NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l’enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.752

28 février 2002

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Vingt‑neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 752e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mardi 15 janvier 2002, à 15 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique du Liban (suite)

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

  La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Liban [(CRC/C/70/Add.8); liste des points à traiter (CRC/C/Q/LEB/2); document de base (HRI/CORE/Add.27/Rev.1)] (suite)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation libanaise reprend place à la table du Comité.

2.M. NEHME (Liban) indique que la société libanaise se modernise et que les modes de vie traditionnels sont en train de céder le pas à une culture davantage axée sur le respect des droits de l’homme. À preuve l’importance nouvelle accordée au respect de l’opinion de l’enfant au sein de la famille, principalement dans les foyers appartenant aux classes moyennes et aux classes ayant un niveau d’instruction élevé. On a en outre observé un recul de la pratique des châtiments corporels au sein de cette même population. Le Gouvernement s’emploie à sensibiliser le public aux droits de l’enfant et a mis en place une stratégie qui consiste à s’adresser en même temps aux parents et aux enfants, de manière à ne susciter aucune résistance des parents. À cet égard, les médias jouent un rôle crucial, en exposant au grand jour des questions qui jadis étaient taboues: on parle désormais à la télévision ou dans les journaux d’affaires de délits sexuels ou de violences sur mineurs.

3.Les crimes d’honneur sont désormais si rares au Liban qu’on ne peut plus parler de phénomène social. Les associations féminines mènent toutefois actuellement une grande campagne en vue de la modification des dispositions pénales relatives aux crimes d’honneur, qui ne prévoient, pour l’homme, aucune peine pour ce motif.

4.La question de la transmission de la nationalité par la mère est toujours à l’examen, le projet de loi en la matière n’ayant pas encore été adopté.

5.Pour éviter que des traitements inhumains ne soient infligés aux enfants à l’occasion des enquêtes judiciaires, le Procureur général a pris une décision en vertu de laquelle il est interdit d’interroger un enfant sans la présence d’un représentant d’une association de défense des droits de l’enfant. Cette décision a été suivie d’effets et l’on ne peut que se féliciter de la nette amélioration des conditions de détention des mineurs et des conditions dans lesquelles se déroulent les interrogatoires.

6.Une loi récente interdit aux enseignants de recourir à la violence, de quelque type que ce soit, à l’égard de leurs élèves. Le phénomène des châtiments corporels à l’école est en nette régression malgré les quelques cas survenus dans des écoles publiques situées dans des régions rurales reculées.

7.Le Liban procède actuellement à la restructuration des services d’aide sociale et à la révision du statut des différentes ONG et associations à vocation sociale, notamment des associations religieuses, qui jouent un rôle clef dans la fourniture de ce type de services. Le Ministère des affaires sociales a défini les critères qui conditionnent la prise en charge d’un enfant par les services sociaux. Jusqu’à présent, seuls les orphelins et les enfants de familles en proie à la violence pouvaient être placés en institution. En raison de la détérioration des conditions de vie due à la guerre, cette assistance a été élargie aux enfants de familles pauvres, qui auront désormais accès gratuitement à l’éducation ou aux services de santé. La plupart des institutions à vocation sociale sont des institutions confessionnelles, qui ne peuvent en aucun cas intervenir directement au sein de la famille ou décider du placement en institution de l’enfant. Elles ne sont que des prestataires de service. C’est aux parents qu’il incombe d’enclencher la procédure de placement en s’adressant au Ministère des affaires sociales. Ce dernier a défini quatre catégories d’enfants susceptibles de bénéficier de l’aide de l’État, à savoir: les nouveau‑nés orphelins de père et mère ou abandonnés; les enfants des familles pauvres que les parents ne peuvent entretenir; les adolescents de 18 ans au plus, qui semblent sur le point d’abandonner leurs études; et les délinquants. Lorsque le Ministère de l’éducation aura instauré l’enseignement obligatoire et gratuit pour tous, le Ministère des affaires sociales pourra retirer l’aide qu’il accorde à ces différentes catégories d’enfants. Dans le cadre de cette restructuration, le Liban entend mettre l’accent sur la fourniture de services au sein même de la famille, pour éviter de séparer les enfants d’avec leurs parents. Enfin, le Ministère de la santé publique quant à lui entend fixer un certain nombre de critères applicables aux crèches, qui devraient permettre d’améliorer les conditions de vie des enfants dans ces établissements.

8.Le Liban est doté d’un système efficace d’enregistrement des naissances et tous les nouveau‑nés y sont déclarés, y compris les enfants palestiniens.

9.En matière d’adoption, et pour toutes les questions relatives au statut personnel, deux systèmes coexistent, selon l’appartenance religieuse. Les communautés chrétiennes reconnaissent l’adoption par laquelle l’enfant reçoit les mêmes droits qu’un enfant naturel et hérite du nom de ses parents adoptifs tandis que la communauté musulmane privilégie le système de la kafalah, si l’enfant n’est pas pris en charge par sa famille élargie. Il n’existe pas de statistiques sur l’adoption internationale, mais les médias ont révélé récemment des affaires d’adoption illégale à l’étranger pendant la guerre. Un projet de loi sur le sujet est en cours d’élaboration.

10.Le Liban possède un cadre institutionnel qui permet de lutter efficacement contre la violence à l’égard des femmes. Les victimes peuvent s’adresser aux divers comités et autres ONG chargés de la défense de leurs droits par le biais des lignes téléphoniques d’urgence mises en place ou encore trouver refuge dans l’un des nombreux centres d’accueil du pays.

11.La nouvelle loi sur les personnes handicapées prévoit l’octroi aux handicapés d’une carte d’invalidité qui leur donne accès à tous types de services, y compris aux services de santé. Indépendamment de la prestation de services, elle met l’accent sur leur intégration au sein de la société.

12.De gros efforts ont été entrepris depuis 1998, pour améliorer la qualité des émissions de radio et de télévision destinées aux enfants. La Convention relative aux droits de l’enfant a servi de base à l’élaboration de diverses d’activités éducatives, telles que la pièce de théâtre de marionnettes pour enfants coproduite par l’UNICEF, qui a connu un franc et durable succès au sein de la population, toutes générations confondues.

13.La question de la peine de mort suscite un débat animé au sein de la société libanaise, et son abolition éventuelle est actuellement examinée par le Parlement. Si des exécutions ont eu lieu après la guerre, les juges disposent désormais d’une plus grande marge de manœuvre, et peuvent décider de prononcer la peine capitale ou encore d’atténuer la peine.

14.Si la loi veut que des comités conjoints associant élèves et professeurs soient créés au sein des écoles pour que tous participent à la prise de décisions, ce n’est pas le cas en pratique. Le nouveau programme scolaire met cependant l’accent sur l’apprentissage actif, qui sous‑entend une plus grande participation de l’élève aux activités qui lui sont proposées. Cette nouvelle méthode pédagogique crée des besoins matériels, il convient à cet égard de saluer l’aide considérable apportée par les ONG et le secteur privé en la matière.

15.Mme AL‑THANI demande si les enfants palestiniens se voient délivrer un certificat de naissance. Obtiennent‑ils des documents qui leur permettent de voyager ou encore de bénéficier d’une couverture sociale, telle qu’une assurance maladie?

16.M. NEHME (Liban) indique que les enfants palestiniens obtiennent un certificat de naissance, puis un laissez‑passer lorsqu’ils désirent se rendre à l’étranger. En matière de soins de santé primaires, ils n’ont pas accès aux hôpitaux publics, car compte tenu de la saturation de ces services, la préférence est donnée aux nationaux.

17.Mme KARP demande quelles mesures sont prises à l’encontre des enseignants qui infligent des châtiments corporels à leurs élèves, s’il est envisagé d’interdire ces châtiments dans la famille et si des recherches ont été menées sur ces pratiques. Dans le domaine de la santé, il serait intéressant de savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour que les enfants dont les parents n’ont pas d’assurance maladie aient accès aux soins de santé primaires.

18.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ demande qui, des autorités libanaises ou de l’UNRWA, est responsable, dans les camps de réfugiés palestiniens, du maintien de l’ordre, de la répression des infractions, et de la construction et de l’entretien des infrastructures.

19.Mme OUEDRAOGO souhaiterait savoir si le placement d’enfants dans des institutions, notamment des enfants de familles pauvres, fait l’objet d’un examen périodique et quelles mesures sont prises pour que ces enfants puissent rejoindre leur famille dans de bonnes conditions. Il serait également utile de savoir quelle est la position du Liban à l’égard de l’adoption internationale et si cet État partie envisage de ratifier la Convention de La Haye sur l’adoption internationale.

20.M. NEHME (Liban) dit que les recherches sur les châtiments corporels dans la famille sont insuffisantes. Le Gouvernement n’envisage pas d’interdire cette pratique au moyen d’une loi. Il préfère s’attacher à convaincre l’opinion publique que ces pratiques sont néfastes pour l’enfant.

21.La sécurité dans les camps palestiniens est assurée par les autorités libanaises et si une infraction y est commise, l’auteur est déféré devant les tribunaux libanais. Toutefois, dans la pratique, il existe entre les autorités libanaises et les organisations représentatives de la population des camps de réfugiés un accord tacite en vertu duquel les autorités libanaises ne pénètrent pas dans les camps. Ce modus vivendi ne pose généralement pas de problème. En effet, un seul des 10 camps que compte le Liban serait le théâtre de rivalités entre factions palestiniennes.

22.Quant aux infrastructures des camps de réfugiés palestiniens, c’est le Gouvernement libanais qui en est responsable. La plupart des camps doivent faire face aux mêmes problèmes que les quartiers pauvres des villes où vivent d’ailleurs la moitié des Palestiniens. À cet égard, le Ministère des affaires sociales réalise actuellement, en collaboration avec des ONG, notamment Caritas, un projet pilote d’aide aux familles pauvres et aux familles qui ont des enfants handicapés.

23.Le PRÉSIDENT invite le Comité à examiner les questions relatives à l’éducation et à la santé et aux mesures spéciales de protection.

24.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ croit savoir que le Liban est doté d’un réseau d’établissements de santé assez étoffé dispensant des services variés et de bonne qualité; elle demande si les personnes non couvertes par un régime d’assurance maladie ou ayant des revenus modestes peuvent accéder à ces services.

25.M. AL SHEDDI demande si le Gouvernement envisage de relever l’âge jusqu’auquel la scolarité est obligatoire − actuellement fixé à 12 ans −, comment il lutte contre l’analphabétisme qui, en 1996, touchait 13,6 % de la population, principalement des femmes, et comment il entend améliorer la formation des instituteurs, dont environ la moitié n’aurait pas les compétences requises pour s’acquitter de leur tâche.

26.Il serait également intéressant de savoir quel est le pourcentage d’enfants scolarisés dans les établissements privés, qui dispensent, semble‑t‑il, un enseignement de meilleure qualité que les établissements du secteur public. Enfin, il serait utile d’avoir des précisions sur les programmes visant à faciliter l’intégration des enfants handicapés dans la société en général et dans les écoles ordinaires en particulier.

27.Mme AL‑THANI demande si la nouvelle loi sur les enfants handicapés est entrée en vigueur. Elle relève à ce propos qu’environ 70 % des handicaps sont dus à des malformations congénitales et demande quelles mesures sont prises, notamment dans le cadre des soins de santé prénatals pour remédier à cette situation.

28.Il est indiqué dans le rapport qu’en 1996 le taux de mortalité infantile était de 48,1 ‰ dans le nord du pays contre 19,6 ‰ à Beyrouth. La délégation libanaise pourrait préciser ce qu’il est prévu de faire pour réduire cet écart considérable. Il serait également utile de connaître les mesures qui sont prises pour encourager l’allaitement au sein et notamment savoir si les mères qui travaillent bénéficient d’un congé maternité et de facilités dans leur entreprise lorsqu’elles reprennent le travail.

29.Enfin, la délégation libanaise pourrait indiquer ce que le Gouvernement entend faire pour augmenter le taux de couverture vaccinale qui n’est actuellement que de 80 %.

30.Mme EL GUINDI demande si les mineurs de 18 ans condamnés à une peine de prison sont incarcérés en compagnie d’adultes, quel est le sort réservé aux jeunes filles condamnées à une peine de prison et quelles mesures sont prises pour faciliter la réinsertion sociale des jeunes délinquants.

31.Mme KARP demande comment le Ministère de la santé et le Ministère de l’éducation coordonnent la mise en œuvre de leurs programmes de soins de santé respectifs, s’il existe des programmes de lutte contre la violence et le racket entre enfants à l’école, si des mesures sont prises dès la petite enfance afin de prévenir l’abandon scolaire, si la tolérance est enseignée dans les écoles, s’il est envisagé de réformer l’administration de la justice pour mineurs afin de réduire le nombre de mineurs incarcérés et de privilégier la prévention et la réinsertion plutôt que la répression.

32.La loi prévoit qu’un jeune délinquant ne peut être interrogé qu’en présence de l’un de ses parents ou d’un travailleur social afin de prévenir tous mauvais traitements et tout acte de procédure illégale. Il serait intéressant de savoir si les enfants en question parviennent à s’exprimer sans difficultés en présence de ces personnes.

33.Mme CHUTIKUL demande pourquoi les taux d’abandon scolaire et de redoublement sont si élevés au Liban, quelles mesures sont prises pour y remédier et pour prendre en charge les enfants qui ont abandonné l’école. D’après la loi, l’enseignement primaire est gratuit et obligatoire au Liban. Or ce principe n’est pas appliqué dans la pratique. Il serait intéressant de savoir ce qu’entend faire le Gouvernement pour remédier à cette situation et pour améliorer la qualité de l’enseignement dispensé dans les écoles publiques.

34.Le PRÉSIDENT, s’exprimant en sa qualité d’expert, relève que d’après le rapport, le coût annuel par élève de l’enseignement primaire s’élève à 271 000 livres libanaises dans le secteur public et à 1 323 000 livres libanaises dans le secteur privé. Or toujours d’après ce rapport, environ 60 % des ménages libanais ont des revenus mensuels inférieurs à 1 200 000 livres libanaises. De nombreuses familles n’ont donc pas, à l’évidence, les moyens d’envoyer leurs enfants à l’école publique ni a fortiori à l’école privée. Ces données expliquent peut‑être que le taux d’abandon scolaire soit aussi élevé au Liban. Il serait intéressant de savoir à cet égard si l’État apporte un soutien financier aux familles à faible revenu afin de garantir l’exercice du droit d’accéder à l’éducation. La délégation libanaise pourrait également préciser le mode de financement de l’enseignement public et indiquer si les établissements privés reçoivent des subventions.

35.Il demande où en est le programme d’éducation sanitaire des établissements d’enseignement public et voudrait savoir si des mesures ont été prises pour lutter contre la malnutrition, telles des campagnes d’information visant à changer les habitudes nutritionnelles des parents.

36.Par ailleurs, il rappelle que le Comité avait, dans ses observations finales sur le rapport initial, recommandé à l’État partie de redoubler d’efforts pour informer la population des risques des mariages consanguins et demande si la législation interdit désormais ce type d’union.

37.Au sujet du travail des enfants, il constate que le rapport ne contient pas de statistiques sur les enfants employés dans l’agriculture et demande si l’État partie envisage de ratifier les Conventions 138 et 182 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et s’il a mis au point, en collaboration avec les ONG et le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC), des programmes ou activités pour combattre l’exploitation des enfants.

38.Il aimerait également savoir si, depuis le retrait des troupes israéliennes du sud du Liban, des programmes particuliers ont été élaborés avec l’appui d’organisations internationales pour faire face aux problèmes, notamment psychologiques, dont les enfants pourraient souffrir. Il souhaite aussi en savoir plus sur les camps de prisonniers de cette région.

39.Par ailleurs, il demande où en est l’examen par le Parlement du projet de loi sur la justice pour mineurs, qui comporte des dispositions relatives non seulement aux auteurs d’infractions mais aussi aux enfants susceptibles de tomber dans la délinquance, pour lesquels des mesures de correction sont également prévues. En particulier, il voudrait savoir si ces enfants seront traités de la même façon que les délinquants juvéniles et placés dans les mêmes institutions.

40.Mme KARP demande si l’État partie compte établir un plan d’action pour donner suite aux recommandations du Congrès mondial de Yokohama contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Constatant que la prostitution figure dans la liste des infractions sexuelles commises par des mineurs, elle rappelle que la Déclaration et le Plan d’action du Congrès mondial de Stockholm invitent les États parties à dépénaliser la prostitution enfantine.

La séance est suspendue à 16 h 35; elle reprend à 16 h 55.

41.M. NEHME (Liban) dit que les statistiques figurant dans le rapport ont été extraites du rapport préliminaire sur la situation des enfants au Liban établi conjointement par l’UNICEF et l’Office central de statistique. Lorsque le rapport final aura été publié, l’État partie actualisera et complétera ces données.

42.Au sujet des centres de santé, il indique que 95 % des lits d’hôpitaux sont gérés par le secteur privé, l’immense majorité des hôpitaux publics ayant été détruits au cours de la guerre. Outre les 700 dispensaires gérés par des ONG, une nouvelle catégorie d’établissements privés a été créée. Il s’agit de centres de santé, à mi-chemin entre les dispensaires et les hôpitaux, dont la construction sera financée notamment par le Fonds arabe de développement économique et social. Ils seront administrés par l’État, en collaboration avec des ONG le cas échéant. Il est prévu à court terme de construire 25 établissements de ce type. Au niveau local, les soins de santé sont essentiellement assurés par les dispensaires des ONG et des centres de développement communautaire du Ministère des affaires sociales. La situation en matière d’équipement et de personnel varie considérablement d’un établissement à l’autre. De façon générale, les médicaments y sont distribués moyennant une participation modique. Par ailleurs il convient de noter que 42 % de la population bénéficient d’une couverture sociale, publique ou privée, cette couverture étant généralement liée à l’activité professionnelle. Le reste de la population peut s’adresser aux établissements publics ou privés pour y recevoir des soins, l’État couvrant 85 % des frais d’hospitalisation.

43.Seuls 12 % des Libanais de plus de 15 ans, dont une majorité de femmes, sont analphabètes. Ce phénomène ne touche que les couches les plus âgées de la population et l’écart est pratiquement nul entre les garçons et les filles, grâce à la politique de lutte contre l’analphabétisme menée par le Gouvernement. La Commission nationale pour l’alphabétisation et l’éducation des adultes met au point des programmes destinés aux femmes des régions rurales fortement peuplées (dans le nord du pays en particulier), qui associent des activités d’alphabétisation, de démarginalisation et de planification familiale, notamment.

44.Au sujet de la formation des maîtres et de la qualité de l’enseignement, il convient de noter que la guerre civile n’a pas eu d’effet sur les taux de scolarisation, qui ont même progressé, mais que la formation des enseignants (qui ne sortaient plus des écoles normales mais étaient recrutés après le baccalauréat) et les infrastructures en ont beaucoup souffert. Depuis la fin du conflit, les écoles normales ont repris leurs activités et un programme intensif de formation continue est exécuté dans tous les domaines pour tous les enseignants. En outre, les élèves fréquentent de plus en plus les écoles publiques, où la qualité de l’enseignement s’améliore. Les examens officiels ont été rétablis et la situation revient progressivement à la normale.

45.Une nouvelle loi relative aux handicapés a été adoptée en 2001. Dans la pratique, certaines de ses dispositions étaient appliquées avant même sa promulgation, par le canal notamment de l’Office national aux affaires des personnes handicapées. Très actif, l’Office doit toutefois améliorer la coordination des activités menées par tous les ministères, et renforcer le financement de ces dernières. Il est notamment prévu de conclure des accords avec les hôpitaux privés. Par ailleurs, les membres du nouveau Comité national des personnes handicapées viennent d’être désignés; tous les titulaires d’une carte d’invalide avaient été invités à participer à l’élection de leurs représentants. En ce qui concerne les mariages consanguins, l’une des principales causes de la naissance d’enfants handicapés, la nouvelle législation prévoit certaines restrictions, ainsi que l’obligation de subir un examen prénuptial, mais n’interdit pas l’union des cousins au premier degré.

46.Le Liban s’efforce de prendre des mesures plus ciblées pour réduire le taux de mortalité périnatale (28 %), dans le cadre de sa politique de protection de la petite enfance.

47.La durée du congé de maternité est de six semaines. Malgré les demandes des organisations féminines et du Gouvernement, le secteur privé refuse d’allonger ce congé.

48.Dans le domaine de la santé, aucun cas de poliomyélite n’a été signalé depuis quatre ans. Un projet de loi est à l’étude pour assurer la couverture sociale des enfants dont les parents ne sont pas assurés. Le programme d’éducation sanitaire continue d’être appliqué, dans le cadre d’activités menées par le Gouvernement, les ONG et les organismes des Nations Unies. L’éducation en matière de santé est inscrite dans les programmes scolaires et, dans la pratique, une personne est responsable dans chaque école de l’application des activités correspondantes.

49.La violence à l’école est un phénomène peu répandu, si ce n’est entre les jeunes des établissements d’enseignement secondaire et supérieur. Les enseignants qui commettent des actes de violence à l’égard d’enfants font l’objet de mesures administratives. Par ailleurs, l’abandon scolaire touche essentiellement les garçons. De fait, les filles sont plus nombreuses dans les écoles secondaires et les universités. Les nouveaux programmes scolaires font une part de plus en plus grande aux valeurs humanitaires; ils prévoient non seulement de faire connaître la Convention, mais aussi les principes relatifs au développement humain et les questions concernant la santé de la procréation et la démographie. Un manuel d’éducation civique est en cours d’élaboration. Pour lutter contre l’abandon scolaire, il est notamment prévu d’interdire les redoublements dans l’enseignement primaire et le Ministère des affaires sociales exécute des programmes d’aide aux élèves en difficulté et de formation professionnelle, avec l’appui des ONG et de l’UNICEF.

50.La loi n° 686 du 16 mars 1998, dont les textes d’application n’ont pas encore été adoptés, prévoit l’enseignement gratuit et obligatoire pour tous les enfants jusqu’à l’âge de 11 ans révolus. Cette loi permettra aux autorités compétentes de prendre des mesures à l’encontre des parents qui ne veillent pas à la scolarisation de leurs enfants. La fréquentation des établissements d’enseignement public va s’en trouver accrue et le Gouvernement envisage la création de nouvelles écoles. La scolarité est gratuite dans les établissements d’enseignement publics, hormis les frais d’inscription; seuls certains établissements privés reçoivent des subventions de l’État. Les fonctionnaires perçoivent une allocation pour frais d’études pour leurs enfants.

51.L’enquête sur le travail des enfants en cours de réalisation par l’UNICEF permettra de mesurer précisément l’ampleur de ce phénomène, notamment dans le secteur agricole.

52.Le problème des mines terrestres est aigu, en particulier dans le sud du pays, région considérée comme prioritaire par le nouveau programme mis en œuvre en collaboration avec l’armée, la Banque mondiale et d’autres institutions des Nations Unies.

53.Le Ministère des affaires sociales est chargé de la réinsertion des anciens détenus et le Gouvernement œuvre à l’élaboration de programmes spécifiques à leur intention.

54.L’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales est un phénomène inconnu au Liban. Un projet de loi sur la délinquance juvénile, élaboré par un comité du Ministère de la justice, a été rejeté en première lecture par une commission parlementaire composée notamment de représentants du Ministère des affaires sociales, de l’UNICEF et du Conseil supérieur pour l’enfance, qui ne l’a pas jugé conforme aux principes énoncés dans la Convention. Ce projet de loi sera donc remanié et la délégation libanaise serait reconnaissante au Comité de formuler quelques suggestions quant à la teneur de la loi envisagée.

55.Mme HAMAOUI (Liban) précise que le Liban a, sur la recommandation du Conseil supérieur pour l’enfance, ratifié le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants et qu’il ratifiera prochainement le second Protocole concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. Par ailleurs, le Gouvernement a ratifié, en 2001, la Convention 182 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination. En collaboration avec l’IPEC, le Gouvernement a lancé un programme national en vue d’abolir le travail des enfants. La première phase de ce programme a consisté à dispenser une formation spécifique aux inspecteurs du travail et à recenser tous les secteurs d’activités où perdure le travail des enfants. Il convient de noter à cet égard que le secteur agricole ne figure pas parmi les priorités dudit programme. Des centres de réinsertion sociale ont été créés à l’intention des enfants qui ont été forcés à travailler, notamment à Beyrouth et à Tyr.

56.En ce qui concerne le système pénitentiaire, contrairement aux jeunes filles, les jeunes garçons délinquants ne sont pas incarcérés dans les mêmes locaux que les délinquants adultes. Dans le cadre d’un programme élaboré conjointement par le Ministère de la justice et par le Centre des Nations Unies pour la prévention internationale de la criminalité, il est prévu de procéder dès que possible à l’emprisonnement des jeunes délinquantes dans des quartiers séparés.

57.Mme KARP demande si le Gouvernement libanais a fait appel à l’assistance technique de l’UNICEF ou d’autres institutions spécialisées des Nations Unies pour mener à bien son projet de réforme du système de justice pour mineurs.

58.Le PRÉSIDENT, parlant en sa qualité d’expert, demande quels sont les secteurs d’activité visés par le programme tendant à abolir le travail des enfants et quelle est l’importance accordée à la situation des enfants dans les programmes menés par le Gouvernement dans le sud du pays.

59.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ demande si le contrôle, des organismes privés prestataires de services de leur comptabilité notamment, est prévu dans le cadre des accords conclus entre le Gouvernement et les secteurs privé et non gouvernemental.

60.M. NEHME (Liban), indique que l’UNICEF fournit déjà une assistance au Gouvernement libanais dans le cadre de différents programmes. Les actions engagées dans le sud du pays constituent un premier train de mesures, qu’il est prévu d’étoffer notamment avec des projets visant spécifiquement à améliorer la situation des enfants. D’ores et déjà, ont été créés plusieurs dizaines de clubs de jeunes ayant pour objectif de mettre en contact les adolescents de la zone anciennement occupée avec ceux du reste du pays.

61.Les autorités ont toujours procédé à un contrôle comptable des organismes prestataires de service et il s’agit maintenant de moderniser et d’informatiser ce processus pour le rendre plus efficace. Il est à noter à ce propos que de nombreux organismes privés se soumettent avec réticence à cette pratique.

62.Mme HAMAOUI (Liban) signale que les autorités s’emploient actuellement en priorité à abolir le travail des enfants dans les usines.

63.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ, résumant brièvement la discussion, se félicite du caractère franc et détendu du dialogue instauré avec la délégation libanaise. Depuis l’examen par le Comité du rapport initial du Liban, des changements positifs ont été apportés à la législation nationale même si certaines incohérences subsistent avec la Convention.

64.Dans ses observations finales, le Comité invitera le Gouvernement à se doter d’une stratégie d’ensemble pour la mise en œuvre de la Convention, tenant compte des autres programmes nationaux pertinents, en matière de lutte contre la pauvreté et de politiques familiales notamment. Le Gouvernement devra s’employer par ailleurs à renforcer le système de collecte des données et à consolider les procédures de suivi de l’application de la Convention tout en veillant à leur indépendance. Le Comité salue l’annonce, par la délégation, d’une meilleure planification budgétaire des investissements publics et d’une réglementation des normes de qualité des services fournis par le secteur privé. Il invite le Gouvernement à harmoniser les âges fixés dans les différents textes législatifs relatifs aux enfants, à intégrer dans le droit interne les principes généraux énoncés dans la Convention et à en tenir compte dans les décisions administratives et judiciaires. Le placement d’enfants en institution constitue un problème et il conviendrait de donner pleinement effet à la législation en vigueur. Le Comité se félicite de constater que la situation des enfants palestiniens est meilleure qu’il ne l’avait imaginée. Enfin, concernant le travail des enfants, il appartient maintenant aux autorités de veiller au respect de la législation en vigueur.

La séance est levée à 18 heures.

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