NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.109424 janvier 2006

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante et unième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1094e SÉANCE (Chambre B)

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 13 janvier 2006, à 15 heures

Président: Mme ALUOCH

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

Deuxième rapport périodique du Liechtenstein

La séance est ouverte à 15 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Liechtenstein (CRC/C/136/Add.2; liste des points à traiter (CRC/C/LIE/Q/2); réponses écrites de l’État partie (CRC/C/LIE/Q/2/Add.1))

1. Sur l’invitation du Président, la délégation liechtensteinoise reprend place à la table du Comité.

2.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que les réserves concernant la Convention relative aux droits de l’enfant font l’objet d’un examen régulier en vue de leur suppression, conformément au programme d’action de la Déclaration de Vienne. Le Liechtenstein a ainsi déjà retiré la réserve qu’il avait émise concernant le paragraphe 2 de l’article 10. Il envisage également de supprimer celle afférente à l’article 7 une fois qu’il aura ratifié les conventions internationales de 1954 et 1961 sur l’apatridie.

3.S’agissant des Conventions de l’OIT, le Gouvernement liechtensteinois a vérifié en 2000 auprès du Bureau juridique de l’OIT qu’il ne pouvait accéder auxdites Conventions que s’il devenait membre de l’Organisation.

4.M. WOLFINGER (Liechtenstein) explique qu’au Liechtenstein la scolarité obligatoire est gratuite, mais que les frais correspondant à l’achat des livres, des manuels et des fournitures scolaires sont à la charge des parents. Toutefois, même s’il ne s’agit pas là d’une règle, la plupart des municipalités fournissent gratuitement le matériel pédagogique au niveau du primaire et l’État prend à sa charge 25 % des coûts d’acquisition du matériel d’enseignement au niveau du secondaire. Une proposition visant à rendre le matériel pédagogique gratuit pendant toute la période de la scolarité obligatoire (de 6 à 16 ans) est actuellement à l’étude et devrait aboutir d’ici à deux ans.

5.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que la violence dans la famille et la délinquance juvénile ne semblent pas être plus répandues dans certains groupes ethniques. La délinquance juvénile n’a pas augmenté au Liechtenstein mais les statistiques sont trompeuses: en effet, étant donné la taille de la population, les chiffres sont très faibles et le nombre de personnes condamnées peut doubler ou tripler sans pour autant révéler une tendance de fond.

6.M. FILALI souhaiterait connaître les mesures prises par l’État partie pour enrayer les phénomènes récents de violence et de xénophobie, endiguer la montée de l’extrême droite et placer toutes les communautés sur un pied d’égalité.

7.M. WALCH (Liechtenstein) dit que le Gouvernement met l’accent sur la communication et qu’à la suite des attentats terroristes survenus aux États-Unis et en Europe, il a créé il y a deux ans, un groupe de travail chargé de l’intégration des musulmans. Des questions telles que l’exercice de la religion et le recrutement d’imams sont ainsi débattues avec toutes les parties concernées en vue de la recherche de solutions communes. Il est à préciser que les premiers immigrés musulmans, turcs pour la plupart, ne sont arrivés au Liechtenstein qu’en 1968 et que la communauté musulmane compte aujourd’hui quelque 1 200 personnes. À la demande de la communauté musulmane, le Gouvernement a accordé un permis de résidence permanent à un imam chargé d’enseigner l’islam aux enfants dans un cadre extrascolaire, à condition que ces cours soient en allemand, de façon à pouvoir surveiller le contenu de l’enseignement dispensé.

8.Mme KIND (Liechtenstein) dit que de nombreux événements et manifestations sont organisés dans le pays, en particulier dans les établissements scolaires, pour combattre le racisme et la discrimination raciale et que les efforts fournis portent actuellement leurs fruits (13 plaintes en 2003, 4 seulement en 2004). La Direction des affaires sociales et la Commission de lutte contre la violence travaillent de concert pour sensibiliser parents et enfants à ces questions et encourager la tolérance.

9.M. WOLFINGER (Liechtenstein) ajoute que les projets et programmes mis en place dans les écoles visent davantage à lutter contre les tensions et les conflits à caractère ethnique que contre les agressions racistes à proprement parler. La situation est donc loin d’être alarmante.

10.Il convient de préciser à cet égard que le pourcentage de jeunes étrangers, y compris de la deuxième et de la troisième génération, scolarisés dans les établissements d’enseignement liechtensteinois est certes très élevé, mais que la plupart sont originaires de pays voisins germanophones (Allemagne, Autriche, Suisse) et partagent donc la même culture. Les autres sont issus de l’immigration européenne des années 60-70 ou proviennent d’Europe du Sud-Est, principalement de Turquie. Des efforts intenses sont entrepris pour favoriser leur intégration, notamment linguistique.

11.M. WALCH (Liechtenstein) salue le rôle essentiel joué par les ONG et les associations de jeunes en matière de lutte contre l’exclusion, la xénophobie et la violence. Les clubs de sports présentent l’avantage de permettre aux jeunes de côtoyer des pairs de nationalité et de culture différentes, de casser les préjugés et de réduire ainsi le fossé d’incompréhension qui peut exister.

12.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que la scolarisation étant obligatoire au Liechtenstein, les établissements scolaires accueillent des élèves handicapés, mais que les autorités ne disposeront de statistiques exactes sur leur nombre que lorsque le handicap aura été clairement défini, ce qui devrait être le cas dans la loi sur le handicap qui devrait être promulguée dans l’année.

13.M. WOLFINGER (Liechtenstein) rappelle que les enfants handicapés peuvent soit fréquenter le «centre thérapeutique éducatif», qui accueille actuellement quelque 115 élèves, dont la moitié d’étrangers, soit être scolarisés dans le cadre du système d’enseignement intégré, où l’on dénombre une quarantaine d’enfants.

14.M. WENAWESER (Liechtenstein) explique que le Liechtenstein appartient aux États de tradition moniste, où le droit international fait directement partie de l’ordre juridique interne, pour autant que son niveau de spécificité soit suffisant. S’agissant de l’application de la Convention, des ajustements sont encore nécessaires et la loi sur la jeunesse en préparation devrait constituer une avancée à cet égard, notamment concernant le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. La liberté de religion est inscrite dans le Code civil, qui fixe l’âge minimum pour le choix d’une confession à 15 ans.

15.M. RANZONI (Liechtenstein) ajoute que la Convention peut, de manière générale, être invoquée directement devant les tribunaux liechtensteinois et que la législation nationale confère aux enfants les mêmes droits que ceux inscrits dans la Convention.

16.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit qu’au Liechtenstein, aucun mineur n’a à ce jour été condamné à une peine privative de liberté, mais qu’en pareil cas, faute de centre de détention spécialisé dans le pays, les jeunes délinquants seraient incarcérés en Autriche.

17.Divers moyens sont utilisés au Liechtenstein pour sensibiliser les enfants, les parents et les tuteurs légaux aux dispositions et principes de la Convention. Chaque année, le 20 novembre, à l’occasion de la Journée mondiale de l’enfance, le texte de la Convention est publié dans les journaux nationaux, une version électronique étant également disponible en anglais et en allemand sur Internet. Lors de l’édition 2004, des «bancs d’écoute», qui permettent de prendre note des intérêts, souhaits et préoccupations des enfants et de les soumettre aux services compétents ont été mis en place pour la deuxième fois dans tout le pays. La Direction des affaires sociales a en outre établi une brochure de vulgarisation de la Convention.

18.Enfin, il convient de noter que la prochaine loi sur la jeunesse imposera aux groupes professionnels, notamment au personnel médical, de participer plus activement à la mise en œuvre des politiques de l’État.

19.M. WALCH (Liechtenstein) dit que des allocations familiales sont versées tous les mois à tous les résidents concernés sans critère de nationalité ni conditions de ressources et même si l’enfant vit à l’étranger. Par contre, la prime de naissance, versée en une seule fois, est placée sous conditions de ressources et réservée aux femmes qui résident au Liechtenstein depuis trois ans ou dont le mari est résident depuis cinq ans.

20.Mme KIND (Liechtenstein) dit que les tribunaux interviennent uniquement lorsqu’un enfant est en danger en raison des difficultés de ses parents et qu’il est nécessaire de le confier à d’autres membres de la famille ou à un tuteur légal. Si les difficultés sont passagères et que la famille ou les proches peuvent apporter l’aide nécessaire, les tribunaux n’interviennent pas.

21.Les groupes d’accueil sociopédagogiques sont des foyers qui accueillent huit à dix enfants ou adolescents en difficulté avec leur famille. Pour éviter de rompre les liens familiaux, les parents participent régulièrement à des réunions du groupe d’accueil et les enfants rentrent chez eux une fois par mois. En général, cette interaction avec les parents permet une amélioration considérable des relations parents-enfants. En cas de placement sous tutelle, la loi prévoit que les services sociaux effectuent au moins une visite par an dans la famille ou le foyer d’accueil. Dans la pratique, les familles d’accueil, qui sont sélectionnées au terme d’une enquête approfondie, font l’objet d’un suivi régulier. En cas d’adoption, une période d’adaptation de deux ans est prévue pour mettre en place la relation parents-enfant, période à l’issue de laquelle le tribunal donne son accord pour l’adoption.

22.M. PARFITT demande si les enfants placés en Autriche ou en Suisse restent sous la responsabilité des autorités du Liechtenstein.

23.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que le Liechtenstein est toujours responsable de l’enfant juridiquement mais qu’il ne s’en occupe pas au quotidien, notamment en ce qui concerne les visites des parents, qui relèvent des autorités autrichiennes ou suisses.

24.Mme KIND (Liechtenstein) ajoute que la Direction des affaires sociales suit régulièrement et de très près les enfants envoyés à l’étranger afin de bien les connaître, car ces enfants ont vocation à revenir au Liechtenstein au bout de quelques années.

25.Mme SMITH demande si l’accord des parents biologiques est impératif pour pouvoir adopter un enfant.

26.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que le consentement écrit des parents biologiques est nécessaire pour une adoption, tout comme une déclaration de l’État d’origine si l’enfant vient de l’étranger.

27.Mme BAROUK-HASLER (Liechtenstein) dit que les mesures prises pour combattre les «drogues» légales comme l’alcool et les cigarettes dans le cadre de la politique de protection de la jeunesse partent du principe que les enfants qui boivent ou fument doivent être éduqués et non punis. Des campagnes de sensibilisation sont donc menées depuis 1998 pour convaincre les adultes de montrer l’exemple et la nouvelle loi sur la jeunesse interdit strictement la vente d’alcool aux mineurs.

28.M. WOLFINGER (Liechtenstein) dit que les écoles contribuent également à la prévention de l’alcoolisme par le biais de projets mis en place par les enseignants en collaboration avec des travailleurs sociaux.

29.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit qu’une nouvelle campagne de prévention de l’alcoolisme et du tabagisme, d’une durée de quatre ans, sera lancée en 2006. Elle mettra l’accent sur la sensibilisation de l’opinion et sur les mesures d’aide concrètes car au Liechtenstein comme ailleurs en Europe, l’alcoolisme et le tabagisme sont des problèmes plus graves que l’abus de drogues illégales. Une enquête sera menée en 2009 pour évaluer les résultats obtenus.

30.Mme KIND (Liechtenstein) dit que, dans le cadre de la politique de déjudiciarisation menée depuis 2000, la personne chargée du suivi sociopédagogique des jeunes travaille en collaboration avec le Parquet et la Direction des affaires sociales. Cette procédure est beaucoup plus rapide qu’une procédure judiciaire et donne d’excellents résultats, car elle permet de convoquer immédiatement le jeune pour examiner son comportement et en discuter avec lui. La loi sur les tribunaux pour mineurs doit être modifiée fin 2006 ou début 2007, de manière à inclure des mesures de substitution – qui existent déjà dans la pratique – permettant d’éviter la condamnation formelle et l’emprisonnement de l’auteur tout en protégeant les intérêts de la victime.

31.M. ZERMATTEN demande si la personne qui assure le suivi sociopédagogique peut être saisie par l’école, par les parents ou par l’intéressé lui-même.

32.Mme KIND (Liechtenstein) dit que lorsqu’un mineur commet une infraction, la police informe la personne chargée d’assurer le suivi sociopédagogique ainsi que le Parquet. La situation du jeune est examinée pour déterminer par exemple s’il est en danger, s’il a besoin de conseils, ou encore si ses parents ont besoin d’aide. Le Parquet reçoit ensuite un rapport sur l’enfant et décide des suites à donner.

33.M. WALCH (Liechtenstein) dit que l’assurance maladie est obligatoire au Liechtenstein et que si un résident étranger, y compris un mineur, n’est pas déjà couvert par une assurance de son pays, son employeur est tenu de lui en fournir une.

34.M. WOLFINGER (Liechtenstein) dit que la prévention des grossesses précoces fait partie des objectifs à long terme du Gouvernement. C’est pourquoi les questions relatives à la sexualité et à la prévention du VIH/sida font l’objet de débats au sein des établissements scolaires.

35.Mme KIND (Liechtenstein) précise que l’on ne recense en moyenne chaque année qu’un seul enfant né de mère mineure. Toutefois, pour éviter que le nombre de ces naissances ne se multiplie, des médecins spécialisés dispensent des conseils aux adolescentes les plus vulnérables, à savoir aux jeunes filles qui ne sont pas assidues dans leurs études, qui ont des problèmes financiers ou qui ont eu maille à partir avec la justice par le passé. À cet égard, le paragraphe 235 du rapport à l’examen est inexact: il existe bien une prise en charge psychologique − gratuite de surcroît − des adolescentes qui ont besoin de conseils.

36.Mme BAROUK-HASLER (Liechtenstein) dit que l’allaitement est encouragé par le personnel soignant des hôpitaux et que les compagnies d’assurance proposent des conditions avantageuses aux femmes qui allaitent au cours des 10 premiers mois de la vie de leur enfant.

37.Les enfants hyperactifs sont pris en charge par des pédiatres, qui ne sont en général pas favorables à la prescription systématique de médicaments et préfèrent adopter une approche au cas par cas après avoir rencontré les parents et le personnel de la crèche, qui connaît bien l’enfant.

38.M. WENAWESER (Liechtenstein), rappelant que personne au Liechtenstein n’est exclu de l’assurance maladie, dit qu’il fournira un complément d’information sur la question de la prise en charge des médicaments antirétroviraux, mais pense pouvoir assurer que ces médicaments sont remboursés au même titre que les autres.

39.M. ZERMATTEN demande si les mineurs placés en garde à vue partagent les cellules des adultes.

40.M. FILALI souhaiterait à ce sujet savoir combien de temps des mineurs peuvent être gardés à vue, s’ils peuvent recevoir la visite de leur famille, et dans quels délais ils doivent être présentés à la justice.

41.Il demande pourquoi la garde de l’enfant est systématiquement octroyée à la mère lorsque les parents ne sont pas mariés, ce qui prive les pères de leur responsabilité parentale.

42.La fourniture des manuels scolaires et des outils pédagogiques relevant, dans le primaire, de la compétence des municipalités et non de l’État, la délégation voudra bien préciser s’il existe des inégalités entre les régions et les communes dans ce domaine.

43.Enfin, un complément d’information sur le statut des minorités sexuelles dans l’État partie serait apprécié.

44.M. RANZONI (Liechtenstein) dit qu’en vertu de la loi sur la police, la durée maximale de la garde à vue est de deux jours. Il convient de noter qu’il n’y a eu aucune détention provisoire de mineurs au cours des cinq dernières années, et que le cas échant, les enfants sont systématiquement séparés des adultes.

45.M. WOLFINGER (Liechtenstein) dit que toutes les municipalités veillent à ce que les manuels scolaires soient distribués gratuitement à tous.

46.Mme KIND (Liechtenstein) dit que lorsque deux personnes vivant en concubinage ont un enfant, la garde de ce dernier est octroyée aux deux parents, mais que le père n’a aucun droit sur son enfant biologique s’il ne vit pas avec la mère de son enfant. Ce n’est pas le cas des pères divorcés, qui se voient octroyer la garde conjointe de leur enfant.

47.M. WENAWESER (Liechtenstein) dit que la discrimination est interdite au Liechtenstein pour quelque motif que ce soit, ce qui inclut la discrimination fondée sur les préférences sexuelles. Le Bureau de l’égalité des chances est expressément chargé, entre autres, de la question de la discrimination fondée sur les préférences sexuelles.

48.La PRÉSIDENTE demande s’il existe dans l’État partie des services de dépistage du VIH, ce qui éviterait aux personnes concernées de se rendre en Suisse ou en Autriche, pour obtenir ce type de services, comme cela semble être le cas actuellement.

49.M. WENAWESER (Liechtenstein), appuyé par Mme KIND, dit que, si les personnes concernées préfèrent la plupart du temps subir le test de dépistage du VIH/sida dans un des pays voisins, c’est uniquement que la taille réduite de l’État du Liechtenstein est peu propice à l’anonymat et à la confidentialité. Il existe un Bureau chargé des questions liées à la sexualité et au VIH/sida, qui emploie deux personnes et dont la tâche est de dispenser des conseils en la matière.

50.M. POLLAR se félicite de la qualité tant du rapport soumis par le Liechtenstein que de la présentation orale qu’en ont fait les membres de la délégation.

51.M. WENAWESER (Liechtenstein) remercie les membres du Comité pour l’attention qu’ils ont portée à l’examen du deuxième rapport périodique du Liechtenstein et les assure que toute l’attention voulue sera accordée aux observations finales, qui seront diffusées à l’échelle du pays.

La séance est levée à 16 h 40.

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