Nations Unies

CRC/C/SR.1758

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

17 janvier 2013

Original: français

Comité des droits de l’enfant

Soixante-deuxième session

Compte rendu analytique de la 1758 e séance

Tenue au Palais des Nations, à Genève, le mardi 15 janvier 2013, à 10 heures

Président:M. Zermatten

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Guyana sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Guyana sur la mise en œuvrede la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/GUY/2-4; CRC/C/GUY/Q/2-4 et CRC/C/GUY/Q/2-4/ Add .1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation guyanienne prend place à la table du Comité.

2.M me Webster (Guyana) dit que le Guyana a adhéré au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, et qu’il a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

3.Conformément à l’engagement pris par le Guyana lors de l’Examen périodique universel en 2010, le Ministère de l’éducation tient actuellement, dans tout le pays, des consultations sur l’abolition des châtiments corporels. Le Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement (PNUAD) 2012-2016 et le programme de pays de l’UNICEF, exécuté en partenariat avec l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), prévoient un appui technique dans le domaine des droits de l’enfant, ainsi que le renforcement des capacités de la Commission constitutionnelle des droits de l’enfant.

4.Rappelant que le principal problème auquel se heurte le Guyana est le manque de ressources humaines, Mme Webster insiste sur les nombreux efforts déployés par le Gouvernement pour faire face à la crise financière, grâce auxquels le pays enregistre un taux de croissance positive depuis 2007 et la qualité de vie de l’ensemble de la population s’est améliorée. Face à la diminution de l’aide multilatérale au développement, le Guyana a renforcé la coopération et le commerce avec ses voisins, ainsi que la coopération Sud-Sud. Il continue d’allouer 20 % de son budget annuel à la santé et à l’éducation. Il est sur la voie de la réalisation de plusieurs objectifs du Millénaire pour le développement, notamment la réduction de la pauvreté et la réduction de la mortalité infantile, en particulier chez les Amérindiens, qui représentaient, en 2002, 10 % de la population.

5.Presque tous les enfants ont désormais accès à l’enseignement primaire et l’égalité est assurée entre filles et garçons en ce qui concerne les taux de scolarisation et de réussite dans le primaire. Les efforts vont être désormais axés sur le secondaire et le supérieur. Mme Webster souligne que la majorité des enfants amérindiens de l’intérieur et des vallées fluviales suivent désormais un enseignement secondaire, et que les cas de travail et d’exploitation d’enfants amérindiens ont diminué.

6.Comme le montrent les septième et huitième rapports périodiques sur la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et les premier, deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Guyana s’emploie à améliorer la collecte et l’analyse des données. Cependant, il ne collecte aucune donnée à caractère ethnique, excepté dans les domaines de la santé et de la sécurité.

7.En vue de faciliter l’égalité de l’accès de tous aux services, le Guyana investit dans la fibre optique afin d’accroître la connectivité du pays. En outre, il a mis en place le programme «Un ordinateur portable par famille», qui vise à fournir des ordinateurs portables aux ménages à faible revenu.

8.Le Guyana doit faire face à deux préoccupations majeures à savoir, d’une part, les changements climatiques et l’imprévisibilité des conditions météorologiques et, d’autre part, la menace politique qui pèse sur la démocratie parlementaire.

9.M me Sandberg(Rapporteuse pour le Guyana) encourage le Guyana à ratifier le Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications. Elle demande comment l’État garantit dans la pratique le respect des dispositions de la Convention et met en œuvre les six textes législatifs relatifs aux enfants et s’il envisage d’adopter un plan national d’action spécifique pour la mise en œuvre des droits de l’enfant. Elle aimerait savoir si l’Agence de protection des enfants est un organisme de coordination conforme à l’Observation générale no 5 du Comité sur les mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant et demande des précisions sur la mise en place d’un service central de collecte des données.

10.Saluant la fermeté de l’action des autorités guyaniennes contre la discrimination, Mme Sandberg demande des précisions sur les mesures prises pour lutter contre la discrimination dont sont victimes les jeunes Amérindiens aux motifs de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur langue ou de leur handicap. Elle s’enquiert enfin de la suite donnée aux plaintes pour maltraitance.

11.M. Pollardemande s’il existe un cadre juridique régissant la participation de la société civile aux activités de promotion des droits de l’enfant et si les organisations non gouvernementales (ONG) bénéficient de fonds publics. Il demande des éclaircissements sur les politiques mises en place pour protéger les enfants vulnérables, prévenir le suicide et les accidents de la route chez les jeunes et lutter contre la mortalité liée aux maladies infectieuses.

12.M. Gurándemande des précisions sur le mandat, la structure et le fonctionnement de la commission des droits de l’enfant. Il aimerait également savoir comment le droit de l’enfant à exprimer son opinion est garanti dans les écoles.

13.M. Koompraphantdemande quelle est la définition de la violence à l’égard des enfants dans la législation et si, en cas de maltraitance ou de négligence, les parents peuvent être poursuivis.

14.M. Kotrane aimerait savoir si le Guyana envisage de ratifier les différents instruments relatifs à l’apatridie et les Conventions de La Haye, et si la Convention relative aux droits de l’enfant a déjà été citée dans des décisions de justice.

15.M me Varmahdemande quelles mesures prend l’État partie pour sensibiliser les parents, notamment dans les communautés amérindiennes, à la nécessité d’enregistrer les naissances.

16.M.  Madi, regrettant que l’âge de la responsabilité pénale soit fixé à 10 ans, demande des précisions sur l’âge du mariage. Il invite l’État partie à mobiliser davantage les médias et les organisations non gouvernementales pour faire changer les mentalités à l’égard des châtiments corporels, qui sont encore largement tolérés par la société.

17.M me Wijemannedemande des éclaircissementssur les attributions, les ressources et l’efficacité de la Commission des droits de l’enfant. Elle aimerait également avoir des précisions sur les crédits budgétaires alloués à la santé, à l’éducation et à la protection de l’enfance. Enfin, elle demande si l’État partie a mis en place un système de collecte de données sur les enfants vivant dans les régions reculées afin d’évaluer leurs besoins dans divers domaines.

18.M me Sandberg(Rapporteuse pour le Guyana) demande comment l’État partie veille au respect par les juges et les organes administratifs du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

19.Le Présidentdemande comment l’État partie lutte contre les effets des changements climatiques et si les enfants participent à la recherche de solutions à ces problèmes.

La séance est suspendue à 11 h  5 ; elle est reprise à 11 h  30.

20.M me Teixeira(Guyana) explique que, depuis la réforme constitutionnelle de 1999‑2001, les instruments internationaux auxquels le Guyana est partie, notamment la Convention, doivent être respectés par les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. La Convention peut être directement invoquée devant les tribunaux, même en l’absence de loi reprenant ses dispositions. L’accent est mis sur la promotion des droits des peuples autochtones, particulièrement vulnérables, à qui l’État a octroyé des titres de propriété pour une durée indéterminée. Les soins de santé et l’éducation sont entièrement gratuits pour tous les enfants, de même que les fournitures et les uniformes scolaires, et des programmes de distribution de repas à l’école ont permis d’améliorer sensiblement les taux de fréquentation scolaire et les résultats des élèves. Grâce aux campagnes de vaccination, l’incidence des maladies évitables est en baisse. Afin d’atteindre les objectifs du Millénaire pour de développement (OMD), l’État entend continuer d’allouer plus de 20 % de son produit intérieur brut (PIB) au logement, à la santé et à la fourniture en eau potable.

21.Le Président demande des précisions sur la répartition des ressources budgétaires. Il aimerait savoir si la Convention a déjà été appliquée par les tribunaux et si l’État partie a l’intention de ratifier d’autres instruments internationaux.

22.M me Teixeira(Guyana) répond que la Convention n’a jamais été invoquée devant les tribunaux, mais que ses principes sont respectés dans les décisions de justice.

23.M me Sandberg (Rapporteuse pour le Guyana) demande si les juges, les procureurs et les avocats sont formés et sensibilisés à la Convention.

24.M me Teixeira(Guyana) confirme qu’il existe des programmes de formation destinés aux professionnels de la justice. La Commission des droits de l’enfant, qui remplace la Commission nationale de l’enfance, a été nommée en 2009 pour une durée de trois ans à l’issue d’un vaste processus de consultation avec la société civile.

25.M me Pandor (Guyana) explique que cette commission a vocation à défendre les droits consacrés par la Convention dans tout le pays, y compris dans les régions les plus reculées. Constituée de 15 membres formés aux droits de l’enfant − notamment d’avocats, de travailleurs sociaux et de membres des médias − elle est financée par des fonds publics et reçoit un appui technique et financier du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). En vertu de la Constitution, elle a pour mandat de garantir les droits de l’enfant, y compris le droit d’être entendu, d’offrir des voies de recours aux enfants victimes de violations, de veiller à la conformité des lois avec la Convention, d’émettre des recommandations et de participer à l’élaboration des rapports destinés aux organes internationaux. Un mécanisme de plainte a été récemment mis en place.

26.Le Présidentdemande si la Commission des droits de l’enfant est dotée d’un mandat d’investigation et si elle est indépendante et conforme aux Principes de Paris.

27.M me Pandor (Guyana) répond que la Commission est habilitée à enquêter sur des affaires de violation des droits de l’enfant, y compris celles impliquant des organismes publics. Elle peut également signaler les cas à la police ou saisir directement l’Agence de protection des enfants. Elle rend compte une fois par an de ses activités au Parlement.

28.M me Sandberg (Rapporteuse pour le Guyana) demande quel est l’organe chargé de coordonner les questions relatives aux droits de l’enfant dans le pays.

29.Le Président aimerait savoir quel organe est chargé de coordonner au niveau national les programmes dans le domaine de la protection de l’enfance, qu’ils aient trait à l’éducation, à la santé ou encore à la lutte contre la pauvreté, et de quel ministère relève l’Agence de protection des enfants.

30.M me Teixeira (Guyana) précise que c’est le Conseil des ministres qui valide en dernier ressort les politiques de l’enfance, même si les questions relatives à la protection de l’enfance relèvent du Ministère du travail, des services sociaux et de la sécurité sociale, dont dépend d’ailleurs l’Agence de protection des enfants.

31.La Commission des droits de l’enfant n’est pas encore pleinement conforme aux Principes de Paris mais le Gouvernement guyanien veillera à ce qu’elle le soit à terme.

32.Le Guyana n’a pas encore réfléchi à la question d’adhérer ou non à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Il a cependant adopté récemment une loi sur l’adoption, qui permet aux Guyaniens vivant à l’étranger d’adopter des enfants de leur nationalité.

33.Le Guyana compte bien instaurer au niveau national un cadre plus favorable aux handicapés. Il envisagera ensuite de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Dans l’intervalle, les collectivités locales s’assureront que tous les nouveaux bâtiments sont accessibles aux handicapés.

34.Étant donné que, depuis une quinzaine d’années, ce sont les personnels de santé, et notamment les sages-femmes, qui sont chargés de déclarer les nouveau-nés à l’état civil, le taux d’enregistrement des naissances avoisine 93 %, les 7 % restants concernant des enfants qui vivent dans des zones reculées. Le Gouvernement ne ménage aucun effort pour que les enfants des régions côtières soient eux aussi systématiquement déclarés à la naissance. L’absence de documents d’état civil est un autre problème car c’est aux parents qu’il appartient de faire les démarches voulues. Comme près d’un tiers des pères ne reconnaissent pas leur enfant, il arrive que les actes de naissance ne soient jamais demandés, et donc jamais délivrés. Les Présidents des conseils de village amérindiens (Toushaos) ont quant à eux intérêt à ce que toutes les naissances soient enregistrées étant donné qu’ils perçoivent des subventions de l’État en fonction du nombre d’habitants recensés. Ils sont d’ailleurs habilités à procéder à des enregistrements tardifs des naissances.

35.Il est désormais interdit à un directeur d’école de refuser d’inscrire un enfant ne possédant pas de papiers d’identité. Ledit directeur est au contraire tenu d’informer les services sociaux, qui sont alors chargés de corriger la situation.

36.M me Sandberg (Rapporteuse pour le Guyana) demande si les parents qui n’ont pas accès à Internet doivent impérativement se rendre à Georgetown pour obtenir l’acte de naissance de leur enfant. La loi prévoit-elle la possibilité de faire une recherche en paternité lorsque le père a refusé de reconnaître l’enfant?

37.La délégation guyanienne pourrait indiquer si, d’une manière générale, ce sont des difficultés financières qui poussent les parents à abandonner leur enfant et exposer les raisons pour lesquelles les pères fuient leurs responsabilités parentales. Il serait intéressant de savoir si les familles ont droit à autant de bons pour les uniformes scolaires qu’ils ont d’enfants, de qui sont composés les comités chargés d’effectuer des visites dans les établissements de protection de l’enfance et si les enfants ont accès à des activités récréatives.

38.M me Al- Asmar demande si une étude a été menée sur les raisons sous-jacentes de l’abandon scolaire et voudrait en savoir plus sur le système d’enseignement professionnel guyanien ainsi que sur les éventuels coûts cachés de l’éducation.

39.M.  Cardona Llorens demande combien d’adoptions internationales ont déjà eu lieu, combien d’enfants handicapés sont scolarisés dans le système d’enseignement ordinaire et si des campagnes de sensibilisation ont été menées pour combattre la discrimination à l’égard de ces enfants.

40.M. Cardona Llorens demande pourquoi les enfants de plus de 16 ans qui sont accusés d’avoir commis une infraction sont traduits devant des tribunaux pour adultes. Il souhaite aussi connaître la durée maximale du placement d’un mineur dans le centre de détention provisoire pour mineurs construit récemment.

41.M me Nores de García demande quelles mesures l’État partie a prises pour garantir un enseignement d’égale qualité dans toutes les écoles du pays et permettre à tous les écoliers d’avoir accès aux nouvelles technologies. Elle demande si le fort taux d’abandon scolaire pourrait être corrélé à la pratique des châtiments corporels. Enfin, elle encourage l’État partie à lutter contre les pires formes de travail des enfants, notamment dans le secteur de l’agriculture, de la pêche et dans les emplois saisonniers.

42.M.  Pollar demande si les mineurs ont accès à des services de conseil confidentiels, dans le domaine de la santé notamment, et si leurs données personnelles sont protégées. Il souhaiterait savoir où en est l’État partie dans la rédaction du rapport initial qu’il est censé soumettre au Comité au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

43.M me Lee demande si l’État partie a mené une enquête sur l’ampleur de la violence contre les enfants et si des sanctions ont déjà été prises contre des personnes qui n’auraient pas signalé des cas de violences sexuelles sur mineur. Elle souhaiterait savoir si l’État partie envisage de prendre des mesures pour que les enfants de moins de 5 ans ne soient plus livrés à eux-mêmes ou confiés à la garde de leurs frères et sœurs aînés lorsque les mères sont au travail. Elle demande enfin si l’État partie est touché par le problème du tourisme sexuel et si des mesures ont été prises pour combattre la tuberculose, dont le taux de prévalence est bien supérieur à celui du reste de la région. La délégation pourrait aussi indiquer si l’État partie a adopté un code national régissant la commercialisation des substituts du lait maternel et préciser combien d’hôpitaux ont été certifiés «amis des bébés».

La séance est levée à 13 heures.