Nations Unies

CRC/C/SR.1462

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

8 septembre 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-troisième session

Compte-rendu de la 1462 e séance (Chambre A)

Tenue au Palais Wilson, Genève, le mercredi 13 janvier 2010, à 10 heures.

Présidente:Mme Lee

Sommaire

Examen des rapports des États parties (suite)

Rapport initial de l’Estonie présenté en application du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfan t, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

La séance est ouverte à 15 h 5

Examen des rapports des États parties (suite)

Rapport initial de l’Estonie présenté en application du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/EST/1; CRC/C/OPSC/EST/Q/1 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.50/Rev.1)

1. Sur l’invitati on de la Présidente, la délégation e stonie nne prend place à la table du Comité .

2.M. Kokk (Estonie) dit que, tandis que plusieurs plans de développement ont couvert différents domaines liés aux droits et à la protection des enfants au cours des années précédentes, en 2010 a démarré l’élaboration d’un Plan de développement de la politique en faveur des enfants et des familles. Il concernera les droits de l’enfant et la protection sociale de la famille. Le Plan de développement de la lutte contre la violence a été lancé en 2009. Il est centré sur la prévention des infractions commises à l’encontre des enfants et par les enfants, la violence dans la famille et la traite des personnes. Le Ministère de la justice a coordonné son élaboration avec la participation de divers organismes gouvernementaux, organisations non gouvernementales (ONG) et forums de citoyens.

3.Depuis 2005, la lutte contre les infractions sexuelles commises à l’encontre des enfants est la priorité absolue de son pays en matière de politique criminelle. Les mesures prises à cet égard comportent l’alourdissement des peines prononcées en répression des infractions sexuelles à l’encontre d’enfants, l’élaboration d’une loi érigeant en infraction la sollicitation d’enfants à des fins sexuelles (le «grooming»), l’introduction de restrictions concernant le travail effectué avec des enfants, la prise d’ordonnances de restriction et le recours à la détention préventive le cas échéant.

4.En 2010 la police axe une bonne partie de son action sur la lutte contre les infractions commises à l’encontre des mineurs et par des mineurs. On a toujours attaché une très grande importance à faire en sorte que les procédures liées aux infractions impliquant des mineurs soient conduites rapidement et les traumatisent le moins possible. Depuis 2010 des services spéciaux de protection des enfants sont mis à disposition dans toutes les préfectures de police du pays. Les procédures pénales impliquant des enfants seront conduites par des fonctionnaires ayant suivi une formation spéciale et compétents pour s’occuper des enfants victimes d’infractions pénales. La police prend également des mesures pour aider les jeunes délinquants à se réinsérer dans la société.

5.L’expansion de la cybercriminalité, notamment l’accroissement du nombre et de la gravité des problèmes liés aux violences faites aux enfants est devenue également prioritaire pour l’action policière en 2010. Les sites Internet populaires auprès des enfants, et donc attractifs pour les personnes soupçonnées de pédophilie, sont surveillés, tout comme les sites de réseaux sociaux et ceux qui sont utilisés pour la prostitution. L’accent est placé surtout sur le travail de prévention auprès des enfants, des parents et de la société en général. En 2009, l’Union estonienne pour la protection de l’enfance, en coopération avec d’autres organismes, a demandé à s’associer au Programme de la Commission européenne visant à promouvoir une utilisation plus sûre d’Internet afin de mettre en place une permanence téléphonique permettant de signaler des contenus Internet inappropriés et un service d’assistance téléphonique pour fournir des conseils.

6.Outre ces initiatives spécifiques, plusieurs mesures mises en œuvre aident plus généralement à lutter contre la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Le gouvernement collabore avec des ONG pour encourager une parentalité positive, a mené des campagnes pour promouvoir des choix responsables concernant la santé sexuelle et s’est joint à une campagne du Conseil de l’Europe pour prévenir les châtiments corporels. Le Ministère des affaires sociales a créé un service national d’assistance téléphonique à destination des enfants ayant besoin d’aide ou de protection, qui dispense des renseignements et des conseils aux enfants et aux adultes. On s’occupe actuellement de passer d’un travail de prévention fondé sur des projets à un travail plus systématique et cohérent, comportant le recours à des pratiques fondées sur des observations factuelles, la détection et l’intervention précoces.

7. Au début de 2010, un département distinct chargé des politiques en faveur de l’enfance et de la famille sera créé au sein du Ministère des affaires sociales pour coordonner plus efficacement les politiques relatives à la protection de l’enfance et de la famille. En 2010, il se préoccupera surtout de mettre au point le Plan d’élaboration des politiques relatives à l’enfance et à la famille, d’améliorer la loi sur la protection de l’enfance, d’appliquer l’interdiction des châtiments corporels pour les enfants, de promouvoir les compétences parentales et de prévenir la violence à l’encontre des enfants.

8.On débat actuellement de la création d’un médiateur pour les enfants. Plusieurs tables rondes ont été organisées à différents niveaux entre des représentants du Parlement, des ministères, des services du Chancelier de justice et de diverses ONG.

9.Le gouvernement a signé la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains et la Convention pour la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, qu’il prévoit de ratifier. En octobre 2008, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants est venu en Estonie et a formulé des recommandations utiles, qui ont notablement contribué à une bonne partie des progrès accomplis. Son gouvernement est conscient qu’il reste beaucoup à faire et accueillera avec intérêt les observations du Comité.

10.M. Kotrane (Rapporteur pour l’Estonie) sollicite des éclaircissements sur l’organisme chargé de coordonner les mesures visant à la mise en œuvre des dispositions du Protocole facultatif. Il serait utile de savoir si un mécanisme a été mis en place pour recevoir les doléances des enfants et de leur famille concernant les violations des droits de l’enfant en général et des droits énoncés dans le Protocole facultatif en particulier.

11.Il demande si, en vertu de la législation pénale de l’État partie, la définition de la vente d’enfants inclut le fait de soumettre l’enfant à un travail forcé et de jouer le rôle d’intermédiaire pour l’adoption d’un enfant, en infraction aux instruments juridiques internationaux applicables en l’occurrence, ainsi qu’il est prévu dans l’article 3 du Protocole facultatif. Le comité serait également heureux d’avoir une explication sur les raisons pour lesquelles certaines activités relevant de la production de travaux pornographiques ne sont pas interdites aux enfants âgés de 14 à 18 ans, ainsi qu’il est indiqué en détail au paragraphe 67 du rapport initial de l’État partie.

12.Il se félicite de ce que la vente ou l’achat d’enfants par une personne morale soit constitutif d’une infraction passible de sanctions. Toutefois, on ne sait pas au juste si l’État partie a établi sa compétence pour connaître des infractions en vertu du Protocole facultatif lorsque l’auteur présumé de l’infraction est un national ou une personne qui réside habituellement sur le territoire de l’État, ou lorsque la victime est un ressortissant de cet État.

13.Il demande pourquoi les enfants témoins âgés de plus de 14 ans n’ont pas nécessairement le droit d’être entendus en présence d’un fonctionnaire de la protection de l’enfance, d’un travailleur social ou d’un psychologue.

14.M me Ortiz demande quelles dispositions ont été prises pour empêcher les personnes de jouer un rôle d’intermédiaire pour l’adoption d’enfants, en violation des instruments juridiques internationaux applicables en matière d’adoption, et si ces mesures se sont révélées efficaces. Elle souhaite également savoir quelles mesures ont été prises par l’État partie pour diffuser les dispositions du Protocole facultatif auprès des services concernés, des enfants et des familles de manière à les leur rendre facilement compréhensibles.

15.M. Puras demande quels enseignements l’État partie a tirés du cas, dont il a été largement fait état,d’un citoyen dont les activités étaient liées aux droits de l’enfant et qui a été condamné pour avoir commis des violences sexuelles contre des enfants.Il serait particulièrement utile de connaître les mesures prises par les autorités pour venir en aide aux enfants victimes dans cette affaire.

16.Il conviendrait de fournir des renseignements complémentaires sur la manière dont les groupes vulnérables ont été recensés, et dont l’État partie traite les causes fondamentales de ces infractions en vertu du Protocole facultatif. Étant donné le nombre important d’enfants institutionnalisés, il demande quelles mesures préventives sont prises pour protéger ces enfants contre les infractions en application du Protocole facultatif.

17.Il souhaite savoir quelles dispositions ont été prises pour faire en sorte que des normes élevées soient respectées et des techniques adaptées aux enfants soient appliquées dans tous les cas où l’on a affaire à des enfants victimes d’infractions. Eu égard au risque que les enfants soient doublement malmenés s’ils sont stigmatisés par les services chargés de traiter ces affaires, il l’intéresserait de connaître les progrès et les problèmes dont l’État partie peut faire état à ce sujet.

18.Il serait intéressant de savoir si l’État partie envisage de rétablir la spécialité professionnelle de psychiatrie des adolescents. D’une manière plus générale, il aimerait connaître les observations de la délégation sur les compétences de tous les professionnels qui travaillent auprès des enfants, comme la police, les procureurs, les travailleurs sociaux et les psychologues.

19.M me Villarán de la Puente demande des détails complémentaires sur les ressources humaines et budgétaires affectées à la prévention et à la répression des infractions en application du Protocole facultatif. Il serait particulièrement intéressant de savoir quelles mesures sont prises pour entraîner la police à lutter contre ces infractions au niveau local, ainsi que le recommande le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

20.M me Aidoo demande si le nouveau départementde l’enfance et de la famille, qui doit être créé au sein du Ministère des affaires sociales, sera en mesure de collaborer à la pleine application du Protocole facultatif avec d’autres départements et ministères qui, par ailleurs, pourraient être plus puissants. Deuxièmement, elle constate qu’il ne semble pas exister de mécanisme systématique de collecte et d’analyse des données relevant spécifiquement des domaines couverts par le Protocole facultatif et elle se demande si une étude a été faite sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants ou le tourisme sexuel qui vise les enfants pour permettre au gouvernement d’élaborer une stratégie. À cet égard, elle se demande si le gouvernement a établi, ou prévoit d’établir, un plan stratégique qui couvre tous les volets du Protocole facultatif.

21.M. Citarella dit que l’État partie doit faire attention à ne pas confondre la traite des êtres humain et la vente d’enfant, qui sont deux phénomènes différents. Il demande quelles dispositions préventives le gouvernement a prises pour alerter les parents et les travailleurs sociaux sur les dangers d’Internet et si la police a le pouvoir de fermer les sites Internet qui ont enfreint les règles relatives à la pornographie mettant en scène des enfants et à la prostitution des enfants.

22.M. Gurán sollicite des informations actualisées sur les plans de création d’un médiateur des enfants et d’un mécanisme de surveillance indépendant pour couvrir tous les volets du Protocole facultatif. Il insiste sur l’importance que revêt la coopération internationale pour la prévention de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants; cette coopération exigerait de bons contacts etun échange d’informations avec d’autres pays. À cet égard, il se demande quelle disposition l’Estonie, qui est à l’avant-garde dans le monde en matière d’informatisation des données, entend prendre au sujet d’un projet européen établi par la présidence suédoise de l’Union européenne pour parer aux dangers qu’Internet fait courir enfants.

23.La Présidente, prenant la parole en tant que membre du Comité, dit qu’elle souhaite lever la confusion concernant l’âge minimum du consentement pour la participation à la confection de documents érotiques. Le Protocole facultatif stipule que l’âge minimum est de 18 ans, et non l’âge minimum pour le consentement à des relations sexuelles selon la législation estonienne. En ce qui concerne les services du Chancelier de justice, elle observe qu’il n’existe pas de loi permettant spécifiquement aux enfants d’avoir accès à un mécanisme de recours. Le Comité recommande que le gouvernement mette en place un code de conduite à cet égard.

La séance est suspendue de 15 h 55 à 16 h 25 pour permettre à la délégation estonienne de préparer ses réponses aux questions du Comité.

24.M me Tikerpuu (Estonie) dit que le nouveau départementqui sera en place à la fin de 2010 sera doté un personnel de 6 fonctionnaires. La coopération et la coordination sont faciles à opérer dans un petit pays, car tous les ministères concernés suivent la stratégie nationale de protection de l’enfance. Le Ministère de la justice élabore un document stratégique sur la lutte contre la violence exercée à l’encontre des enfants, alors que les autres formes de protection relèvent du Ministère des affaires sociales. À eux deux, ces ministères couvrent tous les aspects du Protocole facultatif.

25.M. Kokk (Estonie) dit que, tandis que le Ministère de la justice est chargé de la législation pénale, le Ministère des affaires sociales est en charge de la protection de l’enfance. Il est clair qu’il y a superposition partielle des tâches, mais il convient que la législation pénale garde son caractère universel et ne soit pas divisée entre divers ministères. Quant au nouveau département, une telle expansion est un événement rare en Estonie, laquelle, pour se préparer à entrer dans la zone euro en 2011, procède surtout à des compressions du personnel de l’État. Un département de six personnes, sur un total général de 200 à 300 membres du personnel, suppose une affectation importante de ressources.

26.M me Ploom (Estonie) dit que le Protocole facultatif n’a pas donné lieu à une loi unique, mais que le Code pénal couvre toutes les infractions concernées. Le paragraphe 133 (esclavage) traite de l’infraction de travail forcé. En outre, le Ministère de la justice a déjà bien avancé l’élaboration de la loi sur la traite des êtres humains. Pour ce qui est de l’âge limite pour la participation à des spectacles à caractère sexuel, un projet de loi a été présenté au Parlement en décembre 2009, portant modification du paragraphe 177 du Code pénal (utilisation de mineurs dans la production d’œuvres pornographiques) et cette disposition sera bientôt modifiée à nouveau pour qu’y soit ajouté un paragraphe intitulé «Utilisation de mineurs dans la fabrication d’œuvres érotiques». Dans les deux paragraphes, l’âge limite sera de 18 ans, ainsi que le stipule la Convention. Certaines exceptions seront autorisées, mais cela étant, les enfants de moins de 14 ans, ou ceux âgés de moins de 18 ans qui sont particulièrement vulnérables, auront droit à une protection spéciale. Afin de pouvoir adhérer à la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, l’Estonie a également érigé en infraction la participation des mineurs à des spectacles pornographiques et érotiques. Cela a été rendu nécessaire en raison de l’évolution rapide d’Internet sur lequel on peut voir des spectacles sexuels authentiques. L’Estonie érigera également en infraction le fait d’assister en connaissance de cause à des spectacles pornographiques ou érotiques.

27.M. Kotrane (Rapporteur pour l’Estonie) apprend avec satisfaction que l’Estonie modifie sa législation. Il suggère, toutefois, que les documents dans lesquels apparaissent des enfants de moins de 14 ans fassent l’objet de sanctions plus sévères. Il observe aussi que, en vertu du Protocole facultatif, la détention de documents impliquant la participation d’enfants est également passible de sanctions et il se demande si une disposition à cet effet sera introduite par le gouvernement.

28.M me Ploom (Estonie) répond qu’il s’agit déjà d’une infraction, bien qu’il n’existe aucune disposition qui s’y réfère de manière explicite. Les tribunaux et les procureurs sont tout à fait au courant de la politique du gouvernement à cet égard. Elle ajoute que la sollicitation d’enfants à des fins sexuelles – et pas seulement en ligne – sera également érigée en infraction.

29.M. Aru (Estonie) donne un aperçu des tâches et du fonctionnement des services du Chancelier de justice et expliquequ’ils sont indépendants des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, et qu’il ne s’agit ni d’un organisme politique, ni d’un organisme chargé de l’application de la loi.

30.Le Chancelier de justice n’a pas reçu beaucoup de plaintes liées au Protocole facultatif, la majorité de ces dernières étant traitées par la police et le ministère public. Le Chancelier de justice leur fait suivre toutes les plaintes relatives à la traite des enfants ou à la prostitution des enfants.

31.La Présidente observe qu’il est inhabituel qu’un représentant du Médiateur fasse partie de la délégation de l’État partie et dit que, si les services du Chancelier de justice sont indépendants, il serait plus utile qu’ils puissent communiquer davantage d’informations critiques au Comité à titre indépendant lors de la réunion privée d’avant-session. Elle encourage vivement ces services à envoyer un rapport et un représentant à cette réunion à l’avenir.

32.M. Puras dit que le Comité a encouragé l’Estonie à créer un poste de médiateur pour les enfants et demande à la délégation de fournir des observations complémentaires surle débat qui a eu lieu sur cette question et sur les avantages et les inconvénients de cette institution.

33.M me Ortiz se dit inquiète de constater qu’en Estonie 8 % des habitants sont apatrides, ce qui les rend plus vulnérables à l’exploitation dont il est question dans le Protocole facultatif. Elle demande si l’État partie a envisagé de signer la Convention relative au statut des apatrides et si ces derniers sont plus vulnérables à l’exploitation.

34.M. Kotrane (Rapporteur pour l’Estonie)invite fermement l’État partie à créer un poste de médiateur pour les enfants. Il demande si les touristes qui se rendent en Estonie sont informés des dangers de pratiquer le tourisme sexuel et des sanctions auxquelles il donne lieu, et si le public estonien est mis au courant lorsque des personnes sont poursuivies pour ce délit. Il souhaite également avoir des statistiques sur ces poursuites. Enfin, il sollicite des informations complémentaires sur la ligne d’assistance téléphonique et sur la manière dont elle fonctionne.

35.M. Kokk (Estonie) répond que l’État partien’utilise pas le terme «apatride», préférant définir ces personnes comme des personnes n’ayant pas choisi leur nationalité. Il explique que les personnes peuvent choisir la nationalité estonienne ou russe et que celles qui n’ont pas fait leur choix ont droit à un passeport étranger. Comme ce passeport permet de se rendre plus facilement en Russie et de voyager plus facilement en Europe, certains préfèrent cela plutôt que de choisir la nationalité estonienne. Si les parents d’enfants nés en Estonie demandent pour eux la nationalité estonienne, elle leur est accordée automatiquement. Le nombre de personnes qui n’ont pas choisi leur nationalité a beaucoup diminué au fil du temps et moins de 1 000 d’entre elles sont mineures. Nous n’avons aucune preuve que les enfants apatrides soient plus vulnérables ou aient plus de problèmes que les autres enfants.

36.Il ajoute qu’ils envisageront de faire participer les services du Chancelier de justice aux réunions d’avant-session avec le Comité. La fonction publique de l’Estonie est réduite et le gouvernement se voit contraint de diminuer les dépenses publiques. Il hésite donc à créer des services supplémentaires. Toutefois, des discussions sont en cours au sujet de la création d’un poste de médiateur pour les enfants et il pense que cela se fera finalement, mais probablement pas avant deux ans.

37.M me Ploom dit qu’on ne parle pas beaucoup du tourisme sexuel dans la société estonienne. Dans le cadre du plan concerné, dans un avenir proche, on incitera les agences de tourismeà utiliser le Code mondial d’éthique du tourisme de l’Organisation mondiale du tourisme.

38.Le service d’assistance téléphonique fonctionne 24 heures sur 24 depuis un an, pour donner des conseils en estonien, en russe et en anglais. Son personnel informe la police et les municipalités locales sur les communications des enfants en danger n’ayant pas les ressources ni les pouvoirs qui leur permettent de prendre les mesures nécessaires eux-mêmes. Ce service recueille également les résultats des affaires traitées par les municipalités locales. Elle reconnaît que tout le monde, en Estonie, ne sait pas qu’il existe et ajoute que la sensibilisation à son existence est l’un des problèmes que ce projet doit résoudre. La deuxième campagne d’information du public sur le service d’assistance téléphonique vient de se terminer.

39.L’Estonie a participé aux activités du réseau de recherche EUKidsOnline, ce qui lui a permis de recueillir beaucoup d’informations sur l’utilisation d’Internet faite par les enfants. Le problème consistait à savoir que faire de ces informations. En 2008, un réseau comprenant des organismes, la police, des ONG, des ministères, des sociétés du secteur privé et des prestataires de services a été mis sur pied pour sensibiliser le public aux dangers d’Internet et également éviter le doublonnage des activités dans ce domaine. Un site Web a été créé pour offrir aux parents une formation virtuelle consacrée à la sécurité sur Internet, et d’autres activités sont organisées, telles des consultations à l’intention des enfants et des jeunes sur les risques d’Internet. Des activités de sensibilisation se dérouleront dans le cadre de la candidature de l’Estonie à l’entrée dans le programme «Safer Internet» («Pour un Internet plus sûr») de l’Union européenne. La sécurité Internet est également une des matières enseignées dans les écoles dans le cadre des technologies de l’information.

40.M me Aas dit que la policea lancé un programme spécifique de contrôle d’Internet, qui implique la surveillance des sites Web estoniens et russes sur la base de mots particuliers pour effectuer un suivi du trafic pouvant être lié à la pornographie mettant en scène des enfants. Les renseignements sont ensuite transmis aux enquêteurs. Des rapports hebdomadaires sont établis sur les données recueillies dans le cadre de ce programme et les observations des enquêteurs. Au cours de l’année pendant laquelle le programme a été exécuté au niveau national, de 10 à 15 affaires ont été instruites, toutes n’ayant pas donné lieu à une action en justice.

41.M me Villarán de la Puente demande, étant donné le petit nombre de cas qui figurent dans les statistiques fournies par l’État partie, si certains ne sont pas signalés en raison d’un manque de confiance des autorités ou d’une absence de résultats, ou si tous les cas de vente d’enfants, de prostitution des enfants et de pornographie mettant en scène des enfants ont bien fait l’objet d’une enquête judiciaire.

42.M me Aas répond qu’il est rare que les délits qui relèvent du Protocole facultatif soient signalés, mais qu’ils doivent être identifiés par la police, laquelle doit enquêter à leur sujet, par exemple en exerçant une surveillance sur Internet. Depuis 2007, le public a une grande confiance dans la police, de sorte que cette dernière reçoit quelquefois des informations sur de graves délits commis contre des enfants mais, d’une manière générale, elle doit repérer ces délits elle-même.

43.L’Estonie dispose de 4 000 policiers, dont 1 000 appartiennent à la police judiciaire; 110 policiers sont spécialisés dans les délits commis à l’encontre des enfants. Quelque 14 enquêteurs qui s’occupent exclusivement de ce type d’affaires travaillent au sein d’unités spéciales créées dans les postes de police locaux et 50 autres, dans des unités régionales, ont reçu une formation dans ce domaine. Malheureusement, l’Estonie n’a pas les moyens de disposer d’enquêteurs spécialisés dans toutes les collectivités. Les procureurs ont suivi la même formation.

44.M me Aidoo, observant que de nombreuses affaires concernent des jeunes filles et des femmes, demande si, dans la formation des policiers, il est tenu compte des sexospécificités. Elle rend hommage à l’Estonie pour l’efficacité du système d’appui aux enfants victimes et demande si les autorités ont pris des mesures pour réinsérer ces enfants dans leur famille.

45.M me Aas (Estonie) répond que cette formation n’est pas spécifiquement axée sur les questions liées aux spécificités de chaque sexe, mais qu’il en est tenu compte dans les interrogatoires des enfants et dans les contacts avec les membres de la famille de la victime. La police et les magistrats instructeurs suivent des directives relatives au traitement des mineurs, dont une section est consacrée plus particulièrement aux moyens d’aider à réinsérer les victimes dans leur famille et dans la société. Selon ces directives, la police doit informer les organismes de protection sociale et de protection de l’enfance si des enfants originaires de familles ayant des problèmes sociaux ou en situation scolaire difficile ont été victimes de délits. Lesdites directives tiennent également compte des cas dans lesquels les parents sont dans l’incapacité de reprendre leur enfant.

46.M me Tikerpuu (Estonie) dit que, en 2007, la loi a été modifiée pour que la médiation familiale soit incluse dans le service d’appui aux victimes. Le but de cette médiationest la réunification de la famille, mais un enfant victime d’abus sexuels ne peut pas être réinséré dans sa famille si l’auteur de ces abus est autre membre de ladite famille. Des dispositions sont prises en vue d’améliorer les services de réadaptation et de traitement pour les délinquants.

47.M. Kotrane (Rapporteur pour l’Estonie) dit qu’il serait utile d’avoir des informations sur la manière dont l’Estonie coopère avec les pays voisins pour poursuivre les auteurs de délits en vertu du Protocole facultatif. Il se demande si des mesures particulières sont prises à cet égard. Par exemple, l’Estonie a-t-elle conclu des accords dans ce sens?

48.M. Kokk (Estonie) répond que l’Estonie a d’excellents rapports de coopération avec les fournisseurs nationaux d’accès à Internet. Si la police découvre que des documents inappropriés sont publiés sur un site Web, elle le ferme. Des problèmes se posent avec la cybercriminalité transfrontalière. Il existe des accords, mais il est souvent très difficile d’obtenir des informations en provenance d’autres pays, notamment de la Fédération de Russie. L’Estonie a fait l’objet d’attaques informatiques lancées sur Internet en 2007, et elle a à moult reprises demandé des renseignements aux autorités russes, mais la coopération n’a pas toujours été facile.

49.M me Tikerpuu (Estonie) dit que la coopération est excellente au sein de la région balte et que l’Estonie est membre de deux groupes de travail sur les enfants à risque. Ces organismes ont pour principal objet de lutter contre l’exploitation sexuelle et les violences à l’encontre des enfants, y compris tout ce qui est lié à l’utilisation d’Internet et à la traite. Une initiative est issue de cette coopération, à savoir que les États concernés ont mis en place des contacts pour les enfants non accompagnés et victimes de la traite pour coordonner les actions destinées à traiter ces cas et améliorer l’aide offerte aux victimes. Des dispositions sont prises pour renforcer la coopération entre la police et les contacts, qui ne reçoivent pas toujours assez rapidement les renseignements sur les enfants victimes de la traite de la part des forces de l’ordre. Cela dit, ces contacts ont donné d’excellents résultats. L’Estonie collabore aussi étroitement avec Europol et Interpol, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne pour tout ce qui se rapporte au trafic d’enfants. Lorsqu’elle a intégré le programme «Safer Internet» de l’Union européenne, l’Estonie était impatiente de collaborer étroitement avec «Insafe» et INHOPE. En novembre 2009, une conférence a été organisée à Moscou sur la sécurité Internet, ce qui était un progrès, car la pornographie mettant en scène des enfants provient souvent de la Fédération de Russie.

50.M me Villarán de la Puente demande si des affaires ont été ouvertes à la suite d’infractions relevant du Protocole facultatif.

51.M me Ploom (Estonie) attire l’attention de cette intervenante sur la première page des réponses écrites de l’Estonie (CRC/C/OPSC/EST/Q/1/Add.1), où figure un tableau présentant des chiffres relatifs aux infractions commises entre 2006 et 2008 qui relèvent du Protocole facultatif.

52.M me Tikerpuu (Estonie), évoquant plusieurs questions posées sur l’adoption, dit qu’il n’a pas été fait état de cas d’adoption illicite. L’Estonie respecte scrupuleusementles dispositions de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération face à l’adoption internationale. Les enfants estoniens ne peuvent actuellement être adoptés que dans trois pays : les États-Unis, la Suède et la Finlande. Il n’y a qu’une vingtaine de cas d’adoption internationale par an; la plupart des enfants concernés sont plus âgés et souffrent de handicaps physiques. En général, le gouvernement encourage l’adoption nationale.

53.L’Estonie procède actuellement à une réforme très importante du système d’appui institutionnel dont l’objectif est la promotion des soins dans le milieu familial. Un projet est en cours d’exécution, consistant à construire de petits établissements de type familial, et des normes législatives ont été introduites pour la protection des enfants placés en établissement. Actuellement, il n’est pas possible de placer plus de huit enfants dans un foyer de type familial, chiffre qui descendra à six en 2011. Moins il y a d’enfant dans un foyer et plus il est facile de leur apporter les soins qui conviennent et prévenir les abus sexuels de la part des adultes. Le personnel de ces établissements a reçu une formation complète. Des dispositions sont prises pour améliorer la surveillance des droits de l’enfant dans ces établissements, en se fondant sur l’expérience acquise par la Norvège. En vertu du Code pénal les auteurs d’infractions sexuelles contre des enfants n’ont pas le droit de travailler dans des établissements d’accueil pour enfants.

54.M. Kotrane (Rapporteur pour l’Estonie) dit que ce dialogue constructif avec la délégation estonienne atteste de la ferme détermination de l’État partie d’appliquer les dispositions du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

55.M. Kokk (Estonie) dit que les efforts nécessaires pour lutter contre la cybercriminalité impliquant des enfants seront au cœur des préoccupations de son gouvernement pendant un certain temps encore. L’Estonie est déterminée à mettre pleinement en œuvre le Protocole facultatif, et attend avec intérêt les observations et les recommandations du Comité.

La séance est levée à 17 h 55.