Convention relative aux droits de l'enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.594

20 janvier 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt-troisième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 594ème SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,

le jeudi 13 janvier 2000, à 15 heures

Président : Mme OUEDRAOGO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial de la Sierra Leone (suite)

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

GE.00-40301 (F)

La séance est ouverte à 15 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 6 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial de la Sierra Leone (suite) [CRC/C/3/Add.43; CRC/C/Q/SIE/1; réponses écrites du Gouvernement sierra-léonais aux questions posées dans la liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement)]

1.Sur l'invitation de la Présidente, la délégation sierra‑léonaise reprend place à la table du Comité.

2.M. RABAH se dit très préoccupé par la qualité de l'enseignement puisque, selon les informations dont il dispose, 70 % des enseignants ne seraient pas qualifiés, les parents et les élèves ne recevraient aucune aide financière pour les frais de scolarité, et le taux de scolarisation des filles serait extrêmement bas, même dans le primaire; il demande donc ce que le Gouvernement a prévu de faire pour remédier à la situation. Il souhaiterait en outre savoir si des programmes de réadaptation ont été mis en place pour les enfants ayant été impliqués dans les conflits armés; à ce sujet, il aimerait aussi savoir si les phénomènes d'exploitation sexuelle des enfants et de toxicomanie chez les enfants sont imputables à la guerre civile. Enfin, pour quelles raisons l'État partie n'a-t-il pas ratifié les conventions de l'OIT No 138, sur l'âge minimum, et No 182, sur les pires formes de travail des enfants ?

3.Mme MOKHUANE se félicite des efforts méritoires entrepris par le Gouvernement pour régler les problèmes de santé, en particulier du lancement de programmes de vaccination. Beaucoup reste cependant à faire, vu en particulier l'inadéquation de l'équipement sanitaire, la malnutrition chronique - qui nécessiterait la mise en place de programmes d'approvisionnement en denrées alimentaires -, les disparités entre zones urbaines et rurales en matière de santé, le taux élevé de mortalité maternelle, et les problèmes de logement. Elle prend note avec satisfaction de l'existence de programmes de prévention du VIH/sida, mais se demande s'il existe des programmes visant à lutter contre la stigmatisation et la discrimination à l’encontre des sidéens et des séropositifs.

4.Selon des sources extérieures, le principe de l'éducation primaire gratuite et obligatoire ne serait pas respecté dans l'État partie. Par exemple, des enfants ne portant pas l'uniforme scolaire parce que leurs parents n’ont pas les moyens de leur en acheter un, auraient été renvoyés. En outre, seuls les établissements privés seraient dotés d’équipements pour l’accueil d’enfants handicapés. Des sources d’information extérieures paraissent de plus contredire les indications fournies par la délégation selon lesquelles les deux premières années d'enseignement seraient dispensées dans la langue maternelle des enfants. Mme Mokhuane signale enfin à la délégation que le manque de statistiques rend très difficile la tâche du Comité.

5.Mme EL GUINDI demande si des mesures sont prises afin de prévenir certaines pratiques traditionnelles nuisibles à la santé des enfants - en particulier les mutilations génitales féminines - , pour faire baisser le taux de mortalité infantile, actuellement le plus élevé du monde, et pour améliorer les soins de santé primaires.

6.M. KARP demande s'il existe ou s'il est prévu de créer, d'une part, des centres ayant pour fonction de dispenser aux adolescents des conseils relatifs à des problèmes qui leur sont spécifiques, en particulier en matière de contraception, et, d'autre part, des services hospitaliers spécialisés dans le traitement des enfants atteints de problèmes mentaux.

7.Les programmes scolaires font-il une place aux droits de l'enfant et aux valeurs de paix, de droits de l'homme et de dignité de l'homme ?

8.Selon des sources d'information extérieures, les enfants privés de leur liberté seraient incarcérés dans les mêmes locaux que les détenus adultes et Mme Karp aimerait donc savoir s'il existe un mécanisme permettant aux enfants de porter plainte en cas de violation de leur droit à être détenu à l'écart des adultes. Enfin, le personnel pénitentiaire et les policiers reçoivent-ils une formation sur la façon de se comporter avec des enfants, notamment dans des situations délicates telles que les affaires d'abus sexuel ?

9.Mme RILANTONO s'inquiète de lire au paragraphe 50 du rapport initial que l'obligation inscrite dans la Constitution de surveiller et d'éduquer convenablement les enfants est ignorée d'environ 95 % de la population et demande quels efforts ont été faits pour faire connaître cette disposition et modifier la vision traditionnelle de l'enfant dans la société sierra-léonaise.

10.La PRÉSIDENTE s'associe à Mme El Guindi pour condamner les pratiques traditionnelles affectant la santé des enfants et demande si l'État partie participe à l'initiative régionale visant à en finir avec l'excision. Par ailleurs, la médecine et la pharmacopée traditionnelles sont sans doute d'autant plus utilisées dans l'État partie que ce dernier sort d'une longue période de guerre, mais comme leurs effets peuvent être nocifs, notamment en cas de dosage excessif, elle souhaiterait savoir si l'État partie essaye de limiter les risques ? Enfin, a‑t‑il lancé des programmes de promotion de l'allaitement maternel et de la planification familiale ?

11.Elle prend note en s'en félicitant que dans le cadre de son effort de reconstruction l'État partie a mis en route des programmes de prise en charge psychologique des enfants qui ont connu la guerre, tout en constatant qu'il faut également veiller à prendre des mesures pour éviter un cycle de revanche, à former les professionnels travaillant avec les enfants pour les familiariser avec les principes de la Convention, et à faire le nécessaire pour éliminer les mines antipersonnel dispersées sur le territoire.

12.M. BRIMA (Sierra Leone) indique que la pénurie d'enseignants n'est pas attribuable à une insuffisance des moyens de formation. Le pays compte en effet six écoles normales, dont cinq assurent la formation d'enseignants du primaire. La pénurie que font apparaître les statistiques s'explique par l'exode des enseignants durant la guerre, et leur retour est espéré.

13.Mme JUXON-SMITH (Sierra Leone) dit que des programmes de réadaptation des enfants traumatisés par la guerre ont été mis en place avec l'aide de l'UNICEF. Les enfants pris en charge à ce titre sont soumis à un examen destiné à évaluer les séquelles dont ils souffrent et à déterminer dans quel type d'institution il convient éventuellement de les placer. L'objectif final est bien sûr de les réintégrer dans la communauté une fois leurs problèmes psychologiques atténués. Ce processus est long et difficile, les enfants opposant parfois une certaine résistance, mais des succès ont d'ores et déjà été enregistrés.

14.M. BRIMA (Sierra Leone) confirme que la guerre a été un facteur ayant poussé les enfants à se tourner vers les drogues. Avant le conflit, la toxicomanie était peu répandue et très localisée. Une commission interministérielle a récemment été créée pour réfléchir aux moyens de lutter contre ce fléau grandissant. Cette commission est présidée par le Ministre de l'intérieur et les Ministères de la santé et de l'éducation ainsi que différentes ONG y sont représentés. Des mesures ont aussi été prises pour prévenir le problème à la source : le Gouvernement encourage, par le biais de diverses mesures incitatives, les cultivateurs de cannabis à introduire des cultures de remplacement.

15.Mme JUXON-SMITH (Sierra Leone) ajoute que de nombreuses ONG font de la prévention de terrain auprès des enfants, notamment en se rendant dans les écoles pour parler des effets nocifs des drogues. Des actions de contrôle et de répression sont de plus menées par la police.

16.M. BRIMA reconnaît que les statistiques sur le travail des enfants sont alarmantes tout en faisant observer qu'il est difficile d'imposer le respect de la législation sur l'âge minimum dans une économie essentiellement agraire dans laquelle il est de tradition que tous les membres de la famille participent aux travaux des champs.

17.Les autorités s'attachent à rétablir la situation en matière de couverture vaccinale, dont le taux était de 75 % avant la guerre; elles ont ainsi lancé, en décembre 1999, une campagne de vaccination contre la poliomyélite. Trois hôpitaux fonctionnent à Freetown. Des séminaires sur la santé génésique sont organisés à l'intention des sages-femmes et des médecins traditionnels en vue de réduire la mortalité maternelle. Le nombre de personnes infectées par le VIH en Sierra Leone est relativement bas, mais soucieuses d'éviter la propagation de l'épidémie, les autorités ont fait appel aux chefs religieux pour relayer la campagne de sensibilisation dans les différentes régions du pays. Elles s'emploient en outre à lutter contre la pratique de l'excision tout en respectant les coutumes et les traditions de la population.

18.Beaucoup des efforts déployés en faveur des cultivateurs avant la guerre ont été réduits à néant par les rebelles. Les organisations internationales ont grandement participé à la fourniture de denrées alimentaires aux populations rurales et le Gouvernement essaye de développer les capacités d'autosuffisance de ces populations en leur distribuant des semences.

19.La scolarisation des enfants, en particulier de ceux qui ont été déplacés en raison du conflit, pose encore de gros problèmes. Les enseignants ont été encouragés à travailler en équipe, afin de faire cours à la moitié des élèves le matin et à l'autre moitié l'après-midi. En Sierra Leone, la grande majorité des établissements scolaires sont publics. L'enseignement est dispensé en anglais mais des cours sont aussi assurés dans les différentes langues régionales. Il est prévu que chaque école soit dotée d'un conseiller d'éducation et les adolescents ont accès à des services d'orientation appropriés. Par ailleurs, la Commission nationale des droits de l'homme a élaboré un programme d'éducation à la paix, dispensé dans les établissements scolaires, et un manuel d'éducation à la paix a été distribué à grande échelle aux communautés du pays. Enfin, il est prévu d'intégrer les principes de la Convention dans les programmes scolaires.

20.Mme JUXON‑SMITH (Sierra Leone) dit que les délinquants juvéniles sont jugés par des juridictions spéciales et placés dans des établissements pénitentiaires séparés. Les procédures judiciaires appliquées aux mineurs présentent cependant des lacunes. Par exemple, les mineurs ne sont pas toujours jugés aussi rapidement qu'ils devraient l'être et les enfants arrêtés sont parfois maintenus en garde à vue par la police. Le réseau de protection de l'enfance mis en place par des ONG pour veiller à ce qu'aucun enfant ne séjourne dans un commissariat de police a malheureusement été partiellement démantelé suite à la guerre et les efforts se concentrent actuellement dans la région occidentale du pays.

21.M. BRIMA dit que les violences sexuelles au sein de la famille, notamment l'inceste, font l'objet d'une lourde réprobation sociale et ne sont donc pas très répandues. Il est rare que des enfants portent plainte pour avoir subi des violences dans leur foyer.

22.Quelque 95 % de la population ignorent l'existence de la Convention et les activités de diffusion de cet instrument entreprises au début des années 90 ont dû être abandonnées en raison de la guerre; le Gouvernement sierra‑léonais sollicite à cet égard l'aide de la communauté internationale et du Comité en particulier. Cela étant, la législation nationale prévoit des sanctions pour les auteurs de violations des droits de l'enfant.

23.Les autorités s'emploient à limiter le recours à la médecine traditionnelle et veillent à ce que chaque citoyen ait accès à un dispensaire dans un rayon de moins de 10 km de son domicile.

24.Mme JUXON‑SMITH (Sierra Leone) dit que la malnutrition des femmes constitue souvent un obstacle à l'allaitement mais qu'un programme d'encouragement à l'allaitement est en place dans les hôpitaux du pays et que des compléments alimentaires sont distribués aux mères.

25.M. BRIMA (Sierra Leone) dit que le Gouvernement met l'accent sur des programmes de planification familiale visant à inciter la population à avoir moins d'enfants afin que les droits de chaque enfant, notamment à l'éducation, puissent être mieux garantis. Depuis la signature des accords de paix, une vaste campagne de réconciliation nationale a été lancée et des programmes d'éducation à la démocratie et aux droits de l'homme ont été élaborés à l'intention des établissements scolaires. Enfin, les autorités œuvrent au déminage du territoire sur la base d'indications fournies par les rebelles au sujet de l’emplacement des champs de mines antipersonnel.

26.Mme KARP souligne que l'enseignement des droits de l'homme, en particulier des droits de l'enfant, est une tâche complexe qui nécessite la formation d’enseignants, l'élaboration de manuels scolaires n'étant pas suffisante. Elle demande à cet égard si les autorités sierra‑léonaises envisagent d'organiser des séminaires sur la façon d'enseigner les droits de l'enfant. Les salaires des enseignants étant très bas, elle aimerait savoir si des dispositions ont été prises afin d’encourager les enseignants à se rendre dans les régions particulièrement démunies dans le domaine de l'éducation.

27.Au sujet des violences intrafamiliales, elle demande comment est assuré le soutien aux enfants victimes de telles violences et s'il existe des foyers pour femmes battues et une législation sanctionnant la violence conjugale – qui s’accompagne souvent de violences à l'encontre des enfants.

28.Est‑il exact que les délinquants juvéniles ne sont jugés par des tribunaux spéciaux que jusqu'à l'âge de 17 ans, et non pas 18 comme l'exige la Convention ? Est‑il prévu de relever l'âge de la responsabilité pénale, actuellement fixé à 10 ans ?

29.M. DOEK demande si les enfants en attente de jugement bénéficient d'une aide judiciaire et selon quelles modalités. Il aimerait en outre savoir si le comportement des membres des forces de l'ordre à l'égard des enfants de la rue fait l'objet d'un contrôle et si on veille à établir une distinction entre enfants abandonnés et enfants délinquants. Enfin, quel est le sort des orphelins, en particulier ceux qui ne sont pas placés en famille d'accueil ?

30.Mme MOKHUANE demande si des mesures ont été prises pour répondre aux besoins psychosociaux et émotionnels des adolescents, notamment si des services sont prévus dans les écoles. Elle aimerait de plus connaître la situation en matière de suicide.

31.Mme EL GUINDI souligne que le Gouvernement doit prendre les devants pour éliminer des pratiques préjudiciables comme l'excision et faire évoluer les mentalités.

32. M. BRIMA (Sierra Leone) dit que le Gouvernement a besoin d'une aide extérieure pour organiser des activités de formation. Des dispositions sont prises pour sensibiliser et former les enseignants. Les salaires de ces derniers ont été augmentés et des indemnités devraient être à nouveau versées à ceux qui travaillent dans des régions isolées.

33.Au sujet de l'inceste, aux sanctions pénales s'ajoute l'opprobre social. Des activités spéciales de formation vont être organisées, notamment en ce qui concerne l'accueil des enfants victimes d'abus sexuels. Par ailleurs, la violence entre époux, plus précisément à l'égard de la femme, est condamnée et découragée tant par l'État que par la société.

34.Mme JUXON-SMITH (Sierra Leone) précise qu'il est encore rare que les femmes déclarent avoir été victimes de violences. Toutefois, les mentalités commencent à évoluer et des femmes portent plainte, surtout quand des blessures leur ont été infligées. Des efforts de sensibilisation sont entrepris dans ce domaine.

35.La législation relative à la justice pour mineurs est conforme aux dispositions de la Convention. Les enfants de moins de 18 ans sont traduits devant un tribunal pour enfants. Quant à l'âge de la responsabilité pénale, fixé à 10 ans parce qu'on estime que l'enfant est alors en mesure de comprendre la différence entre le mensonge et la vérité, la possibilité de le relever est envisageable.

36.Il existe des orphelinats mais le Gouvernement essaie d'en limiter le nombre, parce qu'il privilégie le placement des enfants en famille. De plus, on s'est aperçu que plusieurs de ces établissements gonflaient le nombre de leurs pensionnaires pour profiter indûment de la distribution de rations alimentaires. Cela étant, il y a peu d'enfants dans les orphelinats et tout est fait pour trouver des familles d'accueil.

37.M. BRIMA (Sierra Leone) indique que les adolescents peuvent bénéficier gratuitement de services médicaux dans les écoles. S'agissant du suicide, le phénomène ne semble pas courant.

38.Le Gouvernement considère que l'excision est une pratique abominable à bien des égards et beaucoup de gens ne recourent plus à cette coutume qui finira par être éradiquée vu le désir de tous de progresser vers un avenir meilleur.

39.Mme JUXON-SMITH (Sierra Leone) confirme que les enfants ont droit à une aide judiciaire. Quand il s'agit de délits mineurs, l'affaire est réglée en famille. Pour les cas plus graves, lorsque l'affaire est renvoyée devant un tribunal, l'enfant est assisté d'un conseil et le Bureau des affaires sociales suit le procès. Quant aux enfants arrêtés dans la rue, on fait la distinction entre ceux qui peuvent réintégrer leur milieu familial et les véritables enfants de la rue.

40.La PRÉSIDENTE demande quelles dispositions ont été prises pour informer l'opinion publique de la venue de la délégation à la session du Comité et si la teneur des débats sera communiquée avant la publication des conclusions finales.

41.Mme KARP pense qu'en matière d'excision la Sierra Leone pourrait s'inspirer de l'exemple du Nigéria, où l'on continue d'organiser des cérémonies traditionnelles sans toutefois pratiquer l'acte d'excision lui-même. Par ailleurs, elle demande à qui les adolescents non scolarisés peuvent s'adresser lorsqu'ils ont besoin de conseils.

42.Mme RILANTONO voudrait savoir où en est la réforme des services de santé et si la campagne de vaccination permettra d'assurer une couverture satisfaisante.

43.La PRÉSIDENTE demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre en faveur des enfants qui ne peuvent être scolarisés, notamment pour éviter qu'ils ne tournent mal par désoeuvrement.

44.Mme HOWARD (Sierra Leone) indique que les ONG ayant participé à l'établissement du rapport ont mené des activités de sensibilisation, notamment dans le cadre d'émissions hebdomadaires à la radio nationale qui malheureusement ne couvre pas tout le territoire du pays. D'autres activités vont être organisées dans les écoles.

45.M. BRIMA (Sierra Leone) indique que, compte tenu des délais, il y a eu très peu de publicité autour de la venue de la délégation et que les contraintes budgétaires ont empêché qu'un nombre plus important de représentants des ministères se déplacent. En tout état de cause, la délégation ne manquera pas de faire connaître les résultats des débats à son retour.

46.Les enfants non scolarisés sont soit occupés à aider leurs parents dans les exploitations agricoles, soit suivent une formation professionnelle. Par ailleurs, la société ne manque pas de modèles auxquels les jeunes peuvent s'identifier, et généralement ils s'adressent à leurs aînés (parents, employeurs) pour demander des conseils.

47.S'agissant de la réforme du secteur de la santé, le pays s'est doté d'une politique intégrée mise en oeuvre dans le cadre d'un programme d'action national bénéficiant du soutien de la Banque mondiale. Les services médicaux ont été entièrement restructurés et des représentants de la Banque mondiale sont venus évaluer les besoins et définir les activités à entreprendre.

48.Un comité composé notamment de parlementaires, d'anciens ministres et de représentants d'organismes internationaux, comme l'UNICEF, a été mis en place pour promouvoir la campagne nationale de vaccination. D'importantes activités de sensibilisation sont organisées, auxquelles participent, dans un esprit de solidarité, le chef de l'État, les ministres et les anciens chefs rebelles.

49.Mme JUXTON-SMITH (Sierra Leone) précise que des programmes destinés aux jeunes non scolarisés sont mis en oeuvre par des ONG et des ministères dans différentes communautés.

50.Mme MOKHUANE voudrait savoir où en est la décentralisation des services.

51.La PRÉSIDENTE demande comment la Convention est perçue, notamment en ce qui concerne la nécessité de faire de l'enfant un sujet de droit, et si les dispositions de la Convention pourront être incorporées aisément dans la législation.

52.M. BRIMA (Sierra Leone) répond que cela ne devrait pas poser de problème car l'expérience récente fait que le pays a besoin d'une telle législation. À cet égard, de nombreux mécanismes de respect des droits de la personne, ne concernant pas uniquement les enfants, ont été mis en place, dont une commission pour la démocratie et les droits de l'homme. De façon générale, la Convention a été bien reçue dans le pays car bon nombre de ses dispositions correspondent au mode de pensée, aux traditions culturelles, à la législation et à la Constitution du pays. Par ailleurs, le Gouvernement s'emploie à revitaliser les administrations locales, car il est conscient de la nécessité de décentraliser les services, que ce soit en matière de santé, d'éducation ou de conseils psychologiques.

La séance est suspendue à 16 h 56; elle est reprise à 17 h 5.

53.M. RABAH encourage le Gouvernement sierra-léonais à oeuvrer à la reconstruction des infrastructures et des institutions, à communiquer avec les enfants et à leur donner confiance dans le système éducatif, à apporter des changements législatifs propres à faire évoluer les mentalités et à instaurer une coordination entre les différents ministères concernés. Le Gouvernement sierra-léonais devrait décentraliser et assurer la prestation de services aux enfants.

54.Il se dit préoccupé par la discrimination à l'égard des femmes et des filles. S'agissant de la justice pour enfants, en cas d'incarcération il importe de séparer les jeunes délinquants des adultes. La Sierra Leone doit rechercher des solutions de remplacement pour leur éviter la prison. Il convient d'offrir aux juges, aux avocats et aux travailleurs sociaux une formation sous forme de réunions ou d'ateliers afin de les informer sur les droits des enfants, ces derniers n'étant en fait que les victimes de la société.

55.M. FULCI constate que la communauté internationale dans son ensemble a une importante obligation envers les enfants de la Sierra Leone. En tant que Président du Conseil économique et social de l'ONU, il a renouvelé la proposition tendant à ce que l'ONU établisse en faveur de la Sierra Leone un programme de redressement du même type que pour Haïti, afin d'assurer dans un souci d'efficacité la coordination des mesures prises par le Gouvernement et différentes organisations.

56.Dès que la paix sera rétablie en Sierra Leone, son Gouvernement devra s'atteler à trois grandes tâches : en premier lieu assurer la réinsertion sociale des enfants enlevés, remédier au problème de perte d'identité familiale et s'occuper des jeunes enfants ayant été amputé d'une main. La communauté internationale soutiendra à l'évidence les efforts dans ce sens. En deuxième lieu, il s'agira, dans le domaine de l'éducation, de répondre aux attentes des enfants, qui demandent dans leur grande majorité à aller à l'école. Enfin, il faudra fournir plus de services de santé de base aux enfants car, avec l'éducation, la santé est un des éléments moteurs de toute politique de développement national.

57.Mme MOKHUANE accueille avec satisfaction les efforts entrepris par le Gouvernement sierra-léonais pour appliquer la Convention malgré des conditions économiques, politiques et sociales particulièrement difficiles. La création du gouvernement d'unité nationale est la bienvenue.

58.Il est essentiel pour la Sierra Leone d'appliquer la Convention et on ne peut que se féliciter de la mise en place d'un certain nombre de projets et de plans d'assistance d'urgence, notamment dans les secteurs de la santé, de l'éducation, de la protection sociale et de la justice pour les mineurs.

59.Cela étant, le Gouvernement sierra-léonais va être confronté à des tâches difficiles dans tous les domaines : la promulgation de lois visant à assurer la reconnaissance des droits de l'enfant ou l'accélération de cette procédure; l'affectation de ressources aux groupes les plus vulnérables de la population (les enfants); la coordination des services; la gestion et la mise en oeuvre de services; l'instauration d'une culture de respect des droits de l'enfant; le renforcement des faibles structures en matière de santé et d'éducation; la mise en conformité de la justice pour les mineurs avec les dispositions pertinentes de la Convention; l'amplification de la participation des enfants; la prise en considération de l'évolution des aptitudes des enfants; la mise en harmonie du système juridique avec la Convention.

60.Mme KARP espère que la paix sera durable et que les institutions et structures nouvelles amenées à être mises en place serviront d'assise à une évolution guidée par les principes de la Convention.

61.Le Gouvernement sierra-léonais devrait faire appel à la communauté internationale en vue d'accroître les capacités du pays en matière de prise en charge psychologique, d'action sociale et d'infrastructures. Une vision à long terme s'impose en ce qui concerne la création, une fois la paix revenue, de services chargés de traiter les enfants atteints de troubles mentaux et psychologiques. Le Gouvernement sierra-léonais devrait, dans l'intervalle, trouver les moyens d'apporter un soutien psychologique aux enfants qui n'appartiennent pas aux groupes prioritaires pris en charge par les ONG.

62.La Sierra Leone devrait également faire appel à l'assistance internationale en matière de formation relative aux droits de l'homme et de l'enfant, et recourir aux différents mécanismes du système des Nations Unies. Il conviendrait d'introduire à l'intention des policiers et autres fonctionnaires chargés de l'application de la loi une formation spéciale concernant le traitement des infractions sexuelles. En outre, la question de la responsabilité pénale des enfants devrait être abordée dans une optique de protection sociale et non de répression.

63.La décentralisation devrait être encouragée car le niveau local est celui qui se prête le mieux à l'action en faveur des droits de l'enfant.

64.Mme RILANTONO se félicite de l'excellente coopération du Gouvernement sierra‑léonais avec les ONG nationales, élément très prometteur pour l'avenir. En effet, il ne faut pas oublier l'aspect humain dans le contexte de la mondialisation actuelle et future.

65.Le Gouvernement sierra-léonais devrait peut-être s'engager plus avant sur la voie de la déréglementation afin de pouvoir se concentrer sur les politiques, la gestion et les directives.

66.Elle recommande la création d'un mécanisme unique chargé de la coordination et de la gestion du développement et de l'application des politiques de l'État dans le domaine des droits de l'enfant. Elle encourage le Gouvernement sierra-léonais à renforcer ses liens avec les différents intervenants concernés, ainsi qu'à définir une stratégie interministérielle pour la protection des enfants.

67.Vu les carences des services de santé, il faudrait s'attacher à remettre en état l'infrastructure de santé nationale et à assurer à tous l'accès à ces services, y compris dans les zones rurales.

68.La PRÉSIDENTE souligne que les membres du Comité sont pleinement conscients des obstacles auxquels la Sierra Leone a dû faire face et ont pu se convaincre de l'engagement du Gouvernement sierra-léonais autant que de sa volonté de reconstruire le pays et de mettre en oeuvre la Convention. Elle note avec satisfaction que dans la délégation sierra-léonaise figure une représentante d'ONG. Eu égard à la situation actuelle en Sierra Leone, le caractère pluridisciplinaire de la Convention en fait un outil susceptible de grandement contribuer au développement et à la reconstruction du pays.

69.Le changement d'attitude intervenu à l'égard des enfants devrait être pris en considération par le Gouvernement sierra-léonais, qui devrait les traiter comme des sujets de droit. Elle lui recommande de poursuivre son action dans le domaine psychosocial, de faire place à la politique de paix et de tolérance dans son programme et de réserver une grande place à la démocratie, au respect des droits de l'homme et aux enfants.

70.Elle invite le Gouvernement sierra-léonais à hâter la ratification de l'amendement à l'article 43 de la Convention approuvé par l'Assemblée générale des Nations Unies.

La séance est levée à 17 h 40.

-----