Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.727

5 octobre 2001

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Vingt‑huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 727e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le 27 septembre 2001, à 10 heures.

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS DES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial d’Oman

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS DES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial d’Oman [CRC/C/78/Add.1; CRC/C/OMA/1 (liste des points à traiter); réponses écrites (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement)]

1.Sur l’invitation du Président, M me  Al ‑Barwani, M. Aideed, M me  Jaffar, M me  Moosa, M me  Al ‑Lamki, M me  Al ‑Hajri, M. Al ‑Busaidi, M. Shahdad, M. Al ‑Azri et M. Al ‑Khanjari prennent place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souligne qu’il s’agit d’un moment historique pour le Sultanat d’Oman, qui présente pour la première fois un rapport établi en vertu d’un instrument international relatif aux droits de l’homme et exprime l’espoir que cet examen marquera le début d’un dialogue constructif et fructueux avec l’État partie.

3.Mme AL‑BARWANI indique que le bilan des activités entreprises au titre de l’application de la Convention, auquel a donné lieu la préparation des réponses à la liste des points à traiter, a permis de dégager les progrès réalisés et de mettre en lumière les lacunes qui restent à combler. Elle précise d’emblée que l’âge de la majorité est fixé à 18 ans. Toutefois, pour des raisons d’ordre technique ou aux fins de l’application de la législation, différents âges sont applicables pour définir les capacités de l’enfant. Ainsi, les pédiatres ne s’occupent que des enfants de moins de 13 ans, la législation du travail comprend des dispositions relatives aux enfants de 13 à 16 ans et l’âge de la responsabilité pénale est fixé à 9 ans.

4.L’attachement du Sultanat d’Oman au bien‑être des enfants date de bien avant la ratification de la Convention, en 1996. L’État partie a toujours considéré qu’investir dans les enfants revenait à investir dans le développement durable de la nation. Cet engagement s’est traduit par l’allocation d’importantes ressources financières aux ministères de la santé, de l’éducation et des affaires sociales, du travail et de la formation professionnelle. C’est ainsi que le taux de mortalité infantile a été ramené de 118 pour 1 000 naissances en 1970 à 16,7 en 2001 et que le nombre d’enfants inscrits dans les écoles est passé de moins de 1 000 à plus d’un demi‑million pendant la même période. De plus, alors qu’en 1970 seuls les garçons étaient scolarisés, les écoles sont désormais également ouvertes aux filles.

5.Grâce à l’amélioration des services de santé, plusieurs maladies qui faisaient autrefois beaucoup de victimes parmi les enfants ont été éliminées ou sont en voie de l’être. Aucun cas de poliomyélite n’a été signalé depuis 1993. Le programme de vaccination, dont le taux de couverture est de 98 %, a été élargi à 10 maladies, au lieu des 6 habituelles; les nouvelles maladies couvertes étant l’hépatite B, la rubéole et le syndrome de rubéole congénitale (SRC) et l’haemophilus influenza B (Hib).

6.Conformément à la Loi fondamentale du Sultanat d’Oman, à l’article 40 de la Convention et à d’autres normes des Nations Unies, le Parlement s’apprête à adopter une nouvelle loi sur les mineurs, qui portera création de tribunaux pour enfants présidés par des juges spécialisés. Le projet prévoit en outre des mesures de substitution des peines privatives de liberté, ainsi que des conditions particulières de détention lorsque l’incarcération ne peut être évitée. D’importantes ressources budgétaires, et des activités de formation des personnels intéressés, seront nécessaires pour assurer la bonne application de la nouvelle législation.

7.Par ailleurs, l’État partie a mis en place, dans les établissements de santé, un nouveau dispositif pour signaler les cas de mauvais traitement et de négligence à l’égard d’enfants, dans le cadre duquel les médecins des services d’urgence portent à l’attention des services juridiques, sociaux et médicaux compétents certains des cas les moins aisément décelables de violence physique ou sexuelle. Un tel système devrait permettre de mieux appréhender l’ampleur du problème, dans le souci de le combattre plus efficacement. Les données générales dont on dispose actuellement ne sont pas encore exploitables.

8.Une commission des personnes handicapées a été créée en vue d’élaborer une stratégie nationale et un système normalisé de prestation de services et de suivi. Conscient qu’avec les progrès réalisés dans le domaine de la santé de plus en plus d’enfants survivront aux maladies mais resteront handicapés, le Gouvernement omanais s’efforcera d’allouer toutes les ressources nécessaires pour venir en aide aux intéressés.

9.L’application de la Convention ne va cependant pas sans difficultés. Si l’on peut affirmer aujourd’hui qu’aucun enfant n’est employé dans l’industrie, il reste tout de même difficile de définir l’ampleur du travail des enfants dans l’agriculture traditionnelle et les travaux domestiques. La nouvelle législation du travail devrait comprendre de nouvelles mesures de protection, en faisant passer de 13 à 16 ans l’âge minimum d’admission à l’emploi. En tout état de cause, il est déjà interdit de faire travailler de nuit et d’employer à des travaux pénibles et dangereux les jeunes de moins de 16 ans.

10.Les activités de mobilisation sociale et de sensibilisation relatives aux droits de l’enfant doivent être renforcées. Des milliers d’exemplaires de la Convention ont été distribués dans les établissements d’enseignement et de nombreuses campagnes d’information ont été lancées mais il reste encore beaucoup à faire pour assurer la plus large diffusion possible de cet instrument.

11.En préparant les réponses écrites, il est apparu clairement qu’une attention supplémentaire devait être portée aux problèmes de disponibilité, de stockage et de recherche de données. Des travaux ont donc été engagés pour constituer, à l’intérieur d’une base plus générale sur les services sociaux, une base de données relative aux enfants, qui permettra de suivre de façon fiable la situation des enfants et des femmes.

12.Constatant l’absence de coordination centrale des activités relatives à la Convention, l’État partie a décidé de réactiver le Comité omanais des droits de l’enfant. Restructuré, ce dernier a une composition à caractère interdisciplinaire et intersectoriel. En outre, le système de comptabilité nationale ne permettant pas d’isoler les dépenses engagées au titre des services sociaux destinés aux enfants par les différentes administrations, il est prévu de modifier le système de classification budgétaire. Pour conclure, la délégation omanaise tient à souligner que l’État partie entend poursuivre l’application des programmes favorisant le plein exercice de leurs droits par les enfants.

13.Le PRÉSIDENT remercie la délégation d’avoir présenté son rapport en apportant beaucoup d’informations et, surtout, de s’être véritablement attachée à répondre aux principaux points soulevés dans la liste transmise à l’État partie.

14.Mme EL GUINDI se félicite des données statistiques communiquées dans les réponses écrites car le rapport lui‑même ne contenait pas assez de renseignements de ce type, notamment en ce qui concerne l’application de la Convention dans les zones rurales et urbaines. Le rapport fait apparaître que les objectifs fixés lors du Sommet mondial ont été atteints: le taux de mortalité infantile a considérablement diminué et les activités de protection de l’enfance, ainsi que les ressources humaines nécessaires pour les mener, ont été renforcées. Toutefois, l’accent semble avoir été mis avant tout sur les soins aux enfants, en négligeant peut‑être les aspects relatifs aux droits civils et à la participation des intéressés. Il faut cependant constater que, bien qu’il ait émis un certain nombre de réserves, l’État partie a appliqué bon nombre des mesures prévues dans la Convention, mais il n’a pas entièrement intégré les dispositions de cette dernière dans sa législation.

15.En ce qui concerne les mécanismes, Mme El Guindi déplore que le rôle du Comité national pour la protection de l’enfance, créé en 1985, et celui de la Commission nationale chargée de surveiller la mise en œuvre de la Convention, créée en 1997, n’aient pas été plus clairement définis. De plus, elle se demande si ces deux organismes, qui semblent relever uniquement du Ministère des affaires sociales, sont réellement en mesure d’assurer la coordination des mesures en faveur de l’enfance prises dans le pays à tous les niveaux. Par ailleurs, elle constate que l’État partie indique certes dans son rapport que les crédits alloués à la santé et à l’éducation sont en augmentation sans pour autant préciser la part respective de ses dépenses dans le budget national, et ne présente aucune donnée désagrégée sur les services sociaux dans les zones urbaines et rurales.

16.Mme CHUTIKUL demande si le Comité national pour la protection de l’enfance comprend des représentants d’organisations non gouvernementales et si la Commission nationale chargée de surveiller la mise en œuvre de la Convention existe toujours. Elle aimerait également avoir des informations sur les structures chargées au niveau local de faire appliquer la Convention. Par ailleurs, elle voudrait savoir si le Plan d’action national en faveur des enfants, qui comprenait des mesures de protection de la mère et l’enfant, et le Plan d’action national pour la protection des femmes et des enfants, sont deux programmes distincts. Elle demande si les mesures prévues dans le plan d’action établi à la suite du Sommet mondial pour les enfants allaient au‑delà de ce que prévoyait le Sommet et si l’État partie a procédé à l’évaluation des activités menées au titre de ce programme. Rappelant que le Plan d’action avait été élaboré par quatre commissions (santé, éducation, affaires sociales et handicapés), elle demande si ces structures existent encore et quels sont leurs liens avec les mécanismes visés plus haut. Enfin, elle voudrait savoir qui a élaboré le rapport initial de l’État partie et qui sera chargé d’établir les futurs rapports périodiques.

17.Enfin, elle souhaiterait avoir des explications sur les réserves émises par l’État partie et demande où en est le processus de réexamen des réserves concernant les articles 7, 9, 21 et 30 évoqué dans les réponses écrites.

18.M. AL‑SHEDDI demande des précisions sur les rôles respectifs du Comité national pour la protection de l’enfance et de la Commission nationale chargée de la mise en œuvre de la Convention. Par ailleurs, il se félicite de la réponse apportée au sujet de la réserve relative à l’article 21 (concernant l’adoption) et demande de plus amples renseignements sur le processus de réexamen des autres réserves.

19.Mme AL‑THANI demande s’il existe une loi particulière énonçant les droits de l’enfant. En ce qui concerne le mariage, elle voudrait savoir qui détermine ce qui constitue l’«intérêt» de l’enfant dans le cas, évoqué au paragraphe 49 du rapport, où «le juge autorise le mariage d’une personne de moins de 18 ans s’il est établi que le mariage est conforme à l’intérêt de cette personne». Par ailleurs, elle aimerait savoir si Oman envisage de modifier l’âge légal minimum d’admission à l’emploi (actuellement fixé à 13 ans), ainsi que l’âge de la majorité pénale. De même, considérant que les peines d’emprisonnement peuvent avoir des effets très préjudiciables sur le développement de l’enfant, elle demande si des peines de substitution sont prévues et si les conditions de détention des mineurs sont les mêmes que celles des adultes.

20.M. CITARELLA voudrait connaître le statut de la Convention au regard de la législation nationale. Il aimerait savoir s’il est possible d’invoquer cet instrument devant un tribunal et s’il arrive que des décisions administratives soient motivées par ses dispositions. Par ailleurs, il souhaiterait avoir des précisions sur la réserve concernant le paragraphe 4 de l’article 9, notamment sur le sens des termes «ordre public» et, de façon plus générale, sur le processus de réexamen des réserves. En ce qui concerne la définition de l’enfant, il fait remarquer que la scolarité est obligatoire jusqu’à 12 ans mais que les enfants ne peuvent travailler qu’à partir de l’âge de 13 ans. Constatant qu’en revanche l’âge minimum requis pour témoigner en justice est fixé à 18 ans, il demande ce qui motive toutes ces disparités relatives aux capacités de l’enfant.

21.Mme OUEDRAOGO souhaiterait savoir quelles mesures ont été prises en vue de diffuser la Convention le plus largement possible auprès du public et quelle est la portée actuelle des activités de formation des professionnels aux questions relatives aux droits de l’enfant. Elle demande comment les enfants sont informés de leurs droits et encouragés à participer aux activités les concernant. Existe‑t‑il des mécanismes leur permettant de faire connaître leur avis sur les questions qui les intéressent directement? Par ailleurs, les enfants victimes de violations ont‑ils accès à un mécanisme de plainte et peuvent‑ils bénéficier d’une assistance juridique?

22.Mme Ouedraogo souhaiterait également des précisions sur la composition et le rôle du Comité omanais des droits de l’enfant. Faisant observer que les données figurant dans le rapport portent essentiellement sur la survie et le développement de l’enfant, elle demande s’il est prévu de collecter aussi des données se rapportant aux autres questions couvertes par la Convention. Si, comme semble l’indiquer le rapport, il n’existe pas d’institutions spécifiques pour les droits de l’homme, à travers quelle structure les enfants sont‑ils encouragés à exercer leurs droits?

23.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ demande des précisions sur le fonctionnement des deux organes s’occupant des questions relatives à l’enfance. Ceux‑ci ont‑ils mis sur pied des stratégies ciblées et se sont‑ils fixé des objectifs assortis d’échéances ou de budgets précis? Par ailleurs, dans quelle mesure la Convention est‑elle prise en compte lors de l’élaboration de nouvelles lois?

24.Le PRÉSIDENT s’interroge sur les incidences de l’évolution démographique et socioéconomique actuelle du pays. Rappelant que la population d’Oman devrait doubler d’ici 2015 et que l’espérance de vie continuera certainement d’augmenter étant donné la qualité du système de santé national, il fait observer que les besoins des enfants risquent de passer progressivement au deuxième plan alors qu’une attention accrue sera accordée à ceux des personnes âgées. Vu la proportion très importante de travailleurs étrangers dans la population active, les jeunes risquent en outre d’être privés de possibilités d’emploi. Dans ce contexte, le Gouvernement a‑t‑il mis sur pied une stratégie à moyen terme visant à s’assurer que les enfants nés aujourd’hui seront non seulement en bonne santé et bien éduqués mais pourront également espérer trouver du travail dans le pays?

La séance est suspendue à 10 h 55; elle est reprise à 11 h 10.

25.Mme AL‑BARWANI (Oman) précise qu’il existe actuellement deux comités s’occupant des questions relatives à l’enfance, dont les mandats sont complémentaires. Le premier, créé en 1985 et reconstitué en 1997, après la ratification de la Convention par Oman, est le Comité national pour la protection de l’enfance; il dépend du Ministère des affaires sociales et du travail; et a pour mission d’élaborer des politiques et des programmes, dont l’exécution est ensuite entièrement confiée aux différents acteurs concernés. Le second est la Commission spécifiquement chargée de la mise en œuvre de la Convention. Elle mène des activités concrètes et fait rapport au Comité national.

26.De nombreuses mesures ont été prises en vue de diffuser largement la Convention relative aux droits de l’enfant. Des exemplaires en arabe ont été envoyés dans les écoles, où des débats se sont tenus autour des thèmes de la Convention. Des ateliers ont été organisés et des brochures ont été publiées. Les associations féminines ont également joué un rôle important en matière de sensibilisation aux droits de l’enfant. Cela étant, l’impact de ces mesures n’a pas encore pu être mesuré. C’est pourquoi un projet pilote reposant sur deux questionnaires destinés respectivement au grand public et aux fonctionnaires et professionnels de l’enfance est actuellement mis sur pied en vue d’évaluer les résultats obtenus sur ce plan.

27.Le Ministère des affaires sociales et le Ministère de la santé disposent d’un système de bureaux décentralisés. Ces centres régionaux et ruraux ont reçu des exemplaires de la Convention et leurs principaux membres ont pu participer à des ateliers sur les droits de l’enfant. Des formateurs ont en outre été formés afin de pouvoir travailler directement au niveau local.

28.Le rapport présenté au Comité a été élaboré par une commission intersectorielle, en consultation avec différents ministères. Une première version a été établie puis transmise à ces derniers pour observations, avant d’être débattue lors d’une réunion générale. Le texte a été modifié en fonction des avis recueillis puis revu ultérieurement pour corriger certaines erreurs ou procéder à des mises à jour. Le document dont est saisi le Comité est toujours considéré comme un projet dans la mesure où certaines modifications pourront encore y être apportées à l’issue de la présente réunion. Une fois finalisé, le rapport sera diffusé auprès de tous les acteurs concernés, des établissements scolaires et du grand public (notamment par l’intermédiaire des associations féminines).

29.La Convention relative aux droits de l’enfant est effectivement le seul instrument international relatif aux droits de l’homme ratifié par Oman. Le Gouvernement étudie toutefois actuellement la possibilité de ratifier d’autres conventions, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

30.Le Gouvernement omanais a toujours accordé une attention particulière au développement de l’enfant et la mise en valeur des ressources humaines constitue depuis longtemps une de ses priorités. C’est pourquoi il est peu probable que les changements démographiques et socioéconomiques actuels entraînent une réorientation des politiques susceptible d’avoir des incidences négatives sur la situation des enfants et des jeunes. Il sera néanmoins utile de se pencher sur cette question avant l’adoption du prochain plan quinquennal. Le Gouvernement a déjà pris diverses mesures en vue de modifier la structure du marché du travail de façon à accroître les possibilités d’emploi pour les Omanais. Ainsi, une très large majorité des personnes travaillant dans la police et l’enseignement, par exemple, est aujourd’hui de nationalité omanaise. Le processus est plus lent pour les professions médicales en raison de la longueur des études de médecine mais il n’en reste pas moins bien engagé.

31.Un mécanisme intersectoriel a été mis en place très récemment en vue de traiter les plaintes concernant les mauvais traitements à enfants. Celui‑ci fait intervenir non seulement les médecins (qui sont le plus souvent ceux qui signalent les cas) et la police mais aussi des travailleurs sociaux, des conseillers ou encore des fonctionnaires du Ministère de l’éducation. Il n’existe pas à Oman de loi spécifique relative aux mauvais traitements à enfants mais tous les cas signalés, à ce jour peu nombreux, sont suivis d’une action des autorités administratives ou judiciaires. Plusieurs affaires ont été portées devant les tribunaux, où le témoignage des enfants victimes a pu être entendu. Dans le cas de violences subies à l’école, les faits sont tout d’abord signalés au directeur de l’établissement qui les porte à l’attention du Ministère de l’éducation. Après examen, ce dernier décide de la sanction appropriée, qui peut aller d’un simple blâme à un licenciement, voire un procès.

32.Conscient de l’insuffisance des statistiques disponibles relatives aux enfants, le Gouvernement a entrepris de mettre en place une base de données centralisée. Plusieurs ministères disposent déjà de leur propre base mais les données circulent peu et restent difficiles d’accès. C’est pourquoi un projet a été mis sur pied avec l’appui de l’UNICEF en vue de commencer à compiler ces données et à en collecter de nouvelles dès le début 2002.

33.Très peu de dispositions ont été prises en vue de réviser les lois en vigueur pour y intégrer les principes de la Convention. L’une des tâches confiées à la Commission pour les droits de l’enfant est précisément de déterminer quelles dispositions législatives ne sont pas conformes à la Convention et d’étudier les moyens de modifier la législation en conséquence, avec le concours des ministères concernés. À ce stade, les ONG ne sont pas encore représentées dans les deux organes s’occupant des questions relatives à l’enfance mais des propositions ont récemment été faites en vue de les inclure. Ainsi, un décret ministériel visant à permettre à la seule ONG qui travaille directement avec les enfants dans le pays (au service des enfants handicapés) de devenir membre de la Commission pour les droits de l’enfant doit être publié très prochainement.

34.Mme AL‑LAMKI (Oman) confirme que l’âge minimum du mariage est de 18 ans, pour les hommes comme pour les femmes. En vertu du droit islamique, toute femme doit obtenir l’approbation de son père ou de son représentant légal pour se marier, et ce quel que soit son âge. Si ce dernier refuse le mariage sans avancer de raison valable, elle peut saisir la justice afin de faire valider l’union. Une telle procédure n’est aucunement liée au fait qu’elle ait atteint ou non la majorité.

35.Avant la ratification de la Convention, son texte a été communiqué aux différents ministères, qui ont chacun formulé des réserves. Si le Sultanat d’Oman a émis une réserve au sujet de l’adoption, c’est qu’en vertu de cette institution l’enfant adopté prend le nom de l’adoptant et a des droits sur son patrimoine, principes interdits par la charia qui reconnaît en revanche la kafalah comme protection de remplacement, grâce à laquelle un enfant abandonné ou orphelin peut être pris en charge par une famille mais conserve son nom d’origine, s’il est connu, et ne peut prétendre à hériter de sa famille d’accueil. Enfin, le Comité national pour la protection de l’enfance a demandé à ce que des experts en droit réexaminent les réserves; un complément d’information à ce sujet sera fourni dans le prochain rapport périodique.

36.Dans le domaine pénal, il n’est pas possible de condamner un enfant de moins de 13 ans à une peine d’emprisonnement. Entre 13 et 15 ans, le délinquant juvénile peut être placé dans une maison de redressement, et entre 15 ans et l’âge de la majorité, il peut être condamné à une peine de prison, mais pas à la réclusion à perpétuité ni à la peine capitale. La loi sur les conditions d’emprisonnement, dispose que les détenus mineurs sont séparés des adultes. Les mineurs font en outre l’objet de mesures spéciales puisqu’ils peuvent poursuivre leur scolarité en prison: le Ministère de l’éducation se charge d’organiser des cours et des examens et délivre aux mineurs incarcérés un certificat de formation, qui ne porte aucune mention du lieu de l’apprentissage. Des activités récréatives sont également prévues, comme le football ou la télévision. Le projet de loi sur la justice pour mineurs devrait changer les choses puisqu’il préfère le placement en maison de redressement à l’incarcération.

37.Mme AL‑BARWANI (Oman) indique que le Sultanat d’Oman a fait tout son possible pour décentraliser les services afin d’en faire bénéficier les groupes de population vivant dans des zones reculées du pays et dans les régions montagneuses. Le Ministère de la santé déploie des moyens considérables pour desservir les populations même les plus éloignées par le biais d’équipes médicales itinérantes, voire de transferts de médecins en hélicoptère. Des efforts sont également déployés par le Ministère de l’éducation, qui a organisé un système de car de ramassage scolaire. De plus, pour réduire les dépenses allouées à l’éducation et garantir l’enseignement pour tous, Oman a opté pour la construction d’écoles mixtes dans les zones reculées, privilégiant ainsi l’enseignement par rapport à des traditions culturelles, généralement profondément ancrées dans les mentalités. Lorsque les tribus regroupent tous les enfants dans un même lieu, ce sont les professeurs qui se déplacent. Le Ministère des affaires sociales a employé des méthodes similaires pour garantir la fourniture de services sociaux aux populations isolées.

38.Mme EL‑GUINDI souhaite savoir s’il existe des quartiers réservés aux mineurs dans les prisons afin de séparer les jeunes délinquants des détenus adultes.

39.Si la législation omanaise consacre l’égalité entre hommes et femmes et ne fait aucune distinction fondée sur le sexe, il n’en est pas de même dans la pratique, les traditions ayant souvent plus de poids que les lois écrites. Le Gouvernement a‑t‑il pris des mesures pour contrecarrer les traditions qui nuisent souvent au développement de la femme, notamment dans le domaine de l’éducation et du sport.

40.Un certain nombre de questions se posent en matière de citoyenneté: si toute personne qui naît de parents omanais acquiert la nationalité omanaise, qu’en est‑il des enfants qui naissent de parents inconnus, ou d’une mère étrangère et d’un père omanais? Jouissent‑ils du droit à la nationalité? En outre, les travailleurs étrangers qui résident de manière permanente à Oman peuvent‑ils demander la nationalité omanaise?

41.Selon des sources dignes de foi, certaines écoles semblent autoriser les châtiments corporels, ce qui aurait pour résultat d’entamer la confiance de l’enfant et de le dissuader d’exprimer son opinion. Il serait bon qu’Oman prenne des mesures pour remédier à cette situation. Une loi visant à contrôler l’activité des ONG a‑t‑elle été adoptée et, dans l’affirmative, les autorités y ont‑elles largement recours? Enfin, quel statut les enfants ayant reçu une protection au titre de la kafalah ont‑ils au sein de la société une fois adultes?

42.Mme CHUTIKUL fait remarquer que si Oman a instauré l’enseignement gratuit pour tous, aucune loi ne l’a rendu obligatoire. De ce fait, Oman ne peut affirmer que tous les enfants d’âge scolaire sont effectivement scolarisés, d’autant que certains indicateurs tendent à démontrer le contraire. Qu’advient‑il des enfants qui ne vont pas à l’école?

43.Dans le domaine de la violence dont sont victimes les enfants, y compris des violences sexuelles, quelles mesures préventives et de réadaptation sont prévues à la fois pour la victime et pour l’agresseur?

44.Pourquoi un enfant né de mère omanaise et de père étranger n’acquière‑t‑il pas la nationalité omanaise? Les autorités entendent‑elles de cette façon dissuader les femmes omanaises d’épouser des étrangers, considérant que la descendance est assurée par le père? Pourquoi ne pas placer les deux parents sur un pied d’égalité dans ce domaine? De la même façon, qu’est‑ce qui justifie que les enfants omanais n’aient pas le droit de fréquenter les écoles des communautés étrangères dans le pays, alors qu’il arrive souvent que des jeunes poursuivent leurs études supérieures à l’étranger?

45.M. CITARELLA regrette que le rapport, précis sur le plan théorique, ne donne pas davantage de données factuelles. Qu’en est‑il réellement de la mise en œuvre de la Convention? Si la Loi fondamentale interdit toute discrimination fondée sur le sexe, pareille discrimination n’existe‑t‑elle pas dans les faits? Les enfants des immigrants ont‑ils accès aux services sociaux de base, et notamment aux services de santé et à l’éducation? Qu’en est‑il des enfants nés hors mariage? Les uns comme les autres sont‑ils enregistrés auprès de l’officier de l’état civil et peuvent‑ils obtenir la nationalité omanaise? Quelle est la situation réelle en matière de châtiments corporels au sein de la famille ou de l’école?

46.Mme AL‑THANI constate que le paragraphe 49 du rapport stipule que conformément à l’article 10 de la loi sur le statut personnel, le juge peut autoriser le mariage d’une personne de moins de 18 ans. La délégation peut‑elle fournir davantage de précisions à ce sujet? En matière de discrimination, des terrains de sports sont‑ils réservés à l’usage exclusif des femmes? Les enfants nés de parents inconnus sont‑ils enregistrés à l’état civil? Peuvent‑ils recevoir une protection au titre de la kafalah? Existe‑t‑il des institutions chargées de les recueillir?

47.Les données sur le nombre d’agressions sexuelles ou de violences perpétrées contre les enfants faisant gravement défaut dans les pays arabes, le Sultanat d’Oman a‑t‑il l’intention de participer à la Conférence internationale sur le sujet qui se tiendra à Bahreïn en octobre 2001.

48.Mme OUEDRAOGO estime qu’il n’est pas suffisant de distribuer la Convention dans les écoles et qu’il conviendrait d’intégrer l’éducation aux droits de l’homme, et a fortiori aux droits de l’enfant, dans les programmes scolaires.

49.La réforme envisagée de la législation omanaise prévoit‑elle des dispositions en vue de faciliter l’enregistrement des enfants nés hors mariage, qui sont souvent abandonnés par la mère, et de leur conférer des droits civils au même titre que les autres enfants? L’enregistrement des naissances pose de nombreux problèmes: dans les zones très reculées, c’est aux services de santé que revient cette tâche; qu’assure l’enregistrement des enfants étrangers et réfugiés?

50.Enfin, certaines familles n’ont pas pu bénéficier du programme de lutte contre la pauvreté car elles se trouvaient trop isolées. En outre, l’appui dont bénéficiaient certaines familles leur a été retiré avant qu’elles ne soient réellement devenues autonomes, ce qui les a fragilisées, et risque de se répercuter sur l’enfant. Sur quels critères les services compétents évaluent‑ils qu’il est opportun de mettre un terme au programme?

51.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ se félicite que l’intérêt supérieur de l’enfant soit le principe fondamental qui sous‑tend la plupart des politiques et des programmes concernant la santé et le bien‑être des enfants. Elle estime que l’intérêt supérieur de l’enfant devrait présider à toutes les décisions intéressant les enfants et souhaiterait savoir s’il en est tenu compte lors de l’élaboration du budget et dans le cadre de la politique d’omanisation.

52.M. AL‑SHEDDI dit que la kafalah de droit islamique est une protection de remplacement qui diffère de l’adoption et que si les rédacteurs de la Convention en ont fait mention à l’article 21 c’était pour éviter que certains pays islamiques ne formulent des réserves à propos de cet article. Il espère que le débat sur des différentes formes de protection de remplacement incitera l’État partie à retirer la réserve qu’il a formulée à propos de cet article.

53.Tout enfant qui n’a pas été enregistré à sa naissance risque par la suite de ne pas bénéficier de certains avantages et de certaines prestations. L’enregistrement à la naissance étant un droit de l’enfant, même d’après la charia, il conviendrait que le Gouvernement omanais mette tout en œuvre pour que tous les enfants nés à Oman soient enregistrés à leur naissance.

54.Mme EL GUINDI relève qu’aux termes de l’article 244 du Code pénal, toute femme qui aura volontairement interrompu sa grossesse sera punie d’une peine d’emprisonnement de trois mois à trois ans. Or on sait qu’à Oman si le père refuse de reconnaître son enfant la mère fera généralement de même et l’abandonnera. Cet enfant sera rejeté par la société, ne pourra pas être adopté et se heurtera à de nombreuses difficultés tout au long de son existence. Dans ces conditions, ne serait‑il pas préférable d’autoriser l’avortement?

55.Le PRÉSIDENT, prenant la parole en sa qualité d’expert, souhaiterait savoir si en cas de séparation des parents, la garde de l’enfant est confiée systématiquement au père ou à la mère ou si dans sa décision le juge tient compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. S’agissant des enfants nés hors mariage, il est pour le moins surprenant que le père n’ait pas l’obligation d’aider financièrement la mère lorsque celle‑ci s’occupe seule de l’enfant. En effet l’enfant n’a pas à être puni pour des actes commis par des adultes. Enfin, il serait intéressant d’avoir des précisions sur le sort des enfants nés de parents inconnus.

La séance est suspendue à 12 h 30, elle est reprise à 12 h 40.

56.Mme AL‑BARWANI (Oman) dit qu’Oman sera représenté par quatre personnes à la Conférence sur la violence contre les enfants qui se tiendra à Bahreïn. Les autorités espèrent que cette conférence sera l’occasion d’ouvrir un débat public, à Oman, sur la maltraitance d’enfants et sur la nécessité de signaler de tels cas. Pour mieux connaître ce problème, dont les Omanais n’aiment pas parler, on a récemment réalisé une étude pilote portant sur une soixantaine de familles d’où il ressort que la sévérité des châtiments corporels est inversement proportionnelle au niveau d’instruction des parents. Il conviendrait de mener une étude plus approfondie sur cette question.

57.Il existe une loi qui réglemente les organisations de la société civile et les ONG. Elle a été récemment modifiée afin de donner une liberté de manœuvre plus grande à ces organisations, de faciliter leur création et d’encourager la population à participer à leurs activités.

58.Mme AL‑LAMKI (Oman) indique que d’après la loi sur le statut personnel, lorsque les parents se séparent, le juge doit prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant et confier la garde de ce dernier à la personne la plus apte à le protéger et à l’élever. Cela dit, le juge donne généralement la préférence à la mère. Le mariage des jeunes filles de moins de 18 ans n’est possible que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles. Par exemple, si une jeune fille de moins de 18 ans est enceinte, le juge peut ordonner le mariage. Quant à l’avortement, il est interdit à Oman. L’enfant qui naît de père inconnu ou que son père refuse de reconnaître (encore faut‑il prouver que cette personne est bien son père) n’est pas rejeté par l’État. Si sa mère n’a pas les moyens de subvenir à ses besoins, il est placé dans une institution qui relève du Ministère des affaires sociales et qui prend soin de lui.

59.S’agissant de la justice pour mineurs, un enfant de moins de 13 ans qui a commis une infraction ne peut être mis en prison. Les autorités le remettent à son père ou à la personne qui en a la charge et qui doit s’engager à veiller sur lui. En cas de manquement à son devoir, cette personne peut être accusée de négligence ou d’abandon.

60.S’agissant de la nationalité, le principe de base est que l’enfant acquiert la nationalité de son père. Par conséquent, un enfant né de mère omanaise et de père étranger n’acquiert pas la nationalité omanaise. Toutefois, si ses parents divorcent et que son père quitte Oman ou encore si son père meurt, l’enfant peut, à l’âge de 18 ans, demander la nationalité omanaise et, en général, l’obtient. Toutefois, est également Omanais tout enfant né de mère omanaise et de père inconnu, de parents inconnus ou de mère omanaise et de père apatride. Par contre, un enfant né de mère étrangère et de père étranger ou inconnu ne peut pas obtenir la nationalité omanaise.

61.M. SHAHDAD (Oman) dit que les jeunes filles peuvent faire du sport à l’école et participer à des compétitions sportives mais que ces activités ne sont mixtes qu’au niveau primaire. Un enseignant qui exerce une violence physique sur un élève peut être suspendu de ses fonctions et déféré devant la justice pénale selon la gravité de la faute.

62.Les enfants omanais ne peuvent fréquenter les écoles étrangères car l’enseignement y est dispensé dans une langue étrangère et le contenu des programmes est déterminé par les autorités dont relèvent ces écoles et non pas par les autorités omanaises. Par contre, les enfants omanais peuvent s’inscrire dans des écoles privées omanaises qui sont au nombre de 165. En outre, un certain nombre d’étudiants omanais sont envoyés à l’étranger pour y faire des études supérieures. Le nombre d’enfants scolarisés est passé de 90 000 en 1970 à un demi‑million aujourd’hui. Étant donné le taux très élevé de scolarisation, il n’est pas nécessaire d’adopter une loi sur l’obligation scolaire. Il convient également d’indiquer que l’enseignement primaire est gratuit.

La séance est levée à 13 heures.

-----