NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.13845 février 2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Cinquantième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1384e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 21 janvier 2009, à 10 heures

Présidente: Mme LEE

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique de la République démocratique du Congo sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la République démocratique du Congo sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant ((CRC/C/COD/2); liste des points à traiter (CRC/C/COD/Q/2); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/COD/Q/2/Add.1); réponses complémentaires de l’État partie à la liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance))

1. Sur l ’ invitation de la Présidente, la délégation de la République démocratique du Congo prend place à la table du Comité.

2.M. UPIO KAKURA (République démocratique du Congo) dit qu’en dépit du contexte politique et économique lié à la guerre récurrente dans l’est du pays et des violations massives des droits de l’homme qui en découlent inévitablement, le Gouvernement de la République démocratique du Congo a inscrit parmi ses priorités la promotion et la protection des droits fondamentaux et des libertés individuelles. La République démocratique du Congo s’est notamment dotée de la loi no 09/001 portant protection de l’enfant, qui réunit en un seul texte toutes les dispositions légales relatives à l’enfance élaborées dans le respect des normes internationales pertinentes.

3.Sur le plan législatif, la République démocratique du Congo a fourni, depuis la présentation de son rapport initial en 2001, un effort considérable pour ratifier la plupart des conventions internationales et régionales de protection des droits de l’enfant, tels que les deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, la Convention concernant l’âge minimal d’admission à l’emploi (no 138) et la Convention concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination (no 182) de l’OIT.

4.La définition de l’enfant a été inscrite à l’alinéa 1 de l’article 41 de la Constitution, qui dispose que «l’enfant mineur est toute personne, sans distinction de sexe, qui n’a pas encore atteint 18 ans révolus». Pour ce qui est des structures de promotion et de protection des droits de l’enfant, il convient de prendre note de la création, en 1998, du Conseil national de l’enfant, organe gouvernemental chargé de coordonner les activités de mise en œuvre de la Convention.

5.Les ressources budgétaires consacrées aux secteurs sociaux sont en constante augmentation depuis 2001. La part du budget national consacrée à l’éducation est notamment passée de 3 % en 2004 à 8,2 % en 2008, et le Gouvernement alloue directement une partie de ses ressources budgétaires aux principales organisations non gouvernementales d’aide à l’enfance.

6.La diffusion de la Convention et des principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tels que la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, se fait selon différentes modalités et par l’intermédiaire de supports variés. Le Gouvernement de la République démocratique du Congo observe en outre les principes généraux consacrés par la Convention, dont la non-discrimination et l’intérêt supérieur de l’enfant.

7.Pour ce qui est de l’enregistrement des naissances, le plan d’action national mis en place en 2004 a été intégré en 2008 dans un plan global de redynamisation de l’état civil, dont les résultats encourageants se font déjà sentir en termes de renforcement des capacités techniques et institutionnelles. On observe une augmentation constante du nombre de naissances déclarées dans la ville de Kinshasa.

8.Les droits liés à la vie, à la survie et au développement de l’enfant ainsi qu’à sa participation font également l’objet d’une attention particulière de la part du Gouvernement, dans le cadre de l’élaboration des politiques et programmes comme de l’adoption des mesures législatives, administratives et judiciaires.

9.Le Gouvernement de la République démocratique du Congo déplore que les efforts qu’il met en œuvre, avec l’appui de ses partenaires, aient été réduits à néant du fait de la résurgence de la guerre dans l’est du pays, guerre dont les premières victimes sont les enfants et les femmes. Ceux-ci constituent en effet la majorité des 950 000 personnes déplacées recensées dans les provinces orientale, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, où des milliers d’enfants sont recrutés par des bandes armées.

10.Le Gouvernement de la République démocratique du Congo ne ménage aucun effort pour mettre fin à cette situation et accroître le bien-être des enfants. Il met notamment en œuvre de nombreux programmes dans le domaine de la santé, et a entrepris de vastes chantiers pour améliorer l’infrastructure de base, l’accès à l’eau et à l’électricité, à l’éducation, entre autres.

11.Le Ministère des affaires sociales, solidarité et action humanitaire met en œuvre une stratégie nationale visant à protéger les groupes vulnérables, tels les enfants privés de leur environnement familial, dont les grands axes sont la prévention de la rupture des liens familiaux, l’assistance sur le terrain, la réunification et la réinsertion.

12.Pour ce qui est de la lutte contre les violences, les abus et l’exploitation sous toutes ses formes, il convient de noter que ce sont les enfants taxés de sorcellerie qui subissent les pires traitements. La République démocratique du Congo a donc inscrit dans sa Constitution la lutte contre les violences et la maltraitance, et adopté un plan d’action national pour la prévention des violences faites aux enfants, dont la mise en œuvre est coordonnée par le Ministère du genre, famille et enfant. Diverses lois prévoient en outre de lourdes sanctions contre les auteurs d’actes de ce type.

13.La politique nationale mise en œuvre pour assurer l’accès de tous les enfants à l’éducation et atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement repose sur plusieurs piliers, dont le principe de la gratuité de l’enseignement de base, l’inscription massive des enfants d’âge scolaire − notamment les filles −, la rénovation des écoles vétustes et la construction de nouvelles écoles.

14.Dans le cadre de la réforme de la justice, il est prévu de construire des tribunaux pour enfants, de rénover les établissements de garde et d’éducation de l’État et d’en construire de nouveaux, et enfin de former le personnel judiciaire, administratif et social.

15.MmeKHATTAB (Rapporteuse pour la République démocratique du Congo) se félicite que l’État partie fasse preuve d’un tel degré d’autocritique, et mette ainsi l’accent sur les principaux sujets de préoccupation qui seront soulevés dans le cadre de l’examen du deuxième rapport périodique de l’État partie. Après avoir salué l’adoption, le 10 janvier 2009, de la loi portant protection de l’enfant, elle appelle de ses vœux une plus grande volonté politique encore, de la part de l’État partie, à mettre en œuvre la Convention. Elle prend note des conditions particulièrement difficiles que connaît le pays depuis plusieurs années et de leurs conséquences sur le bien-être des enfants, et se félicite des efforts mis en œuvre par le Gouvernement de la République démocratique du Congo pour coopérer avec le Rwanda et l’Ouganda en vue de rétablir la paix dans l’est du pays faute de quoi l’État partie ne parviendra pas à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement.

16.Mme Khattab souhaiterait savoir si les enfants et les organisations non gouvernementales ont été consultés dans le cadre de l’élaboration du rapport à l’examen, si l’État partie aura la volonté de donner suite aux observations finales que le Comité formulera à l’issue de la session en cours et, dans l’affirmative, s’il sera en mesure de le faire. La question se pose en effet de savoir quelle attention est accordée aux questions relatives à l’enfance dans le contexte prévalant actuellement en République démocratique du Congo, si la Convention est connue de tous, si les enfants sont perçus comme des sujets de droit, et dans quelle mesure les combats détournent l’attention de ces questions et paralysent la fonction publique.

17.L’État partie devrait ratifier sans délai la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, la Convention sur le recouvrement des aliments à l’étranger, la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale ainsi que la Convention de La Haye concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants.

18.Mme Khattab voudrait savoir quelle part du montant total de l’aide internationale allouée à l’État partie par les donateurs internationaux, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, va aux politiques de l’enfance, et pourquoi les ressources consacrées à la protection de l’enfance sont généralement présentées comme étant un cadeau du Président, ou d’une œuvre de bienfaisance.

19.Relevant que le Conseil national de l’enfant (CNEN), qui est chargé de coordonner toutes les activités visant à mettre en œuvre la Convention, se compose de membres du Ministère du genre, famille et enfant, dont il tire en outre une partie de ses ressources, Mme Khattab émet des doutes quant à l’indépendance dont il jouit dans le cadre de la mise en œuvre de son mandat. Le Ministère du genre, famille et enfant étant manifestement l’organe réellement en charge de la politique de l’enfance, dispose‑t‑il de suffisamment de pouvoirs, et ses recommandations peuvent-elles être contraignantes et primer sur celles d’autres ministères en cas de désaccord quant à la politique à mener?

20.La délégation pourrait indiquer si le Centre national chargé du suivi du respect des droits de l’homme remplace l’Observatoire national des droits de l’homme et si le Gouvernement considère les ONG comme des partenaires. Sont-elles dotées d’un budget annuel qui leur permet de planifier leur action à l’avance, ou reçoivent-elles des fonds au cas par cas?

21.Pour ce qui est de la discrimination, Mme Khattab note avec préoccupation le sort réservé aux enfants accusés de sorcellerie, parfois même assassinés par leurs propres parents, et l’absence de politique gouvernementale destinée à rétablir les droits de ces enfants.

22.Le Comité apprécierait des informations supplémentaires sur les mesures prises par l’État partie pour mettre en œuvre la stratégie en faveur de l’éducation des petites filles, et souhaiterait savoir combien d’entre elles en ont déjà bénéficié.

23.Enfin, s’agissant des violences sexuelles faites aux petites filles et aux adolescentes, dont le nombre augmente de manière exponentielle en raison de la dégradation des conditions de sécurité dans l’est du pays, y compris dans les camps de personnes déplacées, il serait souhaitable que la délégation décrive les mesures éducatives prises par l’État partie pour faire évoluer les mentalités et pour faire appliquer la nouvelle loi portant interdiction des violences faites aux enfants. À cet égard, la délégation pourrait indiquer si des actions en justice ont été engagées en application de cette loi, et dans l’affirmative, quelle en a été l’issue.

24.M. FILALI (Rapporteur pour la République démocratique du Congo) reconnaît que les difficultés rencontrées par la République démocratique du Congo dans la reconstruction de l’État, dues en partie au manque d’infrastructures, ne facilitent pas le fonctionnement de l’administration à tous les niveaux. L’État partie a toutefois été en mesure de renforcer son cadre juridique relatif à la protection des droits de l’enfant et il serait utile de savoir quel est l’impact des nouveaux textes législatifs sur la situation des enfants. Par ailleurs, le fait que les lois nouvellement adoptées n’abrogent pas forcément les lois plus anciennes entraîne souvent un conflit de lois et les juges sont parfois confrontés à un dilemme quant à la loi applicable. Le problème se pose notamment en ce qui concerne l’âge de la responsabilité pénale, pour lequel les juges appliquent l’ordonnance-loi du 4 juillet 1978, qui dispose que sont mineurs au regard de la loi pénale les enfants âgés de moins de 16 ans au moment des faits. M. Filali demande comment l’État partie envisage de procéder pour que la définition de l’enfant mineur qui prévale soit celle énoncée dans la Constitution du 18 février 2006.

25.Il relève par ailleurs le manque de décrets d’application et parfois l’absence de publication au Journal officiel des textes de loi nouvellement adoptés, ce qui empêche les juges d’appliquer les nouvelles lois. Il souhaiterait aussi savoir ce que la loi portant protection de l’enfant, adoptée le 10 janvier 2009, apporte de nouveau, quels mécanismes vont être mis en place pour sa mise en œuvre et si un budget est prévu à cet effet. Il demande par ailleurs où en est le projet de loi relatif à la femme, à la famille et à l’enfance, pourquoi il n’a toujours pas été adopté et quand l’État partie entend le faire.

26.Il voudrait aussi connaître la cause de la diminution du pourcentage de naissances enregistrées entre 2001 (34 %) et 2007 (31 %), et les mesures que le Gouvernement entend prendre pour redresser la situation.

27.M. SIDDIQUI demande s’il existe un organisme national chargé des statistiques et, dans l’affirmative, quel est son rôle en matière de collecte des données concernant les enfants. Il voudrait aussi savoir si le Conseil national de l’enfant et les conseils provinciaux de l’enfant disposent des pouvoirs nécessaires, si leur personnel est correctement formé à la collecte de données concernant les enfants et si l’État partie a demandé à l’UNICEF de lui fournir une assistance pour organiser cette activité dans le pays.

28.M. Siddiqui note que, selon le rapport, la part du budget national de 2004 consacrée à l’éducation devait être de 10 % et qu’elle n’a finalement été que de 3 %. Il faudrait savoir quel pourcentage du budget national est alloué aux dépenses militaires, et si ces dépenses ont augmenté au fil des ans. La délégation pourrait en outre indiquer comment sont dépensées les allocations budgétaires destinées à l’éducation, la santé et la protection sociale dans les territoires contrôlés par les autorités de la République démocratique du Congo, si elles sont utilisées par les organismes publics locaux, par des ONG, par les autorités centrales ou bien en collaboration entre tous ces acteurs. Il demande enfin s’il existe un mécanisme permettant de suivre les dépenses publiques et d’évaluer leur effet sur la situation des enfants.

29.M. KOTRANE demande si l’État partie envisage de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Il voudrait aussi savoir si les instruments internationaux ratifiés par l’État partie priment le droit interne et s’il est arrivé que des juges invoquent des dispositions non seulement de la Convention relative aux droits de l’enfant, mais aussi d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’enfant, tels que des conventions de l’Organisation internationale du Travail.

30.Il demande quelles incidences la loi du 20 juillet 2006 sur la violence sexuelle, qui a étendu la protection contre le viol à tous les enfants de moins de 18 ans, peut avoir, comme l’affirme l’État partie au paragraphe 67 de son rapport périodique, sur l’interprétation de la disposition discriminatoire prévue à l’article 352, alinéa l du Code de la famille, qui fixe l’âge minimal du mariage à 18 ans pour les hommes et à 15 ans pour les femmes.

31.Notant que le nouveau Code du travail a relevé à 16 ans l’âge minimal d’admission à l’emploi, il demande jusqu’à quel âge la scolarité est obligatoire et souligne qu’il conviendrait de faire correspondre ces deux âges.

32.M. CITARELLA demande quel est le statut des enfants dont la naissance n’a pas été enregistrée, s’ils peuvent accéder à l’éducation et aux services de santé, et s’ils ne rencontrent pas d’autres difficultés liées au fait qu’ils n’ont pas de documents officiels prouvant leur nationalité. Cette question revêt une acuité particulière dans les zones encore touchées par des conflits dans l’est du pays, car un enfant non enregistré peut facilement y être la proie de trafiquants, être déplacé dans une autre région du pays et même disparaître.

33.Mme SMITH, notant les taux élevés de mortalité infantile et de malnutrition, ainsi que le grand nombre d’enfants soldats, d’enfants des rues et d’enfants déplacés dans leur propre pays, déplore que le droit à la vie ne soit pas garanti aux enfants de l’État partie. Elle demande s’il serait possible de sensibiliser davantage l’administration et les familles au fait que les intérêts des enfants devraient être pris en considération de manière prioritaire dans tous les domaines, et d’allouer plus de ressources au domaine social pour améliorer la situation des enfants.

34.M. POLLAR, relevant que la législation prévoit l’enregistrement gratuit des naissances, demande dans quelle mesure cette loi est appliquée et si les autorités sensibilisent les parents à l’importance de l’enregistrement des naissances. Enfin, il voudrait savoir comment l’État partie veille à ce que les fonctionnaires qui gèrent les registres des naissances et le Procureur général, qui signe les registres, exécutent correctement leur travail et soient correctement rémunérés. Il demande par ailleurs quelles sont les dispositions proscrivant et réprimant la torture dans la législation de l’État partie, et ce que font les autorités pour lutter contre les meurtres et les actes de tortures dont sont victimes les enfants des rues.

35.M. PURAS, notant que l’État partie mentionne dans son rapport l’existence de nombreux comités d’enfants, dont 1 comité national, 11 comités provinciaux et plus de 2 000 comités scolaires, dit que, selon certaines informations, ces comités auraient aujourd’hui perdu tout dynamisme et ne seraient plus actifs qu’à l’occasion de journées commémoratives ou de la fête nationale par exemple. Il voudrait savoir ce que l’État partie entend faire pour donner une nouvelle impulsion à ces comités.

36.Relevant que les enfants de l’État partie font souvent l’objet d’immixtions illégales ou arbitraires dans leur vie privée, M. Puras demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre en vue d’assurer aux enfants le droit à la protection de la loi contre de telles atteintes.

37.Enfin il voudrait savoir ce que fait l’État partie pour que les enfants et les adolescents aient accès à des informations utiles à leur développement tout en étant protégés contre celles diffusées, notamment par les médias, qui pourraient nuire à leur bien-être.

38.M. PARFITT, notant que le rapport de l’État partie et la liste des points à traiter ne comportent que peu de références à l’intérêt supérieur de l’enfant, demande à la délégation s’il lui serait possible de donner des exemples montrant que l’intérêt supérieur de l’enfant est pris en considération dans les décisions de justice. Il demande aussi comment le Cabinet des ministres veille à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit pris en compte lors de l’établissement du budget ou de l’élaboration de programmes concernant les enfants.

39.Selon certaines informations, l’activité de l’Observatoire national des droits de l’homme aurait fortement diminué au fil du temps et il serait aujourd’hui quasiment inactif. La délégation pourrait apporter des précisions à ce sujet et indiquer si l’Observatoire est conforme aux Principes de Paris et à l’Observation générale no 2 du Comité sur le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant et s’il jouit d’une réelle indépendance par rapport au Gouvernement. Enfin, elle pourrait préciser à quelle instance peut s’adresser un enfant congolais qui estime que ses droits ne sont pas respectés.

40.Mme AIDOO note avec satisfaction que le Gouvernement alloue des ressources aux ONG et demande quel pourcentage du budget de l’État représentent les 98 millions de francs congolais alloués en 2008 à une dizaine d’ONG nationales et selon quels critères sont sélectionnées les ONG qui reçoivent ce soutien financier. Enfin, elle voudrait savoir si l’État partie s’est doté d’une politique globale régissant la coopération et les relations du Gouvernement avec les ONG en matière de promotion et de mise en œuvre des droits de l’enfant.

41.Mme ORTIZ dit que les accusations de sorcellerie visant certains enfants semblent correspondre à une pratique courante et bien installée, qui viole non seulement le principe relatif à la non-discrimination, mais également ceux relatifs à l’intérêt supérieur de l’enfant, au droit à la vie, à la survie et au développement, et celui relatif à la participation. Elle demande quelles mesures ont été prises par les autorités congolaises pour lutter contre ce fléau.

42.Mme KHATTAB souligne que les allocations budgétaires, consacrées aux domaines qui intéressent les enfants sont très faibles. Un rapport de la Banque mondiale montre qu’en 2007 le Gouvernement, dans le domaine de la santé, a dépensé 80 cents par habitant, alors que ce montant devrait être d’au moins 7 dollars. Les dépenses d’éducation ont également baissé. On peut dès lors s’interroger sur la volonté politique du Gouvernement de s’attaquer aux problèmes qui touchent aux enfants. Il serait bon de savoir s’il existe un mécanisme permettant de suivre l’utilisation qui est faite des fonds reçus au titre de la coopération internationale.

43.M. FILALI voudrait savoir si le Code pénal comporte une définition de la torture.

44.La PRÉSIDENTE, soulignant que le rapport n’est pas conforme aux directives du Comité, demande comment il a été élaboré. Elle demande en outre si des mesures sont prises pour protéger les enfants pygmées, qui sont victimes de discriminations.

45.Mme KENGE NGOMBA TSHILOMBAYI (République démocratique du Congo) dit que le plan d’action élaboré par le Gouvernement pour lutter contre les violences sexuelles comprend un volet portant sur la lutte contre l’impunité et prévoit l’organisation de campagnes d’information et de vulgarisation juridique, l’objectif étant de faire connaître ses droits à la population et de l’inciter à dénoncer les infractions. L’accès à la justice a également été amélioré par la création de chambres foraines, lesquelles permettent aux juges de se déplacer dans les régions du pays dans lesquelles il n’y a pas de tribunaux.

46.Parmi les grands axes de l’action du Gouvernement dans le domaine de la justice figurent le recrutement de magistrats, dont le nombre est insuffisant, la mise en place de parquets spécialisés dans les questions de violence sexuelle, l’instauration de juges pour enfants, la féminisation du personnel judiciaire et le renforcement des capacités des magistrats en matière d’application des lois.

47.Un enfant victime d’une violation de ses droits peut saisir les organes juridictionnels, mais aussi, conformément au Code de protection de l’enfant, saisir certains organes gouvernementaux tels que le Ministère du genre, famille et enfant ou le Conseil de l’enfant.

48.Mme SMITH souhaiterait savoir s’il est prévu de remédier au problème de la faible rémunération des juges.

49.M. PARFITT se demande si le dépôt d’une plainte auprès du Ministère par l’enfant constitue une procédure officielle et donne systématiquement lieu à enquête.

50.Mme KENGE NGOMBA TSHILOMBAYI (République démocratique du Congo) dit que l’action du Gouvernement, notamment ses efforts de lutte contre la stigmatisation des victimes de violences sexuelles, a eu pour résultat que de nombreuses actions en justice ont été engagées, tant par les victimes elles-mêmes que par des ONG. En outre, le Gouvernement, pour remédier au problème de la lenteur de la justice, a instauré une procédure accélérée.

51.M. FILALI souhaite savoir si l’enfant, dans le cadre d’une procédure pénale, peut directement se constituer partie civile en vue d’obtenir un dédommagement et s’il doit, à cette fin, être assisté d’un parent ou d’un conseil, ou s’il incombe au procureur qui a engagé ladite procédure pénale d’engager une action civile.

52.Mme KHATTAB souligne que, si le nombre de plaintes déposées a augmenté, le nombre de cas faisant effectivement l’objet de poursuites judiciaires ne cesse de baisser, ce qui donne le sentiment que le système judiciaire n’est pas en mesure de rendre justice aux victimes d’infractions et de leur accorder réparation.

53.La PRÉSIDENTE demande si les enfants connaissent les voies de recours dont ils disposent. Il serait utile que la délégation décrive le déroulement de la procédure par laquelle un enfant peut déposer plainte.

54.Mme KENGE NGOMBA TSHILOMBAYI (République démocratique du Congo) explique qu’en droit congolais l’enfant mineur est représenté par ses parents. Les enfants victimes de violences sexuelles bénéficient, au titre de l’initiative conjointe de lutte contre les violences sexuelles, d’une prise en charge globale visant à répondre à leurs besoins tant sur le plan judiciaire que médical, psychologique et social. On ne peut affirmer que le système judiciaire ne réponde pas au problème de la violence, dans la mesure où le nombre d’actions en justice a augmenté. Il est vrai que le nombre de magistrats et de tribunaux dans le pays est insuffisant et qu’il convient d’y remédier. Le recours aux chambres foraines est une première solution.

55.M. UPIO KAKURA (République démocratique du Congo) dit que la rémunération des magistrats vient d’être augmentée. Le budget de l’État partie, en 2009, s’élève à 5 milliards de dollars, ce qui est très peu pour un pays comptant une population de 67 millions d’habitants mais constitue néanmoins une augmentation par rapport à 2008, où il était de 3 milliards de dollars. Le Gouvernement estime que, si la paix était restaurée, ce budget pourrait, en 2010 ou en 2011, atteindre 10 ou 15 milliards de dollars. Le pays serait alors en mesure de s’acquitter de ses obligations, notamment en matière de protection de l’enfant.

56.S’agissant de la part de l’aide internationale qui est consacrée à l’amélioration de la situation des enfants, M. Upio Kakura explique que la République démocratique du Congo est engagée dans un processus de réduction et d’annulation de sa dette et que, devant se soumettre aux conditions imposées par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, elle ne peut compter que sur ses propres ressources. Le pays est dans une situation de conflit, et une partie des ressources qui devraient être consacrées aux enfants sont affectées à la protection de la population civile dans les zones de conflit. Le Gouvernement a certes mis en place des mécanismes de protection des enfants dans ces zones mais son action, faute de moyens, n’a pas toute l’efficacité voulue. Pour ce qui est du contrôle des dépenses consacrées au domaine de l’enfance, celui-ci est assuré par la Cour des comptes et par l’Inspection des finances.

57.MmeKHATTAB souhaite savoir si le budget est établi annuellement, et s’il est en augmentation ou en diminution.

58.M. LUYELA LOYEL (République démocratique du Congo) indique que les ONG mentionnées dans le rapport figurent parmi les organisations dont les activités touchent à la protection et à la promotion des droits de l’enfant qui ont été recensées par le Ministère des affaires sociales et qui font l’objet de mesures spéciales d’appui. Ces mesures peuvent prendre trois formes. à savoir des subventions financées par le budget ordinaire de l’État, un appui dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale, et des exonérations accordées par l’État (notamment des facilités pour l’importation de biens servant à la prise en charge des enfants vulnérables). Les critères retenus pour la sélection des ONG bénéficiant d’un soutien de l’État sont notamment leur viabilité et leur efficacité sur le terrain.

59.La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à passer à la deuxième série de questions.

60.M. FILALI (Rapporteur pour la République démocratique du Congo) demande pourquoi des mineurs âgés de 16 à 18 ans sont encore poursuivis en application de la loi de juillet 1978. Il semble qu’il y ait une forme de résistance de certains magistrats, qui tiennent à appliquer cette loi plutôt que d’autres textes établissant l’âge de la responsabilité pénale à 18 ans. Par ailleurs, il constate que les procédures sont souvent très lentes, en raison de l’absence de personnel qualifié, et que cela porte préjudice aux mineurs. Il demande si des dispositions (visant notamment à la mise en place de mesures alternatives) ont été adoptées, ou sont en préparation, en vue de réduire le nombre de procédures impliquant des mineurs.

61.M. Filali déplore l’absence quasi totale de structures pour la détention temporaire des mineurs, ce qui fait que ceux-ci sont détenus dans les locaux de la police ou avec des adultes. En outre, les mineurs ne bénéficient pas de l’assistance d’un conseil juridique ni d’assistants sociaux durant leur détention. Il demande de plus amples renseignements à ce sujet.

62.Notant que les données statistiques établies par les différents organismes ne sont pas toujours cohérentes, il souhaite connaître les causes de ces divergences, parfois importantes.

63.Mme KHATTAB (Rapporteuse pour la République démocratique du Congo) demande si des mesures ont été prises pour prévenir les ingérences dans l’administration de la justice et les cas de corruption dans les affaires de violence contre des enfants ou de violence sexuelle, ces pratiques ayant conduit à une libération quasi systématique des auteurs présumés de ces infractions. Elle souhaite également savoir ce que le Gouvernement a entrepris pour remédier aux problèmes que posent la difficulté d’accès des victimes aux institutions juridiques, l’incitation à passer des accords en dehors des tribunaux, lesquels compromettent réellement les droits des victimes, et le manque de compétences et de moyens, en particulier dans le domaine des techniques d’enquête sur les affaires de violence sexuelle. Par ailleurs, elle demande pour quels motifs les témoins rechignent à s’exprimer devant les tribunaux.

64.Au cours de la période 2006‑2007, plus de 8 200 enfants victimes de violence sexuelle (sur 37 000 au total) ont reçu un appui de l’UNICEF, et les auteurs n’ont été poursuivis que lorsque des organismes bilatéraux ou multilatéraux ont pris en charge les coûts des procédures. Mme Khattab demande si le Gouvernement envisage de prendre en charge les coûts de ce type d’action juridique.

65.La Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour les enfants et les conflits armés, Mme Coomaraswamy, s’est rendue en République démocratique du Congo en 2007 et a formulé une série de recommandations sur la violence dans le cadre des conflits armés. Mme Khattab demande si le Gouvernement a pris des mesures en vue de donner suite à ces recommandations et pour veiller à ce que l’armée de la République du Congo ne commette pas de violations ou de sévices sur des enfants, tels que ceux qui ont été perpétrés en octobre 2008 à Goma. Elle demande si le Gouvernement a pris des mesures concernant les milices qui appuient les FARDC afin de s’assurer qu’elles ne continueront pas à recruter ou à tuer des enfants. Elle demande également si des poursuites ont déjà été engagées contre les auteurs de tels actes.

66.Notant que les enfants des rues sont placés en détention, souvent avec des adultes et dans des conditions sanitaires déplorables, Mme Khattab demande pour quels motifs ces enfants sont arrêtés, dans la mesure où, d’après les informations dont dispose le Comité, ils sont détenus de manière temporaire, puis libérés sans être poursuivis.

67.M. PARFITT souhaite obtenir des informations sur la nouvelle stratégie de réduction de la pauvreté et les programmes consacrés spécifiquement à l’amélioration des conditions de vie des enfants, notamment pour ce qui concerne les questions liées à l’eau et aux conditions sanitaires.

68.Des enfants sont encore enlevés à des fins de recrutement par des groupes armés, d’exploitation sexuelle ou de travail forcé. La délégation pourra peut-être fournir de plus amples renseignements à ce sujet et préciser s’il existe des pourparlers bilatéraux ou trilatéraux concernant les enlèvements et la traite. Elle pourra également indiquer s’il y a des preuves de la traite transfrontière d’enfants congolais, à quelles fins ces enfants sont utilisés et s’il existe des programmes visant à organiser leur rapatriement.

69.M. PURAS constate que, malgré les efforts accomplis dans ce domaine, les indicateurs relatifs à la santé des enfants restent très négatifs: 1 enfant sur 8 décède avant l’âge de 1 an, et 1 sur 5 avant 5 ans. Le taux de mortalité maternelle est l’un des plus élevés dans la région et dans le monde. Il demande quelles mesures ont été prises pour remédier à ce problème et pourquoi celles-ci ne semblent pas être efficaces.

70.Le VIH/sida est un grave problème de santé publique au Congo, principalement chez les adolescents, malgré le programme national pour la santé des adolescents, qui semble avoir peu d’impact sur le terrain. M. Puras demande ce que l’État partie fait pour améliorer la situation en matière de santé des adolescents en général, et plus particulièrement en ce qui concerne le VIH/sida.

71.On sait que lorsqu’un pays dispose de moyens financiers limités dans ce domaine, il est vital de mettre en place un système efficace de soins de santé primaires. Selon les informations dont dispose le Comité, seulement 31 % des enfants âgés de 13 à 25 mois sont vaccinés contre les maladies pouvant être prévenues par la vaccination; en outre, les conditions sanitaires et l’approvisionnement en eau potable restent insatisfaisants et se sont même parfois détériorés récemment. M. Puras demande comment le Gouvernement prévoit de faire face à cette situation inquiétante et quel type d’aide extérieure pourrait lui être apporté. Il souhaite également savoir si le Gouvernement prévoit de réviser la stratégie nationale de renforcement du système de santé ou d’élaborer une stratégie plus efficace. Par ailleurs, il demande quelles mesures ont été prises par le Gouvernement pour améliorer la situation des enfants handicapés.

72.M. KRAPPMANN constate que trop peu d’enfants sont scolarisés et que les infrastructures scolaires ne sont pas satisfaisantes. Il demande si le Gouvernement a élaboré un plan stratégique prévoyant des mesures et des crédits budgétaires, des objectifs et des systèmes de contrôle des résultats. Il souhaite également savoir si des mesures ont été prises pour garantir la sécurité des élèves, si des cours sur les droits de l’homme et les droits de l’enfant sont donnés dans les écoles, de quelle manière le Gouvernement encourage les initiatives privées visant à restaurer les infrastructures scolaires et à faciliter la scolarisation des enfants vulnérables, s’il y a suffisamment d’enseignants dans le pays, et s’il serait possible de recruter de nouveaux enseignants si un plus grand nombre d’enfants étaient scolarisés. Par ailleurs, il demande des renseignements complémentaires sur les politiques visant à intégrer les questions relatives à l’enseignement dans des programmes plus larges d’appui aux enfants, portant notamment sur l’alimentation et la santé, les loisirs et la culture.

73.Mme ORTIZ demande quelles sont les stratégies visant à conseiller et à aider les familles dans l’éducation des enfants. Elle souhaite également savoir s’il existe des structures d’appui au niveau communautaire, et qui est chargé de s’occuper des enfants en cas de négligence des parents.

74.En ce qui concerne la protection de remplacement, Mme Ortiz demande combien d’enfants vivent dans des institutions, quel est le nombre de ces institutions dans le pays, et quelle est la proportion d’institutions étatiques, privées et religieuses. Elle souhaite également avoir de plus amples renseignements sur les normes régissant ces institutions, sur la situation des enfants qui y vivent, et sur les moyens de contrôle dont disposent les autorités.

75.Mme Ortiz demande si la législation autorise désormais les adoptions internationales et, le cas échéant, quel est le nombre d’adoptions au niveau national et au niveau international. Elle souhaite également savoir s’il existe des adoptions traditionnelles, déterminées par des juges de paix ou par des chefs traditionnels, et si des mesures ont été prises pour que les droits de l’enfant soient pris en compte dans tous les types d’adoption. Enfin, elle demande si l’État partie a l’intention de ratifier la Convention de La Haye.

76.M. POLLAR demande s’il existe des programmes visant à apporter une assistance aux enfants réfugiés non accompagnés et aux enfants déplacés à l’intérieur du pays, et quelles sont les mesures visant à protéger ces enfants contre les menaces, l’extorsion, la discrimination et la violence sexuelle. Il note que les enfants réfugiés reçoivent une assistance matérielle du Haut‑Commissariat pour les réfugiés et sont scolarisés mais que les enfants déplacés à l’intérieur du pays sont laissés à l’abandon par les autorités publiques, et demande des précisions à ce sujet.

77.M. Pollar demande si des mesures ont été prises pour lutter contre l’exploitation des enfants, et plus particulièrement contre l’exploitation et les sévices sexuels qui ne sont pas liés aux conflits armés. Il souhaite également savoir ce qui a été fait pour faire évoluer les mentalités en ce qui concerne l’égalité entre les sexes. En outre, il demande quelles actions ont été menées en vue de la mise en œuvre effective du Plan d’action national de lutte contre la violence, en particulier la violence sexuelle.

La séance est levée à 13 heures.

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