NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.103226 mai 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trente-neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1032e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 20 mai 2005, à 10 heures

Président: M. DOEK

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique du Népal

La séance est ouverte à 10 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Népal (CRC/C/65/Add.30; HRI/CORE/1/Add.42; CRC/C/Q/NPL/2 (liste des points à traiter); CRC/C/RESP/88 (réponses écrites du Gouvernement népalais, disponibles en anglais seulement)).

1. Sur l’invitation du Président, la délégation népalaise prend place à la table du Comité.

2.M. JOSHI (Népal) dit que son pays, qui a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant en 1990, a pris de nombreuses mesures d’ordre juridique, institutionnel et administratif pour lui donner effet, parmi lesquelles la loi de 1992 sur l’enfance – en passe d’être modifiée pour mieux répondre aux situations nouvelles auxquelles sont confrontés les enfants − et la loi de 1999 concernant le travail des enfants, l’adoption d’un plan national d’action en faveur de l’enfance (2005-2015), la mise en œuvre d’une campagne visant à promouvoir l’accès à l’éducation pour tous et la mise en route de la procédure de ratification des deux Protocoles facultatifs à la Convention.

3.Pour mieux s’acquitter des obligations lui incombant en vertu de la Convention, le Népal a opté pour une approche holistique associant tous les acteurs qui œuvrent à améliorer la situation des enfants népalais – agences gouvernementales, institutions des Nations Unies, ONG et autres organismes locaux – en intervenant dans des domaines aussi variés que la santé et la nutrition, l’éducation et la formation, le travail des enfants, la lutte contre les abus sexuels, contre l’exploitation et contre la traite ou encore la réadaptation des enfants handicapés.

4.Parmi les grandes avancées d’ordre institutionnel figure la création du Ministère de la femme, de l’enfant et de la protection sociale, de chambres pour mineurs dans les 75 tribunaux de district, du Conseil central pour la protection de l’enfance, de la Commission nationale des droits de l’homme, de la Commission pour les Dalits (Intouchables) et de la Commission de la femme.

5.Ces diverses mesures ont permis de promouvoir et protéger davantage les droits de l’enfant, mais des carences dans la formulation des politiques et la mise en œuvre des programmes, l’instabilité politique, les conditions de sécurité ou encore la rareté des ressources sont autant de facteurs qui freinent l’application pleine et entière de la Convention. Le Gouvernement népalais entend s’employer à l’avenir à faire une place aux questions relatives aux droits de l’enfant dans les politiques de développement national, résorber les inégalités entre garçons et filles et entre zones rurales et zones urbaines en matière d’accès aux services de santé de base et à l’éducation, assurer l’accès universel à un enseignement primaire et à des services de santé de qualité, lutter contre la mortalité néonatale, appliquer efficacement les lois en vigueur relatives à l’enfance, réduire l’incidence du travail des enfants et des autres formes d’exploitation, pallier les effets de l’insurrection maoïste sur les enfants et les femmes et réinsérer les enfants déplacés par le conflit armé ou encore les enfants victimes de catastrophes naturelles.

6.Le rapport à l’examen est présenté dans un contexte particulier puisque le Népal est confronté depuis neuf ans à la violence et à des actes terroristes perpétrés par les insurgés, qui ont sapé les droits et libertés fondamentales de la population. Les sans-abri, les orphelins et les veuves sont toujours plus nombreux et les menaces, actes d’intimidation et enlèvements monnaie courante. Les insurgés enrôlent de force un grand nombre de mineurs et leur interdisent ainsi d’exercer leurs droits à l’éducation et à la santé et d’autres droits fondamentaux.

7.Face à l’ampleur de l’insurrection, l’État n’a eu d’autre choix que de décréter l’état d’urgence pour sauvegarder la sécurité de la Nation et alléger les souffrances de la population. La relative stabilisation de la situation a permis de le lever ultérieurement, conformément à la Constitution, et tous les droits et libertés ont été rétablis. Le Gouvernement s’efforce désormais de créer les conditions propices au retour de la démocratie, comme l’atteste l’organisation en fin d’année d’élections municipales, qui constitueront la première étape vers la consolidation d’un édifice démocratique pluraliste. Le Népal a en outre signé avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme un mémorandum d’accord prévoyant l’ouverture à Katmandou d’un bureau du Haut-Commissariat, ce qui témoigne de son attachement aux droits de l’homme.

8.Mme SMITH se félicite de la qualité du deuxième rapport de l’État partie, rédigé conformément aux directives du Comité, ainsi que des réponses écrites qui fournissent des informations actualisées sur la situation dans le pays.

9.Elle accueille avec satisfaction l’adoption de nouveaux textes législatifs substituant aux peines d’emprisonnement des mineurs des travaux d’intérêt général ou un placement prolongé en maison de correction, ainsi que de l’arrêt de la Cour suprême qui a invalidé une disposition de la loi sur l’enfance autorisant le recours aux châtiments corporels.

10.Le Gouvernement népalais est tenu d’assurer la protection des enfants en toutes circonstances, mais la guerre civile n’est pas l’unique facteur entravant l’application de l’article 6 consacrant le principe du droit à la vie car la pauvreté, le faible niveau de santé sont chaque année responsables d’un grand nombre de morts venant s’ajouter à celles que provoquent les mines terrestres et autres explosifs utilisés par les parties en conflit.

11.Le Comité aimerait savoir si le programme de prise en charge des maladies de l’enfance et de nutrition mis en œuvre en 2002‑2003 a été prolongé et continue de porter ses fruits et quels sont les résultats des programmes visant à combattre la diarrhée et la déshydratation. Il faudrait également savoir s’il est vrai qu’en raison du conflit, les ONG et certains hauts responsables gouvernementaux n’ont plus accès à plusieurs parties du pays et donc à leurs habitants et, dans l’affirmative, quel est le nombre d’enfants concernés et quelle est l’efficacité du programme d’enregistrement des personnes déplacées à l’intérieur du territoire.

12.Il serait en outre utile de savoir si le mandat de la Commission nationale népalaise des droits de l’homme a été reconduit à son terme, en mai 2005, et si le Bureau en charge de l’enfance dont la Commission s’est dotée en novembre 2004 poursuit efficacement son action.

13.Des informations supplémentaires sur le niveau actuel de l’aide internationale en faveur du Népal et sur les activités des ONG et des organismes du secteur privé seraient les bienvenues. La délégation pourrait en outre confirmer ou infirmer les informations selon lesquelles les forces gouvernementales utiliseraient des enfants comme espions ou messagers, décrire les mesures prises par le Gouvernement pour protéger les enfants enrôlés de force par les maoïstes, expliquer quel sort leur est réservé quand ils sont faits prisonniers par les forces gouvernementales et, dans le climat d’impunité qui règne dans le pays, quelles mesures ont été prises pour prévenir les massacres, les viols et les actes de torture et traduire leurs auteurs en justice.

14.M. SIDDIQUI demande quel est le montant de l’enveloppe budgétaire affectée aux services sociaux entre 2000 et 2005 et quel pourcentage du budget de l’enseignement primaire a été consacré à la construction de nouvelles écoles, à l’achat de manuels scolaires, à l’attribution de bourses à des élèves dalits et à la définition des programmes. Il serait souhaitable que l’État partie communique dans son prochain rapport des données statistiques sur la ventilation sectorielle du budget consacré à l’enfance.

15.La délégation pourrait fournir des précisions sur les actes de discrimination visant les enfants dalits et les petites filles, en exposer l’ampleur et la nature et indiquer s’ils tendent à régresser. Il serait à ce propos utile de savoir si les actions menées par le Comité chargé des questions propres aux groupes ethniques, à la communauté dalit et aux communautés autochtones, ainsi que ceux de la Commission de haut niveau pour les Dalits ont porté leurs fruits et quels ont été les résultats du programme de réforme sociale en huit points présenté par le Premier Ministre au Parlement en 2001. Il serait aussi utile de disposer de statistiques récentes sur le nombre d’enfants dalits bénéficiaires d’une bourse d’études, sur le degré d’instruction des boursiers et sur la mesure dans laquelle ces bourses tendent à atténuer cette discrimination.

16.La délégation pourrait aussi indiquer si des textes de loi visant à interdire le système de la dot ont été adoptés, car cette pratique débouche souvent sur des violences physiques à l’égard de la jeune épouse, et préciser si la traite des femmes et des petites filles à des fins de prostitution tend à régresser.

17.Le Comité aimerait en outre savoir si les enfants nés sur le territoire du Népal d’une mère népalaise et d’un père étranger continuent de se voir refuser la nationalité népalaise et si le Gouvernement s’est fixé une date butoir pour instaurer l’égalité entre les sexes en matière de scolarisation. Enfin, il serait intéressant de savoir si les petits garçons et les petites filles sont victimes dans les mêmes proportions de la malnutrition et du travail des enfants.

18.Mme KHATTAB demande des informations supplémentaires sur la discrimination de facto dont semblent victimes les enfants dalits, les enfants handicapés, les enfants des rues, les enfants de réfugiés et les enfants demandeurs d’asile, les enfants autochtones et les enfants issus de minorités, ainsi que sur les mesures prises par l’État de faire cesser la discrimination particulièrement violente s’exerçant à l’encontre des jeunes filles au nom de pratiques ancestrales comme la dot et d’institutions traditionnelles dites badi, deuki, jhuma, kumari et kamlaris.

19.Le peu de sensibilisation au problème de la discrimination et au problème de la violence domestique, dont les femmes et les jeunes filles sont les premières victimes, est déplorable, tout comme le fait que l’âge minimum du mariage (18 ans) n’est pas respecté pour les filles.

20.Il serait utile de savoir quelles mesures les autorités népalaises entendent prendre pour faire enregistrer les naissances dans la pratique, en particulier dans les zones rurales et les régions où sévit le conflit, et étendre l’enregistrement des naissances aux réfugiés du Bhoutan.

21.M. ZERMATTEN demande si à la suite des premières consultations d’enfants tenues au niveau national et local, une modification de la loi de 1992 sur l’enfance ou de ses dispositions d’application ultérieures est en cours pour permettre aux enfants, en tant que personne juridique, d’être entendus et d’exprimer leurs vues dans les procédures judiciaires, civiles ou pénales, et administratives, en particulier scolaires, les concernant.

22.M. KOTRANE déplore qu’aucune femme ne figure dans la délégation de l’État partie et que le Népal n’ait pas ratifié la Convention no 105 de l’OIT sur l’interdiction du travail forcé.

23.L’âge de la responsabilité pénale des enfants est particulièrement bas, ce qui est très préoccupant puisqu’ils peuvent être condamnés à des peines de prison dès l’âge de 10 ans et sont parfois incarcérés avec des adultes.

24.Le Comité aimerait savoir quelles sont les attributions exactes et les réalisations de la Commission nationale des droits de l’homme, créée en 2003, si elle est une instance de contrôle spécifiquement en charge de la protection des droits de l’homme, notamment des droits de l’enfant, dans le pays, et s’il existe un système de plainte.

25.Mme ALUOCH demande si, outre les statistiques officielles émanant des ministères, le système de collecte de données mis en place en collaboration avec le Conseil central pour la protection de l’enfance rassemble les données compilées par les différentes organisations de la société civile et le secteur privé.

26.Mme LEE aimerait savoir si l’État partie entend prendre de nouvelles initiatives en vue de sensibiliser les médias à la protection de la vie privée et, notamment, définir avec eux des règles de déontologie pour éviter la divulgation de l’identité des victimes des pédophiles.

27.M. FILALI se demande à partir de quel âge précisément il est possible de faire comparaître un jeune impliqué dans des activités terroristes devant les tribunaux aux termes de la loi sur la lutte contre le terrorisme et souhaite obtenir un complément d’informations sur les éventuels cours de formation organisés à l’intention du personnel chargé de l’application des lois, notamment les juges pour mineurs et les agents de police, souvent accusés de mauvais traitements. Il déplore le recours abusif des tribunaux au chef d’inculpation de «trouble à l’ordre public» en l’absence de preuves à charge.

28.M. LIWSKI demande si des mesures concrètes sont prises pour encourager le développement des associations de jeunes dans le pays et dans quelle mesure la loi antiterroriste et les mesures de sécurité en vigueur entravent l’exercice par les enfants, en particulier les adolescents, du droit à la liberté d’association prévu à l’article 15 de la Convention.

29.M. POLLAR demande à quel point la législation nationale a été alignée sur les dispositions de la Convention, s’agissant en particulier de l’interdiction des châtiments corporels et du droit d’un mineur de 16 ans de porter plainte, ainsi que du droit à un nom et à une nationalité. Il serait intéressant de savoir si des organismes comme l’UNICEF ont été consultés aux fins de la formulation du plan national d’action en faveur de l’enfance.

30.Il aimerait de plus savoir s’il a été procédé à une évaluation du fonctionnement et de l’efficacité du mécanisme de coordination des nombreuses autorités nationales et locales de protection des droits de l’enfant mis en place, ainsi que du système de plainte à la disposition des enfants − services d’accueil téléphoniques d’urgence et recours devant la Commission des droits de l’homme – et des actions de sensibilisation aux dispositions de la Convention.

31.Le PRÉSIDENT demande un complément d’information sur les attributions, les méthodes de travail et les résultats de la Commission mise en place pour enquêter sur les nombreux cas de disparitions enregistrés dans le pays, quelque 600 plaintes ayant déjà été formulées et quelque 1 500 cas de disparitions rapportés, dont environ 1 200 attribués à l’armée et 300 aux maoïstes.

La séance est suspendue à 11 h 10; elle est reprise à 11 h 30.

32.M. ACHARYA (Népal) rappelle que le Népal fait face depuis neuf ans à une insurrection maoïste et que les atrocités commises, autant d’atteintes au droit humanitaire et aux droits de l’homme, sont sans précédent dans un pays renommé pour sa tolérance et son harmonie et la Commission des droits de l’homme a du reste adopté une résolution condamnant les crimes contre l’humanité commis par les rebelles maoïstes.

33.Même si le Gouvernement ne ménage aucun effort pour pallier les effets de l’insurrection, notamment sur les enfants, il éprouve des difficultés à garantir le droit à la vie, à l’éducation et à la liberté de pensée de chacun, en particulier dans les zones reculées. Il convient cependant de souligner qu’à la moindre alerte, les forces de l’ordre font de leur mieux pour protéger les civils.

34.Les forces de l’ordre népalaises n’emploient des mines terrestres qu’à des fins défensives pour protéger des installations stratégiques et à ce jour aucune information n’indique que des enfants auraient été victimes d’engins posés par elles. En revanche, les mines et les engins explosifs artisanaux qu’utilise massivement la rébellion armée maoïste dans ses actions de type guérilla, font malheureusement de nombreuses victimes, notamment parmi les enfants. Il faut espérer que les protestations de la communauté internationale porteront rapidement leurs fruits.

35.Mme SMITH demande si l’action des maoïstes entrave le programme de vaccination récemment lancé dans le pays ou d’autres programmes sanitaires.

36.M. ACHARYA (Népal) répond que les insurgés maoïstes sont actifs dans tout le pays mais ne contrôlent aucune région dans son ensemble et que le Gouvernement poursuit donc, non sans difficulté, ses efforts de santé publique. Le programme de distribution de vitamine A est d’ores et déjà un succès, la poliomyélite est en voie d’éradication et une grande campagne de vaccination contre la rougeole vient d’être entreprise.

37.Le système d’enregistrement des personnes déplacées à l’intérieur du pays mis en place est encore incomplet. Lors de sa toute récente mission au Népal, le Représentant du Secrétaire général pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays s’est rendu dans différentes zones du pays, dont les plus touchées par les déplacements de population, et a rencontré de nombreux interlocuteurs. Le Représentant a souligné la nécessité de mettre en œuvre une stratégie globale avec l’appui des partenaires internationaux pour faire face au problème des personnes déplacées et le Gouvernement a donc entrepris d’élaborer des directives sur la base des normes définies par l’ONU et de mettre sur pied une politique d’ensemble. Quelque 10 000 personnes déplacées ont déjà été enregistrées dans plusieurs régions et ce n’est qu’un début.

38.Mme SMITH demande si les enfants déplacés peuvent aller à l’école et dans quelles conditions.

39.M. SAPKOTA (Népal) répond qu’en collaboration avec l’UNICEF et les ONG présentes sur le terrain les services sociaux s’emploient à recenser les enfants déplacés avant d’étudier avec les responsables de district concerné la possibilité de scolariser ces enfants. Si les écoles existantes sont déjà en sureffectifs, les autorités font leur possible pour faire venir des enseignants ou créer une école à proximité de l’endroit où vivent ces enfants déplacés.

40.M. ACHARYA dit que le Gouvernement attache une grande importance à l’indépendance et à l’impartialité de la Commission nationale des droits de l’homme et à la continuité de ses travaux. De nouveaux membres de la Commission seront nommés à l’échéance du mandat de ceux en poste et les autorités veilleront à ce qu’ils puissent exercer leurs fonctions dans le plus strict respect des Principes de Paris.

41.Le Gouvernement ne dispose pas de données précises sur le nombre d’enfants enrôlés ou enlevés par les rebelles maoïstes et utilisés dans le conflit armé car une fraction seulement de ces cas est signalée aux autorités par les familles. En revanche, il peut affirmer qu’aucun mineur n’est actuellement employé par l’armée régulière comme messager ou cuisinier ou à tout autre poste. Cette pratique a été totalement abolie voilà quelques années.

42.Les nombreuses affaires de disparitions constituent un grave sujet de préoccupation pour le Népal mais il convient de préciser que dans le contexte actuel du pays ces disparitions ne signifient pas que les personnes disparues ont été physiquement éliminées. La Commission nationale des droits de l’homme est parvenue à élucider environ un tiers des 1 400 cas dont elle a été saisie et a établi que certains noms lui avaient été fournis par les maoïstes eux-mêmes qui essayaient par ce moyen de minimiser le nombre de leurs soldats tués lors d’assauts contre des bâtiments officiels ou des installations des forces de sécurité. En outre, 195 des 267 cas portés à l’attention du Groupe de travail des disparitions forcées ou involontaires ont été résolus: 60 % concernaient des détenus déjà remis en liberté et de 20 à 25 % des personnes placées en détention en vertu de différentes lois; seules six ou sept personnes avaient été effectivement tuées. Conformément aux recommandations du Président du Groupe de travail, qui s’est rendu au Népal en 2004, le Gouvernement a entrepris d’établir un système centralisé d’enregistrement des cas de disparitions et depuis janvier 2005 neuf cas seulement ont été soumis au Groupe de travail.

43.Le Gouvernement recourt à tous les moyens pour combattre l’impunité. Toute allégation d’exaction commise par les forces de sécurité donne lieu à l’ouverture d’une enquête. Des sanctions et mesures disciplinaires ont été prises à l’encontre d’une centaine de militaires et d’autant de membres de la police. Des poursuites ont de plus été engagées devant les juridictions ordinaires. Un militaire a été condamné à une peine de prison. Vu le contexte difficile de la lutte contre l’insurrection, il est certain que des infractions isolées peuvent survenir mais elles ne relèvent en rien d’une politique du Gouvernement. La création du bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme à Katmandou devrait grandement contribuer à prévenir pareils actes et à empêcher que leurs auteurs restent impunis.

44.M. FILALI demande si les familles des disparus reçoivent une aide de l’État.

45.M. KOTRANE s’étonne que les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre l’impunité n’aient pas entraîné de baisse du nombre d’exécutions sommaires, dont l’évolution semble même révéler une certaine systématisation. Il se demande si cette tendance ne traduit pas une sensibilisation insuffisante des membres des forces de sécurité à leurs responsabilités et un manque d’information du public sur les sanctions déjà prises à l’encontre de militaires coupables de tels actes.

46.M. SIDDIQUI, tout en condamnant énergiquement les violences commises par les rebelles, souligne qu’ils ne doivent pas faire perdre de vue que le mouvement rebelle prospère sur le terreau de la pauvreté et de l’exclusion sociale et qu’il est donc nécessaire de s’attaquer au problème de l’exclusion de certains groupes, dont les enfants dalits et les fillettes.

47.M. ACHARYA (Népal) reconnaît que la situation sociale et économique actuelle offre un terrain propice à l’insurrection mais fait valoir que le Gouvernement n’a jamais refusé de prendre en considération les besoins et revendications des groupes défavorisés, comme l’attestent les divers programmes en faveur des femmes, des Dalits et des autochtones. Le Gouvernement, qui est prêt à aller jusqu’à une réforme de la Constitution tendant à renforcer l’autonomie locale, a organisé trois cycles de négociations, qui ont malheureusement échoué. Le fait est que les maoïstes utilisent les questions de pauvreté et de discrimination non pas pour rechercher des solutions constructives mais pour promouvoir leur idéologie extrémiste, contraire aux principes de la démocratie pluraliste.

48.M. SAPKOTA (Népal) dit que des progrès importants ont été accomplis dans la coordination entre organismes gouvernementaux, partenaires de développement, ONG et associations de jeunes. Le Conseil central pour la protection de l’enfance s’est efforcé en particulier de favoriser la participation de représentants de la société civile aux activités en faveur de certains groupes comme les femmes et les fillettes ou encore les Dalits.

49.Un fonds spécial d’urgence et divers programmes ont été mis sur pied pour venir en aide aux enfants touchés par le conflit interne. Plus de 300 orphelins ont été placés dans des institutions, où ils bénéficient d’activités de réinsertion. Un programme a été mis en route dans 25 districts, avec l’appui de plusieurs ONG, en vue d’y recenser les enfants déplacés, de leur fournir des soins de santé et de les scolariser. De par leur proximité avec la population, les conseils de district et comités de village pour la protection de l’enfance jouent un rôle clef à cet égard.

50.Bien que l’enregistrement des naissances soit une pratique éloignée de la culture et des traditions népalaises, même dans les zones urbaines, le taux d’enregistrement est en hausse grâce aux campagnes de sensibilisation menées avec l’appui de l’UNICEF. Le programme «Bienvenue à l’école» permet en outre de scolariser tous les enfants, titulaires ou non d’un acte de naissance.

51.Le Gouvernement a pris des mesures tendant à améliorer le système de justice pour mineurs, notamment par le canal d’un projet triennal, que soutiennent le Gouvernement norvégien et plusieurs ONG, au titre duquel ont été dans un premier temps désignés 10 districts pilotes dans lesquels les magistrats, procureurs, membres des forces de l’ordre et travailleurs sociaux vont recevoir une formation spéciale. L’armée a elle entrepris de formuler des directives sur les normes à respecter en matière de droits de l’homme, y compris les droits de l’enfant.

52.Des mesures seront prises dès le prochain exercice budgétaire pour mieux détailler les différents postes et faire apparaître plus clairement les crédits affectés à l’enfance. L’État fera son possible pour débloquer les fonds nécessaires à la mise en œuvre du Plan national d’action en faveur de l’enfance, qui seront complétés par des partenaires de développement du Népal. Un comité indépendant de suivi de ce plan devrait être créé sous peu.

53.Le Gouvernement et la société civile ont mené des campagnes à grande échelle de sensibilisation au problème de la traite d’enfants et une coopération étroite s’est également instaurée à cette fin entre les autorités népalaises et les autorités indiennes ainsi qu’entre les organisations de la société civile des deux pays. Ces efforts ont commencé à porter leurs fruits, puisqu’une tendance à la baisse de ce phénomène est observable actuellement au Népal.

54.La loi prohibe la discrimination sous toutes ses formes mais dans la pratique les filles et les enfants de communautés marginalisées continuent à être victimes de discrimination au Népal. Le système de la dot persiste effectivement malgré des lois très strictes visant à l’éradiquer. Les institutions dites deuki et jhuma(enfants travaillant comme professionnels du sexe dans certaines communautés) sont proscrites et l’UNICEF continue à mettre en œuvre des programmes destinés à les éliminer, avec l’aide d’organisations de la société civile.

55.Le programme de sensibilisation des professionnels des médias se poursuit et le Conseil népalais de la presse et les associations professionnelles de médias ont élaboré un code de conduite sur le traitement des questions relatives à l’enfance, dont les grandes lignes devraient être reprises dans les procédures du système de justice pour mineurs en voie de finalisation, ainsi que dans les textes d’application de la loi sur l’enfance.

56.La participation des enfants est vivement encouragée et ils ont ainsi été largement consultés lors de l’élaboration du rapport périodique et du plan d’action. Les enfants peuvent exprimer leurs points de vue et préoccupations à l’échelon du comité de développement de villages au cours de sessions spéciales. Le Conseil central pour la protection de l’enfance et les conseils de district pour la protection de l’enfance regroupent plus de 3 500 clubs pour enfants, que le Gouvernement s’efforce de fédérer en réseaux national et régionaux.

57.M. ZERMATTEN demande si la parole de l’enfant est entendue dans les procédures judiciaires et administratives et aimerait en particulier savoir si la loi sur l’enfance de 1992, ou ses règlements d’application, prévoient de recueillir la parole de l’enfant ou de procéder à son audition.

58.M. SAPKOTA (Népal) dit que les établissements scolaires sont dotés de comités regroupant les enseignants et le chef d’établissement et que l’on s’efforce d’instaurer des liens entre ces comités et les clubs pour enfants afin de débattre de questions touchant à la vie quotidienne des enfants, telles que l’accès aux robinets d’eau potable, les activités extrascolaires ou les problèmes de discipline. Les choses évoluent dans le bon sens au Népal, puisque deux des cinq personnes choisies dans chaque district pour participer à l’élaboration de projets en faveur de l’enfance étaient des enfants. Cette démarche a d’abord suscité des réticences, notamment au sein de l’administration, mais l’idée que l’enfant a le droit d’être entendu fait son chemin.

59.Mme SMITH demande s’il existe une procédure de détermination de l’âge des enfants dans le cadre du système de justice pour mineurs, déficient au point que des enfants de moins de 16 ans se retrouvent incarcérés avec des adultes, et, dans l’affirmative, si le doute bénéficie à l’enfant. La délégation pourrait commenter les informations relatives aux conditions de détention des enfants, qui seraient privés d’eau potable, d’accès aux soins médicaux et de loisirs. Un complément d’information sur les procédures dites quasijudiciaires seraient utiles, de même que sur les tribunaux mis en place par les insurgés maoïstes − qui encourageraient l’administration de châtiments corporels.

60.M. SIDDIQUI demande si la proportion des enfants âgés de 5 à 14 ans exerçant une activité économique, qui selon le rapport avoisinait 40 % en 1998, a diminué depuis, où en est la mise en œuvre de la loi de 1999 sur le travail des enfants et si le Comité pour l’élimination du travail des enfants poursuit ses activités. Il faudrait en outre savoir quels en sont les résultats déjà obtenus grâce au programme visant à éliminer d’ici à 2007 les pires formes de travail des enfants. La même question se pose pour le plan directeur relatif au travail des enfants de la période 2001-2010.

61.Le Comité souhaiterait connaître les chiffres les plus récents en matière de mortalité infantile et savoir si le problème de malnutrition chronique des enfants a empiré depuis 1998 (année où 54 % des enfants âgés de moins de 5 ans souffraient de retard de croissance) et, dans l’affirmative, pour quelles raisons.

62.Le mariage des enfants est interdit par la loi, qui n’autorise plus le mariage qu’à partir de 18 ans, mais selon les statistiques environ 24 % des mineurs sont mariés. Le Comité aimerait savoir si cette proportion est en baisse, si des poursuites sont engagées contre les responsables de tels mariages et si des campagnes sont menées pour sensibiliser la population aux risques que ces pratiques font courir à la santé et au développement des enfants.

63.Mme LEE aimerait savoir si le budget affecté aux nouvelles mesures de lutte contre la discrimination à l’égard des enfants handicapés est adéquat et ce qui est fait pour encourager les familles à surmonter la stigmatisation sociale attachée à la naissance d’un enfant handicapé. À ce propos, des précisions seraient les bienvenues sur les cartes spéciales que le Gouvernement népalais prévoit, selon le rapport, de délivrer aux personnes handicapées pour leur ouvrir droit à certaines prestations, ainsi que sur l’identité des personnes chargées de déterminer les ayants droit en l’absence de systèmes de dépistage précoce des handicaps.

64.La délégation pourrait indiquer s’il est prévu de rendre l’enseignement obligatoire dans un proche avenir et apporter des précisions sur les mesures envisagées pour rendre les écoles plus sûres ainsi que sur les mesures que les autorités envisagent pour combattre la discrimination en matière d’accès à l’enseignement dont sont victimes les Dalits et les filles.

65.M. KRAPPMANN demande un complément d’information sur les résultats de l’action du Fonds de lutte contre la pauvreté, qui seraient très bons, et aimerait en outre savoir s’il est possible de développer cette action et à quel point la communauté internationale la soutient.

66.Dans les réponses écrites est mentionné un projet devant déboucher sur un enseignement primaire de qualité, gratuit et obligatoire pour tous d’ici à 2015; il serait utile de savoir quelle sera la durée de cet enseignement et pour quelles raisons il n’est pas possible de l’instaurer plus tôt. La délégation pourrait indiquer si des mesures ont été prises pour aider les familles, au moins les plus pauvres, à assumer certaines dépenses (fournitures scolaires, vêtements, frais de scolarité parfois même) afférentes à la scolarisation de leurs enfants. Il serait également instructif de savoir comment les enfants arrivent à concilier travail et études et si des programmes spéciaux les aident à tirer le meilleur parti de cette situation. Le Comité aimerait en outre savoir si les autorités envisagent de faire bénéficier plus particulièrement les enfants pauvres ou issus de groupes défavorisés de son projet tendant à développer l’enseignement préscolaire afin de compenser leur handicap initial. La formation d’enseignants devrait être prioritaire.

67.Mme ANDERSON demande si, comme semble l’indiquer le rapport, il est effectivement prévu de mettre en place des lieux d’hébergement pour les enfants vivant avec leur mère en détention et pour les enfants mis en examen ou condamnés, car faire coexister ces deux catégories d’enfants serait inadapté.

68.La délégation pourrait en outre indiquer le nombre et la proportion de cas de transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant et préciser si les mères ont accès aux antirétroviraux et si des programmes spécifiques sont mis en œuvre pour venir en aide aux orphelins du sida.

69.Étant donné que 75 % des victimes de viol sont des enfants, il faudrait savoir si une action de prévention est menée pour remédier à cette situation et pourquoi les enfants sont si exposés à ce risque dans la société népalaise.

70.M. LIWSKI demande comment le système de santé est organisé aux niveaux central et local, si son agencement est modulé en fonction des disparités régionales et si la privatisation de certains établissements de santé, qui pratiquent désormais des tarifs élevés, a eu pour effet de réduire l’accès des enfants, notamment des plus pauvres, aux services de santé. La part des dépenses de santé dans le total des dépenses publiques est passée de 3,5 % à 5,03 %, ce dont il faut se féliciter, mais il faudrait aussi savoir s’il est prévu de continuer sur cette voie. La délégation pourrait de plus indiquer quelle suite a été donnée aux demandes formulées à l’occasion des consultations régionales concernant une meilleure répartition des personnels et des médicaments et une surveillance efficace.

71.Le Comité aimerait en outre savoir si les autorités ont fait appel à l’aide d’organisations internationales pour améliorer le taux de couverture vaccinale dans les circonstances les plus difficiles (déplacements de population, insurrection) et si des mesures sont prises pour lutter contre la diarrhée infantile, maladie d’origine hydrique, en assurant l’accès de tous à de l’eau potable. La délégation pourrait aussi indiquer si des mesures sont envisagées pour combattre les affections respiratoires, autre grande cause de mortalité et faire face à l’augmentation alarmante du nombre de cas d’anémie, et si des dispositions particulières ont été prises en ce qui concerne la santé mentale des adolescents déplacés ou exposés à d’autres risques.

72.M. ZERMATTEN, notant que le rapport laisse à penser qu’en matière d’abus et de négligence, auteurs et victimes reçoivent le même traitement, demande si les fillettes victimes de traite, par exemple, sont effectivement emprisonnées dans les cellules féminines mises en place dans 16 districts pour répondre à ce problème. Il serait bon, par ailleurs, que la délégation apporte des précisions sur ce qui constitue une infraction en matière de délinquance juvénile, les paragraphes 323 et 334 du rapport permettant apparemment de conclure que les enfants qui exercent une activité immorale, qui ont fugué ou ont causé des troubles à l’ordre public sont considérés comme des délinquants. Le Comité souhaiterait savoir si cette interprétation est correcte, d’autant que cette apparente confusion entre le traitement réservé aux auteurs d’infractions commises envers les enfants et les enfants qui en sont victimes semble régner également sur le terrain de l’avortement, illégal même en cas de viol ou d’inceste, du mariage forcé des jeunes filles ou des pratiques traditionnelles tendant à prostituer les enfants du type deuki, badi ou jhuma, ce qui appelle les mêmes éclaircissements.

73.Mme ORTIZ s’interroge sur la conformité avec les dispositions de la Convention de la politique à l’égard des enfants séparés de leurs parents et demande des précisions sur la base de données relatives à cette catégorie d’enfants et sur le projet de loi relatif au regroupement familial mentionnés dans les réponses écrites. Il faudrait en particulier savoir quel organisme en est chargé, si les enfants placés en institution le sont en vertu d’une décision judiciaire ou administrative et si des progrès ont été accomplis sur la voie de l’élaboration du projet de loi. Le sort des enfants placés dans ces structures de placement, dont 95 % sont gérées par des ONG, ne fait l’objet d’aucune réglementation ni d’aucun suivi et des précisions sur ce point et sur le caractère prioritaire ou non du regroupement familial seraient donc bienvenues.

La séance est levée à 13 heures.

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