NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.101728 janvier 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trente‑huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1017e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le lundi 24 janvier 2005, à 10 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique du Togo

La séance est ouverte à 10 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Togo ((CRC/C/65/Add.27); document de base (HRI/CORE/Add.38/Rev.2); liste des points à traiter (CRC/C/Q/TGO/2); réponses écrites du Togo (CRC/C/RESP/78))

1. Sur l’invitation du Président, M mes Boyoti N’Dadiya et Akiteyi Azanbo (Togo) prennent place à la table du Comité.

2.Mme BOYOTI N’DADIYA (Togo) dit que, depuis la présentation du rapport initial, des progrès sensibles ont été accomplis au Togo dans le domaine de la protection des droits de l’enfant, notamment avec la création de la Commission nationale d’accueil et de réinsertion sociale des enfants victimes de trafic, la mise en place de comités locaux dans toutes les préfectures et le Plan national d’action pour la lutte contre le travail et la traite d’enfants. Le projet de Code de l’enfant est en train d’être revu et harmonisé avec les instruments internationaux pertinents. Le Togo a ratifié les deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant. Beaucoup reste à faire, mais le Togo a la volonté politique de poursuivre les améliorations, avec l’aide du Comité.

3.Mme ALUOCH demande si le deuxième rapport périodique a été élaboré par le Comité national de protection et de promotion de l’enfant, si cette instance a déjà élaboré un plan d’action en faveur de l’enfance dans les domaines social et juridique, comme le prévoit son mandat, et s’il peut être saisi de plaintes émanant d’enfants. Le rapport ne précise pas qui coordonne l’application de la Convention, ni si la Convention est citée et appliquée par les tribunaux nationaux.

4.Des précisions seraient nécessaires au sujet des tribunaux pour enfants et du budget spécifiquement alloué à l’enfance. Il faudrait aussi savoir si une définition uniforme de l’enfant est prévue dans le projet de Code de l’enfant.

5.Le Code des personnes et de la famille impose le respect des pratiques coutumières, qui sont souvent discriminatoires à l’égard des femmes et des fillettes, et il est à espérer que le futur Code de l’enfant apportera une solution à ce problème et règlera également la question de la discrimination dont sont victimes, en vertu du Code de la nationalité de 1998, les enfants de mère togolaise et de père étranger.

6.Dans son rapport, le Togo mentionne diverses mesures destinées à améliorer l’enregistrement des naissances, mais selon certaines sources peu d’enfants sont enregistrés dans le délai légal et cette pratique reste peu répandue dans les zones rurales, notamment en raison de l’éloignement des centres d’enregistrement, des frais élevés et de l’ignorance des parents; il est d’autant plus nécessaire de sensibiliser la population à cette question qu’un certificat de naissance est requis pour s’inscrire à l’école primaire.

7.Mme OUEDRAOGO constate que la mise en œuvre de la Convention au Togo se heurte à des obstacles d’ordre économique, social et politique et au poids des traditions. Le Togo n’est partie à aucune des conventions de La Haye, ni à celles des Nations Unies relatives à l’apatridie et à la pension alimentaire. Le Togo n’a pas encore soumis ses rapports sur la mise en application des Protocoles facultatifs à la Convention et son deuxième rapport périodique est en outre très sommaire et un certain nombre d’informations font défaut.

8.Le projet de Code de l’enfant est en cours de remaniement, mais certains articles de ce texte semblent avoir besoin d’être mis en conformité avec la Convention, notamment les articles 257, 240, 243 et 340 à 346. À ce propos, il faudrait savoir si le projet de Code prévoit d’harmoniser l’âge nubile des garçons et des filles.

9.La coordination des initiatives liées à l’application de la Convention incombe apparemment à la Direction générale de la protection de l’enfance et au Comité national de protection et de promotion de l’enfant, mais ces deux organismes manquent de ressources financières et humaines et on peut se demander en outre comment ils se partagent les tâches pour éviter les doubles emplois. Il faudrait de plus préciser si le suivi de l’application de la Convention est assuré par l’Observatoire de suivi de la situation des enfants et des femmes, par la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) ou par un autre organisme.

10.Il serait également utile de savoir si le Plan d’action pour la protection et la promotion de l’enfant a fait l’objet d’une évaluation et s’il est prévu d’en adopter un autre. Une politique nationale sur l’enfance et un Plan d’action triennal de la protection de l’enfance avaient également été annoncés.

11.La délégation pourrait indiquer quelle suite a été donnée aux recommandations du Comité concernant la collecte de données, qui présente encore d’importantes lacunes, et fournir des précisions sur la Commission nationale des droits de l’homme. Il serait utile en particulier de savoir de quel genre de plaintes cet organisme est saisi et si les enfants connaissent son existence. D’une façon générale, on peut se demander comment les enfants sont informés de leurs droits, puisque la Commission n’a mené de campagnes de sensibilisation que dans les écoles alors que le taux de scolarisation est très bas dans le pays. Il serait aussi intéressant de savoir à qui rend compte la division chargée de l’enfance au sein de la Commission et si elle peut faire des recommandations au Gouvernement pour la protection des droits des enfants.

12.Il faudrait en outre savoir quelles structures ont été mises en place pour veiller à ce que les enfants accèdent à des informations qui ne leur soient pas préjudiciables, si les séances de sensibilisation des propriétaires de vidéoclubs aux dangers de la diffusion de certains films violents et à caractère pornographique ont eu lieu comme prévu et si les parents sont conscients que leurs enfants risquent d’accéder sur Internet à des documents inadaptés à leur âge.

13.Enfin, il serait utile de savoir ce qui est fait pour interdire les châtiments corporels, encore très répandus à l’école comme à la maison, et pour encourager d’autres formes, non violentes, de punition.

14.Mme AL THANI s’inquiète de la discrimination à l’encontre des enfants handicapés, en particulier de ceux nés avec une malformation, ces derniers étant parfois tout simplement tués, et voudrait savoir ce qui est fait pour réprimer les auteurs de ces crimes et éduquer les parents afin de faire évoluer les mentalités. La délégation pourrait en outre indiquer si des mesures ont été prises pour protéger les orphelins du sida contre la discrimination à l’école et le trafic d’enfants. Des précisions sur les châtiments corporels s’imposent car le Togo fait état d’une interdiction ministérielle alors que certaines sources affirment que cette pratique reste autorisée par la loi.

15.Mme SMITH demande si la corruption constitue une menace importante pour les ressources disponibles. Elle voudrait en outre savoir quelles affaires sont jugées par les tribunaux traditionnels, en place dans les zones rurales, et comment sont nommés les juges des tribunaux ordinaires. Des précisions sur la coopération entre les ministères, qui semble parfois difficile, et avec les ONG seraient également utiles.

16.Mme ANDERSON demande si la mise en œuvre du plan d’action sur l’enregistrement des naissances a débuté et si les jeunes ont la possibilité de créer des associations. Les ONG qui offrent une aide sociale semblent bien plus nombreuses que celles œuvrant à sensibiliser et à promouvoir des droits, ce qui donne à penser que ces dernières ont plus de difficultés à exercer leurs activités et à se demander si cette situation tient à une distinction dans la loi.

17.Enfin, l’enseignement étant dispensé uniquement en français à partir du primaire, la délégation pourrait expliquer comment font les élèves non francophones.

18.M. CITARELLA demande si la Convention a été invoquée devant les tribunaux, quelles mesures sont prises pour empêcher les abandons de nouveau‑nés, pratique qui semble assez répandue, et ce qui est fait pour changer les mentalités et faire accepter aux parents que leurs enfants ont des droits.

19.M. LIWSKI demande si des mesures ont été prises pour remédier à la discrimination − signalée récemment par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels à l’encontre des enfants et adolescents des ethnies du nord du pays, notamment dans le cadre des activités destinées aux jeunes, et si la situation s’est améliorée.

20.Dans le rapport, il est indiqué que les mineurs ne peuvent pas créer des associations mais peuvent adhérer à celles des adultes, mais il serait utile de savoir quel est leur statut au sein de ces associations (simples observateurs ou participants actifs) et si ces dispositions seront modifiées dans le futur Code de l’enfant.

21.Le rapport ne mentionne aucune mesure contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, alors que dans ses observations finales le Comité des droits économiques, sociaux et culturels fait état de violations très graves, en particulier d’exécutions extrajudiciaires. Même s’il s’agit de faits anciens, il serait utile de savoir si des mesures sont prévues pour obliger les agents de l’État à respecter les droits fondamentaux.

22.M. KRAPPMANN demande quelle place occupe l’enfant dans la société togolaise, qui a la responsabilité d’organiser les campagnes de sensibilisation des parents à la nécessité de respecter l’opinion de l’enfant dans les prises de décisions le concernant, combien de parents ces campagnes ont permis de toucher et si ces campagnes ont induit un changement de comportement de la part des parents concernés. Il faudrait aussi savoir si les élèves sont consultés pour toute décision les concernant dans leur établissement scolaire et à partir de quel âge l’enfant est entendu dans le cadre des procédures judiciaires et administratives.

23.La délégation pourrait indiquer si le Parlement des enfants siège régulièrement, en quoi il influence les décideurs dans le cadre de l’élaboration des politiques de l’enfance, si les enfants prennent part aux décisions au niveau local − en donnant par exemple leur opinion au sujet de l’implantation d’aires de jeux ou la mise en place d’activités récréatives − et comment les juges, les enseignants ou les élus locaux sont sensibilisés à l’idée de donner aux enfants davantage de poids dans la prise de décisions.

24.M. FILALI voudrait savoir pourquoi l’État partie n’a pas sollicité l’aide d’organisations spécialisées, comme l’UNICEF, pour élaborer son rapport et regrette que les réponses écrites ne donnent pas d’informations concrètes permettant de se faire une idée précise de la situation des droits de l’enfant au Togo. Il serait utile de savoir si l’État partie envisage de mettre en place un mécanisme de suivi des observations finales chargé de recueillir régulièrement des données sur les différentes questions préoccupant le Comité.

25.Il serait aussi utile de savoir si les responsables de l’application de la loi − la police, les magistrats et autres auxiliaires de justice − bénéficient d’une formation aux droits de l’homme en général et aux droits de l’enfant en particulier.

26.La délégation pourrait par ailleurs exposer les mesures prises en faveur des handicapés pour éviter qu’ils ne soient ostracisés, jusque dans leur propre famille apparemment, et pour combattre les crimes que sont l’infanticide et les mutilations génitales féminines, sur lesquels des données statistiques précises seraient bienvenues.

La séance est suspendue à 11 h 10; elle est reprise à 11 h 30.

27.Mme AKITEYI AZANBO (Togo) dit que c’est à la Direction générale de la protection de l’enfance, relevant du Ministère des affaires sociales, qu’il incombe actuellement d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques de l’enfance, puis d’en effectuer le suivi sur le plan national. C’est également elle qui reçoit les plaintes d’enfants estimant que leurs droits ont été bafoués ou de membres de leur famille ou encore de tiers qui voudraient porter plainte en leur nom. Le Comité national de la protection et de la promotion de l’enfant est chargé de rédiger les rapports périodiques à soumettre en vertu de la Convention et d’autres rapports sur le thème de l’enfance au niveau national; il est prévu de lui conférer davantage d’autonomie afin qu’il puisse s’acquitter de sa tâche en toute indépendance.

28.L’âge de la responsabilité pénale est actuellement de 13 ans, mais le projet de Code de l’enfant prévoit de le relever et de fixer un seul et même âge pour la majorité civile, pénale, civique et le consentement au mariage.

29.La faiblesse du taux d’enregistrement des naissances est imputable au fait que les bureaux de l’état civil sont trop difficilement accessibles à la majorité de la population et c’est pourquoi le Gouvernement, les ONG et les partenaires au développement ont créé des kiosques faisant office de bureaux de l’état civil au sein même des structures sanitaires.

30.Le Gouvernement a entrepris de lutter contre les violences dont sont victimes les enfants en menant des campagnes de sensibilisation dans les écoles et sur les places de marché de manière à toucher le plus grand nombre de personnes. Le Plan d’action triennal de la protection de l’enfance prévoit des interventions dans les écoles et sur les places de marché, ainsi que des actions de porte‑à‑porte pour diffuser ce message le plus largement possible.

31.La Commission de censure a repris ses activités à la fin de l’année 2004 et tient des réunions hebdomadaires. Malheureusement, les vidéoclubs échappent encore pour la plupart au contrôle des autorités, en raison notamment de leurs horaires d’ouverture anarchiques et le plus souvent très tardifs. Le Ministère des affaires sociales et le Ministère de l’intérieur étudient donc actuellement les moyens de mener une action plus efficace pour tenter de régulariser les activités de ces commerces.

32.Le mandat du Parlement des enfants est arrivé à échéance et n’a pas été renouvelé pour le moment. Toutefois, compte tenu des changements actuels, on peut espérer qu’un nouveau parlement des enfants pourra être constitué prochainement. Il convient de signaler par ailleurs qu’il existe des associations d’enfants et que le droit d’association n’est donc pas refusé aux enfants.

33.Mme BOYOTI N’DADIYA (Togo) dit qu’en vertu de l’article 32 de la Constitution, la mère peut transmettre sa nationalité à son enfant au même titre que le père, et que tous les autres textes relatifs à cette question seront à terme alignés sur cette disposition.

34.Le Plan d’action triennal de la protection de l’enfance, élaboré par le Ministère des affaires sociales et sur le point d’être entériné, prévoit la mise en place de campagnes de sensibilisation aux droits de l’enfant et à la question de la discrimination en direction non seulement des écoliers mais aussi de la population dans son ensemble, toutes classes sociales confondues.

35.Des kiosques d’enregistrement des naissances ont été installés dans les centres de santé des zones les plus reculées du pays. Des réunions à l’occasion desquelles les jeunes mères sont invitées à remplir un questionnaire sur lequel elles indiquent le nom de leur enfant, son sexe et sa date de naissance, sont de plus organisées régulièrement dans les centres de santé pour tenir compte du fait qu’un certain nombre d’accouchements se déroulent à domicile avec l’aide d’accoucheuses traditionnelles et pourraient de ce fait échapper au recensement. Les directeurs de centres de santé transmettent ensuite les informations au kiosque faisant office de bureau de l’état civil.

36.Le Gouvernement togolais n’a pas encore donné suite à la recommandation issue de la Conférence régionale sur l’enregistrement des naissances qui s’est tenue à Dakar en février 2004 invitant les États à permettre aux parents, pour une durée d’un an, de déclarer gratuitement leur enfant à l’état civil, mais envisage de le faire. Par ailleurs, des audiences foraines spéciales sont tenues pour la délivrance aux enfants concernés de jugements supplétifs d’actes de naissance, ce qui leur permet de jouir des mêmes droits que les enfants enregistrés immédiatement après leur naissance.

37.La loi togolaise punit l’abandon d’enfants. Lorsque le cas se présente, tout enfant abandonné est pris en charge par les services de la Direction générale de la protection de l’enfance puis confié à un orphelinat avant d’être adopté. Dans ce cas, l’adoption nationale est privilégiée et une procédure d’adoption internationale n’est engagée que lorsque aucune famille togolaise ne s’est portée volontaire pour accueillir l’enfant.

38.La Direction chargée de la protection des droits des personnes handicapées a mené, en collaboration avec la Direction générale de la protection de l’enfance et avec plusieurs ONG, des campagnes de sensibilisation et de prise en charge individuelle des familles ayant des enfants handicapés dans le but de lutter contre la discrimination à l’égard de ces enfants et de favoriser la reconnaissance de leurs droits. Des mesures de sensibilisation ont également été prises pour tenter de mettre fin aux éliminations d’enfants porteurs de malformations à la naissance, en faisant appel à la collaboration des chefs religieux et des féticheurs comme relais sur le terrain. Tous les auteurs de crimes commis contre des enfants nés avec des malformations sont poursuivis et encourent les mêmes peines que les autres criminels.

39.Les autorités n’ont jamais reçu de plainte concernant des actes ou des pratiques discriminatoires à l’encontre des enfants victimes du VIH/sida, mais le Comité national de lutte contre le sida et plusieurs ONG s’occupant du VIH/sida mènent néanmoins des activités de sensibilisation dans les écoles pour prévenir ce type de comportement.

40.Les renseignements selon lesquels il existerait une discrimination à l’encontre des enfants et des jeunes du nord du pays ne sont guère fondés. Si ce type de discrimination a pu se produire dans le contexte plus large des troubles sociopolitiques qui ont secoué le pays il y a plusieurs années déjà, tous les enfants sont aujourd’hui traités de la même façon et cohabitent dans des conditions d’égalité.

41.La Convention relative aux droits de l’enfant est appliquée par les tribunaux togolais; les magistrats appelés à juger les auteurs de délits contre les enfants fondent le plus souvent leurs décisions sur ses dispositions, faute d’une législation nationale spécifique en la matière. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs reçu une formation approfondie à la mise en œuvre de la Convention.

42.Aucune corruption n’est à déplorer dans l’utilisation des ressources allouées aux services destinés aux enfants. Les différentes parties prenantes sont en effet suffisamment conscientes de la vulnérabilité des enfants victimes de violations pour faire en sorte qu’ils n’aient pas à pâtir des incidences d’un tel phénomène.

43.Les différents ministères s’occupant des questions relatives aux droits de l’enfant coopèrent sans grande difficulté. En revanche, il est plus difficile de coordonner l’action des ONG œuvrant en faveur des enfants. Le Plan d’action triennal de la protection de l’enfance, qui doit être adopté prochainement et à la mise en œuvre duquel les ONG vont être associées, devrait permettre de résoudre en partie ce problème.

44.Le PRÉSIDENT demande des précisions sur la manière dont sont perçus les enfants, en particulier s’ils sont considérés comme des titulaires de droits et, le cas échéant, quelles en sont les illustrations au quotidien. La délégation pourrait dire si les enfants peuvent exprimer librement leurs opinions, notamment à l’école, et ce par quels moyens, en quoi consistent précisément les activités de sensibilisation aux droits de l’enfant menées dans les établissements scolaires et, plus globalement, auprès du public, et si la radio par exemple est utilisée à cette fin.

45.Mme VUCKOVIC‑SAHOVIC, constatant que les violences commises par des adultes à l’égard des enfants sont plus répandues à l’école que dans la famille, demande des précisions sur les mesures prises pour sensibiliser les décideurs aux problèmes des châtiments corporels.

46.Mme SMITH souhaiterait des éclaircissements sur la signification du paragraphe 33 du rapport. Elle fait par ailleurs observer que, d’après les renseignements fournis au paragraphe 34, l’exercice du droit d’association par les enfants demeure limité, puisque les mineurs ne sont pas autorisés à créer des associations, mais seulement à y adhérer.

47.Mme KHATTAB demande des précisions sur le processus d’élaboration du Code de l’enfant; elle souhaiterait notamment savoir si les dispositions législatives existantes concernant les enfants ont déjà fait l’objet d’un examen et quelle est l’approche que le Gouvernement se propose d’adopter pour corriger les éventuelles incohérences de ces textes.

48.Mme BOYOTI N’DADIYA (Togo) dit que des radios pour enfants ont été créées dans toutes les régions du pays avec l’appui de l’ONG Plan Togo. Ce sont les enfants eux‑mêmes qui mettent sur pied et animent les émissions diffusées par ces radios.

49.Mme AKITEYI AZANBO (Togo) indique qu’une session de sensibilisation à la promotion et à la protection des droits de l’enfant a été organisée à l’intention des parlementaires, en collaboration avec UNICEF‑Togo. Cette session, animée par des experts, visait à démontrer la nécessité d’adopter un Code de l’enfant. Des activités de sensibilisation ont également été menées auprès des magistrats et de la police judiciaire dans le but de renforcer la protection des enfants victimes de trafic, d’exploitation sexuelle et de mauvais traitements. Ces actions ont suscité une prise de conscience à tous les niveaux. Aujourd’hui, tout acte suspect donne lieu a une réaction immédiate des autorités et toute plainte est suivie d’effet. Le Ministère de l’éducation, quant à lui, a pris un arrêté interdisant les châtiments corporels à l’école.

50.Bien que l’enfant soit traditionnellement roi au sein de la famille et de la société togolaises, il est vrai que son opinion n’a commencé à être prise en compte dans les prises de décisions que très récemment. Les comportements à l’égard de l’enfant ont commencé à changer et cette évolution, même lente, ne peut que se poursuivre.

51.M. FILALI demande quels sont les mécanismes de surveillance mis en place dans les écoles pour veiller au respect de l’interdiction des châtiments corporels et à qui peuvent s’adresser les élèves pour dénoncer des mauvais traitements.

52.Mme OUEDRAOGO demande si le Gouvernement a fait appel à la coopération des chefs traditionnels et religieux dans le cadre de ses programmes de sensibilisation, compte tenu de l’influence considérable qu’ils exercent sur des populations majoritairement analphabètes.

53.M. KRAPPMANN, notant que les inspecteurs pédagogiques ont le pouvoir de faire sanctionner les enseignants ayant recours aux châtiments corporels, demande combien d’enseignants ont effectivement fait l’objet de sanctions pour ce motif en 2003 et 2004.

54.Mme AKITEYI AZANBO (Togo) dit que les chefs traditionnels ont été impliqués très tôt dans la mise en œuvre de la Convention, puisqu’une campagne d’information a été organisée à leur intention dès la ratification de cet instrument.

55.S’agissant des mécanismes de surveillance dans les écoles, des comités des élèves ont été créés dans la plupart des établissements, notamment pour dénoncer les violences ou les abus sexuels commis par le personnel enseignant. Les enfants peuvent ainsi s’adresser à d’autres enfants, avec qui ils se sentent normalement plus en confiance. Les membres de ces comités répercutent ensuite les plaintes aux parents d’élèves et aux autorités compétentes. En 2004, six plaintes dénonçant des violations des droits de l’enfant commises par des enseignants ont été enregistrées à Lomé et toutes ont donné lieu à une action en justice.

56.Le Gouvernement a entamé des discussions avec différents partenaires de développement en vue de la création d’un service d’accueil téléphonique (numéro vert) destiné à recevoir les appels concernant des cas de mauvais traitements à enfants, assorti d’un dispositif complet de prise en charge des victimes de ces actes. Deux numéros qui ont été largement diffusés, notamment par les médias, peuvent actuellement être appelés 24 heures sur 24; ils sont payants, mais les personnes les utilisant ont la possibilité de demander à être rappelées si besoin est. Les appels sont reçus par des professionnels relevant de la Direction générale de la protection de l’enfance. Lorsqu’ils concernent des cas de maltraitance par des proches, la réponse des autorités est immédiate: l’enfant est retiré de sa famille et placé dans une institution d’accueil. Les plaintes peuvent émaner de particuliers mais aussi d’organes gouvernementaux ou d’ONG.

57.Mme KHATTAB demande des précisions sur le rôle de la Commission nationale des droits de l’homme, plus particulièrement sur ses liens avec le Ministère des affaires sociales, dont dépend la Direction générale de la protection de l’enfance.

58.Mme AKITEYI‑AZANBO (Togo) dit que la Commission, tout comme le Comité national de protection et de promotion de l’enfant, peut transmettre des plaintes à la Direction générale de la protection de l’enfance et suivre les dossiers sur le plan de la procédure. En revanche, c’est à la seule Direction générale qu’incombe la prise en charge des enfants victimes de violations.

59.Mme OUEDRAOGO fait état de statistiques selon lesquelles plus de 50 % de la population togolaise vivrait dans une situation d’extrême pauvreté. Si le pays n’a pas encore de stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, il serait bon qu’il se soit, au moins, doté d’un programme intégré en la matière. Le fait d’avoir une stratégie globale de lutte contre la pauvreté permettrait de s’attaquer en même temps aux différents facteurs causaux et, ainsi, de faire une utilisation optimale des moyens humains et financiers limités.

60.Des mesures s’imposent pour décourager les mariages précoces et imposer l’idée que les filles doivent mener leur scolarité à son terme. Le travail des enfants est une réalité, comme dans d’autres pays de la sous‑région, mais au Togo il a pour particularité d’être très développé dans le secteur informel, ce qui favorise les phénomènes d’exploitation et de trafic d’enfants. Pour éviter les cas d’exploitation ou de trafic d’enfants dans le cas des adoptions informelles, les parents devraient être encouragés à enregistrer ou à formaliser les adoptions.

61.Enfin, il apparaît qu’un nombre croissant de filles très jeunes (dès l’âge de 9 ans) se retrouvent sur le marché de la prostitution et que les autorités ferment les yeux. Les établissements en cause sont connus et doivent impérativement être fermés.

62.Mme ALUOCH demande pour quelles raisons l’État partie n’a toujours pas ratifié la Convention de La Haye sur l’adoption internationale malgré le grave problème de trafic d’enfants auquel il est confronté. Permettre les adoptions internationales offrirait la protection d’une famille aux enfants les plus vulnérables. Elle aimerait en outre savoir si le problème des enfants des rues se pose ailleurs que dans la capitale.

63.La plupart des pays s’orientent vers une législation tendant à protéger les personnes infectées par le VIH/sida afin qu’elles puissent continuer à travailler et à élever normalement leurs enfants, et il serait donc intéressant de savoir si l’État partie a entamé une réflexion sur ce point.

64.Le Togo a adopté une loi sur la question des mutilations génitales féminines qui a eu des retombées positives, mais il reste à savoir si d’autres moyens de subsistance ont été offerts aux personnes qui pratiquaient auparavant l’excision pour gagner leur vie.

65.Il est préoccupant que l’administration de la justice pour mineurs souffre d’un dysfonctionnement lié au manque de ressources humaines, matérielles et financières. Si les contraintes financières sont compréhensibles, le manque de ressources humaines l’est moins s’agissant d’un pays indépendant depuis 1960; un complément d’information s’impose donc. Il est anormal que les tribunaux de l’intérieur du pays demeurent dépourvus de juges pour enfants et que tout soit centralisé à Lomé − où ne vit qu’une minorité des enfants togolais.

66.M. CITARELLA aimerait avoir le point de vue de la délégation sur les renseignements émanant de certaines sources selon lesquelles des mineurs seraient incarcérés avec des adultes dans des établissements où ils subiraient des tortures physiques et psychologiques. Il serait en outre utile de savoir si des mesures sont prises pour faire face à l’absence de juges pour enfants dans l’intérieur du pays.

67.Mme CHUTIKUL croit savoir que les enfants victimes de trafic retirés des mains des trafiquants ne reçoivent que peu d’assistance et qu’après avoir été hébergés dans un foyer relevant d’une ONG ils peuvent être interrogés par les services de police dans des conditions contestables. La persistance des trafics s’explique par l’absence de coordination des mesures de lutte, combinée à l’impunité des trafiquants, souvent libérés faute de preuves, et à une application des lois sur les migrations laissant à désirer qui facilite le franchissement des frontières. Il faudrait donc lutter sur ces différents fronts, tout en garantissant à titre préventif la gratuité de l’éducation, puisque certains des enfants victimes de ces trafics ont été expulsés de leur école pour n’avoir pas pu s’acquitter des droits de scolarité. Il est en outre indispensable de créer une commission nationale de lutte contre ce phénomène.

68.Mme ANDERSON demande si les structures de prise en charge et de réinsertion sociale mentionnées au paragraphe 76 du rapport accueillent les mineurs en conflit avec la loi et relève que l’accès à l’éducation et aux services sociaux semble problématique pour les enfants placés dans un établissement de protection de remplacement et ceux incarcérés avec leur mère.

69.Elle voudrait savoir s’il est prévu d’adopter un plan d’action en faveur des enfants orphelins et vulnérables, question en relation étroite avec le trafic et le travail des enfants.

70.Mme ORTIZ souligne que la vie en orphelinat ne doit être qu’une étape transitoire et demande s’il existe un système de familles d’accueil au Togo et s’il y a des programmes d’adoption, bénéficiant de tout le travail de préparation et d’information nécessaire. Elle aimerait connaître le nombre d’adoptions, nationales et internationales, recensées. La ratification de la Convention de La Haye figurait déjà parmi les recommandations que le Comité avait émises à l’issue de l’examen du rapport initial de l’État partie. Cette mesure serait d’autant plus utile que le Togo entretient des relations privilégiées avec des pays comme la France, la Suisse et l’Italie, qui, eux, l’ont ratifiée.

71.Il est fréquent que le point de départ d’un trafic soit un travail domestique proposé à un enfant, parfois à l’étranger. La délégation pourrait donc préciser ce qui est fait au niveau national pour rendre la situation des enfants occupant ce type d’emploi moins vulnérable, qui est chargé de contrôler la manière dont on les traite, s’ils sont enregistrés et disposent de documents d’identité, s’ils ont l’âge légal pour travailler et s’ils restent en contact avec leur famille.

72.Mme KHATTAB note avec satisfaction que les frais de scolarité sont moins élevés pour les filles, mais fait observer que l’éducation est censée être gratuite, au moins dans l’enseignement primaire. À ce problème s’ajoutent ceux de la formation insuffisante des enseignants, des classes surchargées, et de l’absence d’activités culturelles et de loisirs.

73.La condition féminine a de quoi inquiéter et appelle des mesures volontaristes car les filles sont moins souvent enregistrées dans les registres de l’état civil, moins souvent inscrites dans les établissements scolaires et sont de plus victimes des mariages précoces, des violences domestiques et de mutilations génitales. De bonnes mesures ont été prises contre les mutilations génitales féminines, mais il faudrait savoir si elles sont encore en œuvre, pourquoi leurs résultats n’ont pas été évalués et comment les médias traitent cette question.

74.Elle attire l’attention sur la gravité et l’ampleur du phénomène de trafic d’enfants au Togo, dont on dit parfois qu’il ne respecte pas ses obligations internationales en la matière dans la mesure où il n’applique pas des peines assez sévères et ne prend pas les mesures de protection qui s’imposent.

75.Mme AL THANI constate que très peu d’enfants handicapés sont intégrés dans le système scolaire ordinaire et que le budget alloué à la santé et le nombre de professionnels de la santé sont en régression. Les moustiquaires sont chères, alors que le paludisme est un problème de santé publique reconnu. Les disparités régionales dans le système de soins sont importantes, les taux de mortalité maternelle, de vaccination et de malnutrition sont préoccupants, de même que l’accès à l’assainissement et à l’eau potable, le VIH/sida continue à se propager, tout particulièrement chez les adolescents. Les jeunes filles doivent subir des rites de passage abusifs, leur imposant des conditions d’hygiène déplorables.

76.M. KRAPPMANN fait observer que le budget de l’éducation du Togo est inférieur à celui de pays comparables et est en baisse depuis plusieurs années, ce qui appelle un commentaire. Il demande s’il est prévu de développer l’enseignement préscolaire et quelle proportion des enfants de 15 ans obtient le diplôme de fin d’études du premier cycle du secondaire, dont il est à craindre qu’elle ne soit guère supérieure à 20 % compte tenu du nombre de redoublements et d’abandons.

77.M. KOTRANE constate que beaucoup des problèmes relevés par le Comité à l’issue de l’examen du rapport initial restent d’actualité et que de nouveaux se sont faits jour. Il s’étonne ainsi de lire au paragraphe 26 que l’enfant porte le nom de sa mère en cas de désaveu de paternité et aimerait savoir comment se fait un tel désaveu. Dans le même ordre d’idées, il demande quels moyens ont les enfants nés hors mariage d’établir leur filiation et, faisant référence aux préoccupations exprimées à ce sujet par le Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, dans quelle mesure le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est pris en compte dans les décisions touchant aux divorces. Il faudrait notamment savoir si tous les enfants ont droit à une pension alimentaire et si l’enfant d’un couple divorcé peut voyager avec sa mère, sachant qu’une femme ne peut normalement obtenir un passeport qu’avec l’accord de son époux.

78.Malgré son adhésion au Programme international pour l’abolition du travail des enfants, l’État partie demeure en proie à de graves problèmes d’exploitation des enfants, y compris dans les écoles elles‑mêmes du fait de certains enseignants, selon des ONG qui affirment avoir écrit au Ministère de l’éducation pour attirer son attention sur ce problème. Ce phénomène inhabituel appelle d’autant plus une réaction de l’État qu’il incite les parents à déscolariser leurs enfants.

La séance est levée à 13 heures 10.

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