COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT
Quarante-quatrième session
COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1220e SÉANCE
tenue au Palais Wilson, à Genève,le lundi 29 janvier 2007, à 10 heures
Président: M. DOEK
SOMMAIRE
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
La séance est ouverte à 10 h 5.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés [CRC/C/OPAC/KGZ/1; liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/KGZ/Q/1); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/KGZ/Q/1/Add.1)]
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants [CRC/C/OPSC/KGZ/1; liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/KGZ/Q/1); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/OPSC/KGZ/Q/1/Add.1)]
1. Sur l’invitation du Président, la délégation kirghize prend place à la table du Comité.
2.Mme BOROMBAEVA (Kirghizistan) souligne que le Kirghizistan a une population très jeune puisque 38,1 % de ses 5 millions d’habitants sont des enfants et des adolescents. Malgré les troubles politiques de 2005, la menace d’un effondrement de l’économie nationale a pu être écartée et la stabilité macroéconomique préservée, le taux de croissance réel du PIB ayant atteint 2,6 % en 2006. Entre 2004 et 2005, les recettes budgétaires ont augmenté de 10 % et en 2005 la part du budget consacrée aux dépenses sociales représentait 43,1 %. Le Kirghizistan a bien résisté au choc de la transition démocratique, laquelle s’est toutefois accompagnée d’une augmentation sensible de la pauvreté. Des mesures concrètes ont été prises pour contrecarrer cette tendance et une stratégie de développement pour 2007‑2010 est en cours d’élaboration.
3.Une trentaine de lois et de textes normatifs concernent la protection de l’enfance, dont les Codes civil et pénal, le Code du travail et la loi sur la protection sociale et juridique contre la violence familiale, et la loi contre la traite des personnes. Les principes fondamentaux de la Convention ont été incorporés dans la nouvelle Constitution, adoptée en décembre 2006.
4.Les deux rapports initiaux à l’examen ont été élaborés en collaboration avec des représentants de la société civile, ainsi qu’avec l’UNICEF, l’OIT et la Banque asiatique de développement, et l’organisation «EveryChild». Les représentants de la société civile n’ont pas établi de rapport parallèle sur l’application des deux Protocoles à la Convention par le Kirghizistan.
5.Avec le soutien du bureau de l’UNICEF au Kirghizistan et la collaboration de toutes les parties prenantes, le Gouvernement et la société civile ont élaboré un projet de code de l’enfant que le Parlement a approuvé en juin et le Président de la République signé en août 2006. Ce texte, qui reprend presque point par point la Convention, prévoit notamment une protection du droit fondamental de tout enfant de vivre et de grandir au sein de sa famille et des dispositions régissant les activités et les compétences des services publics chargés de la protection de l’enfance. L’article 25 du Code interdit expressément la traite des enfants, la prostitution d’enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. La question de la création d’un organe chargé spécifiquement des droits de l’enfant est en cours d’examen.
6.En vertu d’un nouvel article du Code pénal introduit en 2003 (art. 124 − Traite des personnes) toute personne coupable de traite encourt une peine maximale de 20 ans de prison si la victime est mineure, l’âge de la victime constituant une circonstance aggravante. Le Code pénal incrimine l’incitation à des actes à caractère sexuel (art. 131), les relations sexuelles et autres actes à caractère sexuel avec un mineur de 16 ans (art. 132) et les attentats à la pudeur sur un mineur de 14 ans (art. 133).
7.Un plan contre la traite de personnes pour la période 2002‑2005 a été adopté et un conseil national chargé de cette question a été constitué en avril 2002. La loi portant ratification par le Kirghizistan de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, du Protocole à ladite Convention visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, du Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à ladite Convention et de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a été adoptée en avril 2003.
8.En 2005, le Gouvernement a soutenu une vingtaine de projets à caractère social, dont un prévoyant la création d’un centre d’hébergement temporaire pour les enfants des rues. Dans le prolongement d’une conférence nationale sur la situation des enfants au Kirghizistan organisée en collaboration avec l’UNICEF et l’Agence suédoise de développement international et après la signature le 20 janvier 2006 du décret présidentiel sur les mesures à prendre d’urgence afin d’améliorer la situation des enfants, un projet de plan national d’action pour 2007‑2010 visant à éradiquer les pires formes de travail des enfants et à promouvoir la réadaptation et la réinsertion de ces enfants a été élaboré; il est en cours d’examen par le Parlement.
9.Un projet de campagne médiatique sur les droits de l’enfant pour 2007‑2010 a été mis au point et des lignes directrices sur la sortie et la prise en charge des enfants placés en internat d’État ont été élaborées avec l’appui de l’UNICEF. Une enquête nationale sur la maltraitance d’enfants dans les institutions d’État a été menée pour sensibiliser la population à ce problème et y trouver des solutions. Un groupe de travail a été chargé, en application d’un décret présidentiel, d’aligner la législation relative à la justice pour mineurs sur le Code de l’enfant.
10.Le Kirghizistan est confronté à diverses difficultés, dont l’émigration et l’immigration, la pauvreté, les familles monoparentales, la violence domestique et le travail des enfants. Depuis le démantèlement de l’URSS, l’État a dû assumer de nouvelles responsabilités, en particulier protéger les réfugiés. À la fin 2006, le Kirghizistan comptait 1 396 réfugiés, dont 309 enfants.
11.Un concours sur le thème de la prévention de la marginalisation et de l’exploitation du travail des enfants, auquel 10 millions de soms ont été alloués, a été lancé avec l’appui de l’UNICEF. Tout récemment a eu lieu une conférence sur les fondements juridiques de la protection de l’enfant, qui a porté sur: l’amélioration de la législation et la création d’un mécanisme de suivi de l’application du Code de l’enfant; la réforme des dispositions fondamentales de la législation protégeant les droits de l’enfant en ce qui concerne le travail, la santé et l’éducation; la mise en œuvre des deux Protocoles à la Convention; le renforcement des activités de la société civile dans le domaine de la protection de l’enfance.
12.Le Kirghizistan sait que beaucoup lui reste à faire pour s’acquitter des obligations lui incombant en vertu des deux Protocoles à la Convention et il est déterminé à intensifier sa collaboration avec les organismes internationaux, en particulier l’UNICEF, à cette fin.
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés
13.Mme LEE fait observer que le rapport n’a pas été établi conformément aux directives générales concernant la forme et le contenu des rapports initiaux. Elle demande des renseignements sur la mise en œuvre des paragraphes 1 et 2 de l’article 6 du Protocole, en particulier sur les mesures prises pour assurer l’application efficace de ces dispositions, sur les organes publics chargés de cette tâche et les mécanismes d’évaluation périodique existants.
14.Certains établissements scolaires relèveraient encore du Ministère de la défense et des éclaircissements seraient souhaitables à ce sujet. La délégation voudra bien expliquer pourquoi le lycée «Daniyar Asanov» a été placé sous l’autorité du Ministère de la défense et préciser combien d’élèves y sont inscrits et à partir de quel âge ils y sont admis.
15.Le Comité souhaite savoir si des ressources suffisantes ont été affectées à l’exécution du programme national «Nouvelle génération» et si un examen périodique en a déjà été effectué avec la participation d’enfants et d’ONG. La réponse à la question 2 de la liste des points à traiter étant très peu explicite, des précisions seraient nécessaires à ce sujet.
16.Il serait utile de savoir quel pourcentage d’élèves sortant des écoles militaires s’engagent dans l’armée, si ces élèves sont tenus de s’enrôler et s’ils reçoivent un enseignement sur la Convention et le Protocole facultatif au cours de leurs études.
17.Mme OUEDRAOGO demande si les élèves des écoles militaires qui reviennent sur leur décision de faire une carrière militaire ont la possibilité de changer d’orientation, si des mesures sont prises pour éviter les bizutages dans ces établissements et si les écoles militaires sont couvertes par le groupe de travail créé pour lutter contre les violences et mauvais traitements dans les établissements publics.
18.Mme SMITH demande si les tribunaux du Kirghizistan ont compétence pour juger des nationaux ayant enrôlé des mineurs à l’étranger et des étrangers ayant enrôlé des mineurs kirghizes.
19.Le PRÉSIDENT aimerait savoir si le recrutement de mercenaires mineurs est sanctionné par la loi s’il a lieu à l’étranger et vise un enfant kirghize ou s’il est le fait d’un ressortissant kirghize. La délégation pourrait aussi indiquer si des services de conseil et de soutien psychologique sont, le cas échéant, mis à la disposition d’enfants réfugiés traumatisés par des conflits. Un complément d’information sur la nature du service de remplacement serait bienvenu.
La séance est suspendue à 10 h 50; elle est reprise à 11 h 5.
20.Mme BOROMBAEVA (Kirghizistan) explique que les deux rapports à l’examen ont été rédigés par le Gouvernement et n’ont donné lieu qu’à quelques tables rondes avec des représentants de la société civile car la situation politique était extrêmement troublée en 2005 et 2006. Depuis, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail représentatif de l’ensemble des ministères et de nombreuses ONG, qui est appelé à établir les prochains rapports destinés aux organes conventionnels. Les directives relatives à l’élaboration des rapports seront ainsi pleinement respectées à l’avenir et des ONG mettent du reste déjà la main à leurs rapports alternatifs.
21.Beaucoup a été fait en matière de soutien psychologique. C’est la société civile qui a rédigé la proposition de loi sur la protection juridique de la famille, soumise au Parlement assortie de 36 000 signatures. Ce texte vise les violences à l’encontre des enfants et de tout autre membre de la famille. Plusieurs centres de crises et lignes téléphoniques spéciales ont été mis en place depuis son adoption.
22.Le bizutage est en recul depuis la révision de la loi sur le service militaire et grâce à l’action des comités de mères de soldats, des ONG et du Médiateur.
23.L’application du Protocole facultatif relève actuellement d’une commission interministérielle dirigée par le Vice-Premier Ministre, mais le Parlement étudie la possibilité de créer un organe chargé de la protection des droits de l’enfant, qui assumerait la responsabilité de la mise en œuvre de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant.
24.M. USENALIEV (Kirghizistan) dit que le lycée militaire «Daniyar Asanov» relevait jusqu’en 2005 du Ministère de l’éducation, sauf pour les cours d’éducation physique et de préparation au service militaire, qui dépendaient du Ministère de la défense. Cette double compétence posait des problèmes et le lycée a donc été confié au Ministère de la défense.
25.L’entraînement militaire concerne exclusivement les garçons des classes 9 à 11. Des cas isolés ne peuvent pas être exclus, mais tout est fait pour éliminer les bizutages. C’est pourquoi les élèves de 9e sont séparés des classes suivantes et un conseil de discipline a été constitué.
26.Des services d’aide psychologique sont proposés dans les centres départementaux de ressources spécialisées, dotés notamment de psychologues et de travailleurs sociaux. Les cas les plus difficiles peuvent être examinés au Ministère du travail. Des établissements proposant un enseignement en tadjik ont été mis sur pied, dans le sud, pour les enfants réfugiés du Tadjikistan.
27.Mme BOROMBAEVA (Kirghizistan) souligne que les élèves des établissements d’enseignement militaires sont libres de s’inscrire dans un autre établissement s’ils souhaitent quitter la filière militaire. Un système d’équivalences permet de valider les années d’études effectuées à l’école militaire supérieure de Bichkek dans le reste de l’enseignement supérieur.
28.La délégation tient à la disposition du Comité un exemplaire du «passeport social» délivré à chaque famille de réfugiés, tous ses membres étant inscrits sur ce document, avec les informations pertinentes, comme les services psychologiques dont ils pourraient avoir besoin.
29.M. SUBANOV (Kirghizistan) ajoute que les comités de mères de famille en place dans les établissements militaires peuvent examiner tous litiges portés à leur attention. Le service militaire, dont la durée a été réduite, est obligatoire pour tous les jeunes hommes en bon état de santé. Les élèves de l’école militaire supérieure de Bichkek y sont admis dès l’âge de 17 ans. Le port d’armes est réservé aux personnes de plus de 19 ans et la loi sur les armes interdit formellement de remettre une arme à un mineur. À sa connaissance, aucun mineur kirghize ne participe ni n’a participé à un conflit armé.
30.M. POLLAR dit que selon certaines informations les pays de l’ex-URSS vendraient massivement des armes à des groupes armés africains connus pour recruter des enfants et il aimerait donc savoir comment l’État partie veille à ce que des armes ne tombent pas entre les mains de tels groupes.
31.Le PRÉSIDENT demande si l’État partie interdit toute forme d’exportation d’armes de petit calibre vers des pays en conflit.
32.Mme BOROMBAEVA (Kirghizistan) répond que cela est effectivement interdit.
33.Le Ministre de la défense nommé après la révolution de 2005 s’est attaché énergiquement à rétablir l’ordre et à améliorer les conditions de vie dans les casernes et les cantonnements, y compris en luttant contre le bizutage. Du temps où il était député, il a été à l’initiative du service civil de remplacement − qui peut être choisi pour raisons familiales et s’effectuer en hôpital, par exemple. On lui doit aussi une revalorisation sensible des salaires des militaires.
34.Plus de 11 000 ONG sont présentes au Kirghizistan, dont 3 000 environ œuvrent en faveur de l’enfance. Il s’agit d’un véritable contre-pouvoir, au contrôle duquel sont soumises toutes les entités de l’État. Des représentants de la société civile ont été invités à participer à plusieurs débats parlementaires, dont un sur la mise en œuvre des instruments internationaux ratifiés. Parmi les questions soulevées figurait le financement, car il est vrai que de nombreuses initiatives pâtissent d’un manque de fonds, mais depuis deux ans le programme «Nouvelle génération» est inscrit au budget et bénéficie de crédits en progression, comme d’autres programmes s’inscrivant dans le cadre de la stratégie de développement de l’enfance.
35.L’éducation patriotique s’inscrit dans une logique de prévention et n’est aucunement liée à d’éventuels conflits armés; l’État la considère à ce titre dans la droite ligne du Protocole. Aux termes de la loi sur l’éducation, les parents ont un rôle à jouer dans le développement du patriotisme de leurs enfants.
36.M. FILALI demande si les élèves des établissements d’enseignement militaires sont mobilisables, par exemple en cas de troubles internes à l’ordre public.
37.M. SUBANOV (Kirghizistan) répond qu’ils ne sont en aucun cas mobilisables. Ils reçoivent un enseignement général complété par une préparation au service militaire, jusqu’à l’âge de 18 ans.
38.Le PRÉSIDENT demande si le Protocole facultatif est pris en considération dans la formation des écoles militaires, ainsi que dans la préparation au service militaire dispensée aux élèves des classes 10 et 11 (15 et 16 ans) dans les établissements d’enseignement général.
39.Mme ISABAEVA (Kirghizistan) explique qu’une formation sur les droits de l’homme, y compris sur le Protocole facultatif, figure dans les programmes des écoles militaires et des établissements d’enseignement général pour les classes 9 à 12.
40.M. USENALIEV (Kirghizistan) précise que le pays compte un seul lycée militaire, qui a pour objectif de permettre à chacun d’avoir accès à l’éducation. Il accueille en internat des enfants des régions reculées. Les places y sont très demandées. Dans les établissements d’enseignement général, les écoliers reçoivent une formation au patriotisme deux heures par semaine; les filles suivent des cours de secourisme. Le programme est élaboré en collaboration avec des ONG.
41.Mme BOROMBAEVA (Kirghizistan) ajoute que ce sont les parents qui choisissent d’envoyer leurs enfants au lycée militaire. Aucune pression n’est exercée sur les élèves pour les inciter à s’enrôler. Les châtiments corporels y sont également interdits.
42.Le PRÉSIDENT demande ce qu’il en est de la compétence extraterritoriale en matière de recrutement de mercenaires mineurs et rappelle que le Comité a pour objectif de promouvoir la mise en place d’une protection internationale qui permette d’empêcher partout l’enrôlement des enfants grâce à la poursuite systématique de tous ceux qui s’y livrent.
43.Mme ISABAEVA (Kirghizistan) dit que la question ne s’est pas encore posée au Kirghizistan, mais que l’accroissement des migrations pourrait favoriser ce genre de situation. Le Gouvernement a pris d’importantes mesures pour combattre la traite et le travail des enfants, mais elles ne suffisent pas à protéger ceux qui se trouvent à l’étranger. Il en va de même pour le recrutement d’enfants mercenaires et il faut donc agir en coopération avec les pays voisins, qui doivent eux aussi adopter les mesures requises, et peut-être instaurer un organe de coordination.
Rapport initial du Kirghizistan sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
44.MmeVUCKOVIC-SAHOVIC demande si le programme de promotion des droits de «Nouvelle génération» prévoit des activités relatives au Protocole facultatif.
45.Elle salue la récente adoption du Code de l’enfant, ainsi que la ratification de la Convention no 182 de l’OIT, de la Convention internationale contre la criminalité transnationale organisée et du Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, instruments qui ne peuvent que faciliter la mise en application du Protocole facultatif.
46.Il est en revanche regrettable que le rapport contienne si peu de renseignements sur les problèmes de la prostitution et de la pornographie. D’autres formes d’exploitation, comme l’exploitation par le travail, sont à peine abordées et aucune information n’est donnée sur la vente d’enfants, en particulier dans le contexte de l’adoption.
47.Le Protocole facultatif prime sur la législation interne, mais il reste à savoir si les tribunaux se fondent sur ses dispositions car il n’apparaît pas clairement quelles dispositions nationales incriminent les actes visés à l’article 2 du Protocole. Il ressort en outre du rapport que les personnes morales ne sont pas pénalement responsables.
48.L’État partie a entrepris nombre d’activités dans le domaine si essentiel de la prévention, mais il faudrait savoir si leurs effets ont été évalués et combien d’enfants ont pu être protégés. Il serait également utile de savoir combien de policiers participent à la protection.
49.Les enfants exploités continueraient à être stigmatisés au lieu d’être aidés et il est particulièrement préoccupant que les juges tendent à les considérer comme des délinquants et non des victimes, notamment dans les affaires d’exploitation sexuelle.
50.Mme KHATTAB demande ce qui est fait pour aider les familles pauvres à scolariser leurs enfants puisque l’éducation est le meilleur moyen de protéger les enfants contre la prostitution et d’autres formes d’exploitation. Dans les zones rurales, 10 % seulement des enfants iraient à l’école. La scolarité est en principe gratuite mais la somme à débourser pour une année peut atteindre l’équivalent d’un mois de salaire. En outre, dans certaines régions des raisons culturelles empêcheraient les filles d’aller à l’école.
51.Il serait utile de savoir quels programmes et quelles ressources sont consacrés pour faire face au problème du mariage par enlèvement, pratique qui bien qu’interdite demeure courante, ce qui favorise l’exploitation sexuelle.
52.Pareillement, de nombreuses filles sont victimes de la traite aux fins d’exploitation sexuelle, parfois en connaissance de cause et certaines maisons de prostitution emploieraient des mineures. La délégation pourrait donc préciser si le Kirghizistan coopère avec les pays voisins pour combattre la traite, et si les professionnels qui travaillent avec les enfants sont formés pour détecter cette pratique. Il ressort de certaines informations que toutes les jeunes filles vendues aux fins de prostitution sont de famille musulmane, ce qui amène à se demander quels facteurs poussent les familles à agir de la sorte.
53.Quelque 25 % des enfants travailleraient, le plus souvent dans la vente ambulante, et là encore une coopération avec les pays voisins est importante.
54.Des informations sur les procédures d’adoption nationale et internationale, en particulier sur les mesures visant à empêcher les adoptions aux fins de vente ou d’exploitation, seraient bienvenues.
55.La délégation pourrait indiquer si les unités spéciales de police mentionnées sont opérationnelles et disposent de fonds suffisants pour s’acquitter de leur mission. Plus généralement, il faudrait savoir quels crédits budgétaires sont destinés à la mise en œuvre du Protocole facultatif.
56.M. ZERMATTEN demande si des fonds destinés à l’aide, au soutien et à la réadaptation des enfants victimes de vente, de prostitution ou de pornographie sont prévus au titre du programme‑cadre «Nouvelle génération» ou de la mise en œuvre du nouveau Code de l’enfant, si le Gouvernement soutient les différents projets d’aide aux victimes que mettent en œuvre l’Organisation internationale pour les migrations et des ONG locales, comment ces activités sont coordonnées et si elles couvrent tout le pays.
57.La délégation pourrait aussi indiquer quel statut est accordé dans les procédures pénales aux victimes d’actes de vente, de prostitution ou de pornographie, si ce statut et les Lignes directrices en matière de justice pour les enfants victimes et témoins d’actes criminels, adoptées par le Conseil économique et social en 2005, sont intégrés dans le nouveau Code de l’enfant, si les droits de l’enfant énoncés à l’article 16 de la Convention sont protégés, et si l’enfant a la possibilité de réclamer réparation du préjudice subi, conformément à l’article 9.4 du Protocole facultatif.
58.Il serait utile de savoir s’il existe une ligne d’urgence, permanente et gratuite, accessible dans tout le pays aux enfants, en dehors de celles mises en place par les ONG.
59.Le Comité aimerait en outre savoir si le pays a créé un mécanisme de contrôle de l’adoption, conformément aux observations finales formulées en 2004, et où en est le processus de ratification de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.
60.Mme SMITH demande si l’État partie se conforme aux prescriptions de l’article 4 du Protocole facultatif, concernant la juridiction.
61.Mme OUEDRAOGO demande quel mécanisme assure la collecte de données sur les enfants victimes de vente, de prostitution ou de pornographie, et s’il existe d’autres formes traditionnelles de transfert ou de vente d’enfants. Relevant que les différents programmes d’aide à ces victimes sont inadaptés à leurs besoins en raison des contraintes budgétaires et du manque de personnel qualifié pour les soigner et les réinsérer dans la société, elle souhaite savoir ce que le Gouvernement envisage de faire pour améliorer la prise en charge de ces enfants.
62.La délégation voudra bien exposer les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord signé en 2002 avec le Kazakhstan, et indiquer quel organe en est chargé et le suivi qui en est fait. Il faudrait aussi savoir si des efforts sont déployés pour retrouver les familles des enfants victimes de la vente, de la prostitution et de la pornographie, et pour préparer ces enfants à retourner dans leurs familles, quelles sont les difficultés rencontrées en la matière compte tenu des traditions, et quelles mesures sont prises pour les surmonter.
63.M. SIDDIQUI demande si des enquêtes ont été menées pour évaluer le phénomène de la pornographie mettant en scène des enfants, pourquoi le Code pénal ne comporte pas de disposition réprimant la production, la distribution, l’exportation, l’importation, la transmission, la possession intentionnelle et la publicité de matériels pornographiques impliquant des enfants, et quelles mesures sont prises pour empêcher ce type de pornographie sur l’Internet.
64.Il demande si le Gouvernement coopère avec l’UNICEF, des ONG internationales et les pays concernés pour empêcher la traite des femmes et des enfants et quels programmes sont mis en œuvre par les centres de réadaptation pour mineurs dits antisociaux et s’il ne serait pas préférable de parler d’enfants victimes d’activités antisociales.
65.M. KOTRANE demande si la détention par un adulte de matériel pornographique est réprimée par la loi et si le Kirghizistan peut poursuivre une personne de nationalité kirghize, ou ayant sa résidence sur le territoire kirghize, qui se livre à des actes illégaux au regard du Protocole dans un pays étranger dont la législation n’incrimine pas lesdits actes. L’exigence de la double incrimination n’est pas conforme aux dispositions du Protocole facultatif.
66.Il demande si obliger un enfant à accomplir un travail domestique constitue une infraction au Kirghizistan, qui a ratifié le Protocole facultatif et la Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants.
67.M. POLLAR demande comment des poursuites peuvent être engagées contre une société impliquée dans la vente, la prostitution d’enfants ou la pornographie mettant en scène des enfants puisque la législation pénale nationale ne semble s’appliquer qu’aux personnes physiques (art. 17 du Code pénal).
68.Le PRÉSIDENT aimerait avoir des précisions sur la formation dispensée aux juges et aux procureurs concernant le Protocole facultatif.
69. Il se demande si l’organe que le Gouvernement envisage d’instituer pour assurer l’application de la Convention et des Protocoles et coordonner les activités en la matière sera doté de ressources humaines et financières adéquates.
70.La délégation pourrait aussi indiquer quelles mesures spécifiques le Gouvernement prend pour empêcher que des enfants soient enlevés de leurs familles et emmenés à l’étranger, et si un juge considère comme valables les témoignages écrits des enfants victimes d’exploitation sexuelle à l’étranger qui ne veulent pas venir témoigner devant les tribunaux kirghizes.
La séance est levée à 12 h 45.
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