Convention relative aux droits de l'enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.619

24 mai 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt-quatrième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 619ème SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 17 mai 2000, à 10 heures

Présidente : Mme OUEDRAOGO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Rapport initial de la Géorgie

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 3 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial de la Géorgie [CRC/C/41/Add.4/Rev.1; CRC/C/Q/GEO/1; réponses écrites du Gouvernement géorgien aux questions posées dans la liste des points à traiter CRC/C/1(Future)5]

1.Sur l'invitation de la Présidente, Mme Beridze, M. Tatishvili, M. Nalbandov, Mme Ebralidze, M. Kavadze, M. Kavsadze et M. Bakradze prennent place à la table du Comité.

2.Mme BERIDZE (Géorgie) dit qu'au cours des dernières années la Géorgie a été confrontée à de nombreuses difficultés telles que conflits armés, manque de ressources, crise financière et budgétaire, endettement de l'État, chômage, arriérés de salaires et de retraite qui ont à l'évidence eu des répercussions sur la situation des enfants sans pour autant empêcher la Géorgie d'adopter, en 1994, la Convention relative aux droits de l'enfant. Entre 1995 et 1999, le Parlement géorgien a totalement renouvelé la base législative du pays en adoptant plus de 700 lois. Les autorités s'efforcent de lutter contre la pauvreté, de relancer l'économie et de rétablir la prospérité.

3.S'agissant de promouvoir le respect des droits de l'enfant, le pays se heurte essentiellement à des problèmes d'ordre financier et budgétaire. Le Gouvernement a récemment élaboré un nouveau programme à long terme de relance dans le domaine social qui met l'accent sur les politiques en faveur de la famille et sur la garantie des droits des enfants.

4.L'âge requis pour qu'un enfant puisse bénéficier de conseils juridiques ou médicaux sans le consentement de ses parents ou représentants légaux est actuellement de 18 ans mais devrait être abaissé par voie législative. Pour ce qui est de l'avortement, un projet de loi élaboré en tenant compte des engagements internationaux de la Géorgie sera prochainement soumis au Parlement.

5.Un véritable culte est voué à l'enfant en Géorgie où les cas de châtiments corporels sont extrêmement rares, même si quelques cas ont été signalés dans des établissements préscolaires ou scolaires. L'interdiction de ce type de châtiments dans les écoles relève d'une loi non écrite et ceux qui les infligent peuvent être licenciés et frappés d'une interdiction d'enseigner pendant un certain temps. La Commission des questions juridiques du Parlement examine la possibilité d'ériger en délits ces actes, qu'ils soient infligés dans la famille ou à l'école. À l'heure actuelle, de tels actes ne tombent sous le coup du Code pénal que s'ils ont entraîné des lésions. En fonction des circonstances, des contacts étroits peuvent être établis avec divers organes pour protéger les enfants et les couches les plus vulnérables de la population.

6.Le 25 février 2000, un décret présidentiel concernant l'adoption pour la période 2000‑2002 d'un plan national de lutte contre la violence à l'égard des femmes a été promulgué. Les objectifs principaux en sont d'élaborer une loi et un programme visant à prévenir toute forme de violence à l'égard des filles et de lancer diverses campagnes d'information.

7.En avril 2000, le Médiateur national a présenté au Parlement son rapport annuel, portant notamment sur les enfants de la rue placés dans des établissements publics. Les organisations non gouvernementales jouent un rôle important dans l'aide à ces enfants et aux enfants en général. Il est à noter que les liens entre les structures gouvernementales et les ONG se renforcent. Compte tenu de ses difficultés budgétaires, il est aussi particulièrement important pour la Géorgie de bénéficier de l'aide d'organisations internationales pour financer des programmes en faveur des enfants. Avec la Banque mondiale a ainsi été conclu un accord portant sur une aide de 60 millions de dollars des États-Unis qui doit permettre d'améliorer et de renforcer l'enseignement secondaire.

8.Conformément à une loi adoptée en 1999 concernant l'aide de l'État aux associations pour la jeunesse et l'enfance, ces dernières peuvent soumettre au Président de la Géorgie et aux organes compétents du pouvoir exécutif des renseignements sur la situation en matière de protection et de défense des enfants et prendre des initiatives en vue de modifier les lois et autres textes réglementaires en fonction des intérêts des enfants. Elles peuvent aussi participer à l'élaboration, à l'examen et à la mise en œuvre de programmes gouvernementaux concernant les jeunes.

9.En ce qui concerne l'enseignement, il y a lieu de noter que dans certaines régions montagneuses de la Géorgie, des classes peuvent être maintenues avec seulement trois à quatre élèves alors que le critère normalement appliqué est de 25 élèves par classe. Dans son programme électoral, M. Chevardnadze a accordé une place importante à l'éducation, s'engageant à instaurer progressivement la gratuité de l'enseignement secondaire et à assurer aux enfants des minorités linguistiques un enseignement dans leur langue maternelle.

10.La Géorgie s'est dotée d'une structure pour l'établissement des rapports sur les droits de l'homme à présenter à l'ONU, ce qui devrait avoir un effet positif sur la qualité et le caractère constructif du dialogue de la Géorgie avec les divers organes traitant des droits de l'homme à l'ONU. La Géorgie attend avec intérêt toutes recommandations que les membres du Comité pourront faire pour l'aider à s'acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

11.La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à poser leurs questions relatives aux mesures d'application générale et à la définition de l'enfant.

12.Mme KARP aurait souhaité trouver dans le rapport davantage d'informations sur les répercussions de l'application de la Convention dans la vie quotidienne des enfants. Elle note en outre avec préoccupation qu'aucun renseignement n'a pu être fourni au sujet des enfants vivant en Abkhazie et en Ossétie du Sud.

13.Elle aimerait savoir si la révision de la législation se fait selon un calendrier précis et s'étonne que la Convention, pourtant intégrée dans la législation nationale, ne soit pas invoquée devant les tribunaux. Une étude a-t-elle été faite sur les raisons d'une telle situation ? Serait‑ce parce que la population ne connaît pas la Convention ?

14.Dans les réponses écrites figure l'affirmation selon laquelle, pendant la période 1998‑2000, le Service de défense des droits de l'homme n'a eu connaissance d'aucun acte de brutalité policière ou d'utilisation illégale de la force contre des mineurs. Si l'institution expressément chargée de repérer les violations des droits des enfants n'a rien constaté à ce sujet, c'est qu'il y a un problème, soit que son budget ou ses effectifs sont insuffisants, soit qu'elle ne met pas assez l'accent sur les enfants.

15.Mme Karp souhaite savoir comment la Géorgie entend procéder pour mettre en place un mécanisme efficace de coordination permettant de se faire une idée d'ensemble de l'action menée en faveur des enfants et de ce qui reste à accomplir. Que fait concrètement la Géorgie pour formuler une stratégie et un plan d'action globaux et détaillés en faveur de l'enfance ? Un calendrier a-t-il été fixé à cet égard ?

16.L'étude sur le problème de la pauvreté entreprise en collaboration avec la Banque mondiale a-t-elle été menée à son terme et, dans l'affirmative, quels en ont été les résultats ? Compte tenu de la baisse des fonds consacrés à l'éducation, à la santé, à la sécurité sociale et au Parlement des jeunes, a-t-il été envisagé de revoir les affectations budgétaires de manière à privilégier les enfants ?

17.Enfin, en ce qui concerne les efforts déployés pour faire connaître la Convention à la population et en particulier aux enfants, est-il envisagé de traduire cet instrument dans d'autres langues que le géorgien et l'abkhaze et est-il prévu d'étendre à d'autres régions du pays le programme d'éducation sur les droits des enfants lancé dans la capitale ?

18.Mme EL GUINDI demande un complément d'information sur les relations entre la Commission de la protection des droits de l'homme et le bureau du Médiateur national. Qui est chargé de la coordination entre les ministères, du système de suivi et des données concernant les enfants ? Quelles relations toutes ces instances entretiennent-elles avec les ONG, et comment coopèrent-elles avec celles-ci dans le cadre des activités citées ?

19.M. FULCI s'étonne que dans le rapport de la Géorgie il ne soit pas fait état d'une participation des ONG à son élaboration et d'y lire que les ONG existantes seraient assez inactives alors que selon certaines informations disponibles, il existe à Tbilissi bon nombre d'ONG très engagées dans le domaine des droits de l'homme. La Géorgie envisage-t-elle d'associer davantage les ONG à ce processus ?

20.Il souhaiterait savoir si le bureau du Médiateur national a créé un service appelé à s'occuper des problèmes des femmes et des enfants et , dans la négative, quand il compte le faire. Comment les enfants ont-ils jusqu'à présent bénéficié de l'existence d'un médiateur ? Dispose-t-on de données précises et récentes sur le nombre d'enfants qui ont saisi le Médiateur ? Enfin, il serait utile d'obtenir des précisions sur le rôle des médias, notamment pour ce qui est de faire connaître la Convention et son contenu aux enfants.

21.Mme RILANTONO juge très surprenant de lire dans le rapport que les ONG ne nouent pas aisément des contacts avec les autorités publiques, même si la délégation a indiqué que c'était moins le cas depuis deux ans. Ce sont en effet les ONG qui ont fait campagne pour la Convention et elles peuvent en outre recommander des politiques nationales. Les ONG sont proches de la collectivité et il convient de leur réserver un rôle accru.

22.En l'absence de mécanisme de contrôle, comment la Convention est-elle appliquée à l'heure actuelle ? Enfin, la Géorgie a-t-elle ratifié la Convention No 138 de l'OIT concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi et la Convention No 182 de l'OIT contre les pires formes de travail des enfants ?

23.M. RABAH demande ce qu'il en est du projet de révision du Code pénal tendant à ramener l'âge de la responsabilité pénale à 14 ans dans tous les cas. Concernant les cas où la responsabilité pénale est avancée à 14 ans, de quels crimes "d'une particulière gravité" s'agit-il pour que l'on puisse juger des enfants de 14 ans comme des adultes ? Par ailleurs le rapport n'indique pas l'âge minimum du consentement aux relations sexuelles.

24.Compte tenu du grand nombre de minorités et de la situation géographique du pays, il demande s'il est vrai qu'existe une certaine discrimination fondée sur la langue. La délégation pourrait-elle indiquer dans quelle mesure la Convention a été traduite dans les différentes langues et comment elle est diffusée à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des jeunes dans les écoles et les universités ? Enfin, le Médiateur national a-t-il déjà reçu des plaintes d'enfants ou d'autres personnes et ces plaintes sont-elles parvenues aux tribunaux ? Dans l'affirmative, quelle suite leur a été donnée ?

25. Mme MOKHUANE demande quelle est la composition du Conseil de coordination chargé de suivre l'application de la Convention, si la société civile y est représentée et en quoi son rôle diffère de celui du département ministériel chargé de la mise en œuvre de la Convention. Elle aimerait en outre savoir si une étude a été effectuée pour évaluer l'incidence sur le bien-être des enfants des problèmes liés à la pauvreté, à la mise en place de la politique macroéconomique et au recul économique du pays, évoqués dans l'exposé liminaire ?

26.M. DOEK dit que selon certaines informations, des problèmes comme la fraude fiscale et la corruption, qui ont des répercussions sur le financement de toutes sortes de programmes y compris ceux destinés aux enfants, se posent avec une acuité particulière en Géorgie, et il souhaiterait savoir quelles mesures sont prises pour y remédier.

27.Mme TIGERSTEDT-Täthelä note avec inquiétude que les budgets de la santé, de l'éducation et de la culture sont en baisse alors que l'économie croît et elle appelle l'attention à cet égard sur l'article 4 de la Convention. Elle souhaiterait savoir si la notion de droits de l'enfant entre en ligne de compte dans la planification macroéconomique.

28.La PrÉsidente demande à la délégation géorgienne comment elle a préparé sa venue au Comité des droits de l'enfant. En particulier, a-t-elle pu diffuser le rapport de la Géorgie sur la mise en œuvre de la Convention et si tel est le cas, quelles réactions a-t-elle recueillies ? Y a-t-il eu une conférence de presse ? Comment, le cas échéant, a-t-on informé la population de la tenue de la réunion ?

29.Mme BERIDZE (Géorgie) précise qu'en Géorgie, les instruments internationaux font partie intégrante de la législation nationale, en vertu de la loi sur les actes normatifs, et peuvent donc être invoqués devant les tribunaux. Tout citoyen géorgien, y compris un enfant, peut donc se prévaloir des dispositions de la Convention devant un tribunal même si une enquête par région révèle qu'aucun tribunal n'a jamais été saisi en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant ou d'aucun autre instrument international. La Géorgie fait de son mieux pour mettre sa législation en conformité avec les instruments internationaux auxquels elle est partie. Des travaux sont en cours afin de déterminer les divergences qui pourraient subsister entre la Convention et la législation géorgienne et le Parlement a commencé d'étudier ces lacunes et incohérences afin d'apporter les modifications législatives voulues.

30.S'agissant de la connaissance que la population a de ses droits, la traduction de la Convention dans différentes langues parlées en Géorgie a pu être effectuée avec l'aide d'organisations internationales. Du temps de l'Union soviétique, la langue commune était le russe, qui est encore connu de toutes les minorités mais sera peu à peu supplanté par le géorgien en tant que principale langue de communication. L'État mène un vaste programme d'apprentissage de la langue géorgienne, qui n'est nullement obligatoire et intéresse de nombreux adultes originaires d'Azerbaïdjan et d'Arménie notamment. L'État fait cependant tout son possible pour permettre aux enfants issus de minorités d'être éduqués dans leur langue maternelle.

31.Les principes des droits de l'homme sont enseignés dans les écoles et des émissions ont été consacrées aux droits de l'enfant. Mais du fait du passé totalitaire de la Géorgie, ce sont surtout les droits civils et politiques qui ont retenu l'attention dans les premières années de l'indépendance et les ONG continuent de s'inscrire dans cette logique. La Géorgie ayant adhéré au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Médiateur national a attiré l'attention sur ces droits étroitement liés aux droits de l'enfant : un enfant vit mieux, et ses droits sont mieux respectés dans une famille prospère.

32.De nombreuses ONG ont été fondées ces derniers temps et une trentaine se sont récemment dotées, avec l'aide de l'UNICEF, d'un conseil de coordination. Elles ont élaboré un rapport reprenant en partie les informations que leur avaient transmises des structures gouvernementales. Il y a donc bien coopération entre ces structures et les ONG et elle va en se renforçant, des programmes communs étant même mis en œuvre. Mme Beridze a participé en personne à un programme de formation portant notamment sur le traitement des mineurs, organisé dans plusieurs postes de police à Tbilissi et dans d'autres régions.

33. Le premier titulaire du poste de Médiateur national, nommé fin 1997, a démissionné après avoir été élu au Parlement et son adjoint assure l'intérim en attendant la nomination du nouveau titulaire mais cette institution s'en est trouvée affaiblie. Un homme et une femme se sont portés candidats à ce poste. Le Médiateur a commencé à étudier des questions concrètes et à connaître de plaintes adressées par des citoyens. Dans son premier rapport annuel, publié en 1999, les principales inquiétudes exprimées par le Médiateur concernaient la situation des enfants placés en institution et les enfants de la rue. Le Médiateur n'a encore jamais été saisi directement par des enfants, mais il est intervenu dans plusieurs affaires concernant des enfants, par exemple pour permettre à une mère de reprendre l'enfant dont elle avait obtenu la garde par décision de justice. Dans certains cas, des enfants ont cependant agi de leur propre initiative, dans les écoles, et ces affaires ont été réglées par l'intermédiaire du Ministère de l'éducation. L'âge à partir duquel un enfant peut s'adresser à une autorité gouvernementale ou au médiateur n'est pas défini juridiquement et il n'existe pas de texte à ce sujet, mais le climat en Géorgie est tel que si un enfant s'adressait à une instance ou un responsable gouvernementaux, tout serait fait pour lui venir en aide.

34. La Géorgie étant actuellement dans l'incapacité d'exercer sa juridiction en Abkhazie et dans une partie de l'Ossétie, les autorités géorgiennes ne disposent pas d'informations complètes sur la situation des enfants dans ces deux régions, même si on peut supposer qu'elle se ressent nécessairement de conditions économiques particulièrement difficiles.

35.Dans le domaine de la lutte contre la pauvreté, un accord a finalement été conclu avec la Banque mondiale grâce au financement de laquelle un programme devrait pouvoir être mis en route dans le courant de l'été prochain. Le Parlement des enfants doit reprendre ses travaux le 15 mai 2000.

36.M. TATISHVILI (Géorgie) précise qu'en Géorgie l'enseignement est dispensé soit en géorgien soit, à la demande des parents, dans l'une des cinq langues minoritaires - arménien, azéri, russe, ossète et abkhaze -, ce qui est le cas dans 20 % des écoles.

37.Avec l'assistance d'organisations internationales comme l'ONU, les autorités ont introduit dès 1995 dans les écoles un enseignement sur la Convention; 50 000 brochures, en géorgien, ont été distribuées à l'époque. Avec le concours d'ONG, on a élaboré un manuel destiné à faire connaître la Convention aux enseignants, puis un autre, en 1999, à remettre aux enfants à leur sortie du primaire ou du secondaire. L'ensemble de la population a ainsi été sensibilisée aux principes de la Convention. Malgré des conditions difficiles, le Gouvernement géorgien est parvenu à rendre l'enseignement de la Convention obligatoire et cette mesure n'a pas été sans effet, même si l'on ne peut affirmer que tous les droits de l'enfant sont respectés.

38.Les ONG sont très actives et ont contribué à l'établissement du rapport initial en fournissant de nombreuses données et en déployant des efforts qui ont parfois amené le Gouvernement à revoir sa position sur certaines questions; 16 des 36 ONG enregistrées en Géorgie sont spécialisées dans les droits de l'enfant.

39.Les médias contribuent grandement à la promotion et au respect des droits de l'enfant et de la mère. Dans la presse écrite figurent régulièrement des articles en rapport avec les droits de l'enfant.

40.La Géorgie a participé en avril au Forum de Dakar, qui a rassemblé 182 pays venus faire rapport sur les progrès accomplis en matière d'enseignement primaire au cours des dix dernières années. Le programme mis en place par le Gouvernement géorgien conformément à la loi de 1995 sur l'enseignement présente certaines carences telles que la sous-scolarisation des filles et le fait que le secondaire reste payant, à quoi s'ajoutent les travaux nécessaires pour réparer les dégâts que diverses catastrophes naturelles, dont des inondations, ont provoqués dans de nombreuses écoles du pays.

41.Mme BERIDZE (Géorgie) indique que les projets de loi ayant trait aux droits de la femme et de l'enfant sont élaborés par la sous-commission parlementaire chargée de la protection de la mère et de l'enfant, en consultation avec les organes du pouvoir exécutif et avec les ONG, avec lesquels elle travaille en étroite collaboration.

42.La Géorgie n'a pas encore adhéré aux Conventions Nos 137 et 182 de l'OIT mais des négociations dans ce sens sont en cours. Le Code du travail fixe à 16 ans l'âge légal de l'embauche mais il est possible d'engager un adolescent de 15 ans à condition qu'il s'agisse d'un travail léger, avec le consentement de l'un des parents ou du tuteur.

43.Le nouveau Code pénal ramène à 14 ans la majorité pénale qui était auparavant fixée à 16 ans et exceptionnellement à 14 ans pour les infractions pénales les plus graves. Le Gouvernement géorgien fournira des statistiques sur la délinquance juvénile. Les tribunaux hésitent à envoyer des mineurs en prison et, à l'heure actuelle, 47 mineurs seulement sont détenus dans un établissement pénitentiaire spécialisé où les conditions sont meilleures que dans les établissements pour adultes. Aucune adolescente mineure n'est détenue actuellement, alors qu'en 1993 on en comptait trois.

44.Il n'existe pas d'âge légal minimum pour le consentement à des relations sexuelles, ce qui constitue une lacune au regard de la Convention et le Gouvernement s'emploiera à y remédier en tenant compte des observations du Comité.

45.Le système fiscal fonctionne très mal en Géorgie car la collecte des impôts se heurte à des difficultés et le marché noir est florissant. Le nouveau programme mis en place par l'administration du fisc voilà à peine quelques mois devrait permettre d'améliorer la situation.

46.Le phénomène de la corruption est effectivement très répandu dans le pays. Le Gouvernement géorgien a élaboré un projet prévoyant la création d'une commission spéciale chargée de lutter contre la corruption et cette lutte constituera certainement l'une des priorités de la nouvelle équipe gouvernementale. Il sera rendu compte des résultats obtenus dans le prochain rapport.

47.La commission parlementaire compétente en matière de protection des droits de l'homme travaille en coopération avec le bureau du Médiateur national, responsable devant le Parlement. Le Médiateur soumettra désormais deux fois par an, au lieu d'une, un rapport au Parlement .

48.Le Gouvernement géorgien a commencé à étudier les incidences de la pauvreté sur l'exercice de leurs droits par les enfants. Le Bureau de statistique et le Ministère de la santé et de la protection sociale ont mis en route une enquête à l'échelle nationale qui permettra notamment de recenser le nombre d'enfants qui travaillent et leur âge. Le programme soutenu par la Banque mondiale est en cours et n'a pas encore produit de résultats concrets mais on en escompte des conclusions ventilées selon les différents droits économiques, sociaux et culturels concernant à la fois les adultes et les mineurs.

49.Malgré la croissance économique, les dépenses consacrées à l'enseignement et à la santé sont en baisse car le pays traverse une grave crise budgétaire qui entrave le financement des activités dans ces secteurs en théorie prioritaires. La situation est donc dans son ensemble loin d'être satisfaisante, même si ces secteurs absorbent parfois jusqu'à 70 % de certains budgets locaux.

50.Le Gouvernement géorgien a établi son rapport initial avec le plus grand soin et ne ménagera aucun effort pour assurer la diffusion des observations du Comité à son sujet, comme il l'a fait pour son rapport sur l'application de la Convention sur l'élimination des toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, en 1999, et récemment pour son rapport au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. L'examen du rapport relatif aux droits de la femme avait été suivi d'une conférence de presse et d'une intervention télévisée et des articles à ce sujet sont parus dans la presse.

51. La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à poser des questions de suivi sur les réponses qui viennent d'être données, ainsi que sur les principes généraux et les libertés et droits civils.

52.Mme KARP demande si le bureau du Médiateur dispose de ressources humaines et financières suffisantes et est doté d'antennes dans les différentes régions du pays. Quel est l'effectif de la Sous-Commission pour les questions de la mère et de l'enfant et la Géorgie envisage-t-elle de demander une assistance pour élaborer des indicateurs sur les groupes les plus défavorisés, sur la justice pour mineurs et sur les enfants victimes d'infractions ? Mme Karp voudrait en outre savoir combien de temps il faudra au Parlement pour adopter la nouvelle législation relative aux enfants.

53. En ce qui concerne les dotations budgétaires, la Géorgie pourrait suivre l'exemple de certains pays scandinaves qui ont pris des mesures spéciales concernant le montant des crédits à affecter aux activités en faveur des enfants. Il serait également utile de savoir si un pourcentage a été fixé en ce qui concerne la part de l'aide internationale devant être consacrée aux enfants.

54.S'agissant des principes généraux, elle se félicite d'apprendre que des crédits vont être à nouveau ouverts pour financer les activités du Parlement des enfants et rappelle que, outre une volonté politique, des ressources tant humaines que financières sont nécessaires pour faciliter la participation des enfants non seulement à la vie de l'école, mais aussi à la vie de la société en général.

55.Elle aimerait savoir si l'avis de l'enfant est pris en considération à l'école et devant les tribunaux, ainsi que dans la prise de décisions administratives et s'il existe des directives stipulant qu'il faut entendre un enfant avant de prendre la décision de le retirer à sa famille pour le placer dans une institution. Par ailleurs, elle aimerait avoir des exemples de décisions judiciaires ou administratives prises en privilégiant l'intérêt supérieur de l'enfant par rapport aux intérêts des parents ou de l'État.

56.Se référant au droit à la vie, elle demande si des enfants figuraient parmi les personnes mortes en prison en 1997 et 1998 suite à des brutalités policières. De façon générale, elle voudrait savoir qui est chargé d'enquêter sur les plaintes faisant état de tels actes. Enfin, elle recommande à la Géorgie de compléter la législation interdisant les châtiments corporels par des campagnes de sensibilisation du public, des parents en particulier.

57.Mme RILANTONO veut s'assurer que l'on s'efforce de désagréger par groupe d'âge les données statistiques se rapportant aux enfants. Par ailleurs, elle aimerait savoir s'il est traditionnel en Géorgie de tenir compte de l'avis des enfants, contrairement à ce qui se passe en général dans les pays en développement. Elle demande s'il a été envisagé de mettre en place un dispositif spécial de protection des enfants. En ce qui concerne l'accès à une information appropriée, elle aimerait savoir si des mesures ont été prises pour protéger les enfants des publications à caractère pernicieux, pornographique notamment.

58.Mme TIGERSTEDT-Täthelä juge très intéressante l'information selon laquelle la délégation géorgienne rendra compte au Conseil de la sécurité nationale de sa mission à Genève. Constatant par ailleurs que les médias géorgiens diffusent beaucoup d'informations sur les droits des enfants et de leur mère, elle rappelle que le père a lui aussi un rôle important à jouer dans l'éducation de l'enfant.

59.M. DOEK, demande des explications sur le paragraphe 78 de l'additif au rapport initial où l'on indique qu'il peut être tenu compte des arguments de l'enfant au cours d'une procédure judiciaire : cela veut-il dire qu'un juge peut choisir de ne pas entendre l'enfant ? Quels sont les critères utilisés dans ce domaine ? Existe-t-il une limite d'âge ? L'enfant peut-il être entendu dans les procédures de divorce ? En ce qui concerne la liberté d'association, il demande des éclaircissements sur l'interdiction qui est faite aux enfants de participer aux activités des partis politiques.

60.Mme MOKHUANE constate une grande disparité entre la situation décrite dans le rapport, c'est-à-dire celle dans laquelle la Convention devrait s'appliquer idéalement, et la réalité. Elle demande quelles mesures d'urgence l'État a prises pour garantir le droit à la survie, à la santé et au développement de l'enfant.

61.La PRÉSIDENTE voudrait connaître l'attitude de la société géorgienne vis-à-vis des enfants handicapés et des enfants nés hors mariage et les mesures prises pour que les intéressés ne fassent l'objet d'aucune discrimination. Se référant à l'additif au rapport initial, où l'on indique que la société manifeste une sérieuse inquiétude face au nombre croissant de sectes et de mouvements religieux étrangers à la tradition géorgienne, elle demande si des dispositions ont été prises pour s'assurer que ces sectes ne violent pas les droits des enfants.

62.Mme BERIDZE (Géorgie) dit que les moyens dont dispose le bureau du Médiateur sont très limités et que la personne prochainement nommée à ce poste demandera dès son entrée en fonction le doublement ou le triplement de ces ressources. C'est également l'insuffisance de moyens qui explique que le bureau du Médiateur ne soit pas doté d'antennes locales. En ce qui concerne le projet de loi sur les droits de l'enfant, son objectif est de combler les lacunes existantes et il convient de noter que les ONG participent à son élaboration avec la commission parlementaire compétente.

63.Pour ce qui est des crédits budgétaires destinés aux secteurs concernant les enfants, un plan indicatif est établi chaque année mais, compte tenu des aléas de la situation, ce système n'a guère été efficace jusqu'à présent. La Géorgie bénéficie d'une aide humanitaire internationale très importante dont une grande partie est consacrée aux familles et aux enfants. Cette assistance tend à diminuer mais reste toutefois élevée dans les secteurs de la santé et de l'aide à l'enfance.

64.S'agissant du Parlement des enfants, il convient de noter que ses activités sont en grande partie financées par l'UNICEF. Par ailleurs, il existe un système de bourses destinées aux enfants particulièrement doués dans certaines disciplines, scientifiques ou artistiques notamment. Malgré ses ressources limitées, l'État tient à financer ce type d'entreprise.

65.On a longuement évoqué les insuffisances concernant les droits de l'enfant, mais il ne faut pas pour autant oublier de souligner qu'il est clairement stipulé dans bon nombre de dispositions législatives, dont celles du Code de la famille, que l'intérêt supérieur de l'enfant doit toujours être pris en considération.

66.Aucun mineur n'est décédé en prison. Les décès enregistrés sont ceux d'adultes condamnés, imputables dans la plupart des cas à une maladie. Les agents des forces de police qui violent les droits des prévenus ou des condamnés sont sanctionnés et, au besoin, licenciés. Dans ce contexte, aucune atteinte aux droits d'un mineur n'a été signalée. Il y a eu toutefois un cas où un enfant a fait une fausse déclaration à l'encontre d'un policier, avant de se rétracter.

67.En ce qui concerne l'interdiction des châtiments corporels, la législation géorgienne est on ne peut plus stricte, surtout si des enfants sont concernés. L'objectif n'est pas tant d'emprisonner les parents qui se rendent coupables de tels actes que de leur faire comprendre que leur comportement n'est pas tolérable d'un point de vue moral.

68.En ce qui concerne les statistiques relatives aux enfants, il devrait être possible de produire des données ventilées par groupe d'âge. Enfin, si l'on tient compte de l'avis de l'enfant dans la famille, ce n'est pas uniquement par souci d'obéir à la loi mais parce qu'il s'agit effectivement d'une tradition en Géorgie.

La séance est levée à 13 heures.

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