Nations Unies

CRC/C/SR.1550

Convention relativeaux droits de l’enfant

Distr. générale

7 juillet 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-cinquième session

Compte rendu analytique de la 1550e séance (Chambre A)

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 15 septembre 2010, à 15 heures

Présidente: Mme Lee

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de l’Espagne (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examens des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de l’Espagne (suite)(CRC/C/ESP/3-4; CRC/C/ESP/Q/3-4 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.2/Rev.2)

Sur l’invitation de la Présidente, la délégation espagnole reprend place à la table duComité.

2.MmeAidoo demande un complément d’information sur les méthodes employées pour recenser le nombre de grossesses non désirées et d’interruptions volontaires de grossesse chez les adolescentes. Elle demande si les jeunes bénéficient tous de services dans le domaine de la santé génésique et sexuelle et dans quelle mesure ils sont sensibilisés à ces questions.

3.Elle souhaiterait savoir si le nouveau Plan national stratégique de l’enfance et de l’adolescence comporte un volet axé sur la réduction de la pauvreté des enfants, qui semble être un gros problème dans l’État partie. Il serait également utile de savoir si l’État partie recueille et analyse systématiquement les données sur la pauvreté des enfants et quelles mesures sont prises pour remédier aux différents aspects de cette problématique.

4.M. Fernández Cid (Espagne) dit qu’en 2007 l’Espagne a renvoyé quelque 27 mineurs étrangers non accompagnés dans leur pays d’origine. En 2008 comme en 2009, 10 mineurs ont été renvoyés dans leur pays; cependant, du 1er janvier au 15 septembre 2010, seul un mineur étranger non accompagné a été rapatrié. Ces données donnent un bon aperçu de l’importance que le Gouvernement accorde à l’intérêt supérieur de l’enfant dans l’application de sa politique de sécurité.

5.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit que plusieurs mesures ont été prises pour mettre la législation interne en conformité avec les Protocoles facultatifs à la Convention, notamment au moyen de l’adoption de la loi organique no 5/2010, qui entrera en vigueur en décembre 2010. Parmi ces mesures, on peut citer notamment: le renforcement de la protection juridique des enfants impliqués dans des conflits armés ou victimes de la traite des êtres humains, la pénalisation de la sollicitation d’enfants à des fins sexuelles sur Internet, le durcissement des sanctions en cas d’infractions sexuelles commises contre les enfants et l’introduction de deux mesures pour protéger les enfants des délinquants sexuels, à savoir le contrôle judiciaire et la privation de l’autorité parentale lorsque les auteurs sont les parents de l’enfant. En outre, les sanctions encourues pour les infractions liées à la pornographie infantile ont été durcies et la possession de matériel pornographique ou «pseudo-pornographique» mettant en scène des enfants a été érigée en infraction. Les peines encourues pour les infractions liées à la prostitution d’enfants ont aussi été durcies et le recours à la prostitution d’un enfant a été officiellement érigé en infraction, même s’il est vrai que ces infractions ont souvent été sanctionnées par les tribunaux dans le passé.

6.De façon générale, le Code pénal fixe l’âge du consentement sexuel à 13 ans. Toutefois, lorsqu’une infraction sexuelle est commise avec le recours à la tromperie, les mineurs sont protégés par la loi jusqu’à l’âge de 16 ans. Ils sont protégés jusqu’à l’âge de 18 ans dans les cas d’infractions impliquant la prostitution. L’article 189 du Code pénal prévoit que la notion de pornographie mettant en scène des enfants s’entend de toute représentation pornographique de mineurs jusqu’à l’âge de 18 ans.

7.Particulièrement pertinent dans les litiges matrimoniaux, le droit de l’enfant d’être entendu est protégé dans toutes les procédures administratives, y compris dans la famille, en vertu de l’article 9 de la loi organique no 1/1996 sur la protection juridique des mineurs, qui est applicable dans tout le pays. Le droit de l’enfant d’être entendu est aussi protégé dans la législation sur l’adoption, les soins de santé et le rapatriement.

8.Toute ingérence portant atteinte au droit à l’honneur, au respect de la vie privée et à l’image d’une personne est considérée comme une infraction pénale dans certaines circonstances, notamment dans le cas de l’utilisation d’appareils d’écoute ou d’enregistrement. Si la victime de tels actes est un mineur, c’est une circonstance aggravante. Les cas d’ingérences de moindre gravité portant atteinte au droit à l’honneur, au respect de la vie privée et à l’image d’un enfant, même si elles ne sont pas assez graves pour être considérées comme des infractions, sont prévues par la loi no 1/1996 sur la protection juridique des mineurs. Il incombe au ministère public d’intervenir dans ces cas, même contre la volonté des parents de l’enfant. Les fonctionnaires du ministère public ont reçu des directives précises sur la manière de régler les affaires civiles de ce type, et tout est fait pour que les enfants bénéficient du plus haut degré de protection. Les affaires mettant en cause les médias espagnols, mais survenues en dehors du territoire, relèvent de la compétence de l’Espagne si l’auteur est Espagnol, si la victime ou le ministère public portent plainte en Espagne ou si l’affaire n’a pas été jugée dans le pays où les faits ont été commis.

9.La suppression, conformément aux précédentes observations finales du Comité, de l’article 154 du Code civil qui prévoyait que les parents «peuvent châtier leurs enfants dans des limites raisonnables et avec modération» a dissipé tout doute que la clause puisse servir, aux yeux des parents, à justifier les éventuels mauvais traitements infligés à leurs enfants. Toute violence de ce type est assimilée à un crime ou une infraction, selon sa gravité. L’État mène des campagnes de sensibilisation dont le but est de venir à bout d’une croyance persistante qui tendrait à considérer la violence comme un moyen d’éducation valable. En outre, on notera que l’article 221 du Code pénal réprime l’adoption illégale.

10.MmeOrtiz demande si le droit interne prévoit les cas de participation illicite au processus d’adoption en vue d’obtenir un consentement à l’adoption.

11.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit que l’article 221 du Code pénal prévoit des peines dans les cas où un enfant est abandonné au profit d’un tiers, en violation des procédures légales d’adoption et moyennant compensation financière, afin d’établir une relation analogue à la filiation. Des sanctions sont aussi prévues pour les intermédiaires et les personnes à qui est confié l’enfant, même lorsque le procédé a lieu dans un pays étranger. Si un tel acte se produit dans un centre pour enfants, une école ou autre lieu semblable, c’est considéré comme une circonstance aggravante.

12.M. Mato (Espagne) dit que chaque communauté autonome possède un parlement qui a droit de regard sur les activités du gouvernement de la région concernée. Toutes les recherches récentes ont montré que la structure territoriale de l’Espagne a concouru à réduire les inégalités régionales. Dans le cadre de la coopération entre le Gouvernement central et les autorités autonomes, des normes minimales ont été édictées, même dans les domaines où la capacité normative de l’État est faible, comme celui des services sociaux. Le processus de décentralisation a donné lieu à des innovations importantes dans de nombreux domaines, qui permettent de diffuser les pratiques optimales entre les régions autonomes.

13.M. Citarella (Rapporteur pour l’Espagne) demande quel degré de responsabilité assume le Gouvernement central lorsqu’une communauté autonome n’applique pas une disposition de la Convention.

14.M. Salama Salama (Espagne) dit que les dispositions de la Convention ont été incorporées dans les lois internes fondamentales, applicables sur l’ensemble du territoire espagnol. La Commission d’État, qui se réunit à intervalles réguliers pour examiner toutes les législations adoptées par les autorités régionales, peut proposer d’intenter un recours en inconstitutionnalité devant le Tribunal constitutionnel contre toute loi qui contrevient à ce corpus de lois fondamentales. C’est le Président ou le Défenseur du peuple qui est habilité à intenter un tel recours. Si, pour une raison quelconque, l’action n’est pas engagée, les juges amenés à invoquer la législation en question peuvent eux-mêmes saisir le Tribunal constitutionnel pour lui soumettre un recours en inconstitutionnalité. Les règlements qui n’ont pas rang de loi peuvent aussi être contestés devant le Tribunal constitutionnel, ou une demande de recours administratif peut être portée devant les juridictions ordinaires. Si une communauté autonome viole les droits d’un enfant consacrés dans la Convention, le ministère public peut intercéder en faveur de l’enfant en formant un recours en amparo devant les juridictions ordinaires ou le Tribunal constitutionnel.

15.MmeGarcía Blanco (Espagne) ajoute que le Gouvernement peut demander la suspension immédiate d’une loi d’une communauté autonome déclarée inconstitutionnelle à l’issue d’une action devant le Tribunal constitutionnel.

16.M. Kotrane demande si les enfants ont le droit de porter plainte devant les tribunaux au sujet d’une loi interne qui enfreint une disposition de la Convention et si celle-ci peut être directement invoquée par un juge si un texte de loi fédéral ou relevant d’une communauté autonome est en contradiction avec ses dispositions.

17.M. Salama Salama (Espagne) dit que les enfants peuvent déposer des plaintes relatives à des violations de la Convention devant les juridictions ordinaires par l’intermédiaire de leur représentants ou du ministère public. Les tribunaux sont tenus d’appliquer la Convention en tant que législation interne, vu qu’elle acquiert ce rang dès sa publication dans le Journal officiel. Si la violation provient d’un texte de loi d’une communauté autonome, le juge est tenu de soumettre l’affaire au Tribunal constitutionnel.

18.M. Mato (Espagne) dit que la Convention relative aux droits de l’enfant est plus connue que n’importe quelle loi du pays. Les autorités et les organisations non gouvernementales (ONG) ont veillé à ce que les informations sur la Convention soient bien diffusées dans les écoles et autres cadres.

19.Le Défenseur du peuple tient souvent des réunions de coordination avec les défenseurs des communautés dans les régions. Un de ces défenseurs est chargé de veiller au respect des droits de l’enfant. L’évaluation du Plan d’action en faveur de l’enfance n’a pas encore été faite par tous les ministères et les communautés autonomes, mais un rapport sur ce sujet sera distribué prochainement aux ONG et autres parties intéressées. Le prochain plan devrait être approuvé à la fin de l’année.

20.En Espagne, 15 000 ménages participent à une enquête européenne normalisée visant à recueillir des informations sur la pauvreté touchant les enfants. La pauvreté chez les enfants est mesurée en termes de pauvreté et d’inégalité relatives, sur la base de l’indicateur établi par l’Union européenne (UE) fixant la pauvreté comme le fait de vivre avec moins de 60 % du revenu moyen national. En collaboration avec Eurostat, on cherche actuellement à affiner les questions de l’enquête afin de mettre davantage l’accent sur les inégalités et, en particulier, sur la pauvreté matérielle. Durant les trois dernières années, la proportion d’enfants vivant en situation de pauvreté monétaire, par exemple les cas d’enfants vivant dans des ménages composés de deux adultes et de deux enfants subsistant avec un revenu de moins de 16 000 euros, a baissé d’un point de pourcentage.

21.La situation des Roms en Europe a été une priorité durant la présidence espagnole de l’UE: le Parlement européen et la Commission européenne ont mis au point une feuille de route pour l’élaboration de politiques d’intégration et de lutte contre la discrimination des Roms. L’Espagne a créé un Conseil d’État du peuple gitan, qui regroupe 20 représentants d’organisations roms et des représentants de plusieurs organismes publics. Ce Conseil a conçu un plan d’action qui contient des mesures en faveur des enfants visant à réduire les inégalités et à promouvoir la non-discrimination, en particulier en matière de santé et d’éducation.

22.Un rapport du Défenseur du peuple a montré que certains centres de prise en charge n’étaient pas pleinement conformes à la loi. Pour y remédier, le Procureur général a ordonné l’examen de ces centres, avec inspection et fermeture si nécessaire. Un protocole de base sur la prise en charge des adolescents ayant des troubles du comportement a en outre été mis au point. Ce protocole, approuvé par les ministères et les communautés autonomes, arrête entre autres les critères juridiques minimaux régissant l’admission dans ces centres. Il établit aussi des règles sur le recours à la contrainte physique et la médication, qui ne sont autorisées qu’à titre exceptionnel. La prescription de médicaments aux adolescents, qui doivent être étroitement surveillés durant le traitement, ne peut se faire que sur la base d’un diagnostic établi par un professionnel de la santé.

23.M. Kotrane demande si un texte de loi permet de garantir que seul un juge, et non la famille par exemple, peut décider du placement d’un enfant dans un centre de prise en charge pour enfants ayant des troubles du comportement.

24.MmeOrtiz demande un complément d’information sur les troubles du comportement qui peuvent conduire au placement d’un enfant dans des centres de prise en charge et sur l’âge des enfants concernés. Elle voudrait aussi savoir pour quels motifs des enfants sont placés dans des centres de ce type et si le processus repose toujours sur des bases légales. Elle demande également pourquoi certaines régions, comme l’Andalousie, accueille davantage d’enfants dans ces centres que d’autres régions et qui est chargé d’en contrôler le bon fonctionnement. Elle ajoute que le délai de six mois entre chaque examen de la situation d’un enfant lui paraît trop long et suggère de faire le point plus souvent.

25.MmeAidoo demande des informations sur les politiques sociales en faveur des familles, en particulier des familles vivant dans la pauvreté.

26.M. Mato (Espagne) dit que les comportements perturbateurs − ou autre − de certains adolescents ne sont pas assimilés à des troubles du comportement qui pourraient leur valoir d’être placés dans un centre de prise en charge. Les troubles du comportement des enfants confiés à ces centres sont diagnostiqués sur la base des classifications psychiatriques et psychologiques.

27.La Présidente demande quel système de classification est utilisé.

28.M. Mato (Espagne) répond qu’il s’agit du système de classification élaboré dans le DSM-IV. Les centres proposent des traitements intensifs à des adolescents logés sur place et souffrant de graves troubles du comportement diagnostiqués et de lourds problèmes de santé mentale, lorsque les services de santé mentale de proximité ne peuvent pas les aider. Une autorisation judiciaire est nécessaire pour être admis dans ces centres.

29.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit qu’un protocole proposant de faire des inspections tous les trois mois, plutôt que tous les six mois, a été élaboré. En plus des inspections externes du ministère public, les centres font l’objet d’inspections internes assurées par des organismes décentralisés sous la direction des communautés autonomes. Le Procureur général a l’intention de proposer des réformes législatives pour définir clairement les fonctions des centres et interdire toute violation des droits fondamentaux des enfants qui y séjournent. L’objet de ces centres n’est pas de protéger la société, mais de veiller au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.

30.M. Citarella (Rapporteur pour l’Espagne) demande qui peut demander à un juge de faire procéder au placement d’un enfant dans un centre si ce dernier présente un comportement antisocial.

31.M. Kotrane s’interroge sur la légalité du placement en institution d’un enfant qui n’a pas commis d’infraction, quand bien même cette mesure aurait été ordonnée par un juge.

32.La Présidente demande l’âge des enfants placés dans ces centres et, faisant observer que l’absentéisme scolaire est un comportement répertorié dans le DSM-IV, demande si cela peut être un motif de placement dans une institution.

33.M. Mato (Espagne) dit que les centres ont vocation à traiter les adolescents dont le comportement, extrême, a été précisément identifié, et se manifeste par une agressivité à l’égard de leurs parents. Il souligne que ces établissements ne sont pas prévus pour les adolescents qui se comportent mal et qu’en aucun cas les mineurs n’y sont traités comme des délinquants.

34.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit que la décision de placement d’un enfant dans un centre a pour unique but d’assurer sa protection et celle de sa famille − elle n’est en rien liée à la justice des mineurs.

35.M. Pūras dit que l’Espagne essaie de résoudre les problèmes systémiques non négligeables que posent les cas relevant de la catégorie située entre la justice pour mineurs et la prise en charge des troubles de santé mentale. L’épanouissement social d’un enfant ne devrait pas être entravé par un traitement médical; les adolescents dans ce cas devraient pouvoir bénéficier d’une protection sociale et un nouveau système de droits doit être créé dans ce but, étant donné que les intéressés ne sont ni des délinquants ni des patients. Pour ce faire, les États parties doivent tenir compte de la durée du traitement dispensé et déterminer s’il convient d’obtenir le consentement de l’enfant. Pour remédier à ces troubles, il est préférable de privilégier la prise en charge sociale et thérapeutique plutôt que les méthodes psychiatriques. La démarche des centres part d’une bonne intention, mais toute aide à l’épanouissement social des enfants doit se faire dans le respect de leurs droits.

36.M. Mato (Espagne) dit qu’il est essentiel d’avoir un système de contrôle du régime de placement en institution pour garantir que les droits fondamentaux des enfants ne sont pas violés. Bien que la prévention des cas de violence grave dans la famille soit aussi une priorité importante, les enfants ne peuvent pas être admis dans un centre de prise en charge à la seule demande de leur famille: la plupart des demandes de placement ne sont pas acceptées. Le placement en institution n’est pas une solution permanente, mais temporaire, prise face à une situation d’urgence, le but étant que l’enfant puisse réintégrer sa famille. Lorsque ce n’est pas possible, les mineurs de 14 ans et plus ont la possibilité de vivre de manière indépendante, dans des logements prévus pour eux et sous la supervision de personnel d’encadrement.

37.La Présidente dit que, lors de la révision des protocoles de soins, il faudrait privilégier une approche thérapeutique à la fois cognitive et pharmaceutique, qui doit s’appliquer aussi bien aux parents qu’aux enfants, étant donné que les parents devront renouer le lien avec leurs enfants.

38.Mme Mateu (Espagne) dit que chacune des communautés autonomes a approuvé un programme consacré spécialement à la santé des adolescents. Des programmes encourageant un mode de vie sain et la réduction de la consommation d’alcool et de drogues ont aussi été mis en place. Celui sur la lutte contre la toxicomanie a été plus concluant que celui sur la lutte contre l’alcoolisme. En outre, des campagnes de sensibilisation visent à prévenir les préadolescents des risques liés à la tabagie.

39.Il n’a pas été aisé de mettre en œuvre la stratégie nationale sur la santé mentale en raison des changements dans les infrastructures. La psychiatrie de l’adolescent est devenue une spécialité reconnue. Tous les programmes de santé de base ont une composante tenant compte des besoins spécifiques des adolescents. Le taux élevé de grossesses d’adolescentes posait un grave problème que les pouvoirs publics n’avaient pas réussi à résoudre, jusqu’à ce qu’une décision facilitant l’accès à la contraception ait été prise en 2009. Cette décision, ainsi que l’accent mis sur l’éducation sexuelle dans les écoles, a permis de faire baisser le nombre de grossesses d’adolescentes l’année passée.

40.Mme Mateu dit que les deux médicaments distribués sur le marché espagnol pour traiter le déficit de l’attention avec hyperactivité sont approuvés par l’Union européenne. Ces médicaments ne sont pas administrés dans le cadre de la politique de santé publique et ils ne sont pas financés par les fonds publics. En aucun cas il n’est prescrit de médicaments à des enfants en bonne santé dans le cadre du système de santé national.

41.Elle indique qu’un programme national renouvelable en faveur de l’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois, adopté en 1990, fera bientôt l’objet d’une révision avant d’être reconduit. L’Espagne a le taux le plus élevé d’allaitement maternel exclusif en Europe et calque sa législation dans ce domaine sur les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En outre, la législation de l’Espagne sur l’égalité pour les mères qui travaillent comporte des dispositions sur l’allaitement maternel.

42.M. Blázquez Martín (Espagne) dit que la législation espagnole sur la santé génésique et sexuelle se fonde sur des recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et d’autres organismes internationaux. La mise en œuvre d’une stratégie en matière de santé génésique et sexuelle dans tout le pays a permis de faire diminuer le nombre d’avortements et de grossesses d’adolescentes depuis 2009.

43.M. Marina (Espagne) dit qu’en Espagne, toutes les agences d’adoption sont accréditées et leurs activités surveillées. Leur autorisation d’exercer peut leur être retirée si les autorités n’approuvent pas leurs activités. Les adoptions internationales sont conclues avec des pays signataires de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Il appartient aux pays d’origine de déterminer quels enfants sont adoptables. Le nombre d’adoptions internationales a baissé depuis 2004, tandis que celui des adoptions nationales a augmenté. Pour remédier au problème des placements d’enfants en institution qui s’éternisent, la législation sur l’enfance a été modifiée afin d’autoriser l’adoption lorsque la famille biologique est incapable de s’occuper de l’enfant au terme d’un délai de deux ans. Cette modification de la loi est une des nombreuses mesures prises pour promouvoir les adoptions nationales et pour garantir que les enfants placés en institution puissent vivre dans un cadre familial stable, tant sur le plan juridique que matériel.

44.Au sujet des adoptions en Éthiopie, elle dit que s’il est vrai que le Gouvernement préfère promouvoir les adoptions dans des États parties à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, il ne peut pas empêcher les familles désireuses d’adopter dans d’autres pays de le faire. Conformément à la législation sur les adoptions internationales, une commission chargée d’analyser la situation des pays d’origine a été instituée, afin de déterminer si leurs procédures sont compatibles avec les normes espagnoles. L’Éthiopie est actuellement à l’examen dans ce cadre et il est question d’y effectuer une visite qui serait l’occasion d’un examen plus approfondi des procédures d’adoption du pays.

45.M. Kotrane dit que, malgré l’augmentation du nombre de juges pour enfants et la formation aux droits de l’enfant dispensée aux agents de la police judiciaire, l’État partie a encore tendance à privilégier l’emprisonnement des délinquants, bien que la loi de procédure pénale préconise des peines de substitution. Il demande quelle en est la raison et si l’État partie envisage de repenser les peines appliquées aux mineurs délinquants.

46.M. Citarella (Rapporteur pour l’Espagne) demande pourquoi le nombre de condamnations de mineurs en conflit avec la loi a augmenté et si cette tendance reflète une augmentation réelle du nombre total de mineurs dans ce cas.

47.La Présidente, notant que des mesures ont été prises pour améliorer les taux de scolarisation, souhaiterait savoir ce qui est fait pour limiter l’abandon scolaire et faire en sorte que les enfants terminent leurs études. Elle demande s’il y a assez de professionnels spécialisés dans la prise en charge des enfants ayant des besoins particuliers dans les écoles ordinaires.

48.Mme Al-Asmar demande s’il y a suffisamment d’enseignants dans les écoles primaires, au vu de l’augmentation des effectifs d’élèves. Elle aimerait aussi savoir si des mesures sont prises pour encourager les activités récréatives culturelles et artistiques, plutôt que les activités centrées sur l’informatique, la télévision et les jeux vidéo.

La séance est suspendue à 17 heures; elle est reprise à 17 h 10.

49.La Présidente demande quelles mesures sont prises pour surveiller et améliorer la situation des quatre centres pour enfants des îles Canaries qui, selon certaines sources, ne répondent pas aux normes. Elle demande aussi quelles mesures sont prises pour renforcer les garanties relatives au respect de l’intérêt supérieur des enfants dans le processus de rapatriement, conformément aux directives du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

50.M. Marina (Espagne) dit que la durée maximale de détention des mineurs délinquants est passée de huit à neuf ans, pour les infractions les plus graves seulement. Bien que les effets de ce changement aient été minimes, le législateur a jugé nécessaire d’augmenter la durée de la peine maximale dans les cas particulièrement graves.

51.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit que la loi de procédure pénale applicable aux mineurs est conforme aux articles 37 et 40 de la Convention relative aux droits de l’enfant, de même qu’à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) et aux Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad). Les mineurs ne sont emprisonnés que lorsqu’il n’est pas possible ou opportun d’opter pour une autre solution. Les peines de substitution englobent la liberté surveillée, les travaux d’intérêt général, la détention en établissement semi-ouvert et la détention de fin de semaine. Dans l’ensemble, le nombre d’incarcérations dans des établissements fermés a diminué.

52.Conformément aux Règles de Beijing et à la Convention relative aux droits de l’enfant, le système espagnol de justice pour mineurs repose sur le principe de la spécialisation. Les juges pour enfants, les procureurs, la police et les avocats reçoivent une formation spéciale.

53.M. Citarella (Rapporteur pour l’Espagne)demande combien de tribunaux spécialisés dans les droits de l’enfant possède l’Espagne et où ils sont situés.

54.M. Kotrane, faisant référence au paragraphe 759 du rapport périodique de l’Espagne, demande pourquoi il n’est pas possible de connaître le nombre d’établissements réservés aux mineurs délinquants, bien qu’il existe des données sur les ressources, les structures et les équipements. Il demande quelles «entités collaboratrices» participent à l’administration des établissements de détention pour mineurs et quel est leur rôle.

55.Mme Ortiz souhaiterait savoir quels mécanismes de contrôle ou de surveillance, y compris les organismes publics, assurent le respect des droits des enfants et des adolescents placés dans des institutions publiques et s’il existe des moyens fiables de protéger leur intégrité physique et psychologique, comme la possibilité de porter plainte et de participer à l’évaluation des programmes conçus à leur intention.

56.M. Marina (Espagne) dit que, conformément à la loi sur la responsabilité pénale des mineurs, l’administration de ces établissements est confiée à des organismes publics, sous la direction du pouvoir judiciaire et du ministère public. Les autorités de protection de l’enfance et les organismes publics autorisent les entités collaboratrices comme les ONG à gérer ces centres dans le cadre d’accords de coopération. M. Marina assure au Comité que les chiffres faisant état du nombre d’institutions pour les mineurs délinquants seront fournis une fois la délégation rentrée en Espagne.

57.M. Kotrane aimerait avoir confirmation que les enfants et les adolescents présentant des troubles du comportement ne sont pas hébergés avec des mineurs délinquants dans des centres de détention privés.

58.M. Marina (Espagne) et M. de la Rosa Cortina (Espagne) disent qu’il s’agit d’établissements séparés relevant de deux catégories différentes.

59.M. de la Rosa Cortina (Espagne) dit que les juges pour enfants sont chargés de superviser la gestion des établissements pour mineurs délinquants et de prendre les mesures nécessaires sur le plan disciplinaire, tandis que les organismes publics sont chargés de la gestion quotidienne de l’établissement. Des fonctionnaires du ministère public sont disponibles pour s’entretenir avec les mineurs délinquants de toute réclamation qu’ils pourraient avoir.

60.M. García Cabrerizo (Espagne), répondant à une question sur le handicap, dit que l’Espagne a été le premier pays européen à ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées en 2007, vu que plusieurs des principes énoncés à l’article 24 de la Convention − en particulier ceux de l’égalité dans l’enseignement et du développement des capacités des personnes handicapées et des personnes ayant des besoins spéciaux − correspondent à ceux de la loi de 2006 relative à l’organisation de l’enseignement en Espagne.

61.Le Ministère de l’éducation, en partenariat avec les représentants des principales organisations s’occupant des questions touchant au handicap, ainsi que les ministères et les représentants des communautés autonomes compétents, se réuniront prochainement pour débattre de l’éducation intégratrice et du handicap − notamment dans le cadre de l’enseignement non universitaire − en vue de produire des études détaillées sur le handicap et l’enseignement. Une conférence internationale sur le handicap qui s’est tenue en Espagne en mars 2010 et dont les conclusions ont été présentées au Conseil des Ministres a montré que, d’ici à 2020, 15 % des chercheurs d’emploi non qualifiés pourront trouver du travail. Le Gouvernement espagnol attache une grande importance à fournir du travail aux jeunes ayant des besoins particuliers, ce qui suppose des enseignants spécialement qualifiés et un financement supplémentaire. Les autorités éducatives ont l’intention d’intégrer complètement les enfants handicapés et ceux ayant des besoins spéciaux dans les écoles ordinaires, en s’attaquant au problème dès leur détection. Les enfants étrangers qui ne maîtrisent pas l’espagnol ont la possibilité de suivre des cours spéciaux jusqu’à ce qu’ils puissent intégrer une classe ordinaire. Les associations de promotion des droits des personnes handicapées, comme la Fundacíon 11, font des groupes de pression efficaces.

62.L’augmentation du nombre d’élèves, estimé à 140 000 en 2010, est préoccupante, puisqu’il faudra accroître le nombre d’infrastructures et d’enseignants si l’on veut répondre à leurs besoins. Cela représente 15 à 20 élèves pour un enseignant. Quelque 26 472 écoles sont prêtes pour l’année scolaire 2010, soit 300 de plus qu’en 2009; 18 000 d’entre elles sont des écoles publiques et 8 000 sont privées ou subventionnées. Les montants consacrés à l’éducation ont augmenté de 46 % depuis 2004.

63.Le taux élevé d’abandon scolaire en Espagne, estimé à 31 %, est une source de vives préoccupations pour le Ministère de l’éducation. Quelles qu’en soient les raisons − économiques, sociales ou autres −, la loi relative à l’organisation de l’enseignement a vocation à aider les élèves ayant abandonné l’école à reprendre leurs études en leur proposant des programmes souples, permettant de limiter les abandons scolaires. Il faut aussi tenter d’apporter de l’aide aux élèves en difficulté scolaire, le manque de motivation étant une des causes du problème. Pour y remédier, un programme de renforcement des capacités et d’orientation et soutien scolaires est financé conjointement par le Ministère de l’éducation et les communautés autonomes. Ces services sont particulièrement importants pour les étudiants de troisième et quatrième année, chez qui le risque d’abandon scolaire est le plus élevé, et qui peuvent, dans le cadre de cette initiative, faire appel à l’aide d’enseignants ne relevant pas du système scolaire public.

64.M. Kotrane dit que le Comité est très préoccupé par l’évolution actuelle tendant à confier la gestion des services éducatifs au secteur privé, qui n’applique pas forcément les mêmes politiques que le secteur public. En effet, on sait que certaines structures privées discriminent les Roms et les enfants migrants. Il demande s’il existe des programmes d’enseignement pour ces enfants.

65.M. García Cabrerizo (Espagne) dit que la plupart des enfants migrants sont scolarisés dans des écoles publiques. L’accent est mis sur les subventions à l’éducation. Les autorités éducatives révisent les normes et les réglementations régissant l’octroi de subventions aux écoles pour introduire des mécanismes d’incitation financière aux écoles qui accueillent des enfants immigrants. Il existe bien des programmes d’enseignement spécifiques pour les enfants roms. Les policiers ont pour instruction de signaler la présence d’enfants roms dans les rues afin de les inciter à aller à l’école, mais les autorités locales ont du mal à convaincre les parents et les enfants de l’intérêt qu’il y a à recevoir une instruction de base.

66.M. Marina (Espagne), en réponse à des questions sur les centres d’immigration aux îles Canaries, dit que les îles Canaries et l’Andalousie sont les points d’entrée de flux migratoires massifs. Bien que le nombre d’immigrants soit gérable, les îles Canaries ont demandé l’aide du Gouvernement espagnol, de l’Administration générale de l’État et des communautés autonomes, et ont conclu un accord de coopération en 2006, financé par l’Administration générale de l’État, autorisant le transfert de mineurs des îles Canaries vers d’autres communautés autonomes.

67.La Présidente rappelle que le Comité s’inquiète des normes et des conditions de gestion de ces centres des îles Canaries.

68.M. Marina (Espagne) dit que les enfants sont soumis aux mêmes lois partout en Espagne, y compris dans les communautés autonomes − donc aussi aux îles Canaries. Il souligne que les îles Canaries gèrent efficacement les arrivées de mineurs et que cette situation ne pose pas de difficultés actuellement.

69.M. Citarella (Rapporteur pour l’Espagne), remerciant l’Espagne de la qualité de l’échange, dit que le Comité des droits de l’enfant apprécie les efforts du Gouvernement pour donner suite aux précédentes recommandations du Comité. En effet, l’Espagne est un des pays les plus avancés dans le domaine des droits de l’enfant. Toutefois, l’État doit prendre des mesures pour améliorer la coordination avec les communautés autonomes et la question des mineurs non accompagnés et remédier à certaines formes de discrimination. D’autres problèmes qui n’ont pas été abordés, faute de temps, seront peut-être pris en compte dans les observations finales sur la base des renseignements apportés dans le rapport périodique à l’examen.

70.M. Garrigues (Espagne) dit que le dialogue, qui a été constructif et interactif, ainsi que les recommandations du Comité permettront d’aider l’Espagne à poursuivre la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant.

71.La Présidente dit que la délégation peut compter sur le concours permanent du Comité et que les très nombreuses questions qu’il a posées témoignent d’un véritable intérêt pour le sort des enfants en Espagne.

La séance est levée à 18 heures.