Comité des droits de l’enfant
Observations finales concernant le rapport du Canada valant cinquième et sixième rapports périodiques *
I.Introduction
1.Le Comité a examiné le rapport du Canada valant cinquième et sixième rapports périodiques à ses 2604e et 2606e séances, tenues en ligne les 17 et 18 mai 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2630e séance, le 3 juin 2022.
2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Canada valant cinquième et sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points, qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu en ligne avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.
II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie
3.Le Comité salue les progrès réalisés par l’État partie dans divers domaines, parmi lesquels le logement et le sans-abrisme, le renforcement du dialogue avec les adolescents et la sensibilisation aux problèmes de santé mentale. Il salue également les mesures législatives et institutionnelles et les politiques que l’État partie a adoptées pour mettre en œuvre la Convention, parmi lesquelles les modifications apportées en 2021 à la loi fédérale sur le divorce en vue de prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant, la publication, en 2015, du rapport final et des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et l’entrée en vigueur, en 2020, de la loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations
4.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle l’attention de l’État partie sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : le mécanisme de suivi indépendant (par. 13), la non-discrimination (par. 18), le droit à la vie, à la survie et au développement (par. 21), la maltraitance et la négligence (par. 27), les enfants privés de milieu familial (par. 32) et le niveau de vie (par. 39).
5. Le Comité recommande à l’État partie de garantir la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il le prie instamment de faire en sorte que les enfants participent activement à la conception et à la mise en œuvre des politiques et des programmes les concernant adoptés aux fins de la réalisation des 17 objectifs de développement durable.
A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))
Réserves et déclarations
6. Conformément à ses recommandations précédentes et à la lumière du paragraphe 5 de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne, le Comité prie instamment l’État partie d’envisager de retirer ses réserves aux articles 21 et 37 ( al. c)) de la Convention.
Législation
7. S’il salue l’incorporation de la Convention dans le préambule de nombreuses lois des territoires et provinces, le Comité réaffirme une fois de plus que l’État partie devrait élaborer une loi générale sur les droits de l’enfant au niveau fédéral, conformément aux principes et aux dispositions de la Convention, et veiller à ce que ses lois soient appliquées de manière égale dans tout le pays.
Politique et stratégie globales
8. Le Comité rappelle ses précédentes recommandations et recommande à l’État partie d’adopter une stratégie nationale qui fournisse un cadre global de mise en œuvre au niveau fédéral et au niveau des provinces et des territoires, qui énonce dûment les priorités, les objectifs et les responsabilités respectives des différentes autorités aux fins de la mise en œuvre globale de la Convention, et qui permettra aux provinces et aux territoires d’adopter en conséquence leurs propres plans et stratégies spécifiques. Il lui recommande aussi d’allouer des ressources humaines, techniques et financières appropriées à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation de cette stratégie globale et des plans provinciaux et territoriaux connexes.
Coordination
9. Le Comité recommande à l’État partie de créer un organe approprié à un niveau interministériel élevé ou de renforcer le Groupe de travail interministériel sur les droits de l’enfant au sein du Gouvernement fédéral et de le doter d’un mandat clair et d’une autorité suffisante pour coordonner toutes les activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux national, régional et local et dans tous les secteurs. L’État partie devrait veiller à ce que cet organe de coordination soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.
Allocation de ressources
10. Le Comité se félicite de la mise en place d’une budgétisation tenant compte des questions de genre au niveau fédér al. Rappelant son observation générale n o 19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant et compte tenu de la cible 16.5 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :
a) De procéder à une évaluation complète des besoins budgétaires dans les domaines concernant les enfants et, eu égard à l’article 4 de la Convention, d’allouer des ressources budgétaires suffisantes à la mise en œuvre des droits de l’enfant ;
b) D’adopter une approche fondée sur les droits de l’enfant pour l’élaboration du budget de l’État en mettant en place un système de suivi de l’allocation et de l’emploi des ressources destinées aux enfants pour l’ensemble du budget. L’État partie devrait également utiliser ce système de suivi pour les études d’impact portant sur la manière dont les investissements dans les différents secteurs peuvent servir l’intérêt supérieur de l’enfant ;
c) De définir des lignes budgétaires au profit de tous les enfants, en prêtant une attention particulière aux enfants défavorisés et aux enfants vulnérables pour lesquels des mesures sociales volontaristes pourraient se révéler nécessaires, par exemple les enfants de personnes autochtones, de Canadiens d’ascendance africaine ou de membres d’autres groupes minoritaires et les enfants handicapés, et de faire en sorte que ces lignes budgétaires soient protégées, même en cas de crise économique, de catastrophe naturelle ou d’autres situations d’urgence.
Collecte de données
11. Prenant note de l’existence de 13 régimes de données reposant sur des techniques, des définitions et des technologies différentes, ce qui complique l’agrégation et la comparaison des données, et rappelant son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention, le Comité recommande à l’État partie :
a) D’améliorer son système de collecte de données au niveau fédéral de sorte à permettre le suivi global des droits de l’enfant à l’échelle du pays, et de veiller à ce que ces données soient collectées pour tous les domaines visés par la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant et à ce qu’elles soient ventilées par âge, sexe, handicap, zone géographique, origine ethnique et nationale et situation socioéconomique, de manière à faciliter l’analyse de la situation des enfants, en particulier des enfants vulnérables ;
b) De veiller à ce que les données et les indicateurs relatifs aux droits de l’enfant couvrent tous les enfants de moins de 18 ans et soient communiqués aux ministères compétents et utilisés pour élaborer, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets visant à assurer la mise en œuvre effective de la Convention ;
c) De tenir compte du cadre conceptuel et méthodologique établi dans le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme intitulé Indicateurs des droits de l’homme : Guide pour mesurer et mettre en œuvre au moment de définir, de recueillir et de diffuser des données statistiques.
Mécanisme de suivi indépendant
12.Le Comité note avec une vive préoccupation qu’il n’existe pas de commissaire aux droits de l’enfant indépendant au niveau fédéral et regrette la fermeture du Bureau du Défenseur des enfants de l’Ontario.
13. Le Comité invite instamment l’État partie :
a) À mettre en place rapidement au niveau fédéral un mécanisme indépendant de suivi des droits de l’enfant dont le mandat soit conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et qui soit en mesure de recevoir, instruire et traiter les plaintes des enfants d’une manière qui soit adaptée aux enfants et tienne compte de leurs besoins ;
b) À veiller à ce que ce mécanisme soit chargé d’établir des rapports publics sur la situation des droits de l’enfant ;
c) À rouvrir le Bureau du Défenseur des enfants de l’Ontario en lui confiant le même mandat qu’auparavant.
Diffusion, sensibilisation et formation
14. Notant que les adultes et les enfants vivant dans l’État partie ne connaissent pas suffisamment la Convention, le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses programmes et campagnes de sensibilisation, en coopération avec les organisations de la société civile au niveau fédéral et aux niveaux des provinces et des territoires, afin que la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant soient largement connus du public, y compris des parents et des enfants eux-mêmes. Il lui recommande également d’organiser une formation obligatoire sur les droits garantis à l’enfant par la Convention et par le droit interne, à l’intention de tous les professionnels travaillant au contact et au service d’enfants, parmi lesquels les agents de l’État, le personnel des autorités judiciaires et les professionnels qui travaillent auprès d’enfants dans les services de santé et les services sociaux.
Coopération internationale
15. Le Comité se félicite des engagements pris par l’État partie au niveau international dans divers domaines liés aux droits de l’enfant. Eu égard à la cible 17.2 des objectifs de développement durable, il invite l’État partie à consacrer 0,7 % de son revenu national brut à l’aide publique au développement, selon l’objectif défini à l’échelle internationale, et à inscrire les droits de l’enfant au rang des priorités dans ses accords de coopération internationale. Il lui recommande également d’évaluer les effets de tous ses programmes actuels et futurs d’aide et de coopération internationales sur les droits de l’enfant.
Droits de l’enfant et entreprises
16. Tout en saluant la création, en 2018, du poste d’ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, et rappelant son observation générale n o 16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l’enfant et les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et d’appliquer des règles visant à garantir le respect par le secteur des entreprises des normes internationales et nationales en matière de droits de l’homme, de travail et d’environnement, entre autres, notamment en ce qui concerne les droits de l’enfant. Il lui recommande en particulier :
a) De définir un cadre réglementaire clair pour les entreprises opérant sur son territoire et à l’étranger en vue de recenser les activités qui ont des incidences négatives sur les droits de l’homme ou qui mettent en danger les droits des enfants, de prévenir et d’atténuer leurs effets, en particulier les risques engendrés par la production de combustibles fossiles, et de rendre compte des mesures prises ;
b) D’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme, en plus de la stratégie sur la conduite responsable des entreprises, en passant par une consultation multisectorielle axée sur les droits de l’enfant ;
c) D’exiger des entreprises qu’elles évaluent les effets de leurs activités sur les droits de l’enfant s’agissant de l’environnement et de la santé, entre autres, qu’elles procèdent à des consultations sur ces questions et qu’elles rendent publiques toutes les informations y relatives ainsi que les mesures qu’elles prévoient de prendre pour réduire ces effets.
B.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)
Non-discrimination
17.Le Comité est vivement préoccupé par :
a)La discrimination dont sont victimes les enfants marginalisés et défavorisés dans l’État partie, par exemple la discrimination structurelle dont font l’objet les enfants appartenant à des groupes autochtones et les enfants d’ascendance africaine, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, à la santé et à un niveau de vie suffisant ;
b)Les disparités manifestes entre régions et territoires en ce qui concerne le traitement des enfants et leurs droits, notamment s’agissant des enfants handicapés, des enfants migrants et des enfants appartenant à des groupes ethniques minoritaires.
18. Eu égard aux cibles 5.1 et 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie de mettre un terme à la discrimination structurelle à l’égard des enfants appartenant à des groupes autochtones et des enfants d’ascendance africaine et de s’attaquer aux disparités dans l’accès aux services de tous les enfants, y compris ceux qui sont marginalisés et défavorisés, par exemple les enfants autochtones, les enfants handicapés, les enfants migrants et les enfants appartenant à des groupes ethniques minoritaires.
Intérêt supérieur de l’enfant
19. Rappelant son observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie :
a) De veiller à ce que le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale soit dûment intégré ainsi qu’interprété et appliqué de manière cohérente dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires, comme dans l’ensemble des politiques, des programmes et des projets ayant une incidence sur les enfants ;
b) De définir des procédures et des critères afin d’aider l’ensemble des personnes en position d’autorité à déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans chaque domaine et à en faire une considération primordiale ;
c) De mettre en place, pour l’ensemble des lois et des politiques intéressant les enfants, des procédures obligatoires d’évaluation préalable et rétrospective de leur effet sur l’exercice du droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale.
Droit à la vie, à la survie et au développement
20.Le Comité est vivement préoccupé par :
a)Les informations selon lesquelles des tombes non marquées ont été découvertes sur les sites d’anciens pensionnats autochtones ;
b)Les conclusions formulées en 2019 à la suite de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, selon lesquelles des milliers de décès ou de disparitions de filles ont probablement été passés sous silence pendant des décennies ;
c)Le fait que les enfants anichinabés de la Première Nation de Grassy Narrows, dans le nord-ouest de l’Ontario, continuent de souffrir de problèmes de santé physique et mentale chroniques et graves, tels que des crises d’épilepsie, des troubles de la parole et des difficultés d’apprentissage, en raison de la contamination de l’eau par le mercure dans cette région.
21. Le Comité prie instamment l’État partie :
a) De renforcer les mesures visant à ce que des enquêtes soient menées dans les affaires de meurtre et de disparition et à ce que les familles des victimes et les survivants des pensionnats sur l’ensemble du territoire obtiennent justice ;
b) De donner suite aux appels à la justice figurant dans le rapport de l’Enquête nationale en associant réellement les filles autochtones aux mesures prises ;
c) De veiller à ce que les enfants autochtones du nord-ouest de l’Ontario bénéficient des soins spécialisés nécessaires au traitement de l’intoxication au mercure, y compris en finançant intégralement la construction et le fonctionnement du foyer et centre de soins pour les victimes demandé par la Première Nation de Grassy Narrows ;
d) De veiller à ce que le Gouvernement fédéral collabore avec la province de l’Ontario pour s’acquitter des engagements pris en vue de l’assainissement complet des rivières English et Wabigoon afin de régler la crise sanitaire due au mercure ;
e) D’offrir aux enfants des recours utiles s’agissant des violations de leur droit à la santé résultant de la contamination par le mercure et de prendre immédiatement des mesures pour remédier aux effets de cette contamination sur la santé et le bien-être de la communauté.
Respect de l’opinion de l’enfant
22. Se félicitant des modifications apportées en 2021 à la loi fédérale sur le divorce , qui obligent les juges à prendre en considération l’opinion et les préférences de l’enfant, en tenant dûment compte de son âge et de sa maturité, et rappelant son observation générale n o 12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, le Comité rappelle ses précédentes recommandations finales et recommande à l’État partie de continuer à assurer la mise en œuvre du droit de l’enfant d’être entendu conformément à l’article 12 de la Convention. À cette fin, il lui recommande en particulier :
a) De promouvoir la participation effective et utile de tous les enfants dans la famille, dans la communauté et à l’école, et d’élaborer des bonnes pratiques et de les mettre en commun ;
b) De faire de la prise en considération de l’opinion de l’enfant une condition nécessaire dans tous les processus décisionnels officiels qui concernent les enfants, notamment les affaires de garde d’enfant, les décisions des services de protection de l’enfance, la justice pénale, l’immigration et l’environnement ;
c) De veiller à ce que les enfants aient la possibilité de faire entendre leurs griefs si leur droit d’être entendus n’est pas respecté dans les procédures judiciaires et administratives, et à ce qu’ils aient accès à une procédure de recours.
C.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)
Enregistrement des naissances et nationalité
23. Prenant note des obstacles disproportionnés qui entravent l’accès des enfants des communautés autochtones à l’enregistrement des naissances, le Comité rappelle la cible 16.9 des objectifs de développement durable et prie instamment l’État partie :
a) De délivrer un certificat de naissance à tous les enfants nés sur son territoire, en particulier les enfants autochtones, immédiatement après leur naissance ;
b) De modifier la loi sur la citoyenneté pour y inclure une définition de l’apatridie qui soit conforme au droit international et d’envisager de ratifier la Convention relative au statut des apatrides.
Préservation de l’identité
24. Le Comité rappelle ses précédentes recommandations et prie instamment l’État partie :
a) De veiller au plein respect de la préservation de l’identité de tous les enfants et de prendre des mesures efficaces afin que les enfants autochtones relevant du système de protection de l’enfance soient en mesure de préserver leur identité ;
b) De rétablir sur les certificats de naissance les noms qui ont été modifiés ou supprimés illégalement ;
c) D’adopter des mesures législatives et administratives visant à protéger les droits des enfants appartenant à des minorités et des populations autochtones notamment en ce qui concerne leur nom, leur culture et leur langue, et à veiller à ce que le grand nombre d’enfants qui relèvent du système de protection de l’enfance reçoivent un enseignement sur leur culture et ne perdent pas leur identité ;
d) De réviser sa législation afin que les femmes et les hommes aient légalement le droit de transmettre, dans des conditions d’égalité, leur statut d’autochtone à leurs petits-enfants.
D.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 (al. a)) et 39)
Châtiments corporels
25. Le Comité prend note de la feuille de route de 2019 visant à mettre fin à la violence, mais il regrette que le projet de loi S-206, qui visait à abroger l’article 43 du Code criminel autorisant l’emploi de la force dans une « mesure raisonnable », n’ait pas été adopté. Rappelant son observation générale n o 8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, il prie instamment l’État partie :
a) D’abroger l’article 43 du Code criminel, afin de supprimer l’autorisation d’employer la force dans une « mesure raisonnable » pour corriger les enfants, et d’interdire expressément toutes les formes de violence à l’égard des enfants de tous âges dans la famille, à l’école et dans les autres établissements où les enfants peuvent être placés ;
b) De promouvoir des méthodes d’éducation et de discipline positives, non violentes et participatives ;
c) De lancer des campagnes de sensibilisation destinées aux parents et aux professionnels travaillant au contact ou au service d’enfants afin de promouvoir un changement d’attitude, dans la famille et dans la communauté.
Maltraitance et négligence
26.Le Comité note avec une vive préoccupation que le système de protection de l’enfance ne protège toujours pas les enfants et les adolescents autochtones contre la violence et qu’aucune stratégie nationale globale de prévention de la violence à l’égard de tous les enfants n’a été mise en place. Il prend note des conclusions présentées par la Commission de vérité et réconciliation dans son rapport de 2015 et des 94 appels à l’action lancés par cette même commission, mais s’inquiète de ce qu’aucune information n’a été fournie sur les mesures prises pour donner suite à ces appels.
27. Compte tenu de son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et des cibles 5.2, 16.1 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l’État partie :
a) D’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie nationale de prévention de toutes les formes de violence à l’égard de tous les enfants, de lui allouer les ressources nécessaires et de mettre en place un mécanisme de suivi ;
b) De veiller à l’application des recommandations que la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences a formulées à l’occasion de sa visite au Canada en 2018, concernant la nécessité d’un plan d’action national contre la violence à l’égard des femmes et des filles, et notamment des filles autochtones, et de donner suite aux appels à la justice pour les filles, les femmes et les personnes lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres lancés à l’issue de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ;
c) De renforcer encore les programmes de sensibilisation et d’éducation, y compris les campagnes, avec la participation des enfants, afin de formuler une stratégie globale visant à prévenir et combattre la maltraitance des enfants et la négligence ;
d) D’encourager les programmes à assise communautaire et familiale visant à prévenir et à combattre la violence domestique, la maltraitance des enfants et la négligence en adoptant une approche intersectorielle et adaptée aux enfants, prévoyant notamment à l’accès des enfants victimes à des thérapies appropriées ;
e) De continuer à donner suite aux 94 appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation concernant les violences physiques et sexuelles, la maltraitance et la négligence dont des enfants autochtones ont été victimes dans des pensionnats pendant des décennies.
Exploitation sexuelle et abus sexuels
28. Compte tenu des cibles 5.2, 16.1 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité rappelle ses précédentes recommandations et recommande à l’État partie :
a) De prendre des mesures de soutien et de financement suffisantes pour que tous les enfants victimes d’abus sexuels aient accès aux centres de défense des enfants et des jeunes, organismes interinstitutionnels adaptés aux besoins des enfants ;
b) De considérer comme procédure standard la pratique consistant à reconnaître comme preuve principale l’enregistrement audio-visuel du témoignage d’un enfant, suivi sans délai d’un contre-interrogatoire mené dans des locaux adaptés aux enfants ;
c) De développer les stratégies et programmes visant à lutter contre toutes les formes d’exploitation sexuelle, y compris dans le secteur du voyage et du tourisme et en ligne ;
d) D’établir un plan d’action visant à coordonner et à renforcer les pratiques d’enquête des forces de l’ordre dans les affaires d’abus sexuels sur enfants dans le contexte de la prostitution et de prendre des mesures énergiques pour que toutes les affaires de disparition de filles fassent l’objet d’une enquête et donnent lieu à des poursuites, en veillant à ce que la loi soit appliquée dans toute sa rigueur ;
e) D’établir des critères concernant les peines à imposer pour les infractions visées par le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, afin que la peine soit proportionnée à l’infraction.
Pratiques préjudiciables
29. À la lumière des informations selon lesquelles la législation canadienne autorise des interventions médicales et des traitements chirurgicaux non nécessaires sur les enfants intersexes, le Comité recommande à l’État partie :
a) De modifier sa législation, en particulier l’article 268 ( par. 3) du Code criminel, afin de garantir que les enfants intersexes ne seront pas soumis à des traitements médicaux ou chirurgicaux non nécessaires, eu égard aux droits de l’enfant à l’intégrité corporelle, à l’autonomie et à la libre disposition de soi, et de lancer des consultations nationales avec les personnes intersexes, y compris les enfants, pour éclairer la modification du Code criminel qui visera à interdire de pratiquer sans leur consentement des interventions chirurgicales médicalement non nécessaires sur des enfants intersexes ;
b) D’enquêter sur les cas dans lesquels des enfants intersexes ont fait l’objet d’interventions chirurgicales et des traitements médicaux sans y avoir consenti en connaissance de cause et d’adopter des dispositions législatives afin d’offrir une réparation aux victimes de telles pratiques, y compris une indemnisation adéquate ;
c) De sensibiliser et former les professionnels de la médecine et de la psychologie à l’étendue de la diversité sexuelle, y compris ses aspects biologiques et physiques, et aux conséquences que peuvent avoir pour les enfants intersexes les interventions chirurgicales et autres traitements médicaux non nécessaires.
E.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))
Milieu familial
30. Le Comité rappelle sa recommandation précédente et recommande à l’État partie de maintenir et renforcer le soutien qu’il apporte aux familles vulnérables, en particulier aux familles vivant dans la pauvreté, afin d’éviter que des enfants soient séparés de leur famille.
Enfants privés de milieu familial
31.Le Comité se félicite de l’entrée en vigueur, en janvier 2020, de la loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis, qui reconnaît la compétence des peuples autochtones en matière de services à l’enfance et à la famille, et il prend note des efforts que l’État partie déploie pour améliorer la situation des enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement. Il reste toutefois vivement préoccupé deconstater :
a)Que le nombre d’enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement reste élevé ;
b)Que les enfants autochtones et des enfants d’ascendance africaine restent surreprésentés parmi les enfants placés, y compris dans des familles d’accueil, souvent en dehors de leur communauté ;
c)Que les critères utilisés pour prendre des décisions concernant le retrait d’enfants à leur famille et le placement d’enfants, et qui reposent sur des facteurs socioéconomiques qui ont des incidences disproportionnées sur les enfants autochtones, les enfants d’ascendance africaine et les autres enfants appartenant à des groupes minoritaires, varient d’un endroit à l’autre ;
d)Que les enfants autochtones et les enfants d’ascendance africaine sont plus exposés que les autres aux mauvais traitements, à la négligence et à la violence dans le contexte de la protection de remplacement.
32. Appelant l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, le Comité rappelle ses recommandations précédentes sur les enfants privés de milieu familial et prie instamment l’État partie :
a) De renforcer ses mesures préventives visant à éviter que les enfants soient retirés de leur milieu familial en apportant une assistance et des services de soutien appropriés aux parents et aux personnes ayant la charge d’enfants dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives, y compris au moyen de programmes d’éducation, de services d’accompagnement et de programmes à assise communautaire destinés aux parents, et de réduire le nombre d’enfants qui font l’objet d’une protection de remplacement ;
b) De veiller à ce que la nécessité du placement de l’enfant en institution soit toujours évaluée par des équipes pluridisciplinaires de professionnels compétents, à ce que, dans un premier temps, le placement soit le plus court possible, et à ce que les enfants et leur famille participent à la prise de décision afin que l’approche suivie soit individualisée et adaptée à la communauté ;
c) De veiller à ce que les politiques et les pratiques soient guidées par le principe selon lequel la pauvreté financière et matérielle, ou la situation directement et uniquement imputable à cette pauvreté, ne devrait jamais être un critère suffisant pour retirer un enfant à ses parents ou pour décider qu’il doit faire l’objet d’une protection de remplacement ;
d) De prévoir des garanties suffisantes et de définir des critères précis, fondés sur les besoins et l’intérêt supérieur de l’enfant, permettant de déterminer si un enfant doit faire l’objet d’une protection de remplacement ;
e) De définir des normes de qualité pour toutes les formes de protection de remplacement, de réévaluer périodiquement la nécessité du placement des enfants en famille d’accueil ou en institution et de contrôler la qualité de la prise en charge dans ces différents cadres, notamment en mettant en place des mécanismes accessibles, efficaces et adaptés aux enfants, permettant de signaler les cas de maltraitance, de les suivre et d’y remédier et en infligeant aux auteurs des infractions des sanctions proportionnées ;
f) De renforcer les peines de substitution applicables dans la communauté à l’intention des femmes qui ont des enfants, y compris des nourrissons.
F.Enfants handicapés (art. 23)
33. Rappelant son observation générale n o 9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité prie instamment l’État partie de poursuivre ses efforts de mise en œuvre d’une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, de donner une place prépondérante à l’inclusion des enfants handicapés dans son action en faveur d’un Canada exempt d’obstacles grâce à la mise en œuvre de la loi canadienne sur l’accessibilité et :
a) De continuer de recueillir des données sur les enfants handicapés en vue d’éclairer les politiques et programmes les concernant et de mettre en place un système efficace et harmonisé d’évaluation des handicaps afin de rendre les services d’éducation, de santé et de protection sociale et les services juridiques, entre autres, accessibles aux enfants présentant tous types de handicaps, y compris à ceux qui vivent en milieu rural et dans les réserves, ;
b) De renforcer les mesures visant à garantir une éducation inclusive, y compris en adaptant les programmes scolaires et en formant des enseignants et des professionnels spécialisés qui seront affectés aux classes intégrées ;
c) De renforcer le soutien apporté aux enfants handicapés et à leur famille, en particulier dans les communautés autochtones, en leur fournissant tous les services nécessaires et des soins de qualité, afin que les contraintes financières ne fassent pas obstacle à l’accès aux services et que les revenus du ménage ou l’emploi des parents ne pâtissent pas de la situation ;
d) De renforcer les mesures visant à ce que les enfants handicapés, en particulier dans les communautés autochtones, aient accès à des soins de santé disponibles, accessibles et de qualité, y compris à des programmes de détection et d’intervention précoces au niveau local ;
e) D’associer véritablement les enfants autochtones handicapés, en particulier ceux qui vivent dans des réserves, à la conception et à l’application des normes et des programmes, en y consacrant les ressources humaines, techniques et financières nécessaires.
G.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)
Santé et services de santé
34. Notant avec préoccupation que, dans certaines provinces, l’accès des enfants aux services publics de santé dépend du statut migratoire de leurs parents, rappelant son observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible et appelant l’attention sur les cibles 2.2, 3.1, 3.2 et 3.8 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour :
a) Veiller à ce que tous les enfants qui vivent au Canada aient les mêmes droits concernant les services publics de santé et puissent y avoir accès dans des conditions d’égalité, indépendamment de leur statut migratoire ;
b) Remédier rapidement aux disparités concernant l’état de santé des enfants autochtones, des enfants d’ascendance africaine, des enfants handicapés, des enfants vivant dans des zones reculées ou rurales et des enfants faisant l’objet d’une protection de remplacement.
Santé mentale
35. Le Comité salue les mesures de sensibilisation aux problèmes de santé mentale que prend l’État partie, parmi lesquelles le cadre fédéral de prévention du suicide, mais note avec préoccupation que ce cadre ne prévoit aucune mesure particulière pour les enfants. Compte tenu de la cible 3.4 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :
a) De renforcer les services et programmes de santé mentale destinés aux enfants, y compris en allouant des ressources financières, techniques et humaines suffisantes aux mesures préventives, et de donner la priorité à la fourniture de services de santé mentale aux enfants vulnérables ;
b) D’investir dans le traitement des causes profondes des problèmes de santé mentale et de la forte prévalence des comportements suicidaires chez les enfants, afin d’améliorer les connaissances sur la santé mentale en vue de sensibiliser les enfants et de leur offrir un meilleur accès aux services de soutien ;
c) D’inclure dans le cadre fédéral de prévention du suicide un volet consacré aux enfants qui mette l’accent sur la détection précoce, et de veiller à ce que le cadre soit clairement axé sur les enfants, à ce qu’une attention particulière soit prêtée aux enfants autochtones, et à ce que le point de vue des enfants soit pris en considération dans la conception des services d’intervention et de soutien.
Santé des adolescents
36. Rappelant son observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention et son observation générale n o 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence, et prenant note des cibles 3.3, 3.5, 3.7 et 5.6 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie de renforcer les programmes et services de santé sexuelle et procréative destinés à tous les adolescents, en accordant une attention particulière à la prévention des grossesses non désirées, à l’apport d’un soutien aux filles enceintes et aux parents adolescents et à la réduction du risque d’infections sexuellement transmissibles.
Incidences des changements climatiques sur les droits de l’enfant
37. Le Comité est préoccupé par l’empreinte carbone excessive de l’État partie, due en particulier à ses investissements dans les combustibles fossiles, et par les effets négatifs que les changements climatiques et la pollution de l’air ont sur la santé des enfants. Appelant son attention sur les cibles 3.9 et 13.3 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :
a) De réduire ses émissions de gaz à effet de serre conformément à ses engagements internationaux ;
b) De renforcer, avec la participation active des écoles, la sensibilisation des enfants aux changements climatiques et à la santé environnementale, y compris à la législation pertinente relative à la qualité de l’air et au climat, et de veiller à ce que le point de vue des enfants soit systématiquement pris en considération lors de l’élaboration des politiques et programmes visant à lutter contre les changements climatiques ;
c) De collecter des données sur les incidences des changements climatiques sur les enfants et d’inclure des renseignements sur cette question dans son prochain rapport périodique.
Niveau de vie
38.Le Comité félicite l’État partie des mesures qu’il prend pour assurer l’accès des communautés des Premières Nations à une eau potable propre et sûre et pour travailler plus étroitement avec ces communautés pour régler ce problème, mais il regrette que de nombreux enfants autochtones n’aient toujours pas accès durablement à de l’eau potable. Il constate en outre avec préoccupation :
a)Que les niveaux de pauvreté restent anormalement élevés dans les communautés autochtones et les communautés de Canadiens d’ascendance africaine et chez les enfants appartenant à des groupes minoritaires ;
b)Que les femmes et les enfants sont particulièrement exposés à l’insécurité en matière de logement pour diverses raisons, parmi lesquelles la violence familiale, la pénurie de logements abordables, la faiblesse des salaires, le sous-emploi et la faiblesse des aides sociales.
39. Compte tenu des cibles 1.1, 1.2 et 1.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :
a) D’élaborer, en collaboration avec les communautés autochtones, des plans visant à régler les problèmes d’accès à l’eau et à l’assainissement dans les réserves de façon à trouver des solutions à long terme et durables qui aillent au-delà de la stratégie actuelle visant à mettre fin à tous les avis à long terme sur la qualité de l’eau potable, de fixer des objectifs quantifiables à ce sujet, d’allouer des budgets suffisants et réguliers et de définir un calendrier pour la mise en œuvre initiale ;
b) De veiller à ce que tous les enfants et leur famille vivant dans la pauvreté reçoivent un soutien financier suffisant et bénéficient de services gratuits et accessibles, sans discrimination ;
c) De renforcer les mesures visant à mettre fin au sans-abrisme des enfants et à garantir progressivement à tous les enfants de familles à faible revenu un accès stable à des solutions de logement à long terme qui soient adaptées et abordables, assurent leur sécurité physique, leur offrent suffisamment d’espace, les protègent des risques pour la santé et des dangers structurels, dont le froid, l’humidité, la chaleur et la pollution, et soient accessibles aux enfants handicapés, d’assortir ces mesures de calendriers et de définir des priorités ;
d) D’envisager de réviser les lois des provinces et des territoires régissant les expulsions de sorte que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans toutes les affaires d’expulsion et que tous les moyens de prévention des expulsions soient mis en œuvre avant la résiliation du bail ;
e) De fixer des objectifs annuels ambitieux concernant l’élimination de la pauvreté touchant les enfants, en particulier les enfants autochtones, les enfants d’ascendance africaine et les enfants appartenant à d’autres groupes minoritaires, dans les stratégies de réduction de la pauvreté et dans le cadre des initiatives publiques de suivi et de communication sur les résultats obtenus au niveau national et aux niveaux des provinces et des territoires.
H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)
Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles
40. Conformément à ses précédentes recommandations et compte tenu des cibles 4.1, 4.6, 4.a, 4.b et 4.c des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :
a) De prendre immédiatement des mesures pour supprimer l’imposition de frais d’utilisation dans l’enseignement obligatoire ;
b) D’assurer l’accès à un enseignement de qualité à tous les enfants vivant sur son territoire, dans des conditions d’égalité, et de veiller à ce que les enfants autochtones et les enfants d’ascendance africaine suivent un enseignement culturellement approprié et respectueux de leur patrimoine et de leur langue ;
c) De prendre immédiatement des mesures pour garantir l’égalité d’accès à une éducation sexuelle complète fondée sur des données factuelles dans toutes les provinces et tous les territoires, conformément aux lignes directrices nationales relatives à l’éducation à la santé sexuelle et aux obligations internationales relatives aux droits de l’homme ;
d) De recueillir des données ventilées selon la race, l’âge, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, la zone géographique, l’appartenance ethnique, le statut migratoire, le handicap et le milieu socioéconomique sur les mesures disciplinaires prises dans les provinces et les territoires, afin de surveiller les résultats des mesures visant à réduire les effets discriminatoires des procédures disciplinaires et d’élaborer des mesures ciblées pour lutter contre la discrimination systémique à tous les niveaux de l’enseignement obligatoire ;
e) De travailler en coordination avec les gouvernements des provinces et des territoires pour garantir le droit des enfants et des adolescents de se livrer au jeu et à des activités récréatives accessibles et adaptées à leur âge.
Éducation aux droits de l’homme
41. Compte tenu de la cible 4.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour promouvoir l’instauration d’une culture des droits de l’homme dans le système éducatif et :
a) De faire le point sur la manière dont les droits de l’enfant, tels qu’énoncés dans la Convention, sont intégrés dans la législation, les programmes, les politiques et les pratiques relatifs à l’éducation au niveau des provinces ;
b) De veiller à ce que l’éducation aux droits de l’homme et les principes de la Convention soient intégrés dans les programmes scolaires obligatoires des provinces et territoires et à ce que la formation aux droits de l’enfant soit obligatoire pour les enseignants et les autres professionnels qui travaillent au service d’enfants ou à leur contact ;
c) De développer des supports éducatifs sur les droits de l’homme qui favorisent le respect et l’appréciation de la diversité, et de veiller à ce que les enseignants reçoivent le soutien nécessaire pour enseigner les droits de l’enfant à l’école.
I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 (al. b) à d)) et 38 à 40)
Enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants
42. Rappelant les observations générales conjointes n os 3 et 4 du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et n os 22 et 23 du Comité des droits de l’enfant (2017) sur les droits de l’homme des enfants dans le contexte des migrations internationales, et à la lumière de son observation générale n o 6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, le Comité recommande à l’État partie :
a) De renforcer les mesures visant à garantir que la législation comme les procédures font de l’intérêt supérieur de l’enfant une considération primordiale dans le cadre de toutes les décisions concernant l’immigration et l’asile et que l’intérêt supérieur de l’enfant est toujours déterminé par des professionnels qui appliquent correctement ces procédures ;
b) De revoir d’urgence sa politique qui consiste à placer en détention les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants en situation irrégulière ;
c) De traiter dans un esprit positif et avec humanité et diligence les dossiers des enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants non accompagnés, afin de trouver des solutions durables, conformément à l’article 10 ( par. 1) de la Convention ;
d) De préserver le droit des enfants à l’unité familiale, d’améliorer la gestion des dossiers et de mettre au point des solutions de substitution à la détention pour l’ensemble de la famille, y compris les enfants, par exemple des mesures non privatives de liberté applicables au sein de la collectivité, comme une obligation de pointage, le placement en liberté surveillée ou encore le versement d’une caution raisonnable ou le recours à un garant ;
e) De créer un mécanisme indépendant qui sera chargé de superviser l’action de l’Agence des services frontaliers du Canada, de mener des enquêtes et de connaître des recours formés par les migrants placés en détention.
Exploitation économique, notamment le travail des enfants
43. Compte tenu de la cible 8.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :
a) De mettre en place un mécanisme unique aux fins de la collecte systématique de données ventilées par âge, sexe, zone géographique et milieu socioéconomique sur les conditions de travail dangereuses pour les enfants, de manière à informer le public des mesures prises pour protéger les droits des enfants ;
b) De mettre en place un système efficace de suivi de la mise en œuvre de la Convention de 1973 sur l’âge minimum (n o 138) de l’Organisation internationale du Travail, incluant la participation des enfants, l’accès à des mécanismes adaptés aux enfants pour le dépôt de plaintes et la publication de rapports accessibles aux enfants.
Vente, traite et enlèvement d’enfants
44. Le Comité se félicite des mesures prises pour lutter contre la traite des enfants. Rappelant ses précédentes recommandations, il recommande à l’État partie de continuer de former régulièrement les responsables de l’application des lois et les procureurs en vue de protéger tous les enfants victimes de la traite et d’améliorer l’application de la législation.
Administration de la justice pour enfants
45. Rappelant son observation générale n o 24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants, le Comité engage l’État partie à rendre son système de justice pour enfants pleinement conforme aux dispositions de la Convention et aux autres normes internationales pertinentes. En particulier, il le prie instamment :
a) De veiller à ce qu’aucune personne âgée de moins de 18 ans ne soit condamnée comme un adulte, quelles que soient les circonstances ou la gravité de l’infraction ;
b) D’élaborer un plan d’action efficace visant à éliminer les disparités concernant les taux de condamnation et d’incarcération des enfants et adolescents autochtones et des enfants et adolescents canadiens d’ascendance africaine, comprenant des mesures comme l’organisation de formations sur la Convention à l’intention de tous les professionnels du droit, des membres de l’administration pénitentiaire et des membres des forces de l’ordre ;
c) De veiller à ce que tous les enfants soupçonnés, accusés ou reconnus coupables d’une infraction pénale bénéficient des services d’un conseil qualifié au titre de l’aide juridictionnelle dès le début et tout au long de la procédure, d’assurer l’accès à des programmes de réadaptation à assise communautaire et de veiller à ce que les liens familiaux des enfants et des adolescents incarcérés soient préservés ;
d) De continuer à promouvoir le recours à des mesures non judiciaires, telles que des mesures de déjudiciarisation, de médiation et d’accompagnement, pour les enfants accusés d’infractions pénales et, lorsque cela est possible, d’appliquer des peines non privatives de liberté, telles que la probation ou les travaux d’intérêt général ;
e) De faire en sorte que la détention soit une mesure de dernier ressort imposée pour la période la plus courte possible et réexaminée à intervalles réguliers en vue d’être levée ;
f) De recueillir des données ventilées par âge, sexe, type d’infraction, origine ethnique et nationale, zone géographique et statut socioéconomique sur les enfants en conflit avec la loi et les enfants de détenus, au niveau fédéral ainsi qu’aux niveaux des provinces, des territoires et des municipalités, afin d’élaborer des stratégies ciblées visant à lutter contre la discrimination systémique.
J.Suite donnée aux précédentes observations finales et recommandations du Comité portant sur l’application des Protocoles facultatifs à la Convention
Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
46. À la lumière de ses directives de 2019 sur l’application du Protocole facultatif, le Comité invite instamment l’État partie :
a) À veiller à ce que toutes les infractions visées par les articles 2 et 3 du Protocole facultatif fassent l’objet d’enquêtes et à ce que leurs auteurs soient poursuivis et sanctionnés ;
b) À faire en sorte que tous les enfants soumis à toute forme de vente ou d’exploitation sexuelle soient traités en victimes et ne fassent pas l’objet de sanctions pénales ;
c) À renforcer encore les mesures visant à prévenir et combattre la vente en ligne d’enfants à des fins d’exploitation et d’abus sexuels, dans toutes les provinces et tous les territoires.
Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés
47. Rappelant ses précédentes recommandations, le Comité recommande à l’État partie :
a) D’envisager de porter à 18 ans l’âge minimum de l’engagement volontaire dans les forces armées ;
b) De prendre immédiatement des mesures pour rapatrier les enfants canadiens vivant dans des camps dans le nord-est de la République arabe syrienne et de leur fournir l’assistance nécessaire à leur plein rétablissement physique et psychologique et à leur réinsertion sociale.
K.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications
48. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.
L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme
49. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier les instruments relatifs aux droits de l’homme fondamentaux ci-après, afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant :
a) La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ;
b) La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ;
c) Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
d) Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
M.Coopération avec les organismes régionaux
50. Le Comité recommande à l’État partie de coopérer avec l’Organisation des États américains (OEA) à la mise en œuvre de la Convention et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, à la fois sur son territoire et dans d’autres États membres de l’OEA.
IV.Mise en œuvre et soumission de rapports
A.Suivi et diffusion
51. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement suivies d’effet et qu’une version adaptée aux enfants soit diffusée et soit largement accessible aux enfants, y compris les plus défavorisés d’entre eux. Il recommande également que le rapport valant cinquième et sixième rapports périodiques, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.
B.Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi
52. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un organisme public permanent qui sera chargé de coordonner et d’élaborer les rapports devant être soumis aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme et de coordonner et suivre l’exécution des obligations conventionnelles et l’application des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes, et d’allouer à cet organisme les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement. Le Comité souligne que cette structure devrait être appuyée de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement les institutions nationales des droits de l’homme et la société civile.
C.Prochain rapport
53. Le Comité invite l’État partie à soumettre son rapport valant septième et huitième rapports périodique le 11 janvier 2027 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l’instrument adoptées le 31 janvier 2014 et ne pas dépasser 21 200 mots . Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.
54. Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports à présenter en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument , et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale.