Nations Unies

CRC/C/SR.1715

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

18 juin 2012

Original: français

Comité des droits de l ’ enfant

Soixantième session

Compte rendu analytique de la 1715 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le vendredi 8 juin 2012, à 15 heures

Président: M. Zermatten

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de l ’ Algérie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

T roisième et quatrième rapports périodiques de l ’ Algérie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant(CRC/C/DZA/3-4; CRC/C/DZA/Q/3-4; CRC/C/DZA/Q/3-4/Add.1) (s uite)

1.Sur l ’ invitation du Président, la délégation algérienne reprend place à la table du Comité.

2.M. Madi, considérant que le Code du travail de l’Algérie, qui établit à 16 ans l’âge minimum d’admission à l’emploi et interdit aux mineurs d’effectuer des travaux dangereux, est progressiste, déplore cependant que les notions de mineur et de travail dangereux n’y soient pas expressément définies. Il fait remarquer que le Ministère du travail, de la sécurité sociale et de l’emploi utilise une définition très restrictive de l’âge des enfants qui travaillent et ne prend en compte dans ses enquêtes que ceux qui sont employés dans l’économie formelle, alors que les chiffres sont beaucoup plus élevés lorsque l’on y ajoute le nombre d’enfants qui travaillent dans l’économie informelle. D’après certaines informations, 300 000 enfants de moins de 16 ans travailleraient dans ce secteur, notamment dans les entreprises familiales. Des enfants seraient également exploités et soumis aux pires formes de travail des enfants dans les secteurs de l’agriculture et de la construction.

3.En 2007, le Ministère de la justice a élaboré une loi sur la protection des enfants qui comprend des dispositions strictes sur l’emploi des enfants de moins de 16 ans, ainsi qu’une liste des travaux dangereux. Or, cette loi n’a toujours pas été adoptée. M. Madi demande si le vote de cette loi est toujours à l’ordre du jour des travaux du Parlement. Il aimerait également savoir quelles mesures sont prises pour contrôler l’application de la loi portant interdiction du travail des enfants de moins de 16 ans et quelles sanctions ont été prononcées à l’encontre des employeurs qui l’enfreignent.

4.M. Kotrane constate avec satisfaction que, dans le régime de la kafalah tel qu’il est pratiqué en Algérie, le kafi l peut donner son nom au makfoul, ce qui est un cas unique, qui prouve que l’on peut trouver des interprétations théologiques pour donner une meilleure protection à l’enfant. Cela étant, la kafalah reste un contrat, qui est lié à la personne du kafi l. À la mort de celui-ci, l’enfant perd le droit d’être accueilli dans la famille de substitution et doit s’adresser au juge pour être placé dans une autre famille, à moins que les héritiers ne l’acceptent à leur tour. M. Kotrane demande s’il y a en Algérie un débat sur les moyens de garantir une situation stable à l’enfant placé en kafalah.

5.Il demande si l’Algérie a élaboré une stratégie globale en faveur des enfants des rues qui impliquerait les enfants dans la recherche de solutions durables et favoriserait autant que possible le retour dans leur famille.

6.Enfin, M. Kotrane demande si l’Algérie envisage d’étendre son système de repérage des cas de maltraitance, en permettant à des organismes agréés de recueillir des informations sur les cas de maltraitance et d’effectuer un travail de prévention.

7.M me Sandberg dit que, d’après les chiffres fournis par l’Algérie, 1 555 enfants auraient été victimes de violences sexuelles en 2010. Beaucoup de cas étant passés sous silence, en raison du tabou qui entoure le sujet, elle demande si la délégation pourrait donner une estimation du nombre réel d’enfants victimes. Elle aimerait savoir quelles mesures sont prises pour renforcer les lois en la matière et s’enquiert des mesures de prévention qui ont été adoptées. Elle demande si les victimes bénéficient de soins et de mesures de réadaptation.

8.S’agissant de la traite, le Comité dispose de chiffres datant de 2007, d’après lesquels 9 000 migrants originaires d’Afrique subsaharienne se trouvant en Algérie, parmi lesquels de nombreux enfants, auraient été victimes de traite, d’exploitation sexuelle ou d’autres formes de servitude. Mme Sandberg demande si la loi de 2009 sur la lutte contre la traite établit une distinction entre la traite des personnes et l’immigration illégale. Elle aimerait savoir si les cas de traite des personnes font l’objet d’enquêtes et si les responsables sont poursuivis et condamnés. Elle demande s’il est exact qu’une brigade de police a été créée dans le sud du pays pour lutter contre la traite des personnes et, dans l’affirmative, aimerait savoir quel travail elle accomplit et quels résultats elle a obtenus. Elle demande à la délégation de confirmer qu’aucune personne de moins de 18 ans ne peut être arrêtée et poursuivie pour prostitution et aimerait savoir si un groupe interministériel sur la traite des personnes a été créé.

9.Rappelant que l’Algérie a ratifié en décembre 2006 le Protocole facultatif à la Convention concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, Mme Sandberg demande quand l’État partie a l’intention de présenter son premier rapport, qui aurait dû être soumis en 2009.

10.M. Gastaud, relevant que l’article 49 du Code pénal algérien dispose que les mineurs de moins de 13 ans ne peuvent faire l’objet que de mesures de protection ou de rééducation, en déduit que l’âge de la majorité pénale est fixé à 13 ans et demande si l’Algérie envisage de le relever. Il aimerait savoir si, même en cas de crime, un enfant de moins de 13 ans bénéficie de mesures de protection ou de rééducation ou s’il est condamné à une peine d’emprisonnement. Il demande en quoi consistent ces mesures de protection ou de rééducation et, relevant qu’un mineur peut être condamné à une peine d’emprisonnement de dix à vingt ans, demande dans quelles conditions cette peine est effectuée. Enfin, M. Gastaud demande si les mécanismes de médiation que l’Algérie a évoqués sont déjà institués et, dans l’affirmative, aimerait avoir des précisions sur leur fonctionnement.

11.M me Wijema n ne remarque que le taux de décès de nouveau-nés est élevé, surtout au cours de la première semaine, ce qui pourrait indiquer une insuffisance des soins aux nouveau-nés. Notant que le taux d’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois de l’enfant d’établit à 6,9 %, ce qui est un taux très faible, elle demande si cela ne s’expliquerait pas par le fait que la publicité pour le lait maternisé n’est pas suffisamment réglementée et que le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel n’est pas respecté.

12.Notant que moins de 15 % des jeunes âgés de 15 à 19 ans disposent d’informations exhaustives sur le VIH/sida et sur les infections sexuellement transmissibles et qu’il y a une recrudescence de l’alcoolisme et de la toxicomanie chez les adolescents, Mme Wijemanne demande un complément d’information sur ces questions.

13.M. Delmi (Algérie) dit que le Gouvernement algérien fait tout son possible pour réduire les disparités entre les régions et entre les différentes catégories de la population. Plus de 40 % des fonds du nouveau plan quinquennal seront consacrés au développement humain. Cinq mille établissements d’enseignement seront ouverts et 600 000 places seront proposées dans les universités. Plus de 1 500 établissements de santé seront créés. Deux millions de logements seront construits, 1 million de foyers seront raccordés au gaz naturel, 220 000 foyers ruraux bénéficieront de l’électricité et l’alimentation en eau potable sera améliorée. Le Gouvernement algérien a accordé la priorité à l’amélioration de la vie quotidienne des habitants, ce qui permettra une amélioration du taux de scolarisation des enfants et une réduction du taux d’abandon scolaire.

14.La violence à l’égard des enfants est réprimée par le Code pénal, de même que l’abandon des enfants par leur famille, l’exploitation, le viol, l’atteinte à la pudeur ou l’incitation à la débauche. La loi d’orientation sur l’éducation nationale interdit les châtiments corporels et les brimades. Des mécanismes ont été mis en place pour veiller à l’application de ces dispositions, tels que la Commission de lutte contre la violence dans les établissements scolaires. Dans chaque établissement, des délégués de classe sont en contact direct avec l’administration et signalent les cas de violence. Dans le cadre de rencontres, de séminaires et de journées d’études les enseignants collaborent avec des médecins et des psychologues pour étudier les causes de la violence scolaire et proposer des solutions.

15.Des mesures de prévention ont été prises pour lutter contre la violence sexuelle à l’égard des enfants. Ainsi, des brigades de protection de l’enfance ont été mises en place au niveau national et la sûreté nationale mène des actions de sensibilisation, par le biais de campagnes d’information, notamment dans les établissements scolaires. La police de proximité joue également un rôle important dans la protection des enfants.

16.En ce qui concerne la coopération internationale, l’Algérie a participé à la constitution du groupe spécial d’Interpol sur les crimes sexuels commis contre des enfants et coopère avec d’autres États en vue de la prise en charge des enfants victimes de violence. Des policiers chargés de la protection de l’enfance ont bénéficié de sessions de formation organisées dans le cadre du programme MEDA financé par l’Union européenne. D’autres ont suivi une formation dispensée par Penal Reform International, une formation sur les enquêtes sur les mineurs dans le cadre de la coopération algéro-française ou des formations organisées avec d’autres organisations internationales comme l’UNICEF ou le FNUAP.

17.En 2012, le Gouvernement algérien a adopté une stratégie de famille comprenant notamment des programmes spéciaux de lutte contre la mortalité infantile et des programmes de protection des enfants en bas âge. Des systèmes d’évaluation ont été mis en place pour évaluer leur efficacité. L’accès des familles aux technologies de l’information et de la communication a été encouragé, avec le programme «Un PC pour chaque famille». Enfin, l’accent a été mis sur les activités récréatives, avec la création de structures de loisirs et l’ouverture de maisons de jeunes et de bibliothèques communales ou mobiles.

18.M me Remki(Algérie) dit que le Gouvernement est attaché à la coordination entre les institutions étatiques et les organisations non gouvernementales (ONG). Cette coordination, qui existe depuis une dizaine d’années, a donné lieu à la signature de plusieurs protocoles d’accord entre plusieurs ministères et des ONG.

19.Quelque 1 150 enfants handicapés sont scolarisés dans des établissements scolaires classiques. S’agissant des autres enfants handicapés, ils sont 16 000 à être pris en charge au sein de 186 établissements spécialisés.

20.M. Cardona L l orens dit qu’il faut promouvoir l’intérêt supérieur des enfants handicapés en les intégrant dans des établissements scolaires ordinaires, conformément aux principes de l’éducation inclusive. Il s’enquiert du type de formation qui est dispensé aux éducateurs qui travaillent au sein des établissements spécialisés.

21.M me Remki(Algérie) dit que les 16 000 enfants pris en charge dans des établissements scolaires spécialisés sont trop handicapés pour être intégrés au système classique. Les éducateurs qui les prennent en charge dans les établissements spécialisés ont reçu une formation conforme aux normes internationales dans ce domaine. Dans les écoles ordinaires, les enseignants qui s’occupent d’enfants handicapés sont régulièrement assistés d’un médecin de l’Unité de dépistage et de suivi (UDS).

22.M me Leedemande des précisions sur cet accompagnement. S’il s’agit de consultations médicales, en quoi sont-elles nécessaires?

23.M me Remkin (Algérie) dit que les personnes qui assistent les enseignants des écoles classiques sont surtout des psychologues qui conseillent aux enseignants des méthodes pour prendre en charge les enfants handicapés.

24.Le Président (Rapporteur pour l’Algérie) rappelle le souci du Comité d’avoir des données fiables et vérifiables. Pour éviter la stigmatisation des enfants handicapés, il faudrait qu’ils soient plus nombreux à être intégrés dans les établissements scolaires classiques, et que seule une minorité d’entre eux soit placée dans des institutions spécialisées. Or, d’après les données fournies par la délégation, le taux d’enfants handicapés scolarisés dans des établissements spécialisés est 15 fois supérieur à celui des enfants handicapés intégrés dans les écoles classiques.

25.M me Remki(Algérie) dit que le nombre d’enfants handicapés scolarisés dans les écoles classiques est encore faible car les établissements classiques doivent procéder à des aménagements pour pouvoir accueillir ces enfants. Lorsque les adaptations nécessaires auront été faites, l’Algérie veillera à intégrer ces enfants dans les établissements scolaires classiques.

26.M me Lee s’enquiert de l’accessibilité des établissements scolaires.

27.M me Remki(Algérie) dit que les transports scolaires sont accessibles aux enfants atteints d’un handicap sensoriel ou mental, mais pas aux enfants qui souffrent d’un handicap moteur, qui sont généralement accompagnés à l’école par leurs parents. L’Algérie a besoin de ressources supplémentaires pour rendre les transports scolaires accessibles aux enfants atteints de ce type de handicap.

28.M me Al- Asmar (Rapporteuse pour l’Algérie), constatant que le nombre d’enfants handicapés scolarisés dans des écoles ordinaires reste faible, demande des informations sur les procédures d’admission des enfants handicapés dans les écoles ordinaires et sur le passage de ces enfants en classe supérieure.

29.M me Remki (Algérie) dit qu’aucun enfant apte à être scolarisé dans le système scolaire classique n’est refusé. Le Ministère de l’éducation collabore avec le Ministère de l’intérieur et les collectivités locales pour rendre les établissements classiques accessibles aux enfants handicapés.

30.Le Président (Rapporteur pour l’Algérie) demande des informations sur l’analphabétisme, l’abandon scolaire et le ratio enseignants/élèves.

31.M me Remki (Algérie) dit que le Ministère de l’éducation nationale collabore avec des ONG et les Ministères de la solidarité nationale, de l’intérieur et de la santé en vue d’éliminer les châtiments corporels. Certaines ONG mènent des actions de sensibilisation, notamment dans les écoles.

32.M me Hendel (Algérie) dit que l’Algérie a toujours été une terre d’asile pour tous les réfugiés, qu’ils soient politiques ou économiques, notamment pour ceux qui viennent des pays limitrophes, tels que le Mali, le Niger ou la Mauritanie. La politique algérienne concernant les étrangers repose sur l’égalité de traitement entre les nationaux et les étrangers et ne porte aucunement atteinte aux droits fondamentaux des requérants d’asile, des réfugiés ou des migrants.

33.L’Algérie fonde le traitement réservé aux réfugiés, y compris à leurs enfants, sur les dispositions des articles 67, 68 et 69 de sa constitution et des conventions internationales et régionales auxquelles elle est partie, notamment la Convention de l’Organisation de l’unité africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique de 1969 et la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés de 1951. En outre, la loi no 08‑11 du 25 juin 2008 relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie a introduit une dérogation aux règles de droit commun d’entrée sur le territoire pour les demandeurs d’asile et les réfugiés, en application des conventions internationales ratifiées par l’Algérie dans ce domaine.

34.Des mécanismes ont été mis en place pour prendre en charge les réfugiés, comme le Bureau algérien pour les réfugiés et les apatrides (BAPRA), qui relève du Ministère des affaires étrangères.

35.Il convient de rappeler que l’Algérie est partie à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Les enfants migrants ont les mêmes droits que les enfants algériens. Ils ont accès, au même titre que les autres, à l’éducation de base et aux services de santé.

36.Le Président (Rapporteur pour l’Algérie) demande si le BAPRA mène des opérations concrètes ou s’il s’agit d’un organe de réflexion et d’élaboration de programmes.

37.Concernant le traitement des mineurs non accompagnés sur le territoire, la situation dépeinte par la délégation semble idéale mais ne correspond peut être pas à la réalité. Le Comité s’inquiète en effet d’informations qu’il a reçues au sujet de mineurs non accompagnés placés en détention. Il souhaite connaître les mesures en vigueur concernant la détermination de l’âge, l’assistance juridique, la tutelle et les questions sanitaires. Les règles régissant le rapatriement s’appliquent-elles aux mineurs non accompagnés?

38.M me Sandberg demande des précisions sur la traite des enfants.

39.M. Delmi(Algérie) dit que le BAPRA, structure permanente qui relève du Ministère des affaires étrangères et fait partie de la Direction générale des affaires juridiques et consulaires, s’occupe de la gestion des réfugiés, ycompris de leurs enfants. Tout réfugié arrivant en Algérie est pris en charge par ce bureau, qui établit son statut de réfugié et assure son installation, voire son intégration dans la société, lorsque cela est possible. Il assure également la coordination entre le Ministère des affaires étrangères et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). L’Algérie collabore actuellement avec le HCR et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour renforcer l’action de ce bureau.

40.M m e Abed (Algérie) dit que le rapport périodique est le fruit de consultations approfondies avec tous les ministères et institutions concernés par la protection des droits de l’enfant et avec des acteurs de la société civile algérienne. Des réunions regroupant les différents ministères concernés ont été tenues sous l’égide du Ministère des affaires étrangères. Le Gouvernement a également collaboré avec des ONG qui avaient établi des rapports parallèles.

41.M. Mourad (Algérie) rappelle que l’Algérie a ratifié les principaux instruments relatifs à la lutte contre le travail des enfants, ce qui l’a conduite à introduire dans sa législation nationale la loi no 390-11 de 1990, qui fixe l’âge légal du travail à 16 ans. Le taux d’enfants qui travaillent n’a jamais dépassé 1 %. Certains enfants, dont le nombre est difficile à évaluer, travaillent dans le cadre de la solidarité familiale, mais cela ne signifie pas qu’ils ne sont pas scolarisés. Le Ministère du travail ne pouvant pas se charger seul de la lutte contre le travail des enfants, le Gouvernement a créé en 2003 une commission interministérielle, constituée de 12 départements ministériels et d’un syndicat, chargée de la question.

42.L’inspection du travail sanctionne tout employeur qui embaucherait un enfant de moins de 16 ans. Il s’agit généralement d’amendes, mais, en cas de récidive, des peines d’emprisonnement peuvent être prononcées.

43.L’Algérie célèbre chaque année depuis 2006 la Journée mondiale de lutte contre le travail des enfants, en collaboration avec le Bureau international du Travail, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et des groupes d’enfants.

44.Le Président(Rapporteur pour l’Algérie) demande si l’Algérie a élaboré une définition des pires formes de travail des enfants, comme l’exige la Convention no 182 de l’OIT et quelles mesures l’Algérie prévoit de prendre concernant le travail informel, qui est le plus difficile à détecter, et qui conduit certains enfants à manquer l’école lors des périodes de récoltes et de moissons.

45.Concernant les enfants domestiques, le Comité souhaiterait connaître le point de vue de l’Algérie sur la Convention no 189 de l’OIT sur le travail décent pour les travailleuses et les travailleurs domestiques, à laquelle elle n’est pas encore partie.

46.M. Mourad (Algérie) dit que l’Algérie n’a enregistré aucun cas de pires formes de travail des enfants. Les jeunes travailleurs âgés de 16 à 18 ans font l’objet d’une protection en matière de santé, de sécurité et de moralité. Une liste des travaux dangereux existe bel et bien, mais elle concerne l’ensemble des travailleurs, quel que soit leur âge.

47.Le travail informel au sein des foyers, difficilement décelable, ne peut être combattu que par des actions de sensibilisation. Le phénomène des enfants domestiques est très peu observable au sein de la société algérienne.

La séance est suspendue à 16 h 30; elle est reprise à 16 h 45.

48.M me Hendel(Algérie) explique qu’une loi visant à lutter contre la traite des personnes et le trafic illicite des migrants a été adoptée en 2011. Cette loi érige la traite des personnes en infraction et donne une définition de la traite conforme à celle du Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

49.Les enfants algériens non accompagnés sont pris en charge par les brigades de la protection de l’enfance, avec l’appui des services sociaux et du Croissant-Rouge algérien et l’intervention d’équipes mobiles d’éducateurs de rue. Les enfants étrangers non accompagnés sont recueillis par le personnel des postes de police aux frontières, puis confiés aux brigades de la protection de l’enfance, qui informent le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), lequel prend les mesures qui s’imposent. Le rapatriement dans le pays d’origine de l’enfant se fait en concertation avec le gouvernement du pays dont il est originaire.

50.Le  Président (Rapporteur pour l’Algérie)demande si les mineurs étrangers non accompagnés sont placés dans des centres de rétention et s’ils bénéficient d’une prise en charge médicale, d’un accompagnement social et de l’assistance d’un avocat. Il faudrait également préciser si un tuteur leur est attribué et si, en cas d’incertitude sur leur âge, le bénéfice du doute leur profite.

51.M.  Delmi(Algérie) explique que les enfants non accompagnés qui arrivent en Algérie, souvent de jeunes Maliens ou Nigériens, sont identifiés par le personnel consulaire du pays dont ils se disent originaires, qui détermine, à l’issue d’un entretien, leur nationalité. Une fois leur identité connue, le HCR entreprend des démarches en concertation avec le pays d’origine en vue de leur rapatriement rapide. S’il est impossible de les rapatrier, ils sont placés dans des centres pour migrants, en attente d’une décision définitive. Ces enfants étant étrangers, ils ne peuvent pas être placés sous la protection d’un tuteur, mais c’est une solution que l’Algérie va étudier, afin de leur assurer une meilleure protection.

52.M me Benmansour (Algérie) explique qu’en cas d’abandon d’un enfant adopté dans le cadre de la kafala h, une action en abandon est introduite devant la juridiction qui a autorisé la kafala h, sous la direction du ministère public. En cas de décès du kafil, l’enfant est confié à ses héritiers, à condition qu’ils s’engagent à en assumer la charge. Dans le cas contraire, le juge attribue la garde de l’enfant à l’institution compétente ou à ses parents biologiques, après consultation de l’intéressé si celui-ci est en âge de discernement. Enfin, l’enfant peut être confié à une famille d’accueil, qui reçoit une rétribution à titre de dédommagement pour assurer son entretien. Cette solution de placement est souvent privilégiée par le juge, qui y voit un moyen adéquat de procurer un environnement familial de substitution à l’enfant.

53.Le  Président (Rapporteur pour l’Algérie) demande un complément d’information sur le nombre d’enfants placés en institution ou recueillis par des familles d’accueil. Il aimerait en outre savoir quel organe est chargé de contrôler les bonnes conditions de placement d’un enfant accueilli par une famille algérienne à l’étranger dans le cadre de la kafala h .

54.M me Benmansour (Algérie) dit que la majorité pénale est fixée à 18 ans en Algérie. Les mineurs en conflit avec la loi ne peuvent être l’objet que de mesures de rééducation ou de protection: remise du mineur à ses parents ou son tuteur, application du régime de la liberté surveillée, placement dans un établissement d’éducation professionnelle ou médico-pédagogique, ou encore placement dans un internat habilité à recevoir des mineurs délinquants d’âge scolaire. Le mineur âgé de plus de 13 ans peut faire l’objet d’une mesure de placement dans une institution publique d’éducation surveillée ou d’éducation corrective, mais il ne peut en aucun cas être détenu aux côtés d’adultes. Un centre de rééducation et de protection des mineurs répondant aux normes internationales a été construit et sept autres devraient bientôt voir le jour. Pour les mineurs de plus de 13 ans, la juridiction de jugement peut, dans des circonstances exceptionnelles et sur décision motivée, remplacer une de ces mesures par une amende ou une peine d’emprisonnement, auquel cas le mineur sera détenu dans un pavillon réservé aux mineurs ou dans un centre de protection et de rééducation.

55.En cas de crime grave punissable, pour un adulte, d’une peine de réclusion à perpétuité ou de la peine capitale, le juge applique l’article 50 du Code pénal et peut condamner le mineur âgé de 13 à 18 ans à une peine pouvant aller de dix à vingt ans d’emprisonnement. S’il encourt la peine de la réclusion ou de l’emprisonnement à temps, il est condamné à une peine d’emprisonnement égale à la moitié de celle qui aurait été infligée à un adulte. Le juge reconnaît généralement des circonstances atténuantes, ce qui fait qu’il est rare qu’un mineur soit condamné à une lourde peine d’emprisonnement.

56.Le  Président (Rapporteur pour l’Algérie) demande quel régime est appliqué à un mineur de moins de 13 ans qui commet une infraction grave. Il aimerait également savoir si les magistrats reçoivent une formation à la médiation et combien de mineurs sont placés dans des centres de correction.

57.M me Benmansour (Algérie) répond que le mineur de moins de 13 ans fait l’objet d’une admonestation du juge des mineurs, qui décide de son placement en institution de protection et de rééducation. Aucun âge minimum n’a été défini: le mineur, quel que soit son âge, a affaire au juge des mineurs. La médiation, qui se substitue à l’action pénale, n’est pas encore appliquée mais cela est prévu. Six cents mineurs sont actuellement dans des centres de correction.

58.M.  Gastauddemande si les juges des mineurs sont répartis sur tout le territoire et s’ils siègent en formation collégiale.

59.M me Benmansour (Algérie) répond que, bien que l’Algérie n’ait pas encore de tribunaux pour mineurs proprement dits, chacun des 198 tribunaux du pays comporte une section des mineurs et chacune des 36 cours d’appel est dotée d’une chambre des mineurs, composée d’un juge des mineurs et de deux assesseurs, désignés pour une période donnée.

60.Le suivi des enfants m ekfoul accueillis à l’étranger dans le cadre de la k afala h est assuré par la section sociale des services consulaires algériens dans le pays d’accueil.

61.Le  Président (Rapporteur pour l’Algérie) demande si les enfants victimes de violences sexuelles sont protégés dans les procédures pénales et quelles mesures prend l’État partie pour prévenir ces violences, notamment à l’école.

62.M.  Delmi(Algérie) explique que les enseignants jouent un rôle important dans la prévention des violences sexuelles contre les enfants.

63.M me Benmansour (Algérie) dit que les nouvelles dispositions relatives à la violence intrafamiliale durcissent les peines imposées à quiconque recourt à la violence à l’égard de ses descendants mineurs ou de ses ascendants. En outre, le nouveau Code pénal révisé incrimine la violence à l’égard des femmes et des enfants et définit la violence comme une circonstance aggravante de toute infraction.

64.Le viol conjugal n’est pas défini dans les textes, et force est de constater que cette question est taboue en Algérie. Cela dit, les juges qui sont saisis d’une affaire de viol appliqueront les nouvelles dispositions du Code pénal révisé régissant le viol indépendamment du lien de parenté entre l’auteur de l’acte et sa victime.

65.Pour ce qui est des violences conjugales, le Gouvernement algérien applique une politique de tolérance zéro en vertu de laquelle la responsabilité de l’auteur des faits est systématiquement retenue par le parquet, à moins que l’auteur ne souffre d’une maladie mentale. Pour éviter les récidives, les juges des juridictions pénales sont sensibilisés au fait que, pour être dissuasives, les peines qu’ils imposent doivent être sévères et proportionnelles à la gravité de l’acte délictueux. Le Code de procédure pénale prévoit l’engagement de poursuites dès lors que le parquet a connaissance de la commission de l’infraction, et ce, même en l’absence de plainte. L’argument de l’atteinte à l’honneur et de la provocation n’est jamais retenu par le juge et ne peut en aucun cas aboutir à l’extinction de la procédure pénale.

66.M me Meglef Mehali (Algérie) dit qu’il existe plusieurs types de prise en charge des enfants privés de milieu familial, parmi lesquels le placement en institution, qui repose sur un réseau de 47 établissements à l’échelle du pays, dont 33 accueillent des enfants depuis la naissance jusqu’à l’âge de 6 ans et 14 autres de l’âge de 6 ans à celui de la majorité. Il existe aussi un système de placement dans des familles d’accueil rétribuées, qui perçoivent une allocation en échange de la garde et de l’entretien de l’enfant. Enfin, les mères élevant seules leur enfant bénéficient d’aides financières ainsi que d’aides en nature, qui varient en fonction du nombre d’enfants à leur charge. La délégation fera parvenir au Comité un complément d’information écrit sur le montant desdites allocations.

67.M. O u ali (Algérie) dit que la mortalité infantile est passée de 36,1 ‰ en 2000 à 23,1 ‰ en 2011, ce qui constitue une grande avancée et laisse espérer que l’Algérie parviendra à atteindre la cible de 19 ‰ qu’elle s’est fixé dans le cadre des objectifs du Millénaire pour le développement relatifs à la santé. Cela dit, M. Ouali estime que compte tenu des moyens humains et financiers mis en œuvre, le taux de 23,1 ‰ est encore en deçà de ce que l’on pourrait légitimement attendre. Il précise toutefois que le taux insatisfaisant de mortalité infantile est en grande partie dû aux décès néonatals, qui comptent pour 70 % à 80 % de tous les décès des moins de 5 ans. Le niveau de santé des enfants âgés de plus de 28 jours a quant à lui beaucoup progressé, notamment grâce à la vaccination. Le programme de lutte contre la mortalité maternelle et infantile pour 2006-2009, qui avait pour objectif de réduire de 50 % la mortalité maternelle et de 30 % la mortalité infantile, a été prorogé jusqu’en 2012, et de nombreuses mesures ont été mises en œuvre pour atteindre les objectifs voulus. Les infrastructures de prise en charge de la mère et de l’enfant ont notamment été renforcées, avec la création de services de pédiatrie, de gynécologie, de chirurgie générale et de médecine interne dans tous les centres hospitaliers universitaires (CHU) et la mise en place de nouveaux services de néonatologie chargés d’accueillir les enfants prématurés et les enfants ayant un faible poids à la naissance.

68.L’enquête en grappes à indicateurs multiples (MICS 4) qui va être entreprise prochainement permettra de dire si la campagne de promotion de l’allaitement maternel menée depuis l’enquête MICS 3 en 2006 a porté ses fruits et a permis de rectifier la tendance à la baisse du taux d’allaitement maternel observée en 2006 par rapport à la période précédente.

69.La lutte contre la toxicomanie et l’alcoolisme est le fruit d’une collaboration entre le Ministère de l’éducation, le Ministère de l’enseignement supérieur et le Ministère de la jeunesse et des sports et le mouvement associatif, très actif dans ce domaine.

70.M me Wijeman n e invite l’État partie à mener une enquête pour déterminer les causes du taux élevé de mortalité néonatale afin de le réduire, comme il a été capable de le faire pour celui de la mortalité des moins de 5 ans. Elle souligne l’importance capitale de l’allaitement maternel au cours des premières semaines de vie de l’enfant. L’État partie doit veiller à ce qu’aucun échantillon de substitut de lait maternel ne soit distribué dans les maternités et à ce qu’aucune publicité n’en vante les mérites, à ce que le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel soit strictement appliqué et à ce que les mères soient incitées à allaiter leur enfant dès sa naissance.

71.L’État partie devrait en outre mieux suivre l’état de santé des mères au cours des semaines suivant l’accouchement afin de faire reculer le nombre de décès post-partum.

72.La délégation voudra bien indiquer quels programmes l’État partie met en œuvre pour offrir aux jeunes âgés de 12 ans à 18 ans qui consommeraient de la drogue, de l’alcool ou du tabac, des services de conseil et une prise en charge adaptés et pour interdire les publicités pour le tabac et l’alcool qui ciblent tout particulièrement cette population.

73.Le Président (Rapporteur pour l’Algérie) espère que le principe de tolérance zéro appliqué aux actes de violence perpétrés contre les femmes et les enfants a également été de rigueur pour les événements de Hassi Messaoud, et que toute la lumière sera faite sur les exactions commises.

74.Le Président aimerait connaître le nombre exact d’enfants des rues et savoir quelle protection leur est offerte. Il demande si l’État partie procède à l’identification de ces enfants au même titre que les enfants migrants.

75.M me Benmansour (Algérie) assure que les auteurs des exactions commises à Hassi Messaoud en 2000 puis en 2010 ont tous été traduits en justice, que certaines procédures ont abouti à des condamnations, d’autres à un non-lieu et d’autres encore à la relaxe de l’inculpé.

76.M. Delmi (Algérie) ajoute que ces événements ont trouvé un large écho dans les médias nationaux et internationaux et que de nombreuses associations se sont mobilisées.

77.Les enfants non accompagnés en proie à des difficultés économiques sont souvent contraints de travailler et de vivre dans la rue. Pour leur venir en aide, le Ministère de la solidarité et les autres autorités compétentes ont mis en place des équipes mobiles et des centres d’accueil de jour.

78.M me Al- Asmar (Rapporteuse pour l’Algérie) se félicite du dialogue enrichissant instauré avec la délégation algérienne. Elle espère que l’État partie y aura trouvé des pistes de réflexion qui l’amèneront à mieux mettre en œuvre la Convention et à communiquer davantage avec les organisations internationales et les autres acteurs pertinents dans le domaine des droits de l’homme. Elle pense que l’État partie gagnerait à évaluer son plan national d’action en faveur de l’enfance, à définir des indicateurs et à mettre en place une base de données sur les personnes les plus vulnérables de la société, dont les enfants. Elle indique que, dans ses observations finales, le Comité invitera l’État partie à lutter contre les pratiques discriminatoires en matière de prestations de service, à promouvoir l’intérêt supérieur de l’enfant, dans le cadre de la kafalah notamment, à veiller à ce que les auteurs de violences physiques contre des enfants soient punis, à promulguer une législation applicable aux travailleurs migrants, à combattre le travail des enfants de moins de 15 ans, à protéger les enfants des rues, à rendre la ligne téléphonique spéciale destinée aux enfants accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre et, enfin, à créer des centres de réinsertion pour les enfants en conflit avec la loi et à veiller à ce que les peines de vingt ans de prison ne leur soient imposées qu’à titre exceptionnel. Enfin, l’État partie sera invité à ratifier le troisième Protocole facultatif à la Convention établissant une procédure de présentation de communications.

79.M. Delmi (Algérie) dit que le dialogue franc et fructueux avec le Comité aura été des plus utiles et permettra à l’Algérie de corriger les insuffisances constatées dans la mise en œuvre de la Convention. Il assure les membres du Comité que le Gouvernement algérien accordera toute l’attention qu’elles méritent aux observations finales du Comité, qui seront largement diffusées.

La séance est levée à 18 h 5.