réunion et d’association est gravement limité et note que l’organisation de rassemblements et de défilés publics et la création d’associations sont subordonnées à une condition de conformité aux «principes de l’Islam», lesquels ne sont pas définis dans la législation nationale. Le Comité est également préoccupé par les informations qui continuent de faire état de cas de harcèlement ou de manœuvres d’intimidation, d’interdiction de manifestations et de dispersion de manifestations par la force, ainsi que de l’arrestation et du placement en détention arbitraire de défenseurs des droits de l’homme. Il note avec inquiétude que des défenseurs des droits de l’homme et des avocats de la défense sont souvent emprisonnés pour des infractions dont la définition est vague telles que l’infraction de mohareb et la propagande contre l’ordre établi. Le Comité note en particulier le grand nombre de militantes pour les droits des femmes qui ont été arrêtées et placées en détention, notamment les bénévoles et les militantes de la campagne «Un million de signatures» (art. 19, 21 et 22).

L’État partie devrait faire en sorte que le droit à la liberté de réunion et d’association soit garanti sans discrimination, et libérer immédiatement et sans condition toutes les personnes détenues uniquement pour avoir exercé pacifiquement ce droit, notamment les étudiants, les enseignants, les défenseurs des droits de l’homme (y compris les militantes pour les droits des femmes), les avocats et les syndicalistes. L’État partie devrait également faire en sorte qu’une enquête efficace et impartiale soit immédiatement ouverte sur les menaces, les actes de harcèlement et les violences visant ces catégories de personnes et, le cas échéant, que les auteurs de ces actes soient poursuivis. Il devrait en outre retirer son projet de loi sur la création des organisations non gouvernementales et la surveillance de leurs activités, qui prévoit la constitution d’un comité supérieur de surveillance des activités des organisations non gouvernementales, présidé par le Ministre de l’intérieur et composé entre autres membres de représentants du Ministère du renseignement, de la police, des bassidjiset des Gardiens de la révolution.

27.Le Comité est préoccupé par le fait que de nombreux journaux et magazines, ainsi que l’Association des journalistes, ont été fermés par les autorités depuis 2008, ainsi que par le grand nombre de journalistes, de rédacteurs en chef, de réalisateurs et de professionnels des médias qui ont été arrêtés et placés en détention depuis les élections présidentielles de 2009. Le Comité est également préoccupé par la surveillance de l’utilisation et des contenus d’Internet, le blocage des sites Web qui présentent des nouvelles et des analyses politiques, le ralentissement de la vitesse de transmission sur Internet et le brouillage des émissions diffusées par satellite depuis l’étranger, constatés en particulier depuis les élections présidentielles de 2009 (art. 19).

L’État partie devrait garantir pleinement le droit à la liberté d’expression et d’opinion des médias indépendants et faire en sorte que les journalistes puissent exercer leur profession sans craindre d’être traduits en justice. Il devrait libérer les journalistes emprisonnés en violation des articles 9 et 19 du Pacte, les réhabiliter et leur assurer une réparation judiciaire effective et une indemnisation. Il devrait également faire en sorte que la surveillance de l’utilisation d’Internet n’entraîne pas de violation du droit à la liberté d’expression et du droit à la protection de la vie privée tels qu’ils sont définis dans le Pacte. Le Comité rappelle à l’État partie son Observation généraleno34 (2011) sur l’article19.

28.Le Comité note avec préoccupation que l’âge minimum du mariage est trop bas et qu’il n’est pas le même pour les filles et les garçons. Il est également préoccupé par la pratique des mariages forcés, des mariages précoces et des mariages temporaires de jeunes filles (art. 23 et 24).

L’État partie devrait éliminer la discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne l’âge minimum du mariage. Il devrait également faire en sorte que l’âge minimum du mariage soit conforme aux normes internationales et adopter des mesures concrètes pour prévenir les mariages forcés, les mariages précoces et les mariages temporaires de jeunes filles.

29.Le Comité est préoccupé par les critères d’enregistrement pour la participation aux campagnes électorales (en particulier les sections 1 et 3 de l’article 28 de la loi sur les élections au Majlis), ainsi que par la faculté qu’a le Conseil des gardiens de refuser des candidats à la députation (conformément à l’article 3 de la loi portant modification de la loi sur les élections au Majlis). Le Comité note avec inquiétude que pour les dixièmes élections présidentielles en 2009: 1) sur plus de 450 candidats potentiels, seuls 4 ont été admis; 2) les observateurs internationaux n’ont pas été autorisés à se rendre sur place pour les résultats du scrutin; 3) les signaux des téléphones portables et l’accès aux réseaux sociaux et aux sites Internet de l’opposition ont été bloqués; 4) des militants politiques, des personnes appartenant à des minorités religieuses ou ethniques, des étudiants, des syndicalistes et des militantes pour les droits des femmes ont été harcelés et arrêtés arbitrairement; 5) les résultats des élections ont été approuvés par l’ayatollah Khamenei avant leur entérinement par le Conseil des gardiens; et 6) dans deux provinces la participation a été supérieure à 100 %. Le Comité note également avec préoccupation l’arrestation en février 2011 de dizaines de membres de l’opposition ainsi que la dissolution par décision de justice de deux partis politiques réformistes (art. 25).

L’État partie devrait modifier sa législation de façon à garantir la conformité de l’article3 et des sections 1 et 3 de l’article28 de la loi sur les élections au Majlis avec les droits garantis par l’article25 du Pacte. Il devrait également prendre les mesures voulues pour que les élections se déroulent librement et d’une manière transparente et pleinement conforme au Pacte, notamment en instituant une commission indépendante de surveillance des élections.

30.Le Comité est préoccupé par les restrictions et conditions qui s’appliquent à l’exercice des libertés culturelles, linguistiques et religieuses des minorités présentes dans l’État partie, comme les Kurdes, les Arabes, les Azéris et les Baluches, concernant notamment l’utilisation des langues des minorités à l’école et la publication de magazines et journaux dans ces langues (art. 27).

L’État partie devrait veiller à ce que toutes les personnes appartenant à des minorités ethniques, religieuses et linguistiques soient effectivement protégées contre la discrimination et puissent avoir leur propre vie culturelle, employer leur propre languedans les médias et à l’école, prendre part aux affaires publiques et avoir accès à des recours utiles contre la discrimination.

31.L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, du troisième rapport périodique, des réponses écrites à la liste des points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public. Le Comité suggère également que le rapport et les observations finales soient traduits dans la langue officielle de l’État partie. Le Comité demande en outre que le quatrième rapport périodique soit élaboré en consultation avec la société civile et les organisations non gouvernementales.

32.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 9, 12, 13 et 22.

33.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devra lui parvenir d’ici au 2 novembre 2014, des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble.