NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.101527 janvier 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trente-huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1015e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 20 janvier 2005, à 10 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique de la République islamique d’Iran

La séance est ouverte à 10 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 5 de l’ordre du jour)

Deuxième rapport périodique de la République islamique d’Iran(CRC/C/104/Add.3; liste des points à traiter (CRC/C/Q/IRN/2); réponses écrites du Gouvernement iranien à la liste des points à traiter (CRC/C/RESP/71))

1. Sur l’invitation du Président, M. Akhoondzadeh, M. Jamshidi, M. Sajjadpour, M. Zadeh, M me  Faramarzian, M. Yaqoobi et M. Zareian (République islamique d’Iran) prennent place à la table du Comité.

2.M. AKHOONDZADEH (République islamique d’Iran), après avoir souligné l’importance qu’attache le Gouvernement iranien à la réalisation des objectifs de la Convention, présente dans ses grandes lignes le deuxième rapport périodique de la République islamique d’Iran. Il indique que le projet de loi concernant la création d’une institution nationale s’occupant des questions relatives aux droits de l’enfant doit être soumis très prochainement aux autorités compétentes pour approbation. Ce texte, élaboré par un groupe de travail mis sur pied conjointement par le Ministère des affaires étrangères et le bureau de l’UNICEF à Téhéran, s’appuie sur les résultats du projet de recherche que consacre à cette question la chaire UNESCO d’étude des droits de l’homme, de la paix et de la démocratie.

3.La délégation iranienne saisit cette occasion pour remercier la communauté internationale et les institutions spécialisées, en particulier l’UNICEF, de leur contribution aux opérations de secours et de relèvement menées en Iran après le séisme qui a ravagé la région de Bam en 2004.

4.M. FILALI se félicite des mesures prises par l’État partie en vue de renforcer son arsenal juridique dans les domaines touchant aux droits de l’enfant et salue la mise en œuvre de plusieurs programmes et projets témoignant d’une évolution positive, notamment dans les domaines de l’éducation et de la protection des groupes d’enfants les plus vulnérables. Il regrette néanmoins de ne pas avoir trouvé dans les documents soumis par le Gouvernement iranien plus de renseignements sur l’application concrète de la Convention, ainsi qu’une évaluation critique des incidences des mesures prises sur la situation des enfants.

5.Si certaines des recommandations figurant dans les observations finales du Comité relatives au rapport initial de l’Iran ont été dûment appliquées, celles qui concernaient la définition de l’enfant, le droit à la vie, la non-discrimination et la justice pour mineurs n’ont guère été suivies d’effets.

6.En raison de son caractère imprécis, la réserve générale émise par l’État partie lors de la ratification de la Convention tend à entraver l’application de cet instrument et il aurait été préférable que l’État partie désigne clairement les articles avec lesquels il est en désaccord. Sa position sur ce point est d’autant plus difficile à comprendre qu’il n’a pas formulé de telles réserves concernant les autres instruments auxquels il est partie.

7.Il serait utile que la délégation apporte des éclaircissements sur le statut de la Convention dans l’ordre juridique interne, en indiquant si cet instrument peut être invoqué devant les tribunaux iraniens et servir de fondement à une décision de justice. Il serait également utile qu’elle apporte des précisions sur le fonctionnement de la Commission islamique des droits de l’homme, sur les suites données aux éventuelles plaintes dont cette instance a pu être saisie, et sur les incidences de ses activités aux niveaux régional et local. De façon générale, la coordination de l’application de la Convention constitue une préoccupation compte tenu de la forte centralisation de l’État iranien et il faudrait savoir en particulier comment sont répercutées les décisions des institutions nationales aux niveaux régional et local et quels sont les mécanismes de surveillance à ces niveaux.

8.Plusieurs autres questions préoccupent le Comité et appellent une action de l’État partie. Il convient de citer à cet égard les incohérences dans la définition de l’enfant, qui se traduisent notamment par une discrimination à l’encontre des filles en matière de capacité juridique (âge du mariage), de responsabilité civile et de responsabilité pénale. Il faut également appeler l’attention sur les inégalités entre garçons et filles en termes d’accès à l’éducation, notamment en milieu rural, et sur les cas de discrimination à motivation religieuse, en particulier à l’égard de la communauté bahaïe. Un autre problème est celui du droit de garde de la mère après l’âge de 7 ans en cas de séparation des parents. Enfin, du fait de traditions encore très fortes, le respect de l’opinion de l’enfant reste limité à l’école, devant les tribunaux et dans la famille et la délégation pourrait indiquer si des mesures sont envisagées pour remédier à cet état de choses.

9.M. AL‑SHEDDI demande des précisions sur le statut et la composition du Comité national chargé d’évaluer l’application de la Convention. Soulignant la nécessité de disposer de statistiques fiables pour élaborer des politiques adaptées, il voudrait savoir si l’État partie envisage de prendre des mesures pour améliorer l’enregistrement des naissances, en particulier dans les zones rurales. Par ailleurs, dans la mesure où il n’existe pas de poste budgétaire spécifique pour le financement des services destinés aux enfants, on ne peut que s’interroger sur les moyens permettant d’évaluer la part des crédits alloués à ces services et les résultats de l’utilisation de ces ressources.

10.En vertu de l’article 1179 du Code civil, les parents ont le droit de corriger leurs enfants dans une certaine limite et il serait donc intéressant de savoir quand une correction peut être considérée comme excessive et qualifiée de mauvais traitement et quelles sont les dispositions prises pour sensibiliser les familles au problème des châtiments corporels. De même, les circulaires diffusées par le Ministère de l’éducation concernant l’interdiction des châtiments corporels à l’école ne semblent pas très claires et la délégation pourrait indiquer si des mesures concrètes sont prises pour interdire cette pratique, à laquelle certains enseignants continueraient de recourir, et pour mettre en place un mécanisme de surveillance.

11.Enfin, il semblerait que les mesures visant à diffuser la Convention et à mieux faire connaître ses dispositions au grand public et aux professionnels travaillant avec les enfants ne relèvent pas d’une approche globale et systématique et le Comité voudrait donc avoir des précisions sur ce point.

12.Mme SARDENBERG fait observer que la délégation, quoique de haut niveau − ce dont il faut se féliciter −, ne comporte qu’une femme et s’inquiète de la signification d’une telle sous‑représentation. Constatant que les derniers rapports soumis par l’Iran au Comité des droits de l’homme et au Comité des droits économiques, sociaux et culturels remontent à 1993, elle demande si le Gouvernement a l’intention de soumettre prochainement de nouveaux rapports à ces organes. Il serait intéressant de savoir si le Gouvernement a déjà mis sur pied des mécanismes d’évaluation du fonctionnement du Comité national chargé d’évaluer l’application de la Convention et étudié les mesures à prendre dans l’éventualité où des ajustements s’avéreraient nécessaires.

13.Il y a tout lieu de se féliciter de la participation d’ONG et d’universités aux travaux du Comité national et la délégation pourrait à ce propos apporter des précisions sur les liens qu’entretient le Gouvernement avec les universités et indiquer en particulier s’il existe une coopération systématique aux fins de la recherche et de l’élaboration des politiques.

14.Il serait utile de savoir si la position du Gouvernement a changé d’une manière ou d’une autre au sujet de la réserve générale formulée par l’Iran, car dans ses réponses écrites le Gouvernement iranien fait savoir qu’aucune décision n’a été prise concernant le retrait de cette réserve sans pour autant indiquer si un processus de réflexion est en cours. Or le simple fait de reconnaître les incidences de cette réserve sur l’application de la Convention dans son ensemble constituerait déjà une évolution positive.

15.On a parfois l’impression que les politiques sont fragmentées et qu’une stratégie globale fait défaut, c’est pourquoi il serait utile d’avoir des renseignements sur la coordination des activités liées à l’application de la Convention entre les 28 provinces et de savoir s’il existe des différences de budget et de résultats d’une province à l’autre.

16.Des précisions sur la Commission islamique des droits de l’homme seraient bienvenues; il faudrait par exemple savoir si elle peut être saisie de plaintes contre le Gouvernement. Il serait par ailleurs utile de savoir comment a débuté la coopération de l’Iran avec la chaire UNESCO des droits de l’homme. Enfin, la délégation pourrait indiquer si, d’une façon générale, le Gouvernement a le sentiment que les mentalités ont évolué grâce à ses efforts de sensibilisation aux droits de l’enfant.

17.Mme AL THANI relève que l’Iran n’aborde pas certains motifs de préoccupation du Comité concernant le droit à la vie, à la survie et au développement, notamment l’applicabilité de la peine de mort aux individus de moins de 18 ans et le fait que le meurtre d’un enfant par son père ou son grand-père soit passible d’une peine peu sévère, et ce uniquement si la mère porte plainte. Il serait d’ailleurs intéressant de savoir d’où vient cette pratique, qui n’est pas propre à la culture islamique.

18.Au sujet des châtiments corporels, il faudrait savoir si le Gouvernement envisage d’interdire les sanctions physiques contre les détenus mineurs. Des précisions seraient utiles sur le fonctionnement du comité technique consultatif créé par le Ministère de la santé. Enfin, il serait intéressant de savoir si les permanences téléphoniques destinées aux enfants placés continuent d’être utilisées et si elles sont accessibles aux autres enfants victimes de maltraitance.

19.M. CITARELLA souligne que les principes de la Convention se heurtent à des obstacles culturels dans nombre de pays, certains secteurs de la société ayant encore du mal à accepter que les enfants aient des droits. Le rapport et les réponses écrites montrent que l’Iran a beaucoup évolué à cet égard, ce qui rend d’autant moins compréhensibles ses réserves générales à la Convention. Il faudrait maintenant que la législation évolue également, de façon à permettre éventuellement le retrait de ces réserves dans un proche avenir.

20.Malgré les recommandations du Comité, la définition de l’enfant demeure incompatible avec la Convention en ce qu’elle fixe des âges minimums différents pour les garçons et les filles. Le Gouvernement devrait envisager de supprimer la pratique du mariage temporaire car elle peut favoriser la traite d’êtres humains. Enfin, il existe une discrimination dans l’exercice du droit à la nationalité entre les enfants de père iranien et ceux dont seule la mère est iranienne.

21.M. KRAPPMANN fait observer que le respect des opinions de l’enfant constitue un bon moyen de vérifier quelle conception de l’enfance prédomine dans une société et que les informations fournies sur ce point dans le deuxième rapport périodique sont quelque peu décevantes. Il est indiqué que l’Union des associations islamiques d’élèves a commencé à fonctionner, mais rien n’est dit sur ce qu’elle fait, et il serait dès lors utile de savoir dans quelles instances les enfants peuvent s’exprimer et quelle est l’incidence de cette participation. Enfin, il est regrettable que, dans les procédures judiciaires, les vues de l’enfant ne puissent être exprimées que par le père ou le grand-père paternel, ou un tuteur légal.

22.Mme VUCKOVIC-SAHOVIC souligne que la collecte de données est essentielle pour l’élaboration de stratégies ciblées et que la coopération internationale peut être très utile à cet égard. Elle se félicite que l’éducation aux droits de l’enfant ait été introduite dans les écoles mais demande si une telle formation est également dispensée à la police − ce qui semble d’autant plus nécessaire que des violences policières contre des enfants ont été signalées. Enfin, le nombre d’enfants réfugiés qui deviennent des enfants des rues a augmenté de manière préoccupante.

23.Mme LEE demande si un débat a été engagé en vue de supprimer la discrimination culturelle qui existe entre les garçons et les filles en matière d’héritage.

24.M. LIWSKI salue les initiatives visant à favoriser la participation des enfants, notamment la célébration de la Journée internationale des enfants et la résolution de 2000 inspirée de la Convention, mais demande si ce dialogue avec les enfants et les adolescents s’est poursuivi et a donné lieu à d’autres rencontres et débats. Il aimerait savoir par ailleurs quelle suite a été donnée à la recommandation du Comité concernant la note 2 de l’article 49 de la loi pénale islamique, qui autorise l’imposition de châtiments corporels aux délinquants mineurs.

25.Mme OUEDRAOGO s’inquiète des grandes disparités qui existent dans l’enregistrement des naissances; notamment, les populations rurales sont encore ignorantes de cette pratique, les enfants des réfugiés n’ont pas été enregistrés en 2003 et les couples non mariés ont des difficultés à faire enregistrer leurs enfants. La discrimination en matière de nationalité qui vise les enfants de mère iranienne et de père étranger est également préoccupante. Enfin, la délégation pourrait indiquer si la situation des enfants qui n’ont pas accès aux services sociaux de base parce qu’ils appartiennent à une communauté religieuse non reconnue s’est améliorée.

26.Mme ALUOCH aimerait des précisions sur les critères de sélection («gozinesh») restreignant l’accès au travail de certaines minorités.

27.Le PRÉSIDENT demande si l’Iran prévoit d’adopter un plan d’action national, comme préconisé dans le document «Un monde digne des enfants». La délégation pourrait aussi fournir des précisions sur l’Organisation nationale de gestion et de planification, notamment indiquer si elle intervient dans la coordination des activités liées à l’application de la Convention.

La séance est suspendue à 11 h 20; elle est reprise à 11 h 40.

28.M. AKHOONDZADEH (République islamique d’Iran) dit que depuis l’examen de son rapport initial, l’Iran a été confronté à plusieurs défis, dont un afflux massif de réfugiés du fait des conflits en Iraq et en Afghanistan, avec tous les problèmes que cela peut poser dans les zones frontalières, mais que la période couverte par le deuxième rapport périodique a pourtant été marquée par des progrès, en particulier le développement d’un esprit de transparence, dont le dialogue avec le Comité sera l’illustration.

29.M. JAMSHIDI (République islamique d’Iran) indique que dans le cadre du «Programme de développement judiciaire» l’Iran procède depuis quelques années à une réforme de son système judiciaire, dont l’aspect le plus intéressant pour le Comité est la rédaction d’un projet de loi sur les mineurs délinquants, qui prévoit la création de tribunaux pour mineurs. Rédigé par le corps judiciaire en étroite coopération avec l’UNICEF voilà maintenant deux ans, ce texte aussi exhaustif que cohérent comprend 54 articles et vient d’être approuvé au Conseil des ministres; il ne lui reste plus maintenant qu’à être adopté par le Parlement, ce qui devrait intervenir sous peu. Aux termes de ce projet de loi, les tribunaux pour mineurs se composeront d’un juge et de deux assesseurs, dont une femme. Les juges concernés devront être mariés et avoir des enfants, posséder au moins cinq années d’expérience professionnelle et avoir suivi une formation spéciale.

30.Dans le système judiciaire, l’accent est désormais mis davantage sur le traitement des criminels et des délinquants, et c’est dans cet esprit que le nouveau projet de loi sur les mineurs délinquants prévoit qu’à tout stade de la procédure, y compris pendant et après les audiences, existera une possibilité de conciliation entre les auteurs d’un crime ou délit et les victimes. À tout moment de la procédure également, le juge aura la possibilité de suspendre ou d’arrêter les poursuites si cela est nécessaire pour mettre en place les conditions d’une bonne défense.

31.Selon ce même projet de loi, les mineurs en conflit avec la loi sont traités en fonction de leur âge, filles comme garçons. Trois groupes d’âge ont été définis à cet effet: les 9‑12 ans, les 12‑15 ans et les 15‑18 ans. Les mineurs de 9 à 12 ans ne peuvent pas être condamnés à une peine à proprement parler et font en général l’objet de rappels à la loi en présence de leurs parents, qui doivent prendre l’engagement de veiller à leur bon comportement à l’avenir, et d’entretiens avec des psychologues et travailleurs sociaux. Ils peuvent aussi, si nécessaire, être envoyés dans une institution culturelle ou dans un établissement de formation, ou encore en cure de désintoxication dans le cas des toxicomanes. Le souci principal des autorités est donc de traiter les problèmes de ces enfants et de leur éviter les endroits de perdition et les mauvaises fréquentations. Dans les cas où il n’est pas possible de s’en remettre aux parents, il peut être fait appel à une famille d’accueil.

32.Pour les 12‑15 ans, les mêmes mesures s’appliquent, ainsi que deux supplémentaires: les mineurs concernés doivent s’engager à ne plus commettre d’infraction à l’avenir et ils sont en outre susceptibles d’être traités en établissement de correction, pour une durée de trois mois à un an au maximum, selon une évaluation individualisée de la responsabilité de l’intéressé.

33.Les plus de 15 ans sont davantage responsables de leurs actes et, à ce titre, peuvent être condamnés à verser une amende ou à être placés en centre de réadaptation, où ils pourront faire l’objet d’un large éventail d’activités de correction et de programmes éducatifs, pour une durée qui n’excède généralement pas un an. Pour des actes normalement passibles d’une peine d’emprisonnement à vie ou de la peine de mort, un mineur peut être placé dans un centre de réadaptation pour une durée pouvant aller jusqu’à huit ans.

34.La peine de mort ne s’appliquera plus aux mineurs et les châtiments corporels, y compris la flagellation, et la mise à l’isolement seront interdits à l’égard des mineurs. Les audiences des tribunaux pour mineurs ne seront pas publiques et il sera interdit de divulguer l’identité des mineurs concernés. Des forces de police spéciales ont été créées pour traiter des affaires impliquant des mineurs; les policiers concernés commencent déjà à recevoir une formation spéciale.

35.Plusieurs projets sont en cours d’élaboration avec le concours de différentes organisations, dont le Ministère des affaires sociales et l’UNICEF, concernant en particulier les enfants vulnérables ou «à risque», c’est-à-dire ceux qui n’ont pas encore commis d’infraction mais dont les parents ou tuteurs ne s’occupent pas, par exemple, ou encore les mesures de substitution à la privation de liberté − en plein développement et dont les mineurs sont les premiers bénéficiaires.

36.Cette démarche se caractérise aussi par l’accent mis sur la prévention et elle s’accompagne d’efforts de formation à l’intention des magistrats, des gardiens des établissements de correction, des forces de l’ordre. À ce titre, 15 stages de formation de plusieurs jours, conçus avec l’aide de l’UNICEF, ont déjà été organisés à l’intention des fonctionnaires de police. Les stages de formation dispensés aux magistrats ont eu des retombées positives directes en termes de prise en considération des dispositions de la Convention dans les jugements. En effet, depuis sa ratification, la Convention fait partie intégrante du droit interne iranien et est juridiquement contraignante, de sorte qu’il n’est nullement besoin d’attendre l’adoption de nouvelles lois pour la mettre en œuvre sur le territoire et que ses dispositions ont d’ores et déjà été invoquées.

37.De nouvelles procédures ont par ailleurs été introduites par voie de circulaires. C’est ainsi qu’une circulaire sur la protection des enfants publiée à l’échelle nationale a porté création de bureaux d’assistance juridique sur le terrain, destinés à porter une assistance aux mineurs en conflit avec la loi. Ce sont ces mêmes bureaux, créés il y a deux ans, qui sont en charge d’une évaluation de la situation des droits de l’enfant dans le domaine judiciaire à l’échelle du pays tout entier.

38.M. YAQOOBI (République islamique d’Iran) dit que le nombre d’Iraniens scolarisés dépasse les 10 millions. Le système éducatif se divise en trois niveaux − primaire, secondaire et supérieur − dont le premier est obligatoire pour tous les Iraniens, y compris dans les zones reculées. Il arrive que des familles soient réticentes à scolariser leurs enfants, auquel cas tout est mis en œuvre pour les convaincre, en insistant bien sur la qualité de l’enseignement dispensé.

39.Divers projets éducatifs sont en cours de réalisation avec l’UNICEF, l’UNESCO, le HCR, le Fonds des Nations Unies pour la population et d’autres organisations internationales avec lesquelles l’Iran entretient de bonnes relations de coopération. Un des projets menés sous l’égide de l’UNICEF, lancé voilà trois ans, vise à renforcer l’éducation des fillettes et à mieux faire connaître leurs droits. Des réunions d’experts organisées au Ministère de l’éducation ont débouché sur l’élaboration d’un plan national d’ensemble contenant des instructions aux autres ministères et un plan pour les régions les plus défavorisées, qui vise particulièrement les fillettes. Les droits des fillettes sont un domaine dans lequel de grandes avancées peuvent déjà être notées. Ces divers plans et projets ont été présentés par l’Iran à une réunion interministérielle tenue à Istanbul en présence de Ministres de l’éducation et de représentants de l’UNESCO et pourraient être repris à leur compte par l’Iraq et l’Afghanistan. Ils font l’objet d’une évaluation contrôlée par des organismes internationaux, à laquelle participent également l’Université de Toronto et l’Université Johns Hopkins. À ces initiatives s’ajoutent des ateliers nationaux et régionaux bénéficiant de la participation de mineurs et de formateurs.

40.L’UNICEF et le Ministère de l’éducation ont publié un livre reprenant les principes de la Convention, rédigé dans une langue simple facilement accessible aux enfants, qui a été distribué dans plusieurs provinces du pays. Il est en outre prévu de traduire la Convention en farsi.

41.Le Ministère de l’éducation a également mis au point un code de conduite pour les directeurs d’école, qui interdit le recours aux châtiments corporels comme méthode disciplinaire et prévoit des sanctions à l’égard des enseignants qui ne respecteraient pas cette interdiction.

42.M. FILALI demande si les parlementaires, qui examinent actuellement le projet de loi relatif à la justice pour mineurs, ont reçu une formation aux principes consacrés par la Convention. Il lui semblerait intéressant de savoir si un mineur condamné à mort pour le meurtre d’un autre mineur peut être exécuté à la demande des parents de la victime en application de la loi du talion (qisâs) et si le projet de loi relatif à la justice pour mineurs prévoit de remplacer la peine capitale par une peine de prison à perpétuité.

43.Il serait également utile d’obtenir de plus amples informations sur la règle du prix du sang (diya), qui semble être discriminatoire à l’égard des filles, sur les arrestations massives d’enfants réfugiés libérés sous réserve que leurs parents s’engagent à rentrer dans leur pays d’origine, sur la pratique des trafiquants d’enfants qui consiste à épouser une mineure de manière à lui faire quitter légalement le territoire puis à divorcer avant de la livrer à un réseau de prostitution dans un pays tiers.

44.Enfin, il serait intéressant de savoir quelles mesures l’État a mises en place pour offrir aux enfants une protection en cas de catastrophe naturelle, notamment au cours des 72 premières heures.

45.M. AL-SHEDDI demande si le Gouvernement iranien envisage d’élargir le réseau d’établissements préscolaires à l’échelle du pays compte tenu des disparités flagrantes observées entre les régions dans ce domaine et si l’État partie tient dûment compte des objectifs de l’éducation énoncés à l’article 29 de la Convention et fait une place à l’éducation aux droits de l’homme en général et aux droits de l’enfant en particulier dans les programmes scolaires, y compris dans l’enseignement primaire.

46.Mme LEE demande comment s’explique l’augmentation du nombre d’enfants séparés de leurs parents enregistrée entre 2001 et 2003 et combien d’enfants handicapés sont scolarisés dans des établissements d’enseignement ordinaire pour l’année scolaire en cours.

47.La délégation pourrait faire parvenir au Comité un exemplaire du livre publié par le Ministère de l’éducation pour faire mieux connaître la Convention et indiquer s’il a été distribué aux élèves de l’enseignement primaire.

48.Enfin, le Comité apprécierait de savoir si l’État partie envisage de remédier au problème des enfants réfugiés, qui n’ont manifestement pas accès à l’éducation, ainsi qu’à celui des enfants qui vivent en prison aux côtés de leur mère incarcérée.

49.Mme AL THANI regrette que le rapport ne permette pas de se faire une idée plus précise de la situation des enfants handicapés dans l’État partie et demande s’il existe un organe gouvernemental chargé de centraliser toutes les actions relatives à cette question. Elle souhaite savoir si l’Iran s’est doté d’une législation destinée à protéger les handicapés contre toutes les formes de discrimination et à leur permettre de participer à tous les aspects de la vie publique grâce à des aménagements facilitant l’accès aux bâtiments publics et aux transports en commun.

50.La délégation pourrait indiquer si l’État partie a mis en œuvre un plan en faveur des enfants atteints d’un retard de croissance et des enfants cachectiques, ainsi que des programmes d’information à l’intention des jeunes sur le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles et sur les effets néfastes de la consommation de tabac, d’alcool ou de drogues.

51.M. KRAPPMANN voudrait savoir si l’État partie entend allouer davantage de ressources humaines et financières à l’enseignement préscolaire et pourquoi il retarde depuis tant d’années l’adoption de la loi tendant à prolonger la durée de la scolarité obligatoire au‑delà de la fin de l’enseignement primaire. À ce sujet, il se demande si le taux net de scolarisation annoncé par l’UNESCO (74 %) n’est pas plus représentatif de la réalité que celui qu’avance l’État partie (97 %), qui ne comptabilise manifestement que les enfants inscrits en première année et ne tient pas compte de ceux qui abandonnent leurs études avant la fin de la scolarité obligatoire.

52.La délégation pourrait donner un aperçu de la politique que mène l’État partie en faveur des enfants de réfugiés et des enfants des rues, dont le taux de scolarisation est très faible, et expliquer pourquoi un certain nombre de bahaïs se sont récemment vu refuser l’accès à l’enseignement supérieur.

53.Enfin, le Comité désirerait savoir si l’État partie envisage d’accroître le budget alloué à l’enseignement primaire et à l’enseignement secondaire et quelles sont les méthodes pédagogiques utilisées en Iran à l’heure de la société de l’information qui privilégie des méthodes d’apprentissage interactives.

54.Mme VUCKOVIC-SAHOVIC juge préoccupant le nombre d’enfants de réfugiés non accompagnés et demande pourquoi les procédures de retour sont si longues lorsque le père de l’enfant concerné n’est pas de nationalité iranienne.

55.La délégation pourrait indiquer quelles mesures l’État partie a prises pour lutter contre le trafic d’enfants afghans introduits illégalement sur le territoire iranien en vue de les faire travailler dans les rues et dans quelle mesure il est possible en Iran de poursuivre les personnes qui se livrent à ce trafic.

56.Mme OUEDRAOGO demande si le code de conduite pour les directeurs d’école est respecté dans les établissements scolaires situés en milieu rural, si un dispositif a été mis en place pour veiller à sa bonne application et si l’accent a été mis sur l’existence de mesures de correction non violentes.

57.Du fait que la mère est déchue de son autorité parentale en cas de divorce, il convient de se demander si l’État partie n’envisage pas de revoir la loi régissant cette question en vue de la mettre en conformité avec la Convention, qui en pareil cas préconise la garde partagée de l’enfant.

58.Le Comité apprécierait enfin d’obtenir des informations complémentaires sur les raisons pour lesquelles les enfants sont placés en institution, ainsi que sur le profil type de ces enfants.

59.M. LIWSKI voudrait savoir si l’État partie prévoit d’élargir la couverture des services de santé dans les régions rurales − où seuls 87 % des enfants et adolescents ont accès à des services médicaux, contre 100 % des enfants résidant dans les villes − et, dans l’affirmative, si les autorités compétentes sont conscientes de la nécessité de tenir compte des spécificités des diverses communautés et des styles de vie traditionnels dans la définition des programmes de santé.

60.La délégation pourrait aussi indiquer quels ont été les résultats de l’étude visant à déterminer le profil épidémiologique des difficultés sociales et psychologiques que rencontrent les jeunes, qui devait être entreprise dans chaque province en 2001.

61.Mme SARDENBERG demande quel est le rapport entre le projet relatif à l’organisation et au contenu de l’enseignement préscolaire, qui envisage de faire une place aux innovations scientifiques et spécialisées les plus récentes dans les programmes d’éducation et les droits de l’enfant, et pourquoi c’est à l’Association parents‑enseignants de la République islamique d’Iran qu’il incombe de mener divers programmes pédagogiques et culturels destinés à orienter et à conseiller les parents dans tout le pays.

62.Mme ORTIZ voudrait savoir quelles sont les répercussions des mariages temporaires sur les enfants qui en sont issus et quelle est la politique de l’État partie en matière d’adoption, plus précisément combien d’enfants sont adoptés chaque année et quels sont leurs droits par rapport à ceux des enfants biologiques de leurs parents d’adoption, notamment en matière successorale. Il serait également intéressant de savoir si l’Iran autorise l’adoption internationale et si l’État partie envisage de prendre des mesures de protection à l’égard des enfants afghans et iraquiens séparés de leurs parents et renvoyés dans leur pays d’origine et de modifier la législation en vue d’introduire la possibilité de délivrer aux enfants nés de mère iranienne et de père étranger un permis de séjour d’une durée plus longue à défaut de leur accorder la nationalité.

La séance est levée à 13 h 10.

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