NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l'enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.617

22 mai 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt-quatrième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 617ème SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mardi 16 mai 2000, à 10 heures

Présidente : Mme OUEDRAOGO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

Rapport initial de l'Iran

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

GE.00-42243 (F)

La séance est ouverte à 10 h 5 .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l'ordre du jour)

Rapport initial de l'Iran [CRC/C/41/Add.5; CRC/C/Q/IRA/1; réponses écrites du Gouvernement iranien aux questions du Comité (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement); réponses écrites aux questions 27 et 28 de la liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement)]

1.Sur l'invitation de la Présidente, M. Khorram,, M. Zangeneh, Mme Choubak,, Mme Mosaffa, M. Cheraghchi, Mme Kouhestani, M. Tabatabaie, M. Amin-Mansour, M. Ghods, Mme Tahiri, M. Roshandel, M. Safahi, M. Mir-Mohammadi et M. Hosseini prennent place à la table du Comité.

2.M. KHORRAM (République islamique d'Iran) dit que plus de la moitié de la population iranienne est âgée de moins de 18 ans et que, de ce fait, une grande partie de l'activité des pouvoirs publics, ainsi que des organismes privés, concerne de près ou de loin les différents aspects de la vie des enfants. L'intérêt supérieur de ces derniers est pris en considération à tous les niveaux de la planification, de l'établissement et de l'exécution du budget et tous les moyens sont mis en œuvre pour promouvoir les droits de l'enfant dans les domaines social, économique, culturel et politique.

3.L'Iran, dont la majeure partie des ressources provient de l'exportation du pétrole, consacre plus de 20 % de son budget aux services nécessaires aux enfants et n'a jamais cherché à diminuer ces dépenses, même lorsque le cours du pétrole a chuté et que le pays s’est trouvé confronté à des difficultés financières.

4.L'article 9 du Code civil iranien stipule qu'en cas d'adhésion à un instrument international, les dispositions de celui-ci l'emportent sur la législation interne. Tel est donc le cas des dispositions de la Convention relatives aux droits de l'enfant, qui sont au demeurant directement invocables devant les tribunaux. Conformément à la Constitution, plusieurs dispositifs nationaux sont chargés du suivi et de l'application intégrale de la Convention. Ce sont notamment la Commission dite "de l'article 90", qui reçoit et examine toutes les plaintes; la Cour suprême, responsable du suivi et de l'application intégrale des lois par les tribunaux de première instance; la Cour de justice administrative, qui examine les plaintes déposées par des particuliers contre des violations du droit par des administrations; l’Inspection nationale, qui surveille l’application de la loi par les administrations.

5.La situation des enfants iraniens s'est grandement améliorée dans de nombreux domaines, dont la santé, l'éducation et le droit, et dans le rapport sur son programme de coopération avec l'Iran, l'UNICEF indique du reste que le pays a atteint presque tous les objectifs fixés pour l'an 2000 lors du Sommet mondial pour les enfants.

6.Grâce aux efforts consentis par tous les services concernés, dont le Ministère de la santé et de l'enseignement médical et l'Organisation du budget et de la planification, des progrès

considérables ont été réalisés dans le domaine de la santé : la couverture vaccinale et le taux de scolarisation dans l'enseignement primaire dépassent ainsi désormais 90 %. Le taux de mortalité infantile est tombé à 26 pour 1000 naissances vivantes, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans à 35 pour 1000 naissances vivantes et le taux de mortalité maternelle à moins de 40 pour 100 000 naissances vivantes. Plus de 85 % des naissances se font avec l’assistance de sages-femmes diplômées et ont lieu dans des établissements de santé. Presque tous les enfants, dans les zones tant rurales qu'urbaines, ont accès aux services de santé et d'éducation. Grâce au respect de valeurs islamiques, la maltraitance et l'exploitation économique et sexuelle des enfants sont très faibles par rapport à ce que l’on observe dans d'autres pays.

7.Pour ce qui est de l'éducation, le taux de scolarisation des filles dans l'enseignement élémentaire est passé de 86,3 % en 1990 à 94,5 % en 1998, soit une augmentation de 8,3 %. Pour les garçons, il est passé de 92,4 % à 96,8 %, soit une augmentation de 4,4 %. En 1999, les femmes représentaient 56 % des étudiants des universités iraniennes Ces chiffres témoignent de la volonté du Gouvernement d'améliorer l'éducation des enfants en général, et des filles en particulier. Pour parvenir à de tels résultats, on a ouvert des classes dans les villages les moins peuplés, recruté en priorité des enseignants locaux, progressivement établi des classes distinctes pour les filles et les garçons, sensibilisé la population à l'importance de l'éducation - par les médias et les responsables religieux - et assuré des repas gratuits dans les écoles des zones reculées et défavorisées.

8.En ce qui concerne la participation des enfants, les élèves de chaque école secondaire des grandes villes élisent un "maire" chargé de les représenter auprès de la direction de leur établissement et de coopérer avec celle-ci dans différents domaines (maintien de la discipline et consultations par exemple). Les jeunes peuvent dès 15 ans devenir membres du Centre national de la jeunesse, qui favorise le dialogue entre adolescents. Une Assemblée consultative des enfants et des jeunes a été instituée, à titre expérimental, au Kurdistan en 1998. Ses membres, élus par les élèves des établissements secondaires, coopèrent avec le Gouverneur, qui est tenu de les recevoir tous les mois pour examiner les principaux problèmes rencontrés par les jeunes. Vu les résultats encourageants, l'expérience devrait être étendue à toutes les provinces du pays.

9.De nombreux organismes nationaux, dont le Ministère de l'orientation islamique, la Commission islamique des droits de l'homme, la Radiotélévision iranienne ainsi que des particuliers ‑ cinéastes, artistes, enseignants - ont grandement contribué aux activités de sensibilisation du public et, ce faisant, à la réalisation des objectifs et droits concernant les enfants.

10.Aucun mécanisme n'est chargé spécifiquement de collecter des données sur les enfants. Les informations pertinentes sont recueillies et analysées par différents ministères (dont ceux de la santé et de la culture), ainsi que par l'Office statistique iranien, le Service d'enregistrement de l'état civil et l'Organisation du budget et de la planification. Le Gouvernement envisage toutefois de créer un dispositif, relevant du Cabinet de la Présidence, qui serait chargé de collecter et d'analyser les données et de planifier et suivre tous les programmes politiques, sociaux, économiques et culturels destinés aux enfants, y compris de suivre l'application de la Convention.

11.Comptant de nombreuses minorités ethniques et religieuses, qui ont toujours vécu en harmonie, l'Iran s'emploie à éliminer toute forme de discrimination. La Constitution reconnaît à tous les Iraniens le droit de jouir de tous les droits fondamentaux sans considération de sexe, de couleur, de religion, de race, d'appartenance ethnique et de langue. Les fidèles des quatre religions reconnues par la Constitution (musulmans, chrétiens, juifs et zoroastriens) élisent leurs représentants au Parlement et les minorités non musulmanes y sont en fait surreprésentées, dans le souci de mieux protéger leurs droits. Ces minorités peuvent éduquer leurs enfants dans leur propre langue et leur propre confession, ou les envoyer dans les écoles ordinaires. Par ailleurs, le Gouvernement iranien a pris de nouvelles mesures pour renforcer les droits fondamentaux de toutes les minorités religieuses, y compris celles qui n'appartiennent pas aux quatre confessions officielles. Le Conseil d'État a approuvé une série de dispositions réglementaires sur les droits des citoyens, qui met en avant le principe de l'égalité de tous les Iraniens, y compris les enfants, devant la législation et dans l'exercice des droits sociaux et politiques.

12.Situé sur l'axe principal de transit des drogues en provenance d'Afghanistan, l'Iran a dépensé sans compter, en termes de ressources humaines et financières, pour entraver l'entrée en contrebande de stupéfiants sur son territoire au cours des vingt dernières années. Il a demandé à maintes reprises la coopération de la communauté internationale, des pays consommateurs en particulier, pour combattre ce phénomène qui pose une grave menace pour sa population, y compris les enfants. Il espère que le Comité s'associera à cette demande restée pour l'instant sans réponse satisfaisante.

13.La PRÉSIDENTE constate que dans l’ensemble le rapport initial suit, quant à la forme, les recommandations formulées par le Comité mais qu’il ne comporte pas de section sur les  mesures générales d'application. Sur le fond, le rapport n'est pas suffisamment critique; entièrement axé sur la législation, il n'indique pas les difficultés rencontrées dans l'application de la Convention même si les informations fournies dans les réponses écrites et la présentation orale du rapport au Comité comblent en partie cette lacune. De plus, l'Iran ne semble pas envisager pour le moment de retirer la réserve générale qu'il a émise en invoquant sa volonté d'appliquer strictement la charia.

14.M. DOEK note avec satisfaction que malgré les difficultés rencontrées, la République islamique d'Iran a accompli des progès non négligeables, tout particulièrement dans les domaines de l'éducation et de la santé, atteignant presque tous les objectifs énoncés dans le Plan d'action adopté au Sommet mondial pour les enfants. En revanche, l’Iran n'envisageant pas de retirer sa réserve concernant l'application de la Convention, la délégation iranienne pourrait-elle donner des informations plus précises sur la signification de cette réserve en donnant des exemples de dispositions ou articles de la Convention qui seraient incompatibles avec les lois islamiques et la législation interne en vigueur ?

15.De plus, il serait bon de savoir dans quelle mesure les enfants peuvent invoquer les lois et la Constitution en cas de violation de leurs droits. Peuvent-ils exercer les recours dont il est question au paragraphe 54 du document de base ? Peuvent-ils de leur propre chef saisir un tribunal ou un autre organe approprié du système judiciaire et disposer d'un avocat ?

16.M. FULCI constate que le rapport traite essentiellement des dispositions législatives sans présenter d’évaluation critique de la situation des enfants dans le pays et sans rendre suffisamment compte de la situation concernant le respect du principe de non-discrimination, les droits civils des enfants, notamment leur liberté d'expression et de religion, et l'administration de la justice.

17.L'enfant semble perçu de manière assez paternaliste dans le rapport alors que pour le Comité l’enfant doit jouer un rôle actif en matière de droits de l'homme. D'un point de vue historique, la loi islamique chiite, que la législation iranienne reprend largement en la codifiant, a eu il y a quelques siècles un caractère très novateur sur le plan de la protection des droits de l'enfant, mais les règles appliquées à cet égard ont peu changé depuis. À ce propos il serait utile de savoir si la République islamique d'Iran envisage de revenir sur sa réserve concernant la Convention de manière à faire prévaloir les règles de droit international qu'elle a acceptées sur les règles de droit interne, si un comité a été établi à cet effet et quelles en ont été les conclusions.

18.Le rapport ne contient pas d'informations sur la coopération internationale pour le développement alors que celle-ci est relativement importante dans le pays. Des renseignements complémentaires sur l'aide internationale et bilatérale accordée à l'Iran et sur la mesure dans laquelle la coopération internationale facilite l'application de la Convention seraient les bienvenus.

19.Mme EL-GUINDI souhaiterait savoir comment sont coordonnées les activités des nombreuses organisations qui traitent des questions touchant les enfants en Iran et comment se déroulent la coopération et la coordination avec les ONG. Des mécanismes ont-ils été établis pour recueillir et analyser les données et les indicateurs concernant les enfants ? Le droit interne et la charia prévoyant l'égalité des droits des garçons et des filles, des mesures ont-elles été prises pour faire face aux traditions et protéger les droits des filles, s'agissant en particulier des mariages précoces, de l'éducation, des soins de santé et des activités de loisir ?

20.M. RABAH dit avoir noté en 1995 que certaines ONG menant en Iran des activités en faveur des enfants y suscitaient certaines réserves et aimerait savoir ce qu'il en est cinq ans plus tard. Y a-t-il eu coordination ou coopération entre ces ONG et les organismes gouvernementaux, en particulier pour établir le rapport ? Le rapport ne fait pas état d'un plan d'action ou d'une stratégie quelconques pour la prochaine décennie, est-il prévu d'agir pour harmoniser le droit interne avec la Convention ?Quelle est la proportion du budget national affectée à l’enfance ? Existe-t-il une législation spécifique concernant la délinquance juvénile ?

21.Mme TIGERSTEDT-TÄHTELÄ estime que les questions touchant l'égalité entre les sexes et les droits de chaque enfant ne sont pas suffisamment traitées dans le rapport et les réponses écrites. L’Iran ne semble pas s’être doté d'un mécanisme unique chargé de veiller au respect des droits des enfants. Existe-t-il une coordination entre les divers organismes chargés de cette question ? La situation financière du pays s'est-elle améliorée depuis la remontée du cours du pétrole ? Quelle est la part du budget national consacrée à la santé, à l'éducation et à la protection sociale ?

22.Mme KARP se dit très préoccupée par la réserve que l'Iran a formulée au sujet de la Convention, en particulier parce qu'elle semble traduire un manque de compréhension de ses effets sur la vie quotidienne des enfants. Comment les enfants acceptent-ils l'idée que leurs droits sont limités par la charia ? A-t-il été envisagé d'établir un comité chargé de déterminer s'il serait possible de suivre l'exemple d'autres pays islamiques quant à une interprétation plus libre de la charia ?

23.Certains textes législatifs auraient été amendés, notamment un article du Code civil en vertu duquel la femme peut maintenant dans certaines circonstances se voir attribuer la garde de ses enfants dans le souci de leur intérêt supérieur; des dispositions ont-elles été prises pour faire connaître ces modifications au public, y compris aux enfants ? Un enseignement relatif à la Convention et aux droits de l'homme en général figure-t-il dans les programmes scolaires ou, dans la négative, est-il envisagé de prendre des mesures dans ce sens ?

24.La Commission islamique des droits de l'homme traite de ces droits en général. Est-il envisagé de lui donner un rôle spécifique concernant les droits des enfants ? La délégation iranienne pourrait-elle par des exemples indiquer comment cette Commission traite les plaintes émanant des enfants ? Pourrait-elle faire office de médiateur pour les enfants et contribuer à l'amélioration globale des politiques et des pratiques les concernant ?

25.Enfin, des mesures sont-elles envisagées pour éliminer la discordance entre l'âge jusqu'auquel les enfants sont tenus d'être scolarisés et l'âge à partir duquel ils sont autorisés à travailler ? Sur les plans de l'âge de la responsabilité pénale et de l'âge du mariage, il y a toujours une discrimination entre les garçons et les filles et elle aimerait savoir quel est le fondement logique de la distinction ainsi établie.

26.Mme MOKHUANE demande quelles ont été les mesures prises pour faire connaître le contenu de la Convention à la société. Quelles sont les vues des enfants au sujet de cet instrument qui traite de leurs droits ? La coordination semble faible dans le contexte de l'application de la Convention et il n'a pas été établi de plan national à cet égard. Y a-t-il eu participation de la société civile, des médias et des enfants dans ce domaine ?

27.Mme RILANTONO se félicite des succès obtenus par l'Iran dans le domaine de la santé, en particulier en matière de vaccination. Les processus engagés ont-ils fait appel à la participation des communautés pour que les progrès réalisés soient durables ? Par ailleurs, la délégation iranienne pourrait-elle donner des précisions sur la façon dont est supervisée l'application des droits de l'enfant ?

28.M. DOEK demande si la Commission islamique des droits de l'homme est habilitée à prendre des décisions ayant force obligatoire, notamment en ce qui concerne l'indemnisation des victimes de violations des droits de l'homme. Certaines informations laissent à penser que les magistrats sont peu sensibles aux opinions des femmes et des fillettes et s'appuient de préférence sur les opinions des hommes. Une stratégie, une politique ou un plan ont-ils été établis pour faire connaître systématiquement aux magistrats la Convention et sa signification ?

29.La PRÉSIDENTE souhaite avoir des précisions sur la formation dispensée aux spécialistes qui ont à traiter des questions relatives aux enfants.

La séance est suspendue à 11 h 20; elle est reprise à 11 h 45.

30.M. KHORRAM (République islamique d'Iran), prenant note de l'évaluation négative que certains donnent des réserves à la Convention formulées par son pays, fait valoir que dans tout pays doté d’une imposante bureaucratie, approuver ou adopter des décisions nécessite du temps. Les autorités iraniennes ont tenu et continuent de tenir des consultations avec diverses organisations gouvernementales et non gouvernementales au sujet de la Convention. Leur position n'est pas figée. Le processus d'examen de la compatibilité de la Convention tant avec le droit interne qu'avec la loi islamique n'a fait apparaître aucune contradiction fondamentale jusqu'à présent et l'Iran fera connaître précisément sa position définitive au terme de ce processus.

31.Mme CHOUBAK (République islamique d’Iran) précise qu'une réunion a été organisée au Bureau du Procureur général en présence de magistrats éminents et de spécialistes du droit pour examiner en détail la Convention et comparer chacun de ses articles aux dispositions du droit interne, notamment du point de vue de la situation des femmes. Ce processus, auquel sont également associés la représentante de l'UNICEF en Iran et des représentants des administrations concernées de près par les enfants, comme la police et les services de réadaptation, suit son cours et devrait déboucher très prochainement sur des résultats concrets. Il apparaît d'ores et déjà que les dispositions de la Convention ne sont nullement incompatibles avec le droit interne.

32.Concernant l'application de l'article du Code civil modifié voilà deux ans, elle rappelle que toute loi, après passage pour examen, approbation ou ratification devant l'Assemblée consultative et le Conseil des gardiens, est publiée au Journal officiel pour l'information de tous. L'article en question est au demeurant très souvent appliqué par les tribunaux.

33.M. ZANGENEH (République islamique d’Iran) dit qu'en vertu de l'article 220 du Code de procédure civile, un enfant ou un adolescent peut être représenté par un avocat devant une juridiction pénale. Si ses parents ne peuvent assurer au mineur les services d'un avocat pour des raisons financières ou autres, un conseil lui est commis d'office. La présence d'un avocat est obligatoire à tous les stades de la procédure. Le Code pénal iranien stipule que les mineurs sont pénalement irresponsables. Les délinquants de moins de 18 ans relèvent d’une juridiction spécialisée, devant laquelle ils sont représentés par leurs parents, un avocat et un travailleur social et qui statue en tenant compte de la santé, de l’état psychologique et de la situation générale de l’intéressé.

34.M. KHORRAM (République islamique d’Iran) indique que la coordination entre les différents organes gouvernementaux chargés de la collecte et du traitement des données est assurée par l'Organisation du budget et de la planification, placée sous l'autorité du Président, mais que chaque organe recueille et analyse individuellement ses propres données qu'il soumet ensuite à cette instance. Le troisième plan quinquennal prévoit la création d'un bureau consacré aux questions relatives à l'enfance, également sous supervision de la Présidence.

35.Son pays est favorable à toute aide bilatérale ou internationale susceptible de l'aider à mieux appliquer la Convention et entretient du reste d'excellentes relations avec l'UNICEF, le PNUD et d'autres organisations. Lors de deux ateliers organisés ces deux dernières années sous les auspices de l'UNICEF, respectivement en Autriche et en Suisse, des magistrats et universitaires iraniens ont pu débattre de questions concernant la Convention et la jeunesse.

36.Tout en ignorant quelles étaient les relations avec certaines ONG en 1995, il souligne que l’Iran compte des ONG très actives et bien organisées s’occupant des femmes et des enfants notamment, qui agissent sans entrave. L'institution nationale très puissante qu'est la Commission des droits de l'homme coopère avec différentes ONG. Il arrive que la Commission et ces organisations critiquent les pouvoirs publics et fassent pression sur eux pour qu'une part plus importante du budget soit consacrée aux enfants.

37.Mme Kouhestani (République islamique d’Iran) indique que près de la moitié du budget de l'État est consacrée aux affaires sociales, à l'éducation et à la santé, autant de domaines concernant directement les enfants.

38.Mme MOSAFFA (République islamique d’Iran) souligne que les ONG, en particulier celles qui s'occupent des enfants, occupent une place toujours plus importante dans la société iranienne. Ces organisations sont systématiquement consultées par les organes d'État. Elles coopèrent avec les ministères concernés et participent à des séminaires sur la planification en donnant des avis scientifiques. Un deuxième cas de figure est celui des organisations constituées par les enfants eux-mêmes, conformément à la Convention qui prévoit qu'ils puissent se réunir et se retrouver. L'Association iranienne pour les Nations Unies organise quant à elle un grand nombre d'activités et participe à la mise en œuvre de plusieurs projets. Un séminaire auquel les enfants seront associés à l'échelle nationale doit bientôt être organisé avec le concours de l'UNICEF.

39.L'Université de Téhéran mène actuellement en coopération avec le PNUD un programme relatif aux droits de l'enfant, au titre duquel il est prévu d'organiser en décembre 2000 des ateliers de sensibilisation des enfants ayant pour objet de traduire les droits de l'enfant dans la réalité en République islamique d’Iran. Un autre projet vise à renforcer la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme, notamment des droits de l'enfant.

40. M. TABATABAIE (République islamique d’Iran), précise que de nombreux groupements d’ONG travaillent en coopération avec l’Organisation de la protection sociale dans des domaines comme l’éducation préscolaire, la prise en charge des enfants handicapés ou la protection des enfants défavorisés. L’Organisation est chargée de répondre aux besoins de ces associations caritatives en définissant des critères, des normes et des outils permettant de réguler leurs activités.

41.L'Organisation de protection sociale a de plus mis à la disposition des enfants victimes d'abus deux permanences téléphoniques d’urgence leur permettant de porter plainte et d’obtenir des services d’appui et elle s’est dotée d’une équipe de spécialistes épaulés de conseillers juridiques offrant des services spécifiques à l'enfant, l’aidant à réintégrer son environnement familial et veillant à ce que les coupables soient poursuivis en justice, des condamnations ayant déjà été prononcées dans ce type d’affaire.

42.M. KHORRAM (République islamique d’Iran) fait valoir au sujet des disparités éventuelles entre garçons et filles, que si elles ont pu exister traditionnellement, notamment dans les campagnes, la société et l’État iraniens s’efforcent de les réduire. Ainsi, l’enseignement primaire et secondaire est obligatoire pour tous les enfants iraniens, garçons et filles. Dans l’enseignement supérieur les filles sont d’ailleurs nettement plus nombreuses que les garçons. D’une manière générale, il n’existe pas entre garçons et filles de disparités majeures qui justifieraient une action particulière des pouvoirs publics.

43. De nombreuses publications sont destinées aux enfants et l’Iran compte de très jeunes artistes ou intellectuels, à l’instar de cette jeune cinéaste de 20 ans dont la deuxième œuvre est en compétition au festival de Cannes pour la distinction récompensant le meilleur film.

44. M. DOEK invite instamment le Gouvernement iranien à reconsidérer l’âge de la maturité dans sa définition de l’enfant, qui est de 14 ans et 7 mois pour les garçons et de 8 ans et 9 mois pour les filles, car la différence constatée entraîne une discrimination à l’égard des filles, en ce qui concerne en particulier la responsabilité pénale et l’âge du mariage.

45.Il souhaiterait avoir des statistiques concernant le nombre d’enfants nés hors mariage ainsi que les mères célibataires. Existe-t-il une procédure de recherche en paternité ? Il se demande en outre ce qu’entend faire l’État partie pour remédier au problème de la discrimination à l’encontre des enfants issus de minorités religieuses non reconnues, comme les Bahaïs, et des enfants de réfugiés non déclarés.

46.Mme KARP demande si les garçons de plus de 14 ans et les filles de plus de 8 ans sont effectivement responsables pénalement et dans l’affirmative s’ils peuvent, comme un adulte, être condamnés à mort. Des enfants de moins de 18 ans ont-ils déjà été condamnés à la peine capitale ? La République islamique d’Iran envisage-t-elle de mettre sa législation en conformité avec les dispositions de la Convention interdisant la peine de mort pour les enfants ?

47.La législation iranienne ne semble prévoir de peine contre l’auteur d’un viol sur mineur que s'il s’agit d’un homme marié et avant d’obtenir un dédommagement du violeur la famille de la victime serait obligée de verser une certaine somme au coupable; elle croit également savoir qu’en cas d’infanticide une mère encourt la peine de mort mais qu’un père n’est passible d’aucune sanction. Elle aimerait savoir si la délégation estime de telles dispositions discriminatoires compatibles avec les obligations incombant à l’État partie en vertu de la Convention en matière de protection du droit de l'enfant à l'intégrité physique.

48.Elle souhaiterait savoir s'il est prévu d'organiser d'autres conférences comme celle qui s'est tenue en 1998 sur le thème de la participation des enfants et si les opinions et idées émises par les enfants qui y étaient présents ont donné lieu à un suivi.

49.Enfin, il convient de reconsidérer les conditions de la garde de l'enfant qui privilégient la responsabilité du père, en tenant compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, notamment en cas de remariage de la mère ou lorsque celle-ci quitte le pays.

50.Mme MOKHUANE demande sur quels critères se fonde la primauté de la responsabilité du père, qui est incompatible avec les dispositions de la Convention. Comment l’intérêt supérieur de l’enfant est-il préservé si le père ayant la garde de l’enfant n’a pas un comportement responsable ? La mère dispose-t-elle de recours devant les tribunaux pour faire reconnaître ses droits ? Il serait utile d’avoir des statistiques concernant le nombre d’enfants dont la garde a été confiée au père.

51.M. RABAH demande comment le Gouvernement iranien envisage de résoudre le problème de la discrimination dont les femmes font l’objet dès leur plus jeune âge.

La séance est levée à 13 heures.

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