NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.121630 janvier 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-quatrième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1216e SÉANCE

tenue au PalaisWilson, à Genève,le jeudi 25 janvier 2007, à 10 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial de la Malaisie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial de la Malaisie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/MYS/1 (document en anglais seulement); liste des points à traiter (CRC/C/MYS/Q/1); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/MYS/Q/1/Add.1))

1. Sur l’invitation du Président, la délégation malaisienne prend place à la table du Comité.

2.Mme FAIZAH (Malaisie) dit que la Malaisie a une population très jeune puisqu’en 2006 elle comptait 10,69 millions d’enfants pour un total de 26,6 millions d’habitants. Depuis 2004, le Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de la communauté est l’organe central de protection de l’enfance et en 2005 il s’est doté d’une division de l’enfance; il est prévu de mettre sur pied des services chargés des enfants à l’échelon du district.

3.Le système éducatif se subdivise en établissements de prise en charge et de promotion du développement de l’enfant (pour les 0 à 6 ans), écoles primaires (7 à 12 ans) et écoles secondaires (13 à 19 ans). En vertu de la loi de 1996 sur l’éducation, telle que modifiée en 2002, l’école primaire est obligatoire pour tous les enfants. En 2006, le taux de scolarisation a atteint 91,8 % dans le primaire, 84,4 % dans le premier cycle du secondaire et 72,4 % dans le deuxième cycle du secondaire. En 2004, le Ministère de l’éducation a été scindé en deux, cédant la place au Ministère de l’enseignement supérieur et au Ministère de l’éducation.

4. Les diverses mesures de protection de l’enfance mentionnées dans le rapport et les réponses écrites ont été renforcées par la création dans les services de pédiatrie des hôpitaux d’équipes chargées de détecter les cas de maltraitance et de négligence.

5.Des enfants ont été invités à donner leur opinion pendant la phase d’élaboration des lignes directrices nationales sur l’éducation en matière de santé de la procréation, qui ont été approuvées par le Gouvernement et devraient être incorporées dans le programme des cours dans les mois à venir. Des enfants ont participé à des réunions internationales et régionales, notamment à la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants, et il est prévu d’inciter les enfants, en particulier ceux appartenant aux groupes sociaux défavorisés, à participer à l’élaboration des politiques les concernant.

6.Le Gouvernement entend mener des activités en faveur des enfants défavorisés, en particulier les enfants des rues et les enfants réfugiés, en vue de garantir leur accès à l’éducation et à des documents d’identité. Il projette en outre d’améliorer les conditions de vie des minorités autochtones et des enfants pauvres et de combattre la violence à l’égard des enfants en engageant une réforme de la loi de 2001 sur l’enfance et en créant des centres d’accueil pour enfants victimes de sévices ou de traite, ainsi que d’adopter des programmes de réadaptation à l’intention de ces enfants.

7.Un hôpital spécialisé dans la santé de la mère et de l’enfant a été mis en place et le Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de la communauté élabore actuellement des lignes directrices sur l’éducation, la prise en charge et le développement des jeunes enfants, dont la rédaction devrait être achevée avant la fin de 2007. En outre, le programme «Permata Negara», qui prévoit de faciliter l’accès des jeunes enfants à des soins de santé de qualité à un coût raisonnable devrait être adopté d’ici 2008. Une politique en faveur des handicapés, assortie d’un plan d’action, est en cours de finalisation et devrait être adoptée en 2007.

8.M. ABDUL GANI (Malaisie) dit que beaucoup reste à faire pour mettre la législation nationale en totale conformité avec la Convention. Il est prévu d’apporter des modifications à la réglementation fondamentale de 1975 relative à la sécurité, en particulier d’abroger l’article en vertu duquel la peine de mort peut être prononcée à l’encontre d’un mineur. Il est en outre prévu d’incorporer dans la loi de 2001 sur l’enfance de nouvelles dispositions en vue de protéger l’identité des enfants victimes de mauvais traitements et de négligence et d’abroger les dispositions autorisant les châtiments corporels. La loi de 1966 sur l’emploi des enfants et des jeunes doit aussi faire l’objet d’une révision visant à y inclure une définition de l’âge minimum d’admission à l’emploi et des dispositions protégeant les mineurs contre l’exploitation économique et leur affectation à des travaux dangereux ou nuisibles à leur développement, ainsi qu’à leur assurer l’accès à l’éducation même s’ils travaillent.

9.Afin de mieux garantir le bien-être de l’enfant, il est envisagé d’apporter à la loi de 1993 sur les centres de soins des modifications ayant pour objet d’accélérer le processus d’enregistrement, de veiller à ce que tous les centres en activité soient enregistrés et respectent les normes de qualités les plus élevées et de déléguer certains pouvoirs administratifs aux autorités locales afin d’améliorer l’efficacité du système. Il est de plus envisagé de revoir la loi sur les centres de soins pour enfants de 1984 et d’incorporer dans la loi sur la violence familiale de nouvelles dispositions visant à ce que les victimes, en particulier les enfants, puissent porter plainte et obtenir une protection temporaire et à définir la torture psychologique comme un élément constitutif de la violence familiale. Les peines encourues en cas d’infractions sexuelles, telles que l’inceste, ont été alourdies dans le Code pénal.

10.Face à l’évolution de la société, le Gouvernement a chargé une commission composée de magistrats appliquant la charia, de juristes, de représentants de divers départements de l’administration publique et d’ONG d’examiner la question de savoir quel tribunal (de droit civil ou islamique) est compétent en cas de litige entre des époux dont l’un s’est converti à l’islam - question cruciale en matière de garde des enfants, de droits de succession et de choix de la religion de l’enfant. Le Gouvernement a favorablement accueilli plusieurs propositions de modification de lois, dont la loi de 1976 sur le mariage et le divorce et la loi islamique de 1984 sur la famille. Ces amendements devraient être adoptés avant la fin de 2007.

11.En 2007, le Parlement examinera un projet de loi contre la traite des personnes qui incrimine spécifiquement la traite d’enfants et prévoit l’institution de mécanismes de protection et de centres d’accueil pour les victimes et la délivrance de visas spéciaux permettant aux intéressés de rester dans le pays tant que la procédure n’est pas close, ainsi que de bénéficier d’une aide sociale dans l’intervalle. Le Parlement se penchera aussi sur un projet de loi sur les travailleurs étrangers, qui prévoit notamment d’interdire le recrutement de travailleurs étrangers de moins de 18 ans et de garantir l’accès des enfants de travailleurs étrangers à l’éducation.

12.Les enfants ne sont pas habilités à saisir directement les tribunaux, mais ils peuvent se faire représenter par un tiers ou un conseil et ils ont droit à une assistance juridique.

13.La Malaisie est disposée à lever ses réserves concernant les articles 1er, 2, 7, 13, 15 et 37 de la Convention. Le Comité sera informé des résultats des consultations en cours avec les parties prenantes relatives à la réserve à l’article 14 de la Convention (liberté de religion).

14.Malgré sa réserve relative à l’article 28 de la Convention, la Malaisie a déjà institué un enseignement primaire obligatoire et gratuit. Une contribution d’un montant de 4,5 ringgit (1,18 dollar) par an et par élève est toutefois perçue dans le primaire pour financer les bibliothèques et les activités sportives et artistiques, mais surtout pour responsabiliser les parents quant à l’éducation de leurs enfants. Cette contribution sert aussi à financer des programmes supplémentaires en faveur du développement global de l’enfant. Si le Comité considère que l’enseignement primaire est malgré cela gratuit en Malaisie, la réserve pourra être levée.

15.Le Gouvernement va étudier la possibilité d’adhérer aux deux Protocoles facultatifs.

16.En 2006, à l’issue de discussions avec le Gouvernement indonésien, la Malaisie a accepté l’ouverture d’écoles chargées de dispenser une instruction de base aux enfants d’immigrés indonésiens travaillant dans les plantations de l’État de Sabah. Au total, 109 enseignants indonésiens devraient être détachés pour enseigner dans les centres HUMANA, aux frais du Gouvernement indonésien.

17.La Malaisie s’attache à recueillir des données ventilées sur les enfants des rues et les enfants de travailleurs immigrés clandestins et compte prendre des mesures au terme de ce processus.

18.Le taux d’abandon scolaire très élevé chez les enfants autochtones (o rang asli) a baissé depuis qu’ils bénéficient d’un programme d’assistance éducative, de la gratuité des transports scolaires et de l’éducation jusqu’au troisième niveau, ainsi que de services d’orientation, de séminaires et de cours de motivation.

19.Les enfants actuellement en centre de détention seront transférés en centre de protection, sur la base de dispositions administratives car aucune loi n’a encore été promulguée en la matière. Il a été convenu avec la police d’essayer de mettre en liberté conditionnelle les enfants placés en centre de détention préventive, hormis ceux accusés de délits graves.

20.M. KRAPPMANN se félicite de la qualité du rapport à l’examen et souligne que la Malaisie montre par son exemple qu’il est possible de vivre dans le respect de la diversité ethnique, culturelle et religieuse. Le pays s’est fixé des objectifs ambitieux sur les plans économique, politique et social. Sa croissance économique lui a déjà permis de renforcer les secteurs de la santé et de l’éducation, qui profitent directement aux enfants.

21.La Malaisie a toutefois formulé plusieurs réserves à la Convention, déclarant que les dispositions ne seraient applicables que si elles étaient conformes à la Constitution, à la législation nationale et aux politiques nationales; elle en a déjà levé certaines mais le Comité l’invite à retirer au plus vite les autres. Le Comité a du mal à comprendre pourquoi l’État partie n’a pas encore adhéré aux deux Protocoles facultatifs et l’encourage à le faire.

22.La délégation voudra bien préciser si les quelque 600 000 enfants étrangers vivant légalement ou illégalement dans le pays, demandeurs d’asile ou victimes de la traite, jouissent des droits consacrés par la Convention au même titre que les autres enfants, comme le prescrit l’article 2.

23.Il serait intéressant de savoir pourquoi la loi de 2001 sur l’enfance, très progressiste, ne comporte pas de disposition sur le droit de l’enfant d’exprimer librement son opinion, pourquoi les personnes qui s’occupent d’enfants et les enseignants ne sont pas obligés de signaler les cas d’abus ou de négligence sur enfant et pourquoi la flagellation des enfants n’est pas interdite.

24.Il serait aussi intéressant de savoir quel est le statut de la Convention dans le système juridique malaisien et ce qu’il advient en cas de conflit entre certaines dispositions de la Convention et la législation nationale. La délégation pourrait de plus expliquer comment les deux systèmes juridiques, Code civil et charia, qui contiennent des définitions et des dispositions différentes concernant les enfants (âge de la responsabilité pénale, du mariage, etc.), peuvent coexister sans tensions entre les différents groupes.

25.Le Comité aimerait savoir si la diffusion et la formation relatives à la Convention visent l’ensemble des enseignants, des personnes qui s’occupent d’enfants, des travailleurs sociaux et des membres des services de protection, si les parents sont eux aussi informés, si les enfants connaissent leurs droits et si le grand public est sensibilisé aux droits de l’enfant.

26.L’avis des enfants est pris en considération par les tribunaux dans les affaires de garde d’enfant et d’adoption, mais il faudrait savoir si cette disposition s’applique de manière restrictive ou si l’opinion des enfants est toujours respectée. Il semblerait que les enfants doivent obéir aux ordres des adultes et que leur point de vue ne soit pas pris en compte. Cette vision traditionnelle de l’éducation semble transparaître dans la loi sur l’enfance, dépourvue de dispositions sur le respect de l’opinion de l’enfant.

27.Le Comité souhaiterait savoir si le Plan d’action pour les enfants (2006-2020) couvrira tous les droits inscrits dans la Convention et si, comme préconisé lors du Sommet mondial pour les enfants de 2002, il fixe des objectifs clairs et des délais d’exécution et prévoit des ressources humaines et financières et un mécanisme de suivi.

28.La délégation pourrait apporter des éclaircissements sur le chevauchement d’activités entre le Conseil de coordination pour la protection des enfants, qui regroupe des représentants de tous les ministères et organismes concernés, ainsi que des ONG et des experts dans le domaine, et le Conseil national consultatif pour les enfants. Il serait en outre utile d’avoir des précisions sur les responsabilités et la coordination au niveau des États fédérés et des communautés.

29.Mme ALUOCH demande si le Gouvernement profitera de la révision de la loi sur l’enfance pour harmoniser les termes utilisés en référence aux enfants et modifier l’âge minimal du mariage (afin qu’il soit le même pour les filles et les garçons) ainsi que l’âge minimal d’admission à l’emploi.

30.Elle aimerait savoir s’il est vrai que de nombreux enfants autochtones et enfants de réfugiés ou de demandeurs d’asile, en particulier d’origine philippine, sont victimes de discriminations.

31.M. ZERMATTEN relève que, malgré le système efficace d’enregistrement et les dispositions législatives rendant obligatoire la déclaration des naissances, l’enregistrement des naissances des enfants de ressortissants étrangers − réfugiés, demandeurs d’asile, migrants clandestins − et des enfants illégitimes ou abandonnés pose problème. La délégation pourrait indiquer comment le Gouvernement entend régler ces problèmes liés à l’ignorance ou à la crainte des parents clandestins de se présenter devant les autorités, à l’éloignement des bureaux d’enregistrement et aux coûts, aux frais progressifs et dissuasifs, et à la difficulté d’obtenir des duplicata en cas de perte des papiers d’identité. Le retrait de la réserve relative à l’article 7 serait souhaitable.

32.Des étudiants ayant été poursuivis en justice ou victimes d’interventions policières pour s’être exprimés contre la loi sur la sécurité nationale, il est permis de se demander si la liberté d’expression et la liberté d’association et de réunion pacifique sont bien respectées en Malaisie.

33.L’article 12.4 de la Constitution fédérale, disposant que le parent ou le représentant légal de l’enfant a le droit de décider de la religion de l’enfant, est en contradiction avec l’article 14 de la Convention, sur le droit à la liberté de religion, et à son article 12, sur le droit de l’enfant d’exprimer librement son opinion. En cas d’incompatibilité entre la législation nationale et la Convention, il serait préférable d’appliquer les instruments relatifs aux droits de l’homme ratifiés par le pays, en l’occurrence la Convention relative aux droits de l’enfant.

34.Il faudrait en outre savoir quand le Gouvernement compte abolir les châtiments corporels comme sanction pénale, ce qui lui permettrait de lever sa réserve sur l’article 37 de la Convention.

35.M. SIDDIQUI demande si le Gouvernement a procédé à une évaluation systématique de l’impact des importantes dépenses d’investissement consacrées aux services sanitaires et sociaux ainsi qu’à l’éducation et à la protection de l’enfant et s’il répartit ces dépenses en partenariat avec des organismes locaux et des ONG.

36.Il serait utile de savoir comment le Gouvernement entend résoudre le problème du manque de données sur les enfants vulnérables, autochtones, étrangers, victimes de la traite ou de l’exploitation sexuelle, et s’il prévoit de publier un recueil de statistiques annuel sur toutes les catégories d’enfants.

37. La délégation pourrait indiquer quels liens le Conseil de coordination pour la protection des enfants et le Conseil national consultatif pour les enfants entretiennent avec le Conseil malaisien pour le bien-être des enfants et d’autres ONG s’occupant d’enfants dans le pays.

38.Il faudrait aussi savoir quelle est la répartition des tâches des différentes ONG s’occupant des enfants handicapés et des enfants victimes d’abus sexuels, si les ONG s’occupant d’enfants peuvent avoir accès aux aides internationales, s’il existe des statistiques sur cette question et quelles procédures ces ONG doivent suivre pour bénéficier de fonds étrangers.

39.Le PRÉSIDENT demande si le Gouvernement envisage de ratifier d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en plus de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

40.M. POLLAR demande si le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, amplement intégré dans la législation, l’est aussi dans la formation des professionnels concernés.

41.Le PRÉSIDENT, se référant à l’article 6 de la Convention, demande ce qui est fait pour protéger les enfants des accidents de la route, particulièrement fréquents en Malaisie.

42.M. FILALI demande si l’instance chargée d’examiner la question de la réserve à l’article 14, relatif à la liberté de religion, s’inspire de la pratique d’autres pays musulmans, comment coexistent les systèmes judiciaires civil et islamique et si des efforts sont déployés pour unifier la charia, dont l’interprétation varie selon les écoles.

La séance est suspendue à 11 h 30; elle est reprise à 11 h 45.

43.M. ABDUL GANI (Malaisie) explique que la mise en conformité de sa législation avec les conventions internationales est très complexe en raison du grand nombre de lois nationales. Le Gouvernement attend que tout soit en place pour décider de l’adhésion à des instruments comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ou la Convention contre la torture.

44.La pratique d’autres pays musulmans, notamment du Maroc et de la Tunisie, en matière de liberté de religion est effectivement examinée. Le Gouvernement préfère ne pas donner de délais pour la levée des réserves, de crainte de ne pouvoir les tenir. La prochaine session du Parlement se tiendra en avril, ce qui signifie une adoption de la loi en juin au plus tôt, car elle doit préalablement être approuvée par le Roi. La session suivante aura lieu à l’automne.

45.La Malaisie est majoritairement chaféite, mais rien n’interdit d’emprunter des principes aux autres écoles juridiques s’ils sont plus favorables ou plus justes. La tendance est à l’harmonisation, mais c’est une entreprise délicate car les affaires religieuses relèvent, en vertu de la Constitution, des États fédérés. Des recommandations leur sont adressées, des réunions sont organisées pour débattre des modifications législatives nécessaires et des modèles de loi sont élaborés pour les aider à harmoniser leurs lois avec la Constitution et les meilleures pratiques. Aux tribunaux civils et islamiques s’ajoutent, dans les États de Sabah et Sarawak, des tribunaux autochtones compétents pour les affaires relevant des lois autochtones – le plus souvent des infractions à caractère culturel. Ces trois systèmes cohabitent harmonieusement dans une société qui se caractérise par sa pluralité de cultures, de langues et de religions.

46.L’absence de définition uniforme de l’enfant pose effectivement problème, mais le Gouvernement a accueilli favorablement les recommandations qui lui ont été faites à ce sujet.

47.Le concept de «dérogation raisonnable», qui limite le principe de non-discrimination, signifie qu’une mesure donnée ne s’applique pas à tous de la même manière en toutes circonstances. Ainsi, pour scolariser les enfants de certains groupes autochtones vivant dans des régions très isolées il est nécessaire de leur fournir un transport gratuit, un logement et même de l’argent de poche, alors que les enfants vivant en ville n’y ont pas droit: dans ce cas, la discrimination est légitime car elle est pratiquée pour le bien des enfants.

48.Au sujet des allégations d’atteintes à la liberté d’expression, le Comité peut être assuré qu’aucun jeune n’a été jugé pour avoir exprimé son opinion sur la loi de sécurité intérieure. Que cette loi soit ou non critiquable, il convient de souligner que beaucoup de pays adoptent des lois allant dans le même sens pour faire face au terrorisme. Il se peut en revanche que des jeunes aient été inculpés pour réunion illicite à la suite des manifestations contre la loi sur la sécurité intérieure. Toute réunion organisée à l’extérieur doit en effet être autorisée, pour des raisons liées à la circulation, à la protection de la population, entre autres.

49.Le Gouvernement s’est engagé à lever la réserve à l’article 37, mais là encore, aucun délai ne peut être donné. Le Procureur général lui a soumis à ce sujet un document d’information qui a été bien accueilli. Le Comité sera informé dès qu’une décision aura été prise. Au sujet de la peine de flagellation, pour les enfants elle consiste en coups de verge et non de fouet. Ce châtiment est néanmoins contraire à la Convention et la loi sur l’enfance sera modifiée en conséquence.

50.Les enfants nés hors mariage peuvent obtenir la nationalité si un de leurs parents est malaisien; la charia restreint leur droit d’hériter mais le Gouvernement s’emploie à résoudre ce problème.

51.Il est vrai qu’aucun article de la loi sur l’enfance ne reconnaît aux enfants le droit d’exprimer leurs opinions, et les enseignants n’ont pas l’obligation de les écouter, mais toutes les écoles ont désormais un conseiller à qui les enfants peuvent parler de tout ce qui les préoccupe. Ces conseillers – un pour 500 enfants − se sont révélés particulièrement utiles pour détecter les cas de maltraitance et d’abus sexuels.

52.En Malaisie, les lois promulguées adoptées par le Parlement l’emportent sur toute autre disposition.

53.Mme FAIZAH (Malaisie) dit que depuis 2003 la Commission malaisienne des droits de l’homme dispense aux formateurs une formation sur les principes de la Convention. L’Institut social a inclus un module sur la Convention dans la formation des travailleurs sociaux. Depuis 2004, les enfants participent à la sensibilisation à leurs droits: certains ont été formés pour animer des ateliers sur diverses questions qui les concernent, notamment la violence entre enfants. Cette initiative, menée dans cinq États fédérés, vise essentiellement à sensibiliser les enfants à la Convention, en insistant sur leur droit de participation. Des outils pédagogiques ont été distribués dans les écoles et la campagne «Oui aux enfants» vise à sensibiliser l’ensemble de la population.

54.Le Conseil de coordination pour la protection des enfants, qui veille à l’application de la loi sur l’enfance, en particulier son volet protection, relève du Département des affaires sociales, alors que le Conseil national consultatif pour les enfants, qui dépend du Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de la communauté, est chargé de coordonner les programmes et les politiques relatifs à l’enfance entre les différents organismes publics, les ONG et le secteur privé.

55.Le Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de la communauté attribue chaque année des subventions aux ONG présentes sur le territoire à hauteur d’une trentaine de millions de ringgit. En 2006, les subventions accordées aux seules ONG œuvrant en faveur de l’enfance se sont montées à plus de 7 millions de ringgit et celles affectées aux 24 ONG s’occupant des enfants handicapés à 1,6 million de ringgit. Le Ministère dresse chaque année le bilan des activités menées par chacune des ONG bénéficiaires en vue de déterminer s’il y a lieu de reconduire ces subventions.

56.Le deuxième Plan d’action national pour l’enfance, dont l’achèvement est prévu pour la fin 2007, découle, comme le premier, des engagements pris lors du Sommet mondial pour les enfants.

57.M. KRAPPMANN demande si l’année d’enseignement préprimaire obligatoire qu’il est envisagé d’instituer sera gratuite.

58.On peut s’interroger sur la raison d’être des droits de scolarité que doivent verser les élèves non ressortissants, négligeables en termes de contribution au budget de l’État mais suffisamment élevés pour constituer un frein pour certaines familles. Ces élèves non ressortissants semblent n’être admis que dans les établissements publics et à condition qu’il y reste des places. C’est sans doute dans ce groupe de population que se trouvent les enfants, heureusement peu nombreux, non scolarisés dans le primaire. La délégation pourrait indiquer pour quelles autres catégories d’enfants le taux de scolarisation laisse à désirer et expliquer pourquoi. Si les obstacles sont d’ordre financier, l’État partie devrait envisager de revoir à la hausse les aides versées aux familles démunies afin de relever les taux de scolarisation dans le primaire et le secondaire.

59.La délégation pourrait en outre apporter un complément d’information sur l’enseignement professionnel, qui apparaît comme le parent pauvre du système éducatif, alors que l’économie du pays a grand besoin de professionnels qualifiés dans les métiers manuels.

60.Les méthodes d’enseignement de l’éducation civique et morale seraient à revoir en Malaisie car cet enseignement ne devrait pas être strict au point de faire peur aux enfants mais, bien au contraire, les faire réfléchir et les responsabiliser. La société malaisienne semble faire preuve d’une grande intransigeance à l’égard du comportement des enfants et il arrive que certains soient qualifiés d’incontrôlables et retirés à leurs parents pour des transgressions mineures, comme un simple chahut dans la rue.

61.Mme LEE s’étonne que le paludisme et la tuberculose demeurent des problèmes en Malaisie, alors que ses indicateurs de santé sont excellents par ailleurs. La Malaisie devrait collecter des données sur les comportements sexuels afin d’être en mesure de mieux cibler les actions de prévention du VIH/sida. La sexualité des adolescents est une réalité, et plus tôt ils apprendront les risques des rapports non protégés, plus ces risques seront maîtrisés; il importe donc de mettre en place des cours d’éducation sexuelle et des centres de conseil où les jeunes puissent aborder des questions liées à la santé génésique, entre autres.

62.Il est important de créer une ligne téléphonique gratuite à l’usage des victimes de violence sexuelle − d’autant plus que les cas de violence sexuelle sont deux fois plus nombreux que les cas de violence autres, ce qui appelle des explications − et d’interdire expressément par une loi la prostitution et l’exploitation sexuelle des enfants.

63.La délégation voudra bien préciser quand sera publié le nouveau code sur les substituts du lait maternel et indiquer par ailleurs à quel point les enfants handicapés ont accès au service d’éducation et de santé et de quel organe relève la protection des handicapés.

64.Un complément d’information sur les réfugiés serait bienvenu. La délégation pourrait en particulier indiquer si les enfants de réfugiés, nombreux en Malaisie, ont un certificat de naissance et ont accès gratuitement à l’éducation, si des mineurs non accompagnés sont présents sur le territoire et s’il arrive que des enfants restent sur le sol malaisien alors que leurs parents en sont expulsés.

65.Le PRÉSIDENT demande si la Malaisie veille à ce que les accords de libre‑échange ne nuisent pas à l’accès de sa population à des médicaments génériques.

66.Mme VUCKOVIC-SAHOVIC engage vivement l’État partie à adhérer aux Conventions de La Haye pertinentes, ainsi qu’à revoir sa législation accordant systématiquement la garde des enfants âgés de moins de 7 ans à la mère en cas de divorce. Elle demande s’il est envisagé de permettre la garde alternée.

67.Elle prend note avec satisfaction des ateliers d’orientation parentale organisés sur décision de justice, mais souligne que pareils ateliers devraient être ouverts à titre préventif à tous les couples qui en ressentent le besoin. Il faudrait savoir si des services de conseil sont accessibles aux familles, sur tout le territoire et dans toutes les langues du pays, combien de familles font appel à ces services et s’ils ont contribué efficacement à faire reculer la violence domestique.

68. La délégation voudra bien indiquer si les programmes visant à renforcer les valeurs familiales tiennent compte des différences culturelles existant entre les différentes communautés dans lesquelles ils sont mis en œuvre.

69.M. FILALI demande comment est déterminé le «délai raisonnable» au terme duquel un mineur en garde à vue doit être présenté au juge, si les tribunaux pour enfants couvrent tout le territoire, si les juges qui y siègent sont des magistrats spécialisés au fait des dispositions de la Convention, si le droit de l’enfant d’être entendu dans les procédures judiciaires est respecté et si des mesures éducatives peuvent être imposées en lieu et place d’un procès pénal.

70.Il aimerait avoir davantage de renseignements sur le fonctionnement des écoles agréées pour la réadaptation des mineurs délinquants et des mineurs incontrôlables et des foyers de probation, ainsi que sur les mauvais traitements dont sont victimes des mineurs lors de leur arrestation ou en détention. De nombreux mineurs étant jugés comme des adultes, il faudrait savoir qui en prend la décision et sur la base de quels critères.

71.Relevant que 62 mineurs ont passé entre trois et six mois en détention provisoire en 2005, il demande si la durée maximale de la détention provisoire est fonction de la gravité de l’infraction et si les personnes acquittées après avoir été placées en détention provisoire sont indemnisées.

72.M. ZERMATTEN aimerait connaître le nombre d’enfants en bas âge en détention avec leur mère et les mesures de protection dont bénéficie ce groupe extrêmement vulnérable.

73.La délégation pourrait par ailleurs indiquer si les adolescents homosexuels font l’objet de mesures ciblées de prévention du VIH/sida, bien que les relations homosexuelles semblent être sujet tabou en Malaisie, et y constituent apparemment une infraction.

74.Mme OUEDRAOGO regrette l’absence de données précises sur la consommation de drogue chez les mineurs. La tendance semble à la hausse, en particulier pour les drogues injectables. Des campagnes de prévention touchant l’ensemble de la population, même les enfants non scolarisés, doivent être mises en place, et des centres de désintoxication et de réinsertion être créés.

75.La Malaisie s’étant engagée à participer au plan d’action de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est contre la criminalité transnationale organisée, il est étonnant qu’elle n’ait pas adopté de lois spécifiques contre l’exploitation sexuelle, le travail forcé et la vente d’enfants, alors que pour ces trois types de trafic la Malaisie est à la fois un pays d’origine et de destination. Les autorités malaisiennes sont donc invitées à tout faire pour sanctionner les trafiquants mais pas les enfants victimes, pour lesquels la mise en détention représente une nouvelle victimisation et qui devraient au contraire bénéficier de soins et de mesures de réinsertion.

76.Le PRÉSIDENT note avec inquiétude que certaines familles qui devraient avoir droit à un permis de séjour provisoire ne s’en voient apparemment pas délivrer et que le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés éprouve des difficultés à accéder aux étrangers placés en centre de rétention. La délégation voudra bien indiquer à ce propos si la Malaisie envisage d’adhérer à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

La séance est levée à 13 heures 5.

-----