NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.131628 mai 2008

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1316e SÉANCE*

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 20 mai 2008, à 10 heures

Présidente: Mme LEE

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PÉRIODIQUES PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

Troisième rapport périodique de la Géorgie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 5 .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour)

Troisième rapport périodique de la Géorgie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/GEO/3; liste des points à traiter à l’occasion de l’examen du troisième rapport périodique de la Géorgie (CRC/C/GEO/Q/3); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/GEO/Q/3/Add.1)).

1. Sur l ’ invitation de la Présidente, la délégation géorgienne prend place à la table du Comité.

2.M. GAGNIDZE (Géorgie) rappelle que la Géorgie a adhéré à la Convention relative aux droits de l’enfant en 1994, et au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfantsen 2005.

3.Il souligne que la Géorgie s’emploie à promouvoir les valeurs démocratiques et à renforcer l’état de droit et indique qu’un certain nombre de mesures importantes ont été prises dans le domaine de l’éducation et de la protection des enfants. Ainsi, pour promouvoir les valeurs de tolérance et de démocratie dès le plus jeune âge, le Gouvernement a intégré l’éducation civique dans les programmes scolaires au niveau national.

4.En 2007, il a lancé le Programme pour la sécurité à l’école, dont l’objectif est de lutter contre la violence dans le cadre scolaire. Ce programme, qui comprend 21 sous-programmes, associe les administrations scolaires, les enseignants et les élèves. Son application est supervisée par un groupe d’experts indépendants composé de psychologues, de psychiatres, de directeurs d’établissement, d’enseignants et de travailleurs sociaux. La Géorgie est ainsi devenue l’un des premiers pays à participer au programme lancé conjointement par le Conseil de l’Europe et l’UNICEF pour lutter contre la violence en milieu scolaire.

5.Malgré la croissance économique rapide de la Géorgie, environ 11 % des élèves vivent encore en dessous du seuil de pauvreté. À la fin de 2007, près de 2,5 millions de lari (GEL) ont été alloués aux écoles pour l’achat de manuels scolaires destinés à 57 699 élèves pauvres. En outre, le Ministère de l’éducation et de la science a offert 61 ouvrages à chaque bibliothèque scolaire du pays.

6.Le Gouvernement géorgien accorde une attention particulière à l’intégration des enfants appartenant aux minorités ethniques et des enfants déplacés en provenance des régions en conflit d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud. Le Programme de partenariat scolaire, qui associe les écoles accueillant des enfants issus de minorités ethniques, vise à promouvoir l’intégration de ces enfants dans la société géorgienne. Les projets d’intégration menés dans ce cadre comprennent notamment des cours de langue géorgienne destinés aux élèves azéris et arméniens, des cours de langue ossète ou abkhaze à l’intention des élèves de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, la publication de manuels en ossète ou en abkhaze et l’octroi de bourses à des élèves d’Ossétie du Sud.

7.En 2006, pour promouvoir l’égalité d’accès à l’éducation, le Gouvernement a décidé de donner la priorité à l’éducation intégratrice pour les enfants souffrant d’un handicap. Plusieurs projets ont été lancés pour promouvoir l’intégration de ces enfants dans le système scolaire (campagnes nationales de sensibilisation, mise en place d’équipes pluridisciplinaires, création de centres préparatoires ou encore programmes d’intervention précoce).

8.En 2004, le Gouvernement géorgien a lancé une réforme nationale pour la protection de l’enfance. Reconnaissant les effets négatifs du placement des enfants en institution, il a mis en place un système de prise en charge des enfants au sein de familles. Plus de 3 600 enfants ont ainsi été sortis des institutions et de l’abandon. La réforme nationale pour la protection de l’enfance s’appuie sur de nombreux programmes, tels que la création d’équipes de travailleurs sociaux dans tout le pays, la création de crèches et de foyers pour les mères et leurs bébés, l’octroi de bourses d’enseignement supérieur, le placement en famille d’accueil, la formation du personnel et l’établissement de normes relatives aux services destinés aux enfants.

9.Le Gouvernement a élaboré un plan d’action national pour l’enfance pour la période 2008‑2011 qui a pour objectif d’assurer le développement complet des enfants dans un environnement sûr et qui s’attaque principalement aux problèmes de la pauvreté, de la maltraitance et du placement en institution.

10.MmeTOMASHVILI (Géorgie) souligne qu’en raison de la croissance économique rapide du pays, le Gouvernement géorgien a pu accorder des ressources importantes au système judiciaire et à la promotion des droits de l’homme. Son action a porté principalement sur la réforme du système de justice pour mineurs, afin de le mettre en conformité avec la Convention. Dans ce domaine, la priorité a été donnée à la promotion de mesures autres que la détention, la privation de liberté ne devant être utilisée qu’en dernier ressort. Le nouveau système de justice pour mineurs vise à répondre aux besoins spécifiques des enfants en conflit avec la loi, en mettant l’accent sur leur réadaptation et leur réinsertion sociale.

11.Avec l’appui de l’UNICEF, le Gouvernement est en train d’élaborer un projet de stratégie concernant la justice pour mineurs, et va lancer un projet de déjudiciarisation d’une durée de deux ans à Batumi et à Kutaisi. Il collabore étroitement avec le Gouvernement estonien sur la question de la liberté surveillée. Enfin, le Ministère de la justice et l’Église orthodoxe géorgienne ont conclu un accord en vertu duquel l’Église participe à la mise en œuvre du régime de liberté surveillée auquel peuvent se soumettre les délinquants non violents qui le souhaitent.

12.Un autre élément important de la réforme est le Plan d’action contre la torture, élaboré par le Conseil interinstitutions, qui regroupe des représentants d’organisations gouvernementales et non gouvernementales, qui devrait être soumis prochainement au Président pour adoption. Ce Plan vise notamment à améliorer le régime de la liberté surveillée pour les mineurs délinquants et vise à promouvoir les mesures non privatives de liberté.

13.En ce qui concerne l’amélioration des conditions de détention des mineurs, il convient de signaler qu’un nouveau programme d’études secondaires a été mis en place en 2007 dans les établissements pénitentiaires. Des mesures ont aussi été prises pour faciliter l’accès des détenus aux soins de santé, avec l’établissement en 2007 d’un système d’assurance pour les détenus. Les dépenses consacrées à l’alimentation des détenus ont augmenté de 247 % en 2007 par rapport à l’année précédente.

14.M. PURAS (Rapporteur pour la Géorgie) constate que la Géorgie a accompli des progrès énormes au cours des cinq dernières années. Elle joue un rôle important dans la promotion de la démocratie au niveau régional et fait de son mieux pour résoudre pacifiquement les conflits en cours en Abkhazie et en Ossétie du Sud.

15.La Géorgie a deux défis importants à relever pour pouvoir moderniser sa société et assurer la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant et des autres instruments internationaux. Premièrement, elle devrait investir davantage dans les politiques sociales, sanitaires et éducatives et dans les infrastructures modernes de protection et de promotion des droits de l’enfant. Deuxièmement, il faudrait renforcer la confiance entre les représentants de la société civile et les représentants de l’État. Le Gouvernement n’apporte pas un soutien suffisant aux ONG et ne les associe pas suffisamment à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques nationales. Or, pour passer de la violence et de la discrimination à une culture fondée sur la confiance et la tolérance, la Géorgie aura besoin des ONG.

16.En suivant les recommandations du Comité, la Géorgie évitera d’adopter des mesures inefficaces comme abaisser l’âge de la responsabilité pénale ou investir de manière insuffisante dans les services communautaires destinés aux familles et aux enfants vulnérables.

17.M. Puras demande à quel stade se trouve le processus de coordination de la mise en œuvre de la Convention en Géorgie et quel est l’organe national responsable de la promotion et de la protection des droits de l’enfant et de la coordination de la mise en œuvre de la Convention. Il souhaite savoir quel est le mandat de cet organe, quelles ressources lui sont allouées et comment la société civile est associée à la prise de décisions au niveau national.

18.M. Puras souhaite avoir des renseignements sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Plan d’action national pour l’enfance (2003‑2007) et du Plan d’action national pour la protection des enfants et leur placement en milieu ouvert pour les périodes 2005‑2008 et 2008‑2011. Il demande si ce dernier couvre tous les domaines visés par la Convention et souhaite connaître les ressources financières et humaines qui lui sont consacrées.

19.M. Puras souhaite savoir de quelle manière la Convention relative aux droits de l’enfant influe sur la mise en œuvre d’autres instruments internationaux comme le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et si, dans le cadre de la mise en œuvre de ce Protocole, des mesures particulières ont été prises concernant les droits des enfants et le système de justice pour mineurs. Il demande en outre si le projet de plan de lutte contre la torture comprend des mesures concernant la situation des enfants placés en institution et la mise en œuvre progressive de la Convention relative aux droits de l’enfant.

20.M. Puras souhaite obtenir des précisions sur la politique dite de «tolérance zéro» qui a été adoptée par le Gouvernement géorgien et savoir en particulier si elle est conforme aux normes internationales relatives aux droits de l’enfant.

21.MmeVUCKOVIC-SAHOVIC (Corapporteuse pour la Géorgie) se dit préoccupée par la situation des enfants déplacés à l’intérieur du pays ainsi que des enfants réfugiés, bien qu’elle ait constaté des améliorations dans ce domaine depuis l’examen du précédent rapport. Elle souhaiterait avoir des informations concernant la mise en œuvre des plans et des stratégies en vue de l’insertion sociale de ces enfants. Elle est consciente que le Gouvernement a mis l’accent sur le retour de ces enfants dans leur région d’origine mais souligne que, en attendant qu’un tel retour soit possible, il est nécessaire de les intégrer dans la société. Elle souhaite connaître les mesures envisagées par la Géorgie à cet égard.

22.Mme Vuckovic-Sahovic s’interroge sur le sort des enfants en Abkhazie et en Ossétie du Sud. Elle constate que le Gouvernement géorgien n’a pas été capable de procéder à un recensement dans ces deux provinces et n’est pas en mesure d’évaluer la situation qui y prévaut. Elle souhaite savoir s’il est possible d’avoir des renseignements concernant la situation de ces enfants et si la Convention est réellement appliquée dans ces régions.

23.Elle demande des informations sur la situation des Roms, des actes de violence à l’encontre de cette population ayant été signalés dans un rapport établi dans les années 90.

24.Elle note avec satisfaction que la définition de la torture a fait l’objet de modifications importantes à la suite de la visite du Rapporteur spécial sur la torture, mais se demande dans quelle mesure elle est applicable aux enfants.

25.Elle souligne que, dans son Observation générale no 10 sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs, le Comité n’a jamais émis l’idée d’autoriser quelque gouvernement que ce soit à abaisser l’âge de la responsabilité pénale et demande quel serait l’objectif visé par cette mesure. L’aggravation des délits commis par les mineurs devrait inciter le Gouvernement à identifier les causes de ces comportements plutôt qu’à adopter des mesures répressives.

26.M. KOTRANE demande si le Gouvernement géorgien a l’intention de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et s’il envisage d’élaborer et d’adopter une loi de portée générale sur les droits de l’enfant pour donner suite aux recommandations finales précédentes du Comité relatives au caractère diffus des mesures législatives.

27.M. ZERMATTEN souhaiterait obtenir des éclaircissements sur la consultation des enfants dans les procédures de séparation ou de divorce, conformément à l’alinéa 2 de l’article 12 qui prévoit que les enfants doivent avoir la possibilité d’être entendus dans toute procédure judiciaire ou administrative les intéressant. Il aimerait aussi en savoir davantage sur le fait que l’enfant victime de la traite ne se voit accorder le statut de victime que s’il collabore à la procédure judiciaire.

28.M. PARFITT demande si le bureau du Médiateur pour les enfants dispose des ressources humaines et financières nécessaires pour s’acquitter de son mandat, s’il est accessible à tous les enfants, dans l’ensemble du pays, et s’il a accès aux centres de détention pour mineurs. Il souhaiterait également être informé des progrès réalisés dans la mise en conformité du bureau avec les Principes de Paris et savoir si le Gouvernement tient effectivement compte de ses recommandations.

29.La délégation pourrait préciser si le Gouvernement collabore avec la société civile et les organisations non gouvernementales (ONG) et de quelle manière le bureau du Médiateur coordonne les activités des ONG travaillant en faveur des enfants. Enfin, il serait utile de savoir si les ONG ont été associées à l’élaboration du rapport de l’État partie.

30.MmeKHATTAB, relevant que le budget alloué au Ministère de la justice pour l’alimentation et l’éducation des enfants détenus est en augmentation, demande si les lieux de détention pour mineurs relèvent du Ministère de la justice ou du Ministère de l’intérieur. Elle souhaite en savoir davantage sur le rôle du Ministère de l’éducation et des sciences concernant l’éducation des enfants dans les lieux de détention.

31.La délégation voudra bien dire si le Gouvernement a rencontré des difficultés particulières pour faire connaître la Convention relative aux droits de l’enfant et, notamment, sensibiliser l’opinion publique aux droits des groupes vulnérables, comme les personnes déplacées à l’intérieur du pays, les réfugiés ou les minorités. Il serait utile de savoir comment la société perçoit les droits de ces groupes. Il serait aussi intéressant d’avoir des informations sur la situation des filles, en particulier dans certains segments de la société où leurs droits pourraient ne pas être respectés.

32.Mme Khattab demande si le Gouvernement prend des mesures en faveur des groupes minoritaires et s’il envisage de scolariser les enfants déplacés et d’améliorer leurs conditions d’hébergement. Elle souhaiterait aussi savoir s’il a prévu de réviser la législation relative aux réfugiés en vue de la rendre conforme aux normes internationales.

33.MmeAIDOO relève que le rapport de l’État partie fait mention d’une quarantaine d’ONG travaillant activement dans le pays et qu’un Conseil national de coordination des ONG a été établi en juillet 2006. Elle s’étonne que le rapport ait été préparé uniquement par les différents ministères concernés et que rien ne soit dit sur la collaboration avec les ONG.

34.M. CITARELLA souhaiterait savoir quelle est la valeur juridique de la Convention relative aux droits de l’enfant dans l’État partie, si la législation nationale a été mise en conformité avec la Convention et si les dispositions de la Convention ont déjà été appliquées dans des décisions judiciaires.

35.M. POLLAR souhaite connaître l’importance accordée à l’opinion de l’enfant, par exemple dans le contexte de l’adoption. Il demande s’il existe encore des pratiques traditionnelles ou culturelles qui pourraient entraver la participation des enfants aux décisions les concernant et, dans l’affirmative, si des mesures sont envisagées pour mettre un terme à ces pratiques.

36.MmeLEE s’inquiète de ce qu’un certain nombre d’enfants n’ont pas été déclarés à la naissance et demande s’ils pourront avoir accès aux services de santé et d’éducation. La délégation voudra bien donner des informations sur les enfants retournés vivre dans la région de Gali, en précisant notamment s’ils peuvent recevoir un enseignement en géorgien et conserver leur identité géorgienne. Il serait également utile de savoir si les jeunes ont le droit de se réunir en assemblée, si le Gouvernement prévoit d’instaurer un parlement des enfants et quelles mesures il prend pour tenir compte de leur opinion, y compris celle des enfants issus de groupes vulnérables.

37.M. FILLALI demande de quelle manière le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est appliqué dans les domaines judiciaire, administratif et scolaire. Il souhaite notamment savoir si des décisions judiciaires ont été prises sur la base de ce principe, combien de plaintes ont été déposées par des enfants pour des atteintes à leurs droits ou à leurs intérêts et si le recours aux châtiments corporels à l’école comme à la maison tend à disparaître.

38.MmeGOLUBIANI (Géorgie) souligne que les ONG jouent un rôle important dans l’élaboration des politiques relatives à la protection et à l’éducation des enfants ainsi que dans la prestation de services d’assistance sociale.

39.MmeTOMASHVILI (Géorgie) souligne que les ONG sont associées à des projets spécifiques, participent aux commissions de coordination interinstitutions et aux mécanismes de suivi et collaborent à l’élaboration de certains plans d’action.

40.Certaines questions, telles que la violence familiale et la traite des êtres humains, sont spécifiquement prises en charge par les ONG, qui gèrent les centres d’hébergement ouverts aux victimes et leur fournissent, le cas échéant, une aide judiciaire.

41.En matière d’application de la loi, un protocole d’accord a été signé entre les ONG et le Ministère de l’intérieur. Une division stricte a été établie entre les fonctions du Ministère de l’intérieur, dont relèvent les cellules de garde à vue, et celles du Ministère de la justice, chargé de superviser les établissements pénitentiaires. Ce double système permet de mieux déceler toute violation des droits des personnes détenues.

42.Enfin, conformément au nouveau Code de procédure pénale, le Bureau du Procureur général ne peut ouvrir une enquête que s’il est saisi d’une information. Or ce sont souvent les ONG qui fournissent de telles informations ou portent plainte.

43.M. MESKHORADZE (Géorgie) dit qu’à l’initiative du Ministère de la justice, des bureaux chargés de procéder à l’enregistrement des naissances relevant de l’Agence chargée de l’état civil ont été créés dans toutes les collectivités territoriales et dotés de personnels compétents. En outre, les procédures d’enregistrement ont été simplifiées en 2008, ce qui a permis d’inscrire à l’état civil des mineurs qui jusqu’à présent n’avaient pas été enregistrés. Le nombre de personnes non connues de l’état civil a d’ailleurs considérablement baissé depuis la dernière période examinée.

44.MmeSHUKAKIDZE (Géorgie) précise que cette grande avancée est notamment due au fait que les personnels de l’état civil se rendent systématiquement dans les écoles et les institutions de protection de l’enfance pour procéder à l’enregistrement des enfants ainsi qu’à la volonté politique du Gouvernement géorgien, qui souhaite que tous les enfants soient connus des services de l’état civil d’ici la fin de 2008. Un projet mené en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme devrait d’ailleurs permettre d’atteindre cet objectif: il prévoit en effet que des équipes sillonnent le pays de manière à atteindre toutes les communautés et à veiller à ce que les enfants des minorités soient eux aussi déclarés à la naissance.

45.Une base de données devrait en outre être créée afin d’élaborer des statistiques sur les quelque 645 000 élèves du pays. Le Gouvernement géorgien devrait être en mesure de fournir au Comité, lors de la présentation de son prochain rapport périodique, des données ventilées sur la population scolaire, dont le nombre d’abandons scolaires et les raisons de tels abandons ou encore les taux de redoublement.

46.MmeTOMASHVILI (Géorgie) dit que son pays a ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et a demandé au Défenseur public déjà en place − dont les actions ont grandement contribué à faire diminuer le nombre de cas de torture − de remplir les fonctions de mécanisme national chargé d’effectuer des visites régulières dans les prisons prévu par ce Protocole. Elle précise que les seules régions dans lesquelles l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants pose problème sont les zones de conflit, soit l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud.

47.D’autres mécanismes étaient déjà chargés de prévenir les actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, tels que le Conseil de coordination composé de représentants des Ministères de la justice, de l’intérieur, du travail, de la santé et des affaires sociales, du Bureau du Procureur général et le Bureau du Défenseur public, de Human Rights Watch, du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, de l’OSCE et d’experts indépendants, entre autres. Il existe également une unité relevant du Ministère de l’intérieur chargée de veiller au respect des droits de l’homme de toute personne − mineure ou majeure − placée en rétention et de saisir le Bureau du Procureur général en cas d’allégation de mauvais traitements ou de signes cliniques de torture ou de mauvais traitements. Il faut savoir que dès lors que cette personne est placée en détention avant jugement, elle doit obligatoirement être examinée par un médecin qui s’assure qu’elle n’a pas été soumise à des actes de torture ou autres mauvais traitements. Le Bureau du Procureur général est la seule instance habilitée à engager des poursuites en cas d’allégation de torture ou de mauvais traitements.

48.M. FILALI demande si les victimes d’actes de torture ont accès à des voies de recours dans les cas où le Procureur général ne demande pas l’ouverture d’une enquête.

49.La PRÉSIDENTE, constatant qu’il existe de nombreux mécanismes chargés de prévenir la torture et les mauvais traitements, demande s’il existe un organisme chargé de coordonner les travaux des différents mécanismes de surveillance existant dans ce domaine.

50.MmeTOMASHVILI (Géorgie) répond que le Conseil de coordination interinstitutions est l’organisme chargé d’assurer le bon fonctionnement des organismes publics de prévention de la torture et de protection des victimes. Elle s’engage à faire parvenir au Comité un complément d’information écrit sur le fonctionnement du système de protection mis en place dans ce domaine par la Géorgie.

51.Jusqu’en 2005, le Procureur général était habilité à demander l’ouverture d’une enquête dès lors qu’il estimait que les informations qui lui avaient été présentées le justifiaient. Il s’agissait donc d’un pouvoir discrétionnaire. Depuis la modification du Code de procédure pénale en 2005, il est tenu d’ouvrir une enquête quel que soit son avis sur les faits portés à sa connaissance. Tous les éléments de preuve doivent être versés au dossier et un numéro de rôle est automatiquement affecté à chaque affaire pénale.

52.M. PARFITT voudrait savoir si l’État partie a envisagé la possibilité de créer une commission des droits de l’homme indépendante qui permettrait aux personnes qui estiment avoir été victimes de violations des droits de l’homme de la part de membres des forces de l’ordre de s’adresser à un mécanisme indépendant du Bureau du Procureur général et de la police elle‑même.

53.MmeTOMASHVILI (Géorgie) dit que la police peut demander l’ouverture d’une enquête pour un certain nombre de crimes mais que seul le Procureur peut le faire lorsque les actes incriminés concernent des affaires relatives à des actes de torture ou à des mauvais traitements. Il convient en outre de noter que les organisations non gouvernementales peuvent elles aussi mener une enquête et saisir le Procureur général − ou la police selon les cas − si elles ont connaissance d’informations qui justifient d’engager des poursuites.

54.M. KOTRANE demande si, dans la pratique, le Centre des droits de l’enfant et le Bureau du Défenseur public ont déjà recueilli des plaintes d’enfants dénonçant des violations des droits consacrés par la Convention et quels sont les efforts mis en œuvre par l’État partie pour développer les activités de ce centre dans les différentes régions du pays. La délégation pourrait confirmer ou infirmer les informations reçues par le Comité selon lesquelles il serait question d’abaisser l’âge de la responsabilité pénale à 12 ans à compter du 1er juillet 2008.

55.MmeTOMASHVILI (Géorgie) dit que le Défenseur public est tenu de présenter tous les six mois un rapport au Parlement, qui est rendu public. Le Ministère de l’intérieur et le Bureau du Procureur général en prennent donc connaissance à cette occasion et demandent systématiquement l’ouverture d’une enquête si des violations ont été commises.

56.Le Défenseur public a en outre le droit de se rendre dans tous les lieux de détention pour les inspecter − ou désigner quelqu’un pour le faire à sa place − et rendre compte de ce qu’il y a observé au Parlement. Ce dernier a tous pouvoirs pour décider de la suite à donner aux affaires portées à sa connaissance par le Défenseur public, et le pouvoir exécutif ne peut en rien influer sur la décision du Parlement.

57.MmeGOLUBIANI (Géorgie) dit que, pour ce qui est de la diffusion de la Convention, l’aide de l’UNICEF a été précieuse tant sur le plan technique que sur le plan matériel.

58.Plusieurs programmes de formation aux principes consacrés par la Convention ont été élaborés à l’intention de groupes cibles comme les juges et les enseignants, et la Convention a été inscrite au programme des cours d’éducation civique. Des formations spéciales ont également été dispensées dans les institutions de protection de l’enfance, tant à l’intention des directeurs d’établissements que des enfants placés dans ces institutions. Les travailleurs sociaux et les ONG ont également participé à cet effort en allant à la rencontre de la population sur le terrain.

59.L’Union européenne a pour sa part organisé en Géorgie une formation de trois jours dispensée par des magistrats, qui a porté sur la réforme des institutions de protection de l’enfance dans le respect des principes consacrés par la Convention.

60.La PRÉSIDENTE demande si les dispositions de la Convention sont directement appliquées par les tribunaux.

61.MmeMIKHELIDZE (Géorgie) dit qu’un amendement a été apporté au Code de procédure pénale qui prévoit que seuls les juges, les procureurs et les enquêteurs qui ont suivi une formation spéciale en pédagogie et en psychologie sont compétents pour les affaires pénales concernant des mineurs. Les institutions chargées de la formation des magistrats sont le Bureau du Procureur général et l’École supérieure de la magistrature. La formation, conduite en étroite coopération avec l’UNICEF, s’inscrit dans le cadre de la réforme du système de justice pour mineurs et va concerner, à partir de septembre 2008, 160 juges pour enfants.

62.Les dispositions de la Convention priment le droit interne. La Constitution géorgienne dispose qu’après la Loi fondamentale et l’accord constitutionnel entre l’État et l’Église orthodoxe géorgienne, les traités internationaux occupent la troisième place dans la hiérarchie du système juridique. La Convention relative aux droits de l’enfant est donc directement applicable par le système judiciaire géorgien.

63.M. PARFITT demande à la délégation géorgienne si elle peut donner des exemples de recours actuellement examinés par la Cour suprême, concernant des discordances entre les dispositions d’instruments internationaux ratifiés par la Géorgie et les lois internes.

64.MmeTOMASHVILI (Géorgie) indique que la Géorgie s’est dotée d’une loi qui prévoit que, lorsque la Cour européenne des droits de l’homme fait droit à une plainte déposée par un citoyen géorgien et détermine un certain montant d’indemnité, celle-ci est versée par le Ministère de la justice. La Géorgie s’apprête à modifier sa législation pour que cette procédure soit également possible en ce qui concerne les décisions du Comité des droits de l’homme. De la même manière, des dispositions du Code de procédure pénale ont été modifiées en se fondant sur les décisions du Comité des droits de l’homme et sur celles de la Cour européenne des droits de l’homme.

65.M. PURAS (Rapporteur pour la Géorgie) rappelle qu’au cours des deux dernières décennies le système de santé de la Géorgie s’est effondré et il salue les efforts déployés par le Gouvernement géorgien pour mettre en place un nouveau système de santé rationnel et efficace fondé sur un partenariat entre les secteurs public et privé. Le Comité voudrait toutefois être rassuré sur le fait que les groupes vulnérables, comme les familles, les enfants ou les personnes pauvres ne sont pas sacrifiés et aimerait savoir comment l’État partie veille à ce que les soins de santé maternelle et infantile soient considérés comme prioritaires. Il faudrait aussi savoir si l’État partie s’est doté d’une politique concernant la santé mentale et plus particulièrement la santé mentale des enfants, y compris en ce qui concerne la prévention, les soins de santé primaires, les soins en hôpital de jour et les soins dispensés dans le cadre d’une hospitalisation. La Géorgie ne semble pas disposer de services hospitaliers de psychiatrie mentale qui accueilleraient spécifiquement les enfants, et l’orateur souhaiterait connaître les projets de l’État partie en la matière. Dans les réponses écrites à la liste des points à traiter fournies par l’État partie, on trouve des termes très démodés comme «oligophrénie», «arriération mentale» et «crétinisme». L’État partie pourrait tirer un grand profit de la coopération avec les ONG, qui sont plus avancées dans le domaine de la psychiatrie.

66.MmeVUCKOVIC-SAHOVIC (Corapporteuse pour la Géorgie) demande si les recommandations de l’Étude sur la violence à l’encontre des enfants ont été prises en considération par l’État partie et si celui‑ci envisage de prendre des mesures pour combattre la violence contre les enfants, mais aussi la violence entre enfants, très présente en Géorgie, et de se pencher sur les causes des comportements violents des enfants, car il est prouvé que plus de 90 % des enfants qui commettent des actes de violence en ont eux-mêmes subis. Le Comité a adopté une observation générale sur les châtiments corporels et voudrait savoir si l’État partie, qui a déjà interdit les châtiments corporels à l’école, envisage aussi de les interdire au sein de la famille.

67.M. KRAPPMANN demande des explications sur ce qui lui semble être une dégradation de la qualité de l’enseignement dans les établissements préscolaires. Il semble y avoir plus de places disponibles que d’enfants dans ces établissements, et des explications sur ce phénomène seraient bienvenues. L’orateur demande combien coûte l’éducation préscolaire et comment est contrôlée la qualité de l’enseignement dans ces établissements. Il constate que le nombre d’établissements privés a augmenté et se demande si c’est en réaction à une mauvaise qualité de l’enseignement public.

68.M. Krappmann demande des précisions sur l’intégration des enfants réfugiés. Il aimerait savoir si tous les enfants venus d’autres pays, et notamment de Tchétchénie, bénéficient de tous les droits consacrés par la Convention, en particulier les enfants demandeurs d’asile qui n’obtiennent pas le statut de réfugiés, mais ne peuvent pas être renvoyés dans leur pays pour des raisons humanitaires. Il faudrait savoir ce que prévoit la législation géorgienne relative aux réfugiés pour ces enfants. Beaucoup de réfugiés tchétchènes vivent dans la vallée de Pankisi, où les conditions de développement et d’éducation sont assez mauvaises. Tous les enfants ne sont pas scolarisés; il est fait état d’actes de violence à l’encontre des enfants et de mariages de filles mineures. La délégation voudra bien indiquer qui protège ces enfants et ce que prévoit l’État partie pour améliorer la situation.

69.De nombreux enfants et adultes déplacés à l’intérieur de leur propre pays vivent hors de la société dans des centres collectifs, souvent isolés et dans de mauvaises conditions. Ces centres devraient être fermés. L’orateur demande ce que deviendraient ces personnes si ces centres collectifs étaient privatisés, sachant que ce type de mesures entraîne en général un accroissement du phénomène des sans-abri.

70.Malgré la croissance économique que connaît la Géorgie, la pauvreté ne cesse de progresser et touche en particulier les familles nombreuses n’ayant qu’un seul revenu. M. Krappmann souhaiterait des informations sur les mesures prises par l’État partie pour soutenir ces familles, et souligne que les mesures financières ne sont efficaces que combinées avec d’autres mesures portant notamment sur la santé, l’alimentation, le logement, les loisirs et l’éducation. Il faudrait savoir si l’État partie a mis au point dans les jardins d’enfants, les écoles et les communautés, des programmes ciblés à l’intention des enfants touchés par l’extrême pauvreté.

71.M. KOTRANE, se référant à la question soulevée par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en 2006 sur la persistance des stéréotypes dans les programmes scolaires, qui conduisent les femmes à se limiter aux filières professionnelles traditionnellement féminines, demande des informations complémentaires sur la place des filles et des garçons dans la société et voudrait savoir s’il existe une éducation à l’égalité entre les sexes. Il souhaiterait par ailleurs savoir pourquoi les filles commettent beaucoup moins d’infractions que les garçons et il s’étonne du nombre très faible de condamnations prononcées en 2005 par rapport au nombre élevé d’infractions commises la même année.

72.MmeAIDOO dit que le Comité ne dispose pas d’informations complètes sur le système de santé infantile, sur les activités menées dans le domaine du développement de la petite enfance, comme la promotion de l’allaitement, la stimulation précoce des jeunes enfants et les apprentissages précoces. Elle s’étonne par ailleurs du taux élevé de mortalité néonatale et demande quelles en sont les causes. Elle constate que la mortalité néonatale est plus importante dans les zones rurales que dans les villes, et plus élevée chez les minorités comme les Azéris.

73.De même, en ce qui concerne l’éducation préscolaire, il existe une énorme différence entre les zones urbaines et rurales, et la délégation voudra bien indiquer ce que fait l’État partie pour réduire cet écart.

74.L’oratrice souhaiterait aussi savoir quels sont les services de santé curative et préventive existant pour les adolescents, filles et garçons, notamment en matière d’éducation à la santé de la reproduction, et si les jeunes peuvent bénéficier dans ce domaine d’une aide et d’une écoute confidentielles. Les adolescents ne semblent pas pouvoir prendre de décisions les concernant en tant que patients sans que les informations soient communiquées à leurs parents ou à leurs représentants légaux, et l’oratrice se demande si cela n’est pas, pour eux, source de difficultés. Elle souhaiterait des explications sur le taux élevé de grossesses chez les adolescentes et l’augmentation du nombre d’avortements chez les jeunes filles de 15 à 19 ans.

75.Il serait par ailleurs utile de savoir où en est l’étude sur la pauvreté des enfants menée en collaboration avec l’UNICEF. Dans le cas où elle serait terminée, la délégation pourra préciser si elle est utilisée par le Gouvernement dans le cadre de son programme de réduction de la pauvreté et si ce programme donne la priorité aux enfants.

76.MmeKHATTAB demande si l’État partie projette d’allouer plus de ressources à l’éducation à l’allaitement. Elle voudrait aussi savoir si la Géorgie envisage de ratifier la Convention no 183 de l’Organisation internationale du Travail sur la protection de la maternité.

77.En ce qui concerne l’interdiction des châtiments corporels à l’école, elle souhaite savoir comment l’État partie veille à ce que la loi soit respectée. Elle souhaiterait également obtenir des informations complémentaires sur les avancées réalisées par l’État partie, depuis la présentation de son deuxième rapport périodique, en matière de lutte contre le travail des enfants et dans la mise en œuvre des Conventions de l’Organisation internationale du Travail no 182 sur les pires formes du travail des enfants, et no 138 sur l’âge minimum. Il serait utile de savoir si la Géorgie participe au programme international de l’OIT pour l’abolition du travail des enfants (IPEC), et quel est le rôle des ONG à cet égard. L’oratrice signale que le pourcentage d’enfants qui travaillent en Géorgie est nettement supérieur au taux moyen des pays en transition. En Géorgie, comme dans d’autres pays, certains considèrent qu’un enfant pauvre qui travaille peut ainsi améliorer son niveau de vie et que, par conséquent, le travail des enfants ne doit pas être aboli. Il convient toutefois de souligner que, plus les enfants travaillent, moins ils poursuivent leur scolarité.

78.Mme Khattab se félicite de la création de l’Unité de lutte contre la traite d’êtres humains, mais se demande si l’État partie ne devrait pas mettre en place une unité multisectorielle qui coordonnerait les travaux des différents ministères et organismes qui luttent contre la traite et l’exploitation sexuelle des enfants, tels que les services des migrations, la police, l’éducation, la justice, les médias et les ONG. Elle relève qu’il n’est fait aucunement mention de l’existence d’un système de collecte de données sur les victimes ou d’un mécanisme de plainte, et souhaiterait savoir si des campagnes de sensibilisation sont menées à l’intention des victimes et de la population sur les conséquences de la traite et de l’exploitation sexuelle des enfants, s’il existe des services de réadaptation pour les victimes et des programmes de formation et de renforcement des capacités pour les professionnels qui travaillent dans ce domaine.

79.La délégation pourrait en outre indiquer si l’État partie dispose de statistiques sur le phénomène des enfants des rues, si des mesures sont prises pour protéger ces enfants de l’exploitation sexuelle et de la traite. Elle pourrait aussi préciser s’il existe une politique en matière de réadaptation et de réinsertion de ces enfants, si des services ciblant spécifiquement et systématiquement les enfants des rues ont été mis en place et si un appui est apporté aux ONG qui travaillent avec ces enfants. Enfin, il faudrait savoir ce qui est fait pour protéger les enfants contre la consommation de drogues.

La séance est levée à 13 h 5.

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