Nations Unies

CRC/C/SR.1545

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

21 septembre 2010

Original: français

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-cinquième session

Compte rendu analytique de la 1545 e séance (Chambre B)

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 14 septembre 2010, à 10 heures

Président: M. Zermatten (Vice-Président)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de l’Angola sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de l’Angola sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC/C/AGO/2-4; CRC/C/AGO/Q/2-4; CRC/C/AGO/Q/2-4/Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation angolaise prend place à la table du Comité.

2.M me de Sá Magalhães (Angola) dit que, depuis la fin de la guerre civile, l’Angola a beaucoup progressé dans les domaines du développement social et de l’enfance. Il a adopté un plan stratégique spécifiquement orienté vers la protection de l’enfance, dont la mise en œuvre constitue une priorité absolue du Gouvernement. Le Conseil national des enfants (CNAC), organe de concertation sociale, de suivi et de contrôle des politiques publiques relatives à la promotion et à la défense des droits de l’enfant agit aux niveaux national, provincial et communal. Par la résolution no5/08, en date du 18 janvier 2008, le Gouvernement a pris 11 engagements en faveur de la protection et du développement intégral de l’enfance, mis en œuvre grâce à un plan multisectoriel coordonné, suivi et évalué trimestriellement par le CNAC. Des conseils provinciaux ont été créés pour assurer le suivi direct de toutes les actions planifiées, appuyées par les réseaux de protection de l’enfance.

3.La nouvelle Constitution angolaise, entrée en vigueur en février 2010, offre un cadre juridique innovant et efficace qui garantit le respect de la Convention.

4.Le Gouvernement a adopté, le 14 mai 2007, le décret no31/07 instituant la gratuité de l’enregistrement des naissances et des décès et la gratuité de la carte d’identité pour les enfants jusqu’à l’âge de 11 ans.

5.Le Gouvernement a lancé la Campagne visant à accélérer la réduction de la mortalité maternelle et infantile (CARMMA) et a mis en place la Commission nationale de lutte contre la mortalité maternelle et infantile, qui devraient permettre de réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement. Il s’agit notamment de renforcer le système de santé au niveau municipal, d’étoffer les mesures de protection de la mère et de l’enfant et d’intensifier la mobilisation sociale en faveur de la protection maternelle et infantile ainsi que les actions de formation, de recherche, de suivi et d’évaluation.

6.L’enquête intégrée sur le bien-être de la population (IPEB-2008-2009) a fait apparaître les évolutions suivantes: la proportion de la population vivant sous le seuil de pauvreté est passée de 60 % en 2004 à 38 % en 2008-2009; au cours de la même période, le taux de scolarisation est passé de 58 à 76 % et l’indice de parité dans le primaire s’est amélioré; la mortalité des enfants de moins de 5 ans est passée de 250 pour 1 000 naissances vivantes en 2001 à 195 en 2008-2009. Pendant cette même période, le pourcentage d’enfants en insuffisance pondérale, la mortalité maternelle et le pourcentage de décès dus au paludisme ont également nettement diminué. Le taux de prévalence du VIH/sida se maintient à environ 2,1 %.

7.Enfin, dans le cadre du retour et de la réinstallation des personnes déplacées, des réfugiés et des enfants vulnérables, le Gouvernement a mis en place un programme spécial d’assistance et de réinsertion sociale visant à assurer aux enfants l’accès à l’éducation et aux soins fondamentaux.

8.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Angola) rappelle que la guerre civile qui a sévi en Angola pendant vingt-sept ans et n’a pris fin qu’en 2002 a laissé le pays dans un état désastreux, tant du point de vue des infrastructures qu’en ce qui concerne les valeurs civiques et morales. Il est donc remarquable que l’Angola fasse aujourd’hui partie des pays en développement à revenu intermédiaire et occupe une position forte dans l’économie mondiale grâce à l’exploitation de ses matières premières. Les conséquences de la guerre sont toutefois encore perceptibles et il reste beaucoup à faire en matière de développement et de protection sociale.

9.M. Krappmann se félicite que la nouvelle Constitution et d’autres textes législatifs tiennent compte des droits de l’enfant et salue les mesures prises en faveur des enfants, notamment la création de plusieurs organes et institutions consacrés à la promotion et à la protection des droits de l’enfant.

10.Mentionnant plusieurs plans d’action et stratégies adoptés en faveur de l’enfance, il voudrait savoir comment en est assurée la coordination, en particulier pour ce qui est de leur mise en œuvre aux niveaux provincial et local. Il souhaiterait notamment savoir si le CNAC est doté du mandat, des ressources et du personnel nécessaires pour assurer la coordination des plans et des institutions concernés et si ses activités touchent toutes les régions du pays car, selon certaines informations, beaucoup d’actions en faveur de l’enfance ne concernent que Luanda et sa région.

11.M. Krappmann demande par ailleurs si les activités des réseaux de promotion et de protection de l’enfance sont menées au niveau communautaire, par des professionnels ou par des organisations de la société civile.

12.Certains documents indiquent que, malgré un budget en forte hausse, les dépenses publiques de l’Angola en faveur de l’action sociale, de l’éducation et de la santé sont inférieures à celles d’autres pays d’Afrique subsaharienne dont le PIB par habitant est nettement moindre. Il semblerait que les revenus tirés de l’exploitation des ressources naturelles dont le pays est richement doté ne soient pas utilisés pour améliorer l’espérance de vie, lutter contre la pauvreté, réduire le taux de mortalité infantile et assurer l’accès à l’eau potable. L’Indice de développement humain (IDH) de l’Angola est étonnamment faible. Trop d’argent se volatilise ou n’atteint jamais les caisses de l’État. Le Comité avait déjà soulevé cette question en 2004 lors de l’examen du rapport initial de l’Angola, et la délégation avait donné l’assurance que le Gouvernement s’emploierait à régler ce problème. Or, l’Angola occupe actuellement la cent soixante-deuxième place selon l’Indice de perception de la corruption (IPC). M. Krappmann demande quelles mesures sont prises pour remédier à cette situation.

13.Relevant avec satisfaction que le budget de l’État partie est désormais affiché sur Internet, il dit toutefois avoir cherché en vain les lignes budgétaires consacrées spécifiquement aux enfants. Les commentaires de l’État partie à ce sujet seraient les bienvenus.

14.M. Krappmann demande à la délégation un complément d’information sur l’initiative du Gouvernement, mentionnée dans le rapport de l’État partie, consistant à créer un fonds unique réunissant divers fonds publics et privés en vue d’appuyer les programmes en faveur de la protection et du développement des enfants. Il souligne que l’État partie ne doit pas se soustraire à la responsabilité qui lui incombe au premier chef d’assurer la protection de l’enfance. Il voudrait aussi savoir si le droit de l’enfant d’être entendu dans les procédures administratives et judiciaires le concernant est respecté dans la pratique. Les enfants ne semblent pas être associés à l’élaboration et à la mise en œuvre des plans et stratégies qui leur sont consacrés. Qui plus est, un parlement d’enfants a été dissout; les besoins des enfants n’ont pas été pris en considération quand leurs familles ont été réinstallées de force; la police brutalise les adolescents lorsque ceux-ci ont un comportement inapproprié et la violence et l’exploitation sont omniprésentes. Le Comité aimerait entendre les commentaires de la délégation sur ces questions.

15.M. Filali demande si l’État partie envisage de ratifier la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et le Protocole facultatif s’y rapportant, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, qui ont un lien direct avec la Convention relative aux droits de l’enfant.

16.Il voudrait savoir si, à la suite de l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution, la Commission de révision législative a commencé ses travaux et, dans l’affirmative, si elle a établi des rapports faisant état de l’avancée des travaux et si elle a fait l’inventaire des lacunes en matière de droits de l’enfant et des efforts à faire pour mettre la législation nationale en conformité avec la Convention. Il demande par ailleurs si les dispositions de la Convention priment le droit interne, si les juges peuvent les appliquer directement, s’ils reçoivent une formation sur les droits de l’enfant, s’il existe des cours de recyclage pour ceux d’entre eux qui auraient reçu une telle formation dans le passé et si les juges des mineurs reçoivent un salaire supérieur à celui des autres juges, ce qui constituerait une incitation à se spécialiser dans ce domaine.

17.M. Filali souhaiterait aussi savoir si le mandat du «Provedor de Justiça» est conforme aux Principes de Paris, si cette instance peut être saisie par les enfants et si elle peut s’autosaisir de questions concernant l’enfance, notamment en cas de violation de la Convention et d’autres instruments internationaux visant à protéger les enfants, et si cette institution n’est présente qu’à Luanda ou a des représentations dans les provinces.

18.Enfin, notant que les châtiments corporels sont largement utilisés dans l’État partie et relevant que la nouvelle Constitution prend en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, M. Filali demande quelles mesures ont été prises par l’État partie depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution pour protéger les enfants contre de telles pratiques.

19.M. Koompraphant demande quel cadre juridique est prévu pour la protection des enfants en situation de risque, quelles mesures peuvent être appliquées lorsqu’un enfant se trouve dans une telle situation et si un plan d’action national a été adopté en vue de mettre fin à la violence contre les enfants.

20.M me Maurás Pérez prend note avec intérêt des résultats de l’enquête intégrée sur le bien-être de la population et demande s’il est prévu de renforcer la capacité statistique au niveau central mais aussi au niveau des provinces.

21.Elle relève que des progrès significatifs ont été faits concernant l’élargissement de l’enseignement primaire à tous les enfants mais que des différences criantes persistent pour ce qui est de l’accès à l’enseignement secondaire. Notant que l’enquête montre que la mortalité des enfants de moins de 5 ans reste très élevée et que le nombre d’enfants enregistrés à la naissance est insuffisant, elle demande quelles sont les mesures envisagées pour remédier à ces problèmes.

22.Concernant le suivi indépendant de l’application de la Convention, l’Angola dispose d’un mécanisme appelé «Provedor de Justiça» qui ressemble à un médiateur sans en avoir toutes les caractéristiques et dont le fonctionnement n’est pas tout à fait conforme aux Principes de Paris. Mme Maurás Pérez aimerait savoir ce que compte faire le Gouvernement pour y remédier et mettre en place, au sein de cette entité, un médiateur des droits de l’enfant.

23.Elle aimerait aussi savoir comment le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, mentionné à l’article 80 de la Constitution, est appliqué dans la pratique. Enfin, elle s’interroge sur la responsabilité sociale et environnementale de l’industrie extractive, dont les activités ont un effet sur l’environnement et, partant, sur les conditions de vie des enfants et la réalisation de leurs droits. Selon les chiffres de l’augmentation du revenu national entre 2002 et 2009, l’Angola a énormément bénéficié de la hausse des cours du pétrole, de l’amélioration de sa capacité productive et de son intégration dans le commerce mondial. Il serait donc intéressant de savoir s’il existe un cadre réglementant les activités de l’industrie pétrolière ou des projets visant à ce qu’elle ait des retombées positives pour les enfants.

24.M. Pollar aimerait connaître la suite donnée par le Gouvernement à la Déclaration et au Programme d’action de Durban. Concernant les châtiments corporels, il voudrait savoir ce qu’il en est de la mise en œuvre des conclusions de l’étude du Secrétaire général de l’ONU sur la violence à l’encontre des enfants.

25.M me Herczog s’interroge sur les raisons pour lesquelles seuls 32 % des enfants de 1 an sont enregistrés et l’enregistrement des naissances n’est gratuit que jusqu’à l’âge de 5 ans. Elle relève à cet égard que le certificat de naissance est un document utile dès la naissance, et demande si les professionnels de santé aident les mères à faire enregistrer leur bébé. Un autre problème est celui des enfants réfugiés nés hors du territoire angolais ou rapatriés de camps de réfugiés situés à l’étranger, des enfants étrangers et apatrides, qui ne peuvent pas se prévaloir de la gratuité des services. Enfin, Mme Herzog s’interroge sur les moyens mis en place pour aider les enfants de plus de 5 ans qui n’ont toujours pas de certificat de naissance, étant donné que ce document est nécessaire pour s’inscrire à l’école. Elle demande si ces enfants ont alors droit à la gratuité de l’enseignement et des services de santé.

26.M me Varmah, évoquant l’étude de l’Institut national de l’enfance (INAC) sur les conséquences des accusations de sorcellerie portées contre des enfants, qui montre que de telles pratiques existent dans toutes les provinces, demande quelles mesures ont été prises pour détecter de tels cas et si ces enfants sont pris en charge par une institution ou par l’État, s’ils reçoivent une aide psychologique et s’ils ont accès au système éducatif.

27.Le Président relève que, d’après le rapport de l’État partie, toute personne jusqu’à 18 ans est considérée comme un enfant, mais que la Constitution dispose que la majorité peut être atteinte avant. Il demande des précisions à ce sujet, ainsi que sur l’âge du mariage et l’âge de la majorité pénale.

28.Le rapport contient peu d’informations sur les libertés civiles et fait une confusion entre la liberté d’expression, consacrée à l’article 13 de la Convention, et le droit de l’enfant d’être entendu, consacré à l’article 12. En outre, le rapport fait état de l’existence de mouvements scouts et d’autres associations de jeunes mais n’indique pas si les enfants peuvent s’associer librement. De même, concernant l’article 16 et le respect de la vie privée, il évoque surtout le droit au secret de la correspondance alors que l’article 16 se préoccupe notamment de l’image de l’enfant et de son anonymat, notamment s’il est victime d’une infraction ou témoin dans une procédure. La liberté d’information recouvre bien la liberté d’être informé mais aussi la protection contre des informations potentiellement préjudiciables: or, il est impossible de voir quelles mesures l’État angolais a mises en place pour protéger les enfants contre les risques que présentent les nouvelles technologies, par exemple.

29.En matière de formation et de diffusion de la Convention, le rapport décrit la multiplicité des supports et des moyens de diffusion utilisés mais le problème est celui du grand nombre de langues qui cohabitent sur le territoire angolais. Si les observations finales du Comité de 2004 ont bien été diffusées, il serait utile de savoir dans quelle mesure il en a été de même du rapport à l’examen.

30.Selon certaines informations, le mode d’accréditation des ONG n’est pas clair et certaines n’ont pas toute latitude d’agir. La délégation pourrait apporter des précisions à ce sujet.

31.Enfin, en ce qui concerne le droit à la vie, à la survie et au développement, la délégation est invitée à indiquer si l’avortement est autorisé en cas de viol ou de problèmes médicaux graves.

La séance est suspendue à 11 h 15; elle est reprise à 11 h 35.

32.M me Afonso Gourgel (Angola) rappelle que le CNAC a été créé en 2007 par le décret no 20 du Conseil des ministres pour donner suite à une recommandation faite à l’État angolais par le Comité en 2004. Son président est nommé par le chef du Gouvernement; son vice-président est élu par l’Assemblée des conseillers. Y siègent les représentants de 16 ministères et secrétariats d’État, de l’Institut national de l’enfance (INAC), et de la société civile. Les représentants des organes de la société civile sont nommés par une assemblée sur laquelle le Gouvernement n’a aucun pouvoir de nomination et à laquelle un représentant du Ministère de la justice participe à titre d’observateur des élections. Le Conseil a un mandat de deux ans; la présidence est exercée par roulement et chaque président peut voir son mandat renouvelé deux fois si le Président de la République le juge bon. Des sessions plénières et ordinaires ont lieu chaque trimestre. Au secrétariat exécutif s’ajoutent quatre commissions spécialisées permanentes. La première commission est chargée des politiques de l’enfant de 0 à 5 ans et de la réalisation de 4 engagements sur les 11 qu’a pris le Gouvernement angolais pour assurer la mise en œuvre des droits de l’enfant, à savoir les engagements portant sur l’espérance de vie, sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle, sur l’enregistrement des naissances et sur l’extension de l’éducation préscolaire. La deuxième commission est chargée du respect des engagements concernant les enfants de 6 à 18 ans, qui portent sur l’enseignement primaire et la formation professionnelle et sur la justice pour mineurs. La troisième commission est chargée des engagements relatifs à la prévention et à la réduction de l’impact du VIH/sida sur les enfants et les familles vulnérables, à la prévention et à la réduction de la violence à l’encontre des enfants et au développement des compétences familiales. Enfin, la quatrième commission est chargée des engagements portant sur l’enfant et les médias, la culture et le sport et sur la part du budget consacré à l’enfance et au maintien des acquis.

33.L’action de coordination du Conseil est assurée par le biais des activités menées à bien par chacune de ces commissions en fonction des orientations fixées au niveau local. Toutes les provinces sont déjà dotées de conseils provinciaux des enfants et la majorité ont déjà des conseils municipaux des enfants. En juin 2009, le quatrième Forum national sur l’enfance avait pour devise «Angola: Onze engagements en faveur de l’enfant. Penser national, agir local», slogan qui visait à promouvoir la mise en œuvre des engagements aux niveaux provincial, municipal et local car c’est au niveau des municipalités que l’on peut évaluer le degré de mise en œuvre de chacun de ces engagements.

34.Le Président demande si le CNAC dispose de ressources suffisantes, comment il répartit son budget entre les antennes provinciales et municipales, et s’il travaille efficacement.

35.M me Afonso Gourgel (Angola) précise que le plan national multisectoriel établi par le CNAC permet de mettre en évidence les actions qu’il faut mener à bien pour réaliser chacun des 11 engagements. Pour chaque engagement, on définit les objectifs, les mécanismes de contrôle, les activités principales, le budget ainsi que les agents d’exécution aux niveaux national, provincial et municipal.

36.Des crédits sont alloués aux ministères et aux gouvernements des provinces qui, dans leur budget, doivent préciser les mesures qu’ils comptent prendre pour réaliser chacun des engagements ainsi que les ressources nécessaires.

37.Le pays a engagé depuis deux ans un processus de décentralisation, et la planification des budgets et des plans de travail se fait déjà aux niveaux des provinces et des municipalités.

38.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Angola) souhaiterait savoir si les enfants ont la possibilité de faire entendre leur voix dans cette structure, aux niveaux national, provincial et municipal.

39.M me Afonso Gourgel (Angola) répond que les enfants participent activement aux séances plénières du Conseil national et des conseils provinciaux. Ils expriment également leur opinion dans les associations de jeunes et d’étudiants, et lors des forums nationaux organisés tous les deux ans.

40.M me da Cruz (Angola) indique que tous les Angolais, indépendamment de leur origine, de leur race et de leur condition sociale, peuvent saisir le «Provedor de Justiça», qui est chargé de défendre les droits, les libertés et les garanties des citoyens. Le «Provedor de Justiça», indépendant et inamovible, est élu par l’Assemblée nationale pour un mandat de quatre ans, renouvelable une fois. Il dispose d’un budget annuel autonome établi conformément à la loi et ses antennes locales lui permettent de répondre aux différents problèmes qui se posent à travers le pays.

41.M. Filali demande si la loi de finances comporte un chapitre consacré au «Provedor de Justiça» et soulignant son indépendance et si cette institution collabore avec les organisations de la société civile et les enfants. Enfin, il souhaite connaître ses activités sur le terrain.

42.M me Maurás Pérez souhaiterait savoir si cette institution dispose de personnel formé spécifiquement aux droits de l’enfant, qui pourrait traiter les plaintes déposées par des mineurs ou en leur nom. Elle demande s’il existe des antennes autonomes dans toutes les provinces et, le cas échéant, si ces antennes comptent un département chargé de promouvoir les droits de l’enfant.

43.M me da Cruz (Angola) répond que le «Provedor de Justiça» dispose de personnel spécialisé dans les droits de l’enfant et qu’il y a des services locaux dans les cinq provinces du pays. Même si son budget doit être approuvé par l’Assemblée nationale, il le gère de manière autonome.

44.L’Angola a participé aux Conférences de Durban et a adopté un plan d’action qu’il met actuellement en œuvre. L’article 12 de la Constitution dispose que l’Angola respecte les principes de la Charte de l’Organisation de l’Unité africaine, et l’article 13 énonce que les normes de droit international sont intégrées à la législation nationale. Les instruments internationaux ratifiés par l’État entrent en vigueur après publication au Journal officiel et sont directement applicables.

45.M. Koompraphant voudrait connaître la suite donnée par l’Institut national de l’enfance aux signalements de cas présumés de maltraitance.

46.M me Mixinge (Angola) explique que, dans de tels cas, l’Institut prévient la police, se met en contact avec la famille, et veille à ce que l’enfant bénéficie de soins de santé et d’un soutien psychosocial. S’il y a lieu, il est pris en charge dans un centre d’accueil. Si l’agresseur est mineur, il est déféré devant le tribunal pour enfants.

47.Le Président demande si l’avortement est autorisé en cas de malformation grave du fœtus ou si la grossesse est la conséquence d’un viol.

48.M me da Cruz (Angola) répond que l’avortement est autorisé lorsque la grossesse présente un danger pour la mère ou résulte d’un inceste ou du viol d’un enfant.

49.Le Président voudrait savoir si l’Angola envisage de ratifier d’autres instruments internationaux étroitement liés à la Convention.

50.M me de Sá Magalhães (Angola) indique que tous les instruments internationaux qui n’ont pas encore été ratifiés sont en cours d’examen en vue de leur ratification, mais que ce processus prend du temps et que la situation dans le pays reste encore difficile, la paix ayant été rétablie il y a huit ans seulement.

51.M me da Cruz (Angola) précise que la majorité est fixée à 18 ans dans la Constitution, mais que des mineurs peuvent souhaiter se marier avant, avec l’autorisation de leurs parents, par exemple en cas de grossesse. Dans ce cas, ils deviennent automatiquement majeurs. L’âge minimum pour le mariage est établi à 16 ans pour les garçons et à 15 ans pour les filles.

52.M. Filali s’étonne que la grossesse puisse être invoquée pour justifier un mariage précoce et dit craindre que l’auteur d’un crime de viol sur mineure ne puisse échapper à des poursuites pénales en épousant sa victime.

53.M me da Cruz (Angola) indique qu’il n’y a pas de mariage suite à un viol, lequel est bien considéré comme un crime. Les mariages contractés du fait d’une grossesse sont plutôt une question de dignité pour les familles.

54.Le Président souhaiterait un éclaircissement au sujet de l’âge de la responsabilité pénale.

55.M me da Cruz (Angola) explique que les enfants de moins de 14 ans ne sont pas passibles de sanctions pénales et que l’âge de la majorité pénale est fixé à 18 ans. Entre 14 et 18 ans, les jeunes délinquants font l’objet de mesures sociales qui visent aussi leur famille.

56.M me Maurás Pérez invite la délégation à préciser les mesures prises à l’intention des délinquants mineurs.

57.M me da Cruz (Angola) indique que les mineurs de moins de 14 ans font l’objet de mesures de protection sociale et les mineurs de 14 à 18 ans font l’objet de mesures de prévention de la criminalité. Il s’agit dans les deux cas de mesures d’accompagnement social et psychologique visant à redonner des valeurs aux jeunes et ainsi à prévenir la récidive qui peuvent, lorsque les faits sont graves, s’accompagner de travaux d’intérêt général.

58.M. Krappmann (Rapporteur pour l’Angola) constate que, si la Constitution prévoit la protection de la famille et des droits de l’enfant par l’État, dans les faits de nombreuses familles sont en triste état. Le rapport évoque la désintégration sociale, une perte des valeurs, des violences, des grossesses précoces, ou encore des dénis de paternité. Visiblement, seul un petit nombre de familles est couvert par les programmes de soutien à la parentalité et d’appui financier, qui n’existent pratiquement que dans la capitale.

59.La pauvreté rampante, le chômage et le sous-emploi sont autant de facteurs qui pèsent sur l’état sociopsychologique des familles. Les efforts de lutte contre la pauvreté s’accentuent mais les progrès en la matière sont encore lents, alors même que le pays regorge de ressources et que son PIB croît de 10 % par an.

60.Au-delà d’un niveau de vie suffisant, le bon développement des enfants suppose aussi de bonnes conditions de vie au sens large, et lorsque celles-ci ne sont pas assurées par la famille, l’État doit y pourvoir. Or, les structures manquent pour des millions d’enfants défavorisés d’âge scolaire et préscolaire, et lorsqu’elles existent leur qualité laisse à désirer. L’Angola alloue moins de crédits budgétaires à l’éducation que ses voisins; il manque plus de 50 000 salles de classe, les enseignants sont majoritairement mal formés, les taux de redoublement et d’abandon scolaire sont préoccupants.

61.Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels fait obligation aux États parties, donc à l’Angola, d’arrêter un plan détaillé des mesures nécessaires pour réaliser progressivement la pleine application du principe de l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous. La délégation est invitée à préciser si un tel plan existe et, dans l’affirmative, s’il est assorti d’un calendrier et de lignes de crédits. Elle pourrait aussi apporter un complément d’informations sur l’enseignement technique et professionnel ainsi que sur l’éducation aux droits de l’homme.

62.M me El-Ashmawy souhaite connaître la politique de l’État partie en matière de santé des adolescents. Elle demande si des campagnes d’information ont été lancées, si des données statistiques sont collectées dans ce domaine, quel rôle joue la société civile à cet égard, si l’éducation sexuelle est inscrite dans les programmes scolaires, s’il existe des lignes téléphoniques de soutien et des unités spécialisées dans lesquelles les adolescents peuvent recevoir des soins et des conseils sans autorisation parentale et, dans l’affirmative, dans quelle mesure ces services sont accessibles à tous.

63.Mme El-Ashmawy se félicite de la mise en place du réseau de protection des droits de l’enfant. Elle aimerait que la délégation en précise le mandat et explique comment les travaux de ce réseau sont coordonnés avec ceux de la Cellule contre la violence dirigée contre les femmes et les enfants, rattachée à la Direction nationale des enquêtes pénales. Elle salue aussi l’adoption d’un code de déontologie contre le tourisme sexuel, mais fait observer que l’action de la société civile dans la lutte contre la traite des enfants et la mesure dans laquelle la traite d’enfants est expressément définie dans la législation interne restent encore à préciser.

64.M. Filali souligne que, parmi les nombreux étrangers reconduits à la frontière, on recense des enfants dont certains n’ont même pas 5 ans. La question se pose de savoir si l’État partie a enquêté pour déterminer les types de violation dont ces enfants pourraient être victimes et s’il a conclu des accords avec les États dont sont ressortissants les enfants raccompagnés à la frontière.

65.Le pays ne compte pour l’heure qu’un tribunal pour mineurs, dans la capitale, ce qui donne à penser que les enfants du reste du pays ne bénéficient pas de la protection à laquelle ils ont droit en vertu de la Convention. M. Filali demande si cela s’explique par le manque de crédits budgétaires ou par le manque de magistrats dûment formés et rappelle qu’en tout état de cause faire comparaître les mineurs devant un tribunal pour adultes et les placer dans des établissements de détention avec des adultes est contraire à la Convention. Il incite l’État partie à développer des peines de substitution à la liberté. Enfin, il fait observer que l’Inspection du travail n’a pas les moyens de sa mission.

66.M. Koompraphant souligne que le problème de la maltraitance et du délaissement ne peut être résolu par le seul Code pénal et appelle des mesures d’ordre social. Il demande à la délégation d’indiquer les actions entreprises à l’égard des parents violents ou négligents et les mesures prises pour garantir le recouvrement de la pension alimentaire. Il aimerait aussi savoir comment l’État partie s’assure que les enfants sont bien scolarisés jusqu’à 12 ans au moins, quels mécanismes d’inspection du travail sont en place pour contrôler le secteur informel et quels services éducatifs et mesures de protection au sens large sont accessibles aux familles en détresse.

67.M me Varmah dit que, malgré la gratuité des soins de santé instaurée pour tous les enfants de moins de 5 ans et l’adoption d’un plan stratégique pour 2005-2009, le taux de mortalité infantile reste l’un des pires au monde, ce qui appelle des commentaires. Elle aimerait en savoir plus sur le système de vaccination ainsi que sur les moyens déployés pour garantir à tous l’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Elle jugerait également utile que la délégation en dise plus sur les programmes en faveur des groupes les plus vulnérables mentionnés aux paragraphes 255 et suivants du rapport et précise dans quelle mesure les enfants handicapés ont accès aux services d’éducation, de santé et d’insertion, si le pays dispose d’établissements scolaires spécialisés, avec des enseignants formés au travail avec des enfants handicapés, et si des campagnes de sensibilisation ont été lancées pour lutter contre la stigmatisation des handicapés dans la société.

68.M. Pollar demande si un âge minimum a été défini pour le consentement aux relations sexuelles ainsi que pour les mariages contractés avant l’âge légal du mariage sur autorisation spéciale. La question se pose du reste de savoir qui délivre ce type d’autorisation.

69.Il relève lui aussi que des sources d’information font état de mineurs non accompagnés de moins de 5 ans parmi les demandeurs d’asile et les personnes déplacées et demande comment l’État partie fait face à cette situation. Des compléments d’information s’imposent en outre en ce qui concerne les programmes d’aide au retour volontaire et les enfants apatrides.

La séance est levée à 13 heures.