NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/15/Add.25713 avril 2005

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT Trente ‑huitième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Nigéria

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Nigéria (CRC/C/70/Add.24) à ses 1023e et 1024e séances, tenues le 26 janvier 2005, et a adopté à sa 1025e séance, le 28 janvier 2005, les observations finales ci‑après.

A.  Introduction

2.Le Comité accueille avec intérêt ce deuxième rapport périodique de l’État partie, encore qu’il ait été présenté avec un retard considérable, ainsi que les réponses données par écrit à sa liste des points à traiter (CRC/C/Q/NGA/2). Il note avec satisfaction que l’État partie s’est fait représenter par une délégation interministérielle de haut niveau et se félicite du dialogue franc et ouvert qui a eu lieu, ainsi que de la participation du Président du Parlement des enfants, qui a permis de se faire une idée plus claire de la situation des enfants dans l’État partie.

B.  Mesures de suivi prises et progrès accomplis par l’État partie

3.Le Comité applaudit aux initiatives prises par l’État partie pour réformer sa législation relative aux enfants en vue de l’aligner sur les prescriptions de la Convention, et en particulier à l’adoption en mai 2003 de la loi sur les droits de l’enfant.

4.De plus, le Comité note l’adoption des lois énumérées ci‑après, qui sont destinées à renforcer la mise en œuvre de la Convention:

a)La loi contre la traite des êtres humains, en juillet 2003; et

b)Diverses lois des États de la Fédération visant les droits des enfants, à savoir la loi de l’État d’Ebonyi sur l’abolition des pratiques traditionnelles préjudiciables affectant la santé des femmes et des enfants (2001), la loi de l’État d’Edo portant interdiction des mutilations génitales féminines (2000), la loi modifiant le Code criminel de l’État d’Edo (2000) et la loi de l’État de Cross River prohibant le mariage de filles non pubères et l’excision (2000).

5.Le Comité se félicite de l’installation au Nigéria du Parlement des enfants, tant au niveau des États qu’au niveau national, et au sein du Ministère de l’information du Bureau d’information sur les droits des enfants.

6.Le Comité salue la ratification de la Convention de l’OIT no 138, de 1973, concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, et de la Convention de l’OIT no 182, de 1999, concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination.

7.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié en juillet 2001 la Charte africaine sur les droits et le bien‑être de l’enfant.

C.  Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

8.Le Comité n’ignore pas les défis auxquels l’État partie doit faire face, à savoir la guerre ethnique, religieuse et civile qui dure depuis longtemps et les contraintes économiques imposées par la pauvreté, le chômage et un lourd endettement, qui ont sans doute entravé ses progrès vers la pleine réalisation des droits des enfants consacrés par la Convention.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1. Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44, par. 6, de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

9.Le Comité regrette que beaucoup des préoccupations et recommandations qu’il avait exprimées (CRC/C/15/Add.61) à l’occasion de l’examen du rapport initial de l’État partie (CRC/C/8/Add.26) n’aient pas été suffisamment prises en considération, surtout celles qui concernent l’intégration du droit coutumier et des législations régionales et locales (par. 27), l’affectation des ressources (par. 28 et 33), l’information et la sensibilisation concernant les droits des enfants (par. 30), la collecte de données (par. 31), la non‑discrimination (par. 34), les enfants handicapés (par. 35), les pratiques traditionnelles néfastes (par. 36), les services de soins de santé (par. 37), l’éducation (par. 38), la justice pour mineurs (par. 39), les sévices et la négligence (par. 40 et 43), l’exploitation économique (par. 41) et l’exploitation sexuelle (par. 42).

10. Le Comité demande instamment à l’État partie de ne ménager aucun effort pour donner suite aux recommandations figurant dans ses observations finales sur le rapport initial qui n’ont pas encore été mises à exécution et de s’attaquer à la série de préoccupations exposées dans les présentes observations finales sur le deuxième rapport périodique.

Législation

11.Tout en relevant que 20 États sont en train de promulguer la loi de 2003 sur les droits de l’enfant, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’à ce jour 4 seulement des 36 États l’ont fait. Il s’inquiète aussi de ce que beaucoup des lois de l’État partie, adoptées aux niveaux fédéral, des États ou local, et en particulier les lois religieuses et coutumières, ne respectent pas pleinement les principes et dispositions de la Convention.

12. Le Comité recommande à l’État partie de consacrer tous les efforts et les ressources nécessaires à la mise en œuvre effective des droits et des principes consacrés par la loi sur les droits de l’enfant et de veiller, à titre prioritaire, à ce que cette loi soit dûment adoptée dans tous les États. Le Comité engage aussi l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que son droit interne et son droit coutumier soient parfaitement conformes aux principes et dispositions de la Convention et assurer sa mise en œuvre.

Coordination

13.Tout en notant qu’il existe des organismes chargés de contrôler que la Convention est bien respectée, à savoir la Direction du développement de l’enfant au Ministère des questions féminines et du développement social et le Comité national de protection des droits de l’enfant, le Comité est très préoccupé par le manque manifeste de coordination entre autorités nationales et autorités des États pour tout ce qui concerne les stratégies, les politiques et les programmes touchant les enfants.

14.Le Comité est également préoccupé par le fait que la Direction du développement de l’enfant et le Comité national de protection des droits de l’enfant susmentionnés pâtissent sérieusement de ne pas avoir été dotés de ressources ni investis de pouvoirs suffisants.

15. Le Comité recommande que l’État partie prenne toutes les mesures nécessaires pour mettre en place, en vue de coordonner la mise en œuvre de la Convention, un organe ou une structure efficace qui soit doté de ressources suffisantes ainsi que des pouvoirs, de la stratégie et des plans appropriés.

16. Le Comité recommande aussi que la Direction du développement de l’enfant du Ministère des questions féminines et du développement social et le Comité national de protection des droits de l’enfant soient renforcés et dotés de ressources financières suffisantes pour que leur efficacité soit garantie.

Plans d’action nationaux

17.Le Comité se félicite de l’élaboration d’un plan d’action national, mais il est inquiet de constater que celui‑ci est d’une portée restreinte et ne couvre pas tous les domaines visés dans la Convention.

18. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer à l’horizon 2015 un plan d’action national axé sur les droits qui soit plus complet, couvre tous les domaines visés dans la Convention et intègre les buts et objectifs du document intitulé «Un monde digne des enfants», adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies à l’issue de sa session extraordinaire de 2002 consacrée aux enfants, ainsi que les objectifs de développement énoncés dans la Déclaration du Millénaire. Ce faisant, le Comité engage l’État partie à affecter suffisamment de ressources humaines et économiques à la mise en œuvre de ce plan et à recourir à une démarche participative associant les ONG et les enfants.

Mécanisme de surveillance indépendant

19.Le Comité note avec satisfaction que la Commission nationale des droits de l’homme mise en place au Nigéria a des bureaux régionaux et qu’un rapporteur spécial sur les droits de l’enfant a été nommé en son sein. Il n’en demeure pas moins inquiet de ce que le mandat de cette commission ne prévoie pas suffisamment de ressources pour lui permettre de traiter les questions de droits des enfants et leurs plaintes individuelles. Le Comité apprécie aussi les efforts faits par l’État partie pour renseigner la population en général, et les enfants en particulier, sur la Commission et le Rapporteur spécial sur les droits de l’enfant, mais il juge préoccupant que le nombre des affaires dans lesquelles des enfants interviennent soit fort restreint.

20. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer encore les activités de la Commission nationale des droits de l’homme et du Rapporteur spécial sur les droits de l’enfant, conformément à son Observation générale n o  2 concernant le rôle des institutions nationales des droits de l’homme et aux Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe), notamment en dotant la Commission de ressources humaines et financières suffisantes et en donnant au Rapporteur spécial davantage de moyens de traiter les plaintes émanant des enfants en respectant leur sensibilité et sans perte de temps, ainsi qu’en garantissant la possibilité d’avoir accès à lui/elle, grâce, par exemple, à l’installation d’un téléphone rouge gratuit réservé aux enfants.

Ressources au profit des enfants

21.Le Comité, conscient des difficultés économiques auxquelles se heurte l’État partie, pour une part à cause de la corruption qui est très répandue et de la répartition généralement inégale des ressources, demeure préoccupé par la situation de son système de prévoyance sociale, sur lequel pèse une charge énorme. En particulier, le Comité craint que la protection et la promotion des droits de l’enfant ne souffrent d’une grave pénurie de ressources financières.

22. En vue de renforcer sa mise en œuvre de l’article 4 et eu égard aux articles 2, 3 et 6 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie d’accorder d’urgence la priorité à l’affectation de crédits budgétaires et à une gestion rationnelle du budget pour garantir la mise en œuvre des droits des enfants, en utilisant au maximum les ressources disponibles, si besoin est, dans le cadre de la coopération internationale.

Collecte de données

23.Tout en notant que l’État partie a fait certains efforts pour recueillir des données, et en particulier qu’il a pris une initiative inédite pour créer des bases de données sur les enfants ayant besoin d’une protection spéciale, le Comité demeure préoccupé par l’absence de statistiques complètes et à jour dans le rapport de l’État partie et par le fait que celui‑ci manque d’un système national adéquat de collecte des données sur tous les domaines visés par la Convention qui ménage la possibilité d’une analyse détaillée des données. Le Comité répète que cette analyse est capitale pour définir des actions en faveur des enfants, suivre et évaluer les progrès réalisés grâce à elles et mesurer leur impact.

24. Le Comité recommande à l’État partie de mettre au point un système de collecte de données et d’indicateurs compatible avec les dispositions de la Convention, qui soit ventilé par sexe, âge, milieu de vie, urbain ou rural, et région ou État. Ce système devrait couvrir tous les enfants jusqu’à l’âge de 18 ans, en insistant plus spécialement sur ceux qui sont particulièrement vulnérables. Le Comité encourage en outre l’État partie à utiliser ces indicateurs et ces données pour arrêter les lois, politiques et programmes destinés à assurer la mise en œuvre effective de la Convention. Il lui recommande de solliciter à cet effet l’assistance technique, notamment de l’UNICEF et du BIT.

Diffusion

25.Tout en prenant note des efforts de l’État partie pour diffuser les principes et les dispositions de la Convention, et notamment des travaux du Bureau d’information sur les droits de l’enfant, le Comité considère que ces mesures demandent à être renforcées. Il est préoccupé en outre par l’absence de plan méthodique pour lancer des actions de formation et de sensibilisation parmi les catégories professionnelles travaillant pour et avec les enfants.

26. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De renforcer l’action qu’il mène pour faire en sorte que les dispositions de la Convention soient très largement connues et comprises des enfants au même titre que des adultes;

b) D’associer systématiquement les notables locaux aux programmes de sensibilisation pour combattre certaines pratiques traditionnelles et coutumes préjudiciables qui risquent d’avoir des conséquences négatives pour la mise en œuvre intégrale de la Convention;

c) D’organiser une information et une formation méthodiques au sujet des dispositions de la Convention à l’intention de toutes les catégories professionnelles travaillant pour ou avec des enfants, et en particulier les parlementaires, magistrats, avocats, membres des forces de police, fonctionnaires, travailleurs communaux et locaux, personnels des établissements et lieux de détention pour enfants, enseignants, personnels des services de santé, y compris les psychologues, et travailleurs sociaux;

d) D’introduire l’éducation aux droits de l’homme, et notamment aux droits de l’enfant dans les programmes scolaires, dès l’école primaire;

e) De solliciter l’assistance technique, notamment du Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme et de l’UNICEF.

2.   Définition de l’enfant (article premier de la Convention)

27.Tout en notant que la loi sur les droits de l’enfant donne une définition claire de l’enfant, le Comité juge toujours préoccupant que l’âge de la majorité varie autant selon les États de l’État partie, qui, eux, n’ont pas de définitions claires de l’enfant, et que dans bien des cas cet âge minimum soit trop précoce.

28. Pour améliorer la situation, le Comité réitère sa recommandation (par. 12), à savoir que l’État partie prenne toutes les mesures possibles pour faire promulguer la loi sur les droits de l’enfant dans tous les États du Nigéria, et il engage l’État partie à poursuivre et renforcer ses efforts pour mieux harmoniser les divers âges minimum et/ou les définitions figurant dans sa législation nationale et les fixer à un niveau acceptable sur le plan international.

3.   Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non‑discrimination

29.Tout en relevant que la discrimination est prohibée par la Constitution et qu’un projet de loi antidiscrimination est en cours d’élaboration, le Comité regrette qu’il n’y ait pas de renseignements concrets sur ce qu’il en est dans les faits au Nigéria de l’application aux enfants du principe de non‑discrimination. Il se déclare à nouveau préoccupé par le fait que les enfants appartenant à des groupes vulnérables − filles, enfants de milieux pauvres, enfants nés hors mariage, enfants handicapés et enfants issus de minorités − continuent à se heurter à une discrimination sévère et très répandue. Le Comité est également inquiet de voir que l’État partie ne juge pas nécessaire de prendre des mesures pour prévenir et combattre la discrimination raciale, car, à son sens, les tensions sociales et ethniques, le racisme et la xénophobie se réduisent à très peu de choses au Nigéria (par. 40 du rapport périodique).

30. Le Comité recommande à l’État partie de faire davantage d’efforts pour assurer l’application des lois existantes qui garantissent le principe de la non ‑discrimination et d’adopter, en tant que de besoin, la législation voulue pour garantir à tous les enfants relevant de sa juridiction la jouissance de tous les droits reconnus dans la Convention, sans discrimination, conformément à l’article 2.

31. Le Comité demande que des renseignements précis soient fournis, dans le prochain rapport périodique, sur les mesures et programmes ayant trait à la Convention relative aux droits de l’enfant que l’État partie aura engagés pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action adoptés à la Conférence mondiale de 2001 contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu de son Observation générale n o  1 sur l’article 29.1 de la Convention (buts de l’éducation).

Droit à la vie

32.Dans la perspective du respect du droit à la vie inhérent à toute personne âgée de moins de 18 ans, le Comité constate avec énormément d’inquiétude que la peine de mort est applicable à des jeunes de moins de 18 ans dans le droit de la charia et il souligne que cette peine est contraire aux articles 6 et 37 a) de la Convention.

33. Le Comité demande instamment à l’État partie d’abolir par une loi la peine de mort pour les crimes commis par des jeunes âgés de moins de 18 ans et de remplacer les peines de mort déjà prononcées à l’encontre de jeunes de moins de 18 ans par une peine conforme à la Convention.

Intérêt supérieur de l’enfant et respect de ses opinions

34.Tout en notant qu’il existe des structures institutionnelles ayant pour but de garantir l’intérêt supérieur de l’enfant et le respect de ses opinions, tels les clubs scolaires d’enfants et le Parlement des enfants au niveau national, le Comité redoute que deux principes généraux de la Convention, énoncés aux articles 3 et 12, ne soient pas pleinement appliqués, ni dûment intégrés à la mise en œuvre des politiques et programmes de l’État partie. Vu la prépondérance des idées traditionnelles sur la place de l’enfant dans la hiérarchie de l’ordre social, le Comité craint que les opinions des enfants ne soient pas suffisamment prises en considération et que le respect de ces opinions ne demeure limité, tant au sein de la famille qu’à l’école, devant les tribunaux comme devant les autorités administratives et dans la société en général.

35. Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses efforts pour veiller à l’application des principes de l’intérêt supérieur et du respect des opinions de l’enfant. À ce propos, il lui recommande d’appuyer sans réserve le fonctionnement et la poursuite du développement du Parlement des enfants, tant au niveau national qu’à celui des États, ainsi que de favoriser la mise en œuvre sans restriction du droit de l’enfant de prendre une part active à la vie de la famille, de l’école et d’autres institutions et organismes et de la société en général. Ces principes généraux devraient aussi être incorporés à toutes les politiques et tous les programmes concernant les enfants. Il convient de renforcer la sensibilisation de l’opinion en général à la mise en œuvre de ces principes ainsi que les programmes qui y sont consacrés.

4. Libertés et droits civils (art. 7, 8, 13 à 17 et 37 a) de la Convention)

Enregistrement des naissances

36.Tout en saluant le travail accompli par la Commission nationale de la population et la Commission africaine des réfugiés, dont le mandat s’étend à l’enregistrement des naissances, le Comité craint que la faiblesse alarmante du taux d’enregistrement des naissances, en milieu rural en particulier, ne corresponde au fait que les parents n’ont généralement guère conscience de l’importance de cet enregistrement et de ses conséquences pour le plein exercice par les enfants de leurs libertés et droits fondamentaux, et tout particulièrement l’accès à l’éducation et à la santé et le droit de connaître ses parents et d’être élevés par eux. Le Comité note aussi que l’enregistrement de la naissance des enfants de parents étrangers et de parents réfugiés peut poser des problèmes.

37. À la lumière de l’article 7 de la Convention, le Comité engage l’État partie à adopter une double démarche, à court et à long terme, pour renforcer les actions qu’il mène en vue d’assurer l’enregistrement de tous les enfants à la naissance, notamment par la mise sur pied d’antennes mobiles d’enregistrement et l’organisation d’activités de proximité et de campagnes de sensibilisation à l’intention des familles, des accoucheuses et des chefs traditionnels. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’assurer la coordination entre les ministères compétents et les institutions prenant part aux opérations d’enregistrement des naissances, ainsi que de fournir les infrastructures sociales nécessaires pour faciliter l’enregistrement en milieu rural. En attendant, les enfants qui n’ont pas été déclarés à la naissance devraient se voir accorder l’accès aux services de base, telles la santé et l’éducation, tandis qu’ils s’apprêtent à être dûment enregistrés.

Châtiments corporels

38.Le Comité note que l’article 221 de la loi sur les droits de l’enfant interdit les châtiments corporels dans les environnements judiciaires et qu’une circulaire ministérielle a été adressée aux établissements pour leur notifier l’interdiction des châtiments corporels à l’école. Néanmoins, vu l’article 19 de la Convention, le Comité demeure inquiet de ce que les châtiments corporels soient encore très généralement pratiqués comme sanction dans le système pénitentiaire, de même qu’au sein de la famille, à l’école et dans d’autres institutions. En particulier, le Comité est préoccupé par:

a)Les articles 9 et 11 2) de la loi sur les enfants et les jeunes, qui prévoient la condamnation des jeunes délinquants au fouet et à des châtiments corporels;

b)L’article 18 du Code criminel (États du Sud) qui prévoit le fouet;

c)L’article 55 du Code pénal (États du Nord) qui prévoit le recours à des corrections physiques;

d)Le code de la charia qui prescrit des peines et châtiments corporels tels que la flagellation, le fouet, la lapidation et l’amputation, qui sont parfois appliqués aux enfants;

e)Les dispositions légales qui tolèrent, si elles ne les encouragent pas, les châtiments corporels au foyer, et en particulier l’article 55.1 a) du Code pénal et l’article 295 du Code criminel.

39. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’abolir ou de modifier toutes les lois prescrivant des châtiments corporels comme condamnation pénale, et en particulier la loi sur les enfants et les jeunes;

b) D’interdire expressément par la loi les châtiments corporels dans tous les cadres, et en particulier au sein de la famille, à l’école et dans les autres institutions;

c) De conduire des campagnes de sensibilisation pour faire en sorte que la discipline soit administrée sous des formes positives, participatives et non violentes, d’une manière qui respecte la dignité de la personne de l’enfant et en conformité avec les dispositions de la Convention, et surtout l’article 28.2, pour remplacer les châtiments corporels à tous les niveaux de la société.

5. Milieu familial et soins de remplacement (art. 5, 18 (par. 1 et 2), 9 à 11, 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)

Services de garde d’enfants

40.Vu le très grand nombre de mères qui travaillent et ont donc besoin de services de garde d’enfants dans l’État partie, le Comité s’inquiète de la qualité des services fournis dans les garderies privées ou publiques. Il note aussi avec inquiétude qu’il n’y a pas de mesures en place pour aider les parents qui sont seuls. Il est également préoccupé par le fait que ces garderies manquent des ressources nécessaires pour permettre le plein développement physique, mental et intellectuel des enfants.

41. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter un programme destiné à renforcer et développer les capacités des crèches et garderies sur son territoire, notamment en renforçant les structures existantes, à savoir les centres d’accueil et les familles élargies. Le Comité recommande qu’une formation appropriée soit dispensée à tous les professionnels qui travaillent avec des enfants dans les crèches et garderies et que des ressources suffisantes soient affectées aux installations publiques d’accueil d’enfants. Le Comité engage en outre l’État partie à établir des normes et procédures garanties par des lois pour régir la protection de remplacement, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la sécurité et conformément aux principes et dispositions de la Convention. Le Comité recommande à l’État partie de solliciter l’assistance de l’UNICEF à cet égard.

Enfants privés de leur milieu familial et protection de remplacement

42.Vu les informations indiquant que l’abandon d’enfants est de pratique courante et que le nombre des orphelins du VIH/sida va en augmentant rapidement, le Comité est inquiet de constater que l’État partie n’a pas mis en place de programme d’ensemble doté de ressources suffisantes pour assurer la protection de ces orphelins, que les moyens actuellement disponibles pour assurer une protection de remplacement aux enfants privés de leur milieu familial sont qualitativement et quantitativement insuffisants et que beaucoup d’enfants n’ont pas accès à cette assistance. De plus, le Comité se déclare préoccupé par l’absence de formation appropriée du personnel et d’orientations claires en ce qui concerne le placement d’enfants dans des structures de protection de remplacement. Enfin, le Comité s’inquiète de ce que les enfants eux‑mêmes ne soient entendus ni avant ni durant leur placement.

43. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’adopter d’urgence un programme visant à renforcer et développer les moyens de protection de remplacement en faveur des enfants, et notamment de mettre en chantier une législation efficace, de consolider des structures existantes comme la famille élargie, d’améliorer la formation du personnel et d’affecter davantage de ressources aux organismes compétents;

b) D’établir des normes et procédures, garanties par des lois, pour régir la protection de remplacement, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la sécurité et conformément aux principes et dispositions de la Convention;

c) De systématiser l’audition des enfants pour qu’ils expriment leurs vues sur leur placement;

d) De prévoir un examen périodique du placement d’enfants en institution;

e) De ratifier la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption international e, adoptée en 1993 à La Haye;

f) De solliciter l’assistance de l’UNICEF à cet égard.

Violence, sévices et négligence

44.Le Comité est profondément préoccupé par:

a)Les attitudes et comportements traditionnels discriminatoires envers les femmes et les enfants, qui alimentent la violence, les sévices, sexuels notamment, la négligence, le meurtre, la torture et le chantage;

b)Le niveau généralement élevé d’acceptation de la violence familiale chez les fonctionnaires des services de police et parmi le personnel des tribunaux;

c)L’absence de mesures adéquates, prises par l’État partie, pour prévenir et combattre la violence, les sévices et la négligence dont les femmes et les enfants sont victimes.

45. Le Comité engage l’État partie à renforcer considérablement ses efforts pour prévenir et combattre la violence dans la société, notamment à l’encontre des femmes et des enfants, en famille comme à l’école et dans d’autres cadres. À cet égard, il recommande à l’État partie de prendre les mesures précises suivantes:

a) Mener des campagnes d’information du public sur les conséquences négatives de la violence et des mauvais traitements infligés aux enfants et favoriser les formes non violentes de règlement des conflits et de discipline, surtout au sein de la famille et du système éducatif ainsi que des institutions;

b) Prendre sur le plan législatif toutes les mesures pour interdire toutes les formes de violence physique ou mentale à l’encontre des enfants, et notamment les sévices sexuels, dans tous les cadres sociaux et prendre des mesures efficaces pour prévenir les actes de violence commis au sein de la famille, à l’école ou par les membres de services de police et autres agents de l’État, pour s’assurer que les auteurs de ces actes seront effectivement traduits en justice et mettre ainsi fin à la pratique de l’impunité;

c) Prêter attention à l’étude et à la suppression des obstacles socioculturels, au premier rang desquels la soumission des filles et des femmes et leur acceptation des mauvais traitements, qui les empêchent de demander de l’aide;

d) Prévoir des soins, le rétablissement et la réinsertion pour les enfants directement ou indirectement victimes de violences, en veillant à éviter une nouvelle victimisation de ces enfants dans la procédure judiciaire et à assurer la protection de leur intimité;

e) Apprendre aux parents, enseignants, membres des forces de l’ordre, travailleurs sociaux, magistrats et professionnels de santé à déceler, signaler et gérer les cas de mauvais traitements, en recourant pour cette formation à une démarche pluridisciplinaire;

f) S’inspirer pour de nouvelles actions des recommandations adoptées par le Comité à ses journées de débat général (CRC/C/100, par. 688, et CRC/C/111, par. 701 à 745);

g) Solliciter l’assistance, notamment, de l’UNICEF et de l’OMS.

6. Santé de base et bien ‑être (art. 6, 18, par. 3, 23, 24, 26 et 27, par. 1 à 3, de la Convention)

Enfants handicapés

46.Le Comité exprime à nouveau l’inquiétude que lui inspire la discrimination généralisée à l’encontre des enfants handicapés, tant au sein de la famille que dans la société en général, surtout en milieu rural, et il note que beaucoup des causes d’incapacité sont évitables au Nigéria. Le Comité déplore tout particulièrement que le Gouvernement n’ait pas de politique d’ensemble qui vise expressément les droits des enfants handicapés. Il est également préoccupé par la qualité médiocre des services dispensés aux enfants handicapés et de leur gestion et par l’insuffisance des fonds qui leur sont consacrés. Il est inquiet surtout de constater qu’il y a peu de personnes qualifiées parmi les enseignants et les professionnels qui travaillent avec des enfants handicapés et que l’on ne fait pas assez d’efforts pour faciliter leur intégration dans le système éducatif et dans la société en général.

47. À la lumière des Règles pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale) et des recommandations qu’il a lui ‑même adoptées à sa journée de débat général sur les droits des enfants handicapés (CRC/C/69, par. 310 à 339), le Comité recommande à l’État partie:

a) De faire une étude d’ensemble pour prendre la mesure de la situation des enfants handicapés en ce qui concerne leur accès à des soins de santé, services éducatifs et possibilités d’emploi convenables;

b) D’instituer une politique d’ensemble à l’intention des enfants handicapés et d’affecter les ressources voulues au renforcement des services qui leur sont destinés, au soutien des familles et à la formation de professionnels dans ce domaine;

c) De renforcer l’action qu’il mène pour élaborer des programmes de dépistage précoce pour prévenir les handicaps;

d) D’encourager l’intégration des enfants handicapés dans le système éducatif ordinaire et leur insertion dans la société, notamment en s’attachant davantage à dispenser une formation spéciale aux enseignants et à rendre le cadre de vie physique − écoles, installations sportives et récréatives et tous les autres espaces publics − accessible aux enfants handicapés;

e) De Lancer des campagnes de sensibilisation pour faire prendre conscience à l’opinion des droits et des besoins spéciaux des enfants handicapés, ainsi que des enfants ayant des problèmes de santé mentale;

f) De solliciter la coopération technique de l’UNICEF et de l’OMS, notamment, pour la formation des professionnels, y compris les enseignants, qui travaillent avec et pour les enfants handicapés.

Santé de base et services de santé

48.Le Comité prend bonne note des efforts faits par l’État partie pour améliorer son système sanitaire, avec l’initiative «Hôpitaux amis des bébés» et la «Gestion intégrée des maladies de l’enfance», ainsi que la mise en place du Programme national relatif à l’Agence de vaccination. Il n’en demeure pas moins gravement préoccupé par le taux alarmant de mortalité infantile, postinfantile et maternelle et par la forte incidence des principales maladies dont les enfants sont atteints, à savoir la polio, le paludisme et la diarrhée, ainsi que par la faiblesse du taux de couverture vaccinale dans le pays, et surtout les régions du Nord, comme par la faible proportion d’enfants allaités exclusivement au sein. Le Comité est également préoccupé par le fait que les mères savent très peu de chose sur des questions de santé de base comme les solutions de réhydratation orale pour la diarrhée. Tout en reconnaissant qu’une nouvelle politique nationale d’approvisionnement en eau et d’assainissement a été adoptée, le Comité continue de s’inquiéter de l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement, en milieu rural en particulier.

49. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De s’attaquer, d’urgence, aux taux très élevés de mortalité enregistrés chez les nourrissons, les enfants et les mères, notamment en intensifiant les programmes de vaccination et en améliorant les soins pré et postnatals;

b) De continuer à prendre toutes les mesures appropriées pour améliorer les infrastructures sanitaires, surtout en milieu rural, notamment par la coopération internationale, en vue de garantir l’accès à des soins et services de santé de base dotés d’un personnel adéquat et des ressources voulues, y compris les médicaments essentiels pour tous les enfants;

c) De prendre des mesures pour instituer à l’intention des femmes des programmes de sensibilisation à l’importance, entre autres, des soins de santé prénatals et postnatals, des mesures de prévention et du traitement des maladies courantes, de la vaccination et d’un régime alimentaire équilibré pour un développement sain des enfants;

d) De renforcer son système de collecte de données, notamment en ce qui concerne les indicateurs importants de la santé, en veillant à ce que les données tant quantitatives que qualitatives soient fiables et disponibles en temps utile et en les utilisant pour formuler des politiques et programmes coordonnés propres à assurer la mise en œuvre effective de la Convention;

e) D’assurer l’approvisionnement en eau potable et l’assainissement pour tous.

Santé des adolescents

50.Le Comité craint que les problèmes de santé des adolescents, notamment ceux qui touchent au développement personnel, à la santé mentale et à la santé génésique, n’aient pas suffisamment retenu l’attention de l’État partie. Il est également préoccupé par la forte proportion de grossesses d’adolescentes dans l’État partie.

51. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De mener une étude d’ensemble pour évaluer la nature et l’ampleur des problèmes de santé des adolescents et, avec leur pleine participation, de s’en servir comme point de départ pour définir des politiques et programmes de santé à leur intention, en s’attachant tout spécialement à la prévention des infections sexuellement transmissibles, surtout par des services d’information et de conseil respectant leur sensibilité en matière de santé génésique, et de tenir compte à cet égard de son Observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent (CRC/GC/2003/4);

b) De continuer à renforcer les services de conseil en matière de développement personnel et de santé mentale ainsi que de santé génésique et de les faire connaître et les rendre accessibles aux adolescents;

c) De continuer à travailler avec les organismes internationaux spécialisés dans les questions de santé des adolescents, et notamment le FNUAP et l’UNICEF.

VIH/sida

52.Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour prévenir et maîtriser le VIH/sida, notamment la mise en place du Comité national d’action contre le sida, et l’introduction récente dans certaines régions du dépistage, du conseil et de la prévention de la transmission maternofœtale. Il demeure cependant préoccupé par la forte incidence de l’infection et sa prévalence généralisée au Nigéria, comme par le manque d’information, surtout chez les femmes, sur les modes de transmission et la prévention du VIH/sida. Le Comité est profondément préoccupé par l’impact très grave du VIH/sida sur les droits et libertés culturels, économiques, politiques, sociaux et civils des enfants infectés ou touchés par le VIH/sida, y compris les principes généraux de la Convention et plus particulièrement les droits à la non‑discrimination, aux soins de santé, à l’éducation, à la nourriture et au logement, ainsi qu’à l’information et à la liberté d’expression. Le Comité est également très inquiet de constater que, d’après les estimations d’ONUSIDA, il y a plus d’un million d’orphelins du sida, ce qui fait du Nigéria le premier pays du monde à cet égard.

53. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour prévenir la propagation du VIH/sida et en assurer le traitement, pour mieux intégrer le respect des droits de l’enfant à l’élaboration et l’application de sa politique en matière de VIH/sida et de sa stratégie en faveur des enfants infectés ou touchés par le VIH/sida, ainsi que de leur famille, en prenant en considération les recommandations que le Comité a adoptées à sa Journée de débat général sur les enfants vivant dans un monde marqué par le VIH/sida (CRC/C/80, par. 243), et pour associer les enfants et les chefs traditionnels à la mise en œuvre de cette stratégie.

Mariages forcés et/ou précoces

54.Tout en reconnaissant que l’âge minimum du mariage est fixé à l’échelon fédéral à 18 ans, le Comité constate avec inquiétude que, dans la plupart des États, la législation et le droit coutumier autorisent les mariages précoces et les filles peuvent être contraintes de se marier dès la puberté. Le Comité est particulièrement préoccupé par le grand nombre de femmes qui souffriraient de fistules vésico‑vaginales, provoquées par l’accouchement lorsque le col n’est pas encore bien développé. Le Comité s’inquiète aussi de ce que les filles, une fois mariées, ne bénéficient d’aucune protection et que la jouissance de leurs droits en tant qu’enfants ne soit pas assurée comme le veut la Convention.

55. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation existante pour empêcher les mariages précoces. Il lui recommande aussi de prendre des mesures pour faire en sorte que les filles mariées avant l’âge continuent à jouir pleinement des droits que la Convention leur reconnaît. Le Comité recommande également à l’État partie d’élaborer des programmes de sensibilisation, en y associant les notables locaux et les chefs religieux, ainsi que la société en général, y compris les enfants eux ‑mêmes, pour freiner la pratique du mariage précoce.

Pratiques traditionnelles préjudiciables

56.Le Comité applaudit au dépôt au Parlement, en mai 2003, d’un projet de loi sur la violence à l’encontre des femmes qui visait à proscrire des formes de violence comme les pratiques traditionnelles préjudiciables et la violence familiale, y compris le viol conjugal. Toutefois, il redit son inquiétude devant l’ampleur considérable et la persistance dans l’État partie de ces pratiques traditionnelles préjudiciables, surtout les mutilations génitales féminines ainsi que les scarifications et le meurtre rituel d’enfants, qui mettent très gravement en péril leur vie, et en particulier celle des petites filles.

57.Le Comité constate avec inquiétude qu’il n’y a pas d’interdiction légale desdites pratiques traditionnelles préjudiciables et que les interventions de l’État partie ne sont pas suffisantes pour y remédier. Il s’inquiète aussi de ce qu’il n’y ait pas de services de soutien disponibles pour protéger les filles qui refusent de subir des mutilations génitales, ni pour permettre à celles qui en sont victimes de se rétablir.

58. Le Comité recommande à l’État partie de prendre d’urgence toutes les mesures nécessaires pour éliminer toutes les pratiques traditionnelles préjudiciables au bien ‑être physique et psychologique des enfants, en renforçant les programmes de sensibilisation. Il lui recommande également d’adopter une législation fédérale interdisant ces pratiques et d’encourager les États à modifier leurs lois en proscrivant en particulier les mutilations génitales des femmes, ainsi que de prendre des mesures destinées à apporter un soutien aux filles qui risquent ou refusent de subir de telles mutilations et de prévoir des services destinés au rétablissement des victimes de cette pratique traditionnelle néfaste.

Sécurité sociale

59.Vu la forte proportion d’enfants qui vivent dans la pauvreté dans l’État partie, le Comité note avec inquiétude qu’il n’y a pas d’information fiable sur la couverture des plans de sécurité sociale en place par rapport aux besoins des enfants et de leur famille. Le Comité réaffirme que ces données sont d’une importance capitale pour suivre et évaluer les progrès réalisés et mesurer l’impact des politiques menées en ce qui concerne les enfants. Il craint en outre que le système de sécurité sociale actuellement en place dans l’État partie ne soit pas parfaitement conforme à l’article 26 de la Convention.

60. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’améliorer son système de collecte de données en ce qui concerne la couverture des plans de sécurité sociale actuellement en place et de veiller à ce que tous les indicateurs et données servent à évaluer et réviser ces plans en tant que de besoin;

b) De tâcher de réviser ou/et d’arrêter une politique de sécurité sociale en même temps qu’une politique claire et cohérente de la famille dans le cadre de la stratégie de réduction de la pauvreté, ainsi que des mesures stratégiques efficaces pour utiliser les prestations au titre du filet de protection sociale comme moyen de faire progresser les droits des enfants.

7. Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 de la Convention)

61.Le Comité se plaît à constater que l’éducation s’est vu accorder la priorité absolue dans le budget annuel de l’État partie. De même, il prend note avec satisfaction des initiatives prises par les gouvernements de certains États pour faciliter l’accès des enfants à l’éducation et augmenter les inscriptions scolaires, à savoir le programme de repas scolaires («School meal plus») et la mise au point de la Stratégie d’accélération de l’éducation des filles au Nigéria (la «SAGEN»). Le Comité salue aussi les efforts faits par l’État partie, en coopération avec la société civile, pour mettre en œuvre des programmes d’éducation de la prime enfance. Toutefois, considérant son Observation générale no 1 sur l’article 29.1 de la Convention (buts de l’éducation), le Comité demeure préoccupé par un certain nombre de problèmes variés qui se posent dans le système éducatif de l’État partie, à savoir:

a)L’indisponibilité, dans bien des régions du Nigéria, d’un enseignement primaire gratuit, obligatoire et universel pourtant garanti par la Constitution;

b)Le taux élevé d’analphabétisme, surtout chez les filles et les femmes;

c)La faiblesse générale de la qualité de l’éducation dans l’État partie et les disparités régionales, surtout en ce qui concerne les ressources, les installations et le niveau de l’enseignement;

d)Les disparités sexuelles et régionales caractérisant les effectifs scolaires;

e)Les forts taux d’absentéisme et d’abandon en cours de scolarité, en partie dus aux frais d’inscription qui font que l’envoi de leurs enfants à l’école constitue une charge pour les parents;

f)L’obligation faite par la loi dans certains États de séparer garçons et filles dans les écoles;

g)La ségrégation des enfants de réfugiés et personnes déplacées dans d’autres établissements scolaires que le reste des enfants.

62. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De prendre les mesures voulues pour faire en sorte qu’au moins l’enseignement primaire soit obligatoire, gratuit et universel;

b) D’ériger en priorité l’égalité d’accès des garçons et des filles, des villes comme des campagnes, aux possibilités d’éducation;

c) De prendre les mesures nécessaires pour remédier à la mauvaise qualité de l’éducation et accroître l’efficience interne dans la gestion de l’éducation;

d) De construire de meilleurs équipements d’infrastructure pour les écoles et de dispenser aux enseignants une formation de qualité;

e) De chercher à mettre en œuvre d’autres mesures participatives pour encourager les enfants à fréquenter l’école durant toute la période de la scolarité obligatoire;

f) De prendre des dispositions supplémentaires, notamment sous forme de programmes d’éducation non formelle, pour s’attaquer aux forts taux d’analphabétisme;

g) D’assurer aux enfants qui abandonnent l’école et aux adolescentes enceintes la possibilité de reprendre leurs études;

h) De veiller à ce que des possibilités d’éducation soient offertes aux enfants souffrant du VIH/sida;

i) De veiller à ce que les enfants réfugiés et demandeurs d’asile soient scolarisés sur place pour faciliter leur intégration à la communauté d’accueil;

j) De mettre davantage de programmes de formation professionnelle à la disposition des jeunes, et en particulier des filles, en vue de faciliter leur accès au marché du travail et, dans cette perspective, de ratifier la Convention de l’UNESCO de 1989 sur l’enseignement technique et professionnel;

k) De solliciter une nouvelle assistance technique de l’UNICEF et de l’UNESCO, notamment.

  8. Mesures spéciales de protection (art. 22, 38, 39, 40, 37 b) à d), 32 à 36 de la Convention)

Enfants réfugiés/déplacés

63.Le Comité note que les conflits intercommunautaires liés à des différences politiques, religieuses et ethniques ont abouti à la formation d’une population nombreuse de personnes déplacées sur le territoire même de l’État partie et que celui‑ci accueille d’autre part un groupe important de réfugiés de pays voisins comme le Tchad, la Sierra Leone ou le Libéria. Le Comité est préoccupé par la situation des enfants réfugiés et déplacés qui vivent dans des camps de réfugiés et regrette que l’État partie donne si peu d’informations à leur sujet dans son rapport et qu’il affirme que la question des enfants demandeurs d’asile ne se pose pas au Nigéria. Le Comité est particulièrement inquiet des cas signalés d’exploitation sexuelle, à l’intérieur comme à l’extérieur des camps, de filles et de femmes réfugiées, et notamment d’adolescentes forcées à se prostituer. Il est également inquiet d’apprendre que les grossesses d’adolescentes sont fréquentes dans les camps.

64. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De tâcher, à titre prioritaire, de faire en sorte que tous les enfants déplacés et réfugiés et leur famille aient accès aux services de santé et d’éducation et que tous les droits qui leur sont reconnus dans la Convention soient protégés, y compris celui d’être enregistré à la naissance;

b) De prendre des mesures pour que des services appropriés d’éducation en matière de santé génésique et de conseil respectant leur sensibilité soient effectivement fournis aux adolescents qui vivent dans les camps;

c) De prendre immédiatement des mesures pour que toutes les femmes et tous les enfants déplacés et réfugiés soient effectivement protégés contre toutes les formes de sévices et d’exploitation sexuels et que les auteurs en soient dûment poursuivis en justice;

d) De ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie;

e) De faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur la situation des enfants réfugiés et déplacés, et notamment celle des mineurs non accompagnés;

f) De poursuivre sa collaboration, notamment, avec le HCR.

Enfants touchés par des conflits intercommunautaires

65.Le Comité est profondément inquiet de l’incidence des conflits intercommunautaires sur les enfants au Nigéria. Il est alarmé par les informations indiquant que ces conflits sont marqués par des exécutions extrajudiciaires frappant au hasard les enfants comme les adultes, qui sont quotidiennement tués, abattus et brûlés. Le Comité est profondément inquiet des effets que ces violences ont directement sur les enfants qui en sont victimes, y compris les combattants, de même que des graves traumatismes physiques et psychologiques qui leur sont ainsi infligés. Il note que l’État partie a signé mais n’a pas encore ratifié le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

66. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures possibles pour prévenir les conflits interethniques et de définir une politique générale et un programme de mise en œuvre des droits des enfants qui ont été touchés par un conflit, ainsi que d’affecter les ressources humaines, techniques et financières requises en conséquence. En particulier, le Comité recommande à l’État partie:

a) De mettre au point, en collaboration avec les ONG et les organisations internationales, un système complet de soutien psychosocial et d’assistance aux enfants touchés par un conflit, et en particulier aux enfants combattants et aux enfants déplacés, réfugiés et rapatriés non accompagnés;

b) De prendre des mesures efficaces pour assurer la réintégration des enfants touchés par un conflit dans le système éducatif, notamment en prévoyant des programmes d’éducation non formelle et en faisant passer en priorité la réhabilitation des bâtiments et installations scolaires ainsi que l’approvisionnement en eau et en électricité et l’assainissement des zones touchées par des conflits;

c) De ratifier à titre prioritaire le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

Abus des drogues

67.Tout en reconnaissant les efforts faits par l’État partie pour combattre l’abus et le trafic des drogues ainsi que la violence liée à la drogue, le Comité demeure préoccupé par la forte incidence de la toxicomanie chez les enfants du Nigéria, qui font usage de cannabis, substances psychotropes, héroïne, cocaïne et solvants organiques volatils et qui abusent des plantes locales. Il juge inquiétantes les informations indiquant que les jeunes sont de plus en plus souvent mêlés aux crimes liés à la drogue. Il est également préoccupé par l’absence de législation spéciale interdisant la vente, l’usage et le trafic de substances réglementées qui soit applicable aux enfants comme par l’absence de programmes de traitement à leur intention.

68. Le Comité recommande à l’État partie de faire une étude d’ensemble pour évaluer la nature et l’ampleur de l’abus des drogues chez les enfants et de prendre des mesures pour combattre ce phénomène, notamment par une stratégie générale de réduction de la pauvreté et des campagnes de sensibilisation et d’information du public. Il encourage aussi l’État partie à veiller à ce que les enfants qui abusent des drogues et autres substances toxiques aient accès à des structures et procédures efficaces de traitement, conseil, rétablissement et réinsertion. Il recommande aussi à l’État partie de solliciter le concours et l’assistance de l’OMS et de l’UNICEF.

Enfants des rues

69.Vu le nombre croissant d’enfants qui vivent et travaillent dans la rue et de familles qui sont à la rue, le Comité regrette qu’il n’ait pas été donné d’information sur les mécanismes et les mesures spécialement destinés à remédier à leur situation.

70. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De faire une étude d’ensemble des causes et de l’ampleur de ce phénomène et de mettre en place une stratégie générale pour tâcher de remédier à l’existence d’une population nombreuse et croissante d’enfants des rues, pour réduire et prévenir ce phénomène;

b) De veiller à assurer aux enfants des rues ce qu’il leur faut comme nourriture, habillement, logement, soins de santé et possibilités d’éducation, y compris une formation et l’apprentissage des compétences nécessaires dans la vie courante, en vue de contribuer à leur plein épanouissement;

c) De veiller à ce que ces enfants bénéficient de services de rétablissement et de réinsertion lorsqu’ils sont victimes de violences physiques, sévices sexuels et toxicomanie, d’une protection contre les brutalités policières et de services leur permettant de se réconcilier avec leur famille et leur communauté.

Exploitation sexuelle et pédopornographie

71.Le Comité considère que la législation existante n’est pas correctement appliquée et il est profondément inquiet de constater que le nombre des enfants victimes d’exploitation sexuelle est en hausse dans l’État partie. Il note aussi avec inquiétude que les cas signalés d’agression sexuelle et de viol de filles très jeunes sont également en hausse, surtout dans le Nord. Il déplore que bien souvent les enfants victimes d’exploitation sexuelle ne soient pas suffisamment protégés et/ou secourus pour se rétablir et soient même au contraire traités en criminels.

72. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De faire une étude d’ensemble pour examiner ce qu’il en est de l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie, en recueillant des données exactes sur l’ampleur du phénomène;

b) De prendre les mesures législatives voulues et d’élaborer une politique efficace et complète pour prévenir et combattre l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie, y compris les facteurs qui exposent les enfants au risque de subir cette exploitation;

c) D’apprendre aux fonctionnaires de police, aux travailleurs sociaux et aux magistrats du parquet comment recevoir, suivre, instruire et poursuivre des affaires d’une manière qui protège l’enfant en tenant compte de sa sensibilité et qui respecte l’intimité de la vie privée de la victime;

d) De faire passer en priorité l’aide au rétablissement et de veiller à ce que les victimes disposent de services d’éducation et de formation ainsi que de soutien et de conseil psychosociaux et à ce que celles qui ne peuvent pas réintégrer leur famille se voient offrir des solutions de rechange adéquates et ne soient placées en institution qu’en dernier recours;

e) D’éviter en toutes circonstances d’incriminer les enfants victimes d’exploitation sexuelle;

f) De mettre en œuvre des politiques et programmes appropriés de prévention, rétablissement et réinsertion des enfants qui en sont victimes, conformément à la Déclaration et au Programme d’action ainsi qu’à l’Engagement mondial adoptés en 1996 et 2001, respectivement, au Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales.

Exploitation économique

73.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié en octobre 2002 la Convention de l’OIT no 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi et la Convention de l’OIT no 182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination. Il demeure néanmoins préoccupé par le nombre appréciable d’enfants qui travaillent au Nigéria comme domestiques, dans les plantations, dans les mines et les carrières ou qui mendient dans la rue. Le Comité s’inquiète aussi de ce que l’exploitation et les brutalités soient monnaie courante dans le cadre de la famille élargie, du placement familial et de l’apprentissage.

74.Le Comité est aussi très préoccupé par les cas rapportés de travail forcé des enfants dans l’État partie. Tout en reconnaissant les efforts que celui‑ci et les organismes des Nations Unies ont faits pour réduire le phénomène, le Comité regrette qu’ils n’aient donné que de médiocres résultats.

75. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre et renforcer ses efforts pour éliminer le travail des enfants, tout particulièrement en s’attaquant aux causes foncières de l’exploitation économique des enfants par l’élimination de la pauvreté, et pour mettre en place un système général de contrôle du travail des enfants en collaboration avec les ONG, les organisations locales, le personnel des services de police, les inspecteurs du travail et le programme OIT/IPEC;

b) De faire le maximum, y compris en prenant des mesures préventives, pour que les enfants qui travaillent le fassent conformément aux normes internationales, ne travaillent pas dans des conditions qui leur soient préjudiciables, touchent un salaire décent ainsi que les autres prestations liées au travail et continuent d’avoir accès à l’éducation formelle et aux autres possibilités de développement personnel;

c) De prendre des mesures pour assurer la mise en œuvre de toutes les politiques et lois qui ont trait au travail des enfants, notamment par une campagne de sensibilisation et d’information du public en matière de protection des droits des enfants.

Vente, traite et enlèvement d’enfants

76.Le Comité est heureux de constater que l’État partie fait des efforts sérieux et exemplaires pour combattre la traite des enfants, notamment par des accords antitraite bilatéraux et la mise en place de contrôles conjoints aux frontières. Il salue en outre le vote en juillet 2003 de la loi portant interdiction de la traite des êtres humains, la création de l’Agence nationale pour l’interdiction de la traite des personnes (NAPTIP) et la nomination par le Président en juin 2003 de l’Assistant spécial pour les questions de traite des êtres humains et de travail des enfants. Le Comité relève également que l’État partie a signé en 2003 la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui et qu’il avait ratifié en 2002 le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

77. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et renforcer ses efforts pour prévenir et combattre la traite des enfants. À cet égard, il l’encourage:

a) À améliorer son système de collecte de données sur la vente, la traite et l’enlèvement d’enfants et à veiller à ce que tous les indicateurs et données servent à formuler, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets y afférents;

b) À chercher à conclure de nouveaux accords bilatéraux et des accords multilatéraux sous ‑régionaux avec les pays intéressés, et notamment ses voisins, pour prévenir la vente, la traite et l’enlèvement d’enfants et élaborer des plans d’action concertée entre les pays en question;

c) À continuer de prendre des mesures pour faciliter la protection des enfants, leur retour en toute sécurité dans leur famille et leur réinsertion dans la société, notamment par des programmes de rétablissement et de réinsertion;

d) À renforcer l’Agence nationale contre la traite des personnes et à lui affecter suffisamment de ressources pour qu’elle soit en mesure de remplir correctement ses fonctions;

e) À ratifier la Convention n o  28 de La Haye de 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants;

f) À poursuivre sa coopération avec l’UNICEF et l’OIM, notamment.

Justice pour mineurs

78.Le Comité rend hommage à l’État partie pour ses efforts de réforme de l’administration de la justice pour mineurs, avec la création en 2002 d’un groupe de travail chargé de cette question et la présentation pour discussion du projet de politique nationale sur l’administration de la justice pour mineurs au Nigéria. Néanmoins, le Comité reste très inquiet de ce que le système de la justice pour mineurs de l’État partie, et en particulier celui des tribunaux appliquant la charia, ne soit pas conforme aux normes et règles internationales, et, plus précisément, il déplore:

a)Qu’en attendant que la loi sur les droits de l’enfant soit promulguée dans tous les États, de fortes disparités subsistent en ce qui concerne l’âge minimum de la responsabilité pénale, qui est dans certains cas beaucoup trop jeune par rapport aux pays étrangers;

b)Que les délinquants mineurs soient souvent soumis à des brutalités physiques par les fonctionnaires de la police et de l’administration pénitentiaire;

c)Que les jeunes de moins de 18 ans soient placés dans les mêmes centres de détention et établissements pénitentiaires que les adultes;

d)Que la détention soit d’une longueur excessive, qui peut aller parfois jusqu’à huit ans;

e)Qu’il s’écoule un délai d’une longueur excessive avant l’ouverture des procès;

f)Que les jeunes de moins de 18 ans soient souvent jugés par des tribunaux pour adultes;

g)Que, bien souvent, les jeunes de moins de 18 ans ne soient pas représentés durant leur procès;

h)Que certains enfants soient détenus pour des «délits d’état» comme le vagabondage, la non‑fréquentation de l’école ou l’errance, ou à la demande des parents parce que «ce sont des irréductibles ou qu’ils échappent totalement à l’emprise de leurs parents»;

i)Que les foyers et centres pour jeunes de moins de 18 ans en conflit avec la loi, ainsi que les établissements pénitentiaires dans lesquels ils sont placés, soient si surpeuplés et en si mauvais état;

j)Que l’on manque de professionnels qualifiés pour travailler dans ces établissements;

k)Qu’il n’existe pas d’aides à la réadaptation et à la réinsertion des jeunes de moins de 18 ans à la suite d’une procédure judiciaire;

l)Que l’’article 12 de la loi sur les enfants et les jeunes et l’article 319 2) du Code criminel, de même que les codes pénaux fondés sur la charia de 12 États du Nord, prévoient la peine de mort pour des jeunes de moins de 18 ans.

79.L’État partie a beau prétendre qu’il n’existe pas de divergences entre les dispositions de la Convention et les lois fondées sur la charia quant aux droits des enfants, le Comité demeure profondément préoccupé par la condamnation de jeunes de moins de 18 ans à des traitements cruels, inhumains ou dégradants comme la lapidation, la flagellation, le fouet et l’amputation par les tribunaux appliquant la charia. Il est également inquiet de constater que selon l’article 95 du Code pénal islamique, les enfants âgés de 7 à 18 ans peuvent être punis de l’isolement dans un établissement de redressement ou de 20 coups de canne ou d’une amende, ou des deux peines à la fois.

80. Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation, ses politiques et ses budgets pour garantir la pleine application des règles de la justice pour mineurs, en particulier l’article 37 b) et l’article 40, paragraphe 2 b) ii) à iv) et vii), de la Convention, ainsi que l’Ensemble de Règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des  Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale, et en s’inspirant de la Journée de débat général que le Comité avait consacrée en 1995 à l’administration de la justice pour mineurs.

81. À ce propos, le Comité engage vivement l’État partie, en particulier:

a) À veiller à ce que l’âge minimum de la responsabilité pénale soit applicable dans les 36 États formant l’État partie, en prenant les mesures et décisions recommandées au paragraphe 12 du présent document;

b) À garantir à tous les jeunes de moins de 18 ans le droit de bénéficier d’une aide juridique appropriée et des services d’un avocat pour leur défense et assurer pour eux des procès équitables plus rapides;

c) À élaborer et appliquer des peines de substitution pour remplacer la privation de liberté, afin de faire réellement de la détention une mesure prise en dernier recours pour le minimum de temps;

d) Dans les cas où la privation de liberté est inévitable, à veiller à ce que les conditions de détention soient pleinement conformes, en particulier, aux Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté;

e) À modifier, de toute urgence, la loi sur les enfants et les jeunes et le Code criminel, ainsi que les codes pénaux fondés sur la charia, pour abolir la peine de mort et les traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’endroit des délinquants mineurs et, d’ici là, prendre à titre prioritaire des mesures garantissant que les jeunes de moins de 18 ans ne seront pas condamnés par les tribunaux appliquant la charia à la torture ou à des formes de châtiment cruelles, inhumaines ou dégradantes comme la flagellation et l’amputation;

f) À instaurer, à titre prioritaire, des programmes de formation aux normes internationales applicables à l’intention de tous les professionnels intervenant dans le système de la justice pour mineurs et à mettre en place au sein de la police des groupes spéciaux pour traiter les cas de jeunes de moins de 18 ans qui sont en conflit avec la loi;

g) À ne ménager aucun effort pour mettre en place un programme de réadaptation et réinsertion de mineurs à la suite de procédures judiciaires;

h) À promulguer une modification de la loi sur les enfants et les jeunes interdisant toutes les formes de châtiment corporel dans les établissements pénitentiaires;

i) À solliciter l’assistance technique, notamment, du Haut ‑Commissariat aux droits de l’homme et de l’UNICEF.

9. Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant

82.Le Comité note que l’État partie a signé mais n’a pas encore ratifié les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant, respectivement, la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants et l’implication d’enfants dans les conflits armés.

83. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier immédiatement et mettre en œuvre les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant qui concernent respectivement la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants et l’implication d’enfants dans les conflits armés.

10. Suivi et diffusion

Suivi

84.Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour garantir la mise en œuvre intégrale des présentes recommandations, notamment en les transmettant aux membres du Conseil des ministres ou du Cabinet ou organe analogue, du Parlement et des gouvernements et parlements des provinces ou États, selon le cas, pour examen et suite à donner.

Diffusion

85.Le Comité recommande également que le rapport initial et les réponses écrites présentées par l’État partie, de même que les recommandations qu’il a adoptées à leur propos (observations finales), soient très largement rendus accessibles, y compris (mais pas exclusivement) par l’Internet, au public en général, aux organisations de la société civile, aux groupements de jeunesse, aux organisations professionnelles et aux enfants, en vue de faire connaître la Convention, sa mise en œuvre et la surveillance de son application et de susciter la discussion à leur sujet.

11. Prochain rapport

86. À la lumière de sa recommandation sur la périodicité des rapports, exposée dans le rapport de sa vingt ‑neuvième session (CRC/C/114), le Comité souligne l’importance d’une pratique en matière de présentation des rapports qui soit pleinement conforme aux dispositions de l’article 44 de la Convention. Un aspect important des responsabilités des États parties envers les enfants qui découlent de la Convention est de veiller à ce que le Comité des droits de l’enfant ait régulièrement la possibilité d’examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre de cet instrument. Il est donc capital que les États parties présentent leur rapport régulièrement et dans les délais voulus. Le Comité invite l’État partie à soumettre ses troisième et quatrième rapports périodiques en un rapport unique d’ici au 18 mai 2008, date fixée pour la présentation du quatrième rapport. Ce document ne devra pas dépasser 120 pages (voir CRC/C/118). Le Comité attend de l’État partie qu’il présente par la suite un rapport tous les cinq ans, comme le prévoit la Convention.

-----