Nations Unies

CRC/C/SR.1829

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

27 septembre 2013

Original: français

Comité des droits de l ’ enfant

Soixante- quatr ième session

Compte rendu analytique de la première partie (publique )*de la 1829 e séance**

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 24 septembre 2013, à 15 heures

Président (e): Mme Sandberg

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/PRY/1, CRC/C/OPAC/PRY/Q/1, CRC/C/OPAC/PRY/Q/1/Add.1)

Rapport initial du Paraguay sur la mise en œuvre duProtocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfantset la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/PRY/1, CRC/C/OPSC/PRY/Q/1, CRC/C/OPSC/PRY/Q/1/Add.1)

Sur l ’ invitation de la P résidente, la délégation paraguayenne prend place à la table du Comité.

M. Zarate  Fleitas (Paraguay) souligne, s’agissant du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, que le Paraguay a ratifié le statut de Rome de la Cour pénale internationale et examine actuellement un projet de loi relatif à sa mise en œuvre. La loi relative au service militaire obligatoire interdit l’enrôlement des mineurs dans les forces armées. Tous les établissements de formation militaire dispensent des cours sur le droit international humanitaire et les droits de l’homme, dans le cadre desquels le Protocole facultatif est étudié. L’État paraguayen a conclu quatre accords de règlement à l’amiable dans des affaires d’enfants soldats portées devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme. En cela, il a été cité en exemple au niveau régional.

En ce qui concerne le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, l’action de l’État est coordonnée par le Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence, en collaboration avec la société civile. Le Président de la République a signé avec la coalition d’ONG «Frente por la niñez» et avec l’UNICEF 20 engagements visant à accroître les investissements en faveur de l’enfance et de l’adolescence, en particulier dans les domaines de l’adoption, de la protection de remplacement et de la lutte contre la maltraitance et la traite.

La politique nationale de protection spéciale des enfants et des adolescents a été adoptée en 2012 en vue d’apporter une aide globale aux enfants séparés de leur famille. Parallèlement, un plan de désinstitutionalisation a été mis en place. Une loi contre la traite des personnes, qui vise à prévenir et réprimer toutes les formes de traite, qu’elles soient commises sur le territoire ou à l’étranger, ainsi qu’à protéger et aider les victimes, et qui porte création d’une commission interinstitutionnelle sur le sujet, a également été adoptée en 2012. Le ministère public lutte activement contre la traite par l’intermédiaire de son unité spécialisée contre la traite des personnes et l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents. En outre, en juillet 2012, il a mis en place la Direction du programme d’accompagnement et de protection des victimes et des témoins dans les procédures pénales, qui prête une attention particulière aux enfants victimes de violence sexuelle ou intrafamiliale.

Le Paraguay s’emploie également à prévenir et à éradiquer les pires formes de travail des enfants, comme en témoignent les actions entreprises dans le cadre de la Stratégie nationale et de la Commission nationale pour la prévention et l’élimination du travail des enfants et la protection du travail des adolescents.

Les autorités ont élaboré des indicateurs des droits de l’homme dans les domaines de l’éducation et de la santé. Elles ont également mis en place un projet de suivi des recommandations des organes conventionnels, qui a été élaboré avec l’appui technique du Conseiller aux droits de l’homme du HCDH et a vocation à garantir une plus grande transparence de l’action du Gouvernement et une meilleure diffusion des travaux des organes conventionnels auprès de la population.

Il reste cependant encore beaucoup à faire, notamment sur le plan législatif, et les commentaires et recommandations du Comité seront pour le Gouvernement paraguayen d’une aide précieuse.

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant,concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

M. Nogueira Neto (Rapporteur pour le Paraguay) demande quelles organisations gouvernementales et non gouvernementales sont chargées de l’application du Protocole et sont habilitées à recevoir des plaintes. Il aimerait savoir si la population a connaissance de l’existence de ces organisations et de leurs compétences. Enfin, il demande si une coopération internationale a été reçue ou demandée dans les domaines visés par le Protocole.

M. Cardona  Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) demande combien de lycées sont rattachés au Ministère de la défense nationale et en quoi ils diffèrent des lycées qui dépendent du Ministère de l’éducation. Il demande si l’État partie peut exercer sa compétence extraterritoriale pour les infractions visées par le Protocole et si l’enrôlement de mineurs constitue une infraction pénale. Enfin, il aimerait connaître les mesures de réhabilitation et de réinsertion dont bénéficient les victimes.

M me  Oviedo Fierro demande si les lycées militaires proposent des activités extrascolaires. Elle souhaiterait connaître le sentiment de la délégation quant à la tradition bien ancrée dans la région des fanfares militaires («bandas de guerra»). Le fait de faire défiler des mineurs dans le cadre de marches militaires pourrait-il être remis en question?

M me  Aidoo demande quelles mesures ont été prises pour prévenir et repérer les falsifications d’actes de naissance.

La séance est suspendue à 15 h 40; elle est reprise à 16 h 5.

M. Zarate  Fleitas (Paraguay) déclare que toutes les communes comptent des services pouvant recevoir les plaintes des habitants. Chaque institution publique dispose en outre de son propre bureau des droits de l’homme, qui est habilité à recevoir des plaintes.

Le Mécanisme national de la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé en 2011, est un organe indépendant chargé de contrôler l’action de l’État.

L’enrôlement de mineurs est interdit mais ne constitue pas encore une infraction pénale. C’est cependant une possibilité qui est actuellement à l’étude. Le Paraguay n’a ni reçu ni demandé de coopération internationale sur les questions visées par le Protocole mais serait ouvert à des propositions dans ce sens.

M me  Penã (Paraguay) ajoute que le pays compte 11 établissements de formation militaire, tous publics, dont un seul admet des mineurs, à partir de 15 ans. Conformément à une directive du Ministère de l’éducation, les mineurs ne reçoivent qu’une formation militaire théorique, en plus de l’enseignement général qui suit les programmes habituels de l’éducation nationale. Tout maniement des armes est interdit aux mineurs.

M. Cardona  Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) demande si les droits de l’homme et la culture de la paix figurent parmi les matières enseignées au lycée militaire et si les méthodes disciplinaires utilisées dans cet établissement sont de nature militaire.

M me  Peña (Paraguay) dit que, lorsqu’ils achèvent leurs études, les élèves du lycée militaire sont réputés avoir fait leur service militaire. Cela dit, il faut avoir 18 ans révolus pour entrer dans l’armée. Les droits de l’homme et le droit international humanitaire sont enseignés dans cet établissement.

M. Zarate  Fleitas (Paraguay) dit que la violence physique et psychologique est interdite par le Code de l’enfance et de l’adolescence et par le Code pénal, et qu’il n’est donc pas possible de recourir aux châtiments corporels dans les établissements scolaires. L’Association des proches de victimes du service militaire obligatoire est l’organe chargé de recueillir les plaintes des victimes et d’y donner suite. Le Ministère de la santé et du bien-être social a entamé un processus d’identification de toutes les personnes ayant subi un préjudice lors de leur service militaire afin de leur offrir une prise en charge psychologique. Même les victimes se trouvant dans les zones rurales y ont accès, grâce à la mise en place de services de proximité.

M. Cardona  Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) voudrait en savoir plus sur les mesures de promotion de la culture de la paix, compte tenu du fait qu’il arrive que des enfants en uniforme prennent part à des défilés militaires.

M.  Aguirre (Paraguay) dit que le Paraguay n’est pas un État belliqueux ou militariste mais que son histoire a fait qu’il a souvent eu à repousser l’agresseur. Aussi l’armée reste-t-elle une institution très prestigieuse. Il précise que le lycée militaire constitue la voie royale pour quiconque veut par la suite embrasser une carrière militaire. Le fait que des enfants défilent en uniforme ne signifie pas qu’ils sont soumis à la discipline militaire, ni qu’on leur inculque une quelconque culture de la guerre.

M.  Gurán demande si l’État partie a mis en place un mécanisme permettant de repérer les enfants entrant sur le territoire qui pourraient avoir pris part à des hostilités à l’étranger.

M.  Nogueira  Neto (Rapporteur pour le Paraguay) demande si le point de vue des enfants est systématiquement pris en considération et si l’État partie a déjà eu connaissance de cas d’exploitation sexuelle d’enfants par des militaires.

La Présidente , prenant la parole en sa qualité de membre du Comité, demande pourquoi l’État partie persiste à cautionner l’existence d’un lycée militaire, estimant qu’il serait préférable que les élèves soient majeurs, et donc suffisamment mûrs, pour opter pour une carrière militaire.

M.  Martinez Fernández (Paraguay) dit que, à l’initiative du Ministère de la justice et du travail, une vaste campagne d’enregistrement des naissances a été menée avec la participation du Secrétariat national à l’enfance et à l’adolescence et la police nationale. Cette campagne a abouti à la création d’une base de données numérique à laquelle ont accès les services des forces armées. Cette avancée devrait permettre de résoudre le problème de la falsification des actes de naissance et de l’enrôlement de mineurs dans les forces armées. En outre, le fait de fournir des données falsifiées pour enregistrer un enfant à l’état civil emporte une peine pénale de quinze ans d’emprisonnement.

L’Association des proches de victimes du service militaire obligatoire n’est pas le seul organisme habilité à recevoir les plaintes d’enfants victimes: il existe notamment une ligne téléphonique spéciale que les enfants peuvent appeler, y compris depuis un téléphone portable, ainsi que des services spécialisés dans les municipalités. Les enfants ont donc de nombreuses possibilités de dénoncer une éventuelle violation de leurs droits consacrés par le Protocole facultatif.

La délégation transmettra au Gouvernement paraguayen la proposition du Comité de créer un mécanisme chargé d’identifier les enfants ayant pu participer à des hostilités à l’étranger. Toutes les lois paraguayennes consacrent le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Pour combattre le phénomène du travail domestique non rétribué des enfants (connu sous le nom de criadazgo), le Paraguay a adopté en 2005 un décret interdisant les pires formes de travail des enfants et a également ratifié la Convention no 182 de l’OIT. M. Martinez Fernández n’a pas eu connaissance de cas d’exploitation sexuelle d’enfants par des membres des forces armées.

M me Aidoo aimerait connaître le nombre de personnes condamnées pour avoir enrôlé un mineur dans les forces armées. Elle demande en outre si un mécanisme de plainte a été créé au sein même du lycée militaire afin que les élèves puissent dénoncer facilement les violations de leurs droits.

M. Zarate  Fleitas (Paraguay) n’est pas en mesure de fournir des données précises sur le nombre de condamnations prononcées contre des personnes qui auraient enrôlé des enfants dans les forces armées. Les mécanismes de plainte que peuvent saisir les élèves du lycée militaire sont ceux des forces armées.

M. Cardona  Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) demande un complément d’information sur la situation qui prévaut dans le nord du pays, où l’armée du peuple paraguayen (EPP) commet de nombreux crimes. Il souhaiterait notamment savoir si des mesures spéciales de protection ont été adoptées en faveur des enfants vivant dans cette région.

M me Nimia  da Silva (Paraguay) dit que les membres des forces de l’ordre et des forces de police qui ont été déployées dans cette région pour protéger la population ont été formés aux principes des droits de l’homme et du droit international humanitaire, et sont donc conscients que les enfants ne sauraient être interrogés ni harcelés. D’ailleurs, aucune plainte n’a été déposée pour ce motif. Elle précise que ces forces ont précisément vocation à protéger la population contre les agissements criminels de l’EPP.

M. Cardona  Llorens fait observer que, même si aucune plainte n’a été déposée, on peut lire dans la presse locale et sur Internet que nombre d’enfants ont été interrogés par la police. Au vu des circonstances, il insiste sur la nécessité d’adopter des mesures spéciales pour protéger les enfants.

La Présidente, s’exprimant en sa qualité de membre du Comité, demande si l’État partie a établi sa compétence extraterritoriale pour les infractions visées par le Protocole facultatif et s’il envisage de supprimer l’exigence de la double incrimination.

M. Zarate  Fleitas (Paraguay) répond que l’enrôlement d’enfants n’est pas encore une infraction pénale, mais que le Gouvernement est conscient de la nécessité de procéder aux réformes législatives nécessaires.

Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

M. Cardona  Llorens (Rapporteur pour le Paraguay) salue les progrès accomplis par l’État partie depuis 2010, notamment l’adoption d’instruments législatifs visant à lutter contre la traite. Il note que l’État partie s’est doté d’une multitude d’initiatives, de plans et de programmes sectoriels, mais souhaiterait savoir comment leur application est coordonnée et pourquoi un plan national global n’a pas été adopté. Il aimerait aussi obtenir des informations sur le nombre de plaintes reçues et d’enfants secourus, ainsi que sur les réparations accordées.

M. Cardona Llorensdemande si l’État partie envisage d’interdire expressément dans la loi tous les actes visés par le Protocole facultatif et d’encadrer plus strictement les adoptions, afin d’éviter les adoptions frauduleuses qui peuvent déboucher sur des cas de vente d’enfants. Un complément d’information sur les mesures prises pour accélérer le règlement des affaires d’enlèvement d’enfants par leurs parents serait utile.

M. Cardona Llorens demande des précisions sur les mesures prises concernant les placements d’enfants comme domestiques (criadazgo). La question de la prévention du tourisme sexuel, particulièrement brûlante dans les zones frontalières avec le Brésil, mérite également un complément d’information: que fait l’État partie pour prévenir ce phénomène, inciter les victimes à porter plainte, leur offrir des voies de recours utiles et lutter contre la corruption de la police? Enfin, M. Cardona Llorens demande si l’État partie a mis en place des procédures visant à éviter la victimisation secondaire des enfants victimes d’exploitation sexuelle, notamment pour leur éviter d’avoir à témoigner à plusieurs reprises.

M. Nogueira  Neto (Rapporteur pour le Paraguay) demande si des campagnes de sensibilisation aux infractions visées par le Protocole facultatif ont été menées dans les zones frontalières et si des mesures ont été prises pour former les travailleurs sociaux qui s’occupent des enfants des rues.

M.  Kotrane regrette que la législation interne ne reprenne pas les définitions du Protocole facultatif et n’incrimine pas les actes qui y sont visés. Il note en outre que l’État partie n’a pris pratiquement aucune mesure pour mettre sa législation en conformité avec cet instrument. La délégation pourrait peut-être indiquer si la détention de matériel pédopornographique et l’intermédiation dans les adoptions sont érigées en infraction, et expliquer pourquoi la loi ne semble prévoir aucune disposition visant à protéger spécifiquement les mineurs contre les infractions visées par le Protocole facultatif. M. Kotrane demande en outre si l’État partie reconnaît la responsabilité des personnes morales, s’il a élargi sa compétence juridictionnelle pour poursuivre les actes visés par le Protocole facultatif qui ont été commis à l’étranger et s’il prévoit la possibilité d’extrader les auteurs de tels actes. Enfin, la délégation pourrait peut-être indiquer s’il est prévu d’ériger en infraction le travail domestique des enfants et de le punir comme un cas de vente d’enfant.

M me Muhamad  Shariff croit comprendre que le projet de modification de la loi no 2861/06 incriminant la pornographie mettant en scène des enfants tend à assouplir les sanctions prévues contre les auteurs de telles infractions. Elle demande à la délégation de donner des précisions à ce sujet.

M me Khazova, constatant avec satisfaction que l’État partie a ratifié la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, demande si l’État partie a prévu d’assurer le suivi et le contrôle du placement de l’enfant dans sa famille d’adoption.

M.  Mezmur demande si les autorités ont constaté des cas de vente d’enfant ou d’exploitation sexuelle des enfants dans le cadre des mariages précoces, qui concernent encore 18 % des enfants. Il fait remarquer que les peines prévues par le Code pénal en cas de détention de matériel pédopornographique semblent bien insuffisantes en regard de l’infraction et souhaiterait que la délégation fasse part de ses commentaires à ce sujet.

M me Oviedo  Fierro aimerait en savoir plus sur le montant des allocations budgétaires allouées à la mise en œuvre des plans et programmes adoptés par l’État partie, ainsi que sur les structures et mécanismes d’aide aux victimes.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 17 h 40.