Nations Unies

CCPR/C/ETH/1

Pacte international relatifaux droits civils et politiques

Distr. générale

22 octobre 2009

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Rapports initiaux des États parties

*

[28 juillet 2009]

Table des matières

ParagraphesPage

Introduction1−33

Article premier: Droit à l’autodétermination4−143

Article 2: Mise en œuvre du Pacte au niveau national15−165

Article 3: Droit égal des hommes et des femmes17−256

Article 4: Droits non susceptibles de dérogation26−327

Article 6: Droit à la vie33−438

Article 7: Interdiction de la torture44−669

Article 8: Interdiction du travail forcé67−7412

Article 9: Droit à la liberté et à la sécurité des personnes75−8113

Article 10: Traitement humain des personnes privées de liberté82−10514

Article 11: Interdiction de l’emprisonnement au seul motif de l’inexécutiond’une obligation contractuelle10618

Articles 12 et 13: Droit à la liberté de circulation et de séjour107−11919

Article 14: Égalité devant la justice120−15220

Article 15: Non-rétroactivité des lois153−15425

Article 16: Reconnaissance de la personnalité15526

Article 17: Droit à l’intimité, à l’honneur et à la réputation156−17126

Article 18: Liberté de pensée, de conscience et de religion172−18428

Article 19: Liberté d’expression185−20329

Article 20: Interdiction de la propagande en faveur de la guerre204−20531

Article 21: Droit de réunion pacifique206−20832

Article 22: Liberté d’association209−21232

Article 23: Protection de la famille213−22833

Article 24: Protection des enfants229−24135

Article 25: Participation à la vie publique et aux élections242−27237

Article 26: Égalité et non-discrimination27342

Article 27: Droits des minorités274−27842

Introduction

1.Établi conformément à l’article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le présent rapport constitue le rapport initial et le premier rapport périodique combinés de la République fédérale démocratique d’Éthiopie. Il expose les différentes mesures prises par l’Éthiopie en vue de mettre en œuvre les droits civils et politiques que consacre le Pacte. Élaboré en suivant les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes conventionnels (HRI/GEN/2/Rev.4) et les directives spécifiques au Pacte y figurant, le présent rapport doit être examiné en conjonction avec le document de base commun que l’Éthiopie a soumis au Secrétaire général.

2.En collaboration avec la Commission éthiopienne des droits de l’homme et avec l’appui technique du Bureau régional du HCDH (Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) pour l’Afrique de l’Est, le Gouvernement a élaboré et mis en œuvre un projet en vue de l’établissement de tous les rapports au titre d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme non soumis par l’Éthiopie dans les délais. Le Gouvernement a mené à bien ce projet et soumis un document de base commun ainsi que tous les rapports spécifiques en souffrance, dont le présent, destinés aux organes conventionnels.

3.Le Gouvernement estime que le présent rapport, lu en conjonction avec le document de base commun soumis par l’Éthiopie, apporte des informations suffisantes sur le degré d’application du Pacte dans le pays. Le Gouvernement se réjouit de soumettre ce rapport et espère qu’un dialogue constructif s’engagera avec le Comité des droits de l’homme.

Article premierDroit à l’autodétermination

4.La Constitution de l’Éthiopie garantit le droit de ses nations, nationalités et peuples à l’autodétermination. Ce droit s’exerce selon plusieurs modalités, dont les quatre suivantes appellent une attention spéciale.

5.En premier lieu, le droit des nations, nationalités et peuples de parler, d’écrire et de développer leur propre langue ainsi que leur droit d’exprimer, de développer, de promouvoir et de préserver leur culture et leur histoire sont garantis ont rang constitutionnel. Ces droits sont considérés comme des droits intrinsèques des nations, nationalités et peuples d’Éthiopie. Quelle que soit la place des territoires qu’ils habitent dans la hiérarchie administrative, les nations, nationalités et peuples ont le droit fondamental de développer leur culture et de préserver leur histoire. Si une nation ou nationalité estime que son identité est bafouée ou que n’est pas assurée la promotion de ses culture, langue et histoire, elle saisit la Chambre de la Fédération d’une requête pour examen et décision.

6.La Chambre de la Fédération a reconnu cette forme d’autodétermination dans nombre de ses décisions et a été à l’origine de plusieurs référendums sur la reconnaissance de certains droits, dont le droit de se voir reconnaître une identité distincte et à la protection de cette identité. Un référendum a ainsi eu lieu dans l’État régional des nations, nationalités et peuples du Sud afin de déterminer si les Selti y vivant avaient une identité distincte des autres nations et nationalités établies dans leur voisinage.

7.Les Selti peuvent désormais développer leurs propres culture, langue et histoire, distinctes des autres groupes ethniques. La décision de la Chambre a pris en compte les souhaits et aspirations du peuple considéré à être identifié selon son désir. Il s’agit là d’un excellent exemple de l’exercice par un groupe de son droit à l’autodétermination en termes de particularismes culturel et linguistique.

8.Une seconde modalité de l’exercice du droit à l’autodétermination est le droit à un plein gouvernement autonome, qui englobe le droit pour un groupe donné de créer des institutions de gouvernement sur le territoire qu’il habite. La Constitution dispose que le gouvernement doit promouvoir et appuyer l’autonomie des peuples à tous les échelons dans le respect des principes démocratiques. À ce titre, les nations, nationalités et peuples ont le droit de constituer leurs organes locaux de gouvernement, comme les administrations de zone, de woreda et de kébélé. Tous les États régionaux et leurs subdivisions administratives sont donc dotés de leur structure de gouvernement propre, qui leur permet d’administrer eux-mêmes leurs affaires au quotidien. Ce droit à l’auto-administration va jusqu’au droit de former un État régional appelé à devenir membre de la Fédération. La création de son propre État par toute nation ou nationalité ou tout peuple est décidée à la majorité des deux tiers des membres du Conseil de la nation, de la nationalité ou du peuple concerné ou à la majorité des suffrages en cas de référendum. Toute partie s’estimant lésée par la décision du Conseil a le droit de la contester devant la Chambre de la Fédération.

9.La troisième modalité de l’autodétermination est la sécession, par laquelle une nation, une nationalité ou un peuple peut se constituer en État souverain en vertu du droit international. Vu que l’unité des peuples dans la diversité et la fraternité règne en Éthiopie et que les droits fondamentaux individuels et collectifs y sont protégés, la question de la sécession n’est guère susceptible de s’y poser. Une nation, une nationalité ou un peuple peut néanmoins faire sécession si ses membres optent pour cette démarche. La Constitution et la Proclamation relative à la consolidation de la Chambre de la Fédération ont fixé la procédure de sécession, laquelle doit se dérouler sous la direction de la Chambre de la Fédération. Les principales conditions requises pour qu’un État fasse sécession sont le soutien des deux tiers des membres du conseil législatif de la nation, de la nationalité ou du peuple concerné et la majorité des suffrages à un référendum.

10.La représentation et la participation des nations, nationalités ou peuples à tous les échelons de la structure gouvernementale constituent une autre modalité de l’exercice de l’autodétermination. En vertu de la Constitution, chaque nation, nationalité ou peuple a le droit d’être représenté dans les organes de gouvernement à l’échelon des États régionaux et de la Fédération. Cette représentation englobe le droit de participer aux organes législatifs, exécutifs et répressifs à l’échelon des États régionaux et de la Fédération. Les nations, nationalités et peuples sont donc représentés dans les deux chambres du Parlement de la République fédérale démocratique d’Éthiopie. Les membres de la Chambre des représentants des peuples, dont le nombre est plafonné à 550, sont élus au suffrage libre et direct pour représenter l’ensemble des Éthiopiens, même si ses sièges sont répartis en fonction du nombre de personnes appartenant à chaque nation, nationalité et peuple.

11.Les nationalités et peuples minoritaires qui ne satisfont pas au critère numérique ont droit à une représentation spéciale à la Chambre, où au moins 20 sièges leur sont réservés. La Constitution a institué dès le début cette représentation spéciale. Le critère déterminant les nationalités et peuples entrant dans cette catégorie est défini dans une décision de la Chambre de la Fédération qui secompose de représentants de la totalité des nations, nationalités et peuples de l’Éthiopie et compte actuellement 120 membres, issus de 74 nations, nationalités ou peuples de l’ensemble du pays.

12.Les nations, nationalités et peuples de l’Éthiopie sont aussi représentés de façon équitable dans les administrations publiques. Dans tous les organes chargés de l’application de la loi, dont la police, le parquet et l’appareil judiciaire, des efforts sont déployés pour assurer une représentation proportionnelle à la totalité des nations, nationalités et peuples.

13.On ne dispose pas de données complètes ventilées sur les effectifs de la police et des forces de défense, mais les modalités de recrutement permettent, comme l’exige la loi, d’assurer une représentation équitable de cette diversité. Les nations et nationalités sont aussi représentées équitablement dans l’appareil judiciaire. À l’échelon fédéral, par exemple, 39,2 % des juges sont originaires de l’État régional d’Amhara, 15,5 % de l’État régional d’Oromia, 22,4 % de l’État régional du Tigré et 22,9 % sont issus de divers autres groupes ethniques du pays.

14.Toutes les administrations publiques adoptent dans la pratique des mesures pour assurer la représentation équitable de tous les peuples du pays; la plus courante consiste, lors du recrutement ou des promotions, à accorder, parmi les candidats aux résultats comparables, la priorité à ceux qui appartiennent à une nationalité peu représentée. Les efforts particuliers que déploie la Commission de la police pour faire une place aux nations, nationalités et peuples sous-représentés illustrent bien cette démarche.

Article 2Mise en œuvre du Pacte au niveau national

15.Dans le document de base commun figurent des informations relatives à la publication du Pacte dans différentes langues du pays:

a)L’État a pris plusieurs mesures visant à faire connaître aux citoyens leurs droits découlant du Pacte (par. 212 à 253 du document de base commun);

b)Plusieurs mesures ont été prises en vue de sensibiliser les autorités gouvernementales au Pacte (par. 212 à 253 du document de base commun);

c)La Constitution et la législation en découlant consacrent les droits qu’énonce le Pacte. Dans les sections ci-après du présent rapport figurent des précisions, article par article, sur l’incorporation de chacun de ces droits dans l’ordre juridique interne;

d)Des mesures ont été prises pour garantir des recours propres à donner effet aux droits qu’énonce le Pacte (par. 173 à 188 du document de base commun).

16.La mise en œuvre du Pacte au niveau national se heurte à plusieurs difficultés, notamment les suivantes:

a)La méconnaissance des droits énoncés dans le Pacte par les membres de l’appareil législatif et les fonctionnaires d’État, dont les juges et les agents des organes répressifs (se reporter au document de base commun);

b)La méconnaissance de leurs droits par les titulaires de ces droits et leur incapacité à les faire valoir (se reporter au document de base commun);

c)Le Pacte n’ayant pas été publié au Journal officiel fédéral (Federal Negarit Gazeta), son texte authentique n’est pas d’accès facile, même pour les tribunaux. De rares exemplaires sont probablement disponibles dans certaines bibliothèques, mais force est de constater que la plupart des fonctionnaires n’ont pas accès au Pacte. Une évolution positive est toutefois à signaler: le Conseil éthiopien des droits de l’homme a fait traduire en afan-oromo et en tigrinya (langues les plus utilisées en Éthiopie avec l’amharique) et expédié pour publication les principaux instruments relatifs aux droits de l’homme, dont le Pacte. Le texte de ce dernier n’est toutefois pas encore disponible dans les langues officielles de tous les États régionaux (par. 233 à 235 du document de base commun);

d)Le manque de formation aux dispositions fondamentales des instruments régissant les relations internationales. La plupart des juges, procureurs, policiers et agents subalternes divers de la force publique associés à l’administration de la justice, tout comme la majeure partie des habitants du pays, ne connaissent pas les principes fondamentaux du droit international indispensables pour tenir compte dans l’exercice de leurs attributions et responsabilités respectives des instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Éthiopie est partie (par. 233 à 235 du document de base commun).

Article 3Droit égal des hommes et des femmes

17.Alors que les femmes jouent un rôle important aux nombreux aspects dans la société, dans le passé elles n’ont pas recueilli de fruits à la hauteur de leur contribution et sont défavorisées par rapport aux hommes en raison de préjugés politiques, économiques, sociaux et culturels. Les femmes ont très souvent été considérées comme inférieures aux hommes et été victimes de discrimination.

18.Afin de lutter contre cette mentalité et ces pratiques profondément enracinées, en 1993 le Gouvernent éthiopien de l’époque (le Gouvernement de transition) a adopté la Politique nationale pour les femmes éthiopiennes, tout premier document de cet ordre dans l’histoire du pays, affichant clairement son intention de promouvoir et protéger les droits des femmes dans le pays (par. 273 du document de base commun).

19.La Constitution de la RFDE reconnaît aux femmes le droit à une jouissance égale des droits et garanties qu’elle consacre, dont à l’évidence les droits civils et politiques. Chaque institution gouvernementale est ainsi investie de la responsabilité de faciliter l’application des dispositions de la Constitution et donc d’éliminer toute discrimination institutionnelle envers les femmes. La Constitution prévoit en outre l’élimination des pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes et abroge les lois, coutumes et pratiques qui oppriment les femmes ou leur causent un préjudice physique ou mental.

20.Plusieurs lois contiennent des dispositions instituant une discrimination positive, ce qui marque une avancée notable dans ce sens. La Constitution souligne la nécessité de recourir à la discrimination positive aux fins de remédier aux inégalités et à la discrimination héritées de l’histoire auxquelles les femmes se heurtent en Éthiopie et en finir avec ce déséquilibre immémorial. Ces mesures en faveur des femmes visent à leur permettre d’être compétitives et de participer sur un pied d’égalité à tous les aspects de la vie publique et privée (par. 266 à 273 du document de base commun).

21.Outre ces dispositions de la Constitution, le Plan d’action national pour l’égalité entre les sexes, l’Ensemble de mesures pour le développement de la femme et le Plan d’exécution du Programme de changement et de développement en faveur des femmes d’Éthiopie figurent au nombre des politiques et stratégies ciblant les femmes dans le souci de promouvoir des conditions propres à accélérer l’avènement de l’égalité entre hommes et femmes dans l’exercice de leurs droits inhérents. Le Gouvernement a en outre adopté des mesures visant à améliorer la condition de la femme, notamment des lois destinées à protéger leurs droits.

22.Les dispositions constitutionnelles relatives aux droits des femmes ont été consolidées plus avant dans des lois spécifiques. Lors de l’adoption de nouveaux textes législatifs, le législateur s’efforce d’y intégrer la perspective du genre. Une révision approfondie des textes de loi en vigueur est en cours et de nouveaux sont édictés en vue d’intégrer des idéaux respectueux du genre dans la législation nationale.

23.Le Gouvernement s’est employé énergiquement à fixer des objectifs et buts soucieux du genre tendant à réduire la charge de travail des femmes et à leur permettre ainsi de participer à la prise des décisions politiques et socioéconomiques. La question des femmes est aussi abordée globalement au titre de l’exécution du Plan d’action national pour l’égalité des sexes. Sur ce front, le Gouvernement a pour position d’insister encore sur la consolidation de l’égalité entre les sexes dans le cadre du processus de décentralisation et d’autonomisation.

24.L’État a conçu et mis en place plusieurs mécanismes institutionnels propres à donner aux femmes la possibilité d’exercer les droits et libertés que la Constitution et diverses lois leur garantissent; le Ministère fédéral des affaires féminines, ainsi que les bureaux des affaires féminines à l’échelon des États régionaux, zones et woreda en sont des exemples types. Il convient aussi de signaler que tous les ministères du Gouvernement fédéral ainsi que les services du Médiateur et le Conseil éthiopien des droits de l’homme sont dotés d’un département distinct s’occupant des questions spécifiques aux femmes et aux enfants.

25.Malgré ces efforts, il serait prématuré d’affirmer que les Éthiopiennes exercent désormais pleinement sur un pied d’égalité leurs droits civils et politiques comme le prescrit le Pacte. Des discriminations et inégalités persistantes freinent le rythme de leurs progrès dans presque tous les domaines de la vie. Le Gouvernement entend accélérer le changement dans tous les secteurs dans le souci de la pleine intégration des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes.

Article 4 Droits non susceptibles de dérogation

26.Le Gouvernement fédéral et les gouvernements des États régionaux sont autorisés à décréter l’état d’urgence dans les circonstances exceptionnelles et les strictes limites concernant sa durée et le territoire couvert prévues dans la Constitution. À l’échelon fédéral, la Constitution habilite le Conseil des ministres à proclamer l’état d’urgence en cas d’invasion extérieure ou de désordre public susceptible de déstabiliser les autorités gouvernementales constitutionnelles au point de les mettre dans l’incapacité d’exercer leurs fonctions ordinaires en matière d’application de la loi, ainsi que face à une menace d’épidémie ou de catastrophe naturelle. Les États régionaux peuvent de même proclamer l’état d’urgence sur leur territoire en cas d’épidémie ou de catastrophe naturelle. Cette mesure extraordinaire a pour objet principal de préserver ou rétablir rapidement l’ordre public ou la paix collective dans les zones en proie à l’instabilité institutionnelle ou à une catastrophe naturelle à grande échelle.

27.L’état d’urgence doit être proclamé dans le strict respect des formes prévues par la Constitution. Le Conseil des ministres doit soumettre le texte instituant l’état d’urgence à la Chambre des représentants des peuples (CRP) pour approbation, dans les quarante-huit heures suivant la proclamation de l’état d’urgence si la CRP est en session et au maximum dans les quinze jours dans le cas contraire.

28.Le décret proclamant l’état du décret d’urgence doit être approuvé par les deux tiers des membres de la CRP pour prendre effet. Une fois approuvé, ce décret reste en vigueur six mois au maximum puis peut être reconduit pour des périodes de quatre mois si nécessaire.

29.La Constitution fait obligation à la CRP de créer une commission d’enquête sur l’état d’urgence composée de personnes choisies parmi ses membres et des juristes chevronnés au moment de la proclamation de l’état d’urgence. Cette commission est notamment investie des pouvoirs et responsabilités ci-après: rendre publics, dans un délai d’un mois, les noms de tous les individus arrêtés au titre de l’état d’urgence, ainsi que les motifs de leur arrestation; s’assurer qu’aucune mesure prise pendant l’état d’urgence n’est inhumaine; recommander à l’exécutif des mesures correctives si elle constate un cas de traitement inhumain; veiller à ce que les auteurs d’actes inhumains soient poursuivis.

30.Le Conseil des ministres est investi des pouvoirs nécessaires pour protéger la paix et la souveraineté, ainsi que maintenir la sécurité publique et l’ordre public. Dans le souci de lui donner les moyens de s’acquitter efficacement de son mandat, la Constitution autorise le Conseil à suspendre, dans la mesure nécessaire pour éviter que ne s’instaurent des conditions susceptibles de nécessiter la proclamation de l’état d’urgence, l’exercice par les citoyens de certains droits politiques et démocratiques qu’elle consacre.

31.Il importe tout autant de souligner que la Constitution contient, à l’opposé, une clause de «non-dérogation» en cas de proclamation de l’état d’urgence, disposant que les droits fondamentaux que sont le droit à l’égalité, le droit à l’autodétermination, le droit de développer et de parler sa propre langue, le droit de promouvoir la culture et de préserver l’histoire, ainsi que le droit d’être protégé contre les traitements inhumains ne sont pas susceptibles de dérogation (par. 117 à 119 du document de base commun).

32.Depuis la promulgation de la Constitution de la RFDE, l’état d’urgence n’a jamais été décrété ni au niveau national ni au niveau régional.

Article 6 Droit à la vie

33.La Constitution garantit à chaque personne l’inviolabilité et l’inaliénabilité du droit à la vie. Nulle personne ne peut donc être privée de sa vie, sauf à titre de sanction prononcée par une juridiction de jugement au motif de la commission d’un crime grave. La possibilité d’une privation du droit à la vie persiste ainsi sous réserve que la peine de mort soit prononcée et appliquée conformément à la loi. Ce que la Constitution interdit sans équivoque c’est la privation arbitraire du droit à la vie.

34.Dans sa version révisée de 2005 le Code pénal prévoit la peine de mort, mais seulement contre des délinquants extrêmement dangereux ayant commis des crimes graves en l’absence de circonstances atténuantes. L’exécution de cette peine exceptionnelle qu’est la condamnation à mort exige dans tous les cas une confirmation définitive par le chef de l’État et la vérification qu’elle n’a pas été remise ou commuée par une grâce ou amnistie.

35.La peine de mort ne peut être appliquée à un criminel qui avait moins de 18 ans au moment où il a commis le crime; cette peine ne peut non plus être appliquée à une personne totalement ou partiellement irresponsable, à une personne gravement malade ou à une femme enceinte, aussi longtemps que la personne condamnée demeure en pareil état. Si une femme est enceinte au moment de sa condamnation ou donne naissance alors qu’elle est en prison dans l’attente de son exécution et que cet enfant doit être nourri par sa mère, la peine est commuée en réclusion à perpétuité.

36.Les criminels en attente de confirmation ou d’exécution de la peine de mort sont traités comme les prisonniers purgeant des peines d’emprisonnement de rigueur et des mesures peuvent au besoin être prises pour assurer leur sécurité. Un détenu de cette catégorie peut même être autorisé, à sa demande, à travailler dans sa cellule.

37.Le droit pénal fixe les modalités et mécanismes d’exécution de la peine de mort: il interdit l’exécution par pendaison, par mutilation du corps ou par tout autre moyen inhumain et prescrit que cette peine soit exécutée d’une manière humaine et acceptable − à déterminer par l’organe exécutif ayant autorité sur l’administration pénitentiaire fédérale ou régionale. Aucun règlement à cet effet n’a toutefois encore été édicté et appliqué à ce jour.

38.Un condamné à mort peut demander à être gracié ou à bénéficier d’une commutation de peine (art. 229 et 230 du Code pénal de 2005). Une condamnation à mort peut être commuée en emprisonnement de rigueur à perpétuité par une grâce ou amnistie, conformément aux dispositions du Code pénal et d’autres lois.

39.La Constitution de la RFDE habilite le chef de l’État à commuer une condamnation à mort sauf si le condamné est coupable de crime contre l’humanité, de génocide, d’exécution sommaire, de disparition forcée ou de torture. Instituée en vertu de la Proclamation no 395/2004 y relative, la Commission des grâces est chargée d’examiner les recours en grâce. Après examen d’un recours, la Commission est habilitée à recommander au Président d’accorder une remise de peine, avec ou sans condition et pour tout ou partie, ou de réduire la durée ou la lourdeur de la peine ou de la confirmer si le crime est jugé non susceptible de grâce.

40.Le nombre des condamnés à mort s’est accru au niveau national, passant de 68 en 2001-2002 à 116 en 2006-2007, mais un de ces détenus coupables de crimes graves a été gracié, 34 ont bénéficié d’une commutation en emprisonnement de rigueur à perpétuité et les autres attendent la décision en appel ou la réponse au recours en grâce adressé au chef de l’État.

41.Ce cadre juridique général explique pourquoi la peine de mort n’est prononcée qu’à titre très exceptionnel en Éthiopie, tandis que le très petit nombre d’exécutions à ce jour et les réticences qu’elles soulèvent montrent clairement que cette peine est en disparition. Ces quinze dernières années, seuls trois condamnés à mort ont été exécutés, ce qui tient aux conditions fermes et rigoureuses auxquelles les tribunaux sont assujettis pour prononcer la peine de mort et à l’extrême réticence du Gouvernement à procéder à son exécution.

42.Le nombre de crimes ayant entrainé la mort ou mis en danger la vie d’autrui pour 100 000 habitants est revenu de 13,6 à 8,6 entre les exercices annuels 2001-2002 et 2003-2004 avant de remonter à 10,33 l’exercice annuel suivant (2006-2007) tout en demeurant inférieur au chiffre de 2001-2002 (tableau 61 du document de base commun).

43.L’exercice du droit à la vie tel que consacré à l’article 6 du Pacte est renforcé de plus par des actions positives de l’État, dont la lutte contre les maladies ou l’amélioration progressive de la qualité de vie de la population. (Voir le document de base commun et le rapport initial soumis par l’Éthiopie au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels pour des précisions sur les diverses mesures énergiques prises par le Gouvernement en vue de réduire les taux de mortalité infantile et maternelle et d’allonger l’espérance de vie, dans la ligne des objectifs du Millénaire pour le développement.)

Article 7Interdiction de la torture

44.Les traitements inhumains et dégradants, dont la torture, sont, sur le plan juridique, interdits depuis des décennies. Des textes législatifs, relatifs tant au fond qu’à la procédure, en prohibent strictement la pratique et incriminent les actes constitutifs de torture.

45.La Constitution de la RFDE dispose que les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Éthiopie font partie intégrante de son droit interne et son article 18 interdit en outre catégoriquement les traitements inhumains ou dégradants. Cette interdiction générale a pour corollaire le droit à la sécurité de la personne, en vertu duquel toute personne jouit d’une due protection contre toute atteinte corporelle.

46.La Constitution dispose que chacun a le droit à une protection contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants, sans employer expressément le terme «torture», mais cette pratique est sans conteste totalement interdite en ce qu’elle est couverte par l’interdiction générale plus large des «actes ou traitements cruels, inhumains ou dégradants».

47.La volonté du législateur d’inscrire le droit d’être protégé contre la torture et autres actes ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sur la liste des droits et libertés non susceptibles de suspension ou de restriction en cas de proclamation de l’état d’urgence par le Conseil des ministres montre clairement l’importance que lui accorde la Constitution, qui dispose que la torture est un crime contre l’humanité et donc imprescriptible et que les peines prononcés contre les auteurs de faits de torture ne peuvent être ni remises ni commuées par voie de grâce ou d’amnistie par un organe de l’État, pas même le Parlement.

48.Le Code pénal révisé de 2005 incrimine le fait pour tout fonctionnaire chargé d’arrêter, de garder, de surveiller, d’escorter ou d’interroger une personne de la traiter avec brutalité ou de manière inadaptée ou attentatoire à la dignité humaine, en particulier de faire preuve de cruauté envers elle en lui infligeant une torture physique ou mentale. Dans les cas les plus graves, ce délit est puni de dix ans d’emprisonnement de rigueur au maximum et d’une amende. La peine est plus lourde s’il s’agit d’un fonctionnaire ayant ordonné qu’un tel acte soit commis sous couvert de l’autorité dont l’investit la constitution ou la loi.

49.Le Code de procédure pénale de 1961 énumère certains actes qu’il est interdit à un policier et à toute personne en situation d’autorité de commettre durant une enquête. Pour éviter qu’une enquête pénale ne donne lieu à la violation des droits d’une personne détenue, ledit Code interdit strictement l’usage de méthodes inappropriées durant l’interrogatoire d’un suspect, dont toute forme de pression indue ou de mauvais traitements.

50.L’Éthiopie est partie à plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, interdisant ces pratiques. Comme cet instrument international de portée générale fait partie intégrante du droit interne de l’Éthiopie, la définition de la torture y figurant s’applique à l’évidence dans l’ordre juridique du pays.

51.Des dispositions de la Constitution garantissent le droit des enfants de ne pas être soumis à des châtiments corporels ou à un traitement inhumain dans les écoles et les autres institutions chargées de leur prise en charge et de leur éducation. L’administration d’un châtiment corporel par une personne à son enfant ou à un élève, auparavant acceptable en vertu du Code civil de 1960, n’est plus tolérée depuis l’adoption du Code pénal révisé de 2005. Le Code civil dispose par ailleurs qu’une personne peut en tout temps refuser de se soumettre à un examen médical ou chirurgical ou une expérimentation scientifique, à moins que l’intérêt public ne l’exige.

Recours pour les victimes de la torture

52.Quiconque affirmant avoir été torturée dispose de plusieurs voies de recours. Ainsi, un détenu peut porter plainte devant l’administration pénitentiaire depuis son lieu de détention et une personne peut saisir le tribunal devant lequel elle a été déférée pour dénoncer un acte de torture commis à son encontre alors qu’elle était détenue par la police.

53.Le Bureau de la justice du gouvernement de certains États régionaux, dont l’Oromia, apporte une aide considérable aux victimes de torture − en les représentant et en traduisant les coupables en justice − qui n’ont pas les moyens de rémunérer un avocat pour les représenter et les conseiller en vue d’obtenir en justice réparation du tortionnaire.

54.Le Département de la protection des droits de l’homme dont s’est doté le Bureau de l’administration et des affaires de sécurité de l’Oromia surveille la situation des détenus pour s’assurer que leurs droits fondamentaux ne sont pas violés du fait d’actes arbitraires illicites.

Mécanismes de protection des personnes en détention

55.Le Code de procédure pénale dispose que si un officier de police judiciaire a des raisons de croire qu’une personne a commis une infraction pénale, il peut la sommer de comparaître devant lui. Une fois que la personne suspectée a comparu et que son identité a été établie, il lui est demandé de répondre à l’accusation ou à la plainte la visant; au cours de ce processus, il est interdit de contraindre cette personne à répondre et elle doit être informée de son droit de garder le silence et du fait que toute déclaration qu’elle fera pourra être retenue comme preuve à charge devant un tribunal. Toute violation par un policier des droits de l’homme que protège la Constitution constitue une infraction l’exposant à des sanctions disciplinaires rigoureuses en vertu du Règlement fédéral relatif à l’administration de la police. Les sanctions encourues du chef d’infractions disciplinaires graves vont d’une amende dont le montant peut atteindre un mois du salaire du policier en cause à sa révocation définitive. Si un officier de police judiciaire est reconnu coupable d’actes de torture, d’atteintes physiques ou de toute autre infraction de cet ordre, l’issue la plus probable est sa révocation. Les décisions rendues dans ce type d’affaires sont susceptibles d’un réexamen judiciaire, à la demande de l’agent sanctionné ou de ses représentants.

56.En cohérence avec le Règlement fédéral précité, afin de réprimer tout recours à ces pratiques illégales dans le cadre d’une enquête pénale, l’administration de la police de chaque État régional a édicté une directive sur les sanctions disciplinaires encourues disposant que le comité disciplinaire institué par l’administration de la police concernée est compétent pour recevoir et instruire toutes allégations de violations ainsi que pour prononcer des sanctions disciplinaires de cet ordre dans les limites de sa juridiction.

57.La Proclamation portant création de la Commission fédérale des prisons prohibe tous actes inhumains à l’encontre des prisonniers et traitements attentatoires à leur dignité humaine. Respecter cette dignité et appliquer les peines dans un souci de rééducation et de réadaptation figurent parmi les principes fondamentaux définis dans le Règlement relatif au traitement des détenus fédéraux récemment adopté.

58.Ce règlement relatif aux prisonniers fédéraux, édicté par le Conseil des ministres, rend obligatoire de placer les prisonniers et les prisonnières dans des quartiers séparés. Les lois régionales régissant l’administration des prisons relevant des États régionaux contiennent des dispositions analogues. Les prisonniers et les prisonnières sont donc encellulées séparément dans toutes les prisons. La surveillance des prisonnières est assurée uniquement par du personnel féminin, en stricte conformité avec la réglementation. Quand un haut fonctionnaire inspecte une prison où sont incarcérées des femmes, il doit obligatoirement être accompagné de surveillantes.

59.Le règlement autorise une mère purgeant une peine de prison à garder avec elle son enfant s’il a moins de 18 mois et a besoin de soins maternels intenses. L’établissement pénitentiaire concerné est alors tenu de fournir de la nourriture pour cet enfant, de le faire vacciner, de lui assurer des soins médicaux et tous autres services essentiels nécessaires à son entretien et sa santé. Si le séjour de l’enfant dans ce milieu risque de lui causer un préjudice physique ou psychologique, l’administration pénitentiaire est tenue, à défaut de parents proches, de faciliter la recherche d’un tuteur volontaire hors de la prison.

60.Le règlement dispose qu’une prisonnière incarcérée avec son enfant ou enceinte doit recevoir un supplément de nourriture, sur recommandation médicale. Dans toute prison où un enfant est détenu avec sa mère, on fournit un repas supplémentaire, dont du lait, pour l’enfant, ainsi que des vaccins et des soins médicaux en cas de maladie. Si les soins requis dépassent les capacités du service médical de la prison, des dispositions sont prises en vue d’une prise en charge par un établissement de soins de santé extérieur à la prison.

61.Selon des chiffres récents de la Commission éthiopienne des droits de l’homme, le pays compte 80 974 prisonniers, dont 2 123 femmes; 487 enfants vivent en prison avec leur mère.

Sensibilisation

62.Le Gouvernement sait parfaitement que la méconnaissance généralisée des instruments relatifs aux droits de l’homme par les membres des forces de l’ordre et les gardiens de prison entrave grandement les progrès sur la voie de l’élimination complète de la pratique, isolée, que constituent les violations des droits des personnes en détention. Face à cette situation, plusieurs campagnes de sensibilisation aux droits de l’homme ont été menées dans différentes régions du pays. Avec l’aide financière du Gouvernement norvégien, une formation aux droits de l’homme a été dispensée à l’échelle nationale aux agents des forces de l’ordre de différents échelons en vue d’améliorer leur aptitude à s’acquitter de leurs devoirs et responsabilités en respectant et protégeant les droits de l’homme et les normes connexes que consacrent la Constitution de la RFDE et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Éthiopie est partie.

63.Plusieurs sessions de formation de dix jours ont été organisées dans toutes les régions du pays; 4 300 policiers les ont suivies à ce jour et quelques sessions doivent encore se tenir au titre de ce programme, qui a donné lieu à la publication d’un manuel de formation couvrant les sujets importants que sont les caractéristiques élémentaires et le développement des droits de l’homme, leurs relations avec l’ordre juridique interne, leur respect au stade de l’instruction et pendant le procès ou les droits spéciaux des femmes et des enfants. Ce manuel et les documents de référence nécessaires à la bonne application des normes et valeurs relatives aux droits de l’homme ont été remis à tous les participants.

64.Ce programme n’a pas encore fait l’objet d’une évaluation globale d’impact, mais les réactions recueillies en fin de session auprès des stagiaires, les observations et avis de leurs superviseurs et la réunion initiale conjointe d’examen tenue par les représentants des Gouvernements éthiopien et norvégien indiquent dans l’ensemble que ce programme est une réussite. Le changement d’attitude perceptible chez les agents des organes répressifs montre que la série de campagnes de sensibilisation en cours commence à porter ses fruits.

65.Dans le prolongement de ce programme, le Gouvernement fédéral a engagé des préparatifs en vue de créer un institut des droits de l’homme placé sous la tutelle du Ministère de la justice et chargé d’améliorer les connaissances globales des agents des forces de l’ordre relatives aux droits de l’homme et au système constitutionnel.

66.La plupart des États régionaux mènent des activités de sensibilisation aux droits de l’homme, un bon exemple étant fourni par la formation au traitement des personnes en détention dispensée en 2008 dans l’État régional d’Amhara aux membres de l’administration pénitentiaire et de la milice. Les activités analogues de sensibilisation menées dans plusieurs États régionaux par le Centre pour la réadaptation des victimes de la torture en Éthiopie, une ONG, illustrent les efforts déployés par les ONG et la société civile pour parvenir au degré de sensibilisation désiré (par. 238 du document de base commun).

Article 8 Interdiction du travail forcé

67.Selon la Constitution: «Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude.». Le Code pénal révisé de 2005 punit «quiconque asservit de force une personne, la vend, l’aliène, la gage ou l’achète, se livre à la traite ou au trafic de personnes ou exploite de quelconque manière une personne ou la réduit ou maintient en esclavage, même sous une forme déguisée» de cinq à vingt ans d’emprisonnement de rigueur et d’une amende. La peine minimale est de dix années d’emprisonnement de rigueur si la victime de l’infraction est une femme ou un enfant.

68.La Constitution interdit «la traite des êtres humains à toutes fins» et le Code pénal incrimine la «traite des femmes et des enfants». Ainsi, «quiconque, par la violence, la menace, la tromperie, la fraude, le rapt ou la remise d’argent ou d’autres avantages à une personne ayant autorité sur une femme ou un enfant, recrute, accueille, cache, transporte, exporte ou importe cette femme ou ce mineur à des fins de travail forcé, est puni de cinq à vingt ans d’emprisonnement de rigueur et d’une amende maximale de cinquante mille birr».

69.Diverses mesures visant à prévenir la traite des êtres humains dans le pays et en dehors ont été prises. La Proclamation no 104/1998 relative à l’Agence pour l’emploi privé, encadrant le recrutement par des particuliers ou des entreprises d’Éthiopiens pour des emplois locaux ou à l’étranger constitue un pas important dans le bon sens en ce qu’elle tend à protéger les droits, la sécurité et la dignité des Éthiopiens envoyés et employés à l’étranger.

70.Les Éthiopiens sont libres de voyager et de travailler où ils le souhaitent, mais leurs droits fondamentaux doivent être protégés dans le cadre de cette mobilité et de leurs conditions de travail. L’État s’attache donc à vérifier la légalité des bureaux de placement et à assurer la transparence de leurs activités ainsi que la protection continue des travailleurs expatriés et la fourniture des garanties nécessaires au respect de leurs droits.

71.La traite des femmes constitue depuis peu un grave problème dans le pays et pour y remédier un comité national contre la circulation illégale des personnes a été institué sous la tutelle du Ministère fédéral de la justice.

72.La Constitution prohibe rigoureusement le travail forcé ou obligatoire, les seules exceptions ou dérogations à cette interdiction générale étant pratiquement les mêmes que dans le Pacte.

73.Le Code pénal dispose que le travail obligatoire peut être imposé à l’auteur d’un délit passible d’une peine d’emprisonnement simple inférieure à six mois. Cette peine doit être prononcée par un tribunal d’une manière non attentatoire à la liberté personnelle et à la dignité humaine du délinquant et ne peut être infligée qu’à un condamné en bonne santé.

74.Aucune donnée statistique sur l’ampleur exacte de cette pratique et sur le nombre de délinquants condamnés à une peine de travail forcé ou obligatoire n’est malheureusement disponible. Le nombre des enfants amenés en ville depuis des zones rurales, avec ou sans l’autorisation de leurs parents, pour y être exploités de force par le travail dans des conditions dangereuses est peu élevé. Dans la plupart des cas, les parents n’ont pas la moindre idée des répercussions à terme de cette pratique, ce qui exige manifestement des interventions résolues à tous les niveaux.

Article 9 Droit à la liberté et à la sécurité des personnes

75.Le droit à la liberté et à la sécurité de la personne est un des droits fondamentaux inaliénables et inviolables consacrés par la Constitution de la RFDE, qui garantit le droit à la liberté en disposant que nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour les motifs et selon la procédure fixés par la loi. Nul ne peut être soumis à une arrestation arbitraire ni être détenu sans inculpation ou condamnation. Le Code civil énonce ce même droit dans la section énumérant les droits de la personne; il interdit de restreindre la liberté d’une personne, sauf dans les cas prévus par la loi, et indique que la violation de ce droit constitue un délit civil.

76.Une personne ne peut être arrêtée qu’en vertu d’un mandat d’arrêt décerné par un tribunal, sauf en cas de flagrant délit et autres exceptions visées dans le Code de procédure pénale. La Constitution garantit à toute personne arrêtée le droit d’être rapidement informée dans une langue qu’elle comprend du motif de son arrestation et de toute accusation portée contre elle et indique que toute personne arrêtée a le droit à un exposé rapide et précis du motif de son arrestation si elle est déférée devant un tribunal. L’exercice de ces droits ne semble guère soulever de problème dans la pratique.

77.En vertu de la Constitution comme du Code de procédure pénale, toute personne arrêtée doit être présentée à un juge dans les quarante-huit heures. Toute personne soupçonnée d’une infraction et toute personne détenue est donc immédiatement déférée devant un tribunal et jugée et/ou libérée sous caution. Depuis l’introduction récente du «traitement en temps réel» dans l’administration de la justice (système grâce auquel les policiers, procureurs et tribunaux collaborent afin de se saisir immédiatement des cas de flagrant délit et les traiter en un à deux jours), les infractions les plus légères et les cas de flagrant délit sont traités et jugés en un jour ou deux. Ce système est en place à Addis-Abeba et dans d’autres grandes villes du pays. La loi exclut la libération sous caution dans certains cas et la personne arrêtée peut alors être maintenue en détention jusqu’au procès et pendant (par. 85 du document de base commun de l’Éthiopie).

Droit d’être libéré sous caution et détention provisoire

78.La Constitution garantit le droit d’être libéré sous caution, sauf dans les cas définis par la loi. La remise en liberté sous caution ne peut être accordée si l’infraction imputée au suspect emporte la peine de mort ou quinze ans et plus d’emprisonnement de rigueur et si cette infraction a entraîné la mort de la victime. Elle n’est pas accordée à une personne accusée de faits de corruption passibles de plus de dix ans d’emprisonnement. Le tribunal peut en outre rejeter une demande de remise en liberté sous caution aux motifs suivants:

Vu la nature de l’intéressé, la probabilité qu’il respecte les conditions fixées dans l’ordonnance de remise en liberté sous caution est faible;

S’il est libéré sous caution l’intéressé risque de commettre d’autres infractions;

L’intéressé risque d’influencer les témoins ou d’altérer des éléments de preuve.

79.Le Code de procédure pénale dispose qu’un officier de police judiciaire peut libérer sous caution un suspect qui n’a pas été présenté à un juge; un tel officier peut, à sa discrétion, libérer une personne arrêtée si elle s’engage, en versant ou non une caution, à comparaître au lieu et à l’heure fixés par la police.

80.Si l’intérêt de la justice l’exige, à la demande de la police judiciaire un tribunal peut ordonner le placement en détention d’une personne arrêtée pendant le temps strictement nécessaire pour procéder aux investigations requises. Le tribunal est tenu par la Constitution de déterminer le temps supplémentaire requis pour enquêter en veillant à ce que les autorités répressives mènent leurs investigations dans le respect du droit de la personne arrêtée à un procès rapide. Le Code de procédure pénale limite à quatorze jours la durée de chaque période de détention provisoire mais pas le nombre de ces périodes. Cette lacune peut ouvrir la porte à la violation et au mépris des droits du suspect. Le tribunal examine donc minutieusement toute demande de détention provisoire pour éviter que la possibilité de demander un nombre illimité de fois la reconduction de la détention provisoire ne se traduise par une violation des droits de l’intéressé. Pour remédier à cette lacune, l’Institut éthiopien pour la réforme du système judiciaire élabore un projet de loi de procédure pénale, qui devrait être adopté rapidement.

Détention arbitraire et recours disponibles

81.Le Code pénal incrimine la détention et l’arrestation illégale. Tout agent public qui, en violation de la loi ou au mépris des formes et garanties prévues par la loi, arrête une personne, la détient ou la prive par tout autre moyen de sa liberté, s’expose à des sanctions. La Constitution garantit le droit inaliénable de toute personne de demander à un tribunal d’ordonner sa libération si le policier qui l’a arrêtée ne l’a pas présentée à un juge dans le délai prescrit et ne lui a pas signifié le motif de son arrestation. Toute personne arrêtée peut former un recours en habeas corpus et être libérée si elle a été arrêtée arbitrairement. Le Code civil dispose que quiconque interfère, sans être dûment investie d’une autorité légale, avec la liberté d’autrui commet un délit; toute personne dont le droit à la liberté a fait l’objet d’une atteinte illégale peut donc saisir la justice pour obtenir réparation au civil.

Article 10Traitement humain des personnes privées de liberté

82.La Constitution garantit le droit de toute personne détenue, avant ou après jugement et condamnation, à être traitée dans le respect de sa dignité humaine. Diverses mesures législatives et autres tendant à éviter tout traitement cruel, inhumain ou dégradant à l’encontre de personnes privées de liberté ont été adoptées.

83.Ce droit est aussi inscrit dans les règles et directives édictées par les commissions de police et administrations pénitentiaires concernant l’accueil et le traitement des personnes qui sont confiées à leur garde. Le préambule de la Proclamation portant création de l’Administration pénitentiaire fédérale énonce clairement sa mission: assurer la garde, l’amendement et la réinsertion des prisonniers. Le droit des prisonniers d’être traités dans des conditions respectueuses de la dignité humaine figure parmi les principes fondamentaux que pose la Proclamation. Ce principe a été précisé dans d’autres textes relatifs à l’administration pénitentiaire, dont deux adoptés en Conseil des ministres: le Règlement relatif à l’administration des agents pénitentiaires fédéraux et le Règlement relatif au traitement des prisonniers fédéraux. Toutes les prisons du pays sont dotées de leurs propres directives relatives au traitement des prisonniers dans le respect de leur dignité humaine.

84.L’Administration de la police, organe indépendant, a adopté des règles et directives visant à protéger les droits constitutionnels des personnes gardées à vue. En vertu des attributions dont il est investi par l’Administration de la police, durant un interrogatoire un officier de police judiciaire est tenu de respecter les droits fondamentaux et démocratiques du suspect. Cette même obligation incombe statutairement à tous les agents répressifs intervenant dans la garde des détenus, dont les opérateurs et les gardiens des postes de police. Les mécanismes destinés à évaluer régulièrement tous les policiers en cours de mise en place dans les postes de police permettront de s’assurer que les policiers exercent leurs fonctions dans le respect de leurs attributions.

Mécanismes de plainte

85.Des mécanismes de plainte à l’intention des détenus victimes de violations de leurs droits en cours de détention sont en place dans les lieux de détention. Un détenu peut ainsi porter plainte auprès du centre de détention ou du poste de police. Si son recours n’aboutit pas, le détenu peut soumettre sa plainte aux hautes autorités de la Commission de la police. Les prisonniers peuvent soumettre leurs doléances à ces autorités lors de l’inspection hebdomadaire de leur prison.

86.Les détenus relevant de l’Administration pénitentiaire peuvent la saisir d’une plainte par le canal des comités créés à cet effet ou soumettre une plainte durant les inspections que la Commission éthiopienne des droits de l’homme, le Comité international de la Croix-Rouge ou de hauts fonctionnaires de l’Administration pénitentiaire effectuent dans les prisons; dans certaines, dont celle de l’État régional d’Afar, les détenus peuvent saisir le Commissaire directement de leur plainte en remplissant un formulaire aisément accessible.

Degré de mise en œuvre des normes relatives aux droits de l’homme

87.L’État a pris des dispositions en vue de mettre en œuvre les normes relatives aux droits de l’homme concernant le traitement des prisonniers. Le Règlement du Conseil des ministres relatif au traitement des prisonniers fédéraux, en constitue un bon exemple; ses prescriptions sont conformes à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus. Face à de multiples contraintes, liées en particulier aux ressources limitées et au nombre élevé de prisonniers, appliquer toutes les normes minima dans les prisons s’est révélé difficile dans la pratique.

88.La plupart des prisons sont équipées d’aires de détente et de bibliothèques, même si elles laissent à désirer. Le droit de pratiquer sa religion dans l’enceinte de la prison est respecté et les détenus sont libres d’afficher leur religion et de rencontrer un aumônier. Les prisonniers sont nourris trois fois par jour. Les denrées alimentaires servies et leur qualité nutritionnelle varient selon les prisons, de même que le budget consacré à l’alimentation − le plus élevé étant de 6 birr par jour dans la prison de l’État régional d’Afar et le plus faible de 3,5 birr dans les États régionaux d’Oromia et de Benishangul-Gumaz. La plupart des prisons adaptent leur budget pour faire face à l’inflation galopante que connaît le pays.

89.De l’eau et des sanitaires sont, autant que possible, disponibles dans les lieux de détention, dont les prisons. La plupart des prisons fournissent des services conformes aux normes en la matière, mais dans certaines les sanitaires sont médiocres. Des prisons n’ont pas l’eau courante et leurs détenus doivent utiliser de l’eau de rivière, tandis que plusieurs manquent de latrines. Des équipements de santé, des professionnels de la médecine et des médicaments sont disponibles dans l’enceinte des prisons du pays mais les services fournis sont de piètre qualité faute de logistique. Le service médical d’une prison peut envoyer un détenu malade dans un centre de santé à l’extérieur si son état l’exige.

90.La Commission éthiopienne des droits de l’homme a récemment inspecté un échantillon de 35 prisons, sur les 120 du pays, pour y évaluer la situation en matière de protection des droits des détenus au regard des normes énoncées dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par le pays et de l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. Dans son rapport, la Commission constate que la plupart des prisons n’ont pas les moyens de fournir des services conformes aux normes types énoncées dans l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, mais que globalement des progrès ont été accomplis dans toutes les prisons du pays pour ce qui est d’assurer aux prisonniers un traitement respectueux de leur dignité humaine et de trouver des solutions rapides en cas de plainte. Ce rapport indique que la surpopulation et des problèmes d’assainissement persistent et que dans certaines prisons des violations des droits de l’homme ont été signalées (voir dans l’annexe le tableau 1 récapitulant les plaintes reçues par la Commission).

Méthode de surveillance de l’application effective des normes

91.Les autorités pénitentiaires mettent en œuvre divers mécanismes pour surveiller l’application effective des normes relatives au traitement des détenus. Dans la plupart des lieux de détention, le comportement des membres des agents est évalué régulièrement par leurs supérieurs. Des comités de discipline examinent les affaires de violation des droits fondamentaux des détenus par des agents de la force publique et rendent des décisions finales à ce sujet. Les divers services pénitentiaires sont dotés d’un mécanisme analogue. De hauts fonctionnaires nationaux effectuent de plus fréquemment des inspections, s’ajoutant à celles des organisations nationales et internationales.

Système disciplinaire durant la détention

92.Le Règlement relatif au traitement des prisonniers fédéraux énumère les diverses infractions susceptibles d’être commises par les détenus et les sanctions disciplinaires encourues en fonction de leur gravité, notamment:

Avertissement oral, en privé ou en présence d’autres détenus;

Interdiction, pour un mois au maximum, d’avoir des visites, d’envoyer et de recevoir des lettres, d’utiliser la bibliothèque et de participer aux activités de loisirs;

Mise à l’isolement, de huit jours à deux mois;

Mise à l’isolement pendant au moins deux mois et au plus quatre mois;

Déduction d’un tiers du salaire du détenu pour au maximum six mois et transfert du montant correspondant sur le compte de la prison.

93.La majeure partie des prisons sont dotées d’un comité chargé de défendre les intérêts des détenus. Le plus souvent ce comité est saisi pour examen des cas d’infraction à la discipline et transmet sa décision y relative à l’administration de la prison pour qu’elle l’approuve après s’être assurée qu’elle n’est pas contraire au règlement. Dans presque toutes les prisons les membres du comité sont élus par les détenus; dans les autres ils sont désignés par l’administration.

Séparation des différentes catégories de détenus

94.Le Règlement relatif au traitement des prisonniers fédéraux prévoit de séparer les prévenus des condamnés, si possible. Presque toutes les prisons du pays sont vétustes mais le Gouvernement fédéral et plusieurs gouvernements régionaux ont pris des initiatives en vue d’en faire construire de nouvelles. La plupart des prisons ne possèdent que peu de terrains ouverts et ont besoin d’être remises en état et rénovées. La surpopulation carcérale est courante et les prévenus en détention provisoire ne sont pas séparés des condamnés faute de ressources pour construire de nouvelles places. Dans certaines prisons on s’efforce de placer dans des quartiers distincts les détenus souffrant de maladie mentale. L’étude sur les prisons réalisée par la Commission éthiopienne des droits de l’homme montre que la plupart des prisons n’ont pas les moyens de séparer les différentes catégories de prisonniers en raison de leur nombre élevé. La Commission a formulé d’utiles recommandations visant à promouvoir l’amélioration des conditions de détention.

Le système pénitentiaire

95.Depuis 1991, des efforts sont déployés en vue de passer d’un système pénitentiaire punitif et répressif à un système privilégiant la réadaptation et le reclassement. Des progrès sensibles ont été accomplis mais beaucoup reste à faire pour satisfaire aux normes énoncées dans la Constitution, les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par le pays et les normes internationales minimales pour le traitement des prisonniers. Résoudre dans leur totalité des problèmes profondément enracinés persistant depuis longtemps est manifestement une tâche ardue exigeant beaucoup de temps et de ressources.

96.Le système d’administration pénitentiaire repose sur les grands principes suivants:

Exécuter en toute impartialité les décisions des tribunaux;

Fournir des services de réadaptation et de reclassement aux prisonniers afin de les aider à modifier leur attitude et leur comportement et faire d’eux des citoyens respectueux de la loi, paisibles et productifs;

Améliorer les capacités et compétences de l’administration pénitentiaire;

Susciter dans la population une attitude positive à l’égard des services assurés par l’administration pénitentiaire.

97.Ces principes sont inscrits et consacrés dans différents textes régissant le système pénitentiaire. La Proclamation portant création de l’Administration pénitentiaire fédérale dispose qu’elle a pour mission d’accueillir et de garder les détenus et de leur fournir des services de réadaptation et de reclassement afin de les aider à modifier leur attitude et leur comportement et faire des citoyens respectueux de la loi, paisibles et productifs.

98.Le Règlement relatif au traitement des prisonniers fédéraux conforte ce principe en précisant que ce traitement vise avant tout à mettre l’exécution des peines au service de la rééducation et de la réadaptation, et prévoit divers moyens à cet effet, dont des services éducatifs et des programmes de travail pour les détenus. Certaines prisons donnent de l’argent et des vêtements aux détenus dépourvus de moyens de subsistance à leur libération.

Programmes d’éducation, de formation et de travail

99.En vertu du Règlement précité, les autorités pénitentiaires sont tenues de donner aux prisonniers la possibilité de suivre un enseignement général et divers types de formation professionnelle, en accordant la priorité aux détenus analphabètes. L’enseignement et la formation dispensés doivent être conformes au programme approuvé par l’organe compétent. Des certificats de qualification sont délivrés aux détenus reçus aux examens reconnus par l’organe national compétent au terme de leurs cours.

100.La plupart des prisons mettent en œuvre deux types de programmes éducatifs: dans certaines un enseignement scolaire conforme au programme national d’enseignement en dix ans est dispensé, alors que dans d’autres n’est dispensé qu’un enseignement informel de base. Certaines prisons permettent en outre aux détenus de suivre un enseignement à distance.

101.Une formation professionnelle est dispensée aux détenus pour leur permettre d’acquérir des compétences dans différents domaines (menuiserie, serrurerie, couture, tricot, cuisine et restauration, utilisation d’un ordinateur, etc.). Le Règlement préconise d’être particulièrement attentif aux femmes détenues en la matière, mais dans la plupart des prisons elles ne bénéficient que rarement des possibilités d’enseignement général et la formation professionnelle qui leur est dispensée se limite à la couture et au tricot.

Délinquants mineurs

102.En vertu de la Constitution, les délinquants mineurs placés en établissement de rééducation ou de réadaptation doivent être séparés des adultes. Des unités de protection de l’enfance sont en place dans la plupart des postes de police aux niveaux fédéral et régional. Les services de police de plusieurs villes se sont dotés d’unités de protection de l’enfance opérationnelles, mais ce n’est pas encore le cas des grandes agglomérations. Les centres communautaires établis en tant que sous-composantes du programme de protection de l’enfance assurent la prise en charge des petits délinquants et des primodélinquants mineurs signalés aux unités de protection de l’enfance. Les mineurs coupables d’infractions légères ne sont détenus avec les adultes ni dans les locaux de police ni dans les maisons d’arrêt. Les délinquants mineurs sont placés dans un centre communautaire de redressement, qui privilégie le soutien éducatif pour les inciter à s’instruire et éviter qu’ils n’abandonnent l’école pour se livrer à des activités délictueuses.

103.Les centres communautaires de redressement fournissent du matériel de lecture, mènent des programmes d’apprentissage et d’acquisition de compétences pratiques et assurent des services de loisirs, d’orientation et de conseil. Un délinquant mineur peut ainsi être réadapté sans interruption de scolarité et en restant dans sa famille. L’Institut de réadaptation des délinquantes mineures accueille les mineures suspectées de délit.

104.La législation pénitentiaire prévoit des quartiers distincts en fonction de l’âge, si les conditions le permettent, mais, faute de ressources, la situation n’est pas conforme à cette prescription dans la plupart des prisons, qui sont dépourvues de quartiers séparés pour les délinquants mineurs − les rares exceptions étant les prisons d’Addis-Abeba, de Showa Robit, de Ziway et de Jimma. Des efforts visant à remédier à cette carence sont en cours.

105.Afin d’accélérer la justice, l’État a créé des juridictions spécialisées pour connaître des affaires impliquant des groupes de population requérant une attention particulière. Établies en fonction des besoins des communautés, ces juridictions traitent les affaires de délinquance juvénile, de viols et de flagrant délit (système de «traitement en temps réel»); elles sont appuyées par divers professionnels, dont des psychologues et des travailleurs sociaux. Les affaires impliquant des délinquants mineurs sont jugées en moins de deux semaines, en tenant compte des avis de travailleurs sociaux et de psychologues.

Article 11Interdiction de l’emprisonnement au seul motif de l’inexécution d’une obligation contractuelle

106.Le droit éthiopien interdit de contraindre par corps une personne au seul motif de l’inexécution d’une obligation contractuelle, mais la violation délibérée d’une telle obligation au détriment des Forces de défense ou d’un de leurs services auxiliaires est passible d’emprisonnement. Si l’auteur de l’infraction est une personne morale, la peine encourue est une amende.

Articles 12 et 13Droit à la liberté de circulation et de séjour

107.La Constitution et la législation subsidiaire garantissent la liberté de circulation et le droit de choisir librement sa résidence. Divers textes, dont la loi relative aux réfugiés et la loi relative à l’immigration, ont été adoptés pour assurer la réalisation intégrale et le plein exercice de ce droit.

108.En vertu de la Constitution, tout Éthiopien, et tout étranger se trouvant légalement en Éthiopie jouit, sur le territoire national, de la liberté de circuler, de choisir sa résidence et de quitter le pays à tout moment s’il le souhaite, en nette rupture par rapport à la législation antérieure qui exigeait que tout Éthiopien obtienne des autorités un visa de sortie avant de quitter le pays. Tout Éthiopien a le droit constitutionnel de revenir dans son pays. Une personne ne peut être empêchée de quitter le pays qu’en vertu d’une ordonnance à cet effet rendue par un tribunal conformément à la loi.

109.Le Code civil dispose que toute personne est libre d’élire résidence où bon lui semble, ainsi que de changer le lieu de résidence.

110.Le Code pénal dispose que quiconque empêche une personne de se déplacer librement sur le territoire éthiopien sans être légalement habilité à le faire encourt une peine d’emprisonnement simple ou une amende. Commet une infraction toute personne qui, sans être dûment investie d’une autorité légale, interfère avec la liberté d’une autre personne, même pendant un bref laps de temps, et l’empêche de se déplacer comme elle en a le droit. En pareil cas, l’infraction est réputée avoir été commise même si aucun préjudice n’a été causé au plaignant. Il suffit que le plaignant ait été contraint de se comporter d’une certaine manière sous la menace d’un danger indéterminé.

111.La loi révisée relative à la famille dispose que les conjoints déterminent ensemble leur lieu de résidence commun et habilite donc les femmes à décider avec leur conjoint en la matière. Les conjoints peuvent accepter de vivre séparés pour une période de durée déterminée ou indéterminée.

112.La loi dispose que le tuteur d’un mineur fixe le lieu où doit résider ce mineur, lequel ne peut quitter ce lieu qu’avec l’autorisation de son tuteur; dans le cas contraire son tuteur peut le contraindre à revenir.

113.Le droit relatif à l’immigration impose aux étrangers, pour entrer dans le pays, de posséder un document de voyage valide, un visa ou un permis de séjour permanent émis régulièrement et, le cas échéant, un certificat sanitaire valide (selon le pays d’origine) et les autres documents requis par le Ministère des affaires étrangères. Les étrangers d’origine éthiopienne titulaires de la carte d’identité d’origine éthiopienne n’ont pas besoin de visa d’entrée ou/et de titre de séjour pour entrer ou/et vivre en Éthiopie.

114.Les étrangers résidant en Éthiopie doivent être enregistrés auprès du Service national de renseignement et de sécurité, sauf les diplomates, fonctionnaires internationaux et membres de leur famille résidant en Éthiopie et les étrangers reconnus comme réfugiés par le Gouvernement éthiopien et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Un étranger inscrit auprès du Département principal de l’immigration et de la nationalité reçoit un titre de séjour temporaire ou permanent.

115.Un permis de séjour permanent est délivré à un étranger s’il est entré muni d’un visa d’immigrant, s’il a un domicile en Éthiopie, s’il a vécu en Éthiopie durant au moins trois ans avant le dépôt de sa demande, s’il est marié à une Éthiopienne ou inversement, s’il réalise des investissements en Éthiopie ou y mène des activités humanitaires, s’il a fait ou va faire une contribution exceptionnelle aux intérêts de l’Éthiopie. Un permis de séjour temporaire d’un an est délivré à toute personne n’ayant pas droit à un permis de séjour permanent inscrite auprès du Département principal de l’immigration et de la nationalité.

116.Les réfugiés n’ont pas besoin de visa pour entrer dans le pays ni de permis de séjour pour y vivre. Quand le statut de réfugié est reconnu à une personne, elle reçoit une carte d’identité l’indiquant; une carte d’identité indiquant son statut de demandeur d’asile est délivrée à une personne qui sollicite le statut de réfugié jusqu’à l’examen de sa demande. Ces personnes n’ont pas besoin de présenter un document de voyage valide ou un certificat sanitaire international pour entrer dans le pays. Un document de voyage valide leur est délivré pour leur permettre de quitter le pays définitivement ou avec possibilité de retour.

117.Un réfugié résidant légalement en Éthiopie ne peut être expulsé que pour des raisons liées à la sécurité nationale et à l’ordre public. L’exécution d’un arrêté d’expulsion peut, à la demande du réfugié concerné, être différée pendant un laps de temps raisonnable pour lui permettre de solliciter son admission dans un pays autre que celui vers lequel il est prévu de l’expulser. Un arrêté d’expulsion ne peut être émis que par le chef du Service national de la sécurité et du renseignement, le réfugié concerné ayant le droit de défendre sa cause.

118.Dans l’ordre juridique éthiopien, nul ne peut se voir refuser l’entrée en Éthiopie, en être refoulé ou expulsé s’il risque de ce fait d’être persécuté ou torturé ou de voir sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté menacée au motif de sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un groupe social particulier ou ses opinions politiques.

119.Un étranger ne peut être expulsé ou éloigné que conformément à la loi et à titre exceptionnel, les motifs étant les suivants: il ne dispose pas de moyens de subsistance ou risque de devenir une charge pour la communauté; il s’agit d’un criminel notoire; il est toxicomane ou souffre d’une maladie contagieuse dangereuse; il a menacé la sécurité de l’État; il a fourni des renseignements erronés ou a violé les dispositions de la Proclamation et des règlements relatifs à l’immigration. Les arrêtés d’éloignement sont susceptibles d’appel. L’expulsion en masse d’étrangers est interdite.

Article 14Égalité devant la justice

120.En Éthiopie, le droit à un traitement égal devant les tribunaux et autres organes administrant la justice a rang constitutionnel. Aux termes de la Constitution: «Chacun a le droit de porter une affaire devant la justice et d’obtenir une décision ou un jugement rendu par un tribunal ou tout autre organisme compétent disposant d’un pouvoir judiciaire.». La Constitution garantit le droit de toute association représentant les intérêts collectifs ou individuels de ses membres ou de tout groupe ou de toute personne membre d’un groupe de personnes ayant des intérêts similaires ou le représentant, de porter une affaire devant la justice et d’obtenir une décision ou un jugement rendu par un tribunal ou tout autre organisme compétent disposant d’un pouvoir judiciaire. Elle garantit ainsi l’égalité de chacun devant les tribunaux et les autres organes du pouvoir judiciaire.

121.Le Code de procédure civile, qui régit les modalités d’administration de la justice dans les affaires civiles portées devant les tribunaux ordinaires et d’autres juridictions, dispose que toute personne peut intenter une action civile si elle a un intérêt direct. Le Code dispose en outre que les personnes n’ayant pas les moyens d’intenter une action en justice peuvent le faire en étant exemptées des frais de justice, en tant qu’indigents. Cette disposition tend à éviter que le coût de la procédure judiciaire entrave l’accès à la justice.

122.Le Code de procédure pénale, qui énonce les règles d’administration de la justice pénale, s’applique à toutes les personnes. Aucune discrimination fondée sur la race, la nationalité ou le sexe n’est autorisée. Dans le souci de promouvoir l’accès à la justice, le Ministère de la justice fournit une aide juridictionnelle aux personnes victimes de violations des droits de l’homme. Le Ministère est investi du pouvoir d’intenter une action civile au nom d’une personne incapable de saisir un tribunal.

123.La Constitution reconnaît les pratiques coutumières susceptibles de concourir au règlement d’un différend si elles sont compatibles avec ses dispositions et garantit ainsi que les pratiques coutumières contraires au droit des droits de l’homme ne portent pas atteinte au droit d’accès à la justice. Le système juridique garantit donc à chacun le droit d’accès aux juridictions de jugement et à l’égalité devant elles.

Droit d’être entendu équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial

124.La Constitution dispose que tout prévenu a le droit d’être jugé en audience publique par un tribunal ordinaire dans un délai raisonnable après sa mise en accusation. Le tribunal ne peut examiner une affaire à huis clos qu’en vue de protéger le droit au respect de la vie privée des parties concernées, la moralité publique ou la sécurité nationale. La Proclamation portant création de la Cour fédérale réaffirme que les affaires doivent être jugées en audience publique et que des affaires ne peuvent être jugées à huis clos que dans l’intérêt de la sécurité du public et de l’État ou de la moralité et de la décence publiques.

125.La Constitution institue un pouvoir judiciaire indépendant en indiquant que les juridictions de chaque degré doivent être libres de toute ingérence ou influence de la part de tout organisme gouvernemental, tout agent de l’État ou toute autre partie; elle dispose que les juges exercent leurs fonctions en toute indépendance et ont pour seul guide la loi.

126.Un juge ne peut être démis de ses fonctions avant l’âge de la retraite (60 ans), sauf dans les éventualités suivantes:

Le Conseil judiciaire décide de le révoquer pour violation du règlement disciplinaire ou pour incompétence ou inefficacité flagrante;

Le Conseil judiciaire décide qu’un juge n’est plus en état de s’acquitter de ses responsabilités pour cause de maladie;

La Chambre des représentants des peuples ou le Conseil de l’État concerné approuve par un vote à la majorité une décision à cet effet du Conseil judiciaire. Le départ à la retraite d’un juge ne peut être reporté au-delà de l’âge légal. Un juge fédéral peut renoncer à ses fonctions en démissionnant, sous réserve d’un préavis de deux mois.

127.La Cour suprême fédérale établit le budget des tribunaux fédéraux, le soumet à la Chambre des représentants des peuples pour approbation et l’exécute après approbation. Le budget des tribunaux d’un État est établi par son Conseil.

128.Le Président et le Vice-Président de la Cour suprême fédérale sont nommés par la Chambre des représentants des peuples sur recommandation du Premier Ministre. Les candidats aux autres postes de juges fédéraux sont choisis par le Conseil judiciaire fédéral avant soumission à la Chambre par l’intermédiaire du Premier Ministre pour nomination. Le Président et le Vice-Président de la Cour suprême d’un État régional sont nommés par son Conseil d’État sur recommandation du chef de l’exécutif dudit État. Les juges de la Cour suprême et de la Haute Cour d’un État régional sont nommés par son Conseil d’État sur recommandation du Conseil judiciaire dudit État. Avant de soumettre des candidatures à son Conseil d’État, le Conseil judiciaire de l’État régional considéré est tenu de recueillir l’avis du Conseil judiciaire fédéral sur ces candidatures et de joindre ses observations et recommandations y relatives à sa soumission. Si le Conseil judiciaire fédéral ne rend pas son avis dans les trois mois, ledit Conseil d’État peut entériner les nominations.

129.Peut être nommé juge fédéral tout Éthiopien respectueux de la Constitution qui: a une formation juridique ou a acquis par l’expérience les compétences juridiques requises, a une réputation de diligence, a le sens de la justice et de la bonne conduite, consent à exercer la fonction de juge, a au moins 25 ans. Nul ne peut exercer la fonction de juge en étant au service d’un organe législatif ou exécutif de l’État ou membre d’une organisation politique.

130.Un juge de tribunal fédéral ne peut connaître d’une affaire dans les cas suivants: un lien de consanguinité ou d’affinité l’unit à une des parties ou à son avocat; le litige porte sur une affaire dont une des personnes des parties a eu ce juge pour tuteur, représentant légal ou avocat; il a exercé une fonction en rapport avec l’affaire ou l’objet du litige; il est partie à une affaire judiciaire pendante à laquelle une des parties ou son avocat est partie; des raisons suffisantes donnent à penser qu’un déni de justice pourrait en résulter. Un juge doit se dessaisir dès qu’il constate un tel empêchement et est alors remplacé par un autre. Si une partie à une affaire estime que le juge ne doit pas siéger pour un des motifs susmentionnés, elle soumet par écrit au tribunal une demande de récusation de ce juge. Ce dispositif concourt à assurer l’impartialité des juges.

131.Durant une procédure, un accusé a le droit constitutionnel d’être présumé innocent jusqu’à preuve du contraire. Si un tribunal est saisi d’une affaire dans laquelle il estime que les preuves contre l’accusé font défaut ou ne suffisent pas à motiver sa condamnation, il prononce son acquittement. Il est interdit aux autorités policières, judiciaires et autres autorités publiques d’exprimer publiquement leur opinion quant à la culpabilité de l’accusé avant que la justice n’ait statué. Pour éviter tout préjugé contre l’accusé et garantir la présomption d’innocence, ses condamnations antérieures ne doivent être divulguées au tribunal qu’après sa condamnation, sauf disposition contraire expresse de la loi.

Droits d’une personne accusée d’une infraction pénale

132.La Constitution et le Code de procédure pénale énoncent les garanties minimales dont bénéficie tout accusé dans le système de justice pénale. La Constitution énonce les droits d’un individu accusé d’une infraction pénale en reprenant in extenso les dispositions du Pacte. Un accusé a le droit constitutionnel d’être informé suffisamment en détail et par écrit de l’accusation portée contre lui. Le Président du tribunal donne lecture de l’acte d’accusation à l’accusé puis lui demande s’il conteste cette accusation. Toute personne arrêtée a le droit de garder le silence. Dès son arrestation elle a le droit d’être informée rapidement, dans une langue qu’elle comprend, que toute déclaration de sa part pourra être retenue comme preuve à charge devant le tribunal. Cette disposition garantit le droit de ne pas être forcé de témoigner contre soi-même. La Constitution dit que toute preuve obtenue sous la contrainte est irrecevable.

133.Un accusé a le droit constitutionnel d’être représenté par un avocat de son choix ou de bénéficier d’une représentation légale aux frais de l’État s’il n’a pas les moyens de payer un avocat car autrement un déni de justice en résulterait. Dans la pratique, l’État met un avocat à la disposition de tout accusé n’ayant pas les moyens d’en rémunérer un si l’infraction qui lui est imputée emporte quinze ans ou plus d’emprisonnement. Si un accusé n’est pas représenté par un avocat, le tribunal s’assure avec diligence que ledit accusé est bien informé des charges retenues contre lui et qu’est respecté son droit de soumettre les témoins à un contre-interrogatoire, de contester les preuves produites et de présenter des arguments pour sa défense.

134.Créé sous les auspices de la Cour suprême fédérale, le Bureau des défenseurs publics fournit gratuitement une assistance juridictionnelle et un avocat aux personnes traduites devant les tribunaux fédéraux. Entre 1995 et 2007, le Bureau a fourni une aide juridictionnelle gratuite à 23 835 indigents, dont des individus accusés de crimes de haine, comme le génocide, ou d’atteintes à la vie, à la personne et à la santé, ainsi qu’à des mineurs délinquants. Ces cinq dernières années, le Bureau a fourni gratuitement des services juridiques à 6 485 personnes accusées de crimes passibles de la peine capitale.

135.Tout accusé a le droit constitutionnel de demander l’assistance d’un interprète aux frais de l’État si la procédure judiciaire se déroule dans une langue qu’il ne comprend pas. Pour donner effet à cette garantie constitutionnelle, les tribunaux mettent des interprètes à la disposition des accusés qui ne comprennent pas leur langue de travail. À l’échelon fédéral, par exemple, la langue de travail est l’amharique et les tribunaux sont tenus de fournir un interprète aux personnes qui ne comprennent pas cette langue. Dans les États régionaux et dans plusieurs zones et woredas dont la langue officielle est une langue locale, des services d’interprétation sont de même fournis aux personnes ne la parlant pas. Les interprètes sont recrutés à titre permanent ou ad hoc eu égard aux contraintes liées aux ressources.

136.Un accusé doit comparaître en personne, accompagné, le cas échéant, de son avocat, pour être informé des charges retenues contre lui et s’en défendre. L’accusé doit être gardé de manière adéquate et ne pas être enchaîné, sauf s’il existe de sérieuses raisons de penser qu’il est dangereux ou peut devenir violent ou tenter de s’évader. Une procédure n’est pas engagée s’il est impossible de localiser l’accusé et que l’affaire ne peut être jugée par contumace. Si l’accusé ne comparaît pas sans raison valable à la date fixée pour l’audience, le tribunal constate son absence et peut ordonner son jugement par contumace.

137.Nul accusé ne peut être jugé en son absence sauf si l’infraction imputée emporte une peine d’emprisonnement de rigueur d’au moins douze ans ou figure parmi les infractions visées aux articles 346 à 354 du Code pénal emportant une peine d’emprisonnement de rigueur ou une amende maximale de 5 000 birr. Si la cour décide de juger l’affaire par contumace, elle doit décerner un mandat de comparution indiquant la date de l’audience et notifiant à l’accusé qu’il sera jugé par contumace s’il ne se présente pas le jour fixé.

138.Le droit à un procès rapide est inscrit dans la Constitution et le Code de procédure pénale. Tout accusé a le droit d’être déféré devant un juge dans les quarante-huit heures suivant son arrestation et l’enquête policière doit être menée à son terme sans retard indu. Dans les quinze jours suivant la réception du rapport de police ou du rapport d’enquête préliminaire, le procureur doit déterminer les charges retenues et en saisir la juridiction compétente. Ces obligations incombant à la police et au procureur assurent la rapidité du procès pénal.

139.En vue de remédier aux retards dans l’administration de la justice pénale, qui sont un problème chronique dans le pays, et garantir un procès rapide, le Gouvernement a mis en œuvre une série de mesures, la plus notable étant l’introduction du «traitement en temps réel», inspiré de la justice française, devant permettre à la justice de rendre une décision en quelques jours, voire un jour pour les flagrants délits, les affaires ne requérant pas d’analyse complexe des preuves ou les affaires dans lesquelles l’accusé reconnaît sa culpabilité. Une étude sur son extension à d’autres types d’infractions est en cours.

140.Un accusé a le droit constitutionnel d’avoir un accès complet à toute preuve produite contre lui, d’interroger les témoins à charge, de citer ou présenter des éléments ou preuves à décharge et de demander la comparution et l’audition de témoins devant le tribunal en son nom. Après avoir constaté que des charges existent, et entendu, le cas échéant, les témoins de la partie lésée, le tribunal demande à l’accusé de l’informer en faisant une déposition et en citant des témoins à décharge.

141.L’accusé ou son avocat peut alors exposer les preuves qu’il se propose de faire valoir et citer, le cas échéant, ses témoins et experts, qui prêtent serment ou s’engagent sur l’honneur avant de témoigner. Si l’accusé souhaite faire une déclaration, il parle en premier. Pareille déclaration ne peut pas donner lieu à un contre-interrogatoire, mais le tribunal peut demander à l’accusé des éclaircissements sur toute partie de cette déclaration.

142.Le Code pénal contient des dispositions applicables aux jeunes mineurs, à savoir les enfants âgés de 9 à 15 ans, qui ne peuvent être jugés avec un adulte. Si l’auteur d’une infraction a plus de 15 ans et moins de 18 ans au moment des faits, il est jugé en vertu du droit pénal ordinaire. Les jeunes mineurs ne sont pas passibles des peines ordinaires applicables aux adultes et ne peuvent être détenus avec des délinquants adultes.

143.Le Code de procédure pénale institue une procédure spéciale aux affaires impliquant des jeunes mineurs. Le procureur ne peut engager de poursuites contre un jeune mineur que sur instruction d’un juge. Toute procédure judiciaire visant un jeune mineur se déroule à huis clos. Ne peuvent être présents à l’audience que les témoins, les experts, les parents ou tuteurs et les représentants d’organismes d’aide sociale. Devant la Haute Cour, le procureur doit être présent durant toute audience. Toutes les procédures sont conduites de manière informelle. Il est donné lecture de l’accusation, de la plainte ou des charges au jeune mineur puis il lui est demandé ce qu’il a à dire en réponse. Si l’accusé comprend parfaitement l’accusation et se reconnaît coupable, le tribunal enregistre ce que le jeune mineur a dit et peut le condamner séance tenante.

144.Si l’accusé comprend parfaitement l’accusation ou les charges mais nie sa culpabilité, le tribunal s’enquiert des témoins à citer à charge. Le jeune mineur, son représentant ou son avocat peut demander à ce que tout témoin soit cité. Tous les témoins sont interrogés par le tribunal puis contre-interrogés par la défense. Le jugement est rendu comme dans une affaire ordinaire. Le tribunal est tenu d’expliquer sa décision au jeune mineur et de le mettre en garde contre tout nouvel écart.

145.Le tribunal tient compte de l’âge, du caractère et du degré de développement mental et moral du jeune délinquant pour fixer la peine ou la mesure à son encontre eu égard à sa valeur éducative. Si un enfant âgé de 9 à 15 ans a commis une infraction, le tribunal peut, notamment, prononcer le placement (en institution de soins ou d’éducation surveillée, école ou résidence surveillée ou maison de redressement), l’admonestation ou la réprimande.

146.Tout tribunal ayant condamné un jeune mineur à une mesure peut, d’office ou sur demande de l’intéressé, de son représentant légal ou de la personne ou de l’institution à laquelle il a été confié, remplacer ou modifier cette mesure à tout moment si l’intérêt du jeune mineur l’exige. Il peut être enjoint aux parents ou à toute autre personne légalement responsable de la garde du jeune mineur de prendre en charge tout ou partie du coût de son entretien et de sa formation si du fait de leur incapacité à assurer à l’intéressé les soins et la garde voulus, le tribunal ordonne que ce jeune mineur soit confié à une autre personne ou à une institution de redressement ou de soins. Le tribunal peut, s’il l’estime opportun, avertir, admonester ou réprimander les parents ou autres personnes légalement responsables du jeune mineur s’il apparaît qu’ils n’ont pas accomplis leurs obligations. Avant de prononcer une sanction ou mesure, le tribunal peut ordonner le placement du délinquant mineur en observation en centre médical ou éducatif, foyer ou toute autre institution appropriée.

147.Une chambre spéciale a été instituée dans la pratique pour connaître des affaires impliquant des mineurs délinquants. Des psychologues et des travailleurs sociaux sont chargés de fournir une assistance aux juges et aux délinquants mineurs. Le tribunal statue en tenant compte des recommandations des psychologues et des travailleurs sociaux. Le jugement d’une affaire impliquant des mineurs délinquants prend en moyenne deux mois.

Réexamen par une juridiction supérieure

148.La Constitution dispose que toute personne a le droit de faire appel devant la juridiction compétente de toute ordonnance ou tout jugement rendu en première instance. Le Code de procédure pénale dispose qu’une condamnation prononcée par une juridiction pénale est susceptible d’appel. Une décision avant dire droit d’un tribunal accordant ou refusant un ajournement ou concernant une objection ou bien la recevabilité/l’irrecevabilité des preuves est insusceptible d’appel, mais peut constituer un motif d’appel contre le jugement. Une personne condamnée peut faire appel de sa condamnation et de sa peine; une personne condamnée sur la base d’une reconnaissance préalable de culpabilité peut faire appel contre le quantum ou la légalité de la peine mais non contre sa condamnation.

149.La déclaration d’appel contre un jugement doit être notifiée par l’appelant ou son avocat dans les quinze jours en suivant le prononcé. À la réception d’une déclaration d’appel, le greffier fait établir une copie du jugement attaqué pour remise à l’appelant ou à son avocat ou, si l’appelant est en détention, pour expédition au directeur de la prison où il est incarcéré aux fins de remise à l’intéressé. Cette copie doit porter la date à laquelle elle a été établie et le greffier doit certifier la date à laquelle elle a été remise à l’appelant ou son avocat ou expédiée au directeur de la prison. Le mémoire d’appel doit être déposé dans les trente jours suivant réception de la copie du jugement attaqué. La déclaration et le mémoire d’appel doivent être déposés au greffe du tribunal qui a rendu le jugement attaqué.

150.En cas de dépôt hors délai de la déclaration ou du mémoire d’appel, le tribunal contre le jugement duquel l’appel est dirigé n’accepte pas cette déclaration ou ce mémoire et prie la personne l’ayant soumis d’adresser une demande écrite à la cour d’appel pour solliciter l’autorisation de faire appel hors délai. La demande doit clairement indiquer pour quelles raisons l’appel doit être accepté hors délai et les causes du retard. La cour d’appel n’accorde l’autorisation de faire appel hors délai qu’après s’être assurée que le retard n’est pas imputable à une carence du requérant. Si la cour d’appel accorde l’autorisation de faire appel hors délai, elle indique la date à laquelle doit être déposé le mémoire d’appel.

151.Si la cour d’appel considère des preuves supplémentaires nécessaires pour statuer sur un appel, elle expose ses motifs et peut recueillir elle-même ces preuves. Les éléments ainsi recueillis doivent être considérés comme ayant été examinés durant le procès en première instance. Après examen de l’affaire, la cour d’appel peut rejeter l’appel si elle estime qu’il n’y a pas de motif suffisant pour infirmer. Dans le cas contraire, elle peut: infirmer le jugement attaqué par un arrêt d’acquittement ou d’annulation et ordonner que l’accusé soit rejugé par une juridiction compétente, ou le déclarer coupable et le condamner selon la loi; si l’appel vise la condamnation et la peine, infirmer la condamnation et acquitter l’accusé ou bien maintenir, alourdir ou réduire la peine, avec ou sans modification des conclusions; si l’appel ne vise que la condamnation, infirmer les conclusions et la condamnation et acquitter l’accusé; si l’appel ne vise que la peine, confirmer, alourdir ou réduire la peine. Si la juridiction d’appel confirme la condamnation, mais modifie la peine ou inversement, le second appel ne peut porter que sur l’élément modifié.

Ne bis in idem

152.Le principe d’autorité de la chose jugée est inscrit dans la Constitution, qui dispose que nul ne peut être jugé et condamné du chef d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné conformément au droit pénal et à la procédure pénale. Le Code pénal indique aussi que nul ne peut être poursuivi ou puni du chef d’une infraction pour laquelle il a déjà été condamné, puni ou soumis à d’autres mesures ou acquitté par une décision définitive rendue conformément à la loi. Le Code de procédure pénale interdit d’engager des poursuites du chef d’une infraction couverte par une mesure de grâce ou d’amnistie.

Article 15Non-rétroactivité des lois

153.La Constitution de la RFDE énonce expressément le principe de non-rétroactivité des lois pénales et nul ne peut donc être condamné au pénal pour un acte ou une omission qui ne constituait pas une infraction pénale au moment de leur commission. Une loi pénale ne peut s’appliquer rétroactivement qu’à l’avantage de l’accusé ou du condamné.

154. Le nouveau Code pénal éthiopien, entré en vigueur en 2004 et abrogeant le texte de 1960, consacre ce même principe en disposant qu’une loi pénale ne s’applique rétroactivement qu’à l’avantage de l’accusé ou du condamné. Si un acte incriminé tant par le Code pénal abrogé que par le nouveau a été commis avant l’entrée en vigueur du nouveau, il est jugé conformément aux dispositions du Code pénal abrogé. Si un acte commis avant l’entrée en vigueur du Code nouveau pénal n’était pas incriminé par le Code pénal abrogé alors qu’il l’est par le nouveau, il ne peut être poursuivi en vertu du nouveau. Un acte qu’incriminait le Code pénal abrogé n’est pas punissable si le nouveau Code pénal ne l’incrimine pas et toute procédure engagée en vertu du Code pénal abrogé s’arrête.

Article 16 Reconnaissance de la personnalité

155.La Constitution de la RFDE consacre le droit à la reconnaissance de la personnalité en ces termes: «Chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité.». Le Code civil éthiopien de 1960 dispose que la personne humaine est titulaire de droits de sa naissance à sa mort, sans considération de race, couleur, religion ou sexe. Les organes répressifs du pays sont tenus de respecter et de faire respecter ces droits. Le Code de déontologie des juges indique qu’un juge est tenu de respecter l’humanité, la dignité et les droits des parties. Le Règlement no 44/1997 du Conseil des ministres relatif à l’administration des procureurs fédéraux impose des obligations analogues aux procureurs: «Un procureur doit toujours avoir à l’esprit qu’il agit dans l’intérêt du public» et «doit respecter les droits de l’homme et la dignité humaine».

Article 17 Droit à l’intimité, à l’honneur et à la réputation

156.La Constitution de la RFDE dispose que toute personne a le droit à la vie privée, lequel englobe la protection contre la fouille d’une personne, de son domicile et de ses biens et contre la saisie de tous biens en sa possession, ainsi que le droit à l’inviolabilité de ses notes et de sa correspondance, dont le courrier postal, et de ses communications par téléphone et autres moyens de télécommunications et appareils électroniques.

157.Toute restriction de ces droits est assujettie à des règles strictes: ils ne peuvent être restreints qu’en cas de circonstances impérieuses et en vertu de dispositions législatives spécifiques tendant à sauvegarder la sécurité nationale ou la paix publique, prévenir la criminalité ou protéger la santé, la moralité publique ou les droits et libertés d’autrui.

158.La Constitution de la RFDE dispose que toute personne a le droit au respect de sa dignité humaine, de sa réputation et de son honneur, ainsi que le droit au libre développement de sa personnalité d’une manière compatible avec les droits des autres citoyens. Le plein exercice de ces droits impose à leurs titulaires l’obligation de s’abstenir de toute ingérence arbitraire et illégale et de toute atteinte contre leur jouissance. La Constitution dispose clairement que les agents publics sont tenus de respecter et protéger ces droits. Les titulaires d’obligations sont tant les personnes physiques que morales.

159.S’ajoutant à cette garantie constitutionnelle, certains aspects du droit à la vie privée sont protégés par des textes comme le Code civil, le Code pénal et le Code de procédure pénale. La législation prévoit des recours au civil et au pénal en cas de violation des droits. Le Code civil énonce les droits liés à la personnalité, dont le droit de toute personne de ne pas être soumise à une fouille sauf disposition contraire de la loi. Le Code de procédure pénale dispose que toute personne arrêtée ne peut être fouillée que si l’on peut raisonnablement penser qu’elle est porteuse d’un objet pouvant constituer une preuve matérielle de l’infraction dont elle est accusée ou soupçonnée. Dans tous les cas, la fouille doit être effectuée par une personne du même sexe que la personne arrêtée.

160.Les fouilles corporelles effectuées à l’entrée d’institutions gouvernementales, non gouvernementales ou intergouvernementales visent à sauvegarder la sécurité nationale et la paix publique et non à recueillir des preuves aux fins d’une procédure pénale.

161.Toute fouille personnelle et corporelle doit être effectuée dans le plein respect de la dignité de la personne qui y est soumise. Des appareils à rayons X sont utilisés dans certains lieux à cette fin, mais ils sont peu nombreux en raison des contraintes budgétaires.

162.Le Code civil dispose que le domicile d’une personne est inviolable. Nul ne peut donc pénétrer dans le domicile d’autrui contre sa volonté et nulle perquisition ne peut y être effectuée, sauf dans les cas prévus par la loi.

163.Le Code de procédure pénale dispose qu’un policier ne peut fouiller sans mandat de perquisition des locaux privés, sauf dans deux cas: un policier poursuit un délinquant qui pénètre dans un local ou y place un article constituant l’objet d’une infraction; il est signalé à un policier qu’on peut raisonnablement penser que des articles pouvant constituer la preuve matérielle d’une infraction ayant donné lieu à une plainte ou à une accusation et emportant une peine supérieure à trois ans d’emprisonnement ont été dissimulés ou placés dans un local et que la police a de bonnes raisons de croire que ces articles risquent d’en être extraits en cas de retard dans l’obtention d’un mandat de perquisition.

164.Un tribunal ne délivre un mandat de perquisition que s’il estime que ce mandat est conforme au but de la justice, de toute enquête, du procès ou de tout autre acte de procédure légale. La loi fixe plusieurs limites au pouvoir de la police de procéder à une perquisition avec ou sans mandat. Un mandat de perquisition doit indiquer les biens à rechercher et à saisir et un policier ne peut saisir d’autres biens que ceux visés dans ce mandat. Une perquisition ne peut en principe être effectuée qu’entre 6 et 18 heures, sauf indication contraire expresse du tribunal. Le policier doit dresser la liste des biens saisis et, si possible, la faire vérifier et signer par une personne indépendante.

165.Le Code pénal et le Code civil sanctionnent la violation de propriété privée.

166.La Constitution et le Code civil de la RFDE garantissent l’inviolabilité des notes et de la correspondance, mais certaines lois lui imposent des limites à titre exceptionnel.

167.La Proclamation no 434/2005 portant révision des procédures spéciales et règles de preuve en matière d’anticorruption dispose que dans le cadre d’une enquête sur des faits de corruption, le chef de l’organe compétent (habilité à enquêter et/ou poursuivre ce type d’infraction) peut si nécessaire ordonner l’interception des communications par téléphone, autres moyens de télécommunications et dispositifs électroniques, et du courrier postal.

168.La Proclamation assujettit à certaines conditions l’exercice de ce pouvoir par les autorités. Un mandat d’écoute doit indiquer l’infraction motivant l’interception, la durée de l’interception et le numéro de la ligne de téléphone ou de télécommunications; sa durée ne peut dépasser quatre mois sauf décision contraire du chef de l’organe compétent.

169.En vertu du Code civil, le destinataire d’une lettre confidentielle ne peut en révéler le contenu sans le consentement de son auteur, sauf dans le cadre d’une procédure judiciaire après avoir démontré qu’il y a un intérêt légitime.

170.Le Code civil dispose en outre qu’une personne violant toute disposition d’une loi posant l’inviolabilité des notes et de la correspondance d’autrui commet une infraction et voit sa responsabilité civile engagée.

Droit à l’honneur et à la réputation

171.Une atteinte ou offense illégale à l’honneur ou à la réputation d’une personne engage la responsabilité civile et pénale de son auteur. La victime a le droit d’exiger qu’il soit mis fin à l’atteinte ou à l’offense illégale et de réclamer des dommages-intérêts en vertu de la loi sur la diffamation. Le Code pénal réprime diverses atteintes à l’honneur et à la réputation.

Article 18Liberté de pensée, de conscience et de religion

172.La Constitution de la RFDE consacre la liberté de pensée, de conscience et de religion dans les mêmes termes que les dispositions y relatives du Pacte: «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé, par le culte et l’accomplissement des rites, les pratiques et l’enseignement.».

173.La liberté de pensée et de conscience englobe le droit d’une personne de choisir et professer librement toute conviction. Elle s’applique à la perpétuation ou à l’adoption de religions traditionnelles ou de religions et croyances présentant des caractéristiques ou des pratiques institutionnelles analogues à celles des religions traditionnelles. Elle s’applique au droit des athées et des agnostiques de professer leur conviction et de l’enseigner.

174.Toute personne professant une quelconque religion ou conviction jouit sur un pied d’égalité du droit de l’exprimer directement par le culte et l’accomplissement de rites et de cérémonies. Toutes les religions jouissent de possibilités égales en matière d’accès à la terre pour la construction de lieux de culte.

juma.

176.Les principales fêtes chrétiennes et musulmanes sont des jours fériés légaux. Quatre fêtes chrétiennes sont des jours fériés nationaux officiels: Meskel (Journée de la croix), Noël, Épiphanie et Pâques. Le Ramadan, l’Id Aladha (Arafat) et l’anniversaire du prophète Mahomet (Maulid Annabi) sont aussi des jours fériés nationaux.

177.La liberté de professer et pratiquer une religion ou une conviction englobe le respect de prescriptions alimentaires, le port de vêtements ou couvre-chefs distinctifs, la participation à des rites associés à certaines étapes de la vie et l’utilisation d’une langue particulière communément parlée par un groupe. Dans les internats, le règlement tient compte des préférences religieuses des élèves en matière d’alimentation. Dans les établissements d’enseignement supérieur, les repas sont servis séparément aux étudiants chrétiens et aux musulmans compte tenu des règles alimentaires de leur religion.

178.La Constitution consacre la séparation de l’État et de la religion et dispose que l’État ne doit pas s’ingérer dans les affaires religieuses. Dans la pratique, ce principe est notamment mis en œuvre par la non-ingérence de l’État dans l’élection des dirigeants religieux. Toutes les religions choisissent leurs dirigeants, officiants et enseignants librement selon leur procédure de sélection interne.

179.Les adeptes de toute religion ou conviction peuvent librement fonder des séminaires ou des écoles religieuses. L’église orthodoxe éthiopienne (Tewahido), les catholiques, les protestants et les musulmans ont ouvert des établissements qui forment des officiants, des enseignants et d’autres religieux. L’église Tewahido forme ses prêtres dans de nombreux monastères et séminaires et possède une faculté de théologie formant des professeurs de religion du niveau de la licence. Les Éthiopiens musulmans ont, dans différentes régions, des institutions formant des officiants au niveau intermédiaire. L’église catholique dispense une éducation religieuse dans plusieurs séminaires. Les protestants ont des institutions religieuses formant les personnes appelées à fournir des services spirituels; à Addis-Abeba ils disposent de trois établissements d’enseignement supérieur de théologie des premier et second cycles.

180.Le nombre des publications et textes religieux et leur diffusion ne cessent de s’accroître. On dénombre neuf publications religieuses hebdomadaires, bimensuelles ou mensuelles et huit trimestrielles. Divers ouvrages religieux ont été publiés et distribués dans tout le pays. Les institutions religieuses diffusent librement leurs enseignements sur divers supports écrits, notamment des brochures.

181.La liberté d’adopter ou de professer la religion ou conviction de son choix est un droit absolu, tandis que la liberté de l’exprimer ou de la manifester est sujette à limitations. Ces limitations doivent être prescrites par la loi et s’imposer pour protéger la sécurité publique, la paix, la santé, l’éducation, la moralité publique et les droits fondamentaux et libertés d’autrui, ainsi que d’assurer la séparation de l’État de la religion.

182.La Constitution interdit de restreindre ou empêcher par la contrainte ou tout autre moyen l’exercice de la liberté de professer la religion ou conviction de son choix.

183.Le système éducatif, tel qu’envisagé dans les objectifs sociaux de la Constitution de la RFDE, est exempt de toute influence religieuse. Pour en assurer la laïcité, entre autres, un enseignement relatif à l’éthique et à l’instruction civique a été conçu et mis en œuvre.

184.Le Code pénal incrimine les actes blasphématoires.

Article 19Liberté d’expression

185.La Constitution dispose que toute personne jouit du droit d’avoir des opinions et du droit à la liberté d’expression sans aucune interférence, ce dernier englobant la liberté de rechercher, recevoir et diffuser toute information et idée, sans considération de frontières, sous forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix.

186.La Constitution de la RFDE garantit la liberté de la presse et des autres médias ainsi que la liberté de création artistique. La liberté de la presse englobe expressément l’interdiction de toute forme de censure et l’accès aux informations d’intérêt public. La Constitution dispose en outre que dans l’intérêt de la libre circulation des informations, des idées et des opinions − essentielle au fonctionnement d’une démocratie − la presse, en tant qu’institution, bénéficie d’une protection juridique propre à en assurer l’indépendance opérationnelle et la capacité à faire place à la diversité des opinions. Tout média financé ou contrôlé par l’État doit être géré de façon à en assurer la capacité à promouvoir la diversité dans l’expression des opinions.

187.La Constitution de la RFDE dispose que les droits ne peuvent être limités que par des lois assises sur le principe selon lequel la liberté d’expression et d’information ne peut être limitée au motif de la teneur de l’opinion exprimée ou de son effet. Des limitations légales peuvent être édictées en vue de protéger le bien-être de la jeunesse ou l’honneur et la réputation de la personne.

188.La Proclamation no 34/1992 relative à la presse, qui garantit la liberté, les droits et les devoirs de la presse, a été remplacée il y a peu par la Proclamation no 590/2008 relative à la liberté des médias et à l’accès à l’information, qui tend à préserver et consolider les acquis et les pratiques positives en matière de liberté d’expression tout en levant les obstacles structurels et institutionnels à l’indépendance des médias et au libre-échange des informations et idées, afin de garantir l’existence de médias indépendants et diversifiés aux normes éthiques et compétences professionnelles élevées et de promouvoir et consolider les valeurs de transparence et de responsabilité dans la conduite des affaires publiques.

189.Entre le 21 octobre 1992 et le 7 juillet 2008, des licences ont été attribuées à 1 267 organes de presse (768 journaux, 316 revues, 180 éditeurs électroniques et 3 agences de presse), dont 550 journaux et 175 revues déjà implantés sur le marché et 100 maisons d’édition électronique et 2 agences de presse en activité (au tableau 56 du document de base commun figurent la liste des organes de presse et d’autres détails).

190.L’État a organisé de nombreuses formations pour les journalistes en vue de renforcer leurs capacités et leur éthique professionnelles. Il a appuyé la création et le renforcement d’associations de journalistes, une aide notable ayant en particulier été apportée à l’Association des femmes journalistes. Le Gouvernement invite les organes de presse privés à ses conférences de presse; en 2007-2008, des organes de presse privés ont assisté à 69 conférences de presse du Gouvernement aux côtés des organes de presse officiels.

191.Malgré les progrès, des difficultés persistent dans ce domaine. Des organes de presse privés ont eu un comportement irresponsable nuisible au bon développement démocratique du pays. Ils ont attisé les violences consécutives aux élections nationales de 2005.

192.Dans la plupart des cas, désireux d’inciter la presse à contribuer aux efforts de développement du pays dans tous les domaines, l’État a fait preuve de tolérance face aux violations de la loi, mais cette attitude s’est révélée inopérante en mai 2005 et l’État a dû engager des poursuites contre les médias ayant violé la légalité; dans quelque 17 affaires de délits de presse, les tribunaux ont prononcé des condamnations pour violation du régime légal de la presse et du droit pénal. En fin de compte, les condamnés ont été amnistiés dans le souci d’instaurer une société tolérante et de consolider les acquis démocratiques du pays.

193.Parmi les autres obstacles à l’exercice de la liberté de la presse figurent le faible niveau de développement de certains organes de presse privés lié à des problèmes internes et l’absence d’organisme ou conseil faîtier des journalistes habilité à sanctionner les fautes professionnelles des journalistes et à regrouper un maximum d’associations de journalistes.

Services de radiotélédiffusion

194.La Proclamation no 178/1999 relative aux services de radiotélédiffusion (remplacée par la Proclamation no 533/2007) vise à garantir l’usage adéquat et équitable des ressources limitées du pays en fréquences radio et à définir clairement les droits et obligations des opérateurs de radiotélédiffusion. Son préambule reconnaît le grand rôle de ces services dans l’exercice des droits constitutionnels fondamentaux, dont la liberté d’expression.

195.La Proclamation a créé l’Autorité éthiopienne de radiotélédiffusion, chargée de promouvoir l’expansion de services de radiotélédiffusion de qualité, rapides et fiables, aptes à concourir au développement politique et socioéconomique, et de les réglementer. L’Autorité est habilitée à attribuer, suspendre ou annuler les licences de radiotélédiffusion. On distingue trois types de services: public, commercial, communautaire.

196.Aux termes de la législation, un service public de radiotélédiffusion est: «un service qui diffuse des émissions de radio ou de télévision établi aux fins d’éduquer, d’informer et de divertir le public à l’échelon de la Fédération ou d’un État régional, dont le budget est financé en tout ou partie par l’État et qui est responsable devant la Chambre fédérale des représentants des peuples ou devant le Conseil de l’État régional».

197.Un service commercial de radiotélédiffusion est «un service qui diffuse des émissions de radio ou de télévision établi au profit d’une personne morale aux fins d’informer, d’éduquer ou de divertir le public».

198.Un service communautaire de radiotélédiffusion est «un service à but non lucratif qui diffuse des émissions de radio ou de télévision et a été établi par la volonté et pour l’intérêt d’une communauté et est administré et géré par une communauté de personnes vivant dans une zone donnée ou partageant un intérêt commun».

199.La législation relative à la radiotélédiffusion a assuré l’accès à des opinions diverses en autorisant des services commerciaux et communautaires de radiotélédiffusion qui ont mis fin au monopole du service public de radiotélédiffusion.

200.Après avoir examiné leurs capacités, l’Autorité a enregistré comme opérateurs commerciaux deux stations de radio au statut antérieur incertain en termes de propriété. Quatre stations de radio, dont deux avaient déjà commencé à émettre avant décembre 2008, ont reçu une licence d’opérateur commercial de services de radiodiffusion.

201.Un rôle crucial revient aux services communautaires de radiotélédiffusion dans la propagation d’informations non relayées par d’autres médias, chose très importante dans un pays comme l’Éthiopie où des nations et nationalités diverses coexistent. Depuis décembre 2008, l’Autorité a attribué à cinq organisations une licence d’opérateur communautaire de service de radiotélédiffusion.

202.Alors qu’il n’y avait auparavant que deux stations de radio et une chaîne de télévision publiques, le service public s’est développé et des licences ont été voilà peu attribuées à sept administrations municipales et régionales − dont six ont commencé à émettre. La ville de Dire Dawa et le gouvernement de l’État régional d’Oromia ont obtenu une licence de télédiffusion; ce dernier a procédé à des essais en décembre 2008.

203.Pour diversifier l’offre sur la télévision publique, des licences de radiotélédiffusion commerciale ont été attribuées à trois opérateurs diffusant des chaînes étrangères.

Article 20Interdiction de la propagande en faveur de la guerre

204.La Constitution dispose que toute propagande en faveur de la guerre de même que l’expression publique d’opinions attentatoires à la dignité humaine sont interdites par la loi. En vertu de l’article 257 du Code pénal, toute personne qui, dans le but de commettre ou de soutenir un quelconque des actes constituant un crime contre la Constitution ou l’État «appelle publiquement à de tels actes par la parole, des images ou des écrits, ou lance ou diffuse, de façon systématique et préméditée, par la parole, des images ou des écrits, des informations ou insinuations inexactes, haineuses ou subversives tendant à démoraliser le public et saper sa confiance ou sa volonté de résister, encourt une peine d’emprisonnement simple ou, si les conséquences prévisibles de ses activités sont particulièrement graves, une peine d’emprisonnement de rigueur d’au maximum dix ans». Les crimes contre la Constitution ou l’État sont: l’outrage à la Constitution ou à l’ordre constitutionnel, l’entrave à l’exercice des pouvoirs constitutionnels, la rébellion armée ou la guerre civile, l’atteinte à l’intégrité politique ou territoriale de l’État et la violation de la souveraineté territoriale ou politique.

205.«Tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence» est une infraction pénale. (Pour un examen approfondi des dispositions pénales et autres interdisant tout appel à la haine nationale et raciale, voir le rapport initial soumis par l’Éthiopie au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.) Le Code pénal réprime donc tout appel à la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, l’hostilité ou la violence.

Article 21Droit de réunion pacifique

206.Le droit de se réunir librement avec d’autres personnes est inscrit dans la Constitution. Toute personne a ainsi les droits de se réunir, de manifester et d’adresser une pétition avec d’autres, pacifiquement et sans armes, mais la Constitution permet d’imposer certaines restrictions à leurs modalités d’exercice. Toutes les dispositions requises concernant le lieu de tenue d’une réunion en plein air ou le parcours d’une manifestation peuvent être adoptées pour préserver l’intérêt public et protéger les droits démocratiques, la moralité publique et la paix durant la réunion ou manifestation. Ce droit n’«exonère pas de la responsabilité en vertu des lois en vigueur visant à protéger le bien-être de la jeunesse ou l’honneur et la réputation des personnes et des lois interdisant toute propagande en faveur de la guerre et toute expression publique d’opinions attentatoires à la dignité humaine».

207.La «Proclamation no 3/1991 relative à la procédure applicable aux manifestations et réunions politiques publiques pacifiques» dispose que chacun «a le droit d’organiser des manifestations et réunions politiques publiques pacifiques et d’y participer». L’exercice de ce droit ne doit pas empiéter sur les droits légaux d’autrui. Il est obligatoire de donner un préavis pour exercer ce droit, mais la Proclamation n’impose pas l’obligation de demander une autorisation proprement dite; elle indique que «tout individu, groupe ou organisme qui organise une manifestation ou réunion politique publique pacifique est tenu de soumettre par écrit un préavis quarante-huit heures avant sa tenue». L’État a lui la responsabilité de procéder à tous les préparatifs nécessaires pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité afin que la vie quotidienne de la population ne soit pas perturbée. Si l’État juge préférable, pour des considérations liées à la paix et à la sécurité, que la manifestation ou réunion politique publique pacifique se tienne à un autre moment ou ailleurs, il en informe les organisateurs par une notification écrite motivée dans les douze heures suivant la soumission de leur préavis.

208.Est interdite, toute manifestation ou réunion publique politique, même pacifique, tendant à promouvoir la discrimination fondée sur la race, la couleur, la religion, le sexe ou d’autres considérations, de promouvoir le racisme ou d’inciter à la défiance et à la haine ethnique entre les nations, nationalités et peuples. Les restrictions et prescriptions imposées par la Proclamation sont conformes aux dispositions de la Constitution et visent à faciliter l’exercice du droit de réunion pacifique sans atteinte aux droits d’autrui.

Article 22Liberté d’association

209.La Constitution, en son article 31 consacre la liberté d’association en disposant que «toute personne jouit du droit à la liberté d’association en faveur de toute cause et à toute fin», mais les organisations formées en violation de la loi ou en vue de subvertir l’ordre constitutionnel légal ou favorisant pareilles activités sont interdites. La liberté d’association peut être exercée par quiconque en faveur de toute cause, pour autant que son but soit légitime. Des associations peuvent être fondées à des fins humanitaires, professionnelles, sociales, politiques ou autres. La Constitution énonce le droit de quiconque d’être membre, de sa propre volonté, d’une organisation politique, syndicale, sectorielle, patronale ou professionnelle, à condition de répondre aux critères particuliers et généraux fixés par elle.

210.Selon des statistiques récentes, plus de 7 000 œuvres caritatives et associations sont enregistrées au niveau national. Entre 2003-2004 et 2007-2008, le Ministère de la justice, compétent en la matière, a enregistré plus de 4 000 ONG − œuvres caritatives et associations locales ou étrangères actives dans plus d’un État régional − tandis que l’enregistrement de 111 associations était annulé pour divers motifs: décision des membres, inexécution des obligations, non-renouvellement, enregistrement frauduleux, participation à des activités étrangères à l’objet et aux buts de l’entité. Trois associations ont été suspendues en raison de leur intitulé, pour fraude ou pour inexécution de leurs obligations. La Proclamation relative à l’enregistrement et à la réglementation des œuvres caritatives et des associations, désormais en vigueur, a été élaborée afin d’en promouvoir le fonctionnement et d’en assurer la transparence et la responsabilisation.

211.S’agissant des relations du travail, aux termes de l’article 42 de la Constitution: «les travailleurs de l’industrie et des services, les exploitants agricoles, les manœuvres agricoles et les autres travailleurs ruraux, ainsi que les fonctionnaires d’un rang inférieur à un certain niveau de responsabilité et dont les fonctions ne sont pas incompatibles, ont le droit de former des associations». Ce droit comprend le droit de former des syndicats et d’autres associations aux fins de négocier collectivement avec les employeurs ou des organismes concernés par leurs intérêts. Les employeurs ont eux aussi le droit de créer leurs propres associations. Donnant effet au droit constitutionnel d’association, la Proclamation no 377/2003 relative au travail consacre le droit des travailleurs de fonder des syndicats et des employeurs de former des associations d’employeurs et d’y participer activement. La Proclamation fixe les modalités d’enregistrement des syndicats et des associations d’employeurs. Ces entités doivent être enregistrées auprès du Ministère du travail et des affaires sociales, au niveau fédéral, ou du bureau de travail, à l’échelon de l’État régional.

212.Les citoyens sont autorisés à former des organisations politiques en vue de briguer et d’occuper des postes politiques. S’ajoutant à certaines formalités, le respect des lois du pays est la seule exigence à satisfaire pour former une organisation politique.

Article 23Protection de la famille

213.L’article 34 3) de la Constitution dispose que la famille est l’unité naturelle et fondamentale de la société et jouit de la protection de la société et de l’État. Afin d’assurer la protection voulue à la famille, l’État a pris diverses mesures − notamment adopté des lois, élaboré des politiques et créé des institutions. Le pays a adopté divers textes législatifs régissant les relations familiales et abrogé les lois incompatibles avec la Constitution pour assurer la protection de la famille. Cette protection est inscrite dans la Constitution, le Code fédéral et les codes régionaux de la famille, le droit du travail et le Code pénal de 2005. La politique gouvernementale d’action sociale et de développement adoptée en 1996 vise à prévenir et maîtriser les problèmes sociaux dans le pays. Les politiques nationales relatives à la santé et à la population font aussi une place à la protection à la famille.

214.La Constitution garantit aux hommes et aux femmes le droit de se marier et de fonder une famille sans aucune distinction de race, nation, nationalité ou religion, à condition d’avoir l’âge nubile, tel que fixé par la loi. Elle dispose que les conjoints ont des droits égaux à la conclusion du mariage, durant le mariage et à sa dissolution et exige que des lois soient adoptées afin de protéger les intérêts des enfants en cas de divorce.

215.En vertu de la Constitution, un mariage ne peut être contracté qu’avec le consentement libre et entier des futurs conjoints (par. 181, 189 et 192 du rapport initial de l’Éthiopie au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Le Code révisé de la famille applicable aux deux villes fédérales (Addis-Abeba et Dire Dawa) fait de ce consentement libre et entier une des conditions essentielles pour la validité d’un mariage. Le code de la famille de tous les États régionaux reprend ce principe.

216.Le Code fédéral et les codes régionaux de la famille fixent l’âge nubile. Un homme comme une femme de moins de 18 ans ne peut contracter mariage, dans toutes les régions. Le Ministère de la justice, au niveau fédéral, ou le Bureau de la justice, au niveau régional, peut à titre exceptionnel, sur demande des futurs époux ou des parents ou du tuteur légal de l’un d’eux, accorder, pour motif grave, une dispense abaissant cet âge d’au maximum deux ans. Un mineur qui se marie en bénéficiant d’une dispense, est de ce seul fait émancipé de toute restriction juridique. Le Code pénal punit quiconque épouse une personne mineure.

217.Les conjoints sont aussi égaux en droit en ce qui concerne la gestion de la famille, l’entretien, la préservation de l’intérêt supérieur et l’éducation de leurs enfants et le choix du domicile commun. Les femmes se heurtent toutefois à certains problèmes dans la pratique pour participer aux décisions ayant des incidences sur elles et leurs familles. Beaucoup reste à faire pour en finir avec la conception traditionnelle voulant que dans un ménage il appartienne au mari de prendre les grandes décisions.

218.En vertu du Code révisé de la famille, pour sauvegarder l’intérêt supérieur et le bien-être d’enfants un tribunal est tenu de prendre des mesures pouvant aller jusqu’à passer outre aux conditions d’un mariage convenues par les parties si elles ne protègent de manière adéquate les intérêts des enfants concernés.

219.La Constitution reconnaît les mariages religieux et coutumiers pourvu qu’ils ne soient pas contraires à ses dispositions et aux conditions essentielles du mariage (par. 181, 189 et 192 du rapport initial de l’Éthiopie au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Le Code fédéral et les codes régionaux de la famille reconnaissent les mariages religieux ou coutumiers, aucune distinction n’étant faite quant à l’effet du mariage qu’il ait été contracté devant un officier d’état civil ou selon les formes prescrites par une religion ou la coutume.

220.Le Code de la famille exige que tout mariage coutumier ou religieux soit enregistré par un officier de l’état civil habilité. Si les conjoints ne font pas enregistrer leur union, le bureau de l’état civil est tenu de le faire d’office dès qu’il en a connaissance. Les conjoints doivent produire un acte de mariage pour prouver qu’ils sont mariés. En cas de perte de l’acte ou de non-enregistrement du mariage, ils doivent prouver au tribunal qu’ils vivent comme des conjoints et sont considérés et traités comme tels par leur famille et leur communauté. Le mariage prend effet le jour de sa conclusion.

221.Le Code de la famille reconnaît aussi l’union libre. Si un homme et une femme cohabitent comme mari et femme sans avoir conclu de mariage valide, leur relation est considérée comme une union libre. À moins que les parties n’en conviennent autrement, les biens acquis durant cette union entrent dans la communauté si elle a duré au moins trois ans. Les dépenses courantes d’un homme et d’une femme vivant en union libre sont partagées à raison de leurs moyens respectifs. Seul un tribunal est compétent pour décider si un homme et une femme ont établi une union libre.

222.Une personne de nationalité éthiopienne ne la perd pas en épousant une personne de nationalité étrangère. Une Éthiopienne qui épouse un étranger ne doit donc pas changer de nationalité. Le droit éthiopien reconnaît un mariage contracté hors d’Éthiopie pour autant qu’il ne porte pas atteinte à la morale publique.

223.Le Code fédéral et les codes régionaux de la famille prohibent le mariage jusqu’à un certain degré de parenté ou d’alliance. Le mariage entre des personnes ayant un degré de parenté en ligne directe (ascendants et descendants) est interdit. En ligne collatérale, il est interdit de se marier avec un membre de sa fratrie, une tante ou un oncle. Le mariage entre des personnes alliées en ligne directe est interdit. Le mariage entre un homme et la sœur de sa femme ou d’une femme avec le frère de son mari est interdit. Le Code pénal punit l’inceste de trois ans d’emprisonnement au maximum, sans déchéance des droits familiaux.

224.Il est légalement interdit à certaines personnes de contracter mariage et pareille personne ne peut se marier que si un tribunal l’y autorise, la demande à cet effet pouvant être présentée par la personne intéressée ou son tuteur.

225.Le Code de la famille interdit à une personne de contracter mariage si elle est déjà mariée. Le Code pénal incrimine la bigamie, sauf si elle est conforme à des pratiques religieuses ou traditionnelles reconnues par la loi. L’initiative visant à prohiber la bigamie a suscité une résistance dans la région d’Oromia, mais les codes de la famille de toutes les régions qualifient désormais d’illégale cette pratique en général. La bigamie est surtout présente en milieu rural et participe de la religion ou de la tradition. L’État et des ONG ont mis en œuvre des programmes de sensibilisation contre cette pratique.

226.Les pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes et aux enfants, en particulier le mariage précoce, l’enlèvement et le mariage forcé, demeurent des problèmes majeurs en Éthiopie. Des données statistiques complètes font défaut, mais les mariages et successions matrimoniales arrangés sont chose courante en milieu rural. Le mariage précoce est la pratique traditionnelle néfaste la plus courante, avec un taux national de prévalence de 54 %. En milieu rural, plus de 31 % des femmes sont mariées à l’âge de 15 ans, contre 10,1 % dans les zones urbaines. Le taux de prévalence des mariages précoces est le plus élevé dans la région d’Amhara (45,8 %), suivie de la région d’Afar (29,9 %); il est aussi pratiqué dans les États régionaux du Tigré (28,9 %) et d’Oromia (21,2 %).

227.Autre pratique traditionnelle néfaste, l’enlèvement reste une des grandes causes de mariage précoce et forcé et le Code pénal de 2005 l’incrimine. En Éthiopie les principales victimes d’enlèvement sont les femmes, en particulier en milieu rural. Une enquête réalisée en 2006-2007 indique que la conclusion d’un mariage suite à un enlèvement n’est plus tolérée et est désormais sévèrement punie.

228.Les causes profondes du phénomène des mariages précoces et des enlèvements sont le manque de sensibilisation de la société à ses effets nocifs, des facteurs économiques et les normes sociales. L’État a mené des campagnes publiques de sensibilisation contre les mariages précoces et les enlèvements; ces efforts ont permis des progrès sensibles.

Article 24 Protection des enfants

229.L’Éthiopie a ratifié plusieurs instruments internationaux ou régionaux ayant pour objet de protéger les droits des enfants, dont la Convention relative aux droits de l’enfant et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, et les a incorporés dans son droit.

230.La Constitution de la RFDE et toutes les constitutions d’État régional contiennent des dispositions spéciales relatives aux droits de l’enfant. La première énonce les droits reconnus aux enfants, dont le droit à la vie et à un développement optimal, à la non-discrimination, et à une protection spéciale s’ils sont privés de milieu familial et consacre la protection de l’enfant contre les châtiments corporels et contre l’exploitation et les pratiques dangereuses ou nuisibles à son éducation, sa santé ou son bien-être.

231.La Constitution appelle les institutions publiques et privées d’action sociale, les tribunaux, les autorités administratives et les organes législatifs à faire de l’intérêt supérieur de l’enfant une considération primordiale dans toutes leurs actions concernant les enfants. Établi sous les auspices de la Cour suprême fédérale, le Bureau du projet sur la justice pour mineurs s’emploie à que les tribunaux statuent et jugent en se fondant sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Conformément à la Constitution, les enfants nés hors mariage ont les mêmes droits que les enfants nés dans le mariage, y compris en matière successorale.

232.Au niveau fédéral, les activités des ministères sectoriels tendant à donner effet aux droits de l’enfant sont coordonnées par le Ministère des affaires féminines.

233.Au sens du Code civil, est mineure toute personne âgée de moins de 18 ans. Les enfants de moins de 9 ans sont pénalement irresponsable (voir plus haut, par. 145). Les personnes de moins de 18 ans ne peuvent être enrôlées dans les forces armées.

234.La loi fixe l’âge minimum d’admission à l’emploi; la Proclamation no 377/2003 relative au travail interdit d’employer une personne de moins de 14 ans, limite la durée du travail à sept heures pour les jeunes travailleurs (enfants de 14 à 18 ans) et interdit de leur imposer un travail de nuit (de 22 heures à 6 heures), des heures supplémentaires et tout travail un jour de repos hebdomadaire ou férié.

235.La loi encadre les relations entre employeurs et travailleurs, travailleurs enfants compris. La Proclamation précitée consacre une section aux conditions de travail des jeunes travailleurs. Elle interdit à un employeur d’affecter un jeune travailleur à des activités risquant, par leur nature ou du fait de leurs conditions d’exécution de mettre en danger sa vie ou sa santé. Sont interdits aux jeunes travailleurs les secteurs d’activité suivants: transport routier, ferroviaire, aérien ou fluvial de personnes et de marchandises; manutention dans les ports et entrepôts (soulever, tirer ou pousser des charges lourdes ou tout type de travail connexe); production, transformation ou transport d’électricité; travail souterrain, dans les mines, carrières et autres; travail dans les égouts et creusement de tunnel. Malgré l’absence de données structurées, force est de constater toutefois que dans la réalité des enfants travaillent dans des conditions contraires à la loi, des enfants étant par exemple couramment employés dans le transport de passagers en ville.

236.L’État a chargé des consultants d’élaborer un plan d’action national pour la protection des enfants victimes de travail forcé et des pires formes de travail des enfants. Soucieux de promouvoir et protéger les droits de l’enfant, il a aidé à instituer des comités des droits des enfants dans toutes les régions aux divers échelons. Les unités de protection de l’enfance en place dans plusieurs postes de police assurent une protection juridique aux enfants victimes; des mesures visant à réunir les enfants avec leur famille on été prises.

237.La Constitution impose à l’État, dans la limite des moyens disponibles, d’aider les enfants dépourvus de parents ou tuteur. Il est investi de la responsabilité de protéger les orphelins et d’encourager la création d’institutions encadrant et favorisant leur adoption et œuvrant à leur bien-être et à leur éducation. Afin de faciliter la prise en charge des enfants vivant dans des conditions très difficiles, l’État a pris diverses mesures, allant de l’adoption de politiques à l’établissement d’institutions. Des documents visant à promouvoir le principe d’intérêt supérieur de l’enfant ont été formulés, dont des lignes directrices sur: l’adoption; l’enfant et la famille; la réunification familiale; les familles d’accueil.

238.Les services d’adoption, nationale et internationale, œuvrent à assurer aux enfants privés de milieu familial une protection de remplacement. En 2000, 3 067 enfants (1 463 filles; 1 604 garçons) ont bénéficié d’une adoption internationale; l’État a institué un mécanisme pour assurer leur suivi, même après leur départ à l’étranger. La situation de 239 enfants adoptés vivant dans deux pays a été examinée et les missions dépêchées ont permis de constater que les enfants s’y trouvant suite à une adoption internationale y vivaient dans de bonnes conditions. Plusieurs études sur la prévalence de la traite des enfants et les problèmes sociaux connexes, ainsi que sur les problèmes liés à l’adoption nationale et internationale ont été réalisées et des forums de consultation organisés.

239.La Constitution consacre le droit de l’enfant à une nationalité. La Proclamation no 378/2003 relative à la nationalité éthiopienne dispose que toute personne née d’un parent éthiopien est réputée de nationalité éthiopienne. Un enfant adopté par une personne de nationalité éthiopienne peut acquérir cette nationalité, s’il a moins de 18 ans et vit en Éthiopie avec ses parents adoptifs, s’il est prouvé qu’il a renoncé à sa nationalité antérieure ou peut le faire à l’acquisition de la nationalité éthiopienne ou s’il est apatride. Si un des parents est étranger, ce parent est tenu d’y consentir expressément par écrit.

240.Afin de s’assurer que chaque enfant a une nationalité et réduire les cas d’apatridie chez les enfants, en vertu du droit de la nationalité éthiopienne tout enfant abandonné trouvé en Éthiopie est réputé né de mère éthiopienne et de nationalité éthiopienne sauf en cas de preuve de sa nationalité étrangère.

241.Faute de législation nationale à cet effet, l’enregistrement immédiat des enfants à la naissance n’est pas systématique en Éthiopie mais depuis la ratification de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, le pays s’attache à assurer systématiquement cet enregistrement immédiat. Des efforts ont été déployés dans le cadre de conférences nationales sur l’enregistrement des enfants en vue de sensibiliser les membres des forces de l’ordre et des organes exécutifs, juridiques et administratifs. Un groupe de travail présidé par la Commission éthiopienne des droits de l’homme a été mis en place afin de créer les conditions nécessaires à l’enregistrement des enfants à la naissance ou après. Le projet de loi sur l’enregistrement des faits d’état civil est prêt et doit être soumis sous peu au Parlement pour approbation.

Article 25Participation à la vie publique et aux élections

242.Possède la nationalité éthiopienne, toute personne dont un des parents est éthiopien en vertu de la Constitution et de la législation nationale pertinente relative à la nationalité. Un étranger peut acquérir la nationalité éthiopienne. Tout Éthiopien, sans considération du mode d’acquisition de la nationalité, a droit à la jouissance, l’exercice et la reconnaissance de tous les droits et avantages accordés aux Éthiopiens tels que prescrits par la loi.

Élections

243.La Constitution dispose que tout ressortissant éthiopien a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis, sans discrimination aucune. Tout Éthiopien a le droit d’élire et d’être élu au cours d’élections périodiques à tout poste officiel de tout échelon. Les élections se déroulent au suffrage universel et égal et au scrutin secret afin de garantir la libre expression de la volonté des électeurs. Les élections à des postes de responsabilité au sein d’organisations politiques, de syndicats, d’associations sectorielles et d’associations professionnelles doivent être libres et démocratiques.

244.Les membres de la Chambre des représentants des peuples, organe suprême de l’État fédéral, sont élus par le peuple pour un mandat de cinq ans au suffrage universel au cours d’élections directes, libres et régulières au scrutin secret.

245.La Chambre des représentants des peuples est investie du pouvoir d’édicter des lois, de contrôler l’exécutif et de nommer les juges fédéraux, ce qui permet au peuple, par l’intermédiaire de ses représentants, de participer à la direction des affaires publiques. Les représentants sont tenus de respecter la volonté du peuple. Outre le droit d’exprimer sa volonté au cours d’élections périodiques, le peuple peut légalement déchoir un de ses représentants, en cas de manquement, par un vote de défiance, en vertu de la Proclamation no 88/97 relative à la déchéance des membres de la Chambre des représentants des peuples.

246.Le peuple participe à la vie publique tant à l’échelon suprême qu’aux échelons les moins élevés des pouvoirs publics, qui sont aussi investis de pouvoirs adéquats afin que le peuple puisse participer directement à leur administration.

Le Conseil électoral national

247.La responsabilité des élections est dévolue au Conseil électoral national, qui rend compte à la CRP de l’État fédéral mais possède sa propre personnalité juridique; il a notamment pour mission d’assurer la mise en place d’un gouvernement démocratiquement élu au cours d’élections libres, impartiales et équitables à tous les échelons conformément à la Constitution et de permettre aux citoyens d’exercer leur droit constitutionnel démocratique d’élire et d’être élu. En consultation avec les partis politiques, le Conseil fixe le calendrier d’inscription sur les listes électorales. Il s’emploie principalement à assurer la mise en place à tous les échelons d’un gouvernement élu périodiquement au cours d’élections libres, équitables, impartiales, transparentes et pacifiques conformes aux normes nationales et internationales, à préserver ainsi l’intégrité et la crédibilité du processus électoral dans le pays et à renforcer la participation des citoyens au processus électoral en dispensant à la population une instruction civique et électorale.

Principes électoraux

248.La Proclamation précitée énonce les principes électoraux suivants:

a)Les élections ont lieu au suffrage universel et direct et au scrutin secret afin que les électeurs expriment leur volonté librement, sans discrimination et dans l’égalité;

b)Tout Éthiopien dont les droits électoraux ne sont pas légalement restreints peut élire et être élu;

c)Chaque vote a le même poids;

d)Nul Éthiopien ne peut être contraint à voter ou à être élu.

Conditions d’exercice du droit de vote

249.La Proclamation précitée assujettit l’exercice du droit de vote à trois conditions:

Être de nationalité éthiopienne;

Avoir 18 ans accomplis ou plus au moment de l’inscription;

Avoir résidé durant six mois dans la circonscription où l’on souhaite voter.

250.N’a toutefois pas le droit de voter une personne:

Déclarée incapable de prendre une décision en raison de troubles mentaux;

Purgeant une peine privative de liberté suite à une condamnation judiciaire;

Dont les droits électoraux sont légalement restreints.

251.La Proclamation précitée énonce les conditions d’éligibilité suivantes:

Être de nationalité éthiopienne;

Parler la langue de travail de l’État régional ou de la zone de candidature (disposition visant à garantir que le candidat comprend et représente pleinement ses électeurs);

Avoir 21 ans accomplis ou plus à la date de l’enregistrement;

Avoir résidé régulièrement dans la circonscription de candidature les deux années précédant immédiatement la date de l’élection ou être né dans la circonscription de candidature ou dans la ville ou le woreda s’il y a plus d’une circonscription, ou bien avoir travaillé régulièrement dans la ville ou le woreda pendant deux ans;

Ne pas avoir été privé de son droit de voter et d’être élu.

Un candidat indépendant doit recueillir la signature d’au moins mille personnes dont la résidence dans la circonscription est certifiée par l’administration locale.

Sanctions pénales

252.Le Code pénal punit quiconque entrave le libre exercice des droits électoraux, disposant que quiconque par intimidation, contrainte, abus de pouvoir ou violence, par fraude, relative en particulier aux noms, dissimulation ou omission d’un appel ou d’une convocation, ou tout autre moyen ou méthode répréhensible a) empêche une personne d’exercer son droit légitime d’élire ou d’être élu ou b) en obtient en recourant à pareils moyens l’engagement d’exercer ce droit ou la persuade de l’exercer d’une certaine manière ou de s’en abstenir, encourt un an d’emprisonnement simple au maximum ou une amende.

253.La loi réprime la corruption électorale. Le Code pénal dispose que quiconque, directement ou indirectement, promet ou verse une somme d’argent ou accorde tout autre avantage à une personne pour la persuader d’exercer son droit d’élire ou d’être élue d’une certaine manière, ou de s’en abstenir, encourt cinq ans d’emprisonnement de rigueur au maximum et une amende; il dispose aussi que quiconque ayant le droit d’élire ou d’être élu accepte ou convient d’accepter une somme d’argent ou tout autre avantage lié à l’exercice de son droit ou de l’exercer d’une certaine manière ou de s’en abstenir encourt les mêmes peines.

254.Toute violation du secret du scrutin tombe sous le coup du Code pénal, qui pose que quiconque a) par des moyens illicites découvre comment un électeur a exercé son droit de vote ou a voté, ou b) l’ayant appris fortuitement rend ce fait public intentionnellement et le propage par la parole, la presse ou autrement encourt une peine d’emprisonnement simple ou une amende.

Mesures visant à garantir des élections libres et équitables

255.Durant la période de transition (au début des années 90), lors de la mise en place du système démocratique pluraliste dans le pays, les membres de la Commission électorale d’alors et des comités de circonscriptions ont été choisis parmi les membres de partis politiques siégeant à la Chambre des représentants. Cet effort initial a abouti à un système propre à garantir des élections libres et équitables.

256.La Constitution garantit l’indépendance du Conseil électoral national, institué pour assurer à l’abri de toute influence des élections libres et équitables aux niveaux fédéral et régional.

257.Les quatre proclamations destinées à garantir des élections libres et équitables édictées ces quinze dernières années − en se fondant sur les leçons tirées du déroulement des élections antérieures − ont permis d’apporter les aménagements jugés nécessaires à la législation électorale. Le texte en vigueur, la Proclamation no 532/2007 portant amendement de la législation électorale éthiopienne dispose que les membres du Conseil électoral doivent faire preuve de loyauté à la Constitution, d’impartialité et de professionnalisme et avoir une réputation de bonne conduite. Les membres du Conseil sont nommés par la CRP sur recommandation du Premier Ministre, qui avant de les désigner veille à la tenue de consultations suffisantes avec les partis politiques siégeant à la Chambre pour vérifier l’indépendance et l’impartialité des candidats.

258.Toutes les élections organisées dans le pays se sont déroulées conformément à la loi et au calendrier détaillé des activités électorales établi par le Conseil électoral, sauf dans quelques zones où vivent des éleveurs itinérants.

259.Avant et pendant les élections, le Conseil électoral et des associations mènent des activités d’instruction civique et électorale qui portent principalement sur la législation et les procédures et le devoir civique d’élire et d’être élu, en usant de divers moyens (tracts, émissions de radio et de télévision et séances de formation de la population à l’aide de matériel audiovisuel mobile).

260.La documentation électorale et les bulletins de vote sont conçus dans un souci de clarté et tout le matériel électoral est facilement compréhensible pour tous les électeurs.

261.La Proclamation précitée dispose que les bureaux de vote doivent être agencés de manière à en assurer adéquatement la sécurité et la protection avant le jour du scrutin.

262.La législation et les procédures électorales en vigueur assurent l’équité et le secret du scrutin et la confiance de la population en son intégrité. Outre la Proclamation précitée, plusieurs règlements et directives garantissent le déroulement équitable, libre et transparent des élections, dont les suivants:

Règlement no 1/2007/08 sur la composition et le fonctionnement des Comités d’examen des plaintes à tous les échelons;

Règlement no 2/2007/08 sur l’agrément et la déontologie des prestataires de services d’instruction civique et électorale;

Règlement no 3/2007/08 sur l’agrément et la déontologie des observateurs électoraux locaux;

Règlement no 4/2007/08 sur le Code de déontologie électorale;

Directive no 1/2007/08 sur l’enregistrement des candidats;

Directive no 2/2007/08 sur l’enregistrement des électeurs;

Directive no 1/2007/08 sur les observateurs publics et les représentants de candidats;

Directive no 4/2007/08 sur le Code de déontologie des agents électoraux;

Directive no 5/2007/08 sur le scrutin, le dépouillement et l’annonce des résultats.

263.Dans l’ensemble, ces directives et règlements ont garanti la confidentialité du processus électoral, la sécurité des électeurs et la confiance de la population dans l’intégrité du système électoral national. Dans tous les bureaux de vote, les conditions sont réunies pour permettre aux électeurs de voter dans le secret et le confort. En application de la réglementation et afin de renforcer la confiance de la population, dans la totalité des bureaux de vote et des circonscriptions des observateurs de la population et des représentants des candidats peuvent être désignés pour surveiller le processus électoral depuis l’enregistrement des électeurs jusqu’à la proclamation des résultats. Le Conseil électoral a autorisé et agréé la présence d’observateurs électoraux locaux ou étrangers afin que des tiers neutres vérifient l’équité et la transparence du scrutin.

264.La législation électorale autorise tout fonctionnaire à se présenter à un mandat électif en tant que candidat indépendant ou membre d’un parti politique. Un fonctionnaire ne peut se voir retirer un quelconque avantage au motif de sa candidature à un poste électif s’il a respecté les prescriptions pertinentes. Vu le grand degré d’indépendance que requiert l’exercice de leurs fonctions, les juges, militaires et policiers doivent démissionner avant de briguer un mandat électif; ils ne peuvent pas faire campagne en faveur d’un candidat par des discours, écrits et autres moyens tant qu’ils sont en fonction.

265.Les élections se déroulent dans la régularité. La Proclamation précitée expose en détail les modalités de traitement du contentieux électoral. Les plaintes portant sur l’inscription des électeurs peuvent être soumises d’abord au Comité des plaintes du bureau de vote; si une partie n’est pas satisfaite de la décision de ce Comité, elle peut la contester devant le bureau électoral de circonscription (Comité de circonscription d’examen des plaintes) puis le tribunal de woreda. La procédure est identique pour les plaintes concernant le scrutin. Les plaintes portant sur l’enregistrement des candidats peuvent être portées d’abord devant le Comité de circonscription d’examen des plaintes, puis le Comité d’examen des plaintes du bureau électoral régional et enfin la Cour suprême régionale. Les plaintes visant le dépouillement et les résultats peuvent être soumises au Comité de circonscription d’examen des plaintes puis au Conseil électoral et enfin à la Cour suprême fédérale.

266.Il convient de mentionner une affaire type ayant donné lieu à une interprétation des dispositions de la Constitution relatives au droit d’être élu, qui concernait l’État régional Benishangul-Gumaz. La plainte visait le rejet par le Conseil électoral des candidatures de membres de certains groupes ethniques au motif qu’ils ne parlaient pas une des cinq langues autochtones en usage dans cette région; les intéressés avaient alors saisi la Chambre de la Fédération, organe investi du pouvoir d’interpréter la Constitution, en arguant que leur droit constitutionnel de se présenter à une élection leur avait été dénié sans motif valable. Après examen du litige, dans une décision en date du 14 mars 2003, la Chambre a estimé ce rejet contraire à la Constitution du fait que les intéressés avaient le droit de se présenter à une élection si, comme c’était le cas, ils parlaient la langue de travail du Conseil régional.

267.La législation relative à la radiotélédiffusion dispose que tout opérateur de services de radiotélédiffusion doit accorder un temps d’antenne gratuit aux partis politiques et candidats enregistrés conformément aux prescriptions applicables pour leur permettre de faire connaître leurs objectifs et programmes à la population ou de diffuser des déclarations durant la campagne électorale. Tout parti politique ou candidat peut diffuser des messages électoraux. Le prix demandé pour diffuser de la propagande électorale ne peut dépasser celui des publicités commerciales, dans le souci d’alléger la charge financière que les partis politiques et les candidats indépendants doivent supporter pour sensibiliser les électeurs à leur programme politique. La Directive sur les opérateurs de services de radiotélédiffusion expose en détail les modalités d’attribution de temps d’antenne gratuit en période électorale; elle dispose qu’une entité diffusant des émissions de radio ou de télévision en vertu de la Proclamation relative aux opérateurs de services de radiotélédiffusion est tenue d’attribuer un temps d’antenne gratuit aux candidats. Le temps d’antenne attribué doit être juste et raisonnable pour tous les partis politiques et les candidats indépendants.

268.Conformément à la Proclamation no 50/2007 relative à la fonction publique fédérale, les postes y sont pourvus sans aucune discrimination entre demandeurs d’emploi ou fonctionnaires fondée sur l’origine ethnique, le sexe, la religion, les opinions politiques, le handicap, le VIH/sida ou tout autre motif, afin de garantir le droit des citoyens à l’emploi dans la fonction publique. Une personne condamnée par un tribunal pour abus de confiance, vol ou fraude peut en être écartée, sauf si elle a été réhabilitée. Tout fonctionnaire peut briguer une promotion. La loi prévoit clairement des procédures de plainte et des mécanismes disciplinaires. Des sanctions disciplinaires, qui vont de l’avertissement oral à la révocation, peuvent être imposées par une administration publique sur recommandation du Comité d’examen des plaintes. Les tribunaux administratifs peuvent examiner en appel pareille décision d’une administration publique. Un appel portant sur une question de droit peut en outre être porté devant la Cour suprême fédérale, ce qui garantit la régularité de la procédure à tous les agents de la fonction publique. L’emploi dans la fonction publique ne peut prendre fin qu’aux motifs prévus par la loi: démission, maladie, inefficacité, force majeure, retraite, manquement grave à la discipline.

Problèmes liés à l’exercice du droit de vote

269.La participation aux élections nationales et régionales des Éthiopiens résidant à l’étranger se heurte à des difficultés liées au grand nombre de circonscriptions (plus de 500) et au système d’élections législatives, qui compliquent la gestion des opérations électorales à l’étranger. Les systèmes de collecte de données et communication en place dans le pays ne favorisent en outre pas la participation au scrutin des Éthiopiens de l’étranger. La Proclamation précitée habilite le Conseil électoral à définir et à soumettre à la Chambre des représentants des peuples les moyens propres à donner à la diaspora éthiopienne la possibilité de prendre part aux élections. Des préparatifs sont en cours en vue de la réalisation d’études sur l’exercice de ce droit.

270.La mise en place de bureaux de vote à proximité de tous les électeurs soulève des difficultés. La Proclamation précitée prévoit l’installation de bureaux de vote spéciaux dans certains lieux pour permettre aux militaires et aux fonctionnaires civils ainsi qu’aux étudiants vivant loin de leur circonscription d’origine de voter. Lors des dernières élections les étudiants ont été inscrits et ont voté dans la localité de leur université. L’inscription des électeurs et le déroulement du scrutin soulèvent des difficultés dans les zones où est pratiqué le pastoralisme, comme l’État régional somali, car les pasteurs ne cessent de se déplacer. Des bureaux de vote mobiles ont été déployés lors des deux dernières élections pour permettre aux intéressés de voter à proximité du lieu où ils se trouvaient et la loi électorale en vigueur autorise le Conseil électoral à déployer au besoin des bureaux mobiles d’inscription dans les zones de pastoralisme. Des préparatifs en vue de la rédaction et de la mise en œuvre d’une directive générale sur l’application de cette disposition sont en cours.

271.Un nombre de plaintes considérable a été déposé dans le passé. Les partis politiques portent plainte aux différents stades du processus électoral − de l’inscription des électeurs à l’annonce des résultats. Lors des seules élections de mai 2005, des plaintes ont été déposées dans 299 des 547 circonscriptions, ce qui a entraîné un dépassement du budget électoral et suscité un climat de suspicion quant à l’intégrité de l’ensemble du processus électoral. La plupart de ces plaintes n’étaient pas étayées. Après avoir examiné toutes les plaintes, le Conseil électoral a rejeté celles à l’appui desquelles n’avait été fourni aucun élément prouvant une fraude ou toute autre pratique susceptible d’avoir infléchi les résultats, mais a ordonné un nouveau scrutin dans plusieurs circonscriptions.

272.Diverses difficultés ont été signalées lors des élections de 2005 et 2007, dont: la distribution tardive du matériel électoral dans quelques circonscriptions; l’insuffisance de l’allocation versée aux membres du personnel électoral; le report du calendrier électoral à la demande de partis politiques; la pénurie de bulletins de vote et leur mauvais usage dans des circonscriptions; la tenue d’activités de campagne électorale dans certains lieux malgré une interdiction légale; l’insuffisance du nombre et des qualifications des membres du personnel électoral; la prise de mesures illégales contre des membres du personnel électoral par certaines administrations publiques et des ONG; la non-fourniture par des donateurs de l’assistance électorale promise. En collaboration avec le Gouvernement et d’autres parties prenantes, le Conseil électoral a pris les mesures nécessaires pour éviter que ces difficultés n’affectent pas la tenue d’élections libres et équitables.

Article 26Égalité et non-discrimination

273.Cet article a été repris quasi littéralement par les rédacteurs de la Constitution. Les mesures juridiques et autres prises pour donner effet au principe général d’égalité et de non-discrimination sont exposées dans la troisième partie du document de base commun.

Article 27Droits des minorités

274. La Constitution reconnaît les minorités nationales sans pour autant définir précisément les notions de minorité nationale ou linguistique. La Proclamation amendant la législation électorale éthiopienne charge la Chambre de la Fédération de déterminer à l’avance au regard de critères précis les nationalités minoritaires que l’on estime avoir besoin d’une représentation spéciale, mais la Chambre n’a pas encore fixé de critères clairs, ni déterminé les nationalités minoritaires concernées, en raison principalement du manque de personnel et des contraintes financières; elle a élaboré des plans tendant à remédier aux difficultés et engagé des recherches sur l’identification des nationalités minoritaires.

275.La Constitution garantit à chaque nation, nationalité et peuple d’Éthiopie, dont les nationalités minoritaires, le droit inconditionnel à l’autodétermination, y compris le droit à la sécession. La Constitution reconnaît à chaque nation, nationalité et peuple d’Éthiopie, dont les nationalités minoritaires, le droit de parler, d’écrire et de développer sa propre langue, d’exprimer, de développer et promouvoir sa culture et de préserver son histoire. Une nationalité minoritaire jouit du droit constitutionnel à l’autogouvernement intégral, qui couvre le droit de créer des institutions gouvernementales sur le territoire qu’elle peuple et d’avoir une représentation équitable dans le gouvernement de l’État régional et celui de la Fédération.

276.Les nationalités minoritaires jouissent, dans l’ensemble, de tous les droits que la Constitution reconnaît aux nations, nationalités et peuples.

277.La Constitution dispose que dans chaque circonscription électorale les membres de la Chambre des représentants des peuples sont élus au scrutin majoritaire. Des dispositions légales doivent être prises pour assurer une représentation spéciale aux nationalités et peuples minoritaires. Le nombre des membres de la Chambre ne doit pas dépasser 550, eu égard au chiffre de la population et à la représentation spéciale des nationalités et peuples minoritaires. Les nationalités et peuples minoritaires doivent avoir au moins 20 sièges. Selon le Conseil électoral national, 22 sièges de la Chambre des représentants des peuples ont été remportés par des membres de minorités nationales lors des élections de mai 2005.

278.Chaque nation, nationalité ou peuple, dont les minorités nationales, doit être représenté par au moins un membre à la Chambre de la Fédération. La constitution de certains États régionaux garantit une représentation spéciale aux nationalités et peuples minoritaires dans leur Conseil d’État. Ces dispositions permettent aux minorités nationales de promouvoir et protéger leurs droits et de faire valoir leurs intérêts dans le processus législatif et l’interprétation de la Constitution.