Nations Unies

CRC/C/SR.1836

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

1er octobre 2014

Français

Original: anglais

Compte rendu analytique de la 1836 e  séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 30 septembre 2013, à 10 heures

Présidente:Mme Sandberg

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques du Luxembourg sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques du Luxembourg sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/LUX/3-4; CRC/C/LUX/Q/3-4; CRC/C/LUX/Q/3-4/Add.1)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation luxembourgeoise prend place à la table du Comité.

2.M. Hoscheit (Luxembourg), présentant le rapport de l’État partie (CRC/C/LUX/3‑4), dit que la situation du Luxembourg est particulière, caractérisée par une immigration importante et une multiculturalité exceptionnelle, qui posent de réels défis en termes d’intégration des enfants, dans le système scolaire notamment. La population luxembourgeoise s’est accrue de plus de 22 % depuis 2001, et le nombre d’enfants et de jeunes âgés de 0 à 19 ans de plus de 14 %. Cette évolution a eu des répercussions sur les priorités en matière de politique ainsi que sur les besoins en investissements et en infrastructures: le nombre de places dans les structures d’assistance parentale accueillant des enfants de jour ou de nuit ainsi que dans les services de prise en charge de la petite enfance a par exemple plus que quintuplé, et le nombre d’élèves dans l’enseignement post-primaire a augmenté de 20 %.

3.En mars 2013, le Conseil de gouvernement a engagé un dialogue avec la jeunesse, en mettant en place un mécanisme de consultation encadrée. Le premier point à l’ordre du jour a porté sur l’initiative intitulée «Garantie jeunes », lancée par les ministres de l’emploi de l’Union européenne et destinée à offrir aux jeunes des possibilités d’emploi.

4.En juillet 2013, les ministres de l’éducation, de l’égalité des chances, de la famille et de la santé ont lancé le programme national pour la promotion de la santé affective et sexuelle et ont annoncé l’adoption d’une politique commune pour la mise en œuvre d’un plan d’action pour 2013-2016.

5.En septembre 2013, le Ministère de la santé et le Centre de recherche public de la santé ont publié deux rapports sur la santé des nouveau-nés et de leur maman. D’une manière générale, le Luxembourg respecte les recommandations d’Eurostat et recueille des données sur les grossesses et les naissances afin d’assurer un suivi fiable.

6.Suite à des discussions avec la société civile, le monde politique et les autorités de police et de justice, la loi sur la violence domestique a été considérablement remaniée récemment. Les droits des victimes, majeures ou non, sont désormais mieux garantis.

7.Un vaste projet de réforme de l’enseignement secondaire est actuellement en cours, et un nouveau projet de loi a été soumis au Parlement au printemps 2013. La diversité linguistique et sociale des élèves constitue le défi le plus important à relever. En tenant davantage compte de leurs profils très différents, il sera possible de permettre à un plus grand nombre d’entre eux d’avoir accès aux études supérieures. Des mécanismes d’orientation scolaire et un nouveau système d’évaluation des étudiants sont actuellement mis sur pied, et il est envisagé d’introduire des cours d’éducation éthique.

8.Un projet pilote a été mis en place pour aider les primo-arrivants à rejoindre le système scolaire ordinaire, en tenant compte de leurs compétences linguistiques et en renforçant leurs compétences d’apprentissage.

9.Pour ce qui est des enfants handicapés, M. Hoscheit dit que le Gouvernement luxembourgeois prévoit d’entreprendre une étude sur l’inclusion, dont l’objectif est de sensibiliser les élèves à cette notion, les mesures à relativement court terme prises jusqu’à présent se révélant insuffisantes. Une campagne de publicité à la télévision, dont la diffusion est prévue pour décembre 2013, a pour objectif de montrer que les personnes handicapées sont davantage gênées par les barrières auxquelles elles se heurtent chaque jour que par leur handicap proprement dit. Entre autres initiatives, il est également prévu de créer un centre social de réadaptation pour les enfants handicapés âgés de 5 à 16 ans, et de mettre en œuvre un projet pilote prévoyant des activités extrascolaires pour les enfants autistes.

10.M. Gurán (Rapporteur pour le Luxembourg) dit que le Comité a pris note avec satisfaction du rôle actif qu’a joué le Luxembourg dans les activités et les forums portant sur les droits de l’enfant organisés au niveau européen; il félicite l’État partie pour la présentation professionnelle de son rapport et la précision de ses réponses écrites.

11.Pour ce qui est du cadre institutionnel requis pour la mise en œuvre de la Convention, M. Gurán rappelle que, dans ses précédentes observations finales (CRC/C/15/Add.250), le Comité avait recommandé à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un plan national d’action pour l’enfance. D’après les réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/LUX/Q/3-4/Add.1), l’État partie a créé récemment un groupe de travail interministériel chargé d’élaborer un plan d’action et de coordonner l’action gouvernementale. M. Gurán demande des précisions sur la structure et le mandat de ce groupe de travail.

12.M. Gurán demande quelles mesures le groupe de travail envisage de prendre à court terme dans le domaine de la coordination, et notamment de la coordination avec l’Office national de l’enfance (ONE). À cet égard, il aimerait en savoir plus sur le mandat de l’Office, ainsi que sur l’appui que lui apporte l’État.

13.Dans quelle mesure est-ce que les ONG et les enfants eux-mêmes participent à ses travaux? Il est difficile de dire si le principe de la participation des enfants à la gestion des affaires les concernant bénéficie d’un réel appui aux divers niveaux de la société, y compris au sein des collectivités locales et des écoles.

14.Pour ce qui est du suivi indépendant, M. Gurán fait observer que l’Ombuds-Comité pour les droits de l’enfant relève d’un ministère, ce qui pose la question de son indépendance. Il demande des précisions sur les qualifications professionnelles des membres de cette institution.

15.Comment l’accès à ce mécanisme de plainte destiné aux enfants est-il garanti? Les enfants ont-ils connaissance de l’existence de l’Ombuds-Comité et de leur droit de porter plainte? À cet égard, M. Gurán demande également si l’État partie à l’intention de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, établissant une procédure de communications.

16.Sur le plan statistique, les nombreux enfants étrangers au Luxembourg sont quelque peu pénalisés, le taux d’abandon scolaire de ce groupe de population étant plus élevé. Comment est-ce que l’État partie veille à ce que ces enfants aient les mêmes opportunités que les autres enfants?

17.M me Winter(Rapporteuse pour le Luxembourg), faisant référence aux précédentes observations finales du Comité, demande si l’État partie a étudié plus avant la question du retrait de ses réserves aux articles 2, 6 et 15 de la Convention. Celles-ci ne sont plus nécessaires et pourraient être retirées sans aucun problème. La question de la réserve à l’article 7 pourrait faire débat.

18.Il ne semble pas que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant ait été pleinement intégré dans le droit interne. Le principe qui consiste à tenir compte de l’opinion de l’enfant semble avoir été incorporé en partie, dans la mesure où, dès l’âge de 9 ans, les enfants ont le droit de donner leur point de vue sur des questions juridiques; il est toutefois important que, quel que soit leur âge, les enfants aient voix au chapitre; aussi Mme Winter se demande-t-elle s’il pourrait être demandé à un enfant de 4 ans de donner son avis, en cas de divorce par exemple.

19.M. Kotrane dit que l’État partie a ratifié presque tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il n’a toutefois pas ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le faire pourrait renforcer les droits de ce groupe. M. Kotrane demande si l’État partie pourrait envisager d’adhérer à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, qu’il n’a pas non plus ratifiée.

20.S’agissant du droit des enfants de connaître leurs parents et des enfants nés hors mariage, M. Kotrane note avec satisfaction le projet de loi sur la filiation mentionné dans les réponses écrites de l’État partie, projet qui remédierait aux problèmes liés aux accouchements anonymes et mettrait un terme à l’utilisation de termes tels que «illégitimes». La question se pose toujours de savoir si, lorsqu’un enfant cherche à établir sa filiation au moyen de tests d’ADN, il est possible de refuser de se soumettre à un tel test.

21.M me Oviedo Fierro demande comment l’État partie parvient à faire face à la demande accrue de services liés à l’arrivée massive de migrants. Elle demande également dans quelle mesure les enfants migrants sont associés aux processus de consultation comme le dialogue avec la jeunesse; leur participation est importante en ce sens qu’ils peuvent apporter un point de vue différent au débat. D’une manière générale, Mme Oviedo Fierro voudrait savoir quand ce dialogue a été engagé, et comment les conclusions auxquelles il aura abouti seront utilisées.

22.Mme Oviedo Fierro dit ne pas avoir trouvé d’informations sur la participation des enfants aux réseaux sociaux, ni sur les mesures prises pour surveiller les effets d’Internet sur les adolescents. L’Internet pouvant exposer les jeunes à des situations qui ne sont pas toujours positives, elle aimerait savoir quelles mesures l’État partie prend à cet égard.

23.M. Gastaud demande si la société civile et les associations de jeunes ont participé à l’élaboration du rapport de l’État partie. Il aimerait savoir comment l’État partie fait connaître la Convention, en particulier aux personnes travaillant avec des enfants et aux enfants eux-mêmes, et quels sont les résultats obtenus. Enfin, il demande si le Parlement des enfants existe toujours et, dans l’affirmative, comment ses membres sont choisis et quel est son statut vis-à-vis du Gouvernement et du Parlement.

24.M me Wijemanne demande quel est le montant des crédits budgétaires consacrés au plan national d’action. Elle aimerait savoir si l’État partie a mis en place une base de données sur l’enfance regroupant des informations ventilées par type de problèmes ou besoins.

25.M me Khazova demande si la nouvelle législation sur la filiation mettra fin aux conséquences négatives des naissances hors mariage. D’après le Code civil par exemple, l’enfant né hors mariage d’une personne mariée ne peut être élevé par son parent biologique que si le conjoint dudit parent y consent; elle demande donc ce qu’il advient de l’enfant si le conjoint s’y oppose. Cette question se pose aussi si, à la naissance d’un enfant, les deux parents biologiques sont mariés à des tiers: qu’advient-il de l’enfant si leurs conjoints respectifs refusent d’élever l’enfant? Mme Khazova aimerait savoir dans quelle mesure cette disposition du Code civil tient compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, et si l’État partie envisage de retirer la réserve qu’il a formulée en raison de cette disposition.

La séance est suspendue à 11 heures; elle est reprise à 11 h 20.

26.M. Ho scheit (Luxembourg) dit que l’adhésion à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille pose au Gouvernement luxembourgeois de nombreux problèmes d’une grande complexité, similaires à ceux que rencontrent tous les autres pays membres de l’Union européenne. Aucun pays européen n’a ratifié cet instrument, et le Luxembourg n’a pas davantage l’intention de le faire.

27.M. Janizzi (Luxembourg) dit que le Gouvernement a créé un mécanisme de coordination des droits de l’enfant et œuvre actuellement à la définition de priorités à long terme et à court terme. Le Gouvernement a pour objectif d’élaborer un plan national d’action dans lequel seraient impliqués tous les ministères. L’Office national de l’enfance (ONE) a été créé en 2008 et a été chargé de trouver les meilleures solutions aux problèmes des enfants.

28.Le Président de l’Ombuds-Comité est nommé par le Ministre des affaires familiales et de l’intégration sociale. Des efforts sont en cours pour rendre l’Ombuds-Comité plus indépendant, et une structure budgétaire indépendante a déjà été mise en place. L’Ombuds-Comité est composé de membres d’associations caritatives n’ayant aucune relation contractuelle avec le Gouvernement.

29.Le Luxembourg ratifiera prochainement le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, établissant une procédure de communications. Il a d’ores et déjà signé la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, qui entrera bientôt en vigueur dans l’État partie.

30.Pour ce qui est de la possibilité d’accoucher «sous X», M. Janizzi dit qu’elle évite que les femmes enceintes se tournent vers des structures non médicalisées pour accoucher ou recourent à un avortement, faute de solution plus satisfaisante. Le Gouvernement envisage de créer un registre confidentiel où seraient consignées les informations relatives aux origines de l’enfant. Les mères et les enfants auront la possibilité d’accepter ou de refuser de rencontrer l’autre partie.

31.M. Kotrane dit que le Comité s’intéresse bien sûr au sort de la mère, puisque l’enfant a besoin d’elle. Cela dit, il existe un conflit d’intérêts entre le droit de la mère à l’anonymat et le droit de l’enfant de connaître ses parents, et pas seulement sa mère, mais aussi son père et ses frères et sœurs. La Convention dispose que l’intérêt supérieur de l’enfant doit primer.

32.M me Herczog fait observer que l’adoption internationale et l’adoption secrète semblent être des pratiques identiques. Il serait utile de savoir si, en vertu de la loi luxembourgeoise, les enfants ont le droit, à partir d’un certain âge, d’obtenir des informations sur l’identité de leurs parents. Le Gouvernement sensibilise-t-il les femmes à ces questions difficiles, et leur offre-t-il des services de soutien dans ce domaine?

33.M. Janizzi (Luxembourg) dit que les règles qui régissent l’accouchement «sous X» et celles applicables à l’adoption internationale sont tout à fait comparables. En vertu du projet de nouvelles normes, la mère et l’enfant seront l’un comme l’autre habilités à lever le secret de leur identité.

34.La Présidente demande comment, concrètement, la mère et l’enfant peuvent prendre cette décision. Elle aimerait savoir si cette règle s’applique une fois que l’enfant a atteint l’âge de 18 ans.

35.M. Janizzi (Luxembourg) dit qu’il existe deux cas de figure: celui d’un enfant qui recherche sa mère, et celui d’une mère qui recherche son enfant. Dans les deux cas, c’est la personne recherchée qui accepte ou non de rencontrer l’autre partie, et l’enfant doit nécessairement être âgé d’au moins 18 ans.

36.Pour ce qui est de la participation des ONG à l’élaboration du rapport, M. Janizzi dit que le Gouvernement a choisi de rédiger lui-même le rapport. Cela dit, un rapport parallèle a également été élaboré avec l’aide du Ministère des affaires familiales et de l’intégration sociale, qui travaille en étroite collaboration avec les ONG à la définition des politiques et programmes.

37.M. Meisch (Luxembourg) dit qu’un projet de législation portant création d’un cadre de référence sur l’éducation des enfants et les programmes scolaires applicable à tous les établissements scolaires a été élaboré. Une initiative en cours vise à créer des conseils d’enfants au sein des collectivités locales.

38.Le Parlement des jeunes est ouvert à tout mineur qui souhaite y participer. Il jouit d’une grande autonomie et organise ses propres réunions, à l’occasion desquelles ses membres peuvent débattre de toute question les intéressant. Les participants se réunissent en petits comités et soumettent leurs propositions au Parlement en séance plénière, qui adopte les résolutions avant de les transmettre aux ministères.

39.Lorsqu’un projet de législation faisant suite à une de ces propositions est soumis au Parlement, les jeunes parlementaires sont invités à assister à la séance correspondante du Parlement. Un programme d’information itinérant sillonne le pays pour faire connaître les travaux du Parlement des jeunes. Le Parlement des jeunes participe également à un dialogue structuré avec l’Union européenne.

40.Au niveau local, les centres pour la jeunesse s’efforcent d’établir des liens entre la culture luxembourgeoise et celle des immigrés,afin de faciliter l’intégration sociale des jeunes immigrés.

41.M. Kotrane fait observer que le Luxembourg n’a pas ratifié la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local. Étant donné que les étrangers ne sont pas autorisés à participer à la vie publique, il est intéressant que le Luxembourg fasse une telle exception pour les enfants.

42.M. Hoscheit (Luxembourg) dit qu’il s’agit là d’une perception erronée de la réalité. Tous les ressortissants européens vivant au Luxembourg sont pleinement intégrés à la vie publique; 43 % de la population ne sont pas autochtones et jouent un rôle considérable au sein de la société. Le traité de Maastricht a bien entendu ouvert la voie à l’intégration politique.

43.M. Meisch (Luxembourg) dit que l’intégration constitue de fait un réel défi pour un pays composé de 43 % d’immigrés. Le Gouvernement estime que les femmes et les enfants doivent participer à la construction de la société luxembourgeoise de demain.

44.M me Sevenig (Luxembourg) dit que cette hétérogénéité sociale est également visible dans le système scolaire. Il faut faire la distinction entre la nationalité et les langues parlées à l’école. De nombreux élèves parlent une langue à la maison et une autre à l’école.

45.Le Gouvernement a créé des classes spéciales pour les enfants qui ne sont pas capables de s’intégrer au système d’enseignement public pour des raisons linguistiques. Il a également mis en place un système d’enseignement préscolaire accessible aux enfants dès l’âge de 3 ans, dans le but de leur enseigner la langue dès le plus jeune âge.

46.La Présidente demande des précisions sur les réserves qui pourraient être levées avec l’adoption de la nouvelle loi.

47.M. Thyes (Luxembourg) dit que le nouveau projet de loi portant modification du Code civil abrogera l’article 334-6; une fois que la loi aura été adoptée, le Ministère de la justice informera le Ministre des affaires étrangères qui, à son tour, élaborera une loi en vue de lever la réserve. Le Ministère de la justice n’est pas habilité à lever une réserve; c’est au Ministère des affaires étrangères qu’il incombe de le faire. Du point de vue du Ministère de la justice, la réserve pourra alors être levée dans son intégralité; il est toutefois possible que d’autres ministères émettent des objections.

48.Si un père refuse de se soumettre à un test de paternité, l’État en assume les conséquences. À la question de savoir ce qu’il se passerait si les conjoints respectifs des parents biologiques d’un enfant refusaient d’accepter l’enfant au sein de leur famille, M. Thyes dit que le projet de modification prévoit de supprimer la règle du consentement.

49.M me Ney (Luxembourg) dit que le concept de l’intérêt supérieur de l’enfant existe depuis de nombreuses années et fait partie de la jurisprudence. En cas de divorce, l’opinion de l’enfant est bien prise en considération. Il n’est toutefois pas raisonnable de demander à un enfant de 4 ans de choisir l’un ou l’autre de ses parents. En cas de divorce litigieux, un juriste spécialisé nommé et payé par l’État passe du temps avec l’enfant et est chargé à la fois de faire connaître les vues de l’enfant au tribunal et de donner son avis sur l’intérêt supérieur de l’enfant.

50.M me Winter  demande s’il est obligatoire de recueillir l’opinion de l’enfant.

51.M me Ney (Luxembourg) dit qu’il est difficile de fixer un âge précis en la matière, les enfants étant tous différents. Il est tenu compte à la fois de l’âge et de la maturité, et des mesures sont également prises pour éviter d’aggraver le différend entre les parents. Les enfants sont toujours présents aux audiences tenues dans les affaires les concernant, et le juge peut les interroger directement, soit en audience publique, soit à huis clos.

52.M. Kotrane demande si le juge est tenu de recueillir l’opinion de l’enfant. Dans son observation générale no 12 relative à l’article 12, le Comité appelle les États parties à imposer aux tribunaux d’entendre les enfants; les décisions judiciaires doivent en outre être susceptibles d’appel devant une juridiction de degré supérieur.

53.La Présidente dit qu’il y a de nombreuses questions que l’on peut poser à un enfant de 4 ans sans pour autant lui demander directement de choisir entre ses parents.

54.M me Ney (Luxembourg) dit que, dans les procédures de divorce, l’intérêt supérieur de l’enfant porte principalement sur les questions relatives à la garde et aux droits de visite accordés à chacun des parents. En matière de divorce, les juges ne sont pas tenus de recueillir l’opinion de l’enfant et, en pratique, beaucoup d’enfants préfèrent ne pas avoir à donner leur avis pour éviter d’être impliqués dans le conflit. Ceux qui ne souhaitent pas exprimer leurs vues peuvent le faire savoir, en particulier par l’intermédiaire de l’avocat qui leur a été commis d’office.

55.M me Khazova demande s’il il y a un âge minimum en deçà duquel les tribunaux ne commettent pas d’office un avocat aux enfants.

56.M m e Ney(Luxembourg) dit qu’aucun âge minimum n’a été fixé en la matière et qu’il est même arrivé, dans certains cas, que des avocats soient commis d’office à des nourrissons. Les enfants nés hors mariage jouissent des mêmes droits que les enfants nés de parents mariés; les seules différences portent sur l’autorité compétente pour rendre une décision relative à la garde ou au droit de visite en cas de séparation des parents. Dans le cas des enfants nés hors mariage, c’est au juge des tutelles qu’il appartient de statuer, tandis que dans les cas d’enfants nés de parents mariés, c’est le juge des référés qui est compétent tout au long de la procédure de divorce, à l’issue de laquelle c’est le tribunal pour mineurs qui a compétence pour trancher.

57.M. Kotrane dit qu’il conviendrait d’harmoniser les règles de compétence des juges. Malgré les efforts louables déployés par le Gouvernement pour éliminer les différences de traitement de tous ordres appliquées aux différentes catégories d’enfants, il en existe toujours en pratique. Il cite à titre d’exemple un document récent émanant du Ministère de la santé qui fait référence aux enfants légitimes et illégitimes.

58.M me Ney (Luxembourg) dit que, à vrai dire, cette distinction est toujours inscrite dans la loi mais qu’elle en sera retirée dès lors que le projet de loi sur la filiation aura été adopté. Les mesures administratives voulues seront alors prises pour mettre un terme aux différences de traitement qui en découlent en pratique.

59.M. Gurán dit que, d’après des informations portées à la connaissance du Comité, le projet de révision de la Constitution met davantage l’accent sur les droits des parents que sur ceux des enfants. La délégation est invitée à s’exprimer sur ce point.

60.M. Thyes (Luxembourg) dit que la révision de la Constitution est un processus long et complexe, dont on ne sait encore à quoi il va aboutir. Le projet initial a été rédigé en consultation avec la Commission de Venise du Conseil de l’Europe. Le Gouvernement ne considère pas que la proposition privilégie les droits des parents au détriment de ceux des enfants.

61.M. Hoscheit (Luxembourg) dit que le pays ne s’est pas doté d’un système dualiste, et que les instruments internationaux signés par le Luxembourg priment la loi nationale.

62.M me Winter demande si le projet de révision de la Constitution fait expressément référence à l’intérêt supérieur de l’enfant.

63.M. Hoscheit (Luxembourg) dit ne pas être en mesure de répondre à cette question.

64.M. Gurán demande si le Gouvernement serait ouvert aux suggestions que le Comité pourrait lui faire au sujet de la révision de la Constitution.

65.M. Kotrane demande à la délégation de fournir des exemples d’affaires où les tribunaux ont appliqué directement la Convention ou d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme plutôt que la loi nationale.

66.M. Hoscheit (Luxembourg) dit qu’il ne peut s’exprimer au nom du Premier Ministre ou d’autres membres du Gouvernement sur la manière dont ils entendent mener le processus de réforme constitutionnelle. Compte tenu de la tradition internationaliste du Luxembourg, rares sont les exemples où la loi nationale s’est révélée être en conflit avec les conventions internationales. Toutefois, il est arrivé que les tribunaux optent pour cette solution dans certains cas, et les décisions prises n’ont fait l’objet d’aucune controverse.

67.M me Ney (Luxembourg) dit qu’une de ces décisions concernait les différentes dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale qui s’appliquent aux enfants nés de parents mariés et aux enfants nés hors mariage. Le tribunal avait déclaré ces dispositions contraires à l’ordre juridique, et elles seront bientôt modifiées avec l’adoption du projet de loi sur la filiation.

68.M me Winter demande si le Gouvernement a mis au point des stratégies pour dissuader les enfants de mettre en ligne des contenus à caractère sexuel dans lesquels ils apparaissent. Elle souhaite savoir si toutes les formes de châtiments corporels sont interdites dans la sphère privée ainsi que dans les institutions. Elle demande s’il est exact que les tribunaux pour mineurs peuvent ordonner le placement d’enfants en conflit avec la loi dans des prisons pour adultes, pour une période indéterminée, afin de les punir d’un comportement criminel ou problématique. Si tel est le cas, l’on peut conclure à une violation des droits de l’enfant.

69.Mme Wintersouhaite savoirs’il existe des centres de détention pour mineurs, et si l’État partie s’est réellement doté d’un système de justice pour mineurs, le système en place semblant se situer à mi-chemin entre la protection sociale et la justice pénale, et son organisation est difficile à appréhender. Les détenus mineurs peuvent être placés en régime cellulaire pour une durée pouvant aller jusqu’à dix jours, ce qui, d’après elle, est trop long. Quels systèmes de contrôle ont été mis en place pour consigner le temps passé par les enfants en régime cellulaire? Est-il prévu de modifier la loi pertinente? Enfin, Mme Winter souhaite savoir ce qui empêche le tout nouveau centre de détention pour mineurs de 16 à 18 ans de devenir opérationnel.

70.M. Gurán demande si des études ont été menées récemment sur la situation des enfants détenus avec des adultes. Il demande des précisions sur les programmes mis en œuvre pour répondre aux besoins des enfants migrants vivant au Luxembourg.

71.M me Herczog note avec satisfaction la création de centres de formation à la parentalité mais demande comment le Gouvernement veille à ce que les familles qui en ont le plus besoin bénéficient de telles formations. Elle aimerait en savoir plus sur les conseils dispensés aux parents et aux femmes enceintes au sujet des besoins émotifs des enfants.

72.Mme Herczog demande pourquoi le Gouvernement semble préférer le placement en institution aux soins communautaires, alors qu’il est prouvé que ce type de placement nuit au développement de l’enfant. Elle demande si le Gouvernement a tenu compte des Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants et des Lignes directrices européennes communes sur la transition des soins en institution vers les soins de proximité.

73.M. Kotrane note avec satisfaction l’amélioration de la situation des enfants non accompagnés qui demandent l’asile, mais est préoccupé par le fait que les enfants peuvent toujours être détenus dans des centres de rétention pour migrants, parfois même avec des adultes. Il demande comment le Gouvernement s’assure que les enfants migrants renvoyés dans leur pays d’origine ne seront pas exploités à leur retour.

74.En 2007, le Comité a recommandé au Luxembourg de veiller à ce que sa législation interdise expressément de violer les dispositions relatives à l’enrôlement et à l’implication d’enfants dans des hostilités contenues dans le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. Il a également recommandé au Luxembourg d’établir sa compétence extraterritoriale pour de telles infractions, lorsque celles-ci sont commises par – ou contre – un citoyen luxembourgeois ou une personne ayant des liens d’une autre nature avec l’État partie. M. Kotrane demande si le Gouvernement a pris des mesures pour mettre en œuvre ces recommandations et, le cas échéant, lesquelles.

75.M me Wijemanne demande si des études ont été menées pour déterminer les causes de l’accroissement du taux de suicide et des problèmes de santé mentale chez les jeunes. Elle souhaite savoir quels types de services sont mis à la disposition des jeunes souffrant de ce type de problèmes. Notant que le taux d’allaitement maternel exclusif diminue et que seuls deux hôpitaux dans le pays ont été homologués «amis des bébés», elle demande comment le Gouvernement envisage de redresser la situation, si des formations à l’allaitement sont régulièrement offertes aux travailleurs de santé, et si la distribution de substituts du lait maternel dans les hôpitaux est encadrée.

76.Compte tenu de l’accroissement du nombre de jeunes impliqués dans des accidents de la circulation, Mme Wijemanne demande quelles mesures éducatives et préventives ont été prises à cet égard. Notant que le taux d’obésité et la consommation d’alcool ont également augmenté chez les jeunes, Mme Wijemanne demande si le Gouvernement a élaboré des plans d’action pour renverser cette tendance et pour promouvoir la santé affective et sexuelle des jeunes. Croyant savoir que les médicaments psychotropes sont trop souvent prescrits aux enfants souffrant de troubles du comportement, elle demande à la délégation de s’exprimer sur ce point. Enfin, elle demande si des études ont été menées pour expliquer l’accroissement du nombre d’interruptions de grossesse.

77.M. Mezmur demande si l’initiative visant à dresser une liste de pédophiles a progressé. Il souhaite savoir si des statistiques ont été recueillies auprès des deux centres d’appel pour l’enfance maltraitée du pays ainsi qu’auprès de l’unité de police spécialisée dans la protection des mineurs. Il demande s’il est exact que les statistiques de la police n’établissent pas de distinction entre les violences à enfant et les autres infractions commises contre des enfants.

78.M. Cardona Llorens demande quelles mesures spécifiques l’État partie prend pour promouvoir l’intégration des enfants handicapés, en particulier dans le domaine de l’éducation, du sport et des loisirs. Il croit comprendre que les enfants présentant un handicap intellectuel ou psychosocial peuvent être placés dans un hôpital psychiatrique avec l’accord des parents. Dans ce cas de figure, il souhaite savoir dans quelle mesure l’opinion de l’intéressé est prise en considération. Enfin, il demande quelles mesures de substitution aux sanctions pénales, comme la médiation, peuvent être appliquées aux enfants en conflit avec la loi.

79.M me Oviedo Fierro dit que, d’après des informations dont dispose le Comité, les violences à enfant, y compris les violences sexuelles, sont en augmentation au Luxembourg. Elle demande si tel est le cas et, dans l’affirmative, quelles mesures de prévention le Gouvernement met en œuvre. Elle aimerait des données statistiques sur les suicides d’adolescents, dont le nombre augmenterait également, et demande quelles mesures sont prises pour prévenir ce phénomène.

80.M me Winter demande pourquoi les parents sont automatiquement déchus de leur autorité parentale lorsque leur enfant est placé en institution. Elle souhaite savoir si la législation nationale définit clairement la pornographie infantile et la prostitution infantile. Elle demande si les membres des forces de l’ordre sont formés à la prise en charge des enfants. Enfin, prenant l’hypothèse d’un enfant de 8 ans qui aurait commis un meurtre, elle souhaite savoir qui serait saisi du dossier, et où l’enfant serait placé.

La séance est levé e à 13 heures .