NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. GÉNÉRALE

CRC/C/SR. 788 24 juillet 200 2

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trentième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 788 e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mardi 28 mai 2002, à 10 heures

Président  : M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES ( suite )

Deuxième rapport périodique de la Tunisie

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document , à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

EXAMEN DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) ( suite )

Deuxième rapport périodique de la Tunisie [CRC /C /83/Add.1; CRC/Q/TUN/2 (liste des points à traiter); CRC/C/RESP/4 (réponses écrites)]

La séance est ouverte à 10 h 10 .

1 . Sur l’invitation du Président, M.  Zouari, M.  Ben Salem, M.  Bouktaief, M.  Khemakhem et M.  Na j jar prennent place à la table du Comité.

2. M. ZOUARI (Tunisie) dit que l’engagement du G ouvernement tunisien en faveur de l’enfance constitue un des fondements stratégiques de sa politique de développement. La mise en œuvre du Programme national d’action pour la survie, la protection et le développement de l’enfant a permis des progrès considérables, notamment dans le domaine de la santé. Diverses réformes ont été entreprises dans les domaines de l’éducation, de la formation professionnelle, de l’animation culturelle et de l’information ; elles avaient notamment pour objectif d’améliorer la qualité de l’enseignement par l’élaboration de nouveaux programmes (mettant l’accent sur l’acquisition des compétences de base, l’apprentissage des langues étrangères et la maîtrise des technologies de l’information), la création de zones d’éducation prioritaire et la promotion de l’égalité entre garçons et filles à l’école. Des mesures ont également été prises en vue de garantir le maintien des enfants à l’école jusqu’à l’âge de 16 ans, ce qui a permis de lutter efficacement contre le travail des enfants.

3. L’action menée par le Gouvernement a commencé à porter ses fruits. Ces dernières années, la croissance démographique a ralenti et la situation économique des familles s’est améliorée. Il convient de signaler que la part des crédits alloués aux secteurs sociaux représente environ 50 % du budget de l’ É tat. Un f onds de solidarité nationale a été récemment institué et les institutions financières internationales l’ont approuvé . La Banque tunisienne de solidarité finance par ailleurs un certain nombre de petits projets en faveur des jeunes.

4. Diverses mesures juridiques ont été prises en vue de protéger et promouvoir les droits de l’enfant en Tunisie. Le système judiciaire a été modifié de façon à garantir un traitement adapté à l’enfant délinquant, avec la création de juridictions spécialisées. Le Code de la protection de l’enfant, promulgué en novembre 1995, concerne à la fois les enfants en difficulté et les enfants délinquants. Il privilégie le volet préventif et institue notamment une procédure de médiation visant à éviter la comparution des mineurs devant les tribunaux, ainsi qu’un système d’observation permettant d’éviter le placement des mineurs délinquants en  centre de redressement. L’adoption de ce Code s’est accompagnée de la mise en place de nombreuses structures aux niveaux national et local, parmi lesquelles le corps des délégués à la protection de l’enfance. Ce s délégués ont pour mission de veiller au bien−être et au respect de l’intégrité physique ou morale des enfants ; i ls peuvent informer les autorités compétentes de toute situation dangereuse pour l’enfant ou intervenir directement, notamment en qualité de médiateur. Afin de renforcer l’efficacité de ce système, un délégué général à la protection de l’enfance a été désigné et chargé de coordonner les activités de tous les délégués, tout en garantissant leur indépendance. L’ Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant a de plus été créé en février 2002.

5. La loi portant création d’un parlement des enfants , qui vient d’être adoptée , prévoit que la moitié au moins des membres de ce parlement s eront désignés en fonction de leurs résultats scolaires, les autres étant élus parmi les enfants participant aux conseils municipaux. L’élaboration de l’ordre du jour des sessions pourrait être confiée à l’Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant .

6. La Tunisie a adhéré aux deux protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant. Le Gouvernement a en outre pris diverses mesures en vue d’appliquer les observations finales du Comité

concernant le rapport initial de la Tunisie, notamment dans les domaines de la lutte contre la discrimination et de la protection des enfants contre l’exploitation économique. La Tunisie a ratifié les conventions 138 et 182 de l’ OIT concernant , respectivement , l’âge minimum d’admission à l’emploi et les pires formes de travail des enfants. Le Gouvernement établit un rapport annuel sur la situation des enfants en Tunisie, qui est examiné en Conseil des ministres. À l’occasion de la Journée de l’enfant, célébrée le 11 janvier, un prix du Président de la République pour les droits de l’enfant est décerné aux organismes et associations qui se sont distingués dans ce domaine.

7. M. BOUKTAIEF (Tunisie) explique que les secteurs de l’éducation et de la santé sont aujourd’hui organisés selon un système performant qui repose sur la mise en œuvre de programmes intégrés de prévention, de protection et de prise en charge et sur une législation conforme aux dispositions de la Convention.

8. Quant au système de protection sociale , d epuis l’adoption du Code de la protection de l’enfant, des mesures ont été prises en vue d’harmoniser la législation pertinente et de mieux coordonner les différents programmes menés en faveur des enfants en difficulté ou dans le besoin. L’objectif du Gouvernement est d’établir un système garantissant la prise en charge totale des enfants, à la fois dans la cellule de base que constitue la famille et au sein de la société, et permettant d’éviter la marginalisation des plus vulnérables d’entre eux (notamment l es orphelins, l es enfants nés hors mariage, l es handicapés et l es enfants sortis du système scolaire). Les mécanismes mis en place à cette fin se rattachent à la fois au système de protection sociale et au système de protection judiciaire. Tel est le cas de la fonction de délégué à la protection de l’enfance, qui constitue précisément un relais entre ces deux systèmes.

9. Le Gouvernement souhaite que tout enfant en danger ou victime de mauvais traitements puisse trouver assistance à tout moment auprès de n’importe quelle structure publique. C’est pourquoi il a mis sur pied des formations interdisciplinaires à l’intention notamment des travailleurs sociaux, des éducateurs, des policiers et des magistrats et s’efforce d’encourager la formation de réseaux entre ces différents acteurs au niveau local.

10. Le Code de la protection de l’enfant contient une nouvelle disposition – intitulée "devoir de signalement" – qui donne obligation à tous (professionnels et non professionnels) de signaler, directement au délégué ou à travers d’autres structures, les cas où des enfants sont en situation de danger. Le délégué, agissant en concertation avec le juge pour enfant ou de la famille qui lui accorde l’autorisation d’intervenir, évalue cette situation. S’il y a absence de danger, l’affaire est classée, sinon, en cas de risque véritable, le délégué prononce des mesures de protection, qui peuvent être des mesures d’urgence (séparation du milieu familial, prise en charge sociale et psychologique, suivi) ou des mesures conventionnelles négociées avec les parents (maintien de l’enfant dans sa famille, protection, orientation, etc.).

11. M. KHEMAKHEM (Tunisie) dit que différents mécanismes sont prévus en ce qui concerne le traitement des enfants en conflit avec la loi. D’une part, l’enfant de moins de 13 ans jouit de la présomption irréfragable d’innocence et les enfants de 13 à 18 ans d’une présomption simple en matière pénale. D’autre part, deux régimes distincts ont été instaurés pour les enfants de 13 à 15 ans, qui ne peuvent pas être placés en détention provisoire, et les enfants de 15 à 18 ans, auxquels le juge peut, dans un recours extrême , imposer une peine corporelle. Le Code prévoit également l’interdiction de porter l’action civile devant les juridictions pour enfant, la possibilité de correctionnaliser tous les crimes (sauf le meurtre), la possibilité pour le juge de prononcer la confusion d es peines applicables . Le juge pour enfant est assisté par des assesseurs, dont l’un est généralement spécialisé en psychologie et un autre en sociologie. La composition du tribunal pour enfant est différente selon que celui ‑ci siège en matière de contravention et de délit ou en matière de crime. En outre, le Code de la protection de l’enfant a été amendé en mai 1995 , lorsque le législateur a institué le double degré de juridiction en matière criminelle et décidé à cette occasion de retirer la déclaration N o  2 et la réserve N o  2 concernant la Convention.

12. Dans la détermination des sentences, les juges pour enfant privilégient, lorsque cela est possible, la remise de l’enfant à ses parents et les mesures de rééducation et de réinsertion sociale. Un nouveau régime de règlement des conflits a été établi, qui est celui de la médiation en tant que mécanisme favorisant la conciliation entre l’enfant auteur d’une infraction ou son représentant et la victime, son représentant ou ses ayants droit. Cette médiation a pour objectif d’arrêter les poursuites, le jugement ou l’exécution de la peine, en fonction de la phase pendant laquelle elle intervient. La possibilité qu’a le tribunal ou le juge pour enfant de réviser les sentences constitue une autre mesure de protection.

13. Un nouveau régime de la liberté surveillée a été instauré. Cette surveillance est assurée, en milieu ouvert, par des délégués, bénévoles ou rémunérés, nommés parmi les travailleurs sociaux et elle peut être une mesure provisoire prise par le juge pour enfant, une mesure complémentaire ou une mesure principale.

Mesures générales d’application et définition de l’enfant

14. M. AL ‑SHEDDI constate avec satisfaction que le rapport a été soumis dans les délais impartis et établi conformément aux directives du Comité. Une place importante y est accordée à l’harmonisation de la législation nationale avec la Convention. De nombreuses mesures ont été prises suite aux recommandations formulées par le Comité lors de son examen du rapport initial. L e Code de la protection de l’enfant englobe toute une série de textes et de services visant à assurer le bien ‑être des enfants. À ce sujet, d es précisions sur la sélection et les attributions des délégués à la protection de l’enfance seraient bienvenues. La nomination de juges pour enfant est également une mesure importante et très satisfaisante.

15. Le Comité se félicite de la ratification par l’État Partie des deux Protocoles facultatifs à la Convention ainsi que de la Convention N o  138 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui donne suite à sa recommandation tendant à porter à 16  ans l’âge minimum d’admission à l’emploi .

16. L e rapport et les réponses écrites ne permettent toutefois pas d’établir clairement quel est l’organe responsable de la coordination de la politique de l’enfance et il serait intéressant de savoir si un système indépendant de contrôle a été mis en place, qui s’occupe des questions de planification, comment la supervision des activités des délégués à la protection de l’enfance est assurée et qui présente les rapports d’évaluation . Enfin, il serait bon que la délégation apporte des précisions sur l’évolution des allocations budgétaires au secteur de l’éducation.

17. M me  SARDENBERG constate qu’aucune femme n’est présente dans la délégation et se demande pourquoi . Ell e souhaite connaître la place réservée aux droits de l’homme, et de l’enfant en particulier, dans la nouvelle constitution.

18. E lle note que très peu d’informations sont fournies sur la contribution de la société civile à la mise en  œuvre de la Convention et sur la façon dont les enfants perçoivent eux ‑mêmes leurs droits et leurs attentes. Il serait donc bon que la délégation explique comment l’État p artie entend, en appliquant une politique principalement axée sur la protection du bien ‑être des jeunes, donner à la notion de droits de l’enfant toute l’importance qui lui revient et faire évoluer les attitudes et les comportements pour faire en sorte que l’enfant soit effectivement considéré comme un sujet de droit. La délégation pourrait également apporter de plus amples informations sur l’élaboration et la teneur du rapport sur la situation des enfants présenté tous les ans en  Conseil des minist res , ainsi que sur les activités de suivi auxquelles il donne lieu .

19. M me  AL ‑THANI demande si le rapport annuel au Conseil des minist re s porte uniquement sur l’éducation et la santé des enfants ou si d’autres aspects de l’application de la Convention, dont les questions relatives au droit de l’enfant d’exprimer ses opinions , y sont abordés. Elle souhaite aussi en savoir plus sur les activités de l’ Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude

pour la protection des droits de l’enfant  : est ‑il habilité à recevoir les plaintes émanant d’enfants, prend ‑il systématiquement des mesures pour remédier à la situation, remplit ‑il les fonctions d’un médiateur et des membres du Gouvernement y siègent-ils ?

20. Il serait également utile de savoir si l’État p artie envisage de prendre des mesures pour renforcer la formation, jusqu’à présent insuffisante, des membres de la police et des forces armées et pour sensibiliser tous les personnels concernés à la nécessité de respecter les dispositions de la Convention.

21. En fin , elle aime rait avoir des précisions sur la nature des travaux, la composition et le statut de l’Organisation tunisienne des droits de l’homme et se demande en particulier s’il s’agissait au départ d’un organe gouvernemental . O ù en est le projet d e nouveau plan d’action national en faveur de l’enfance ?

22. M. CITARELLA demande si l’État p artie envisage de retirer le reste de ses déclarations et réserves concernant la Convention. Il voudrait savoir pourquoi le Code de la protection de l’enfan t , largement inspiré de la Convention, ne s’appelle pas "code des droits de l’enfant" et pourquoi la démarche suivie par la Tunisie dans ce domaine vise davantage à protéger l’enfant qu’à assurer le respect de ses droits et à promouvoir sa participation à la vie de la société en tant que sujet de droit.

23. En ce qui concerne la définition de l’enfant, il demande, d’une part, si l’État Partie envisage d’harmoniser entièrement l’âge minimum légal du mariage et, d’autre part, ce qui motive l’obligation pour les jeunes filles de plus de 17 ans d’obtenir l’autorisation de leurs parents pour se marier et jusqu’à quel âge cette disposition s’applique.

24. M me KARP demande si la Constitution tunisienne ne pourrait pas intégrer une composante "droits de l’homme" et si la Convention relative aux droits de l’enfant ne pourrait pas servir, d’un point de vue pratique, au renforcement du processus de démocratisation largement entamé dans le pays, étant donné qu’il semble difficile de garantir les droits civils et politiques des enfants dans une société non respectueuse des droits de l’homme. Elle se demande également comment un seul et même organe, à savoir le Conseil national de l’enfance, qui est d’ailleurs désormais présidé par le Premier ministre et dont certaines des attributions ont été redéfinies, peut à la fois assurer la coordination et le suivi de la réalisation des activités de mise en oeuvre de la Convention. Comment peut-il être chargé de l’application concrète de ses dispositions et avoir dans le même temps un regard extérieur et critique sur les mesures prises ?

25. Elle voudrait savoir dans quelle mesure les enfants sont impliqués dans le processus d’élaboration du rapport annuel sur la situation des enfants. Que pensent-ils de sa mise en application et ont-ils la possibilité de participer aux discussions y relatives puisque l’expérience montre que le point de vue des enfants en la matière est toujours des plus enrichissants.

26. Elle demande par ailleurs si l’Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant dont s’est récemment doté la Tunisie a reçu pour mandat de réaliser des études sur des sujets spécifiques, notamment sur la violence dans la société, et en particulier sur les thèmes encore considérés comme tabous que sont la violence au foyer, l'exploitation et les abus sexuels et les violences au sein de la famille, et si la Tunisie envisage de se doter d’un système de plainte auquel les enfants auraient accès sachant que le système instauré, qui repose sur les délégués à la protection de l’enfance et ne concerne que des cas très particuliers de victimisation ou de violation des droits de l’enfant, ne permet pas aux enfants de faire valoir directement leurs droits.

27. Il serait bon d’avoir un complément d’informations sur l’équilibre que la Tunisie a trouvé entre la focalisation du système de sécurité sociale sur certains secteurs, notamment les enfants en danger, et l’offre d’un système de sécurité sociale traditionnel pour les familles . La Tunisie ayant pour politique de

maintenir l’enfant dans son milieu familial, existe-t-il une structure sociale chargée de soutenir les familles, avant même que les problèmes ne se posent ?

28. S’agissant de la procédure de signalement, quelle est la place de la police dans la structure de défense des enfants ? Quand le système pénal intervient-il pour mener ses enquêtes sur les cas d’exploitation d’enfants et traduire les auteurs de ces crimes en justice ? Quel type de coopération existe ‑t ‑il entre les deux systèmes pour garantir tant l’efficacité du système de répression pénale que le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant ?

29. M me CHUTIKUL constate avec satisfaction qu e la Tunisie a atteint les objectifs fixés dans son Plan national d’action pour la survie, le développement et la protection de l’enfant, en  matière de santé notamment, mais aimerait savoir si le plan en question, arrivé à son terme en 2001, a été prolongé ? Des éclaircissements sur la coordination de l’action de s différents ministères dont relèvent les questions de l’enfance en Tunisie seraient également utiles. À ce sujet , qui assure la mise en oeuvre des politiques relatives aux droits de l’enfant ? Lequel du Conseil supérieur de l’enfance et du Conseil national de l’enfance fonctionne actuellement ? Quel est son mode d’action et comment est-il relié aux organes oeuvrant au niveau local ?

30. La Tunisie ayant jusqu’ici produit trois rapports annuels sur la situation des enfants, quelles mesures concrètes ont été prises ? S’agit-il de rapports purement descriptifs ou analytiques ? Qui décide dans le pays des nouvelles questions à traiter au titre des droits de l’enfant ? Quant aux ONG, quels sont le rôle et les fonctions de l’Association tunisienne des droits de l’enfant et quelles sont ses relations avec le Gouvernement ?

31. M me TIGERSTEDT-TÄHTELÄ estime encourageant que la part du budget affecté e aux secteurs de l’enfance, de l’éducation et de la santé ait augmenté en Tunisie entre 1999 et 2001 , mais souligne que ce n’est pas tant le montant des sommes consacrées à l’éducation ou à la santé qui importe que la qualité des services offerts.

Quant au financement du budget, elle souhaiterait savoir comment a été élaboré le nouveau système d ’imposition mis en place. Existe-t-il dans le pays une délocalisation des pouvoirs, notamment en matière d’éducation et de santé, et dans l’affirmative, comment cette décentralisation fonctionne-t-elle ? Enfin, la Tunisie compte-t-elle suffisamment d’établissements d’enseignement technique pour assurer son développement et satisfaire aux besoins de son industrie ?

32. Le PR É SIDENT , intervenant en  sa qualité d ’expert, souhaite connaître les raisons de la réduction des dépenses consacrées à la santé ces dernières années. Faut-il y voir un recul de la part des ressources allant aux enfants ?

33. M me OUEDRAOGO félicite le Gouvernement des progrès accomplis depuis la présentation du rapport initial, tout en faisant remarquer que certains domaines méritent encore davantage d’attention et en  jugeant surprenante l’absence de femmes dans la délégation tunisienne . Elle constate avec satisfaction que le Gouvernement a retiré certaines des réserves et déclarations qu’il avait formulées.

34. Elle demande q ui assure le contrôle et le suivi de la mise en œuvre de la Convention en  Tunisie  – l’Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant , comme semblent l’indiquer les réponses écrites, ou le Conseil national de l’enfance – , si l Observatoire est indépendant ou est rattaché à une autre structure et q uels ont été les progrès accomplis en termes de personnel et de budget depuis l’adoption du décret qui l’a institué . Est-il prévu qu’il travaille en partenariat avec les délégués à la protection de l’enfance dans certaines situations ?

35. S’agissant du p arlement des enfants, il n’apparaît pas clairement dans le rapport la manière dont le pouvoir législatif pourrait prendre en compte ses délibérations. Pourquoi par ailleurs ne pas porter de 16 à 18  ans la limite d’âge de ses membres ? T outes les catégories sociales d’enfants  seront-elles représentées dans ce parlement  ?

36. Elle aimerait savoir dans quelle mesure les ONG ont participé à l’élaboration du rapport et si leurs critiques et observations ont été prises en compte ? Au stade de la diffusion du rapport, y a-t-il eu des discussions ou des tables rondes organisées sur le sujet ? Quelle considération a pu être donnée aux critiques et observations recueillies ?

37. Au niveau des mécanismes mis en place par le Code de la protection de l’enfant, quelles sont les mesures d’application du devoir de signalement ? Comment la Tunisie parvient-elle à sensibiliser la population et les enfants au changement d’attitude radical qu’implique la nécessité de procéder à ce signalement ?

38. M me KHATTAB constate qu’en dépit de ses ressources limitées, la Tunisie est devenue une référence en matière d ’action en faveur de l’enfance . E lle se demande si la délégation tunisienne envisage d’inviter le Président du Comité des droits de l’enfant à la conférence des États arabes convoquée en octobre à Tunis pour élaborer un p lan d’action régional destiné à assurer le suivi de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants . Un séminaire ayant déjà été organisé par l’Institut tunisien des droits de l’homme au sujet des obstacles rencontrés dans la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant, la Tunisie ne pourrait-elle pas prendre en considération les propositions de cet Institut  ?

39. Dans le rapport, il est fait référence à la nécessité de demander le consentement du tuteur légal pour le prélèvement d’organes sur un mineur ou un incapable en vue d’une greffe. La Tunisie a-t-elle pris des mesures pour éviter tout abus dans ce domaine  ? Elle aimerait également connaître la gravité du problème posé par la possibilité de prodiguer des soins à un enfant sans consentement légal et la façon dont ce problème est traité .

40. Elle constate avec satisfaction que l’âge minimum du mariage est fixé à 17  ans pour les filles , ce qui devrait encourager l’éducation de la femme , et s’attend à ce que cet âge limite soit à nouveau relevé.

Enfin, M me Khattab félicite la Tunisie pour l’intérêt qu’elle porte à la protection de l’environnement en tant qu’élément vital de l’enseignement et de l’éducation.

La séance est suspendue à 12 h 00 ; elle reprend à 12 h 20.

41. M.  ZOUARI (Tunisie) dit qu’ il ne faut pas déduire de l’absence de femmes dans la délégation tunisienne que les femmes n'ont aucun poids au sein de la société; au contraire, puisqu’elles comptent pour 20 % des effectifs des conseils municipaux, 12 % des parlementaires et sont également représentées au sein des ministères (6 d'entre elles sont ministres).

42. La réforme de la Constitution tunisienne soumise au peuple tunisien par référendum le 26 mai 2002 a été approuvée avec un score massif de 99,52 % ; e lle prévoit entre autres dispositions d'inscrire les droits de l'homme dans le texte de la Constitution, ce qui par voie de conséquence devrait permettre d'accorder davantage d'attention au respect des droits de l'enfant et à la Convention relative aux droits de l'enfant.

43. Le Conseil supérieur de l’enfance , créé en 1990 au sein du Ministère de la jeunesse et de l’enfance, est devenu, en vertu du décret du 6 mars 1995, le Conseil national de l’enfance relevant directement du Premier Ministre. Il a pour objectif d’assister le Ministre de la jeunesse, de l’enfance et des sports dans l’élaboration de la politique générale du Gouvernement dans le domaine des droits de l'enfant. Prennent part aux réunions du Conseil national les parties concernées – ONG, associations, ministères de la santé, de l'éducation, entre autres – en fonction de l'ordre du jour. Le Conseil national se réunit chaque année en janvier pour rédiger un rapport qui dresse le bilan des activités entreprises au cours de l'année écoulée et pour mettre au point le plan d'action national pour l'année à venir.

44. Plusieurs mesures ont été prises dans le domaine de la défense des droits de l'enfant, dont : la création d u corps des d él é gués à la protection de l'enfance, la création de l'Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant et la promulgation du Code de la protection de l'enfant . Le Gouvernement a en  outre institué le poste de médiateur des enfants, dont le titulaire relève du Minist ère de la jeunesse, de l'enfance et des sports, et est en relation constante avec les autorités locales (préfets, maires) et les juges. Enfin, la Tunisie s'est dotée en février 2002 d'un p arlement des enfants, qui permet aux enfants de se faire entendre et de participer au processus législatif puisqu'on leur demande de donner leur avis sur les projets de loi relatifs à l'enfance. Le suivi des décisions prises par les jeunes parlementaires est confié à l'Observatoire d’information, de formation, de documentation et d’étude pour la protection des droits de l’enfant .

45. Le Gouvernement tunisien a mené une grande campagne médiatique pour sensibiliser la population aux principes consacrés dans la Convention et a inscrit au programme d'éducation civique l'étude de la Convention et du Code de la protection de l'enfant. U ne ligne téléphonique d'urgence a en  outre été mise en place afin que les enfants estim a nt que leurs droits ont été bafoués puissent être entendus et orientés vers les services compétents. Cette initiative a porté ses fruits puisque le nombre de plaintes reçues s'élève aujourd'hui à 10 000.

46. Le Gouvernement tunisien est heureux d’accueillir à Tunis en  octobre 2002 la conférence des États arabes convoquée dans le cadre du suivi des décisions de la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants . Ce tte conférence sera l'occasion pour les pays participants de mettre en commun leur expérience en matière de politique de l'enfance et de jeter les bases d'un plan d'action régional en la matière.

47. L a stabilité sociale qui caractérise la Tunisie d'aujourd'hui a beaucoup à voir avec la gratuité des soins de santé et de l'éducation , le Gouvernement allou ant chaque année 20 % du budget national à ces deux secteurs.

La Tunisie a mis en place une politique de décentralisation en vertu de laquelle elle a confié aux autorités locales une partie des plans et programmes sociaux, lesquels sont planifiés et financés par le Gouvernement mais mis en œuvre au niveau local par les districts et les municipalités. Tous les deux ans et demi, le Gouvernement organise au niveau des districts une vaste consultation des enfants et des adolescents qui couvre tous les domaines les concernant.

48. M me KHATTAB demande s'il existe des statistiques sur le travail des enfants du groupe d'âge 14-16 ans.

49. M. ZOUARI (Tunisie) souligne que l'école est obligatoire jusqu'à 16 ans et que le taux de scolarisation est de 99 , 1 %. Les enfants dont le niveau est in suffisant pour poursuivre des études dans le système traditionnel sont orientés vers des filières spécialisées où ils reçoivent une formation professionnelle. S'il est difficile d'éradiquer totalement le travail des enfants, on peut le combattre et l'un des meilleurs moyens en la matière consiste à lutter contre la pauvreté et à créer des emplois pour les adultes.

50. De très nombreuses ONG oeuvrent à la défense des droits de l'homme en  Tunisie et beaucoup ont conclu avec le Gouvernement un accord de partenariat, en vertu duquel elles collaborent avec le Conseil national de l’enfance en lui fournissant des données factuelles. L'on peut également citer l'Institut arabe des droits de l'homme qui organise des réunions et autres séminaires sur tous les sujets qui concernent les enfants. Le 23 avril de c haque année est célébrée la Journée nationale des associations et des organisations, à l’occasion de laquelle le Gouvernement rencontre toutes les parties concernées dans le cadre d'une réflexion sur les orientations futures à adopter en matière de politique de l'enfance. Se félicitant de l'aide précieuse fournie par les ONG et autres organisations, tant sur le plan de l'élaboration et de la mise en œuvre des divers programmes que de la collecte de fonds, il souligne à quel point il est souhaitable que cette collaboration s'intensifie.

La séance est levée à 13 heures.