NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.13906 février 2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Cinquantième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1390e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le lundi 26 janvier 2009, à 10 heures

Présidente: Mme ORTIZ

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ((CRC/C/OPSC/MDV/1); liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/MDV/Q/1); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/MDV/Q/1/Add.1))

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés ((CRC/C/OPAC/MDV/1); liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/MDV/Q/1); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/MDV/Q/1/Add.1))

1. Sur l’invitation de la Présidente, la délégation de la République des Maldives prend place à la table du Comité.

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

2.Mme JAMEEL (Maldives) rappelle que les Maldives ont ratifié le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants le 10 mai 2002 et le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés le 29 décembre 2004. Les rapports initiaux sur la mise en œuvre de ces deux instruments n’ont pas pu être établis et soumis dans les délais fixés par le Comité en raison de l’insuffisance des ressources humaines et techniques dont disposent les organes gouvernementaux compétents.

3.Si le problème de l’implication d’enfants dans les conflits armés ne se pose pas directement pour la République des Maldives, il en va tout autrement pour la prostitution des enfants, la vente d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, dont de larges pans de la société refusent pourtant de reconnaître l’existence. Cette culture du déni et du silence, conjuguée à l’absence de données complètes sur ces phénomènes et à une certaine passivité des pouvoirs publics, a fait que les questions visées dans le Protocole facultatif n’ont pas toujours été considérées et traitées comme des priorités.

4.Les Maldives traversent depuis 2004 une période de transformation politique et sociale radicale. Le processus de réforme a donné lieu à l’adoption d’un certain nombre de lois ayant une incidence sur la mise en œuvre des deux Protocoles facultatifs, parmi lesquelles la loi sur la police, la loi sur les forces armées, la loi sur l’emploi et la loi sur l’immigration. La proclamation de la nouvelle Constitution en août 2008 a entraîné la séparation des pouvoirs et considérablement renforcé les droits des citoyens des Maldives. L’article 35 de la Constitution, en particulier, interdit expressément toute forme de discrimination et d’exploitation à l’encontre des enfants. Nombreux sont les spécialistes qui estiment cependant que les dispositions de la loi sur la protection des droits de l’enfant de 1991 sont insuffisantes au regard des obligations internationales du Gouvernement. Des mesures ont donc été prises pour modifier la législation en vigueur afin de favoriser la mise en œuvre de la Convention et de ses Protocoles.

5.L’arrivée au pouvoir d’un nouveau gouvernement à l’issue des premières élections pluralistes tenues dans le pays, en novembre 2008, s’est accompagnée de nombreux changements structurels et remaniements. Le Ministère de la condition féminine et de la famille, qui était le principal organe chargé de la mise en œuvre de la Convention et de la loi sur la protection des droits de l’enfant, a été dissous. Son mandat relève aujourd’hui du Ministère de la santé et de la famille, au sein duquel a été créé un Département de la protection de l’enfance et de la famille. De même, le Ministère de la justice a été supprimé et ses fonctions ont été confiées à la Commission des services judiciaires et au Bureau du Procureur général. Cette restructuration a rendu le dialogue plus difficile avec certains partenaires sectoriels dans le domaine de la protection de l’enfance. C’est le cas en particulier avec la magistrature, qui exerce désormais son indépendance avec excès et considère toute tentative de dialogue comme un risque d’atteinte aux principes consacrés par l’article 141 c) de la Constitution, qui interdit tout acte influençant les fonctions et devoirs des juges.

6.La législation en vigueur fixe à 16 ans l’âge minimal du consentement aux relations sexuelles. Toutefois, la majorité des juges associe la maturité cognitive à la puberté, qu’ils utilisent donc comme critère pour déterminer si un enfant a atteint l’âge de consentement. De plus, en raison des déficiences du système de justice pénale, les poursuites à l’encontre des auteurs d’infractions sexuelles demeurent rares. Il est à espérer que les choses évolueront lorsque le projet de code pénal et le projet de loi sur la preuve auront été adoptés. Les modifications apportées en mai 2008 à l’article 173 des Règles en matière d’infractions pénales, relatif aux infractions à caractère sexuel, qui remplacent les peines non privatives de liberté par des peines d’emprisonnement, ont suscité beaucoup d’espoir dans la population. Toutefois, à ce jour, seul un petit nombre de suspects a été jugé en vertu des nouvelles dispositions. Il apparaît indispensable de sensibiliser les acteurs du système de justice pénale aux injustices rencontrées par les enfants, en tant que victimes, délinquants, témoins ou autres. Le Département de la protection de l’enfance et de la famille a entrepris d’agir auprès des grandes institutions de l’État à cette fin.

7.L’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales est devenue un danger réel avec le développement du tourisme dans le pays. Bien que les touristes soient traditionnellement accueillis sur les îles inhabitées, qui leur sont spécifiquement réservées, le tourisme commence également à se développer sur les îles habitées. Cette proximité avec les populations locales accroît inévitablement les risques d’exploitation. Même si cela n’est guère visible dans les statistiques officielles, l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et la prostitution des jeunes liée à la drogue constituent des problèmes réels aux Maldives. En revanche, tout semble indiquer que ces activités ne relèvent pas de la criminalité organisée. Une étude sur la violence à l’égard des enfants réalisée en 2004 a révélé un certain nombre de cas de prostitution d’enfants, notamment à des fins d’échange contre des biens et des services, ainsi que l’utilisation d’enfants pour la production de matériel pornographique. Malgré l’engagement du Gouvernement à protéger les enfants contre l’exploitation sexuelle et la traite à l’échelon régional et international, l’absence de recherche sur ces questions aux Maldives constitue un obstacle majeur à toute action concrète. Le fait de ne pas disposer de données se traduit en outre par un déni de ces problèmes rendant très délicat tout échange avec les parties prenantes.

8.La coopération internationale a permis un renforcement des capacités et la mise en place de mécanismes et infrastructures de protection de l’enfance. L’assistance et le soutien apportés aux autorités maldiviennes par les organismes des Nations Unies ont été particulièrement précieux. L’UNICEF, en particulier, a beaucoup aidé au renforcement des capacités dans le domaine de la protection de l’enfance et à la décentralisation des services de protection de l’enfance dans les atolls. L’Autorité de protection de l’enfance et de la famille a collaboré avec ECPAT International aux fins de l’élaboration d’une politique sur l’exploitation sexuelle et la traite des enfants. La police nationale, l’Autorité de protection de l’enfance et de la famille et le Child Exploitation and Online Protection Centre ont organisé conjointement une formation sur la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants via Internet. Les Maldives sont membres de l’organisation Child Helpline International, avec laquelle elles ont créé un numéro gratuit pour les enfants dans le pays. Elles font également partie du forum sud-asiatique sur la violence à l’égard des enfants, dont elles s’emploient à promouvoir l’institutionnalisation en tant que mécanisme régional. Enfin, le Gouvernement maldivien travaille actuellement avec le Comité de coordination sur la traite et la prostitution des femmes et des enfants de la SAARC (Association sud‑asiatique de coopération régionale) à la mise au point d’une procédure d’intervention régionale. À toutes ces activités s’ajoutent les partenariats formés avec les quelques ONG qui s’occupent de la protection de l’enfance, à commencer par la Commission des droits de l’homme des Maldives. Le Gouvernement est particulièrement attaché à cette collaboration et espère qu’elle portera bientôt ses fruits.

9.Parmi les activités auxquelles des crédits ont été alloués pour les deux prochaines années, il convient de citer la réalisation d’une étude complète sur l’exploitation sexuelle des enfants, qui doit servir de base à l’élaboration de politiques, la création d’une unité de la justice pour mineurs au sein du Bureau du Procureur général, la présentation au Parlement d’un projet de loi sur la justice pour mineurs et d’un projet d’amendement à la loi sur les droits de l’enfant, la tenue de séminaires à l’intention des magistrats sur les meilleures pratiques et les normes internationales en matière de poursuites dans les affaires d’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, et l’organisation de formations à l’intention de la police sur le traitement des délinquants juvéniles et la réalisation des enquêtes concernant les familles et les enfants. Le Gouvernement continuera en outre d’aider au renforcement des capacités des ONG dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’enfant.

10.Mme LEE (Rapporteuse pour les Maldives, pour le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) dit que le Comité accueille avec satisfaction la ratification par les Maldives des deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention de la SAARC sur la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants aux fins de prostitution, ainsi que l’inclusion dans la nouvelle Constitution de l’article 35a, qui protège expressément les droits de l’enfant. Elle invite la délégation à donner des précisions sur le processus d’élaboration du rapport à l’examen, en indiquant notamment si certains des membres du nouveau gouvernement ont été amenés à y prendre part. La délégation pourra peut-être également expliquer pourquoi il a été question dans le discours liminaire de «quelques» ONG seulement. Cela signifie-t-il qu’il existe peu d’ONG s’occupant des questions relatives aux enfants aux Maldives ou que peu d’entre elles participent au suivi de la Convention?

11.La collecte de données ventilées, notamment sur les violations du Protocole facultatif, continue apparemment de poser problème. À cet égard, il serait intéressant de savoir comment fonctionne aujourd’hui le système «Maldives Info» et où en est la mise en place de la base de données nationale sur la protection de l’enfance, qui doit être achevée en 2009. La délégation pourra peut-être préciser si cette base de données couvrira toutes les dispositions du Protocole facultatif.

12.Il serait utile également d’avoir des précisions sur le rôle du nouveau Ministère de la santé et de la famille ainsi que du Conseil national pour la protection des droits de l’enfant dans la coordination et l’évaluation de la mise en œuvre du Protocole et sur les mesures prises pour garantir l’indépendance de la Commission nationale des droits de l’homme et la doter de ressources humaines et financières suffisantes, conformément aux recommandations formulées précédemment par le Comité. La délégation pourra peut-être indiquer si la Commission est facilement accessible aux enfants et si elle est habilitée à recevoir des plaintes au titre du Protocole et à y donner suite.

13.La Rapporteuse souhaiterait savoir s’il existe un Plan d’action pour la mise en œuvre du Protocole et quelles ont été les mesures concrètes prises pour appliquer le Plan national d’action pour le bien-être de l’enfant maldivien (2001-2010). Elle demande en outre un complément d’information sur l’action menée en matière de prévention, notamment dans le contexte du tourisme sexuel. Il est indiqué dans le rapport que la législation maldivienne interdit la prostitution et que le fait de vendre des faveurs sexuelles constitue une infraction. Il serait intéressant de savoir si, parallèlement aux mesures prises pour lutter contre l’offre, il existe des dispositions similaires concernant la demande. Enfin, la délégation pourra peut-être faire le point sur l’élaboration du nouveau code pénal.

14.M. PARFITT demande à la délégation des précisions sur la formation des magistrats. Notant que le public hésite à recourir aux services de l’Unité de la protection de la famille et de l’enfant (qui relève de la police) en raison d’une certaine crainte vis-à-vis des forces de l’ordre, il demande ce qui pourrait être fait pour corriger cette situation.

15.La délégation pourra peut-être indiquer au Comité le nombre de plaintes émanant d’enfants reçues par la Commission des droits de l’homme des Maldives, en précisant si les enfants ont facilement accès à cet organe et si les procédures suivies sont adaptées à leur âge. Il serait en outre intéressant de connaître le rôle de la Commission dans l’élaboration des rapports sur la mise en œuvre du Protocole. Enfin, la délégation pourra peut-être décrire les mesures prises pour assurer la protection des enfants victimes de mauvais traitements et veiller à ce qu’ils aient au moins un endroit où loger. La solution consistant à écarter l’auteur des mauvais traitements du domicile familial est-elle parfois envisagée?

16.Étant donné les liens établis entre la prostitution des enfants et la drogue, il serait utile de savoir quelles sont les mesures prises pour enrayer le trafic et la consommation de drogue dans le pays.

17.M. KOTRANE demande si le Gouvernement envisage d’adopter une législation visant spécifiquement à lutter contre toutes les formes d’exploitation des enfants, y compris le tourisme sexuel et la pédopornographie, et s’il étudie la possibilité de ratifier les Conventions nos 138 et 152 de l’OIT.

18.Mme AIDOO appelle l’attention de la délégation sur le fait que les questions relatives à l’enfance, dont s’occupe le Ministère de la santé et de la famille depuis la dissolution du Ministère de la condition féminine et de la famille (MCFF), ne concernent pas uniquement la santé. Aussi espère-t-elle que l’État partie élaborera une politique de l’enfance ciblant la protection intégrale des droits de l’enfant consacrés par la Convention.

19.Compte tenu que beaucoup de pays affirment sans pour autant avoir réalisé d’enquête sur le sujet, qu’il n’y a aucun cas de vente d’enfant, de prostitution infantile ou de pornographie mettant en scène des enfants sur leur territoire, il serait intéressant de savoir si la République des Maldives envisage de procéder à une analyse approfondie de la situation des enfants qui ne se borne pas à rassembler des informations sur l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Il serait toutefois utile de connaître l’ampleur du tourisme sexuel et les facteurs qui favorisent ce phénomène, et de savoir quels sont les atolls les plus touchés par ce fléau.

20.Il serait en outre intéressant de savoir si, dans le cadre de la mise en place de la ligne téléphonique spéciale destinée aux enfants, l’État partie travaille de concert avec Child Helpline International − réseau global de lignes vertes œuvrant pour la protection des droits de l’enfant − ou avec des organisations non gouvernementales, et à quel stade en est ce projet, compte tenu que ce service devait devenir opérationnel à la fin de 2008. Cette ligne sera-t-elle exclusivement réservée aux enfants et accessible depuis tous les atolls?

21.La délégation voudra bien indiquer quel type d’assistance l’Unité de la protection de la famille et de l’enfant (UPFE) relevant du Service de police des Maldives offre aux victimes des crimes visés par le Protocole facultatif, et en quoi consistent les services de réadaptation psychosociale et de réinsertion proposés par les centres de protection sociale mis en place dans différents atolls par le Ministère de la condition féminine et de la famille. Enfin, un complément d’information serait le bienvenu sur les programmes de sensibilisation destinés à faire connaître aux enfants les moyens dont ils disposent pour se protéger contre ces crimes.

22.Mme SMITH se félicite du degré d’indépendance dont jouit désormais le pouvoir judiciaire et estime que les cours de formation continue destinés aux juges devraient être dispensés par des organisations non gouvernementales de façon à préserver cette indépendance. Elle souhaiterait savoir si l’État partie a érigé en infractions pénales les actes et activités visés à l’article 3 du Protocole facultatif, et quelles mesures il envisage de prendre pour assurer toute l’assistance appropriée aux victimes des infractions visées dans le Protocole facultatif, et veiller à ce que celles-ci ne soient pas passibles de poursuites.

23.M. ZERMATTEN se dit préoccupé par la pratique qui veut que les familles démunies confient parfois leur enfant à un autre couple et souligne que l’absence de contrôle de l’État en la matière peut ouvrir la voie à la vente d’enfants. Il souhaiterait savoir si le droit interne porte interdiction de l’utilisation d’enfants à des fins d’exploitation économique et si, en vertu de la législation nationale, les personnes morales impliquées dans des activités à caractère pédopornographique s’exposent à des poursuites pénales.

24.Il serait intéressant de savoir si, dans le cadre de l’adoption de la nouvelle législation relative à la justice pour mineurs, l’État partie envisage de remplacer les confrontations qui ont actuellement lieu entre les auteurs présumés des actes délictueux et les victimes par des enregistrements audiovisuels, de manière à ce que les mineurs soient préservés au stade de l’audition.

25.M. CITARELLA demande si les instruments internationaux en général, et le Protocole facultatif en particulier, priment le droit interne, et si le Protocole est bien connu de tous, y compris des Parlementaires et des membres de l’exécutif.

26.La délégation pourra indiquer si, dans le cadre de la révision de son Code pénal, l’État partie entend adopter des dispositions portant expressément interdiction de la vente d’enfant et du transfert d’organes.

27.M. FILALI souhaite savoir si une disposition du droit positif appliqué dans l’État partie peut aller à l’encontre d’une injonction légitime de la charia, et s’il est prévu que le nouveau Code pénal fasse une distinction entre l’infraction de vente d’enfant, celle de prostitution d’enfants et celle de pornographie mettant en scène des enfants, plutôt que de les regrouper comme c’est le cas actuellement sous l’appellation d’«inconduite sexuelle». Il serait également intéressant de savoir s’il est prévu que ledit Code incrimine le tourisme sexuel.

28.Il conviendrait que la délégation indique si un enfant peut, en vertu du droit positif, être poursuivi au cas où il aurait eu des rapports sexuels interdits (zina), ou si en pareilles circonstances, il est systématiquement perçu comme étant victime.

29.La délégation pourrait en outre préciser quel traitement est réservé dans l’État partie aux personnes qui ont commis un crime visé par le Protocole facultatif à l’étranger, et si ce traitement varie selon la nationalité de l’auteur présumé de l’infraction et celle de la victime.

30.La PRÉSIDENTE demande si le Conseil national pour la protection des droits de l’enfant existe toujours et, dans l’affirmative, quel rôle il joue, de qui il se compose et s’il a déjà pris des mesures en application des dispositions du Protocole. Elle voudrait savoir si la police et le ministère public ont créé des équipes chargées d’enquêter sur les délits liés à la pornographie sur Internet, et le cas échéant, si des poursuites peuvent être engagées contre les auteurs de ces crimes.

31.Enfin, rappelant la singularité géographique de l’État partie, dispersé sur une multitude d’îles, la Présidente se demande comment l’État partie parvient à diffuser le Protocole facultatif à l’ensemble de la population − enfants, adolescents, familles, enseignants, chefs traditionnels, entre autres.

32.Mme LEE (Rapporteuse pour les Maldives, pour le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) aimerait savoir si l’État partie envisage d’adhérer à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, les Maldiviens étant de plus en plus nombreux à se tourner vers l’étranger pour adopter. Elle se demande si la multiplication des maisons d’hôtes et des stations touristiques à l’échelle du pays, ainsi que des safaris en bateau autour des atolls, n’entrave pas la lutte contre la prostitution infantile et la vente d’enfants. Enfin, elle voudrait savoir quel organisme est chargé d’effectuer le suivi des enfants placés dans des familles d’accueil sur l’île de Malé.

La séance est suspendue à 11 h 5; elle est reprise à 11 h 30.

33.Mme JAMEEL (Maldives) dit que divers partenaires ont été consultés dans le cadre de l’élaboration du rapport à l’examen, tant au stade de la collecte d’informations au début du processus que de l’approbation du texte final.

34.Les organisations de la société civile ont commencé à œuvrer en faveur de la protection des droits de l’enfant il y a environ cinq ans. Plusieurs d’entre elles, dont CARE Society et Society for Health Education, ont largement contribué à la transformation politique et sociale du pays depuis 2004, notamment en menant des campagnes de sensibilisation.

35.De nombreux partenaires ont désormais connaissance de l’existence du système «Maldives Info», mis à jour sur une base annuelle.

36.Une enquête nationale a été menée en 2006-2007 sur l’incidence de la violence faite aux femmes et aux enfants, mais compte tenu du tabou qui entoure ces questions, elle a été intitulée «Enquête sur le vécu des femmes». Elle est malheureusement incomplète en ce sens qu’elle ne s’est pas intéressée à la situation des enfants âgés de moins de 15 ans, et qu’elle ne couvre pas l’exploitation des enfants à des fins commerciales, la pornographie infantile ni la vente d’enfants.

37.Mme Jameel déplore vivement que le Ministère de la condition féminine et de la famille, auquel elle appartenait, ait été dissous après quatorze ans d’existence, et affirme qu’elle-même et ses anciens collègues ne manquent jamais une occasion de plaider en faveur de sa reconstitution. Aussi invite-t-elle les membres du Comité à formuler une recommandation dans ce sens à l’issue de l’examen du rapport initial de son pays sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

38.M. YOOSUF (Maldives) dit que la conception de la base de données nationale sur la protection de l’enfance a commencé en 2007 avec l’aide de l’UNICEF, et que le logiciel d’exploitation de cette base devrait être fonctionnel d’ici la fin du premier trimestre 2009, après quoi des programmes de formation pourront être dispensés aux personnes intéressées.

39.Mme JAMEEL (Maldives) dit qu’on ne peut que se féliciter du fait que le pouvoir judiciaire soit aujourd’hui tout à fait indépendant car il a pu arriver autrefois que des personnes influentes interviennent dans des procédures ayant trait à des violations des droits de l’enfant et que les tribunaux prononcent des décisions en faveur de l’auteur des violations. Mme Jameel se dit toutefois préoccupée par «l’arrogance» dont font preuve certains professionnels de la justice qui restent insensibles aux questions relatives aux enfants. À la fin de 2007, par exemple, une enfant de 12 ans a été violée pendant son sommeil par quatre hommes sous les yeux de son jeune frère âgé de 10 ans. Le tribunal a conclu que l’enfant était consentante parce qu’elle n’a pas crié, fait révélateur de l’ignorance des juges en matière de psychologie et de comportement de l’enfant. Le Ministère de la condition féminine et de la famille a alors beaucoup contribué à ce qu’il soit fait appel de cette décision.

40.M. KOTRANE demande si, en vertu de la législation de l’État partie, une enfant de 12 ans peut être considérée comme consentante.

41.Mme JAMEEL (Maldives) dit que la question du consentement a toujours fait l’objet de polémiques. La plupart des juges considèrent que la puberté sert de référence en la matière et estiment qu’un enfant qui a atteint l’âge de la puberté a la maturité nécessaire pour être éventuellement consentant. Le Ministère de la santé et de la famille souhaiterait pouvoir dialoguer avec les professionnels de la justice afin de les sensibiliser aux dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’enfant. Les tribunaux tiennent en effet rarement compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans les procédures judiciaires car ce principe ne figure pas dans les lois et réglementations des Maldives.

42.M. PARFITT demande ce que fait l’État partie pour que le viol soit qualifié comme il se doit dans le Code pénal. Il voudrait aussi savoir si les professionnels de la justice se montrent désireux de bénéficier d’une formation aux dispositions de la législation.

43.Mme JAMEEL (Maldives) dit que le Ministère de la santé et de la famille collabore avec la Commission de la magistrature, organe indépendant créé en vertu de la Constitution qui a pour mission de mener une action éducative auprès des professionnels de la justice. À l’occasion de l’affaire susmentionnée, le Ministère de la santé et de la famille a pu engager des discussions, notamment avec le Ministère de la justice, et obtenir que l’article 173 des Règles en matière d’infractions pénales soit modifié et qu’y soient intégrés différents types d’infractions sexuelles commises à l’encontre des enfants, notamment le fait de faciliter et d’encourager la prostitution d’enfants, et que les peines non privatives de liberté jusqu’alors prévues pour les auteurs de tels actes soient remplacées par des peines privatives de liberté. Cette modification a été adoptée le 11 mai 2008.

44.Mme SMITH demande si une loi définit l’âge du consentement aux relations sexuelles.

45.M. FILALI demande si les professionnels de la justice ne seraient pas des conservateurs enclins à appliquer strictement la charia et si les Maldives ne souffriraient pas d’un manque de droit positif qui l’empêcherait d’envisager certaines questions du point de vue des instruments internationaux et de tenir compte des évolutions du monde moderne.

46.M. CITARELLA dit qu’il serait souhaitable que l’État partie se dote d’une législation qui disposerait que toute personne qui aurait une relation sexuelle avec un enfant n’ayant pas atteint l’âge du consentement serait passible de poursuites pénales.

47.Mme JAMEEL (Maldives) dit que la modification qui a été introduite à l’article 173 des Règles en matière d’infractions pénales fixe à 16 ans l’âge du consentement aux relations sexuelles, mais qu’aucune affaire n’a encore été instruite en vertu de cet article. L’absence de droit positif est en effet une des raisons de la situation actuelle. Les Maldives ne disposent pas actuellement de lois qui traiteraient spécifiquement des questions visées par les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Les autorités ont entrepris de modifier la législation relative à la protection des droits de l’enfant mais, en raison des profondes réformes qui s’opèrent dans le pays et de l’élaboration de la nouvelle Constitution, de nombreux projets de loi n’ont toujours pas été examinés par le Parlement.

48.Le Parlement qui sera élu en mars 2009 sera composé de 75 nouveaux députés et le Ministère de la santé et de la famille, et en particulier son Département de la protection de l’enfance et de la famille, devra alors sensibiliser ses nouveaux interlocuteurs aux questions touchant aux droits de l’enfant. Le Ministère s’est assuré que les projets de loi, les politiques et les plans d’actions relatifs aux droits de l’enfant constitueraient une priorité pour le nouveau Gouvernement. Un nouveau budget lui a été octroyé, qui lui permettra de poursuivre ses travaux et de faire en sorte que le projet de loi qu’il élabore sur la protection des droits de l’enfant soit en conformité avec les instruments internationaux auxquels sont parties les Maldives.

49.La PRÉSIDENTE demande comment les dispositions du Protocole facultatif sont prises en compte dans le projet de nouveau code pénal.

50.Mme JAMEEL (Maldives) dit que toutes les dispositions du Protocole facultatif n’ont pas été intégrées dans le projet de nouveau code pénal mais que la délégation veillera à ce que ce soit fait à son retour aux Maldives. Le projet de nouveau code pénal énonce toutefois en détail les différents types d’infractions qui peuvent être commises à l’encontre des enfants et définit le principe du consentement.

51.La Commission des droits de l’homme sera conservée par le nouveau gouvernement car c’est un organe créé en vertu de la Constitution. Elle sera totalement indépendante. Le Plan national d’action pour le bien-être de l’enfant maldivien pour la période 2001-2011 est mis en œuvre au moyens de plans d’action sectoriels, par exemple dans les domaines de l’éducation et de la santé. En 2008, il a fait l’objet d’une évaluation, et il est apparu que les enfants handicapés n’avaient pas été suffisamment pris en considération. Un plan d’action a donc été élaboré à leur intention. Le Plan national d’action est aussi mis en œuvre par l’intermédiaire du Septième plan national de développement, qui dispose d’un mécanisme d’évaluation et de suivi, et dont l’exécution est régulièrement contrôlée par l’ancien Ministère de la planification et du développement national, aujourd’hui appelé Département de la planification et du développement national. Il n’existe toutefois pas d’organe spécifiquement chargé du suivi de la mise en œuvre de la Convention. En vertu de son mandat, la Commission des droits de l’homme a notamment pour fonction d’assurer une surveillance et une évaluation indépendantes de la situation des droits de l’enfant. Il conviendrait cependant que le Gouvernement dispose de son propre mécanisme de suivi de la mise en œuvre de la Convention.

52.La PRÉSIDENTE dit qu’il serait souhaitable que l’État partie adopte un plan d’action portant spécifiquement sur les principes consacrés dans le Protocole facultatif.

53.M. PARFITT demande si la Commission des droits de l’homme est habilitée à surveiller la mise en œuvre de la Convention.

54.MmeLEE (Rapporteuse pour les Maldives, pour le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) dit qu’il serait important, comme l’a mentionné Mme Jameel, que le Gouvernement se dote d’un mécanisme de coordination et d’évaluation de la mise en œuvre de la Convention. Une surveillance indépendante est par ailleurs nécessaire et il ne faudrait pas que la Commission des droits de l’homme soit éclipsée en la matière par le mécanisme de coordination et de suivi qui serait créé au sein du Gouvernement. La Commission doit en effet pouvoir recevoir des plaintes, enquêter sur les violations signalées et surveiller les actions du Gouvernement relatives à la protection des droits de l’enfant. Mme Lee voudrait aussi savoir quel est actuellement l’organe chargé de surveiller la mise en œuvre du Protocole facultatif et quel est le rôle du Conseil national pour la protection des droits de l’enfant dans le nouveau Gouvernement. Elle demande aussi qui surveille la situation et la pratique en matière de mariages précoces.

55.Mme JAMEEL dit que l’Unité «Planification, suivi et études» du Département de la protection de l’enfance et de la famille nouvellement institué est aujourd’hui l’autorité chargée de coordonner la mise en œuvre de la Convention.

56.Auparavant, tout enfant qui désirait se marier avant l’âge de 18 ans devait s’adresser au Ministère de la condition féminine et de la famille, qui donnait un avis au tribunal afin que le juge prenne une décision en toute connaissance de la situation de l’enfant. Les juges ont ensuite estimé que cette pratique était contraire à la Constitution et au principe de l’indépendance de la justice. Le Ministère de la santé et de la famille souhaiterait aujourd’hui pouvoir collaborer avec les tribunaux des affaires familiales et notamment obtenir des données sur le nombre et le type d’affaires relatives à des mariages précoces qui ont été instruites.

57.La PRÉSIDENTE demande comment fonctionne la Commission des droits de l’homme, qui sont ses membres, si elle surveille aussi la mise en œuvre du Protocole facultatif, si elle a subi des changements depuis la formation du nouveau Gouvernement, si elle reçoit des plaintes émanant d’enfants et s’il existe un médiateur indépendant.

58.Mme JAMEEL (Maldives) dit que la Commission des droits de l’homme a son propre mandat indépendant. Son rôle n’a pas changé avec la mise en place du nouveau Gouvernement. Les Maldives ne se sont pas encore dotées d’un médiateur. C’est aujourd’hui le Département de la protection de l’enfance et de la famille qui joue ce rôle et reçoit les plaintes formulées par des enfants.

59.La PRÉSIDENTE demande si des enfants ont pu bénéficier d’un soutien de la part de la Commission des droits de l’homme s’agissant de violations des droits visés par le Protocole facultatif.

60.Mme JAMEEL (Maldives) répond qu’à sa connaissance la Commission des droits de l’homme ne peut recevoir des plaintes émanant d’enfants. Il est certain que la Commission devrait être dotée d’un mécanisme permettant aux enfants de signaler des cas de violations de leurs droits.

61.M. YOOSUF (Maldives) dit que les Maldiviens n’utilisent pas la permanence téléphonique mise en place par l’Unité de la protection de la famille et de l’enfant parce qu’ils ne sont pas suffisamment informés de l’existence de cette permanence téléphonique et non parce qu’ils ne font pas confiance aux services de police.

62.Mme JAMEEL dit que les centres de protection sociale créés dans les atolls sont destinés à fournir une protection temporaire aux enfants qui en ont besoin. En 2008, l’accent a été mis sur la formation des personnels de ces centres, qui n’ont repris le travail qu’en janvier 2009. Jusqu’à cette date, les enfants qui en avaient besoin ont été accueillis dans un centre situé dans la capitale. Les centres de protection sociale travaillent en étroite coopération avec les autorités de police et les services de santé locaux. Compte tenu du fait qu’il est très difficile d’éloigner et de faire condamner les personnes qui ont commis des infractions sexuelles à l’encontre d’enfants, il arrive fréquemment qu’un enfant victime continue à vivre à proximité de son agresseur. Pour éviter de telles situations, et bien qu’il soit en général préférable de favoriser le maintien des enfants dans leur famille, les services de protection sociales privilégient aujourd’hui le retrait de l’enfant de l’environnement où il subit des violences.

63.Le Service de la famille et du développement communautaire, qui relève du Département de l’enfant et de la famille, est le principal service chargé de la prévention au sein du Gouvernement. Il fournit des ressources et un soutien aux centres de la famille et de l’enfant, lesquels mènent des activités de prévention dans les communautés locales et les communautés insulaires. Des informations et des documents sont largement diffusés et sont incorporés au matériel pédagogique utilisé dans le cadre de la formation des policiers et des autres professionnels concernés. Ces mesures sont toutefois insuffisantes et le Ministère entend accentuer ses efforts en matière de prévention, notamment en mobilisant davantage les médias.

64.Le Gouvernement réalisera, au cours de l’année 2009, une étude exhaustive sur les questions visées par le Protocole; un partenariat a été mis en place à cette fin avec ECPAT.

65.Mme AIDOO exprime l’espoir que cette étude ne se limitera pas à l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales mais qu’elle portera sur l’ensemble des questions liées à la protection des enfants. L’État partie, compte tenu du coût d’une telle étude, pourrait peut-être envisager de solliciter le concours d’organisations comme l’UNICEF.

66.La PRÉSIDENTE dit que les organisations s’occupant d’exploitation sexuelle ont tendance à fonder leur action sur le Protocole de Palerme. Elle engage l’État partie à s’appuyer plutôt, dans le cadre de son étude, sur le Protocole facultatif car celui-ci a une portée beaucoup plus large que le Protocole de Palerme s’agissant des droits des enfants.

67.Mme JAMEEL (Maldives) indique qu’une étude de portée nationale sur la violence à l’encontre des enfants a été réalisée et que ses résultats seront publiés dans les mois qui suivent.

68.Pour ce qui est de la permanence téléphonique spécialement destinée aux enfants, toutes les démarches nécessaires à sa mise en place avaient été effectuées et elle était prête à entrer en service lorsque le Gouvernement a changé d’avis sur la question. Ce service sera néanmoins lancé avant avril 2009.

69.Le transfert d’organes, bien qu’il ne soit pas pratiqué dans le pays, fera l’objet de dispositions dans le futur projet de loi sur la protection de l’enfance. Le travail forcé, quant à lui, s’il ne fait pas l’objet de dispositions législatives particulières, est considéré comme une forme d’exploitation; la loi sur l’emploi fixant l’âge minimum de l’accès à l’emploi à 16 ans, tout enfant embauché n’ayant pas atteint cet âge est considéré comme étant victime de travail forcé.

70.La PRÉSIDENTE dit que, bien que l’État partie indique que l’adoption en tant que telle ne se pratique pas dans le pays, il pourrait y avoir des cas d’enfants vendus à une famille ou enlevés à une famille démunie pour être confiés à une autre famille; elle s’inquiète de ce que de telles pratiques ne fassent pas l’objet d’un contrôle de la part de l’État. Il serait utile de savoir quelles dispositions législatives régissent les adoptions internationales et si l’État partie envisage de ratifier la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

71.Mme JAMEEL (Maldives) dit qu’aucun cas d’adoption internationale n’a été recensé dans le pays et que l’adoption n’y est pas autorisée car elle est considérée comme contraire à la charia. L’État partie est cependant en train d’examiner la possibilité de retirer la réserve qu’il a formulée concernant les dispositions de la Convention relatives à l’adoption car celles-ci prévoient que la protection de remplacement fournie à un enfant peut avoir la forme de la kafalah. Les autorités sont toutefois préoccupées par le fait que dans certaines parties du pays des enfants sont parfois placés illicitement dans une famille au prétexte de leur offrir une vie meilleure. Elles donnent parfois suite à des informations faisant état de telles situations mais la surveillance exercée en la matière n’est pas systématique. Le Département de la protection de l’enfant et de la famille se rendra, au cours de l’année, dans les îles dans lesquelles se pratiquent ces adoptions informelles afin de rencontrer les parties concernées et de recueillir des informations.

72.La PRÉSIDENTE dit que la kafalah est davantage une forme d’accueil que d’adoption. Elle se demande, à cet égard, si le Gouvernement réfléchit à la possibilité de reconnaître la notion d’adoption.

73.Mme JAMEEL (Maldives) indique que le Gouvernement actuel n’a pas encore débattu de cette question.

74.M. SIDDIQUI souhaiterait savoir si le nouveau Gouvernement envisage de modifier certaines lois de la charia afin de les adapter aux circonstances actuelles, comme la tradition islamique l’autorise et comme cela a été fait dans certains pays.

75.Mme JAMEEL (Maldives) indique qu’un débat sur cette question a été engagé. Par ailleurs, le projet de nouveau code pénal, qui doit être adopté par le Parlement, est un texte très progressiste, qui intègre les principes de la charia comme les principes consacrés par les instruments internationaux. Le Gouvernement a en outre créé un ministère des affaires islamiques qui est chargé d’entretenir un dialogue avec les oulémas et de veiller, notamment, à ce que la charia soit considérée à la lumière de l’intérêt supérieur de l’enfant.

76.Un enfant peut être poursuivi en justice pour zina car les juges ont tendance à interpréter cette notion de manière étroite.

77.La législation nationale prime les instruments internationaux. Lorsque le Gouvernement ratifie un tel instrument, le Parlement doit adopter une législation permettant sa mise en œuvre, ce qui oblige souvent le Gouvernement à appliquer les instruments internationaux par des mesures administratives. La situation évolue cependant car le Parlement est davantage sensibilisé à l’importance des conventions internationales et il veille de plus en plus à ce que les obligations internationales contractées par le pays soient prises en compte par la législation nationale. En outre, la nouvelle Constitution prévoit que tout instrument international que le Gouvernement envisage de signer ou de ratifier doit être préalablement examiné et approuvé par le Parlement, ce qui a pour effet d’inciter celui-ci à adopter une loi d’application y relative.

78.La PRÉSIDENTE demande à la délégation de préciser si le Parlement doit approuver tous les instruments internationaux qui ont été ratifiés par les Maldives.

79.Mme JAMEEL (Maldives) dit que ce n’est pas le cas pour les instruments qui ont déjà été ratifiés mais que ce le sera pour tous ceux qui seront ratifiés dans l’avenir, ce dont elle se félicite car cela responsabilisera les parlementaires et leur permettra de mieux connaître ces textes.

Rapport initial des Maldives sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

80.M. POLLAR (Rapporteur pour les Maldives, pour le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés) se félicite de ce que l’âge minimal de l’enrôlement dans les forces armées de l’État partie ait été relevé à 18 ans. Il se demande toutefois si des lacunes dans l’application de cette disposition ont été recensées, à savoir si des mineurs de moins de 18 ans parviennent à s’enrôler frauduleusement dans l’armée. Les procédures d’enregistrement des naissances ont-elles toute la rigueur voulue? Il convient également de saluer le fait que les personnes qui souhaitent s’engager dans les forces armées sont soumises à plusieurs examens visant à évaluer leur maturité affective.

81.M. Pollar souhaiterait avoir des précisions sur la contribution des ONG à l’élaboration du rapport ainsi que sur les rapports qu’entretient le Gouvernement avec celles-ci dans le cadre de leurs efforts respectifs pour promouvoir la Convention et ses protocoles facultatifs. Il souhaiterait également que l’État partie fasse part de ses vues concernant l’absence, dans la législation nationale, de disposition interdisant l’enrôlement de mineurs dans les forces armées.

82.Le programme de sensibilisation mis en place par l’État partie pour dissuader les enfants de commettre des actes de violence devrait être davantage axé sur l’implication des enfants dans les conflits. Il serait utile de savoir si une étude a été faite pour recenser les enfants qui ont été enrôlés dans les forces armées avant le relèvement de l’âge de l’enrôlement à 18 ans et pour évaluer les conséquences psychologiques de cet enrôlement. La délégation pourrait aussi préciser s’il y a aux Maldives des enfants qui ont été impliqués dans un conflit armé à l’étranger et indiquer quelles mesures ont été prises à leur égard.

83.Il serait utile d’avoir des informations sur les mécanismes de surveillance de l’application du Protocole facultatif qui ont été mis en place, ainsi que sur les mesures qui ont été prises pour garantir que des armes transitant par l’État partie ou provenant de celui-ci ne soient pas utilisées dans des régions dans lesquelles des enfants sont impliqués dans un conflit armé. M. Pollar souhaiterait également savoir quelles mesures ont été prises pour garantir que toute personne qui enrôle un enfant dans les forces armées, que cet enfant soit maldivien ou non et que cette personne vive aux Maldives ou à l’étranger, soit poursuivie en justice. L’État partie, enfin, est invité à préciser s’il traite les questions liées à l’interdiction de l’implication des enfants dans les conflits armés dans le cadre de la coopération qu’il entretient avec d’autres États.

84.M. KOTRANE souhaiterait savoir si l’État partie envisage d’adopter des dispositions législatives interdisant l’utilisation d’enfants par des groupes armés distincts de ses forces armées, notamment des groupes religieux extrémistes et des gangs.

85.M. PARFITT demande si la Commission nationale des droits de l’homme est habilitée à veiller à ce que le Ministère de la défense respecte les dispositions du Protocole facultatif et si la législation prévoit des sanctions pénales applicables aux personnes ou aux entités qui enfreignent les dispositions du Protocole facultatif, en particulier celles qui ont trait au recrutement. Il souhaiterait, par ailleurs, savoir quelles mesures concrètes ont été engagées pour garantir que les enfants réfugiés ou demandeurs d’asile qui auraient pu être impliqués dans des hostilités soient repérés et pris en charge.

86.M. CITARELLA souhaiterait savoir si le Protocole facultatif est suffisamment diffusé dans le pays, en particulier au sein des institutions militaires, et si les écoles militaires sensibilisent leurs élèves aux dispositions du Protocole et à la question des enfants étrangers venant de pays qui ont été le théâtre d’un conflit armé.

87.M. FILALI se demande de quel ministère relèvent les écoles militaires, qui établit leur budget et quelle est la teneur de leurs programmes de formation. Ceux-ci comprennent-ils l’entraînement au maniement des armes à feu? Abordent-ils la question de la promotion de la paix? La délégation pourra peut-être aussi préciser s’il existe, parallèlement à l’examen des actes de naissance, d’autres moyens de vérifier l’âge des recrues.

La séance est levée à 12 h 45.

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