NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/AZE/CO/414 avril 2005

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑sixième session21 février‑11 mars 2005

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

AZERBAÏDJAN

1.Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques de l’Azerbaïdjan, présentés en un seul document (CERD/C/440/Add.1), à ses 1691e et 1692e séances (CERD/C/SR.1691 et 1692), tenues les 4 et 7 mars 2005. À sa 1700e séance (CERD/C/SR.1700), tenue le 11 mars 2005, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport que l’État partie lui a soumis et les informations complémentaires que la délégation lui a fournies oralement. Il a jugé encourageante la présence d’une délégation de haut niveau et se félicite de la possibilité ainsi offerte de poursuivre son dialogue avec l’État partie. Il regrette toutefois que le rapport, dans l’ensemble, ne contienne pas suffisamment de renseignements sur la mise en œuvre concrète de la Convention.

B. Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a promulgué une nouvelle législation comprenant des dispositions antidiscriminatoires, notamment un Code pénal et un Code de procédure pénale.

4.Le Comité se félicite de l’adoption, en juin 2002, de la Loi constitutionnelle sur la mise en œuvre des droits et des libertés de l’homme dans la République azerbaïdjanaise.

5.Le Comité accueille avec satisfaction la création du Commissariat aux droits de l’homme de la République azerbaïdjanaise, en application de la Loi constitutionnelle relative au Médiateur adoptée en décembre 2001.

6.Le Comité se félicite que l’État partie ait ratifié la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales en 2000, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en 2002 et la Charte sociale européenne en 2004.

7.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a commencé à appliquer la procédure de détermination du statut de réfugié, dans le cadre de sa coopération avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

8.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la stratégie nationale de réduction de la pauvreté pour 2003-2005, qui s’adresse aux déplacés en tant que groupe vulnérable.

9.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a fait en 2001 la déclaration facultative reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir des communications, prévue à l’article 14 de la Convention.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

10.Le Comité note la position de l’État partie selon laquelle, malgré les effets négatifs du conflit du Haut‑Karabakh, les personnes d’origine arménienne ne sont pas victimes de discrimination en Azerbaïdjan. Il est cependant préoccupé des informations selon lesquelles les Arméniens résidant en Azerbaïdjan seraient victimes de discrimination raciale et préfèreraient, pour la plupart, dissimuler leur identité ethnique afin de ne pas subir de discrimination (art. 2 de la Convention).

Le Comité encourage l’ État partie à continuer de surveiller toutes les tendances susceptibles de donner naissance à des comportements racistes et xénophobes et à combattre les conséquences négatives de ces tendances. En particulier, il lui recommande de réaliser des études en vue d’évaluer correctement la fréquence des cas de discrimination raciale, en particulier contre les personnes d’origine arménienne.

11.Tout en se félicitant des informations que la délégation a fournies sur les mesures de lutte contre la traite prises par l’État partie, notamment l’adoption, en 2004, du Plan d’action national de lutte contre la traite d’êtres humains et la création, au sein des services de police, d’un département d’aide aux victimes, le Comité est préoccupé par le fait que la traite d’êtres humains, notamment de femmes, d’hommes et d’enfants étrangers, reste un problème grave dans l’État partie, qui est à la fois un pays d’origine et un point de transit (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur la traite d’êtres humains et de continuer de prendre les mesures législatives et politiques nécessaires pour prévenir et combattre ce phénomène. Il invite instamment l’État partie à apporter aide et assistance aux victimes, dans leur propre langue chaque fois que cela est possible. Il lui recommande également de continuer de déployer des efforts déterminés pour poursuivre les auteurs d’infractions dans ce domaine et souligne qu’il est de la plus haute importance de mener des enquêtes promptes et impartiales.

12.Le Comité s’inquiète de ce que des demandeurs d’asile, des réfugiés, des apatrides, des déplacés et des résidents de longue durée en Azerbaïdjan soient victimes de discrimination dans les domaines de l’emploi, de l’éducation, du logement et de la santé (art. 5).

Le Comité invite instamment l’État partie à continuer de prendre les mesures nécessaires, conformément à l’article 5 de la Convention, pour garantir aux demandeurs d’asile, aux réfugiés, aux apatrides, aux déplacés et aux résidents de longue durée les mêmes possibilités de jouir pleinement de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il lui demande d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur les mesures prises à cet effet et appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXX concernant la discrimination contre les non ‑ressortissants.

13.Le Comité note que, même si l’État partie s’efforce généralement de se conformer aux normes de la Convention relative au statut des réfugiés, certains demandeurs d’asile sont exclus par la procédure de détermination du statut de réfugiés de l’État partie. Il s’inquiète de ce que des personnes qui ne sont pas officiellement reconnues comme des réfugiés puissent tout de même avoir besoin de formes subsidiaires de protection, étant donné qu’elles ne peuvent rentrer dans leur pays pour des raisons impérieuses telles qu’un conflit armé en cours. Il s’inquiète également des informations faisant état de cas de refoulement de réfugiés (art. 5 b)).

Le Comité demande à l’État partie de faire en sorte que ses procédures relatives à l’asile n’aient pas pour but ou pour effet d’entraîner une discrimination entre les demandeurs d’asile fondée sur la race, la couleur, ou l’origine nationale ou ethnique, conformément à la section VI de sa recommandation générale XXX. Il lui recommande d’envisager d’adopter des formes subsidiaires de protection accordant le droit de séjour aux personnes qui ne sont pas officiellement reconnues comme des réfugiés mais peuvent tout de même avoir besoin d’une protection, et de poursuivre sa coopération avec le Haut ‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Il lui recommande en outre, lorsqu’il renvoie des demandeurs d’asile dans leur pays, de respecter le principe de non-refoulement.

14.Tout en accueillant avec satisfaction les renseignements donnés sur les groupes minoritaires, le Comité regrette l’insuffisance des informations fournies sur la participation de ces groupes à l’élaboration des politiques culturelles et éducatives. Il est également préoccupé par l’absence de programmes de soutien des langues minoritaires et par le fait que ces langues ne sont pas utilisées dans le système éducatif dans une mesure proportionnelle à la part que représentent les différentes communautés ethniques dans la population de l’État partie (art. 5).

Le Comité invite l’ État partie à faciliter la participation des minorités ethniques à l’élaboration des politiques culturelles et éducatives. Il lui recommande également de prendre les mesures nécessaires pour créer les conditions qui permettront aux personnes appartenant à des minorités de développer leur culture, leur langue, leur religion, leurs traditions et leurs coutumes, et de faire des études ou de suivre un enseignement dans leur langue maternelle. Il l’invite à inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur cette question.

15.Le Comité note avec préoccupation l’explication avancée par l’État partie selon laquelle, malgré les dispositions législatives prévoyant le droit à une protection et des voies de recours effectives, aucune affaire fondée sur les dispositions pertinentes du Code pénal relatives à la discrimination raciale n’a été portée devant les tribunaux (art. 6).

Le Comité demande à l’État partie d’inclure, dans son prochain rapport périodique, des données statistiques sur les poursuites engagées et les peines infligées dans les cas d’infractions en rapport avec la discrimination raciale où les dispositions pertinentes de la législation interne en vigueur ont été appliquées. Il lui rappelle que l’absence de plaintes et d’actions en justice de la part des victimes de discrimination raciale peut, dans une large mesure, être le signe de l’absence de législation appropriée, de l’ignorance de l’existence de voies de recours ou d’un manque de volonté des autorités d’engager des poursuites. Il est donc essentiel de prévoir les dispositions nécessaires dans la législation nationale et d’informer le public de l’existence de voies de recours dans le domaine de la discrimination raciale.

16.Le Comité regrette l’absence d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour améliorer la compréhension, le respect et la tolérance entre les différents groupes ethniques vivant en Azerbaïdjan, en particulier sur les programmes qui ont été éventuellement adoptés pour dispenser un enseignement interculturel (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures propres à promouvoir la compréhension et l’éducation interculturelles entre groupes ethniques, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements plus détaillés à ce sujet.

17.Le Comité, tout en notant les renseignements fournis par la délégation, continue d’estimer que les mesures prises pour informer le public, les responsables de l’application des lois, les membres des partis politiques et les professionnels des médias sur les dispositions de la Convention pourraient être renforcées (art. 7).

Le Comité encourage l’ État partie à étendre et à renforcer l’action qu’il a engagée dans le domaine de l’éducation en matière de droits de l’homme . En outre, une attention particulière devrait être portée à la recommandation générale XIII, selon laquelle les responsables de l’application des lois devraient recevoir une formation particulière pour faire en sorte que, dans l’exercice de leurs fonctions, ils respectent et protègent les droits de l’homme de tous sans distinction de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique.

18.Le Comité note l’insuffisance des informations fournies sur les mesures prises par l’État partie pour associer les organisations non gouvernementales à l’élaboration du rapport périodique et s’inquiète de ce que les organisations de la société civile, y compris les organisations qui luttent contre la discrimination raciale, ne puissent pas opérer librement.

Le Comité souligne l’importance du rôle que joue la société civile dans la pleine application de la Convention et recommande à l’ État partie de promouvoir le libre fonctionnement des organisations de la société civile qui contribuent à promouvoir les  droits de l’homme et à combattre la discrimination raciale. Il l’encourage en outre à consulter les groupes de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

19.Le Comité recommande instamment à l’État partie de ratifier la modification du paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptée le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvée par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il attire l’attention de l’État partie sur la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, dans laquelle celle‑ci a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de la modification et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cette modification. L’Assemblée générale a renouvelé cette demande dans sa résolution 58/160.

20.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de continuer de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. Il lui recommande en outre d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures adoptées pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national, en particulier l’élaboration et la mise en œuvre du Plan d’action national.

21.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

22.L’État partie devrait, dans un délai d’un an, donner des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations que le Comité a formulées aux paragraphes 10 et 13 (par. 1 de l’article 65 du Règlement intérieur). Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses cinquième et sixième rapports périodiques en un seul document le 15 septembre 2007 et de veiller à traiter dans ce rapport tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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