NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l’enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.733

4 février 2002

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Vingt-huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 733e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 2 octobre 2001, à 10 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial du Qatar

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 10 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial du Qatar [CRC/C/51/Add.5; CRC/Q/QAT/1 (liste des points à traiter); réponses écrites du Qatar (documents sans cote distribués en séance, en arabe et en anglais seulement)]

1.Sur l’invitation du Président, la délégation qatarienne, composée de Mme Sheikha Hessa bint Khalifa bin Hamad AL‑THANI, M. Sheikh Fahad Awaida AL‑THANI, M. Abdulla bin Nasser AL‑KHALIFA, M. Al‑Fateh ALRASHID, M. Saleh Badr ALSADA, M. Sheikh Khaled Jassim AL‑THANI, M. Abdulrahmane Ali ALOGAILI, M. Mohamed Ahmed ALJANAHI, M. Nawal Abdullah ALSHEIKH, M. Abdulhamid Ismail ALANSARI, Mme Nour Abdullah ALMALKI, Mme Sheikha Aliaa Ahmed AL‑THANI et de Mme Sheikha Haya Ahmed AL‑THANI, prend place à la table du Comité.

2.Mme Sheikha Hessa bint Khalifa bin Hamad AL‑THANI (Qatar) dit que malgré tous les efforts qu’il a déployés au cours de la décennie écoulée, le Gouvernement qatarien est conscient qu’il lui reste encore beaucoup à faire pour améliorer la situation des enfants dans le pays. En dépit des difficultés économiques auxquelles il doit faire face, le Gouvernement s’est refusé à réduire le montant des dépenses consacrées à la santé, à l’éducation et à la sécurité sociale. Le Qatar a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant en 1995 et en a publié le texte dans le Journal officiel. Les articles de la Convention ont été intégrés dans le droit interne. Un projet de loi sur l’enfance est en cours d’élaboration et, une fois promulgué, constituera le cadre juridique pour toutes les questions concernant les enfants, depuis la conception jusqu’à l’âge adulte.

3.S’agissant des institutions, le Gouvernement a créé le Conseil suprême des affaires familiales qui a pour mission de renforcer le rôle de la famille dans la société, de la protéger contre toutes les menaces et d’atteindre les buts fixés dans la Déclaration du Sommet mondial pour les enfants et dans la Convention relative aux droits de l’enfant.

4.Dans le domaine de la santé, l’État du Qatar dispense gratuitement à toutes les personnes des soins médicaux, curatifs et préventifs et a, au cours de la décennie écoulée, considérablement amélioré la qualité des soins de santé dispensés aux mères et aux enfants.

5.Le Gouvernement est parfaitement conscient qu’il importe d’améliorer l’enseignement en élaborant et actualisant les programmes d’étude, en accordant une attention particulière à l’enseignement préscolaire et à l’enseignement technique et professionnel et en améliorant les compétences des enseignants. Le Gouvernement s’efforce aussi d’appliquer le principe de l’égalité des chances pour toutes les personnes − hommes et femmes. À cet égard, la délégation qatarienne est heureuse d’informer le Comité que le 27 septembre 2001, l’Émir du Qatar a promulgué la loi no 25 qui rend l’école obligatoire et gratuite pour tous les enfants jusqu’à la fin du niveau préparatoire et qui prévoit une lourde amende pour les parents qui n’inscriraient pas leurs enfants à l’école. Le Gouvernement accorde une attention particulière aux enfants les plus vulnérables, notamment aux orphelins, qu’il confie à des familles de remplacement et dont il évalue les besoins et suit les progrès.

6.Conscient de la pénurie de données statistiques sur les femmes et les enfants, le Gouvernement a décidé de faire figurer sur la liste de ses priorités la création, dans un proche avenir, d’une base de données détaillées sur les femmes et les enfants.

7.Le Gouvernement a confié au Conseil suprême des affaires familiales le soin de procéder, en collaboration avec tous les organismes publics et toutes les organisations gouvernementales qui s’occupent de l’enfance, à une analyse détaillée des progrès réalisés dans l’amélioration de la situation des enfants au cours de la décennie écoulée. Une stratégie concernant l’enfance pour la prochaine décennie sera élaborée à la lumière des résultats de cette analyse. Par ailleurs, le Gouvernement élabore actuellement une stratégie visant à améliorer la situation de la femme dans la société qatarienne, en coopération avec l’UNIFEM et conformément aux priorités établies par le Plan d’action de Beijing.

8.Le Conseil suprême des affaires familiales a adopté, en octobre 2000, un plan national visant à diffuser la Convention relative aux droits de l’enfant et organisé récemment, sous le patronage d’éminentes personnalités, une campagne «Dire oui pour les enfants» qui a permis de recueillir 60 000 signatures dont celle de S. M. l’Émir.

9.S’agissant de la violence contre les enfants, le Gouvernement a créé un service d’assistance téléphonique appelé «L’ami des enfants» qui reçoit les appels et les plaintes d’enfants et de jeunes gens. Cette permanence téléphonique devrait permettre aux autorités compétentes d’évaluer l’ampleur du problème et de définir les moyens d’y remédier. Le Conseil suprême des affaires familiales met actuellement en place un centre pour les jeunes, en coopération avec les organismes publics concernés.

10.L’État du Qatar a ratifié la Convention 182 de l’OIT concernant les pires formes de travail des enfants et signera prochainement les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant respectivement l’implication d’enfants dans les conflits armés et la vente d’enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie impliquant des enfants.

11.M. AL-SHEDDI constate que le niveau élevé de la délégation et la récente adoption d’un décret rendant obligatoire et gratuit l’enseignement jusqu’à la fin du niveau élémentaire témoignent de l’intérêt que porte le Gouvernement qatarien aux droits de l’enfant. Si le rapport initial du Qatar a été rédigé conformément aux directives du Comité, on peut toutefois regretter qu’un certain nombre de questions n’y soient pas abordées, notamment l’âge légal minimum d’admission à l’emploi et l’âge légal du consentement au mariage. La délégation qatarienne pourrait également expliquer plus clairement comment l’enfant peut exercer son droit d’être entendu.

12.S’agissant de la réserve générale formulée par le Qatar au moment de la rectification, le Comité se félicite que dans ses réponses écrites, le Gouvernement indique être en train de l’examiner en vue de la modifier, voire de la retirer. Le Comité estime en effet que les dispositions de la Convention ne sont pas incompatibles avec le droit islamique.

13.Il serait par ailleurs utile d’avoir les renseignements supplémentaires sur la composition du Conseil suprême des affaires familiales, sur son mandat, sur le rôle qu’il joue dans la mise en œuvre de la Convention et sur le budget dont il dispose pour mener à bien ses activités. Enfin, il conviendrait que l’État partie prenne des mesures supplémentaires pour mieux faire connaître la Convention aux enfants. Par exemple, une petite brochure sur les droits de l’enfant devrait être remise à chaque écolier qui la garderait sur lui et pourrait s’y référer dans sa vie de tous les jours.

14.M. CITARELLA souhaiterait que la délégation précise quelles sont les dispositions de la Convention que le Qatar estime incompatibles avec le droit islamique et explique en quoi elles le sont. Il serait également intéressant de savoir si les dispositions de la Convention peuvent être invoquées devant les tribunaux, y compris les tribunaux chargés de veiller au respect de la charia. Enfin, il conviendrait de relever l’âge de la responsabilité pénale qui est actuellement fixé à 7 ans même si, ainsi qu’il est précisé dans le rapport, un mineur âgé de 7 à 18 ans ne peut être tenu pour pénalement responsable que s’il est jugé suffisamment mûr pour être conscient de la nature ou des conséquences de ses actes.

15.Mme CHUTIKUL demande comment sont coordonnées les activités menées par les différentes entités qui s’occupent de l’enfance, s’il existe un organisme chargé d’harmoniser le droit interne avec les dispositions de la Convention ou si c’est au Conseil suprême des affaires familiales qu’incombe cette tâche. La délégation pourrait indiquer quelles sont les relations entre le Conseil suprême des affaires familiales et les autorités locales en ce qui concerne les questions intéressant les enfants. Dans les réponses écrites, il est indiqué qu’aucun organisme particulier n’a encore été mis en place pour recevoir les plaintes faisant état de violations des droits de l’enfant. Dans le même paragraphe, il est précisé que quiconque viole les droits de l’enfant est passible de poursuites. N’y a-t-il pas une contradiction entre ces deux affirmations? De telles poursuites ont‑elles déjà été engagées?

16.Mme OUEDRAOGO regrette que le rapport de l’État partie n’ait pas été établi en suivant les directives du Comité, notamment au niveau des titres et des sous-chapitres. Elle constate par ailleurs un certain nombre de répétitions et de lacunes. Au sujet des mesures générales d’application, elle voudrait savoir ce qui a été effectivement entrepris pour que l’enfant puisse lui‑même exercer ses droits. Se félicitant des mesures déjà prises pour diffuser la Convention, elle demande s’il est prévu d’intégrer un enseignement relatif aux droits de l’enfant dans les programmes scolaires. Elle voudrait aussi savoir si l’État partie a cherché, dans le cadre de la diffusion du rapport, à recueillir les observations et les critiques des spécialistes et du grand public. Enfin, elle demande des précisions sur l’âge minimum légal du mariage et sur celui de la majorité pénale.

17.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ demande si le plan national évoqué au bas de la page 16 des réponses écrites est le même que le plan d’action national faisant suite au Sommet mondial pour les enfants et si ce dernier fait partie des activités touchant l’application de la Convention ou s’il s’agit d’un processus distinct. Elle fait observer à ce sujet que le plan d’action ne portait pas exactement sur les domaines visés par la Convention. Constatant que le rapport ne contient aucune information sur les principes généraux relatifs aux droits de l’enfant (intérêt supérieur et participation, notamment), elle demande quelles sont les dispositions de la Convention qui ne sont pas appliquées en raison de la réserve émise par l’État partie.

18.Le PRÉSIDENT, parlant en sa qualité d’expert, demande si le prochain plan d’action portera uniquement sur la santé et l’éducation ou si son champ d’application sera élargi aux droits civils et aux libertés, notamment. Il voudrait avoir des précisions sur le groupe de travail qui doit être mis en place avec l’UNICEF pour comparer les dispositions de la Convention et celles de la charia. Il aimerait aussi connaître la composition et les attributions des différents organes du Conseil suprême des affaires familiales. En particulier, il demande des explications sur l’origine et l’utilisation des ressources non budgétaires mises à la disposition du Conseil. Par ailleurs, il aimerait savoir quand sera promulgué le projet de loi relatif aux enfants. En outre, il recommande à l’État partie de veiller à ce que les données statistiques sur les enfants portent exclusivement sur les moins de 18 ans. Enfin, il demande des précisions sur la façon dont le Conseil suprême entend sensibiliser l’ensemble de la population à la notion de droits de l’enfant et à la nécessité de faire de celui‑ci un sujet de droit.

19.Mme CHUTIKUL, faisant référence à la stratégie pour les enfants mentionnée dans les réponses écrites, demande des précisions sur la place respective de l’évaluation approfondie de la situation des enfants et du plan d’action national dans les priorités du Conseil suprême.

La séance est suspendue à 11 h 5; elle reprend à 11 h 20.

20.Mme Hessa AL‑THANI (Qatar) dit que le Conseil suprême des affaires familiales comprend un conseil d’administration composé de représentants des ministères de la santé, de l’éducation et de la planification, des représentants d’ONG et d’hommes d’affaires, ainsi qu’un secrétariat général et un secrétariat technique consultatif composés d’experts de la famille, de la santé, de l’économie et de l’environnement. Il comprend également cinq comités (chargés des questions relatives aux femmes, aux jeunes, aux enfants, aux personnes âgées et aux handicapés) qui participent bénévolement à l’exécution des projets et aux campagnes de sensibilisation du public. Ces comités donnent des conseils concernant les projets à exécuter, organisent des séminaires et présentent des propositions en vue de modifier la législation, dont un projet de loi sur les personnes démunies qui a été examiné par le Conseil des ministres. En outre, le Conseil suprême travaille en coordination avec tous les autres mécanismes s’occupant des enfants.

21.M. ALOGAILI (Qatar) précise que les ressources extrabudgétaires sont constituées de divers dons et subventions et donnent la possibilité de financer des projets exécutés dans tout le pays, dont par exemple la création d’un centre de formation des agriculteurs. De façon générale, ces projets visent à améliorer le sort des familles, à satisfaire les besoins concernant la santé et à aider les handicapés et les personnes les plus démunies.

22.M. ALANSARI (Qatar) dit qu’alors que les tribunaux fixaient traditionnellement l’âge minimum du mariage à 14 et 18 ans (puis 16 et 18 ans) pour les filles et les garçons, respectivement, le Conseil suprême des affaires familiales a constitué un comité d’experts pour proposer un projet de loi fixant à 18 ans l’âge minimum légal du mariage. Saisi de ce texte, le Parlement ne s’est pas encore prononcé, mais il semble tout à fait favorable à une telle décision.

23.M. ALSADA (Qatar) dit qu’en vertu de la loi sur la délinquance juvénile, les enfants âgés de moins de 7 ans ne sont pas responsables de leurs actes. Entre 7 et 14 ans, ils sont jugés par les tribunaux pour mineurs. Les sanctions imposées vont de la simple réprimande au placement en maison d’éducation corrective, en passant par la mise sous surveillance judiciaire (l’enfant étant placé sous la supervision des services sociaux).

24.M. ALRASHID dit que l’État partie envisage de revoir les réserves qu’il a émises au sujet de certaines dispositions de la Convention susceptibles d’être en contradiction avec les préceptes de l’Islam. Il convient en tout état de cause de préciser que ces réserves ne concernent pas les objectifs fondamentaux de la Convention. S’agissant des réunions envisagées avec l’UNICEF, aucune disposition n’a encore été définitivement arrêtée.

25.M. AL KHALIFA (Qatar) dit que la législation qatarienne interdit le travail des enfants de moins de 15 ans et contient diverses dispositions réglementant les conditions d’emploi des enfants âgés de 15 à 18 ans afin qu’ils ne puissent être astreints à aucun travail risquant de nuire à leur santé physique ou morale.

26.Mme AL MALKI (Qatar) indique que le rapport présenté à l’UNICEF était un rapport de fin de décennie, qui dressait le bilan de la mise en œuvre du plan d’action adopté en 1990. Lors de l’élaboration de ce rapport, les autorités concernées ont pris conscience de la nécessité de réaliser une étude plus globale couvrant tous les aspects de la Convention. L’étude entreprise par le Conseil suprême des affaires familiales a précisément pour but de traiter de toutes les questions relatives à la promotion et à la protection des droits de l’enfant au Qatar en vue de l’élaboration d’une stratégie nationale pour l’enfance. Des groupes de travail seront chargés de planifier la mise en œuvre de cette stratégie, qui devrait commencer dès le début 2002.

27.Afin de pallier l’absence de coordination entre les mécanismes chargés au sein de chaque ministère de traiter des plaintes relatives à des violations des droits de l’enfant, le Conseil suprême a demandé la création d’un mécanisme centralisé. Dans un premier temps, il a mis en service une ligne spéciale d’assistance téléphonique aux enfants, qui devrait lui permettre de mieux connaître l’ensemble des violations commises à l’égard des enfants et d’affiner ainsi sa stratégie.

28.La diffusion de la Convention a été confiée au Conseil suprême des affaires familiales, qui a créé un comité chargé d’organiser des campagnes d’information et de sensibilisation avec l’appui des médias et de mesurer l’impact de ces activités. Le Ministère de l’éducation a naturellement joué un rôle clef auprès des enfants eux‑mêmes. La Convention a été publiée et diffusée en arabe et le sera prochainement en anglais. Une version simplifiée a été élaborée pour les enfants et une brochure spéciale a été distribuée à toutes les écoles préparatoires. Soucieux de renforcer les activités visant à atteindre les enfants eux‑mêmes, le Conseil suprême a constitué une équipe de chercheurs chargée de préparer la formation de formateurs, en collaboration avec l’UNICEF. Même si le bien‑être de l’enfant a toujours occupé une place essentielle dans la culture musulmane, la notion de droits de l’enfant proprement dite constitue en fait une notion nouvelle dans les pays arabes. Le Gouvernement qatarien a donc fait tout son possible pour introduire et consolider cette notion depuis la ratification de la Convention en 1995.

29.M. AL SHEIKH (Qatar) dit que les droits de l’enfant sont pris en compte dans tous les programmes scolaires. Des études ont été réalisées en vue de déterminer les meilleurs moyens de diffuser les principes consacrés par la Convention à l’école, et le Ministère de l’éducation a organisé des séminaires de formation à l’intention des enseignants. La liberté d’expression des enfants à l’école est, quant à elle, garantie par l’existence de conseils des élèves dans chaque établissement.

30.M. AL‑SHEDDI demande si la législation qatarienne contient des dispositions visant à interdire toute forme de discrimination. À cet égard, il s’interroge sur la situation des enfants de travailleurs immigrés, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, aux soins de santé et aux services sociaux. Il souhaiterait en outre savoir comment est perçu et appliqué le principe de l’égalité entre garçons et filles en matière d’éducation, en particulier en dehors de la capitale. Soulignant que les sanctions prévues en cas de non‑enregistrement d’une naissance ne semblent pas suffisamment dissuasives, il demande s’il existe un mécanisme permettant de garantir l’enregistrement effectif de toutes les naissances, notamment dans les zones rurales. Dispose‑t‑on de statistiques ventilées sur le nombre de naissances enregistrées par zone? La base de données sur les enfants qui devrait être créée prochainement couvrira‑t‑elle cette question?

31.Il serait par ailleurs utile de savoir quelles mesures ont été prises ou sont prévues en vue de promouvoir la liberté d’expression des enfants et quelle est l’approche adoptée par le Conseil suprême en la matière. Étant donné que le développement harmonieux de l’enfant doit être favorisé dès son plus jeune âge, bien avant le début de sa scolarité, comment les enfants sont‑ils encouragés à exprimer librement leur opinion non seulement à l’école mais aussi au sein de leur famille? La délégation pourrait‑elle apporter des précisions concernant le fonctionnement de la ligne téléphonique spéciale pour les enfants?

32.MmeCHUTIKUL souhaiterait savoir s’il existe au niveau municipal ou local des structures chargées des questions relatives aux droits de l’enfant. Notant que la loi sur la nationalité qatarienne stipule que toute personne née au Qatar ou à l’étranger d’un père qatarien a la nationalité qatarienne, elle demande quelle est la règle appliquée aux enfants nés de mère qatarienne. Elle s’interroge par ailleurs sur les taux de scolarité indiqués dans les tableaux figurant dans les réponses écrites. Il semblerait en effet que le nombre de filles inscrites dans les écoles élémentaires et secondaires soit supérieur à celui des garçons. Est‑ce réellement le cas et comment expliquer ces chiffres? Il semblerait également que certaines matières du niveau secondaire, comme le commerce ou la technologie, ne soient pas accessibles aux filles. Quelle en est la raison? L’enquête réalisée en vue de mettre au point la stratégie nationale pour les enfants pourrait constituer l’occasion d’examiner le système éducatif, notamment les programmes scolaires et les méthodes d’enseignement, sous l’angle de la parité entre les sexes.

33.Le PRÉSIDENT, relevant également un certain nombre d'incohérences dans les statistiques présentées, demande des éclaircissements sur les chiffres concernant la scolarisation des enfants dans les établissements privés: les garçons y sont‑ils effectivement plus nombreux que les filles et, le cas échéant, comment s’explique cette situation?

34.Mme OUEDRAOGO demande si des mesures vont être prises en vue de faire accepter le nouvel âge minimum du mariage − 18 ans pour tous − par la population. Elle souhaiterait par ailleurs savoir comment sont enregistrés les enfants nés hors mariage et les enfants de parents étrangers et quelle est l’instance chargée de statuer sur les litiges familiaux. Existe‑il un code de la famille? Des mesures concrètes sont‑elles prises en vue de mettre fin à la violence dans la famille et comment les filles sont‑elles protégées contre la violence sexuelle? Enfin, quels moyens sont utilisés pour sensibiliser les parents aux problèmes de la négligence et des mauvais traitements et quelles sont les dispositions prises lorsqu’un enfant est maltraité dans sa famille? La flagellation est‑elle encore pratiquée, notamment pour corriger les mineurs délinquants?

35.M. CITARELLA demande, vu la réserve générale formulée par l’État du Qatar à l’égard des dispositions de la Convention qui, selon lui, sont incompatibles avec les dispositions de la charia islamique, quelle est la réaction des enfants face aux dispositions d’un instrument international apparemment incompatibles avec la charia, notamment les articles 13 et 14 de la Convention sur la liberté d’expression, la liberté de pensée et de religion. La coexistence de principes contradictoires ne perturbe‑t‑elle pas le système de référence des enfants?

36.Dans le rapport, il est indiqué qu’aucun texte législatif n’autorise la discrimination au motif de la race, de la couleur, du sexe, de la langue, de la religion ou pour toute autre raison, mais dans les faits les hommes et les femmes ne sont pas traités sur un pied d’égalité. Ainsi, en matière de succession, les femmes ne peuvent prétendre qu’à la moitié de la part dont héritent les hommes; elles doivent en outre obtenir l’accord de leur représentant légal pour accomplir des actes aussi simples que de passer le permis de conduire. Les étrangers sont eux aussi victimes de discrimination, les immigrants ne bénéficiant pas de la gratuité de l’éducation, de la santé et des services sociaux dont jouissent les Qatariens. Dans quelle mesure les enfants d’immigrants peuvent‑ils bénéficier des prestations sociales et des services sociaux au même titre que les enfants qatariens, et de quel statut jouissent les enfants nés hors mariage?

37.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ se félicite que la Loi fondamentale reprenne le principe énoncé à l’article 3 de la Convention, à savoir que l’intérêt supérieur de l’enfant est une considération primordiale, et qu’elle dispose que l’État doit assurer le bien‑être de la génération montante. Elle salue en outre la volonté de l’État de créer des organismes chargés expressément d’assurer la protection des droits des enfants, sous l’égide du Conseil suprême des affaires familiales. En matière de garde d’enfants, comment le Qatar entend‑il veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant et le droit de ce dernier à être entendu soient respectés?

38.Mme OUEDRAOGO demande si la pratique des mariages consanguins est fréquente au Qatar et, dans l’affirmative, si des mesures sont prises pour la décourager compte tenu des dangers qu’elle représente pour l’enfant à naître.

39.Le PRÉSIDENT, prenant la parole en sa qualité d’expert, rappelle, en matière de garde d’enfants, que la charia dispose qu’en cas de séparation des parents, les enfants de moins de 7 ans sont confiés à leur mère tandis que, passé cet âge, les enfants sont placés sous l’autorité de leur père; cette règle stricte ne semble pas laisser beaucoup de place à l’opinion de l’enfant et il aimerait donc savoir ce qu’il en est dans la pratique.

40.Dans les réponses écrites, il est indiqué que sont considérés comme orphelins les enfants ayant perdu leurs deux parents ou leur père. Les enfants qui perdent leur mère ne sont‑ils pas considérés comme orphelins? Qu’advient‑il d’eux à la mort de leur mère? Mentionne‑t‑on les orphelins de père parce que la mort du père donne lieu au versement d’allocations familiales à la mère pour l’éducation de son enfant? Les enfants nés de «père inconnu» sont‑ils placés sous la garde de la mère ou confiés à la famille élargie? Leur mère peut‑elle prétendre à des allocations familiales? Quel est le statut des mères élevant seules leur enfant?

41.En matière de justice pour mineurs, le Code pénal semble s’appliquer aux enfants âgés de 16 ans ou plus et ils peuvent donc être condamnés à la peine capitale. Une telle peine a‑t‑elle déjà été prononcée contre des mineurs? Dans l’affirmative, a‑t‑elle été exécutée? Le Qatar entend‑il supprimer cette possibilité, autant en théorie qu’en pratique? Envisage‑t‑il également d’abolir la flagellation?

42.En vertu de la charia, les familles d’accueil doivent remplir un certain nombre de conditions, notamment avoir la nationalité qatarienne et résider de façon permanente au Qatar. Pour quelle raison les étrangers n’ont‑ils pas le droit d’accueillir des enfants − qatariens ou étrangers −, règle qui semble discriminatoire?

43.L’article 27 de la loi sur les mineurs habilite le tribunal pour mineurs à suspendre totalement ou partiellement la tutelle ou la garde octroyée par ordre d’une autorité compétente dans un certain nombre de cas; en pratique, les tribunaux recourent fréquemment à cette disposition. Qu’advient‑il de l’enfant une fois qu’il a été retiré de la garde de ses parents? Est‑il confié à la famille élargie ou placé en famille d’accueil? Étant donné qu’une mère qatarienne ne peut transmettre sa nationalité à son enfant, quelle nationalité l’enfant acquiert‑il s’il naît d’une mère qatarienne et d’un père apatride?

44.M. CITARELLA fait remarquer que, dans le tableau figurant à la page 14 des réponses écrites récapitulant le nombre d’enfants placés en détention et condamnés au cours des trois dernières années, la dernière classe d’âge concerne les 13-16 ans. Peut‑on en déduire qu’à partir de 17 ans, les mineurs ont le même statut que les adultes?

La séance est suspendue à 12 h 35; elle est reprise à 12 h 45.

45.M. AL‑KHALIFA (Qatar) indique qu’une permanence téléphonique a été mise en place pour recueillir les plaintes des enfants. Afin de toucher le plus grand nombre de personnes possible, les numéros d’accès ont été diffusés très largement par les médias. En collaboration avec le Ministère de l’intérieur, les enfants dont les plaintes sont justifiées sont orientés vers un médecin ou un pédopsychiatre. Les plaintes peuvent, le cas échéant, donner lieu à l’ouverture d’une procédure judiciaire.

46.M. ALTANAHI (Qatar) indique qu’un système d’enregistrement des naissances est en place au niveau de l’hôpital. S’agissant des enfants trouvés, qui sont souvent des enfants nés hors mariage, la loi no 16 de 1992 a modifié les dispositions de la loi antérieure sur l’enregistrement des naissances et des décès, et la nationalité qatarienne est désormais reconnue, ce qui leur donne accès aux même droits que les enfants nés de parents connus.

47.M. ALANSARI  (Qatar) indique que pour lutter contre le mariage précoce, notamment des filles, le Conseil suprême des affaires familiales a organisé un certain nombre d’activités, dont des ateliers et des colloques destinés à sensibiliser la population aux effets négatifs de cette pratique. Un sondage récemment effectué par la presse a cependant fait apparaître que 80 % des habitants seraient défavorables au maintien de cette pratique.

48.En matière de garde d’enfants, les filles de moins de 13 ans sont confiées à leur mère tandis que, dès l’âge de 11 ans, les garçons ont le choix de vivre avec l’un ou l’autre de leurs parents. Le Comité chargé d’harmoniser les procédures en la matière a suggéré que les enfants, filles ou garçons, soient confiés à la garde de leur mère jusqu’à 15 ans, âge au‑delà duquel c’est à eux qu’il appartiendrait de décider avec qui ils souhaitent vivre.

49.Le PRÉSIDENT, prenant la parole en sa qualité d’expert, demande ce qu’il adviendrait des jeunes filles enceintes de 16 ou 17 ans si toutefois l’âge du mariage était fixé à 18 ans, comme semble le souhaiter la majorité de la population. En cas de grossesse précoce donc, une dérogation serait‑elle accordée?

50.M. ALANSARI (Qatar) indique qu'en vertu de la législation en vigueur, le juge est habilité à faire une exception à la loi dans certains cas exceptionnels, et les grossesses précoces pourraient justifier l’octroi d’une dérogation.

51.Mme ALMALKI (Qatar) indique que les enfants nés hors mariage obtiennent la nationalité qatarienne, et qu’ils jouissent à ce titre des droits et avantages dont bénéficient les petits Qatariens dans le domaine de l’éducation, de la santé ou autres.

La séance est levée à 13 heures.

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