Convention relative aux droits de l'enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.66617 novembre 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt‑cinquième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 666ème SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 4 octobre 2000, à 15 heures

Présidente : Mme OUEDRAOGO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial de la République fédérale islamique des Comores (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial de la République fédérale islamique des Comores [CRC/C/28/Add.13 (rapport initial), CRC/C/Q/COM/1 (liste des points à traiter)] (suite)

1.Sur l'invitation de la Présidente, la délégation comorienne reprend place à la table du Comité.

2.M. FULCI revient sur les actes de violence perpétrés contre des enfants. Le Code pénal prévoit que la famille d'un enfant dont l'intégrité physique a été violée peut porter l'affaire devant la justice en vue d'obtenir des dommages‑intérêts. La compensation financière annule‑t‑elle le crime, ce qui reviendrait à le tolérer ?

3.Les Comores déclarent ne pas avoir besoin de structures de protection de remplacement car le nombre d'enfants abandonnés est minime, mais il semblerait que la structure familiale ne soit pas aussi solide que par le passé et que les enfants de la rue, qui se livrent à de nombreuses activités à la limite de la légalité, soient toujours plus nombreux. Que font les Comores face à ce phénomène ? En outre, la pauvreté pousse les enfants à travailler dès l'âge de 7 ans comme domestiques en échange d'un toit et de nourriture; la délégation peut‑elle donner davantage d'informations sur ce sujet ?

4.Quelles ont été les répercussions, sur le plan des soins de santé élémentaires et du bien-être de l'enfant, du départ en 1998 du personnel de santé du PNUD, dont le gynécologue, le chirurgien et le chef des services de santé de l'île d'Anjouan ?

5.M. DOEK demande si le Gouvernement a pris des mesures en vue de réduire le taux élevé de mortalité maternelle, notamment en menant des campagnes de sensibilisation pour inciter les femmes à fréquenter les services de soins prénatals et périnatals. Dans ce contexte, le Gouvernement entreprend‑il de sensibiliser la population à l'utilisation de contraceptifs et facilite‑t‑il l'accès aux services de santé génésique ? Prend‑il en compte les besoins des adolescents dans ce domaine ?

6.Seuls 40 % des zones urbaines et 15 % des zones rurales bénéficient de services d'assainissement adéquats. Face à la rapidité de la croissance démographique et à l'accroissement consécutif de la demande d'eau potable, quelles mesures le Gouvernement prend-il ?

7.Les Comores se caractérisent par un faible taux de scolarisation; quel est le pourcentage d'enfants parvenant en fin d'études primaires ? En outre, 35 % des Comoriens ne savent ni lire ni écrire. On peut en tirer des conclusions sur la qualité de l'enseignement dispensé aux Comores. Si les enseignants n'ont souvent pas le niveau pédagogique requis, le véritable problème vient de leur manque de motivation dû à la faiblesse de leur rémunération. Est‑il vrai que les salaires des enseignants sont dérisoires et que parfois ils ne leur sont pas versés pendant plusieurs mois ?

8.Les Comores n'ayant pas de système de justice pour mineurs, il serait souhaitable de savoir quelle est la politique générale suivie par le pays : les jeunes délinquants y sont-ils condamnés à des peines d'emprisonnement ou bien a‑t‑on mis en place des peines de substitution pour éviter de plonger ces jeunes dans le milieu carcéral ?

9.Mme RILANTONO demande si les Comores ont pris des mesures pour combattre le paludisme, maladie qui touche gravement le pays.

10.Rappelant qu'aux termes de la Convention, un enfant autochtone ou appartenant à une minorité ethnique ne peut être privé du droit de pratiquer sa religion, elle souhaite savoir s'il existe autant d'écoles dites modernes que d'écoles coraniques et à quel type d'enseignement va la préférence des parents. Par ailleurs, les écoles coraniques préparent‑elles les enfants à la réalité socioéconomique du pays, l'État exerce‑t‑il un contrôle sur ces écoles et évalue‑t‑il la qualité de l'enseignement ?

11.Mme MOKHUANE, prend note du taux élevé d'abandon scolaire, en particulier dans le secondaire, et demande ce qu'il advient des 14‑17 ans étant donné que la scolarité n'est obligatoire que jusqu'à 14 ans.

12.En matière de santé, elle souhaite savoir si les Comores ont mis en place un programme visant à former le personnel local pour remplacer les personnels de santé étrangers qui ont quitté le pays en 1998. Les Comores ont-elles mis en œuvre des politiques de santé publique pour apporter une solution aux problèmes sanitaires liés à la surpopulation des zones urbaines et lutter contre le choléra ? Dans l'affirmative, ces politiques ont-elles donné de bons résultats ? Les Comores collaborent avec des organisations internationales pour lutter contre le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles. Ont‑elles mis en place des services spécialisés dans la prise en charge des enfants sidéens ou séropositifs ? La malnutrition est également un problème de santé majeur aux Comores, où 44 % des enfants souffrent d'un retard de croissance. Des mesures sont-elles prises pour améliorer la situation ?

13.Notant que l'exploitation intensive des terres a eu sur l'environnement  de graves répercussions telles que l'appauvrissement des sols, l'érosion, le détournement de cours d'eau et les risques d'extinction d'espèces végétales ou animales, Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ aimerait savoir si les Comores ont mis au point des programmes de sauvegarde de l'environnement.

14.La PRÉSIDENTE demande quelles ont été les modalités d'établissement du rapport initial : en particulier, les auteurs du rapport ont‑ils consulté les ONG présentes dans le pays ?

15.En matière d'éducation, les enfants participent-ils à la prise de décision les concernant au sein des établissements scolaires et sont-ils représentés dans les conseils de discipline ou d'établissement ?

16.L'État partie fait valoir que dans le domaine de la protection de l'environnement, les dispositions juridiques et la répression ne sont qu'un palliatif et qu'il est nécessaire que la population prenne conscience des risques auxquels elle s'expose à ne pas protéger son patrimoine national. Les Comores ont‑elles entrepris de sensibiliser la population, et notamment les jeunes, à ces questions en vue de les faire davantage participer à la protection de l'environnement ? Existe‑t‑il en outre des programmes visant à améliorer les conditions de vie, dans le domaine de l'habitat, de l'eau et de l'assainissement ?

17.Enfin, la polygamie et l'instabilité conjugale concourent à fragiliser l'environnement familial. On signale un certain nombre de fugues chez les jeunes enfants, qui semblent fuir les problèmes familiaux. Quelles sont les solutions apportées à ce problème ?

18.M. DJAFFAR (Comores) dit que le rapport a été rédigé en 1996 par un diplomate ayant vécu de nombreuses années à l’étranger. Les ONG et la société civile n'ont pas participé à l'élaboration de ce document, qui passe à côté de certains problèmes importants. Du fait du poids des traditions et de la religion, les auteurs de certaines violations ne sont pas traduits en justice. De nombreuses personnes luttent contre cet état de fait en refusant le non‑dit. Les dédommagements financiers en cas de viol, par exemple, sont une pratique répandue. Bien souvent, les parents ne portent plainte que s'ils n'ont pas pu s'arranger au niveau de la famille ou de la communauté. Il s'agit là d'une réalité difficile à reconnaître mais qui ne pourra changer que si on la regarde en face.

19.Il est vrai que le taux de délinquance juvénile est particulièrement bas. La société comorienne souffre de bien d'autres maux, notamment de l'instabilité chronique du pays et de ses difficultés financières et économiques, mais échappe en partie à ce problème, grâce surtout au très fort ascendant qu'exercent les parents sur leurs enfants. La criminalité est faible dans le pays et, même pour les adultes, les procès en cour d'assises sont rares. Les peines prononcées pour les enfants sont généralement légères. Il existe une seule prison, vétuste et sans quartier pour les mineurs. C'est pourquoi les magistrats s'efforcent au maximum d'éviter la détention des jeunes. Cela revient en fait à laisser ces derniers livrés à eux‑mêmes, puisqu'il n'existe pas de système d'assistance éducative ni de mécanisme de réintégration. C'est pourquoi plusieurs propositions ont été soumises au Ministère de la justice par les magistrats des tribunaux de première instance, qui ont tous été formés en France et sont sensibilisés au problème de la protection de l'enfant. Ainsi, un projet de création d'une "maison d'insertion sociale" pour les jeunes a été mis sur pied et le Ministère étudie actuellement, avec l'appui de l'UNICEF, la possibilité de créer la fonction de juge pour enfants. Par ailleurs, l'instruction islamique est répandue aux Comores, y compris dans les écoles modernes, même si cela n'entre pas dans le cadre d'un programme du Gouvernement.

20.La polygamie reste pratiquée, même si elle recule depuis une vingtaine d'années du fait de l'évolution des mentalités mais aussi pour des raisons matérielles, les hommes n'ayant généralement pas les moyens financiers d'entretenir plusieurs femmes. Il est bien entendu impossible d'interdire la polygamie du jour au lendemain. En revanche, le projet de code de la famille dispose que tout mari souhaitant épouser une deuxième femme devra en demander l'autorisation à sa première épouse. L'adoption de ce texte, indispensable à la modernisation de la société comorienne, devrait donc permettre de lutter notamment contre le problème de l'instabilité conjugale.

21.Mme TOYB (Comores) explique que les incidences du retrait du personnel du PNUD sur le système de santé ont été minimes comparées à l'ampleur des problèmes qui se posent dans ce domaine. De nombreux médecins comoriens sont aujourd'hui au chômage, en raison de la situation économique et financière du pays. Des progrès ont malgré tout été accomplis au niveau des districts sanitaires avec la formation de personnel paramédical. La prise en charge des femmes en âge de procréer, des mères et de leurs enfants tend également à s'améliorer. Des programmes ont été mis en œuvre dans ce domaine avec l'appui du FNUAP, du PNUD et de l'OMS. Les femmes sont aujourd'hui informées des méthodes de contraception, qui sont toutes utilisées, et ce gratuitement. Une vaste campagne de sensibilisation a également été menée avec le concours des autorités religieuses et a permis de faire évoluer les comportements, notamment chez les maris. Les organisations communautaires sont elles aussi mobilisées, comme l'Association comorienne du bien‑être familial qui a ouvert des centres d'animation où les jeunes peuvent assister à des projections de films et recevoir des informations sur la santé génésique. Dans le domaine de la lutte contre le sida, l'Association des femmes africaines face au sida (AFASI) est particulièrement active. Il existe également un programme national, dont la mise en œuvre se heurte toutefois à la réticence des malades à se faire connaître. Ceux‑ci vont rarement vers les centres de santé, où certains médicaments fournis par l'OMS pourraient leur être distribués. Les familles, par leur silence, contribuent à l’isolement de ces malades.

22.Dans le cadre du programme de lutte contre le paludisme mis en œuvre avec l'appui de l'OMS, des brochures sont distribuées dans les foyers de jeunes et les établissements scolaires. Un des objectifs de ce programme est de promouvoir l'utilisation des moustiquaires et leur imprégnation au deltamétrine. En outre, toute personne dont la température est supérieure à 38,5 °C a droit à un dépistage gratuit afin de pouvoir ensuite être traitée à la chloroquine. Pour ce qui est du choléra, l'épidémie de ces dernières années a été vite maîtrisée mais la maladie reste endémique. Un autre problème important de santé publique est celui de la malnutrition, dont souffre la quasi‑totalité de la population. Du fait de l'épuisement des sols et des conditions précaires de l'agriculture, les Comores sont loin de l'autosuffisance alimentaire. Paradoxalement, la population manque même de poisson, les pêcheurs n’ayant pas l’équipement nécessaire pour exercer correctement leur activité. Différents projets visant à remédier à cette situation ont vu le jour mais n'ont pu être menés à bien faute de moyens financiers et administratifs. Le Gouvernement, l'OMS et la FAO ont entrepris récemment de mettre sur pied un programme pour l'autosuffisance alimentaire.

23.Les carences du système éducatif s'expliquent en grande partie par la situation socioéconomique des enseignants. Ceux‑ci sont dûment formés mais leurs arriérés de salaires sont tels que beaucoup refusent de travailler. Il faut savoir qu'au cours de ces quatre dernières années, on a comptabilisé une vingtaine de mois non payés. La rentrée scolaire 2000 est elle‑même compromise puisque les enseignants attendent le paiement des arriérés pour 1999‑2000, qui sont de six mois. Il est déjà arrivé que les cours ne soient pas assurés pendant toute une année scolaire.

24.Les écoles coraniques sont plus nombreuses que les écoles modernes, à l’égard desquelles certaines familles manifestent encore des réticences. L'ensemble de la population est favorable à l'école coranique et tous les enfants y ont accès. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé d'y introduire les cours d'alphabétisation et d'encourager une modernisation, grâce en particulier à la venue de professeurs autres que les théologiens et les professeurs d'arabe. Par l'intermédiaire des ONG arabo‑islamiques installées dans le pays, les élèves peuvent ensuite être envoyés dans certains pays arabes, comme l'Égypte, l'Arabie saoudite, le Soudan ou le Koweït, pour y faire des études universitaires y compris ‑ et c'est là une évolution récente ‑ en science, technologie et lettres modernes.

25.Les problèmes environnementaux, liés notamment à la déforestation, sont très nombreux. Des activités de sensibilisation ont commencé à être menées auprès de la population et un programme de protection de la zone côtière vient d'être lancé par la Communauté de l'Océan indien. L'absence de tout habitat social crée une situation dangereuse, dans la mesure où la majorité des familles vivent toujours dans des paillotes qui ne peuvent pas résister aux incendies et aux intempéries. Aucune mesure n'a été prise à ce jour en vue d'améliorer la sécurité des conditions de logement de la population. De même, une grande partie du pays est toujours privée d'eau. Des efforts ont été faits en vue de mobiliser les communautés pour améliorer l'assainissement et la gestion des ordures ménagères, sous l'impulsion notamment d'associations pour la protection de l'environnement. Le ramassage des ordures n'est cependant pas systématique et les problèmes d'hygiène persistent. Ces questions du logement, de l'approvisionnement en eau et de la gestion des déchets n'ont malheureusement pas encore été abordées par le Gouvernement.

26.La PRÉSIDENTE demande des précisions sur la manière dont sont traités les délinquants juvéniles. Pour ce qui est de la polygamie, elle doute que les dispositions du nouveau code de la famille soient la meilleure solution pour éliminer cette pratique, le refus de la première épouse ne constituant peut‑être pas un obstacle suffisant. Elle demande par ailleurs quelle est la situation des enfants nés hors mariage et celle des mères célibataires. Elle aimerait en outre savoir dans quelles mesures les adolescents sont pris en considération dans les programmes de santé génésique, qui semblent s'adresser surtout aux adultes.

27.M. DJAFFAR (Comores) souligne que les juges évitent autant que possible de condamner un mineur à une peine de prison, sachant que celui‑ci n'y serait pas séparé des détenus adultes. À défaut de peines de substitution à proprement parler, les magistrats tentent de mettre à contribution les parents afin qu’ils s’efforcent de comprendre les causes du comportement de leur enfant et cherchent des solutions.

28.Mme TOYB (Comores) précise qu'une association pour le bien-être de la famille informe les jeunes sur les moyens de contraception et que la Ministre de l’éducation, qui préside également l’ensemble des associations de femmes du pays, prévoit d’intégrer dans les programmes scolaires un cours sur la santé sexuelle et génésique, initiative soutenue par les organisations non gouvernementales. Dans certaines écoles, les enfants peuvent faire entendre leur voix en participant aux conseils de classe et aux conseils de discipline.

29.M. DOEK demande ce que sont exactement les cercles d’enfants. La législation comorienne contient-elle des disposition garantissant à l’enfant le droit d’être entendu lors d’une procédure et quelles sont les conditions requises pour user de ce droit ? Comment la police traite‑t‑elle les mineurs délinquants ? Est-elle formée pour accomplir sa tâche dans le respect des droits de l’enfant ? Quelle est la durée de la garde à vue ?

30.Eu égard au faible taux de fréquentation scolaire, il faudrait savoir si les enfants non scolarisés travaillent et, dans l’affirmative, dans quel secteur. L’État partie connaît-il le problème du travail des enfants et envisage-t-il de ratifier les Conventions Nos 138 et 182 de l’OIT concernant respectivement  l’âge minimum d’admission à l’emploi et l’interdiction des pires formes de travail des enfants ?

31.Mme MOKHUANE souhaite savoir quel est le taux d’abandon scolaire et ce que deviennent les enfants concernés. À quel âge la consommation d’alcool est‑elle autorisée et que fait‑on pour éviter que les enfants puissent acheter de l’alcool ? Quelle est la situation des enfants handicapés et des moyens sont‑ils mis en œuvre pour les intégrer dans la société ?

32.Il est regrettable que dans le rapport et les réponses écrites ne figure aucune information sur les mesures prises en faveur des adolescents. Le développement psychique et social de l’enfant n’est pas moins important que sa survie alimentaire. Quels sont les besoins des adolescents et comment sont traitées les pathologies psychiques ?

33.Mme RILANTONO, déplorant que la délégation ne comporte pas d’expert sur l’éducation, recommande à l’État partie de veiller à ce que les écoles coraniques dispensent un enseignement du même niveau que les écoles dites modernes.

34.Mme TOYB (Comores) souligne que ni les parents, ni le Gouvernement ne négligent l’importance de l’éducation et que la principale cause de l’abandon scolaire est le manque de ressources. Les parents qui ont quelques biens n'hésitent pas à les sacrifier pour envoyer leurs enfants en école privée. Les garçons qui abandonnent l’école vont travailler aux champs, tandis que les filles aident leur mère dans l’accomplissement des tâches ménagères ou sont données en mariage, ce qui explique la forte proportion de mariages précoces. D’autres enfants qui cessent d’aller à l’école se retrouvent livrés à eux‑mêmes, ce qui risque d'accroître la délinquance juvénile. Le secteur de la santé est moins en difficulté que celui de l’éducation car les Comores reçoivent l’aide de l’OMS et de l’UNICEF.

35.La consommation d’alcool est en principe interdite à tout âge et, bien que certains jeunes passent outre cette interdiction, l’alcoolisme dans ce groupe de population n’est pas encore un réel problème. Pour ce qui est de la toxicomanie, la seule mesure prise a été la création de la brigade antidrogue.

36.M. DJAFFAR (Comores) indique que la police n’est pas formée de façon satisfaisante, contrairement à la gendarmerie, qui fait venir des instructeurs de France. C’est la raison pour laquelle la magistrature a déployé des efforts de sensibilisation de la police, notamment en faisant afficher dans les locaux de police des instructions interdisant le recours à la torture. La durée de la garde à vue est de 24 heures et ne peut être prolongée jusqu’à 48 heures qu’avec l’autorisation du Procureur. À Moroni et dans l’île de Mohéli, une permanence téléphonique a été mise en place afin que toute garde à vue puisse être notifiée à n’importe quel moment au Procureur. À l’École nationale des forces armées, les futurs officiers de police judiciaire reçoivent un enseignement sur la protection des mineurs en garde à vue. Malgré ces efforts de sensibilisation, des cas de mauvais traitements infligés par des policiers se sont produits mais les auteurs ont dû répondre de leurs actes devant la justice.

37.Bien que l'alcool soit prohibé par la loi, on peut s'en procurer n'importe où et l'alcoolisme chez les jeunes pourrait devenir un grave problème. Les seules affaires de drogue dont a été saisie la justice n'ont porté jusqu'à présent que sur le trafic et la consommation de cannabis.

38.S'agissant des enfants nés hors mariage, c'est le droit musulman qui régit le statut personnel et il ne prévoit rien en ce qui les concerne. La naissance d'un tel enfant constitue une honte pour une famille et, de ce fait, on préfère parfois recourir à un avortement clandestin. Il arrive que les enfants nés hors mariage prennent le nom de leur oncle maternel mais il ne s'agit là que d'un pis‑aller et il faudra légiférer en la matière pour combler ce vide juridique. En ce qui concerne la définition de l'enfant, l'enfance prend fin à la puberté selon l'islam et à 18 ans selon le Code civil et selon le projet de code de la famille.

39.En collaboration avec le Gouvernement, l'UNICEF mène actuellement, une étude visant à évaluer l'ampleur du travail des enfants. En se fondant sur les résultats de cette étude, le Gouvernement prendra les mesures qui s'imposent pour remédier à ce phénomène, qui va en s'aggravant puisque l'on voit toujours plus d'enfants manifestement non scolarisés vendre divers objets dans la rue. À l'heure actuelle, aucune structure n'est en place pour la prise en charge des enfants handicapés et des enfants souffrant de problèmes psychologiques et le Gouvernement devra donc trouver des solutions à ce problème.

40.M. DOEK demande ce que fait le Gouvernement pour aider à réinsérer, à leur démobilisation, les enfants recrutés par les mouvements de guérilla à Anjouan et s'il est exact que la prostitution d'enfants commence à faire son apparition aux Comores.

41.M. FULCI signale que d'après l'UNICEF, à Anjouan les groupes séparatistes continuent à recruter des enfants âgés de 13 à 16 ans et n'hésitent pas, pour ce faire, à les droguer.

42.Face aux enfants qui travaillent, le Gouvernement ne doit pas sombrer dans l'attentisme mais prendre des mesures urgentes, en particulier en vue de faire respecter les dispositions pertinentes du Code du travail, notamment celles qui interdisent le travail des enfants de moins de 15 ans, et ratifier les Conventions Nos 138 et 182 de l'OIT.

43.La PRÉSIDENTE demande si les Comores reçoivent une aide extérieure, dans le cadre de la coopération bilatérale, pour faire face aux problèmes économiques et financiers et si l'État rencontre des difficultés pour payer leurs salaires aux fonctionnaires. Il serait également utile de savoir si le nouveau code de la famille contiendra des dispositions concernant les enfants nés hors mariage.

44.Mme TOYB (Comores) précise que le Gouvernement comorien n'a pour l'heure aucune prise sur les événements qui se déroulent à Anjouan, notamment en raison de l'embargo décrété par l'OUA. Il faut espérer que les négociations engagées avec les séparatistes permettront de remédier à la situation dramatique des enfants recrutés par les groupes rebelles.

45.Une enquête récente montre que les enfants ne sont pas touchés par la prostitution mais que des jeunes mères célibataires ou divorcées se prostituent pour nourrir leurs enfants. Il faut rappeler que de nombreuses jeunes filles sont mariées précocement sans leur consentement; beaucoup divorcent ensuite et se retrouvent avec des enfants à nourrir.

46.M. DJAFFAR (Comores) dit que des conférences et des campagnes d'information sont organisées pour sensibiliser les familles et les enfants au problème du travail des enfants. De plus, un tribunal du travail vient d'être créé à Moroni. La délégation comorienne transmettra au Gouvernement les recommandations du Comité concernant la ratification des deux Conventions de l'OIT susmentionnées et la nécessité de faire respecter les dispositions du Code du travail.

47.Les principales recettes de l'État proviennent des taxes douanières et des impôts et lorsqu'elles font défaut il est très difficile de payer leurs salaires aux fonctionnaires. En ce qui concerne l'aide de l'étranger, il convient d'indiquer que les Comoriens qui travaillent en Europe, principalement en France, apportent une aide considérable aux membres de leur famille restés au pays et contribuent à la construction d'écoles, de bibliothèques et de routes.

48.La PRÉSIDENTE invite M. Doek à présenter le projet d'observations finales du Comité.

49.M. DOEK constate que le Gouvernement devra prendre des mesures, notamment législatives et financières, pour améliorer la situation des enfants, en particulier les enfants qui travaillent, les enfants nés hors mariage, les enfants handicapés, et les enfants placés en foyer.

50.La PRÉSIDENTE remercie la délégation pour les informations fournies au Comité, qui lui ont permis de mieux comprendre les difficultés rencontrées par le Gouvernement comorien pour mettre en œuvre la Convention, tout en regrettant qu'un certain nombre de questions soient restées sans réponse. Elle encourage vivement le Gouvernement comorien à adopter une approche intégrée de l'application de la Convention et exprime l'espoir que les Comores progresseront dans la réalisation des droits de l'enfant.

La séance est levée à 17 h 25.

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