Nations Unies

CRC/C/SR.1830

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

1er octobre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Soixante-quatrième session

Compte rendu analytique de la 1830 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 25 septembre 2013, à 10 heures

Présidente: Mme Sandberg

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant , concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (suite)

La séance est ouverte à 1 0  h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre duProtocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfantset la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/PRY/1 ; CRC/C/OPSC/ PRY/Q/1 ; CRC/C/OPSC/PRY/Q/1/Add.1) (suite)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation paraguayenne re prend place à la table du Comité.

2.La Présidente invite la délégation paraguayenne à répondre aux questions posées la veille par les membres du Comité.

3.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que les stratégies et les plans du Gouvernement sont gérés par les ministères et les organismes compétents. Les droits de l’enfant sont garantis par la loi no 1680/01 portant création du Code de l’enfance et de l’adolescence. La loi a également mis en place un mécanisme de coordination des plans et programmes en faveur de l’enfance. Le Président s’est engagé à porter à 7 % du produit intérieur brut (PIB) les crédits alloués à ce secteur d’ici à 2018.

4.M. Cardona Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) dit que les plans du Gouvernement sont décrits dans le rapport de l’État partie (CRC/C/OPSC/PRY/1), mais que c’est leur application et leur coordination concrètes qui le préoccupent. Il aimerait notamment savoir si le Conseil national de l’enfance et de l’adolescence s’est réuni au cours des douze derniers mois, et combien de personnes le Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence emploie. Combien des plus de la centaine d’organismes locaux chargés de la mise en œuvre des plans au niveau local fonctionnent-ils réellement? D’après des informations reçues par le Comité, beaucoup d’entre eux ne se réunissent pas. Enfin, il demande comment seront répartis les crédits budgétaires à partir de 2013 dans le cadre de la nouvelle politique en cours d’élaboration.

5.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le Conseil national s’est peu réuni au cours des derniers mois, et que les rares réunions qu’il a tenues n’ont pas eu de résultats très positifs. Au niveau local, les départements et les municipalités ne sont pas encore tous dotés d’un conseil.

6.Pour ce qui est de la question du personnel, M. Zarate Fleitas dit que le Secrétariat national a absorbé les programmes de soutien direct et a parfois perdu de vue leur principal objectif. Toujours est-il que le Gouvernement entend décentraliser aux organismes locaux la gestion des programmes de soutien direct et renforcer le système national en y intégrant les municipalités. Il faut pour cela que celles-ci soient en mesure d’investir dans le soutien direct aux enfants et aux adolescents, sans pour autant que cela ait des répercussions négatives pour elles.

7.Passant au contexte socioculturel dans lequel s’inscrit la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, M. Zarate Fleitas dit que la sensibilisation et la formation des acteurs de ce domaine sont les meilleurs moyens de combattre ces phénomènes. La pauvreté est un facteur essentiel: les quelque 20 % de la population vivant dans l’extrême pauvreté sont particulièrement exposés au risque que leurs enfants soient exploités. Le Gouvernement entend combattre l’extrême pauvreté d’ici à 2015 en mettant en œuvre son plan «Offrir des chances», auquel est également associé le secteur privé. En outre, compte tenu du rôle crucial que joue la petite enfance dans l’avenir des enfants, le Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence met en œuvre, en collaboration avec la Banque interaméricaine de développement (BID), la politique nationale de prise en charge de la petite enfance.

8.M. Cardona Llorens demande quelles mesures l’État partie a prises pour combattre certains comportements encouragés par les médias. Par exemple, la presse écrite publie fréquemment des photos érotiques de jeunes filles, et lance régulièrement des concours de beauté, comme si exhiber le corps des femmes était parfaitement normal. Le Gouvernement envisage-t-il de recourir au Code pénal pour empêcher la diffusion de tels messages, ou de créer des partenariats stratégiques avec les médias afin de remédier à ce problème?

9.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que la publication d’images de cette nature est interdite par le Code de l’enfance et de l’adolescence mais n’a pas été érigée en infraction pénale. Du fait qu’elle n’emporte aucune sanction, cette interdiction est inefficace.

10.M me Abdo (Paraguay) rappelle que les membres du Comité ont demandé comment l’État partie était en mesure de surveiller l’efficacité de ses nombreux plans et programmes. Elle dit que, dans les faits, le suivi porte généralement sur la gestion des projets plutôt que sur la nature des mandats ou l’utilisation des ressources. La stratégie nationale de développement statistique lancée par la Direction générale des statistiques, enquêtes et recensements vise à corriger ce problème et se fonde sur des données statistiques pour coordonner les plans sectoriels, éviter le chevauchement des activités et garantir ainsi un travail de qualité. Dans le cadre de cette stratégie, le Réseau des droits de l’homme du pouvoir exécutif a défini divers groupes d’indicateurs destinés à faciliter la surveillance des programmes. Grâce à la ventilation des données recueillies – dont l’expérience a prouvé qu’il s’agissait d’une opération coûteuse et complexe sur le plan technique, mais nécessaire –, des liens ont pu être établis entre les caractéristiques des divers groupes et l’utilisation efficace des crédits budgétaires.

11.Le Réseau des droits de l’homme du pouvoir exécutif joue un rôle très important en ce qu’il regroupe tous les organismes publics œuvrant dans le domaine des droits de l’homme, ce qui lui permet d’avoir à la fois une vue d’ensemble et un point de vue spécialisé sur chaque dossier.

12.Pour ce qui est de l’élaboration du rapport de l’État partie, Mme Abdo dit que, depuis qu’il a rédigé son rapport sur la mise en œuvre du Protocole facultatif, le Paraguays’est soumis à l’Examen périodique universel et entend à l’avenir reproduire l’approche adoptée à cette occasion: la société civile et le Bureau du Défenseur du peuple ont participé à l’élaboration du rapport national, ce qui a été très bénéfique. Les organisations de la société civile ont pris le temps d’analyser les questions importantes, et il ne fait pas de doute que l’État obtient de meilleurs résultats lorsqu’il collabore avec ce secteur ainsi qu’avec les organismes internationaux.

13.M me Peña (Paraguay), répondant aux préoccupations du Comité au sujet du placement préalable pendant la procédure d’adoption, rappelle que l’adoption est une institution censée protéger les enfants mais qu’elle reste une mesure exceptionnelle. La loi accorde la priorité au maintien des liens familiaux dans toute la mesure possible, conformément au droit de l’enfant de connaître ses parents et de vivre avec sa famille. Le placement préalable pendant la procédure d’adoption n’est peut-être pas une procédure optimale, mais il est prévu par la loi. Il permet d’éviter des procédures d’adoption longues et souvent stressantes et, si l’on élargit les «liens familiaux» aux personnes chez qui l’enfant est placé pendant la procédure d’adoption, cela signifie que l’enfant vit avec ceux qui, dans les faits, sont devenus sa famille pendant deux ans.

14.M. Kotrane rappelle que, dans ses précédentes observations finales sur la mise en œuvre de la Convention par l’État partie (CRC/C/PRY/CO/3), le Comité avait déjà demandé au Paraguay de modifier sa législation sur le placement préalable pendant la procédure d’adoption. Cela dit, le problème que cette procédure pose au regard du Protocole facultatif n’est pas lié au système d’adoption mais au droit pénal et à la prévention de la traite. La question est de savoir quelle disposition pénale existe pour punir les personnes qui facilitent l’adoption illégale et la vente d’enfants.

15.M. Cardona Llorens note que, sur les 540 «adoptions» prononcées par décision de justice au cours des trois dernières années, seules 39 étaient de vraies adoptions, tandis que 500 concernaient des cas de placement préalable pendant la procédure d’adoption. Il demande pourquoi les tribunaux sont enclins à choisir, dans 90 % des cas, une solution censée être très exceptionnelle. Il demande à cet égard dans quelle mesure l’intérêt supérieur de l’enfant est pris en considération. Quel contrôle est exercé par les organes judiciaires compétents? Il aimerait en particulier savoir si des enveloppes circulent pour influencer les juges dans leurs décisions: quelles mesures l’État partie prend-il pour court-circuiter les ventes d’enfants dans lesquelles des membres de l’appareil judiciaire pourraient être impliqués?

16.M me Khazova demande de quels moyens l’État partie s’est doté pour suivre les enfants adoptés à l’étranger et surveiller leur situation.

17.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le Code pénal définit comme traite ou vente d’enfants des actes de natures diverses. Il doit être modifié pour que tous les actes de cette nature, y compris la violation des lois relatives à l’adoption, soient sanctionnés. Pour ce qui est du placement préalable pendant la procédure d’adoption que les tribunaux continuent d’autoriser, M. Zarate Fleitas dit que l’État partie a accepté les recommandations du Comité en 2010 et que deux projets de modification de la loi sont en cours d’examen. S’agissant du contrôle des adoptions internationales, le Centre de l’adoption et ses partenaires dans d’autres pays ont mis en place des mécanismes spéciaux de suivi bilatéraux pour suivre la situation des enfants adoptés à l’étranger.

18.M me Peña (Paraguay) dit que la loi sur l’adoption a, dans les faits, mis un terme aux procédures d’adoption internationale illégales, assimilables à des ventes d’enfants. Il n’y a plus de lien direct entre les parents candidats à l’adoption et les personnes souhaitant confier leur enfant à l’adoption; toutes les demandes d’adoption, y compris en vue de l’adoption internationale, sont traitées au Paraguay par le Centre de l’adoption. Les organismes chargés de l’adoption n’interviennent pas dans la procédure. Le Centre soumet les demandes d’adoption, dont les demandes émanant de l’étranger, aux tribunaux, qui les transmettent aux tribunaux nationaux des pays demandeurs. L’adoption internationale n’est ouverte qu’aux pays parties à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

19.Rien n’indique que les mises sous tutelle dissimulent des cas de traite d’enfants. C’est le Conseil national de l’enfance et de l’adolescence qui est chargé de traiter les demandes correspondantes. Compte tenu du lien possible que ces placements peuvent avoir avec la pratique du criadazgo – consistant à employer des enfants à des tâches domestiques en échange du gîte, du couvert et, parfois, d’une éducation élémentaire – les demandes de mise sous tutelle sont dûment évaluées, analysées et suivies par des tribunaux spéciaux. Certains tuteurs potentiels présentent de telles demandes en vue de prendre en charge un enfant, tandis que d’autres le font en vue de l’adopter. Le placement préalable pendant la procédure d’adoption doit être évité du fait qu’il peut compromettre le droit de l’enfant à l’identité; les autorités nationales jugent très important de veiller à ce que les enfants conservent leurs liens familiaux.

20.M. Aguirre (Paraguay) dit que, lorsque la démocratie a été rétablie, le Paraguay a introduit des politiques portant interdiction de l’adoption internationale. Auparavant, l’adoption internationale était une activité lucrative, et environ 3 000 familles y recouraient chaque année; M. Aguirre indique fièrement que l’on n’en dénombre désormais plus aucun cas. Des mesures ont été prises pour accroître le nombre d’adoptions nationales, mais la législation applicable est très stricte.

21.M me da Silva (Paraguay), répondant à une question posée la veille, dit que, entre autres mesures prises pour protéger non seulement les enfants victimes de violence mais aussi les femmes et les adolescents, et pour veiller à ce que tous soient traités correctement lors du procès, des lignes directrices interinstitutionnelles portant sur leur protection ont été adoptées.

22.Une division chargée des femmes, des enfants et des adolescents victimes de violences a été créée au sein de la police; trois postes de police en zone urbaine et trois autres en zone rurale ont été désignés pour prendre en charge les enfants. Des policiers spécialisés travaillent avec les victimes pour veiller à ce que leurs droits soient dûment protégés et à ce qu’elles bénéficient de services adaptés de qualité, ainsi que d’une prise en charge personnalisée. Cette approche doit être élargie à l’ensemble du pays.

23.Un certain nombre de stratégies ont été mises en place au niveau local pour combattre la violence intrafamiliale. Les agents de police, hommes et femmes, bénéficient de formations sur la violence intrafamiliale, la discrimination et les questions affectant les enfants, dont ceux de groupes vulnérables. Les mineurs n’ont pas besoin d’être accompagnés d’un adulte pour porter plainte et des équipes d’appui aux divers groupes de population assurent une permanence vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans certains commissariats. Des équipes spécialisées sont chargées de recevoir, enregistrer et suivre les plaintes déposées par des enfants et de leur fournir différentes formes d’aide. Quelque 70 % des victimes de violence intrafamiliale sont des femmes, et environ 3 % des mineures.

24.Le Département de l’enfance et de l’adolescence du Bureau du Défenseur du peuple effectue également un suivi des affaires impliquant des enfants et exerce un contrôle en la matière. Il offre une assistance à tout enfant qui en fait la demande. Il a compétence pour intenter une action au civil et pour intervenir dans les affaires de mise sous tutelle; il peut recevoir des plaintes portant sur des violations des droits de l’enfant et engager des actions en justice; il peut représenter des enfants devant la justice et protéger leurs droits, soumettre les affaires aux autorités compétentes, proposer des mesures appropriées et veiller à ce que les délais soient respectés. Le Département est habilité à demander à divers organismes institutionnels et, par voie judiciaire, à des organismes privés, de lui transmettre des rapports en lien avec ses enquêtes. L’équipe multidisciplinaire dont se compose le Département travaille en collaboration avec les autorités judiciaires dans les affaires impliquant des enfants, en lui fournissant des comptes rendus écrits ou oraux, en élaborant des rapports techniques ou encore en formulant des recommandations sur les mesures voulues, selon que de besoin.

25.Le Ministère et le Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence ont instauré une unité de lutte contre l’exploitation sexuelle chargée d’aider les victimes de la traite et de l’exploitation à se réinsérer ainsi que de sensibiliser la population à ces questions. Une ligne téléphonique spéciale a été créée pour recevoir des appels et en effectuer le suivi. Un programme de protection des témoins a été mis en place à l’intention des personnes qui courent un risque du fait qu’elles ont participé à un procès en tant que victimes ou témoins.

26.M. Cardona Llorens dit que, outre les renseignements fournis sur les programmes mis en œuvre, le Comité aimerait des informations plus précises sur ce qu’il advient des victimes et des témoins à l’issue d’un procès. Qu’est-il fait concrètement pour aider les victimes à se réadapter et à se réinsérer? Combien de personnes la ligne téléphonique spéciale emploie-t-elle, et de quel budget est-elle dotée?

27.M me Aidoo, se référant à l’article 9 du Protocole facultatif, invite la délégation à expliquer comment les autorités veillent à ce que les victimes soient correctement indemnisées par les personnes ou entités légalement responsables, et à faire part de son expérience en la matière.

28.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit qu’une unité de lutte contre la traite et l’exploitation sexuelle a été créée et que, au cours d’un procès, le suivi et l’aide dont bénéficient les victimes se résument à une simple surveillance. Faute de ressources suffisantes, il n’est pas possible de garantir une prise en charge complète aux enfants victimes de vente, de prostitution ou de pornographie, mais tout sera mis en œuvre pour accroître les crédits budgétaires. Des ressources supplémentaires sont également nécessaires pour garantir une bonne réinsertion et un suivi adéquat des enfants victimes. La ligne téléphonique spéciale est accessible gratuitement vingt-quatre heures sur vingt-quatre; toutefois, ces derniers temps, ses faibles ressources ne lui ont pas permis de répondre à la demande, ni de former son personnel de manière adéquate.

29.Le Code pénal prévoit que l’auteur d’une infraction indemnise la victime; toutefois, les demandes d’indemnisation sont rares en matière civile et pénale. Il conviendra de mettre en place les procédures voulues pour que les victimes soient assurées d’obtenir réparation et aient ainsi les moyens de reprendre une vie normale.

La séance est suspendue à 11 h 10 ; elle est reprise à 11 h 30.

30.M. Brizuela (Paraguay) dit que l’article 140 du Code pénal érige en infraction un large éventail d’actes liés à l’existence de matériels pédopornographiques. L’organisation ou le financement de spectacles pornographiques mettant en scène des enfants, à des fins privées ou publiques, est également passible de poursuites. Les auteurs s’exposent à une peine pouvant aller jusqu’à dix ans d’emprisonnement, sans aucune possibilité de remise en liberté conditionnelle.

31.Des circonstances aggravantes sont retenues lorsque les matériels pédopornographiques diffusés mettent en scène des enfants de moins de 14 ans, lorsqu’un parent, un tuteur ou toute personne chargée de l’éducation de l’enfant est impliqué; lorsqu’une personne ayant autorité sur l’enfant participe auxdits actes; lorsqu’il est fait usage de la violence, de la force, de la menace ou de la contrainte sur la personne d’un enfant ou encore lorsqu’il y a promesse de rémunération. La peine peut aller jusqu’à dix ans d’emprisonnement si l’enfant à moins de 14 ans, et jusqu’à cinq ans si l’enfant est âgé de 14 à 18 ans.

32.Les peines punissant les actes pédopornographiques prévues à l’article 140 sont plus sévères que celles qui sont imposées dans les affaires impliquant des adultes.

33.L’article 29 du Code pénal punit de peines pouvant aller jusqu’à douze ans d’emprisonnement le fait de soumettre quiconque au travail forcé ou à des pratiques analogues; la même peine est imposée en cas de prélèvement d’organes humains sans le consentement de l’intéressé. Le Paraguay a ratifié la Convention no 168 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la promotion de l’emploi et la protection contre le chômage (1988) et la Convention no 102 de l’OIT concernant la sécurité sociale (norme minimum) (1952).

34.Le principe de l’extraterritorialité est reconnu dans certains cas, notamment dans les affaires de traite des êtres humains. Le Code pénal prévoit la possibilité de poursuivre au Paraguay les auteurs d’actes réprimés par les conventions et traités internationaux même lorsque ces actes ont été commis à l’étranger.

35.M. Cardona Llorens a compris que le prélèvement d’organes humains à des fins de trafic, sans le consentement de l’intéressé, constitue une infraction mais aimerait savoir si la vente des organes d’un enfant constitue en soi une infraction, compte tenu de ce que, dans ce cas, le consentement du mineur doit être donné par un parent. Il demande en outre à la délégation comment les personnes morales impliquées dans la distribution de matériels pédopornographiques au moyen des nouvelles technologies peuvent être poursuivies et punies s’il n’est pas possible de les identifier, et comment les personnes physiques coupables de telles infractions mais qui ne se trouvent pas sur le territoire paraguayen peuvent l’être.

36.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le Code pénal n’a pas établi la responsabilité pénale des personnes légales.

37.M. Kotrane dit que le Comité souhaite savoir si le travail forcé des enfants et la vente d’organes sont punis en tant qu’infractions visées par le Protocole facultatif, et emportent en conséquence des peines plus sévères. Il demande si les tribunaux nationaux ont compétence pour connaître d’infractions visées par le Protocole lorsqu’elles sont commises à l’étranger, qu’il existe ou non un accord bilatéral.

38.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le Code pénal prévoit la possibilité d’engager des poursuites pénales si les actes commis à l’étranger nuisent aux intérêts légitimes du Paraguay ou encore s’il y a lieu de protéger les biens juridiques de ressortissants paraguayens. La vente d’enfants n’a pas en soi été érigée en infraction, mais d’autres dispositions pénales peuvent être appliquées pour punir cet acte.

39.M. Candia (Paraguay) dit que, en application du Plan national de prévention et d’éradication du travail des enfants et de protection du travail des adolescents, une liste des principaux partenaires a été établie afin de parvenir à repérer les enfants soumis aux pires formes de travail, dont le placement d’enfants en tant que domestiques (criadazgo). Pour ce qui est des causes du travail des enfants, il dit que, bien que la pauvreté nécessite une action des plus urgente, il est toutefois nécessaire de tenir compte des croyances culturelles des familles et de la communauté, qui considèrent que le travail des enfants et des adolescents contribue de manière positive à leur éducation et à leur développement. L’État ne ménage aucun effort pour faire évoluer les mentalités à ce sujet, soulignant que le travail des enfants nuit à leur épanouissement et que le fait de mener de front le travail et les études est l’une des principales causes d’absentéisme et d’abandon scolaire. Les mesures de lutte contre les pires formes de travail des enfants visent notamment le travail des enfants en zone rurale, l’exploitation sexuelle des enfants et l’exploitation des enfants au foyer. La législation nationale ne fait pas de distinction entre l’exploitation des enfants dans les familles de militaires et l’exploitation des enfants dans les familles de civils; elle ne prévoit aucune exception.

40.Les activités ciblées mises en place à l’initiative du Ministère de l’éducation et de la culture reposent notamment sur la campagne intitulée «Apprendre sans peur», qui prévoit des ateliers de sensibilisation à l’éradication des mauvais traitements et des violences à l’école. Un autre programme vise à améliorer les relations interpersonnelles dans le monde de l’éducation afin de favoriser la sociabilité des élèves. Le statut psychosocial des enfants concernés par la pratique du criadazgo fait également l’objet d’un suivi, et une procédure a été mise en place pour permettre aux enseignants de signaler toute violation des droits de l’enfant, de façon à ce que l’État puisse intervenir rapidement.

41.Le programme Abrazo a désormais été élargi aux autres formes de travail jugées dangereuses pour les enfants, et des programmes pilote mettant l’accent sur la formation et l’offre d’emplois protégés pour les adolescents ont été lancés. Des éducateurs surveillent plus de 200 zones urbaines afin de suivre et de consigner les déplacements des enfants des rues, en vue d’élargir le programme à ces enfants. Il va sans dire que l’un des principaux problèmes réside dans le fait que de nombreuses familles dépendent du revenu des enfants qui travaillent. Conscient de cela, le Gouvernement a renforcé l’aide financière aux familles depuis 2011. Un mécanisme de suivi des familles a été mis en place; il repose sur des visites fréquentes effectuées par des travailleurs sociaux et sur l’élaboration de plans en faveur de la famille destinés à suivre l’évolution de la situation. Les familles vivant dans l’extrême pauvreté reçoivent des bons de solidarité, et celles qui ont des enfants en bas âge un panier alimentaire de base chaque mois.

42.Le Paraguay a ratifié la Convention no 138 de l’OIT sur l'âge minimum (1973), la Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants (1999) et la Convention no 189 de l’OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011).

43.M. Cardona Llorens salue la ratification, par l’État partie, de la Convention no 189 de l’OIT. Le Comité est préoccupé par le phénomène de l’esclavage domestique des enfants, qui va de pair avec la vente d’enfants à des fins de travail, et souhaite connaître les peines applicables aux personnes qui soumettent un enfant à la pratique du criadazgo.

44.M. Mezmur demande quelles mesures l’État partie a prises pour renforcer les capacités des organes chargés de faire appliquer la loi à cet égard, notamment la police, l’appareil judiciaire et l’administration des douanes.

45.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que la pratique du criadazgo n’a pas été érigée en infraction autonome dans la législation pénale, mais que les peines applicables à d’autres infractions, comme la violation des règles régissant l’adoption, peuvent être appliquées aux personnes qui soumettent un enfant à cette pratique. Le programme Abrazo ciblait à l’origine les enfants travaillant dans la rue; il a ensuite été élargi aux enfants employés dans les fabriques de briques et les plantations de canne à sucre. Il a pour objectif de dissuader les enfants de quitter leur communauté, ce qui, par ricochet, aidera à prévenir le criadazgo. Il serait bon de dresser le bilan de ce programme afin de déterminer comment l’appliquer le plus efficacement possible à la prévention du criadazgo.

46.Pour ce qui est du renforcement des capacités des organes chargés de faire appliquer la loi, M. Zarate Fleitas dit que le Bureau de la Défense publique s’est doté d’un réseau de médiateurs à l’enfance et à l’adolescence à l’échelle du pays. Le Ministère de l’intérieur a mis en place une ligne téléphonique confidentielle permettant de dénoncer les pratiques répréhensibles ou la corruption des membres de forces de l’ordre.

47.M me da Silva (Paraguay) dit que le Secrétariat national à la lutte contre la corruption a été créé pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies de lutte contre la corruption et pour instaurer des mécanismes de contrôle du secteur public. Des procédures ont été élaborées pour recevoir les plaintes visant des fonctionnaires, mener des enquêtes et engager des poursuites judiciaires.

48.La Présidentedemande si la ligne téléphonique est fréquemment utilisée.

49.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que la délégation répondra à la question sur le nombre de plaintes par écrit. En réponse à un certain nombre de questions posées la veille, il dit que la traite des êtres humains sur le territoire national est punie par une loi qui a été promulguée en 2011. Le tourisme sexuel n’a pas en soi été érigé en infraction dans la législation nationale, mais il peut faire l’objet de poursuites pour d’autres chefs d’inculpation. Pour ce qui est de la frontière avec le Brésil et de la tenue prochaine de la Coupe du monde de football, les services du ministère public ont prévu de se réunir la semaine suivante pour définir un cadre de coopération à cet égard.

50.La ligne téléphonique accessible au niveau national résulte d’une coopération fructueuse entre les ONG et l’État; elle est chargée non seulement de recevoir les plaintes mais aussi de répondre aux questions d’ordre général sur les droits de l’enfant. Elle transmet les plaintes aux autorités compétentes et effectue un suivi afin de s’assurer que les mesures nécessaires sont prises.

51.M me Aidoo demande si l’État partie a travaillé avec l’industrie du tourisme pour mettre au point un code de déontologie destiné à mettre les enfants à l’abri du tourisme sexuel et à faciliter le signalement d’actes de cette nature.

52.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence collabore depuis peu avec le Secrétariat national au tourisme pour recueillir des données qui devraient permettre de planifier des initiatives ciblées.

53.M me Aldoseri demande à la délégation d’indiquer dans le complément d’information qu’elle fera parvenir par écrit au Comité combien d’affaires ont donné lieu à l’ouverture d’une enquête, et si des membres des forces de l’ordre ont fait l’objet de poursuites.

54.La Présidentedemande si les prostitués mineurs sont considérés comme des victimes ou comme des délinquants dans le droit pénal paraguayen et si ceux qui sont âgés de 14 à 18 ans peuvent être visés par une procédure pénale.

55.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que les prostitués mineurs sont considérés comme des victimes en vertu du Code pénal et ne peuvent faire l’objet de poursuites.

56.M. Kotrane voudrait savoir précisément si la peine prononcée en cas d’offre d’enfants à des fins illicites est aggravée lorsque les intéressés sont victimes d’exploitation sexuelle.

57.M. Mezmur demande à combien de reprises la question s’est posée d’alourdir une peine de prison dans les affaires de prostitution infantile, et dans quelles conditions.

58.M. Zarate Fleitas (Paraguay), répondant à la question sur l’offre d’enfants, dit que l’article 139 du Code pénal dispose que si la victime est âgée de moins de 14 ans, la peine maximale est portée à huit ans d’emprisonnement. Toutefois, la disposition ne vise pas les enfants de plus de 14 ans. Il n’y a pas de statistiques sur la fréquence à laquelle de telles peines aggravées sont imposées.

59.La Présidentedemande si le taux élevé de mariages d’enfants peut faciliter la commission d’infractions visées par le Protocole facultatif.

60.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit qu’aucun mariage d’enfant n’a été signalé comme constituant un cas de vente d’enfants. Chez les peuples autochtones, les enfants se marient plus tôt, et il convient de respecter leur culture tout en garantissant la protection des droits de l’enfant. À cet égard, le Paraguay a ratifié la Convention no 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux (1989).

61.M me Oviedo Fierro demande si l’État partie envisage de réviser le cadre juridique applicable aux procédures d’adoption, qui sont excessivement longues. Elle demande ce que fait l’État partie pour veiller à ce que toutes les mesures voulues soient prises pour privilégier les liens de famille. Elle aimerait également en savoir plus sur le pouvoir personnel des juges en matière de placement des enfants.

62.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit, à propos de la longueur des procédures d’adoption, que deux projets de modification de la loi ont été présentés. La Cour suprême a récemment adopté une décision qui fixe la durée des mesures de protection de l’enfance, dont le placement en institution et la mise sous tutelle. Une unité spécialisée dans la protection de l’enfance a été créée au sein du Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence; elle travaille actuellement en coordination avec les autorités judiciaires et les organisations de la société civile à la désinstitutionalisation des enfants, au maintien des liens de famille et à la prévention des situations pouvant aboutir à des cas de vente ou d’exploitation d’enfants.

63.M. Cardona Llorens remercie la délégation pour le dialogue constructif et sincère qu’elle a instauré ainsi que pour la transparence de son rapport. Le Comité ne doute pas que ses recommandations aideront l’État partie à élaborer sa politique nationale et à sensibiliser la population aux problèmes auxquels sont confrontés les enfants.

64.M. Nogueira Neto (Rapporteur pour le Paraguay, pour le Protocole facultatif, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés) dit que le Comité note avec satisfaction les informations fournies par la délégation sur la coordination des activités mises en œuvre au Paraguay au titre du Protocole facultatif à la Convention, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, sur les activités destinées à faire connaître le Protocole et à sensibiliser la population aux principes qu’il consacre, sur la formation de tous les professionnels concernés, sur la mise en place de mécanismes de collecte de données et de vérification de l’âge, sur l’éducation à la paix, sur les mesures de protection des enfants victimes et sur la coopération internationale.

65.M. Zarate Fleitas (Paraguay) dit que le dialogue et la coopération avec le Comité aideront l’État partie à sensibiliser tous les organismes publics à la question des droits de l’enfant.

La séance est levée à 12 h 30.