Nations Unies

CCPR/C/HRV/CO/2/Add.1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

4 février 2011

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Examen des rapports soumis par les États partiesconformément à l’article 40 du Pacte

Croatie *

Renseignements reçus de la République de Croatie surla suite donnée aux observations finales du Comitédes droits de l’homme (CCPR/C/HRV/CO/2)

[17 janvier 2011]

Réponse de la République de Croatie concernant la suite donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 5, 10 et 17 des observations finales du Comité des droits de l’homme relatives au deuxième rapport périodique de la République de Croatie, en date du 29 octobre 2009

1.Conformément au paragraphe 21 des observations finales du Comité des droits de l’homme (CCPR/C/HRV/CO/2) relatives au deuxième rapport périodique de la République de Croatie, la République de Croatie présente des renseignements sur la suite qu’elle a donnée aux recommandations formulées par le Comité aux paragraphes 5, 10 et 17.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 5

Lutte contre la discrimination

2.En ce qui concerne la lutte contre la discrimination, il est nécessaire de souligner que la République de Croatie prend des mesures vigoureuses pour éliminer toute forme de discrimination et combattre les préjugés à l’égard des minorités ethniques.

3.Afin de garantir une meilleure protection aux membres des minorités nationales, notamment des minorités serbes, de promouvoir leurs droits et d’éliminer les comportements discriminatoires à l’égard de tous les membres des minorités nationales, le Gouvernement croate a adopté, en 2008, un Plan d’action aux fins de l’application de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités. Ce document a pour objectif de permettre aux intéressés d’exercer dans les meilleures conditions et aussi pleinement que possible les droits qui leur sont garantis par la Loi constitutionnelle sur la protection des droits des minorités nationales.

4.Le Plan d’action susmentionné comprend des mesures réparties en 12 chapitres (usage officiel et public des langues et alphabets des minorités nationales; enseignement dans la langue et l’alphabet des minorités nationales; utilisation des signes et symboles propres à ces minorités; autonomie culturelle, droit de conserver sa religion et de fonder des communautés religieuses avec d’autres adeptes de cette religion; accès aux médias; organisation autonome et association dans le but de servir des intérêts communs; présence des minorités au sein des organes représentatifs à l’échelon national et au niveau local ainsi que dans les organes administratifs et judiciaires; participation des membres des minorités nationales à la vie publique et à la gestion des affaires locales par le biais des conseils et la désignation de représentants des minorités; protection contre toute activité susceptible de porter atteinte aux droits et libertés des membres des minorités nationales; renforcement de la tolérance à l’égard des différences et répression de la discrimination; Programme national en faveur des Roms et Plan d’action de la Décennie 2005-2015 pour l’intégration des Roms; mesures générales visant à appuyer la mise en œuvre de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités et du Plan d’action).

5.Pour assurer efficacement le suivi de la mise en œuvre des mesures figurant dans le Plan d’action, la présentation d’un rapport annuel au Gouvernement sur la mise en œuvre du Plan d’action aux fins de l’application de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités a été rendue obligatoire. Ainsi, en octobre 2010, le Gouvernement croate a adopté le Rapport sur la mise en œuvre du Plan d’action aux fins de l’application de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités nationales pour 2008 et 2009.

6.Il ressort des précédentes constatations sur l’exécution du Plan d’action que les mesures ont produit les résultats escomptés dans de nombreux domaines (autonomie culturelle des minorités nationales, enseignement dans la langue et l’alphabet des minorités nationales, droit de professer sa religion et de fonder des communautés religieuses avec d’autres adeptes de cette religion, présence des minorités au sein des organes représentatifs à l’échelon national et au niveau local, exécution du Programme national en faveur des Roms et du Plan d’action de la Décennie pour l’intégration des Roms 2005-2015). Les représentants des minorités nationales au Parlement croate ont largement contribué à la concrétisation des droits de celles-ci. Les membres des minorités nationales font partie intégrante de la majorité au pouvoir et elles participent à la gestion des affaires de l’État.

7.Il est important de souligner que d’après l’analyse de la mise en œuvre des mesures susmentionnées, 48 d’entre elles ont été pleinement appliquées (51,6 %), 33 sont en cours d’exécution (35,48 %), 5 ont été partiellement exécutées (5,38 %) et 7 n’ont pas été mises en œuvre (7,53 %). Les statistiques ci-dessus montrent donc un pourcentage élevé d’exécution des mesures prévues au Plan d’Action (92,47 %). La plupart de celles qui n’ont pas été appliquées devrait l’être en 2010.

8.Même s’il est manifeste que la mise en œuvre des mesures du Plan d’action a contribué notablement à la promotion et à l’exercice effectif des droits des minorités nationales garantis par la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités, des améliorations sont encore possibles et le Bureau chargé des minorités élabore donc un nouveau Plan d’action aux fins de l’application de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités pour l’exercice à venir. Le nouveau Plan définira de nouvelles mesures permettant l’application cohérente de la Loi constitutionnelle sur les droits des minorités, en poursuivant la mise en œuvre des mesures en cours d’exécution, tout en intensifiant l’action visant à en améliorer l’efficacité.

9.Le Conseil consultatif du Conseil de l’Europe a, lui aussi, confirmé les progrès de la Croatie en ce qui concerne les droits des minorités nationales, après examen du troisième rapport de la République de Croatie sur la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Le Conseil de l’Europe a pris note avec satisfaction des normes rigoureuses que la République de Croatie a introduites dans sa législation.

10.Par ailleurs, le Bureau chargé des minorités nationales du Gouvernement de la République de Croatie, en coopération avec le Conseil pour les minorités nationales et la faculté de sciences politiques de Zagreb, a organisé un atelier intitulé «Médias et minorités nationales dans la République de Croatie» à l’intention des journalistes travaillant pour les médias électroniques et la presse écrite. Concernant les recommandations et les lignes directrices portant sur le traitement de sujets relatifs aux minorités, il a été souligné que la représentation de celles-ci dans les quotidiens et dans les journaux télévisés et radiodiffusés devait être améliorée. L’atelier avait pour objectif de développer l’objectivité des journalistes et des rédacteurs dans leurs articles sur des sujets ou des événements se rapportant aux minorités nationales, en soulignant la nécessité d’atténuer les stéréotypes et les préjugés à l’encontre des minorités nationales et en particulier des Roms.

11.En 2008, la République de Croatie a pris part à la campagne du Conseil de l’Europe intitulée «Dosta!» (Assez!), contre la discrimination à l’égard de la minorité rom en Europe. Conformément à la recommandation du Conseil de l’Europe et aux obligations incombant à la Croatie en tant que pays participant à cette campagne, le Bureau chargé des minorités nationales, en coopération avec Fade In, une ONG établie à Zagreb, a réalisé et financé, en 2009, un spot publicitaire pour la promotion de la campagne «Dosta!» qui a été diffusé sur la chaîne de télévision nationale HRT.

12.En 2009, dans le cadre du projet intitulé «Soutien à la mise en œuvre de la loi antidiscrimination», le Bureau chargé des droits de l’homme, le Bureau du Médiateur, le Centre d’étude sur la paix et l’École de la magistrature ont organisé ensemble à Zagreb, Split et Osijek des séminaires sur la mise en œuvre de la loi antidiscrimination réunissant au total 58 participants venus de tout le pays.

13.Également en 2009, des ateliers intitulés «Appuyer les droits des témoins et des victimes» organisés à Zagreb, Split, Rijeka et Osijek ont réuni au total 75 participants (juges et procureurs) venus de différentes régions de la République de Croatie.

14.Enfin, les établissements sociaux ont reçu des instructions claires en ce qui concerne la mise en œuvre d’une réglementation prévoyant une action positive en matière de droits de l’homme et de lutte contre la discrimination, c’est-à-dire des mesures à prendre en cas d’intolérance, sous quelque forme que ce soit, et/ou d’agression verbale ou physique envers des membres des minorités nationales.

Crimes motivés par la haine

15.La République de Croatie accorde une attention particulière au problème des crimes motivés par la haine. Il convient de noter que le suivi analytique de la situation permet d’affirmer qu’aucun cas de violence organisée contre un groupe particulier n’a été enregistré. D’ailleurs, la collecte et l’analyse d’informations sur les crimes motivés par la haine permet de prendre des mesures préventives appropriées en cas d’aggravation avérée d’une menace dont un groupe ethnique serait l’objet, en tout temps, en tout lieu ou d’une manière quelconque.

16.Même si le phénomène est de moins en moins fréquent, il est clair qu’il existe encore quelques tensions héritées de la guerre patriotique, en particulier chez les populations qui ont participé aux hostilités et qui ont subi des pertes humaines et matérielles considérables. Il faut toutefois souligner qu’aucune escalade du conflit ou attaque organisée contre des membres d’autres groupes ethniques ou contre leurs biens n’a été observée. En général, il s’agit de conflits individuels, passagers et sporadiques, ne présentant entre eux aucune similitude sous-entendant des attaques planifiées, organisées et dirigées par certains groupes ou individus.

17.Parallèlement, il convient de mentionner que l’observation du Comité relative à la lenteur des enquêtes sur les affaires de crimes motivés par la haine, c’est-à-dire sur des incidents à motivation ethnique, n’est pas entièrement fondée. En effet, outre l’attention toute particulière accordée aux enquêtes concernant les crimes de ce type, le fort pourcentage d’affaires qui ont été réglées (80,43 % en 2007, 72,41 % en 2008 et plus de 90 % en 2009) contredit cette observation.

18.Le Ministère de l’intérieur s’occupe spécialement de ce genre d’infraction, ainsi qu’il ressort clairement de l’adoption et de la mise en œuvre du programme du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE à l’intention des agents de la force publique concernant la lutte contre les crimes inspirés par la haine. Vingt-cinq policiers ont suivi cette formation et ont acquis le statut de formateurs. Parallèlement, certains points du programme ont été intégrés dans la formation générale des agents de la force publique ainsi que dans celle des spécialistes. La procédure à suivre dans les affaires relatives à des crimes motivés par la haine est clairement définie pour tous les services de la Direction de la police et est énoncée par des instructions spéciales qui leur ont été transmises après l’entrée en vigueur de la modification du Code pénal (1er octobre 2006).

19.Afin de traiter les affaires de crimes motivés par la haine dans les meilleurs délais, le Bureau du Procureur général, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés dans le cadre de la procédure pénale relative à ce type d’affaires, a rédigé à l’adresse de tous les procureurs des directives au titre desquelles, en cas de soupçon de crime motivé par la haine, une instruction sera ouverte de toute urgence, en coordination avec la police et d’autres organes officiels, afin de permettre une enquête et une inculpation rapides. Des registres spéciaux sont tenus pour ces crimes qui font l’objet de statistiques spéciales. Ainsi, les fonctions d’instruction et de surveillance du Bureau du Procureur général garantissent un traitement rapide, approprié et complet de ces infractions, ainsi que la protection de la partie lésée, c’est-à-dire des victimes de ces crimes, tâches qui font partie des attributions du Bureau du Procureur général.

Rapatriement durable

20.En ce qui concerne la recommandation portant sur le fait que l’État doit poursuivre l’action de développement économique et social des régions peuplées de rapatriés serbes, il convient de noter que le Gouvernement de la République de Croatie a intensifié ses efforts dans les régions affichant un retard. Il s’agit entre autres des «zones intéressant particulièrement l’État» dans lesquelles revient s’installer la majorité des rapatriés d’origine serbe.

21.Un nouveau Ministère du développement régional, des forêts et de la gestion de l’eau a été créé à cet effet en 2008 et la loi sur le développement régional a été adoptée en décembre 2009. Cette loi fixe les objectifs et les principes régissant le développement régional de la République de Croatie, ainsi que le plan stratégique de développement des zones assistées et le cadre institutionnel permettant de régir, évaluer et classer les entités locales et régionales autonomes en fonction du niveau de développement de la zone. L’évaluation du niveau de développement des entités autonomes est fondée sur l’indice de développement socioéconomique.

22.En juin 2010, la Stratégie de développement régional de la République de Croatie pour 2011‑2013 a été adoptée. Plusieurs règlements d’application ont également été adoptés au titre de la loi sur le développement régional et la loi sur les zones assistées devrait être promulguée d’ici à la fin de l’année.

23.Les mesures susmentionnées et les textes rédigés par les institutions compétentes déterminent les actions qui contribueront à un développement plus harmonieux de toutes régions de la République de Croatie. Elles soutiennent les progrès démographiques et économiques, le retour des populations installées avant la guerre et les solutions permettant de fournir des logements permanents, ce qui suppose avant tout de contribuer au développement des régions en retard par rapport à la moyenne du pays, à savoir les zones intéressant particulièrement l’État où reviennent s’établir la majorité des rapatriés d’origine serbe.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 10

24.La République de Croatie accorde une attention particulière aux procès pour crimes de guerre. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a d’ailleurs souligné les efforts déployés pour traiter les affaires de crimes de guerre dans son rapport du 27 octobre 2009 qui met en avant les progrès appréciables réalisés dans ce domaine. En ce qui concerne la surveillance des procès pour crimes de guerre, il a été souligné que c’est une tâche ardue dont les ONG croates sont capables aujourd’hui de s’acquitter. La République de Croatie traite toutes les affaires de crimes de guerre en appliquant des critères égaux et objectifs à tous les auteurs de ces crimes.

Procès pour crimes de guerre

25.Afin de déterminer si les tribunaux rendent un jugement partial lors des procès pour crimes de guerre, selon que les accusés sont membres de l’Armée croate (ci-après dénommée HV), de l’Armée nationale yougoslave (ci-après dénommée JNA) ou de groupes paramilitaires, le Ministère de la justice a réalisé une «Analyse des procès-verbaux des affaires de crimes de guerre jugées par les tribunaux de district de la République de Croatie pour la période 2005-2009».

26.Cet intervalle de temps a été jugé raisonnable pour donner des indicateurs clairs de l’attitude des magistrats croates envers les auteurs de crimes de guerre. Les données traitées constituent un échantillon suffisamment important pour faire ressortir l’évolution du nombre de dossiers traités, et pour comparer certains paramètres.

27.Les résultats de l’analyse sont développés ci-après:

28.Sur les 195 accusés, 124 (64 %) étaient présents à leur procès, tandis que 71 (36 %), des membres de la JNA pour la plupart, ont été jugés par contumace. En effet, un très grand nombre de membres de la JNA n’ont pu être appréhendés par les autorités judiciaires (92 % ont été jugés par contumace). À l’inverse, il est à noter qu’en 2005, 2007, 2008 et 2009, tous les membres de l’Armée croate qui étaient inculpés étaient présents à leur procès et aucun d’entre eux n’a été jugé par contumace.

29.Sur les 47 membres de l’Armée croate, 41 étaient présents à leur procès et 6 (13 %) ont été jugés par contumace (dont 2 ont été acquittés (33 %) et 4 (64 %) ont été reconnus coupables de tous les chefs d’accusation retenus contre eux). En tout, 87 % des intéressés étaient donc présents à leur procès.

30.Sur les 148 membres de la JNA, 83 étaient présents à leur procès, tandis que 65 (43 %) ont été jugés par contumace (11 d’entre eux (17 %) ont été acquittés et 54 (83 %) ont été condamnés). En tout, 56 % des accusés étaient donc présents à leur procès.

31.Il ressort de ces statistiques qu’une proportion plus grande de membres de l’Armée croate étaient présents à leur procès et que, par conséquent, ils ont été plus nombreux que les membres de la JNA à assumer les conséquences de leurs crimes.

32.Étant donné qu’un grand nombre de procédures pénales par contumace ont été intentées dans les premières années 90, pendant la guerre, il a été conclu que dans certaines affaires des individus avaient été condamnés sur la base de preuves insuffisantes et que, par conséquent, ces condamnations n’étaient pas conformes aux normes légales régissant les procès. Dans tous les cas où des enquêtes ultérieures ont fourni des éléments permettant d’avancer que la condamnation par contumace, définitive et exécutoire, devait être revue en fonction des faits et preuves nouveaux (et pouvant aboutir à un acquittement ou à une condamnation fondée sur le Code pénal moins sévère), il a été conclu que la procédure devait être révisée.

33.Le Bureau du Procureur général de la République de Croatie (DORH) a donc élaboré un Plan d’action pour l’application de l’Instruction no O-4/08 relative aux affaires de crime de guerre et de l’Instruction no A-223/08 en date du 12 décembre 2008, permettant la réouverture de la procédure pénale concernant certaines affaires (conformément à la loi sur la procédure pénale, parue au Journal officiel no 152/08) pour lesquelles il a été conclu que des faits ou preuves nouvellement révélés pouvaient amener le tribunal à rendre un jugement différent de celui rendu par contumace.

34.En application du Plan d’Action susmentionné, le Bureau du Procureur général a examiné les affaires dans lesquelles les accusés avaient été condamnés par contumace pour crime de guerre. Cent dix-sept affaires ayant entraîné 465 condamnations définitives et exécutoires ont ainsi été recensées.

35.D’après les données recueillies depuis le mois de septembre 2010 au titre de la loi de 2008 sur la procédure pénale et de la loi portant modification de la procédure pénale (2009), 17 demandes en révision dans des procès pour crimes de guerre concernant 94 personnes ont été présentées. Ces demandes ont été agréées pour 90 personnes et rejetées pour 2 personnes; pour 2 autres, les tribunaux n’ont pas encore tranché. En ce qui concerne les futures affaires, le DORH, conformément à la loi, continuera de transmettre des demandes en révision lorsque celles-ci seront fondées.

36.Les deux lois susmentionnées ont donné plus de latitude au Bureau du Procureur général pour rouvrir des procédures, ce qui permet d’éliminer les défauts relevés dans les procès où le jugement définitif a été rendu en l’absence de l’accusé.

37.La quatrième Conférence régionale des procureurs généraux, qui s’est tenue à Brioni les 27 et 28 mai 2010, s’est révélée très utile pour renforcer la coopération bilatérale et l’échange de données d’expérience et de propositions pour la poursuite des criminels de guerre originaires de l’ex-Yougoslavie. La question des procédures relatives aux crimes de guerre a été abordée lors de cette conférence, qui a également été l’occasion de présenter la base de données sur les crimes de guerre créée par le Bureau du Procureur général de la République de Croatie et utilisée depuis juin 2010. Cette base de données contient des informations relatives aux crimes de guerre, une description des crimes, des renseignements sur les victimes et les témoins, des éléments de preuve ainsi que d’autres informations pertinentes. Le Bureau coordonne les procédures engagées par la police et d’autres organes de l’État afin de permettre d’enquêter sur les crimes de guerre dont les auteurs sont inconnus et il supervise à cette fin les échanges d’informations et de preuves avec les instances judiciaires d’autres pays, conformément aux protocoles de coopération qui ont été signés.

38.Il est important de mentionner la participation à cette conférence de représentants du Bureau du Procureur de la République de Serbie chargé de traiter les affaires de crimes de guerre, du Bureau du Procureur de la Bosnie-Herzégovine, du Bureau du Procureur général du Monténégro, du Bureau du Procureur fédéral de la République de Bosnie-Herzégovine, du Bureau du Procureur de la Republika Srpska et du Bureau du Procureur du district de Brčko en Bosnie-Herzégovine.

Impartialité des tribunaux croates

39.L’analyse du nombre de condamnations prononcées pour crimes de guerre débouche sur les conclusions suivantes:

40.Sur les 146 personnes ayant fait l’objet d’une condamnation définitive, 24 sont membres de l’Armée croate (16 %) et 122 sont membres de la JNA (84 %).

41.Sur les 49 personnes qui attendent le prononcé du jugement, 23 sont membres de l’Armée croate (47 %) et 26 sont membres de la JNA (53 %).

42.On observe une certaine continuité dans le nombre de verdicts rendus ces dernières années. En effet, 14, 19, 11, 10 et 24 verdicts ont été prononcés respectivement en 2005, 2006, 2007, 2008 et 2009, avec un taux de condamnation de 35 % pour les membres de l’Armée croate et de 65 % pour ceux de la JNA.

43.Les mesures appliquées par les organes judiciaires croates montrent que dès lors qu’il existe des raisons valables de soupçonner une personne de crime de guerre, cette personne doit être traduite en justice pour répondre de ses actes, qu’elle soit membre des forces d’agression ou des forces de défense.

44.Étant donné le contexte de la guerre patriotique, pendant laquelle l’Armée croate était l’armée de défense et la JNA était l’agresseur, il n’est pas étonnant que le nombre de condamnations de membres de la JNA soit plus élevé.

45.En outre, les deux catégories définies dans l’analyse sont l’Armée croate et la JNA, et non l’origine ethnique des intéressés. De fait, sur la période étudiée, parmi les membres de l’Armée croate qui ont été jugés, 3 se sont déclarés musulmans, 1 était issu de la minorité albanaise et 1 autre était Slovène (tous étant des citoyens de la République de Croatie). Il serait donc inapproprié de parler de l’origine ethnique des auteurs de crimes de guerre dans le cadre de la présente analyse, puisque l’origine ethnique n’a pas eu la moindre influence sur les décisions rendues au cours des procès pour crimes de guerre.

46.Au cours des cinq dernières années, les procès se sont déroulés devant 16 tribunaux de district, au sein des mêmes populations et dans les lieux où les crimes ont été commis, ce qui montre une certaine maturité et une volonté de sanctionner tous les crimes de guerre, indépendamment de l’origine ethnique de leurs auteurs (voir le tableau ci-dessous).

Nombre de personnes condamnées, par appartenance ethnique, année du jugement (1992-2009) et article du Code pénal (CC) invoqué

Personnes condamnées pour crime de guerre, par groupe ethnique

Total

Croates

Serbes

Bosniaques

Albanais

Autres

Inconnu

2009

Art. 158, par. 1 , du CC

29

5

18

4

2

2008

Art. 158, par. 1 , du CC

8

2

4

2

Art. 160 du CC

2

2

2007

Art. 158, par. 1 , du CC

21

8

12

1

2006

Art. 158, par. 1 , du CC

20

1

18

1

Art. 160 du CC

1

1

2005

Art. 158, par. 1 , du CC

28

26

1

1

Art. 160 du CC

3

1

2

2004

Art. 156 du CC

4

3

1

Art . 158, par . 1 , du C C

8

5

1

1

1

2003

Art . 158, par . 1 , du C C

10

10

Art. 158, par. 2 , du CC

1

1

Art. 160 du CC

1

1

2002

Art. 158, par. 1 , du CC

23

1

21

1

Art. 165 du CC

1

1

2001

Art. 156 du CC

2

2

Art. 158, par. 1 , du CC

20

20

Art. 160 du CC

3

3

Art. 165 du CC

2

2

2000

Art. 158, par. 1 , du CC

51

1

49

1

Art. 158, par. 2 , du CC

12

12

Art. 160 du CC

10

6

4

Art. 165 du CC

1

1

1999

Art. 156 du CC

2

2

Art. 158, par. 1 , du CC

22

10

2

10

Art. 158, par. 2 , du CC

4

1

3

Art. 160 du CC

5

5

1998

Art. 156 du CC

8

8

Art. 158, par. 1 , du CC

26

1

19

6

Art. 160 du CC

1

1

1997

Art. 120, par. 1 , du BCC

29

1

28

Art. 120, par. 2 , du BCC

1

1

Art. 121 du BCC

1

1

Art. 121 du BCC

9

7

2

Art. 128 du BCC

1

1

1996

Art. 120, par. 1, du BCC

48

1

46

1

Art. 122 du BCC

7

2

5

Art. 128 du BCC

1

1

1995

Art. 120, par. 1, du BCC

55

3

30

1

1

20

Art. 122 du BCC

1

1

Art. 128 du BCC

3

3

1994

Art. 119 du BCC

1

1

Art. 120, par. 1, du BCC

144

8

117

1

4

14

Art. 120, par. 2, du BCC

1

1

Art. 121 du BCC

1

1

Art. 122 du BCC

6

6

Art. 128 du BCC

5

1

3

1

1993

Art. 142, par. 1, du CCY (Code pénal de Yougoslavie) (identique à l’article 120, par. 1, du BCCRH)

32

14

1

17

Art. 144 du CCY (identique à l’article 122 du BCCRH)

1

1

Art. 150 du CCY (identique à l’article 128 du BCC)

1

1

1992

Art. 144 du CCY (identique à l’article 122 du BCCRH)

1

1

Total

678

45

528

3

1

20

81

47.Il convient de mentionner que les personnes comptabilisées dans ce tableau ont été jugées conformément à la loi en vigueur au moment des faits. C’est pourquoi les jugements rendus dans la période 1992-1993 l’ont été en application des dispositions du Code pénal de Yougoslavie. À partir de 1993, les jugements ont été rendus conformément au Code pénal de la République de Croatie.

Le projet du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme«Justice pour les crimes de guerre»

48.La formation du personnel intervenant dans les procès pour crimes de guerre est dispensée dans le cadre du projet du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) intitulé «Justice pour les crimes de guerre». Ces dernières années, une formation dans le domaine d’expertise juridique susmentionné a été organisée à l’intention des avocats et des magistrats. Une conférence régionale a été tenue sur le thème des crimes de guerre.

49.En 2008, l’Association du barreau croate et le Ministère de la justice ont établi une liste d’avocats chevronnés désireux de compléter leur formation pour travailler en tant qu’avocats de la défense dans des affaires de ce type. Cette liste a été publiée sur le site Web de l’Association du barreau et communiquée à tous les tribunaux de district. La pratique a aussi été instaurée de désigner comme avocats de la défense des personnes figurant sur cette liste. Le 14 avril 2009, une formation à l’intention des avocats ayant fait part de leur intérêt s’est tenue dans les locaux de l’Association du barreau, en coopération avec l’École de la magistrature.

50.Une formation continue concernant les procès pour crimes de guerre est assurée aux juges et aux procureurs. Depuis 2004, plusieurs séminaires et ateliers ont été organisés à l’École de la magistrature, en vue de familiariser des juges et des procureurs avec les particularités de ces procès. La formation s’est déroulée comme suit:

a)En 2004

Atelier intitulé «La Croatie et le droit pénal international», en coopération avec l’École de la magistrature et le Ministère néerlandais des affaires étrangères:

À Stubičke Toplice les 21 et 22 mai, les 11 et 12 juin, et les 2 et 3 juillet;

À Opatija les 24 et 25 septembre;

À Trogir les 15 et 16, et les 29 et 30 octobre.

Ont participé à cet atelier 60 juges et procureurs venus de toute la Croatie.

b)En 2007

Séminaire intitulé «Organisation et tenue de l’audience principale: le rôle du tribunal dans la garantie d’une défense appropriée et l’utilisation des éléments de preuve dans le contexte du droit à une procédure équitable dans les procès pour crimes de guerre», organisé par l’École de la magistrature et l’OSCE:

À Zadar les 8 et 9 novembre;

À Tuhelj les 29 et 30 novembre.

Ont participé à ce séminaire 59 juges et procureurs venus de toute la Croatie.

c)En 2009

Séminaire intitulé «Crimes de guerre: réouverture de la procédure pénale pour les procès par contumace au titre des nouvelles dispositions de la loi sur la procédure pénale, en vigueur depuis le 1er janvier 2009», organisé par l’École de la magistrature:

À Požega le 26 janvier;

À Osijek le 30 janvier;

À Šibenik le 5 février;

À Zadar le 6 février;

À Zagreb le 9 février.

Ont participé à ce séminaire 78 juges et procureurs venus de toute la Croatie.

51.En juin 2007, une conférence régionale intitulée «L’héritage du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et son influence sur les États de la région» a été organisée à Dubrovnik par la faculté de droit de l’Université de Zagreb, des associations de la société civile et l’École de la magistrature. Au total, 51 participants étaient présents, dont 17 venus des pays voisins et 34 de différentes régions de Croatie.

52.Le BIDDH a élaboré un projet qui comprendra la traduction en langue croate des verdicts du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). Une liaison vidéo prévue dans le cadre du projet a été mise en place.

53.Le fondement juridique de l’utilisation des enregistrements vidéo est la loi sur la procédure pénale de la République de Croatie. Sur le territoire, cinq tribunaux de district (Osijek, Rijeka, Split, Vukovar et Zagreb) compétents pour juger les affaires visées à l’article 11 bis du Règlement de procédure et de preuve du TPIY sont équipés de tous les moyens techniques nécessaires pour entendre les témoins de cette manière. En 2009, des témoignages ont été recueillis à l’aide des moyens vidéo dans les tribunaux de Zagreb, Rijeka et Vukovar:

Dans cinq procédures avec la République de Serbie;

Dans une procédure avec la Bosnie-Herzégovine;

Dans deux procédures avec le Royaume de Norvège.

54.Les procès pour crimes de guerre se tiennent devant tous les tribunaux de district compétents, conformément à l’article 12 de la loi sur l’application du statut de la Cour pénale internationale et sur les poursuites des infractions pénales au droit international humanitaire et au droit international militaire (JO no 175/03), qui dispose que, pour les crimes de guerre, sont aussi compétents, outre les tribunaux locaux compétents, les tribunaux de district de Zagreb, Osijek, Rijeka et Split. Ceux-ci se sont vu accorder le statut et le mandat spéciaux d’instance spécialisée pour les crimes de guerre. Ladite loi prévoit également la possibilité pour le Procureur général de Croatie de demander au Président de la Cour suprême, dans les cas où des irrégularités sont constatées, l’autorisation de transférer une procédure du tribunal local à l’instance spécialisée.

55.Il ne faut donc pas voir les tribunaux spécialisés pour les crimes de guerre comme une nécessité pour poursuivre convenablement les auteurs de crimes de guerre dans toutes les procédures relevant des tribunaux locaux mais comme une option que peut choisir le Bureau du Procureur général, avec l’assentiment de la Cour suprême, pour les affaires pour lesquelles il existe un motif quelconque de supposer que le procès ne respecte pas les règles de procédure prescrites.

56.Au 30 septembre 2010, le Bureau du Procureur général avait présenté à la Cour suprême huit demandes de transfert de dossier de crime de guerre à un tribunal spécialisé. La Cour suprême a accédé à la demande dans quatre affaires:

Une affaire du tribunal de district de Gospić a été transférée au tribunal de district de Rijeka;

Une affaire du tribunal de district de Karlovac a été transférée au tribunal de district de Zagreb;

Deux affaires du tribunal de district de Šibenik ont été transférées au tribunal de district de Split.

57.Concernant les quatre autres demandes de transfert, la Cour suprême n’a pas encore rendu sa décision.

58.Par l’intermédiaire de l’attaché de liaison auprès du TPIY, le ministère public rassemble des données et éléments de preuve complémentaires pour mettre au jour et poursuivre des crimes de guerre dont les auteurs directs n’ont pas encore été découverts. C’est avec ce même objectif qu’on s’attache à collecter activement des éléments de preuve pour les affaires dans lesquelles les auteurs directs sont encore inconnus, afin de traiter ces affaires selon le principe dit de la responsabilité hiérarchique des commandants d’unité, que ce soit chez les Croates ou chez les Serbes.

59.En ce qui concerne la coopération avec le TPIY et plus particulièrement la soumission de documents ayant trait aux opérations militaires croates demandés par le tribunal, il convient de signaler que la procédure prévue à l’article 54 bis du Règlement de procédure et de preuve concernant les documents relatifs à l’artillerie a été achevée le 27 juillet 2010. La chambre de première instance du TPIY dans l’affaire Gotovina , Čermak et Markača rejeté la demande du parquet de demander par une ordonnance au Gouvernement croate de remettre des pièces ou des informations au sujet des documents manquants concernant l’artillerie, parce qu’il était, selon l’analyse de la chambre, impossible de déterminer avec certitude si les documents en question existaient. De fait, après une procédure rigoureuse qui a duré plus de deux ans, la chambre de première instance du TPIY a reconnu la bonne volonté et le zèle dont le Gouvernement croate avait fait preuve dans la recherche des documents demandés et s’est prononcée contre l’adoption d’une telle décision à l’égard de la République de Croatie.

60.De plus, l’Équipe spéciale interministérielle, constituée par le Président croate à la fin du mois de septembre 2009 pour améliorer les enquêtes administratives menées au sujet de ces documents concernant l’artillerie, a présenté à ce jour 10 rapports à la chambre de première instance dans l’affaire Gotovina , Čermak et Markač. Cette Équipe spéciale poursuit ses activités et prépare actuellement un nouveau rapport.

Les crimes de guerre qui ne font pas l’objet d’une procédure

61.Un autre problème qui subsiste, outre les jugements par contumace, est celui des crimes de guerre qui n’ont pas fait l’objet de poursuites.

62.En décembre 2008, le Bureau du Procureur général et le Ministère de l’intérieur ont mis au point des plans d’action définissant l’unique ligne de conduite à suivre pour résoudre ce problème. Ces plans sont complémentaires et compatibles sur le fond.

63.Le Bureau et le Ministère de l’intérieur ont étudié ensemble le cas des affaires dans lesquelles les criminels sont inconnus afin de déterminer l’ordre de priorité quant aux mesures à prendre pour identifier les auteurs directs.

64.Les critères reconnus pour définir les affaires prioritaires sont avant tout le nombre de victimes, l’ampleur des dommages matériels, la manière dont le crime a été commis ainsi que les circonstances et la date des faits, les chances de retrouver les auteurs, les témoins et les victimes. Il s’agit dans tous les cas d’activités qui suivent encore leur cours.

65.Dans ces affaires, la situation se complique du fait que les événements se sont produits il y a près de vingt ans, ce qui est très long pour qui souhaite obtenir des éléments de preuve fiables, élucider les circonstances avec objectivité et aboutir à une reconstruction exacte d’un événement faisant l’objet de poursuites pénales devant un tribunal local ou étranger.

66.Nonobstant ces difficultés potentielles, le Bureau du Procureur général et la police collaborent activement pour identifier les crimes de guerre qui n’ont pas fait l’objet de poursuites et pour retrouver les personnes responsables, quelle que soit leur appartenance ethnique.

67.En juillet 2010, le Procureur général a tenu une réunion de travail avec les procureurs de district concernant les travaux préparatoires en vue de l’élaboration d’une stratégie opérationnelle pour le traitement des crimes de guerre, concernant tout particulièrement les crimes dont les auteurs demeurent inconnus. L’échéance pour la mise au point de la stratégie a été fixée à la mi-novembre 2010.

68.En août 2010, les parquets des tribunaux de district ont soumis au Bureau du Procureur général leur analyse des difficultés rencontrées et des mesures à prendre dans certaines affaires où les auteurs ne sont pas connus. Conformément aux instructions, les procureurs de district ont classé les affaires par ordre d’importance, c’est-à-dire en fonction de leur difficulté et selon leur évaluation des motifs de mener des investigations plus poussées pour identifier les auteurs.

69.Le Bureau du Procureur général a regroupé ces rapports en un document unique et donné sa propre analyse des priorités. Le 24 septembre 2010, le document a été présenté à la Direction de la police afin que les services de police puissent mettre en place, à la lumière de l’analyse des parquets, un plan d’action concret pour ces affaires.

La loi sur l’amnistie et application inopportune de la prescription

70.En ce qui concerne la recommandation de veiller à ce que la loi d’amnistie (JO no80/96) ne soit pas appliquée aux cas de violations graves des droits de l’homme ou aux violations qui constituent des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre, nous tenons à signaler que les infractions visées dans le Code pénal qui ne peuvent faire l’objet d’une grâce sont énumérées à l’article 3 de la loi d’amnistie. L’article dispose que les crimes de génocide ou de guerre et autres crimes constituant des violations graves des droits de l’homme ne peuvent pas faire l’objet d’une grâce, non plus que les actes de terrorisme constituant une infraction pénale en vertu du droit international.

71.En ce qui concerne la recommandation portant sur la nécessité de veiller à ce que l’application de la prescription soit suspendue pour la période du conflit, afin de permettre les poursuites dans les cas graves de tortures et d’homicides, il est à signaler que dans le Code pénal certaines infractions ne sont pas visées par les dispositions générales relatives à la prescription. Ainsi, la prescription ne s’applique pas aux crimes de génocide, à la guerre d’agression, aux crimes contre l’humanité, aux crimes de guerre ni aux autres infractions pénales pour lesquelles le droit international interdit la prescription. L’imprescriptibilité se fonde sur la Convention de 1968 sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

Réponse aux questions soulevées au paragraphe 17

72.Il est indiscutable qu’aucun journaliste ne devrait devenir, en raison de son travail, la cible d’attaques de la part de personnes que ses écrits dérangent. Les organes compétents de la République de Croatie mettent en œuvre toutes les activités de prévention et de répression possibles afin de prévenir et poursuivre mieux encore toutes les formes d’agressions et d’actes d’intimidation visant des journalistes.

73.Les agressions contre les journalistes, indépendamment des médias pour lesquels ils travaillent, sont une priorité des services de police. Cependant, les auteurs de ces infractions utilisent généralement la force physique ou des objets contondants (le plus souvent des battes ou des cannes), et ils sont habituellement masqués (casque de moto, casquette, lunettes de soleil). Dans ces conditions, et du fait que la police est d’ordinaire avertie après les faits, il est plus difficile d’identifier et de retrouver aussi bien les auteurs directs que les instigateurs de ces agressions.

74.Néanmoins, dans les cas de lésions corporelles graves infligées à des journalistes (celles qui sont classées «atteintes majeures à la vie ou à l’intégrité physique»), toutes les conditions légales étaient remplies pour la prise de mesures d’investigation spéciales et, sur ordre de la justice, certaines personnes ont été placées sous surveillance après que des informations avaient été reçues qui donnaient à penser qu’elles pouvaient être responsables d’agressions visant des journalistes. Malheureusement, dans certaines affaires, cette surveillance n’a pas permis de retrouver l’auteur; les services de police doivent poursuivre et intensifier leurs travaux sur ces dossiers.

75.Par ailleurs, pour prévenir toute agression potentielle contre certains journalistes virulents et qui ont des raisons de craindre qu’ils pourraient être la cible d’attaques, ou si la police elle-même a obtenu des informations dans ce sens, et parallèlement à l’action menée pour rechercher l’agresseur potentiel, la police accorde une protection aux intéressés, à moins que ceux-ci ne refusent expressément cette protection.

76.Les statistiques des agressions contre les journalistes montrent que le nombre des actions pour infraction pénale est en hausse. Or il est indéniable que les journalistes ne doivent pas être attaqués par d’autres personnes en raison de leur travail, et en ce sens la police est clairement tenue de mener une enquête criminelle poussée à chaque agression de journaliste, en vue d’en traduire les auteurs en justice sans délai. S’agissant des agressions dont ont été victimes les journalistes D. Miljuš et H. Appelt, la police procède à une enquête comme suite à la requête du Bureau du Procureur général.

77.Le Bureau du Procureur général, dès qu’il reçoit un signalement ou toute autre forme de renseignement faisant état d’une agression, d’une menace ou de toute autre infraction pénale commise à l’encontre d’un journaliste, entreprendra, en coopération avec la police et d’autres institutions, toutes les mesures d’enquête et activités nécessaires pour identifier et poursuivre l’auteur des faits. C’est ainsi qu’au cours des dernières années une trentaine de personnes ont été mises en examen à l’issue d’une enquête (y compris les individus mis en cause pour les meurtres des journalistes I. Pukanić et Z. Franjić), et 20 d’entre elles ont été condamnées jusqu’à présent.