Comité des droits de l’enfant
Cinquante-neuvième session
Compte rendu analytique de la 1680 e séance
Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 23 janvier 2012, à 15 heures
Président:M. Zermatten
Sommaire
Examen des rapports soumis par les États parties (suite)
Troisième et quatrième rapports périodiques du Togo sur la mise en oeuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (suite)
Rapport initial du Togo sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
La séance est ouverte à 15 h 5.
Examen des rapports soumis par les États parties (suite)
Troisième et quatrième rapports périodiques du Togo sur la mise en oeuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (suite) (CRC/C/TGO/3-4; CRC/C/TGO/Q/3-4 et Add.1)
1.Sur l’invitation du Président, la délégation togolaise reprend place à la table du Comité.
2.M me Wijemanne dit que le Comité a été informé que seulement 30 à 40 % environ des femmes enceintes ont accès à du personnel de santé qualifié pour l’assistance à l’accouchement et les soins obstétriques d’urgence, ce qui peut avoir pour conséquence des taux de mortalité et de morbidité maternelles élevés. Les mutilations génitales féminines risquent d’entraîner un travail prolongé ou une obstruction du travail ayant des effets pour la mère et l’enfant à naître et contribuant à des handicaps chez l’enfant. Les grossesses chez les adolescentes sont particulièrement à risque, notamment lorsque la mère a subi une mutilation génitale. Mme Wijemanne demande s’il est prévu d’augmenter les ressources allouées à la santé maternelle et de former du personnel de santé, en particulier dans les zones rurales.
3.De nombreuses maladies touchant les nourrissons et les jeunes enfants, comme les maladies respiratoires, la diarrhée et le paludisme, semblent être évitables. La carence en iode, par exemple, qui peut avoir des effets néfastes sur le développement de la petite enfance et contribuer à des handicaps, peut être évitée par la mesure peu coûteuse et efficace consistant à ioder le sel commun. Mme Wijemanne demande si le problème vient du manque de ressources et de personnel qualifié ou de la sensibilisation insuffisante des services, et s’il est prévu de remédier à cette situation.
4.Notant que la sous-alimentation aiguë et chronique est répandue dans l’État partie, Mme Wijemanne félicite le Gouvernement d’avoir mis en place un programme efficace de supplémentation en vitamine A.
5.La priorité devrait être donnée à la lutte contre le VIH/sida, en particulier pendant la grossesse, afin de prévenir la transmission de la mère à l’enfant. Notant qu’un quart environ des enfants orphelins sont orphelins du sida, Mme Wijemanne demande si les femmes enceintes sont dépistées et ont accès, si nécessaire, à la thérapie antirétrovirale.
6.M me Aidoo félicite l’État partie des efforts faits pour promouvoir l’éducation au moyen de la suppression des frais de scolarité et de l’adoption de mesures spéciales en faveur des filles. Toutefois, elle a cru comprendre qu’un tiers des enseignants sont des volontaires non formés qui travaillent dans des écoles informelles et communautaires. La situation est particulièrement grave dans la région des Savanes au nord, où jusqu’à 50 % des enseignants seraient des volontaires payés en espèces ou en nature par les parents ou des associations réunissant parents et enseignants. Mme Aidoo demande si des mesures sont prises pour former davantage d’enseignants et améliorer la qualité de leur formation.
7.Mme Aidoo demande, compte tenu des taux élevés d’abandon scolaire, s’il existe des programmes visant à offrir aux jeunes une seconde chance d’entrer dans le système éducatif, de reprendre leur développement intellectuel et d’accroître leurs compétences.
8.En ce qui concerne la formation professionnelle, Mme Aidoo note que le Togo n’a pas encore ratifié la Convention de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) concernant l’enseignement technique et professionnel. Prévoit-il de le faire?
9.Le Président note que l’État partie prévoit de prendre de nouvelles mesures pour soutenir le système de justice pour mineurs. Soulignant que la privation de liberté doit n’être qu’une mesure de dernier ressort dans le cas des enfants en conflit avec la loi, il demande si des solutions de substitution à la détention ont été examinées. Il s’enquiert aussi des mesures visant à prévenir l’usage de la violence ou de la torture contre des enfants lors de leur arrestation ou de leur garde à vue, et à veiller à ce que les auteurs soient traduits en justice et punis.
10.Le Comité a reçu des informations concernant une prison de Lomé où les conditions de détention, notamment la nourriture, les locaux, les droits de visite et l’espace cellulaire, sont particulièrement mauvaises pour les mineurs. De plus, les enfants sont apparemment livrés à eux-mêmes pendant qu’ils exécutent leur peine. Quelles mesures prend le Gouvernement pour remédier à cette situation?
11.M. Hamadou (Togo) assure de nouveau au Comité que le Gouvernement a bien conscience des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention. Il convient de garder présent à l’esprit, cependant, qu’une démocratie doit, dans l’intérêt de la bonne gouvernance, respecter les opinions divergentes et en tenir compte, ce qui peut dans certains cas faire obstacle à la réalisation de projets ambitieux. C’est au Gouvernement et à l’Assemblée nationale qu’il incombe de proposer des initiatives législatives mais les priorités du Gouvernement ne coïncident pas toujours avec celles de l’Assemblée. Le respect de la séparation des pouvoirs empêche le Gouvernement d’obliger les parlementaires à adopter certains projets de loi. En outre, des élections sont prévues en 2012 et tous les partis politiques affinent leurs stratégies pour s’assurer le soutien des électeurs. Il importe de veiller à ce que les projets de loi ne soient pas perçus comme étant imposés au peuple. Malheureusement, cela signifie, dans certains cas, qu’il faut tenir compte d’aspects de l’opinion publique qui ne sont pas conformes aux normes internationales.
12.Selon le Comité, les enfants handicapés peuvent faire l’objet de discrimination s’ils sont placés dans des institutions spécialisées. M. Hamadou souhaite toutefois savoir s’il serait approprié et faisable de placer un enfant sourd dans une école ordinaire afin d’éviter toute discrimination. Il fait valoir que l’inscription dans des institutions spécialisées est une forme de discrimination positive, du même type que les frais de scolarité moins élevés pour les filles. Les enfants qui ont un handicap relativement grave doivent être protégés, par exemple contre les moqueries de leurs camarades. Les équipements fournis dans les institutions spécialisées sont conçus pour faciliter l’accès de ces enfants à l’éducation.
13.M. Cardona Llorens dit que les enfants handicapés ont les mêmes droits fondamentaux que les autres enfants. La seule façon de leur donner les moyens de construire leur vie en étant insérés dans la société est de promouvoir cette insertion dès leur premier jour d’école. Une approche protectrice les séparant des autres enfants limitera leur capacité de participer à la société sur un pied d’égalité. Ils seront confinés dans des ghettos et continueront d’être perçus par les autres enfants comme irrémédiablement différents. M. Cardona Llorens reconnaît cependant qu’ils ne doivent pas simplement être admis dans des écoles ordinaires ne disposant pas de l’infrastructure et des enseignants qualifiés qui sont nécessaires. La discrimination positive appelle la mise en place d’aménagements raisonnables à cet égard.
14.M. Hamadou (Togo) dit que les autorités vont dans ce sens, étape par étape. Si des enfants lourdement handicapés sont placés sans transition dans des écoles ordinaires, il craint que la discrimination ne soit exacerbée. Un enfant sourd ne peut pas être placé dans une école ordinaire sans les infrastructures nécessaires et sans enseignants formés. Cela étant, les mesures à prendre pour remédier à la situation exigeront un investissement considérable.
15.M. Kotrane note que les priorités que l’État partie s’est fixées semblent être réalisables à la lumière de sa situation financière actuelle. Il précise cependant que le Comité, lorsqu’il met l’accent sur des choix fondamentaux, ne parle pas de moyens financiers mais d’une approche fondamentale des droits de l’homme. Le fait que le Code de l’enfant ne s’intitule pas «Code des droits de l’enfant» reflète, selon M. Kotrane, une certaine conception de ces droits au Togo. Les droits des enfants handicapés ne sont même pas mentionnés dans ce code, qui rassemble des textes disparates définissant le statut de l’enfant mais n’accorde pas une attention suffisante aux droits fondamentaux. Un changement de mentalités est nécessaire pour que les droits des enfants, et en particulier les droits des enfants handicapés, occupent une place importante dans le système juridique.
16.M. Hamadou (Togo) assure de nouveau au Comité que le Gouvernement togolais a la ferme intention d’améliorer la situation et de renforcer les droits de tous les enfants.
17.Les mariages forcés et précoces sont réprimés par le Code pénal. Bien que les dispositions pertinentes soient difficiles à appliquer dans la pratique, les autorités judiciaires sont déterminées à punir ceux qui les enfreignent et ne se décourageront pas. Le support législatif de leur travail sera renforcé. Les enfants issus de mariages forcés qui sont réputés nuls jouissent des mêmes droits que les autres enfants togolais.
18.M. Kotrane appelle l’attention sur l’article 248 du Code de l’enfant, qui dispose qu’un enfant né hors mariage qui a été reconnu par l’un des parents a le droit de réclamer des aliments au parent concerné. Le paragraphe 2 du même article prévoit que l’enfant né des relations adultérines de sa mère peut réclamer des aliments à son père biologique à la condition qu’il ait été préalablement désavoué par le père présumé (le mari de la mère). Le troisième et dernier paragraphe, dont la teneur est préoccupante, indique qu’un enfant né des relations adultérines de son père ne peut lui réclamer des aliments qu’autant que celui-ci l’a reconnu. M. Kotrane souligne que tous les enfants ont le droit à un nom, une famille et des aliments de leur père, même s’ils sont nés hors mariage. L’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas correctement défini à l’article 4 du Code de l’enfant et le Code dans son ensemble porte davantage sur le statut juridique de l’enfant que sur ses droits.
19.M. Hamadou (Togo) dit que des experts du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ont participé au processus de rédaction du Code. Cependant, la version originale qui a été soumise à l’Assemblée nationale a été modifiée afin de parvenir à un consensus. Cela étant, le texte n’est pas gravé dans le marbre et pourrait être amélioré avec l’aide du Comité.
20.M me Abbey-Kounte (Togo) dit qu’une division spécialisée de la justice pour mineurs opère à Lomé. Dans le reste du pays, la justice pour mineurs fait partie de la formation initiale des juges qui sont désignés par le Président de la cour d’appel pour agir en qualité de juges pour enfants. Le Code de l’enfant prévoit le respect de toutes les garanties procédurales dans les affaires concernant des enfants, y compris le droit à un avocat dès le moment de l’arrestation. Il dispose aussi que les enfants de moins de 16 ans ne peuvent être privés de liberté; dans ces affaires, les juges sont tenus de prononcer des peines de substitution.
21.Le Président demande si toutes les personnes qui travaillent dans le système de justice pour mineurs, et pas seulement les juges, reçoivent une formation spécialisée. Il serait utile de savoir quel type de formation est dispensée aux autres acteurs, tels que le personnel pénitentiaire et les travailleurs sociaux, et comment ceux-ci coordonnent leur travail, tant dans la capitale que dans le reste du pays. Le Président souhaite avoir des éclaircissements sur la façon dont un enfant âgé de 14 ans qui a commis un meurtre sera traité par le système judiciaire. Il faudrait aussi des informations complémentaires sur les mesures spéciales prises en ce qui concerne les enfants victimes, en particulier ceux qui sont appelés à témoigner au tribunal.
22.M me Abbey-Kounte (Togo) dit qu’étant donné que l’âge de la responsabilité pénale est fixé à 15 ans dans le pays, un enfant âgé de 14 ans qui a commis un meurtre ne peut pas être déféré devant un tribunal. Dans de tels cas, le juge pour enfants est tenu d’ordonner des mesures éducatives, comme l’obligation de fréquenter le centre de réinsertion sociale Cacaveli de Lomé, qui est géré par l’État. Les enfants ne peuvent pas rester en garde à vue pendant plus de trente heures. Tout le personnel de l’appareil judiciaire bénéficie régulièrement d’une formation en cours d’emploi sur la façon de s’occuper des enfants victimes et des enfants en conflit avec la loi.
23.M. Kotrane demande des éclaircissements sur l’article 336 du Code de l’enfant, qui prévoit que le tribunal peut, par une décision spécialement motivée, prononcer une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de dix ans contre un enfant ayant dépassé l’âge de 16 ans au jour du jugement. Le fait que la date à laquelle une infraction a été commise doit être le facteur déterminant dans tous les cas est un principe universellement reconnu du droit pénal. Cela est particulièrement important dans les actes commis par des mineurs. Il semble qu’une peine d’emprisonnement puisse en fait être infligée dans l’État partie à un enfant qui a commis un meurtre à l’âge de 14 ans si cette peine n’est pas prononcée avant que l’enfant ait 16 ans.
24.Le Président note que le Togo n’est pas le seul pays à utiliser la date du jugement d’une infraction au lieu de la date de sa commission, ce qui constitue une violation des droits de l’homme. Il demande donc à l’État partie de modifier sa législation dans ce domaine.
25.M. Ahondo (Togo) dit que le retard dans la révision des dispositions discriminatoires qui ne sont pas conformes à la pratique internationale est dû au fait que la mise à jour de la législation nationale n’a pas fait l’objet d’une approche systématique. Le Code de la famille et des personnes est actuellement en cours de réexamen car il convient d’assurer sa conformité avec toutes les obligations internationales qui incombent au Togo. Plusieurs dispositions ont déjà été révisées; ainsi, le Code prévoit désormais le droit du conjoint de rester au domicile conjugal en cas de décès de son partenaire, indépendamment de la volonté des enfants. Un accord a aussi été conclu afin de faire figurer la violence familiale dans le Code révisé de la famille et des personnes, le Code de l’enfant et le Code pénal. Un projet de loi sur la violence contre les filles et les femmes est également en cours d’examen. Néanmoins, de nombreuses victimes de violence familiale sont réticentes à signaler ces infractions par peur de représailles. Le Gouvernement s’efforce de sensibiliser les femmes et les enfants à leurs droits et de les encourager à dénoncer les infractions.
26.M. Kotrane demande quelles mesures préventives sont prises par l’État partie pour éviter la violence contre les enfants. Des mécanismes sont nécessaires pour veiller à ce que les autorités soient informées et puissent prendre des mesures à un stade précoce afin d’éviter que ce type de violence ne s’aggrave. En particulier, M. Kotrane souhaite savoir si les médecins et les enseignants sont tenus par la loi de signaler tout signe de maltraitance d’un enfant. Ces signalements permettent aux autorités civiles d’intervenir et de conseiller les parents et les autres personnes responsables d’enfants sur l’utilisation de méthodes de discipline non violentes.
27.Le Président demande si la permanence téléphonique qui a été mise en place est utilisée ou pourrait l’être pour soutenir de telles mesures préventives.
28.M. Hamadou (Togo) dit que le projet de révision du Code pénal contient des dispositions spécifiques interdisant la violence contre les enfants.
29.M. Ahondo (Togo) dit que conformément au Code sanitaire, les médecins sont tenus de signaler tous les cas dans lesquels des enfants montrent des signes physiques de violence et de mauvais traitements. Les enseignants sont aussi tenus de les signaler. Le personnel de la permanence téléphonique qui répond aux appels est chargé d’alerter les autorités judiciaires lorsque des cas exigent une enquête.
30.Bien que les châtiments corporels soient clairement interdits par la loi, il faut, pour pouvoir poursuivre l’auteur, que la victime ait subi une incapacité. Des mesures administratives ont été prises contre certains enseignants à la suite de plaintes de parents dont les enfants avaient reçu la bastonnade à l’école. Le Gouvernement prend des mesures pour rendre les parents et les enseignants plus conscients de la nécessité d’utiliser des méthodes de discipline non violentes.
31.Le Président demande si les châtiments corporels sont expressément interdits dans les centres de réadaptation pour jeunes délinquants et autres établissements de justice pénale.
32.M. Ahondo (Togo) dit que les châtiments corporels sont expressément interdits dans tous ces centres. Tout membre du personnel qui a recours à ces châtiments se voit infliger des sanctions administratives et peut être traduit devant un tribunal.
33.M. Hamadou (Togo) dit que, si les châtiments corporels sont interdits dans tous les milieux, il est difficile de savoir exactement ce qui se passe dans chaque maison, école et centre de réadaptation du pays. Les autorités punissent tous les auteurs sur lesquels leur attention est appelée.
34.M. Cardona Llorens demande si la loi interdit expressément aux parents de gifler leurs enfants si la gifle n’entraîne pas d’incapacité. Il serait utile de savoir si des sanctions pénales et civiles ainsi qu’administratives peuvent être prononcées pour des châtiments corporels infligés dans le cadre familial.
35.M. Hamadou (Togo) dit que tous les actes constitutifs de châtiments corporels sont interdits, indépendamment de leurs conséquences. Le Gouvernement s’efforce de sensibiliser le public à la nécessité de signaler les cas de châtiments corporels. Les auteurs de ces infractions sont passibles de sanctions administratives ou judiciaires, ou les deux dans certains cas.
36.M. Kotrane demande pourquoi les enfants âgés de 15 ans et plus ne sont pas protégés contre les châtiments corporels par le Code de l’enfant, dont l’article 355 ne réprime que les actes de violence contre les enfants âgés de moins de 15 ans.
37.M. Ahondo (Togo) dit que le Code de l’enfant et le Code pénal couvrent à eux deux les enfants de tous les âges.
38.Le Président invite la délégation à répondre aux questions posées précédemment au sujet de l’adoption.
39.M. Ahondo (Togo) dit que le Code de l’enfant prévoit l’adoption simple et l’adoption plénière. Alors qu’en ce qui concerne les adoptions dans le pays, l’adoption simple pourrait être plus pratique, elle coûte actuellement autant que l’adoption internationale, car les processus sont similaires. Il a été souligné que le maintien de coûts aussi élevés que ceux de l’adoption internationale risque de décourager les adoptions dans le pays. Il faut réaliser une étude pour s’assurer qu’il n’y a pas de discrimination.
40.M me Nores de García note que, étant donné que la majorité de la population vit dans la pauvreté au Togo, l’adoption est inabordable pour la plupart des gens dans le pays, ce qui constitue de fait une discrimination. Relevant que le fait qu’un ministère gère les adoptions rend le processus très lent, elle demande ce que fait l’État partie pour l’accélérer.
41.M. Ahondo (Togo) dit que le pays remet en état plusieurs de ses institutions. En ce qui concerne l’adoption, les efforts faits pour réduire les délais et les coûts ont eu un certain succès mais des améliorations sont encore possibles.
La séance est suspendue à 16 h 25; elle est reprise à 16 h 50 .
42.M. Lantomey (Togo) dit qu’il y a eu des coupes dans le budget de l’éducation mais que celles-ci ne devraient pas avoir d’effets négatifs sur le fonctionnement des écoles parce qu’il y a un financement considérable au titre du projet «Éducation pour tous» et que l’Agence française de développement a fourni des fonds supplémentaires.
43.L’école primaire publique est gratuite depuis 2008. L’État fournit des fonds aux écoles pour payer les salaires et couvrir les coûts d’exploitation.
44.Le plan pour l’éducation (2010-2020) vise à dispenser un enseignement solide à tous les enfants, y compris les enfants handicapés. Depuis 2009, Handicap International mène dans la région des Savanes un projet visant à intégrer les enfants légèrement handicapés dans les classes ordinaires. Une enquête a été menée pour recenser les enfants admissibles et la possibilité d’élargir cette approche à d’autres régions est examinée.
45.M. Cardona Llorens dit que, selon les statistiques disponibles, très peu d’enfants handicapés au Togo fréquentent des écoles ordinaires ou même des écoles pour les enfants ayant des besoins spéciaux. Il ne croit pas que toutes les coupes opérées dans le budget de l’éducation puissent être compensées par l’aide internationale. L’éducation inclusive nécessite des enseignants spécialement formés, et partant, un financement supplémentaire. Les coupures budgétaires auront donc sans nul doute des incidences sur cette éducation. Compte tenu des avantages de l’éducation inclusive pour les enfants et du fait qu’elle est moins coûteuse que l’éducation spécialisée, il est urgent que les enfants handicapés soient intégrés dans la mesure du possible.
46.M. Lantomey (Togo) dit que la délégation a pris note des observations et des recommandations du Comité et que le pays leur donnera effet dès que les ressources le permettront.
47.Répondant à des questions posées sur d’autres sujets, M. Lantomey dit que la sensibilisation au VIH/sida fait partie des programmes scolaires à tous les niveaux de l’enseignement depuis 2009. Les cas de violence et d’exploitation sexuelle sur des enfants dans les écoles sont souvent dissimulés par les autorités pour des raisons socioculturelles. Quand ils sont révélés, des mesures appropriées sont prises. Ainsi, deux enseignants impliqués dans l’exploitation sexuelle d’enfants ont été suspendus et seront poursuivis.
48.À la suite d’une étude réalisée en 2011, des propositions ont été faites pour améliorer la situation des nombreux enseignants volontaires du pays, notamment en augmentant leurs salaires et en mettant en place des programmes de formation.
49.Certains enfants abandonnent l’école à cause de difficultés scolaires, d’autres par manque d’argent. L’éducation non traditionnelle permet d’aider ces enfants à reprendre leur formation et des efforts sont faits pour leur proposer des apprentissages. Les programmes de l’enseignement secondaire sont révisés afin de mieux répondre à la situation socioéconomique du pays et les enseignants suivent une nouvelle formation, l’objectif étant de réduire le taux d’abandon scolaire.
50.Le Président dit qu’il y a peut-être un lien entre le recours à des enseignants volontaires et le taux d’abandon scolaire. Les violences sexuelles peuvent aussi amener des élèves à abandonner l’école. L’État partie devrait prendre des mesures pour améliorer le ratio enseignant-élève en construisant de nouvelles salles de classe et en augmentant le nombre d’enseignants. En outre, les enseignants auteurs de violences sexuelles sur des enfants ne doivent pas être simplement suspendus mais placés en détention.
51.M. Lantomey (Togo) dit que les classes surchargées sont un problème mais qu’il est prévu de construire 1 800 salles de classe dans le primaire dans un avenir proche et 600 salles de classe dans le secondaire d’ici à 2020.
52.M. Ahondo (Togo) dit que la suspension de ces enseignants est une mesure de précaution qui n’empêche pas les poursuites judiciaires.
53.M. Lantomey (Togo) dit, en réponse à une question duPrésident, qu’il croit que cinq enseignants ont été accusés de violences sexuelles et que trois affaires judiciaires sont en cours.
54.M. N’tapi (Togo) fournit des statistiques sur la réduction du taux de transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant dans le pays. Il donne un aperçu des types de dépistage et de traitement disponibles et décrit les efforts de sensibilisation. Bien que les taux de mortalité maternelle soient toujours élevés, de nombreux efforts sont faits pour s’attaquer au problème. Des campagnes de vaccination sont menées régulièrement pour réduire l’incidence des maladies évitables et des approches communautaires sont utilisées pour lutter contre les maladies endémiques telles que le paludisme.
55.Le Président demande des informations sur la santé sexuelle et génésique des enfants. Il demande quel type d’information sur le sujet est donné aux filles en particulier, et si les adolescents peuvent se procurer des contraceptifs facilement.
56.M. N’tapi (Togo) dit qu’un large éventail de contraceptifs est disponible au Togo et que près de 70 % des centres de santé en proposent. Des services de planification familiale et de contraception sont disponibles pour tous ceux qui les demandent.
57.M. Minekpor (Togo) dit que le pays oeuvre à la réalisation de l’objectif du Millénaire pour le développement concernant l’accès à l’eau potable et l’assainissement de base. Le Togo a adopté un Code de l’eau et une politique nationale de l’eau, et à partir de 2010 quelque 40 % de la population rurale, 29 % de la population semi-urbaine et 49 % de la population urbaine ont eu accès à l’eau potable. La proportion de personnes ayant accès à des latrines est passée de 10 % en 2000 à près de 12 % en 2010.
58.M me Tebie (Togo), s’exprimant au sujet des efforts que fait le Gouvernement pour éliminer les stéréotypes sexistes, dit que le Togo a une politique nationale relative à l’équité du traitement des hommes et des femmes et à l’égalité des sexes et que les stéréotypes de genre ont disparu du matériel pédagogique, en particulier dans l’enseignement primaire. Le pays est partie à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et au Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique. Les textes de ces instruments sont diffusés dans des versions françaises simplifiées et dans les autres langues écrites du pays.
59.En ce qui concerne les mutilations génitales féminines, Mme Tebie rappelle les statistiques fournies plus tôt par la délégation et dit que les tribunaux punissent les personnes reconnues coupables de cette pratique. Les victimes peuvent bénéficier d’un soutien psychosocial et médical. Pour éviter d’enfreindre la loi, cependant, certaines personnes se rendent dans les pays voisins pour faire procéder à des mutilations. Le Togo coopère avec le Bénin et le Burkina Faso dans ce domaine, a mis en place une permanence téléphonique pour encourager le signalement des cas et offre aux praticiens une formation à d’autres professions.
60.Le Président demande si la coopération avec les pays voisins va jusqu’à la traduction en justice des auteurs de mutilations génitales féminines et si ceux-ci sont de nationalité togolaise ou sont des nationaux des pays dans lesquels ils opèrent.
61.M me Tebie (Togo) dit que des poursuites ont lieu et que les auteurs de ces infractions, qui sont généralement des nationaux des pays voisins, sont souvent extradés.
62.M me Azambo (Togo) dit que le Code du travail de 2006 contient des articles réprimant le travail des enfants et que le Ministère du travail a publié un arrêté ministériel sur le sujet qui a été largement diffusé, notamment sur les marchés et dans les ateliers. Les inspecteurs du travail opèrent fréquemment des descentes dans les lieux où l’on sait que des enfants travaillent. Grâce à la stratégie nationale pour l’élimination du travail des enfants, qui est financée par le Département d’État des États-Unis d’Amérique, plus de 11 500 enfants ont été retirés de lieux de travail dangereux.
63.Le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a élaboré un plan national de lutte contre le travail des enfants. Une étude sur l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales est menée avec l’appui de l’UNICEF et de l’OIT, en vue de l’élaboration d’un plan national pour s’attaquer au problème.
64.L’une des principales causes du travail des enfants est la pauvreté. Le Gouvernement s’emploie donc à promouvoir des projets à haute intensité de main-d’œuvre, comme la construction de routes, afin de stimuler l’emploi. Des cantines sont mises en place dans les écoles pour encourager les enfants à ne pas abandonner l’école et, dans le cadre d’un projet soutenu par la Banque mondiale, les parents qui vivent dans des conditions particulièrement difficiles reçoivent une aide financière pour démarrer leur propre entreprise.
65.Le Président voudrait savoir si l’État partie fait quelque chose pour réglementer la pratique répandue consistant à envoyer des enfants à d’autres membres de la famille pour travailler comme domestiques.
66.M me Azambo (Togo) dit que des ONG telles que WAO Afrique, avec l’appui de Save the Children, œuvrent pour que ces enfants reçoivent une éducation de base et que les familles qui les emploient soient suivies. La plupart de ces enfants ont plus de 15 ans et n’ont plus d’obligation scolaire. WAO Afrique leur dispense un enseignement complémentaire pour éviter qu’ils ne tombent dans la délinquance.
67.Le Président dit que, selon les informations dont dispose le Comité, de nombreux enfants employés comme domestiques n’ont parfois que 9 ans. Loin d’être des criminels potentiels, ce sont des victimes.
68.M. Hamadou (Togo) dit que le Gouvernement prend des mesures pour décourager le recours au travail des enfants ou, à tout le moins, faire en sorte que les jeunes travailleurs soient payés au salaire minimum, actuellement fixé à 35 000 francs CFA, soit environ 70 dollars des États-Unis.
69.M me Herczog demande si les familles qui ont recours au travail des enfants sont passibles de poursuites en vertu du Code pénal. Le problème n’est pas de savoir si les enfants travailleurs sont payés, mais le fait que les enfants ne doivent pas travailler.
70.M. Kotrane dit que le Code de l’enfant de 2007 ne permet pas de savoir exactement dans quelle mesure l’État partie a la volonté de protéger et de promouvoir les droits de l’enfant. Il demande si le droit des enfants d’avoir accès à la culture et aux loisirs, y compris au sport, est garanti et quelles sont les perspectives d’élargissement de cet accès à l’avenir.
Rapport initial du Togo sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/TGO/1 ; CRC/C/OPSC/ TGO/Q/1 et Add.1)
71.M me Nores de García (Rapporteuse pour le Togo, pour le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants) demande si le Gouvernement acceptera que des ONG participent à l’élaboration des rapports de l’État partie au Comité et de la politique nationale.
72.Tout en prenant note avec satisfaction de l’introduction du Code du travail, du Code de l’enfant et de la loi sur la traite des enfants, ainsi que de la scolarité gratuite, le Comité note qu’il faut mettre en place un mécanisme de coordination efficace, de haut rang et doté des fonds et du personnel nécessaires pour assurer le suivi des activités liées à la mise en œuvre du Protocole facultatif. Mme Nores de García demande si l’État partie a l’intention d’incorporer dans la législation nationale toutes les infractions visées aux articles 2 et 3 du Protocole facultatif et d’identifier les secteurs de la population qui risquent le plus d’être victimes de ces infractions. L’État partie a-t-il envisagé d’incorporer dans sa législation la définition complète de la vente d’enfants, telle qu’elle figure dans le Protocole facultatif?
73.Étant donné que, en vertu du droit de l’État partie, il n’existe pas de sanctions applicables à la prostitution des jeunes âgés de 15 à 18 ans, Mme Nores de García voudrait savoir si l’État fait quelque chose pour protéger ces jeunes et s’il modifiera la législation afin de protéger tous les enfants victimes de la prostitution. Elle demande aussi si l’État partie durcira les peines applicables à la production et à la distribution de matériel pornographique mettant en scène des enfants, qui sont actuellement trop faibles pour dissuader les auteurs. Elle souhaite que la délégation clarifie la situation juridique des enfants dont la mère est en prison et des enfants migrants, réfugiés, demandeurs d’asile et porteurs ou victimes du VIH/sida, car le Code de l’enfant ne les mentionne pas.
74.Mme Nores de García demande pourquoi le plan national relatif à la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants élaboré en 2009 avec l’appui de l’UNICEF et de Plan Togo n’a pas été mis en œuvre et si l’État partie envisage de diffuser systématiquement le contenu du Protocole facultatif à tous les secteurs de la société qui travaillent avec les enfants. Elle demande aussi quelles mesures l’État partie prend pour lutter contre les pratiques et coutumes traditionnelles, y compris le mariage précoce, les mutilations génitales féminines, l’infanticide, la polygamie, la discrimination à l’égard des jumeaux et des enfants handicapés, et le droit des maris de répudier leurs épouses, qui entravent toutes la pleine application des lois relatives aux droits de l’enfant.
75.La moitié de la population âgée de moins de 18 ans n’a pas d’acte de naissance ou de carte d’identité. Ces enfants sont particulièrement exposés à l’exploitation sexuelle car la prostitution est largement et ouvertement pratiquée, surtout dans les hôtels et les maisons closes de la capitale, Lomé. Mme Nores de García demande si l’État partie a l’intention de délivrer gratuitement des actes de naissance à tous les enfants. Elle souhaite aussi savoir si la publicité pour les établissements qui offrent des services sexuels est interdite ou s’il existe des dispositions prévoyant la fermeture de ces établissements, la poursuite des propriétaires et la confiscation de leurs biens. Les propriétaires d’un hôtel ou d’une maison close de Lomé ont-ils déjà été condamnés pour avoir employé des enfants prostitués?
76.En ce qui concerne les procédures pénales concernant des enfants victimes, Mme Nores de García demande si l’intérêt supérieur de l’enfant est considéré comme étant primordial tout au long de ces procédures et si ces enfants et leurs familles bénéficient d’une aide juridique et d’une protection appropriées. Elle souhaite aussi savoir si les personnes ou les institutions qui aident les enfants victimes bénéficient d’une protection contre les représailles et si les enfants ont le droit de demander réparation.
77.M. Kotrane dit que la loi de 2005 sur la traite des enfants et le Code de l’enfant ne contiennent pas les définitions de toutes les infractions prévues par le Protocole facultatif. La vente d’enfants n’est pas couverte par l’infraction de traite des enfants. Les adoptions effectuées en violation des procédures établies devraient être constitutives de vente d’enfants. On ne sait pas clairement si l’État partie a compétence pour connaître des affaires impliquant des nationaux ou des résidents du Togo victimes ou auteurs d’infractions visées à l’article 3 du Protocole facultatif qui sont commises en dehors du territoire de l’État partie. Il ne semble pas non plus que le Protocole facultatif soit considéré comme une base juridique suffisante pour l’extradition en ce qui concerne ces infractions.
78.M. Madi demande si le Gouvernement fournit des services de soutien aux victimes. Il semble que les ONG contribuent largement à fournir ces services et qu’elles soient en plus obligées de payer une redevance à l’État pour pouvoir le faire.
79.Le Président demande si le Code pénal permet de poursuivre et de punir les personnes morales accusées d’infractions visées par le Protocole facultatif. Il souhaite aussi savoir quel statut est accordé aux enfants victimes dans les procédures pénales. Les enfants victimes ou témoins sont-ils protégés? Le Président demande en outre si les juges, les procureurs ou les policiers chargés d’interroger les enfants victimes sont dûment formés et quelle protection contre d’éventuelles représailles est accordée aux victimes et aux témoins. Les victimes peuvent-elles bénéficier d’une indemnisation de l’État?
La séance est levée à 18 heures.