Nations Unies

CRC/C/SR.1554

Convention relativeaux droits de l’enfant

Distr. générale

28 juillet 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-cinquième session

Compte rendu analytique de la 1554e séance (chambre A)

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 16 septembre 2010, à 15 heures

Présidente: Mme Lee

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties(suite)

Rapport initial de la Bosnie-Herzégovine sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Rapport initial de la Bosnie-Herzégovine sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/BIH/1; CRC/C/OPSC/BIH/Q/1 et Add.1)

Sur l’invitation de la Présidente, la délégation de Bosnie-Herzégovine reprend place à la table du Comité.

2.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) rappelle que le rapport de la Bosnie-Herzégovine a été établi par les ministères compétents, en concertation avec des organisations non gouvernementales (ONG), comme exposé en détail dans la section I du rapport.

3.M. Kotrane (Rapporteur pour la Bosnie-Herzégovine − Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants − OPSC) demande si la Bosnie-Herzégovine a prévu de ratifier la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Il demande quelles mesures sont prises pour faire face à la mendicité organisée et assurer la protection des enfants roms. Il aimerait également savoir comment les divers plans sectoriels sont coordonnés et financés et si l’État partie a envisagé de mettre en œuvre un seul plan national qui aurait vocation à couvrir différentes catégories. Il demande si des études ont été menées en vue d’obtenir des informations qui serviraient de fondement à l’élaboration des stratégies et des plans d’action nationaux.

4.M. Kotrane demande en outre si le travail forcé est considéré comme une infraction pénale et sanctionné comme telle en Bosnie-Herzégovine et si le Protocole facultatif à la Convention constitue une base juridique suffisante pour réprimer le travail forcé ou le fait de jouer un rôle d’intermédiaire dans des adoptions illégales, qui équivalent à des formes de vente d’enfants.

5.Il demande des informations sur l’implication de policiers et d’agents de la fonction publique dans la commission d’infractions visées par le Protocole, sur les éventuelles enquêtes et poursuites engagées ainsi que sur la mesure dans laquelle la compétence nationale peut être appliquée en dehors du territoire national relativement à des infractions commises par ou contre des citoyens ou des habitants de Bosnie-Herzégovine. Il demande si l’État partie prévoit de conclure des accords d’extradition avec la Serbie et la Croatie et si, en l’absence de tels accords, le Protocole a pu servir de fondement à des demandes d’extradition. Enfin, M. Kotrane souhaiterait en savoir plus sur la coopération entre la police bosniaque et les polices des pays voisins.

6.M.Pūras  demande dans quelle mesure les centres d’action sociale participent au règlement des questions visées par le Protocole et quel est leur rôle dans la structure nationale. Il demande en outre si d’autres services spécialisés sont à la disposition des victimes d’infractions énoncées dans le Protocole, comme des foyers d’accueil et des centres proposant des services de réadaptation psychosociale, et, dans l’affirmative, combien il y en a, quelle assistance ils proposent, qui les gèrent et qui les financent.

7.Il invite en outre la délégation à indiquer combien l’État partie a investi pour mener des campagnes de sensibilisation aux dispositions du Protocole auprès de tous les acteurs concernés, notamment les enfants, et comment la société civile participe à la prévention des infractions qui relèvent du Protocole et à l’aide apportée aux victimes de ces infractions.

8.M. Pūrasdemande quelles mesures a pris l’État partie pour sensibiliser le public au problème du tourisme sexuel et lutter contre ce phénomène, ce qu’il a fait pour faire progresser l’enregistrement des naissances et enregistrer rétroactivement les enfants non déclarés à l’état civil, comment l’État partie prévient le risque que des enfants placés en institutions ne deviennent victimes des infractions énoncées dans le Protocole et s’il est conscient de ce risque, et si la délégation a eu connaissance de cas de ce type.

9.MmeAidoo demande des informations sur le bureau central de la statistique et s’il est prévu de renforcer son action afin d’améliorer la collecte de données se rapportant à la Convention et aux Protocoles facultatifs. Elle demande également s’il y a des sources de données sur les droits des enfants autres que les sources fédérales. Constatant le manque d’harmonisation des lois pénales de l’État partie et les différences qui existent quant aux sanctions appliquées selon les régions, elle demande quelles mesures entend prendre l’État partie pour garantir que les infractions décrites dans le Protocole seront qualifiées et réprimées d’une manière uniforme dans tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine. En outre, le paragraphe 62 des réponses écrites appelle des précisions: faut-il comprendre que les enfants victimes de la traite et d’infractions visées par le Protocole facultatif sont traités comme des enfants ayant un comportement socialement négatif? Enfin, elle demande si l’État partie envisage de mettre en place un service d’assistance téléphonique pour les enfants victimes d’infractions au regard du Protocole.

10.M. Citarella demande quelle place occupent les instruments internationaux énumérés dans l’annexe à la Constitution dans la hiérarchie des normes de Bosnie-Herzégovine. Il se demande par ailleurs si l’infraction de vente d’enfants a été incorporée dans la législation pénale nationale et si elle peut désormais faire l’objet d’une sanction pénale. Il demande des informations sur les mesures concrètes prises pour limiter l’offre de matériels pédopornographiques sur l’Internet.

11.La Présidente demande quel ministère est chargé d’appliquer le Protocole facultatif et comment les ministères et les autorités municipales coopèrent et coordonnent leur action.

La séance est suspendue à 15 h 40; elle est reprise à 16 heures.

12.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) explique que le Ministère des droits de l’homme et des réfugiés est chargé de surveiller la mise en œuvre du Protocole facultatif, tandis que le Ministère de la sécurité est chargé de la prévention de la traite des personnes, notamment des enfants.

13.La Présidente demande quelles sont les autres attributions du Ministère des droits de l’homme et des réfugiés, s’il dispose des ressources financières et humaines nécessaires pour s’acquitter de sa mission et de quelle manière il garantit que les questions relatives aux enfants soient toujours au sommet de la liste des priorités.

14.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) explique que les attributions du Ministère des droits de l’homme et des réfugiés sont doubles: il est chargé, premièrement, de surveiller l’application par la Bosnie-Herzégovine des obligations qu’elle a contractées sur le plan international, et deuxièmement, de contrôler la promotion et la protection des droits de l’homme sur le plan national. Ce ministère a la possibilité de mettre en route des programmes et des projets visant à améliorer certains aspects de la protection des droits des enfants, en particulier ceux des enfants des catégories vulnérables. Il a mis sur pied un mécanisme de protection des enfants et d’aide à ceux-ci dans les affaires pénales les concernant, lorsqu’ils sont victimes de violence ou d’exploitation par exemple. Il joue aussi un rôle de coordination et soutient les institutions, telles que les centres d’aide sociale, au niveau local. Il peut leur allouer des fonds pour leur permettre d’offrir une protection adéquate aux groupes vulnérables. Il n’intervient que dans les cas particulièrement graves d’exploitation, de violence sexuelle ou de travail forcé, à la demande de l’institution ou de l’ONG qui s’occupe des victimes. La procédure d’intervention se déroule comme suit: un centre d’action sociale ou une ONG soumet une demande d’intervention, sur la base de laquelle le Ministère décide de l’assistance à apporter et des ressources qu’il faut affecter à cette fin. Ce ministère s’attache surtout, dans les affaires pénales graves concernant des enfants victimes, à proposer des services que les petites communautés ou institutions ne peuvent pas assurer, comme le placement en famille d’accueil ou d’autres formes de protection physique.

15.MmeAl-Asmar demande quel rôle jouent les ONG dans la prévention de la traite et de la vente d’enfants et comment sont financées leurs activités.

16.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que les ONG ont leurs propres programmes et initiatives et ont conclu des mémorandums d’accord avec le Gouvernement. Le Ministère des droits de l’homme et des réfugiés peut intervenir pour apporter son concours dans la mise en œuvre de programmes de réinsertion d’enfants ayant été victimes de la traite. Chaque ONG soumet au Ministère, qui l’examine, un plan de réinsertion de la victime, accompagné d’un récapitulatif des financements nécessaires. Le Ministère et les ONG travaillent avec les victimes pendant une durée allant de six mois à un an, après quoi les autorités locales prennent le relais. Dans le cadre de cet accord de coopération, toute organisation peut proposer un plan de réinsertion et demander l’octroi d’une petite subvention, qui lui permettra d’en commencer l’exécution. Le Ministère des droits de l’homme et des réfugiés subventionne des organisations qui peuvent intervenir sur le long terme, en gérant, notamment, des programmes de rapatriement. Des aides financières sont versées aux victimes de la traite afin de leur permettre de bénéficier de services publics tels que soins de santé et éducation.

17.La plupart des victimes de la traite sont des Roms. Parmi les mesures prises pour protéger la communauté rom, on peut citer un programme d’enregistrement des naissances mis en place en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui prévoit la déclaration à l’état civil des enfants non enregistrés, ainsi que l’enregistrement des nouveau-nés. Un autre programme a été mis sur pied en vue d’améliorer la situation des Roms sur les plans du logement et de la santé. On procède à des évaluations des besoins parmi la population rom en organisant notamment des visites dans les communautés roms pour déterminer ce qui fait obstacle à l’enregistrement des naissances. Ainsi, on s’est rendu compte que les parents étaient réticents à enregistrer leurs enfants à l’état civil en raison de leur mode de vie nomade. De nouvelles règles ont été adoptées: les parents et les tuteurs qui n’enregistrent pas la naissance de leurs enfants sont passibles d’une amende et les établissements de soins sont tenus d’enregistrer d’office les naissances. Les efforts vont se poursuivre dans ce domaine, en particulier dans le cadre de la Décennie européenne pour l’intégration des Roms, 2005-2015.

18.MmeAidoo, saluant les efforts engagés afin d’enregistrer les naissances des enfants roms, demande quelles mesures sont prises pour veiller à ce qu’ils soient scolarisés.

19.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que des efforts sont faits pour améliorer l’intégration des Roms dans le système scolaire officiel. L’accès au logement est lié à l’accès à l’éducation. Dernièrement, des logements ont été fournis à 150 familles roms, dont les enfants ont été automatiquement inscrits à l’école locale. Au total, 20 000 Roms sont enregistrés en Bosnie-Herzégovine; l’État s’emploie à leur fournir des prestations en matière de santé, de logement et d’éducation. Des mesures d’incitation financière sont offertes aux familles dont les enfants fréquentent régulièrement l’école: ces mesures ont donné de bons résultats et ont permis de faire progresser les taux de fréquentation scolaire, en particulier à Sarajevo, Tuzla et Zenica, où les Roms sont particulièrement nombreux.

20.MmeAidoo demande si des mesures sont prises pour éliminer les représentations stéréotypées des minorités dans les manuels scolaires, et pour promouvoir une culture de la paix, chez les enfants en particulier.

21.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit qu’il y a peu de cas de discrimination et de représentations stéréotypées des Roms dans les écoles. S’il est illusoire d’espérer parvenir à éliminer totalement tous les types de discrimination raciale et ethnique, des efforts sont faits néanmoins pour sensibiliser les parents comme les enfants à l’importance de l’intégration des Roms. L’intégration scolaire fait partie de l’histoire de la Bosnie et, bien que la guerre ait changé l’attitude de certaines personnes, très peu de communautés se montrent hostiles à l’égard des enfants roms à l’école.

22. Au sujet des infractions de traite des enfants et de vente d’enfants, MmeDjuderija souligne que dans le droit interne, la traite des enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et la vente d’enfants aux fins d’adoption relèvent de la traite des personnes. L’infraction que constitue la traite des enfants, y compris la vente d’enfants, est punissable d’une peine privative de liberté d’une durée minimum de cinq ans.

23.Un système de collecte de données sur les cas de traite, dont l’élaboration a débuté en 2008, fonctionne depuis 2009. L’État met en œuvre une stratégie nationale de prévention de la violence contre les enfants, dans le cadre de laquelle des données sont recueillies dans tout le pays une fois par an en vue de la préparation d’un rapport national dressant un état des lieux de la violence contre les enfants, la traite des enfants, l’utilisation d’enfants à des fins de mendicité et la violence − notamment sexuelle − à l’égard des enfants.

24.MmeAidoo demande quand l’État compte effectuer un recensement national, sachant que le dernier remonte à 1991.

25.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) explique que les pouvoirs publics ont conscience de la nécessité de procéder à un recensement mais que la question de la méthode à privilégier pour la collecte des données fait l’objet de vifs désaccords politiques.

26.M. Rizvo (Bosnie-Herzégovine) dit qu’en 2003, le Conseil des ministres a adopté une décision sur la coordination des mesures de lutte contre la traite des personnes et a nommé un coordonnateur national chargé d’en assurer la mise en œuvre. D’autres ministères intervenant dans la lutte contre la traite des personnes ont été aussi invités à désigner un représentant chargé de travailler avec le coordonnateur national sur toutes les questions liées à la traite des personnes. Lesdits représentants et le coordonnateur national ont élaboré une stratégie et un plan d’action, qui ont été soumis au Conseil des ministres pour approbation. Le troisième plan d’action est actuellement en cours. Le coordonnateur national et les représentants nommés ont aussi pour mission de veiller à la conformité des activités des ministères dont ils relèvent et des ONG actives dans la lutte contre la traite avec les obligations contractées par la Bosnie-Herzégovine sur le plan international. Des progrès considérables ont été accomplis, car il n’y a pas eu de désaccord politique sur les mesures à prendre pour mettre fin à la traite des personnes, y compris la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

27.Une cellule spéciale chargée de la coordination des poursuites, des activités de police et des questions fiscales en Bosnie-Herzégovine a pour mission d’organiser et d’harmoniser le déroulement des enquêtes pénales dans toutes les affaires relatives à la traite des êtres humains. Toutes les actions entreprises par les pouvoirs publics pour combattre ce phénomène ont donné de bons résultats, reconnus en 2006 par la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants. La Bosnie-Herzégovine est le premier pays à avoir fait l’objet d’une visite et d’un rapport de la Rapporteuse spéciale.

28.M. Citarella dit que dans le Protocole facultatif, la vente d’enfants et la traite des enfants sont définies différemment. Tout en relevant que sa législation en matière de traite est satisfaisante, il demande si l’État partie envisagerait aussi de définir expressément la vente d’enfants dans son droit pénal.

29.MmeAidoo dit que le Comité a reçu des informations relatives à des cas de traite à l’intérieur du pays, faisant état de cas de vente d’enfants à des fins de travail forcé, notamment de mendicité et de travail domestique. Elle demande si les pouvoirs publics ont pris des mesures pour mener des enquêtes et enrayer ce phénomène.

30.MmeTaraba (Bosnie-Herzégovine) dit que l’application directe de la Convention dans les affaires de violence sexuelle contre des enfants est problématique parce que le droit interne établit une distinction entre les enfants de moins de 14 ans, ceux qui ont entre 14 et 16 ans et ceux qui ont entre 16 et 18 ans. Certaines dispositions de la législation de l’État partie ont été mises en conformité avec les prescriptions du Protocole facultatif. Par exemple, toute personne reconnue coupable de l’achat d’un enfant à des fins d’adoption, de transplantation d’organes ou d’exploitation est condamnée à une peine privative de liberté de cinq ans minimum. Par contre, le fait d’astreindre un enfant au travail forcé n’est pas une infraction pénale distincte dans le droit interne.

31.M. Kotrane (Rapporteur pour la Bosnie-Herzégovine − OPSC) dit que les définitions utilisées dans les lois de l’État partie diffèrent de celles du Protocole à la Convention, ce qui crée une confusion. Dans le Protocole, astreindre un enfant au travail forcé est assimilable à la vente d’enfants. Il demande instamment au Gouvernement d’incorporer dans le droit interne la terminologie employée dans le Protocole.

32.MmeJurić (Bosnie-Herzégovine) dit que la définition de la traite reconnue sur le plan international a été pleinement intégrée dans le droit interne et que des dispositions complémentaires ont été ajoutées concernant d’autres aspects de l’infraction, comme la falsification de passeports, le fait d’infliger des violences physiques ou psychologiques et la confiscation du produit de l’infraction.

33.Il y a toujours des différences entre les entités sur le plan législatif, bien que des progrès aient été accomplis pour uniformiser les lois. En août 2010, la Republika Srpska a modifié son Code pénal pour harmoniser les peines réprimant la traite des personnes avec celles prévues par la législation de la Fédération de Bosnie-Herzégovine; elle a en outre récemment modifié sa législation pour y inclure des dispositions sur la pornographie.

34.En ce qui concerne le système de justice pénale pour mineurs, la Republika Srpska a élaboré un projet de loi sur la protection et le traitement des jeunes dans les procédures pénales qui prendra effet en janvier 2011. En vertu de cette loi, les juges, les procureurs, les travailleurs sociaux et les agents de police recevront une formation spéciale leur permettant d’assister les mineurs dans les procès mettant en cause des adultes accusés d’infractions à leur encontre.

35.La Présidente souhaiterait savoir quelle législation protège les mineurs victimes de la vente d’enfants, de prostitution et de pornographie, les réponses écrites n’étant pas claires sur ce point.

36.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que les enfants victimes étaient auparavant assimilés à des enfants délaissés par leurs parents ou leurs tuteurs légaux et privés d’éducation. La définition des enfants livrés à eux-mêmes englobait les enfants nécessitant une prise en charge spéciale. Depuis, la loi a été modifiée et la définition des enfants victimes de la traite est conforme à celle du droit international: ces enfants ne sont plus assimilés à des enfants livrés à eux-mêmes.

37.La Présidente aimerait savoir quels mesures et traitements sont prévus pour garantir que ces enfants victimes bénéficient du soutien dont ils ont besoin en matière de réadaptation sociale et psychologique. Sont-ils traités comme des mineurs délinquants?

38.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que les enfants victimes d’infractions définies dans le Protocole ne reçoivent pas le même traitement que les mineurs délinquants. Des efforts sont actuellement faits en vue de persuader les services d’appliquer de nouvelles normes conformes au Protocole facultatif, pour que les enfants victimes de tous types de violence, et en particulier des infractions énoncées dans le Protocole, soient traités comme des victimes et non comme des enfants livrés à eux-mêmes.

39.MmeAidoo demande de quel soutien bénéficient les parents, les familles et les communautés dans l’accompagnement à la réinsertion des enfants victimes d’infractions prévues par le Protocole facultatif. Elle se félicite de la nouvelle loi de 2009 sur l’assurance maladie qui offre une couverture à tous les enfants de Bosnie-Herzégovine, y compris les enfants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif, mais aimerait savoir si l’État a émis des instructions réglementaires permettant aux services sociaux d’appliquer ces dispositions.

40.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que beaucoup a été fait en faveur des enfants victimes dans son pays, afin d’améliorer les normes professionnelles, de fournir des directives aux travailleurs sociaux et à la police et de mettre en œuvre des pratiques respectueuses de l’intérêt supérieur de l’enfant. Certains enfants n’étant pas prêts à rentrer dans leur famille, les communautés mettent sur pied des dispositifs complets de services pour leur faciliter la transition. Les centres de proximité pour les enfants victimes font un excellent travail mais il est souvent difficile de traiter avec des parents peu coopératifs qui n’assument pas leurs responsabilités ou avec ceux qui n’ont pas les moyens d’offrir à leurs enfants un environnement familial adapté.

41.MmeTaraba (Bosnie-Herzégovine) dit qu’en 2005, le Conseil de la Bosnie-Herzégovine pour l’enfance a organisé plusieurs ateliers à l’intention des enfants sur le thème de la Convention relative aux droits de l’enfant et son Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, ainsi qu’une conférence destinée aux ministres de l’éducation, à laquelle des enfants faisaient office d’observateurs des droits de l’homme. Étonnamment, beaucoup d’enfants avaient entendu parler de la Convention grâce à des projets parrainés par des organisations non gouvernementales mais, dans l’ensemble, la Convention était peu connue dans la plupart des écoles.

42.Diverses activités de sensibilisation ont été menées en vue de prévenir la violence à l’égard des enfants. En 2008, le Ministère des droits de l’homme et des réfugiés, conjointement avec l’ONG Save the Children (Norvège), a publié un livret illustré donnant aux enfants et aux enseignants des pistes de discussion sur le thème de la maltraitance des enfants, de la vente d’enfants et de la violence à l’égard des enfants à l’école et à la maison. Ce même ministère, cette fois avec le concours de Save the Children (Royaume-Uni), a mené une campagne en Bosnie-Herzégovine entre 2008 et 2010 visant à promouvoir les différences culturelles. Cette initiative a débouché sur un programme d’envergure nationale sur la prévention de la violence qui a été diffusé dans toutes les écoles et a fait intervenir les enseignants, les parents et les enfants, et a abouti à la publication de trois documents clefs destinés aux enfants de 6 à 9 ans, de 9 à 12 ans et de 12 à 14 ans.

43.Il est vrai que l’État n’effectue pas de recensement mais, en l’absence d’un ministère de la santé, de l’éducation et de la politique sociale à l’échelle de la Bosnie-Herzégovine, ces questions sont du ressort des ministères des entités chargés d’élaborer les législations. Le Ministère des affaires civiles de Bosnie-Herzégovine joue le rôle de coordonnateur mais n’assume pas de responsabilités. Toutefois, il est important de souligner que les ministères des entités ont adopté et approuvé les documents issus des conférences et des activités décrites plus haut. En outre, un groupe de pression militant pour la prévention de la traite des enfants a publié un livre et des directives sur la prévention de cette infraction à l’intention des élèves du primaire et du secondaire et des parents.

44.Un plan d’action révisé en faveur de l’éducation des enfants roms, adopté en juin 2010 et élaboré par des représentants de la population rom, des ministères des entités et des enseignants, garantira l’inscription de tous les enfants roms à l’école primaire obligatoire à compter de septembre 2010, permettant ainsi de les retirer de la rue et de les scolariser. Dans ce cadre, le Ministère des droits de l’homme et des réfugiés a organisé un stage de formation de deux jours sur l’intégration des Roms dans l’enseignement, dont la conclusion a été que les enfants roms n’étaient pas victimes de discrimination ou de comportements stéréotypés à l’école.

45.MmeMutevelić (Bosnie-Herzégovine) dit que le Code de procédure pénale ne contient pas de dispositions particulières à l’intention des plaignants victimes d’infractions visées par le Protocole facultatif et qu’il n’existe qu’une loi de protection des témoins, selon laquelle les témoins vulnérables bénéficient d’une procédure d’audition particulière. Le projet de loi sur les mineurs, en attente d’adoption par le Parlement, est prometteur et devrait permettre d’améliorer le déroulement des procédures pénales à l’encontre des mineurs délinquants et le traitement des enfants plaignants. Il définit 23 infractions concernant les enfants et les mineurs et une procédure régissant le traitement des mineurs victimes de ces infractions.

46.MmeAidoo, se référant à une affaire signalée par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, se dit préoccupée par les inégalités découlant des différences entre les entités en ce qui concerne le droit pénal, la manière dont sont jugées les affaires et les sanctions. Dans une affaire, les éléments de preuve présentés par l’enfant − utilisés par le procureur comme preuve principale de la violation de ses droits − avaient été rejetés, à la suite de quoi le présumé responsable avait été libéré. Elle aimerait savoir si de tels cas sont encore courants.

47.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit qu’il s’agissait en l’espèce d’un enfant handicapé et que, de ce fait, la validité en droit de sa déclaration avait été mise en cause, ce qui ne signifiait pas qu’on ait nié son statut de victime. Vu que l’enfant n’avait pas la capacité mentale de comprendre les circonstances de l’affaire, qu’il n’y avait pas de témoins et que les expertises médico-légales n’avaient pas été concluantes, il avait été impossible de prouver que des violences sexuelles avaient été commises. Elle assure toutefois au Comité que les dépositions d’enfants sont tout à fait recevables devant un tribunal.

48.MmeMutevelić (Bosnie-Herzégovine) dit que, conformément au Code de procédure pénale (art. 100, par. 5), les plaignants majeurs ou mineurs victimes d’infractions, telles que le viol ou d’autres formes de violence sexuelle, ne peuvent pas être interrogés sur ce qu’était leur vie sexuelle avant l’infraction. Les dépositions des victimes sont recueillies par des spécialistes de la police scientifique.

49.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que l’État procède actuellement à la mise en place d’une unité distincte au sein du Bureau du Procureur qui s’occupera des affaires concernant des enfants et qu’une formation spéciale sera dispensée aux juges et procureurs sur la manière de les traiter.

50.MmeAidoo demande si l’État partie tient compte du paragraphe 4 de l’article 9 du Protocole facultatif, qui dispose que tous les enfants victimes de la traite, de la pornographie et de la prostitution devraient avoir accès à des procédures leur permettant, sans discrimination, de réclamer réparation du préjudice subi aux personnes juridiquement responsables.

51.MmeMutevelić (Bosnie-Herzégovine) dit que le Code de procédure pénale prévoit l’indemnisation des victimes. Si les délais le permettent, le montant de l’indemnisation est décidé dans le cadre de la procédure pénale, sinon, l’affaire est confiée à une juridiction civile. Les affaires concernant des mineurs sont traitées en priorité.

52.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que des efforts sont fait en vue d’accélérer le traitement des demandes d’indemnisation.

53.MmeHorić (Bosnie-Herzégovine) dit que, conformément au Code pénal, la législation pénale interne est applicable en dehors du territoire national à toute personne qui a commis une infraction attentatoire à l’intégrité du pays. Le droit interne s’applique aussi aux Bosniaques qui ont commis des infractions en dehors du territoire national à l’encontre du pays ou de ses citoyens ainsi qu’aux étrangers qui ont commis des infractions en dehors du territoire national à l’encontre du pays ou de ses citoyens et qui sont ensuite entrés sur le territoire. Une loi relative à l’entraide judiciaire internationale en matière pénale adoptée en 2009 réglemente la procédure régissant ce type d’entraide et les critères et procédures en matière d’extradition. En l’absence d’accord bilatéral d’extradition, les instruments internationaux peuvent être invoqués. La Bosnie-Herzégovine a conclu des accords bilatéraux avec de nombreux États de la région, dont certains ont été modifiés en 2009 pour permettre l’ouverture d’enquêtes conjointes.

54.M.Rizvo (Bosnie-Herzégovine) dit que les actions de lutte contre la traite des êtres humains sont parfaitement coordonnées avec les efforts de lutte contre la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pédopornographie, ces infractions étant considérées comme les manifestations les plus graves de la traite des personnes.

55.La police coopère activement avec Interpol, Europol et d’autres organismes internationaux de coopération en matière policière. La police de Bosnie-Herzégovine joue un rôle clef dans l’action du Centre régional pour la lutte contre la criminalité transfrontière de l’Initiative de coopération pour l’Europe du Sud-Est, qui comporte une cellule spéciale sur la lutte contre la traite des personnes. La Bosnie-Herzégovine a également conclu des accords bilatéraux en matière de coopération policière avec tous les pays de l’Europe du Sud-Est, plusieurs pays de l’Union européenne, ainsi qu’avec d’autres États. Tous ces accords prévoient l’échange d’informations ainsi que la planification et l’exécution conjointes des enquêtes, notamment celles concernant les affaires de traite d’êtres humains.

56.Depuis 2007, les pouvoirs publics redoublent d’efforts en vue de protéger les enfants de l’exploitation et de la maltraitance et se servent à cette fin des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Le Plan d’action pour l’amélioration du dispositif de protection des enfants contre la pédopornographie et autres formes d’exploitation sexuelle et de sévices à l’aide des technologies de l’information et de la communication (2010-2012) est conforme aux dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant et de ses deux Protocoles facultatifs, de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et des protocoles s’y rapportant, de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains et de sa Convention sur la cybercriminalité. Avec le concours du secteur non gouvernemental, de grands progrès ont été faits pour harmoniser la législation pénale et renforcer la capacité des organes compétents en matière de protection des victimes et de prévention. Le pays a mis à disposition deux permanences téléphoniques aux fins de la lutte contre la traite des personnes: une dédiée à la lutte contre la pédopornographie et les abus sur l’Internet et un service d’assistance en ligne appelé «Safe Child» (Sécurité des enfants), à l’adresse www.sigurnodijete.ba, proposant une page pour les enfants et une pour les parents. En outre, les pouvoirs publics ont lancé une campagne visant à sensibiliser les enfants aux dangers de la pédopornographie, à laquelle a participé une vedette du hip-hop plébiscitée par le public.

57.MmeAidoo demande si tous les enfants de l’État partie ont accès à ces services téléphoniques.

58.M.Rizvo (Bosnie-Herzégovine) dit que toutes les permanences téléphoniques fonctionnent dans tout le pays.

59.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que le problème de la mendicité est traité en parallèle avec celui de la traite des personnes, vu que la plupart des enfants qui mendient y sont contraints par des groupes organisés. Des études ont montré que le fait de retirer les enfants mendiants des rues pour leur propre sécurité était inefficace, car ils étaient rapidement remplacés par d’autres et, une fois remis en liberté, se remettaient à mendier ailleurs. La nouvelle approche des autorités, qui en est encore à un stade expérimental, consiste à ne pas conduire de force les enfants qui mendient au poste de police, mais d’amener ceux qui le souhaitent dans un foyer, où ils peuvent choisir de demeurer. Le foyer les nourrit, leur donne accès à des installations sanitaires et leur offre la possibilité de participer à des activités récréatives. Des travailleurs sociaux professionnels essaient de recueillir des informations sur ce qui les a amenés à mendier dans la rue. Ce programme pilote a été mené à Sarajevo et Tuzla où il a rencontré un certain succès: plusieurs enfants ont été envoyés à l’école et leur famille a bénéficié d’une aide leur permettant d’offrir un foyer stable à leurs enfants.

60.La Présidente demande si les foyers sont publics et s’il y en a dans tout le pays.

61.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) explique que ces foyers sont actuellement gérés par les collectivités locales mais que l’État a l’intention de subventionner ce programme. Il est prévu d’ouvrir des centres similaires dans d’autres grandes villes, comme Banja Luka et Mostar.

62.MmeJurić (Bosnie-Herzégovine) dit qu’en 2009, le Conseil des ministres a nommé une commission chargée de contrôler la gestion des centres d’accueil pour enfants, dont les inspections n’ont révélé aucun cas de maltraitance.

63.M.Kotrane (Rapporteur pour la Bosnie-Herzégovine − OPSC) demande un complément d’information sur les cas signalés, les enquêtes, poursuites et condamnations pour les infractions de vente d’enfants, de prostitution d’enfants ou de pornographie mettant en scène des enfants visant des membres de la police et des employés de sociétés de sécurité privées.

64.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) dit que, même si la police et les autres forces de sécurité du pays ne sont pas à l’abri de la corruption, peu de cas graves ont été signalés ces dernières années. Selon les données dont elle dispose, rien de porte à croire que des policiers ou des agents de la fonction publique aient été impliqués d’une quelconque manière dans des affaires de maltraitance d’enfants depuis la restructuration de la police en 2005.

65.Les pouvoirs publics sont conscients que le risque de tourisme sexuel existe dans le pays; ils veillent à l’inspection des établissements fréquentés par des touristes et s’assurent que les hôtels et autres établissements appliquent des mesures de prévention. La loi interdit à toute personne de moins de 18 ans de quitter le territoire sans le consentement de ses parents ou tuteurs.

66.L’État a amorcé le processus de ratification de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Au cours des dix dernières années, seuls 20 enfants ont été adoptés en dehors de Bosnie-Herzégovine et toutes les familles concernées avaient des liens étroits avec les enfants adoptés ou avec le pays.

67.M.Kotrane (Rapporteur pour la Bosnie-Herzégovine − OPSC) dit que le dialogue qui s’est tenu durant l’après-midi dénote clairement la volonté politique de l’État partie de poursuivre la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Les plans d’action mis en œuvre en vue de prévenir la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants gagneraient à être renforcés et à être mieux coordonnés pour que les maigres ressources qui leur sont consacrées soient utilisées au mieux. M. Kotrane recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour harmoniser sa législation pénale avec les dispositions du Protocole facultatif, renforcer les capacités des différents acteurs sur le terrain, élargir les compétences des tribunaux afin qu’ils puissent connaître des infractions définies dans le Protocole facultatif et intensifier sa collaboration avec les organisations internationales comme le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et l’Organisation internationale du Travail (OIT).

68.MmeDjuderija (Bosnie-Herzégovine) accueille avec intérêt les suggestions du Comité et assure ses membres de la détermination du Gouvernement à améliorer la protection des droits des enfants dans tous le pays.

La séance est levée à 18 heures.