Soixante-huitième session
23 octobre-17 novembre 2017
Point 4 de l’ordre du jour provisoire
Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 18 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes
Liste de points et de questions concernant le huitième rapport périodique du Kenya
Additif
Réponses du Kenya *
[Date de réception : 3 juillet 2017]
Cadre constitutionnel et législatif et harmonisation des lois
Si les dispositions de la Convention ont été invoquées par les tribunaux
En raison du régime dualiste qui le caractérise, le Kenya est tenu par la loi no 45 de 2012 relative à la conclusion et à la ratification des traités de transposer dans son droit interne l’ensemble des conventions et traités internationaux. Cette loi vise à donner effet aux dispositions du paragraphe 6 de l’article 2 de la Constitution et prévoit une procédure pour la conclusion et la ratification des traités et autres fins connexes. La Constitution prévaut sur le droit national, et les tribunaux font respecter le droit international dans les décisions qu’ils rendent, comme en témoigne la décision en l’affaire Mary Mwaki Masinde v. County Government of Vihiga. La requérante avait allégué qu’une discrimination au motif de sa situation matrimoniale lui avait valu de se voir refuser un emploi auprès de l’administration du comté de Vihiga. Dans l’affaire en cause, la Cour a invoqué l’article 2 de la Convention, qui oblige les États parties à condamner la discrimination à l’égard des femmes sous toutes ses formes. La requérante a reçu 3 millions de shillings kényans (soit 30 000 dollars des États-Unis) en dommages-intérêts pour discrimination. En outre, la Cour suprême du Kenya, dans son avis consultatif no 2 de 2012, a confirmé l'obligation de réalisation progressive de la règle constitutionnelle voulant qu'aucun organe électif public ne puisse compter plus de deux tiers de membres du même sexe, en invoquant l’article 4 de la Convention qui exige l’adoption par les États parties de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes.
Les dispositions de la Convention ont également été invoquées dans d’autres jugements, y compris la décision de la Cour d’appel en l'affaire Rono v. Rono et la décision de la Cour supérieure en l’affaire Lerionka Ole Ntutu. La Constitution l’emporte sur toute loi du Parlement ou la remplace. En outre, les articles 1 et 2 (1, 6) affirment que la Constitution est la loi suprême de l’État, à la suite de quoi toute convention ratifiée par l’État partie est intégrée dans l’ordre juridique interne. Le Kenya ayant ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, celle-ci est donc partie intégrante de la Constitution et l’emporte sur les lois du Parlement. Dans ce cas, la Convention est appliquée en l’état, et au sens du paragraphe 6 de l’article 2 de la Constitution.
Mesures prises pour garantir que les tribunaux islamiques (Kadhi) ne dérogent pas aux dispositions constitutionnelles sur l’égalité
La spécificité du contexte historique kényan pour ce qui est des tribunaux islamiques (Kadhi), à savoir les controverses ayant entouré ce sujet avant la promulgation de la Constitution en 2010, explique la consécration de leur intégration dans la Constitution. Les tribunaux islamiques (Kadhi), toutefois, ne dérogent pas aux dispositions constitutionnelles sur l’égalité et ne priment pas la Cour supérieure. Les parties qui professent la foi musulmane sont libres de laisser le soin à la Cour supérieure de trancher sur les questions qui les affectent en lieu et place des tribunaux islamiques (Kadhi). Au cas où les parties ne seraient pas satisfaites de la décision rendue par les tribunaux islamiques (Kadhi), il leur est loisible de former un recours devant la Cour supérieure et de faire appel du jugement rendu. À cet égard, les parties ne sont pas lésées en faisant appel aux tribunaux islamiques (Kadhi). C’est le cas, par exemple, de l’appel civil no 15 de 2013. Dans ce cas précis, une mère a interjeté appel auprès de la Cour supérieure de la décision du tribunal islamique de Mombasa qui avait donné la garde de ses deux enfants à son ex-mari. Le juge de la Cour supérieure a annulé la décision du tribunal islamique (Kadhi) au motif d’incompétence. Dans une autre affaire, à savoir la cause de succession no 301 de 2014 examinée par la Cour supérieure de Mombasa (dans le cas de la succession de S.P.B, défunt), la question dont le tribunal était saisi était de savoir si la Cour supérieure avait compétence pour examiner une question de succession concernant un défunt de confession musulmane ou si c’était le tribunal islamique (Kadhi) qui avait compétence exclusive. La Cour a décidé que le tribunal islamique (Kadhi) n’avait pas compétence exclusive pour traiter des questions musulmanes.
Compétence des tribunaux islamiques (Kadhi)
L’article 170 de la Constitution kényane de 2010 définit la compétence du tribunal islamique (Kadhi). Cette compétence se limite à statuer sur les questions de droit musulman relatives au statut personnel, au mariage, au divorce ou à la succession dans des affaires où toutes les parties sont de confession musulmane et se soumettent à la juridiction des tribunaux islamiques (Kadhi). Il s'ensuit que ces tribunaux ne peuvent être saisis que par des parties qui sont de confession musulmane et qui s’engagent à respecter et à se soumettre à leur autorité. Au cas où les parties ne seraient pas satisfaites de la décision rendue par les tribunaux islamiques (Kadhi), il leur est loisible de former un recours devant la Cour supérieure et d’y transférer leur affaire. L’exemple précité montre que les femmes musulmanes disposent de voies de recours; les interventions ne se font pas au coup par coup, le personnel juridique ayant reçu une formation adéquate et disposant des compétences appropriées en droit islamique. L’une des conditions requises pour siéger au sein des tribunaux islamiques (Kadhi) repose sur l’appartenance à la foi musulmane et la connaissance du droit musulman tel qu’il s’applique à toutes les sectes de l’Islam.
La loi de 2010 sur les tribunaux islamiques (Kadhi) (modifiée en 2012) dispose que la compétence des tribunaux islamiques (Kadhi) ne limite en rien la compétence de la Cour supérieure et des juridictions inférieures dans les affaires portées devant elles. Les affaires entendues devant les tribunaux islamiques (Kadhi) sont également soumises à un contrôle judiciaire, et leurs dossiers doivent être consignés et présentés à la Cour supérieure. Un tribunal islamique (Kadhi) a le droit d’exercer la compétence suivante, à savoir l’interprétation des questions relevant du droit musulman et relatives au statut personnel, au mariage, au divorce ou à l’héritage lors de procédures où toutes les parties sont de confession musulmane; mais rien dans le présent article ne limite la compétence de la Cour supérieure ou de toute autre juridiction inférieure dans toute procédure dont elle est saisie.
Accès à la justice
Programme national d’assistance et de sensibilisation judiciaires : financement, couverture et aide juridictionnelle pour les affaires civiles
Financement
Par le biais de l’article 48 de la loi de 2016 sur l’aide juridictionnelle, les femmes ont accès à la justice au Kenya. Le financement accordé par le Gouvernement s’étant révélé insuffisant, les partenaires de développement tels que l’Union européenne (UE) et ONU-Femmes ont pris la relève du financement de ces activités. Des progrès ont néanmoins été accomplis avec l’adoption de la loi de 2016 sur l’aide juridictionnelle. Un comité de neuf membres a été mis en place pour commencer à mettre en œuvre cette loi. Le financement des activités connexes a également été pris en compte pour l’année financière 2017/2018. Le programme couvrira l’ensemble du pays.
Couverture
En vertu de la loi de 2016 sur l’aide juridictionnelle, il existe un service national d’aide juridictionnelle dont les fonctions comprennent l’administration d’un régime national d’aide juridictionnelle accessible et abordable à l’intention de tous les Kényans qui ont en besoin. Le programme national d’assistance et de sensibilisation judiciaires a mis en œuvre cinq projets pilotes au Kenya entre 2009 et 2012. Les projets pilotes ont été les suivants : à Nairobi, on a mis l’accent sur le droit de la famille (mariage, divorce et partage des biens matrimoniaux), tandis que d’autres projets pilotes ont abordé d’autres domaines du droit à Nakuru, Mombasa, Kisumu et Eldoret. Les projets pilotes étaient destinés à couvrir les comtés voisins.
Groupes marginalisés
Parmi les autres mécanismes mis en place pour remédier aux problèmes d’accès à la justice, il convient de citer notamment les comités d’utilisateurs des tribunaux répartis sur l’ensemble du pays, les audiences foraines dans les zones reculées du Kenya qui ciblent les groupes marginalisés tels que les femmes, ainsi que l’obligation constitutionnelle d’assurer la représentation équitable des hommes et des femmes lorsqu’ils siègent auprès des systèmes de justice traditionnels; les dispositifs de médiation rattachés au tribunal et le tribunal d’instance (anciennement juridiction de proximité) établi en vertu de la loi de 2016 relative au règlement des petites créances, qui cible les litigants vulnérables comme les femmes.
Gestion des différends : modes alternatifs de règlement des différends
L’accès à la justice passe par la reconnaissance des modes alternatifs de règlement des différends, qui sont tous subordonnés à la loi. Il s’agit du règlement des différends par des voies autres que le recours au système judiciaire; ces voies incluent la négociation, la médiation, l’arbitrage, la conciliation et le recours à des mécanismes de règlement informel des différends. L’article 35 de la loi sur l’aide juridictionnelle dispose que celle-ci s’applique à une variété d’affaires, y compris les affaires civiles, les affaires pénales, les affaires familiales, les questions constitutionnelles et les préoccupations d’intérêt général.
Hiérarchie entre le droit écrit, le droit coutumier, le droit islamique et le droitdes personnes
La Constitution est la loi suprême du Kenya et l’emporte donc sur toute autre loi. Elle reconnaît l’existence des modes alternatifs de règlement des différends, dans la mesure où ils ne contreviennent pas aux dispositions de la Constitution. Pour ce qui est du droit coutumier, il peut être appliqué dans la mesure où il ne porte pas atteinte à la justice ou à la morale et n’est pas contraire aux dispositions de la Constitution, telles que les dispositions relatives à l’égalité et au principe de la non-discrimination en vertu de l’article 27 et au respect de la dignité de la femme au titre de l’article 28. En tant que tel, il existe certains domaines où les différends peuvent être régis par le droit coutumier et le droit islamique. Dans le cas des tribunaux islamiques (Khadi), les deux parties doivent accepter les arrêts rendus. Comme mentionné précédemment, les décisions des tribunaux islamiques (Khadi) font l’objet d’un examen par la Cour supérieure. Ainsi, les particuliers peuvent également interjeter appel des décisions des tribunaux islamiques (Khadi) auprès de la Cour supérieure.
Les femmes et la paix et la sécurité
Représentation et participation des femmes
Le plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité a été adopté et un secrétariat a été créé à cet effet. Le plan est ancré dans les valeurs constitutionnelles de l’égalité des sexes, de l’inclusion et de la participation. Il place « l’individu » au centre des préoccupations de sécurité plutôt que de dévoluer spécifiquement cette place à « l’État ». Au niveau des comtés, ce sont les comités de district pour la paix qui ont assuré la représentation des femmes conformément aux dispositions de la discrimination positive de la Constitution (principe selon lequel les organes dont les postes sont pourvus par élection ou nomination ne doivent pas être composés à plus de deux tiers de membres du même sexe).
Lutte contre l’extrémisme violent
Radicalisation
L’impact de l’insurrection des Chabab peut être observé dans la manière dont les femmes et les filles sont radicalisées et se livrent à l’extrémisme violent. Par exemple, trois femmes ont fait détoner une bombe dans un poste de police de Mombasa. Le Gouvernement kényan a par ailleurs émis un mandat d’arrêt INTERPOL à l’encontre de Samantha Lewthwaite, communément appelée la « Veuve blanche », pour sa participation à l’attaque perpétrée par les Chabab en septembre 2013 contre le centre commercial du Westgate. Dans le cadre de l’escalade de l’insurrection, des femmes sont également enlevées et radicalisées; il y a aussi des cas où des femmes se rendent en Somalie, un pays voisin, avec l’intention de rejoindre les Chabab comme épouses de djihadistes. Au-delà des facteurs économiques, une étude doit être menée pour déterminer les causes sous-jacentes de l’émergence de l’extrémisme chez les femmes. Une campagne nationale sur les femmes, la paix et la sécurité a également été entreprise par le Gouvernement et un élément majeur de la sensibilisation est la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent dans une démarche tenant compte de la problématique hommes-femmes.
Stratégie nationale
Face à l’augmentation des cas d’extrémisme violent, le Président a lancé une stratégie nationale de lutte contre l’extrémisme violent en septembre 2016. Cette stratégie s’emploie à mettre en place et à déployer des outils d’alerte rapide et des outils d’intervention précoce contre la radicalisation qui jouissent de la confiance du public. Elle s’accompagne d’un volet psychosocial qui tente de répondre aux besoins psychosociaux des personnes radicalisées, ainsi que de celles qui ont été jusqu’à adhérer à des réseaux ou groupes extrémistes violents. Cette même assistance est offerte aux membres de leurs familles qui, dans bien des cas, sont traumatisées et éprouvent des sentiments de peur et de honte.
Déradicalisation et initiatives de réinsertion
La stratégie nationale prévoit également des programmes de réadaptation/réinsertion et de déradicalisation. Parmi les autres lois que le Gouvernement a mises en place, il convient de citer, par exemple, la loi relative à la prévention du terrorisme (POTA, adoptée en 2012), la loi relative aux produits du crime et à la lutte contre le blanchiment d’argent (POCAMLA, adoptée en 2009) et la loi sur la prévention des crimes organisés (POCA, adoptée en 2010). Un Centre national de lutte contre le terrorisme (NCTC), ainsi qu’une Unité de police antiterroriste (ATPU) ont également été mis en place. On peut citer à cet égard le rôle joué par la loi relative à la prévention du terrorisme (POTA, adoptée en 2012), qui a été invoquée dans le cas de Nuseiba Mohammed Haji Osman, qui était soupçonnée d’appartenir à un groupe terroriste et d’avoir l’intention de se livrer à des activités terroristes. En conséquence, l’accusée a dû remettre son passeport à l’Unité de police antiterroriste (ATPU) et doit se présenter devant cette instance toutes les deux semaines. Le Centre national de lutte contre le terrorisme (NCTC) coopère avec les organisations de femmes telles que le Kenya Muslim Women Alliance (alliance des femmes musulmanes du Kenya, ou KEMWA) et le Kenya Community Centre (centre communautaire du Kenya ou KECOSCE) pour lutter contre l’extrémisme violent et la radicalisation chez les femmes. Le Gouvernement s’emploie également à renforcer la coopération avec des théologiens musulmans modérés, y compris kényans, afin de cibler les jeunes femmes et améliorer l’éducation relative aux préceptes de l’Islam.
Mécanisme national de promotion de la femme
Stratégie nationale de promotion de la femme et réalisation de l’objectifde développement durable no 5
La stratégie nationale de promotion de la femme s’inspire de la Constitution, de « Kenya Vision 2030 » et des plans quinquennaux à moyen terme. Faisant fond sur ces documents nationaux, le Kenya a élaboré une politique nationale concernant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, en veillant à ce que les préoccupations tenant compte de la problématique hommes-femmes soient pleinement intégrées dans le processus de développement national se rapportant aux deux paliers de l’administration. Le document de politique générale fait fond en grande partie sur l’objectif de développement durable no 5. Le Kenya a également mené à bien un état de référence initial sur l’objectif de développement durable no 5, en veillant à ce que les interventions engagées afin d’améliorer la mise en œuvre de cet objectif spécifique tiennent compte des données factuelles qui en sont issues.
Commission nationale de la condition de la femme et de l’égalité des sexeset Direction de l’égalité des sexes
Ces deux mécanismes ont été renforcés grâce à une restructuration et à des ressources humaines et financières plus importantes. La Direction de l’égalité des sexes a été renforcée par la création du Département d’État des affaires féminines du Ministère de la fonction publique, de la jeunesse et du genre. Pour la première fois dans l’histoire du Kenya, le pays s’est doté d’un Département d’État des affaires féminines à part entière, qui est dirigé par une secrétaire principale. Le budget a également été amélioré, et en l’espace d’une année, près de 100 cadres issus de différents domaines d’expertise ont été recrutés et se penchent sur la problématique hommes-femmes.
La Commission nationale de la condition de la femme et de l’égalité des sexes ainsi que le Département d’État des affaires féminines actuel assument les responsabilités suivantes : politiques, intégration de la lutte contre les inégalités entre les sexes, conventions et traités internationaux. Ces deux administrations ont un rôle distinct, la Commission nationale de la condition de la femme et de l’égalité des sexes exerçant essentiellement des fonctions de contrôle, tandis que le Département d’État des affaires féminines est chargé de coordonner la mise en œuvre des initiatives relatives à l’égalité des sexes dans tous les secteurs. Les mandats et les responsabilités sont clairement énoncés dans la loi de 2011 sur la Commission nationale de la condition de la femme et de l’égalité des sexes et le décret de mai 2016. Les responsabilités sont précisées plus avant dans la structure d’exécution de la politique nationale concernant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.
Déploiement de spécialistes des questions relatives à la problématique hommes-femmes dans les ministères
Les spécialistes des questions relatives à la problématique hommes-femmes qui travaillent avec les fonctionnaires spécialisés dans les questions intéressant les jeunes ont contribué à : la définition de programmes pour la mise en place de comités de transversalisation de la problématique hommes-femmes, la formulation de politiques de transversalisation de la problématique hommes-femmes ainsi que l’élaboration de principes directeurs régissant le lieu de travail et visant à mettre fin à la violence sexiste, y compris les structures de mise en œuvre. Ils ont également assuré le suivi du projet de loi sur l’accès aux marchés publics (30 % du budget d’achat de biens, travaux et services devant être alloué par les adjudicateurs à des micro et petites entreprises appartenant à des femmes, des jeunes ou des personnes handicapées) au sein de leurs ministères, notamment en faisant face aux défis émergents, et en améliorant ainsi l’accès des catégories susmentionnées à ces marchés.
Grâce à la contribution de ces spécialistes, le Kenya a élaboré des systèmes qui permettent de suivre et de rendre publique l’enveloppe financière en faveur de l’égalité des sexes grâce à l’élaboration de directives de budgétisation tenant compte de la problématique hommes-femmes. Les directives budgétaires qui ont été publiées au cours de l’année financière 2016/17 comportaient des dispositions spécifiques visant à intégrer la problématique hommes-femmes lors de l’établissement des objectifs à moyen terme. En outre, des efforts sont couramment déployés, en partenariat avec le Trésor public, pour inclure le genre dans les classes du plan comptable normalisé dans le but de suivre et de rendre publiques les allocations affectées à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, comme le prévoient les indicateurs de l’objectif de développement durable no 5.
Genre et données ventilées par sexe
Un cadre visant à consolider les données ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique et handicap a été lancé. Des données sont actuellement disponibles dans les domaines suivants : fonction publique (emploi, nominations et promotions), Teachers Service Commission (Commission du personnel enseignant du Kenya) et universités.
Mesures temporaires spéciales
Mise en œuvre du principe stipulant que les organes publics électifs ne doivent pas être composés à plus de deux tiers de membres du même sexe
Le projet de loi Chepkonga ainsi que les projets de loi Duale ont été débattus au Parlement en 2015. En mars 2017, le Juge Mativo a ordonné au Procureur de la République et au Parlement d’adopter une législation visant à faire respecter sous 60 jours le principe de deux tiers de membres du même sexe. Selon le Juge, toute violation de cette règle autoriserait tout citoyen kényan à introduire une requête auprès du Président de la Cour suprême du Kenya, qui enjoignerait au Président de procéder à la dissolution du Parlement. Le Gouvernement a soutenu massivement la promulgation du projet de loi en vue de déboucher sur l’application des articles 27 et 81 de la Constitution, mais sans obtenir le résultat escompté. Par ailleurs, une stratégie nationale visant à renforcer l’appui consenti aux femmes souhaitant accéder aux mandats électifs a été lancée.
Autres mesures temporaires
Au titre de la loi no 33 de 2015 sur la passation des marchés publics et la cession des biens publics, les gouvernements de comté sont tenus de réserver 30 % du budget d’achat de biens, travaux et services aux petites et micro-entreprises appartenant à des femmes et à des jeunes. Dans le même temps, au niveau national, la loi de 2015 sur la passation des marchés publics et la cession des biens publics affirme que 30 % de l’ensemble des achats et de la cession des biens publics devrait être réservé aux femmes, aux jeunes et à d’autres groupes marginalisés. À noter également que sur les 30 %, 5 % est réservé aux femmes handicapées. Parmi les autres mesures prises, il convient de noter le National Government Affirmative Action Fund (NGAAF), le Fonds Uwezo, le Youth Enterprise Fund, le Women Enterprise Fund et le Cash transfers for Persons Living with Disability, ainsi qu’une augmentation du salaire minimum en vertu de la loi sur le salaire minimum.
Stéréotypes et pratiques traditionnelles néfastes
Sensibilisation
Participation des anciens
Un nombre croissant d’hommes se sont joints à la lutte contre les mutilations génitales féminines; ce faisant, ils se font les champions des droits des filles à la protection et à l’éducation. Cela est particulièrement vrai chez les Masaïs et les Embus qui reconnaissent que cette pratique a une incidence négative sur le développement de leurs communautés. En outre, la fourniture de moyens de subsistance alternatifs aux exciseuses reconverties conduit à un abandon de plus en plus fréquent de cette pratique.
Participation de la communauté
Les policiers ont renforcé l’action qu’ils mènent auprès des conseils des anciens. Une formation de modèles sélectionnés dans les zones à forte prévalence de ces pratiques a été entreprise. Les zones ciblées sont les suivantes : Wajir, Tana River, Meru, Tharaka Nithi, Elgeyo Marakwet, Bomet, Nyamira, Kajiado, Narok, Marsabit, Samburu, Isiolo, Baringo et West Pokot. Les initiatives menées dans le pays ont permis d’atteindre au moins 1 530 personnes cibles. Des programmes d’échanges établis à l’intention de la communauté Maa de Kajiado, Samburu et Narok et se rapportant aux pratiques culturelles préjudiciables, notamment le « beading » et les mutilations génitales féminines (MGF) ont également été réalisés. Les conseils traditionnels d’anciens ont décidé de tenir des dialogues dans leurs « Manyattas » (villages) respectifs afin d’engager les résidents à renoncer à ces pratiques néfastes.
Viol des filles, appelé « Beading »
Il s’agit d’un rite de passage chez le peuple Samburu qui consiste à donner des perles à de jeunes filles (qui n’ont parfois que 9 ans); ce cadeau signifie qu’elles sont désormais fiancées à des Morans Samburu (jeunes guerriers).
Éducation
Un manuel de formation, intitulé « Stopping Medicalization of FGM » (enrayer la médicalisation des mutilations génitales féminines), qui cible la profession médicale, a été établi. Il vise à susciter une prise de conscience et à assurer la formation progressive de tous les agents sanitaires, plus précisément dans les communautés où les mutilations génitales féminines ont une forte prévalence, telles que les communautés gusii, sambaru, masaï, et somalienne. Ce manuel aborde un certain nombre de questions, dont l’autonomisation des travailleurs sanitaires, ainsi que l’introduction d’une déontologie et d’un code de conduite à l’intention des professionnels de la santé. Des progrès ont été accomplis concernant l’intégration de la thématique des MGF aux nouveaux programmes scolaires. Cette matrice, qui traite de questions pertinentes et d’actualité, a été créée et un ordonnancement thématique a déjà été mis en place.
Poursuites
Le Parquet a examiné 76 affaires, dont l’état d’avancement de l’instruction se trouve à des stades différents. Il existe un certain nombre de rites de passage de remplacement qui ont été lancés dans les communautés qui considèrent les mutilations génitales féminines comme un rituel d’initiation des filles. D’ores et déjà, le Gouvernement national a obtenu l’adhésion des administrations de comtés dirigées par les Premières dames de comté. Le Gouvernement a mis de côté des fonds destinés aux initiatives relatives à l’autonomisation des filles.
Partenariats
S’agissant de la planification de la lutte contre les MGF, une collaboration renforcée avec les administrations locales pour traiter des questions budgétaires à l’échelon du comté a été instituée. Par exemple, pour l’année financière 2016/2017, West Pokot a réservé environ 60 millions de shillings kényans (soit 60 000 dollars des États-Unis) pour les initiatives concernant les enfants, les mariages précoces et les mutilations génitales féminines. Des réseaux entre les organismes publics et les acteurs non étatiques ont été mis en place au niveau des comtés pour combattre les pratiques préjudiciables telles que les mutilations génitales féminines et le mariage d’enfants. Les principes directeurs de la lutte contre les mutilations génitales féminines (2010) ont été examinés et présentés au Cabinet pour adoption.
Autres mesures
Plusieurs mesures ont été mises en place, dont l’application de la loi de 2011 sur l’interdiction des mutilations génitales féminines (chapitre 62B). Un certain nombre de personnes ayant contrevenu aux dispositions de la loi ont été poursuivies. Par exemple, la chambre criminelle de la cour d’appel (audience d’appel no 6 de 2014), a condamné une femme à une peine d’emprisonnement de sept ans pour avoir pratiqué des mutilations génitales féminines. Des poursuites ont été engagées dans un cas plus récent (2015).
Des mesures ont également été prises pour mettre fin au mariage d’enfants par le biais de la Constitution, qui, selon le paragraphe 2 de l’article 45 (droit kényan, 2010) dispose que le droit de se marier ne peut être accordé qu’aux adultes. La Constitution décrit un adulte comme une personne âgée de 18 ans et plus. Cet article a été invoqué dans le cas de la requête constitutionnelle no 40 de 2011, où les requérants ont été inculpés d’avoir exposé une jeune personne au mariage d’enfants. Cela étant, la loi de 2014 sur le mariage est une autre mesure de lutte contre le mariage d’enfants. La loi prescrit que l’âge minimum de consentement au mariage soit fixé à 18 ans. La loi sur les délits sexuels peut aussi être invoquée pour poursuivre les délinquants.
Remise en cause des normes sociales et inversion des stéréotypes
On s’accorde à reconnaître que les administrations de comté au Kenya veillent à ce que des mesures soient prises pour remettre en cause les normes sociales et inverser les stéréotypes relatifs aux rôles traditionnels des hommes et des femmes en favorisant la participation du public. Grâce à la participation du public, il s’est dégagé une adhésion en faveur du principe de deux tiers de membres du même sexe, dans le cadre des mesures visant à inclure les voix et opinions des femmes dans le processus de participation du public et à inverser les stéréotypes sexistes. La loi de 2013 sur l’éducation de base permet également d’aborder la question de l’éradication et de l’élimination des stéréotypes sexistes. Cette démarche est validée en veillant à ce que les stéréotypes ne soient pas perpétués dans le matériel pédagogique. L’éducation de base fait également partie de la stratégie qui consiste à éliminer les stéréotypes traditionnels concernant les femmes et les hommes. La mise en place d’une telle éducation de base aura des incidences profondes.
Violence sexiste
Application de la législation
La loi de protection contre la violence familiale, adoptée en 2015 est une législation complète qui offre protection et assistance aux femmes victimes de violence sexiste. La loi de 2006 sur les délits sexuels vise également à protéger les victimes de violence sexiste. Un rapport national de 2014 sur la criminalité indique que 45 % des femmes kényanes âgées de 15 à 49 ans ont subi des violences physiques ou une violence sexuelle sous une forme ou une autre. Des mesures ont été prises pour offrir des services d’appui aux victimes de violence sexiste, grâce à la mise en place de guichets uniques dans les hôpitaux de référence, et dans certains postes de police, où il existe un service d’accueil pour les femmes. Cette infrastructure permet de signaler les cas de violence sexiste.
Les tribunaux ont également été à l’avant-garde de la prise de décisions concernant la violence sexuelle dirigée contre les femmes. Par exemple, le 27 mai 2013, la Cour supérieure de Meru a prononcé une décision constitutionnelle historique où un groupe de jeunes filles a contesté avec succès l’inaction du Gouvernement kényan face aux violences sexuelles perpétrées à l’encontre des enfants, notamment le viol sur mineur. Cette pétition symbolique, qui a été déposée le 11 octobre 2012, à l’occasion de la première Journée internationale de la fille, a bénéficié du soutien d’Equality Effect, un groupe international de recherche collaborative qui est placé sous l’égide de « 160 Girls » (programme « 160 Girls »). La requête a été introduite sur fond d’une forte prévalence de violences sexuelles commises à l’encontre d’enfants dans le comté de Meru et, de fait, dans l’ensemble du pays. À l’époque, le Kenya s’était déjà doté d’une législation adéquate sous la forme de la loi de 2006 sur les délits sexuels, qui impose des peines sévères pour le viol sur mineur et autres délits sexuels. Toutefois, l’efficacité de la loi a été ternie par son application médiocre en raison de l’incapacité de la police à enquêter sur les plaintes de violence sexuelle ou d’en arrêter les auteurs.
Signalement
Un numéro d’urgence dédié à la violence sexiste (composer le numéro 1195) a été lancé en mars 2017. Il s’agit d’une initiative du programme de lutte contre la violence sexiste menée par Healthcare Assistance Kenya (HAK) qui intensifie les efforts visant à protéger les femmes et les filles de la violence sexiste.
Système de suivi et d’évaluation
Ce système a été élaboré en 2011 et est en cours d’examen. En outre, tous les établissements de comtés disposent d’un personnel attitré et de services spécialisés où la violence sexuelle et sexiste est traitée comme une urgence. Le Gouvernement a été le fer de lance de la mise en place d’un système d’information national visant à recueillir et à intégrer des données sur la violence sexuelle et sexiste dans les secteurs suivants : santé, Service national de police, Bureau du Directeur des poursuites pénales (ODPP), système judiciaire et éducation/Teachers Service Commission (Commission du personnel enseignant du Kenya).
Traite d’êtres humains et exploitation de la prostitution
Application de la loi de 2010 sur la traite d’êtres humains
Un Plan d’action national a été élaboré et un comité consultatif mis en place. Certaines institutions gouvernementales, par exemple le Ministère de la santé, ont intégré un module sur la traite d’êtres humains dans les programmes d’enseignement révisés consacrés à la violence sexuelle et sexiste à l’intention des travailleurs de la santé. Le Gouvernement a également commencé à mettre au point un mécanisme de collecte de données pour améliorer le suivi des efforts de lutte contre la traite dans les 47 comtés du Kenya.
Loi de 2013 sur la protection des victimes
Cette loi vise également à améliorer l’assistance octroyée à toutes les victimes de la traite, y compris sous la forme d’hébergement, de nourriture, de soins médicaux, de prise en charge psychosociale, de protection policière et de mise en place d’un fonds d’aide aux victimes. Au cours de la période considérée dans le rapport, le Gouvernement a alloué 7 millions de shillings kényans (soit 70 000 dollars des États-Unis) au fonds d’assistance aux victimes. Le Gouvernement fournit des services aux adultes victimes de la traite qui ont été identifiés sur le territoire kényan ou à l’étranger. Les missions diplomatiques du Kenya fournissent également une assistance aux victimes kényanes de la traite, principalement en facilitant les contacts entre les victimes et leurs familles. Le Gouvernement a également entrepris de déployer auprès des missions kényanes implantées à l’étranger des conseillers à l’emploi, en particulier au Moyen-Orient. De nouveaux principes directeurs à l’intention des Kényans en quête de possibilités d’emploi à l’étranger ont été élaborés afin de garantir que leurs contrats de travail respectent les normes spécifiques fixées au sein du Ministère. En septembre 2015, un groupe de travail ministériel a présenté un rapport au Secrétaire du Cabinet, où il concluait que les travailleurs non qualifiés étaient les plus vulnérables à l’exploitation, et formulait des recommandations concernant les moyens de traiter cette question et de réglementer les agences de recrutement, en particulier celles qui sont non enregistrées. Le financement public et l’insuffisance des ressources restent un sujet de préoccupation.
En ce qui concerne l’application de la loi de 2013 sur la protection des victimes, des progrès ont été réalisés et il y a désormais en place un Conseil de protection des victimes. La Commission de la réforme du droit et les services du Procureur général de la nation ont entrepris de revoir les projets de règlements ainsi que les règles régissant les fonds d’affectation spéciale dans le cadre de l’application de la loi. Une charte des droits des victimes a également été élaborée.
Données sur la traite
Bien que les données sur les affaires de traite n’aient pas encore été pleinement ventilées, 762 trafiquants présumés ont été poursuivis et 456 condamnations ont été enregistrées en 2016. Quatre-vingt-un cas se sont soldés par un acquittement. Pour la première fois, le Gouvernement a reçu des données provenant des services répressifs disséminés sur l’ensemble des 47 comtés que compte le pays, ce qui a contribué en partie à l’augmentation notable des poursuites et condamnations signalées.
Comité consultatif pour la loi de 2010 sur la traite des êtres humains
Dans le cadre de son plan de travail annuel en 2016, ce comité a élaboré des procédures opératoires standard à l’intention des procureurs et assuré la formation d’environ 50 formateurs issus des principales parties prenantes engagées dans la lutte contre la traite. Le Comité consultatif, par l’intermédiaire des bureaux représentés et du Département des services à l’enfance a diffusé des matériels de sensibilisation et des études de cas dans un effort visant à sensibiliser les communautés locales aux indicateurs potentiels de la traite.
Formation
Le Gouvernement a assuré une formation à la lutte contre la traite à l’intention de son personnel diplomatique. La formation que dispense le Gouvernement aux forces déployées à l’étranger lors des missions internationales de maintien de la paix comprend un module sur les droits de l’homme, et aborde la lutte contre la traite des êtres humains.
Participation à la vie politique et publique
Dispositions de la Constitution
La Constitution kényane a servi à accroître le nombre de femmes nommées dans les organes de décision du pays. L’article 81 de la Constitution de 2010 prévoit le principe des deux tiers, qui dispose que les organes publics électifs ne devraient pas être composés à plus de deux tiers de membres du même sexe. En outre, il existe un certain nombre de règles régissant la composition de l’Assemblée nationale, dont l’article 97 (1) qui énonce qu’il devrait y avoir 47 femmes représentant chacun des 47 comtés, et 12 membres proposés par les partis politiques pour représenter des catégories spéciales, y compris les femmes, les jeunes et les personnes handicapées. L’article 98 de la Constitution précise également la composition du Sénat et veille à ce que 16 sièges soient réservés à des candidates proposées par les partis politiques. Au niveau des comtés, les assemblées de comté s’attachent à respecter le principe de deux tiers de membres du même sexe, conformément à l’Article 177 1) b) au moyen de sièges spéciaux et en veillant à ce que celles-ci ne soient pas composées à plus de deux tiers de membres du même sexe. Les mesures susmentionnées garantissent que les femmes puissent participer à la vie politique et publique.
Application de la Constitution et de la législation connexe
Le Kenya a promulgué des lois qui, conjuguées à la récente réforme du droit électoral par le biais de l’amendement à la loi de 2016 sur la loi électorale, visent à renforcer la participation des femmes au processus électoral. La loi de 2016 sur les délits électoraux s’emploie à améliorer la participation des femmes au processus électoral; la loi de 2016 sur les partis politiques affirme par ailleurs que pour qu’un parti puisse se prévaloir d’un enregistrement à part entière, le nombre de membres inscrits au parti ainsi que la composition de son organe directeur doivent refléter une représentation équilibrée des sexes. Un organe directeur ne doit pas être composé à plus de deux tiers de membres du même sexe. La loi porte création d’un fonds de financement des partis politiques, dont une partie doit être utilisée pour renforcer les mesures visant à assurer une participation et une représentation plus équitables entre les sexes. Les modifications apportées à la législation en vigueur par le biais de la loi de 2016 sur les partis politiques (amendement no 2) s’emploient à promouvoir la participation sans exclusive. Afin d’être en mesure de bénéficier d’un enregistrement à part entière, un parti doit pouvoir présenter des données ventilées sur ses membres; les chartes des partis doivent veiller à ce que tout organe de parti ne soit pas composé à plus de deux tiers de membres du même sexe. La loi de 2016 sur les partis politiques a été modifiée une nouvelle fois par l’amendement à la loi de 2016 sur la loi électorale, qui prévoit que le fonds de financement des partis politiques ventilera proportionnellement 15 % de ses crédits aux partis politiques remplissant les conditions requises du nombre de candidats proposés pour représenter des catégories spéciales, y compris les femmes. La promulgation de la loi de 2016 sur les délits électoraux contient des dispositions relatives à la tenue d’élections libres et régulières ainsi qu’à l’apport d’une instruction civique par une commission indépendante de délimitation des circonscriptions électorales.
Politique d’égalité
Un projet relatif à la politique d’égalité a été présenté au Cabinet pour adoption. Le Kenya a transposé dans sa législation les objectifs de développement durable, en adoptant les indicateurs relatifs à l’objectif de développement no 5 sur le suivi de la proportion de femmes occupant des postes de direction et la proportion de sièges détenus par des femmes au sein des structures publiques nationales ou locales. Ces considérations ont été prises en compte dans le troisième plan à moyen terme de « Kenya Vision 2030 », dont l’exécution doit se faire dans les cinq prochaines années. Le Gouvernement a également élaboré une stratégie nationale pour venir en aide aux femmes qui briguent des mandats électifs. La période de mise en œuvre de la stratégie s’étend au-delà de l’élection générale qui doit se tenir en août.
Violence politique
Diverses mesures ont été prises pour prévenir la violence politique en prévision des prochaines élections législatives :
a)Des marches pour la paix et des séances de prières sont prévues à l’échelle du pays par différents intervenants, y compris des acteurs étatiques;
b)Une cartographie des points chauds où la violence risque d’éclater a été dressée et un système d’alerte rapide a été mis en place;
c)Des réunions de concertation ont été organisées entre les femmes candidates, le Secrétaire de cabinet chargé de la sécurité, et la Commission indépendante chargée des élections et du découpage électoral, parmi d’autres organes; des assurances ont été données sur les préparatifs en cours visant à assurer la sécurité et à entraver toute violence politique;
d)Un suivi de l’activité des médias sociaux pour prévenir le discours haineux est prévu.
Nationalité
Loi sur la citoyenneté et Constitution
Les dispositions de la Constitution annulent et remplacent la loi sur la citoyenneté et peuvent donc être invoquées pour garantir que les femmes et les filles nées à l’étranger de parents qui sont des ressortissants kényans ne deviennent pas des apatrides.
Femmes réfugiées et apatrides
Le Gouvernement kényan a pris des mesures pour s’attaquer aux problèmes qu’engendre l’apatridie des peuples nubien et makonde. Dans le cas de ces tribus, le Gouvernement a délivré des cartes d’identité et des titres de propriété aux Makonde et les a classés comme étant la 43e tribu du Kenya. Les problèmes auxquels se heurtent les Nubiens ont été résolus au moyen de la délivrance de titres de propriété. Le Gouvernement a également désigné des comités dans les comtés où résident des Somaliens pour faciliter la délivrance de cartes d’identité à tous les citoyens d’origine somalienne. Des extraits d’actes de naissance sont délivrés à tous les enfants dès leur naissance afin d’éliminer tout problème d’enregistrement à l’avenir.
Éducation
Discrimination positive
Le Gouvernement a pris une mesure qui consiste à assurer un enseignement primaire gratuit ainsi qu’un enseignement secondaire subventionné en vue d’accroître le nombre de femmes et de filles qui accèdent à l’enseignement secondaire et universitaire. Cette mesure de discrimination positive a une composante sexospécifique qui stipule que les critères de sélection pour les candidates demandant l’admission aux programmes Mastères doivent être revus à la baisse (jusqu’à 2 points). Dans la même veine, il existe une disposition concernant l’infléchissement du seuil d’admissibilité en faveur des personnes appartenant à des groupes marginalisés ou des personnes handicapées, par exemple, un abaissement des critères d’entrée (jusqu’à 3 points) pour les personnes qui présentent des incapacités physiques. Ces politiques de discrimination positive s’emploient à obtenir la parité des sexes et à offrir un système d’éducation inclusive.
Protection des élèves
La loi de 2012 sur la fonction d’enseignant protège les apprenantes de la maltraitance grâce à la Teacher Service Commission (Commission du personnel enseignant du Kenya) qui peut refuser l’enregistrement des enseignants qui ont commis une infraction à l’encontre d’une élève ou de ceux qui ont été reconnus coupables d’avoir commis une infraction sexuelle à l’encontre d’une élève. De même, la loi de 2001 relative aux enfants (révisée en 2011) prévoit des garanties contre la maltraitance et l’exploitation sexuelle des enfants, comme indiqué à l’article 15. Dans le même temps, le projet de loi de 2014 sur la santé procréative a été élaboré pour assurer la protection des adolescentes contre la violence sexuelle, y compris la violence physique et les pratiques coutumières et normes culturelles qui empiètent sur le droit à la santé procréative des adolescentes.
Emploi
La prévalence du travail des enfants au Kenya est reconnue, comme l’atteste la prise en compte de la Convention relative aux droits de l’enfant et l’adoption du Protocole de Palerme.
Le Kenya est également signataire du programme pour un travail décent de l’OIT, l’objectif de celui-ci étant d’ouvrir la voie à l’équité du traitement des deux sexes dans les zones urbaines et rurales. En outre, il existe deux autres conventions de l’OIT relatives à l’emploi que le Kenya a ratifiées en 2001. Il s’agit en premier lieu de la Convention de 1958 concernant la discrimination (emploi et profession) (no 111) qui favorise l’équité du traitement des deux sexes et la non-discrimination dans l’emploi, et aborde le harcèlement sexuel. La deuxième Convention est la Convention sur l’égalité de traitement de 1951 (no 100) : cette convention promeut l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes.
Autonomisation économique des femmes
L’autonomisation économique des femmes a progressé grâce à la loi sur la passation des marchés publics et la cession des biens publics, qui stipule que 30 % des offres doivent être réservées aux femmes. Cette disposition garantit que les femmes puissent œuvrer à leur autonomisation économique. La Constitution kényane aide également à promouvoir l’autonomisation économique par le biais de l’Article 27 qui affirme que les hommes et les femmes doivent jouir des mêmes droits et bénéficier de l’égalité des chances dans tous les domaines, notamment les domaines économique et social.
Santé
Mortalité maternelle
Des mesures sont en cours pour remédier au taux de mortalité maternelle élevé au Kenya grâce à la gratuité des soins de maternité, qui a été instituée en 2013. Les disparités régionales dans l’accès aux services de santé sont prises en compte grâce à la mise à disposition d’ambulances au niveau des comtés. Le Gouvernement s’est par ailleurs engagé à embaucher 30 infirmières et 10 agents de santé communautaire par circonscription.
Un rapide état des lieux, qui se fonde sur le recensement de la population et du logement de 2009 et qui analyse le fardeau de la mortalité maternelle et sa répartition, a identifié 15 comtés comme ayant la charge de mortalité maternelle la plus élevée. Environ 50 % des décès maternels constatés au niveau national sont enregistrés dans ces comtés. Le « Joint Programme on Reproductive, Maternal, Newborn, Child and Adolescent Health » (RMNCAH) ou programme conjoint de la Santé de la reproduction, de la mère, du nouveau-né, de l’enfant et de l’adolescent (SRMNEA) est une initiative englobant six comtés, qui a été créée en juillet 2015. Elle est actuellement mise en œuvre dans les comtés de Mandera, Wajir, Marsabit, Isiolo, Lamu et Migori. Cette initiative met l’accent sur les efforts visant à faciliter l’accès aux services de SRMNEA et à en améliorer la qualité; à susciter la demande en services de SRMNEA chez les collectivités; à appuyer le renforcement des capacités institutionnelles au niveau des comtés et au plan national pour qu’elles soient en mesure d’assurer la prestation de services de SRMNEA et de renforcer les systèmes de suivi et évaluation au niveau national et infranational.
Réalisations
Parmi les réalisations menées à bien, il convient de citer du matériel livré à 507 établissements de santé supplémentaires qui assurent à l’heure actuelle la prestation de services de soins obstétriques d’urgence et de soins aux nouveau-nés. Quatorze centres offrant des services complets de soins obstétriques d’urgence et de soins aux nouveau-nés ont également été mis en place, élargissant l’accès des mères et des enfants à ces spécialités médicales. Des améliorations significatives ont été enregistrées au niveau des six comtés susmentionnés dans l’accès aux soins avant et après l’accouchement, ainsi que dans la présence d’accoucheuses qualifiées. La demande de services de SRMNEA a doublé en raison d’initiatives de financement novatrices du côté de la demande, du remaniement de la stratégie de santé des collectivités et de l’utilisation des médias tels que des messages radiophoniques conjuguée à une amélioration de l’offre de services de santé. Grâce à ce programme, des dirigeants religieux participent activement à la promotion de la santé maternelle et aux activités de plaidoyer contre les pratiques néfastes telles que les mutilations génitales féminines et les mariages d’enfants qui prévalent dans tous les comtés couverts par le programme. Le programme a également contribué à améliorer les structures de coordination et de partenariat au niveau des comtés. Par le biais d’un certain nombre d’interventions, le gouvernement national et les administrations locales s’efforcent l’un et l’autre de remédier au problème que représente le taux de mortalité maternelle élevé.
Décentralisation du secteur de la santé publique
La Constitution kényane de 2010 donne mandat aux gouvernements de comté en ce sens. En conséquence, on a constaté une augmentation du nombre d’établissements de soins au niveau des comtés, qui est passé de 8 846 en 2013 à 10 032 en juin 2016.
Gratuité des services de maternité
Cette initiative s’inspire d’une directive présidentielle qui a pour objectif de remédier aux insuffisances constatées dans l’accès aux services de santé et à réduire la mortalité maternelle et néonatale. Des progrès importants ont pu être réalisés jusqu’à présent; le recours aux soins obstétricaux et aux accouchements assistés par les mères a augmenté, passant de 52 % à 60 %. Les accouchements assistés par du personnel soignant qualifié sont passés de 62 % à 74 %. Le taux de mortalité maternelle (TMM) a marqué un fléchissement, passant de 488 à 362/100 000 naissances vivantes (KDHS, 2014). Le nombre d’accouchements qui se déroulent à domicile a diminué tandis que les accouchements médicalisés continuent d’augmenter. En outre, un fonds assorti de conditions a été créé pour la maternité gratuite, au titre duquel des fonds sont alloués aux gouvernements de comté s’ils respectent le principe de la gratuité des services de maternité.
Modernisation des établissements de soins situés dans les taudis urbains
Ce projet a été essentiellement mis en place pour remédier aux problèmes économiques et sociaux auxquels doivent faire face les habitants de taudis pour accéder aux services de santé tels que l’avortement sans risques. À la fin de l’exercice budgétaire 2015/16, 11 installations mobiles (dispensaires) avaient été créées, dont 8 sont opérationnelles dans le taudis de Kibera, situé dans la municipalité de Nairobi. Le Ministère de la santé prévoit de mettre en place 100 autres dispensaires dans 12 grandes villes du pays; de même, une cartographie des lieux a été menée à bien et 80 sites pouvant accueillir des activités ont été identifiés jusqu’à présent.
Programme de subvention au titre de l’assurance maladie
Des initiatives, lancées tant par les autorités locales que par l’État, visent à contribuer à une meilleure qualité de la vie, à l’atténuation de la pauvreté et au développement humain par le biais de la satisfaction des besoins en matière de santé de la population; à supprimer les obstacles financiers qui compromettent l’accès aux soins de santé et à réduire l’incidence des dépenses de santé catastrophiques, ce qui peut être accompli par la consolidation et l’expansion des mécanismes de subvention destinés à contrer les déterminants sociaux de la santé, de manière à parvenir à une couverture sanitaire universelle. Ce projet cible environ 21 530 ménages, dont 17 612 bénéficient déjà de services de santé dans un hôpital de leur choix. Les gouvernements de comté ont également pris des initiatives concernant la couverture sanitaire universelle pour améliorer l’accessibilité et le coût des services médicaux afin de ne pas faire de laissés-pour-compte.
Projet de gestion et de maintenance des équipement médicaux
L’objectif de cette initiative est d’améliorer l’accès des différentes composantes de la population kényane au programme intitulé Kenya Essential Package for Health – KEPH (programme intégré de services de santé de base au Kenya). Plus précisément, ce projet s’emploie à aider une centaine de centres hospitaliers locaux de niveau 4 à se doter d’infrastructures et de matériel qui sont conformes aux normes et règles généralement acceptées. Le matériel est destiné aux unités de soins intensifs, aux blocs opératoires, et à la radiographie/imagerie. En outre, ces installations seront parfaitement en mesure de fournir une vaste gamme de services de santé complets, conformément aux normes et règles exigibles, facilitant ainsi le diagnostic rapide des maladies non transmissibles (également appelées maladies chroniques).
Campagne « Beyond Zero »
L’initiative « Beyond Zero » a bénéficié du soutien des gouvernements de comté. La campagne vise à accélérer le développement économique et social du Kenya grâce à la prise en compte d’un volet santé. Le but recherché est de mettre en place un Kenya où les décès évitables de mères et d’enfants n’ont plus cours et où les inégalités sociales ne prédéterminent pas la prestation de services de santé essentiels. Parmi les réalisations de cette campagne, il convient de citer la mise en place de dispensaires mobiles qui se rattachent à tous les hôpitaux de référence implantés dans les comtés, et ce sur l’ensemble du territoire. En facilitant l’accès des citoyens kényans à la prestation de soins de santé, les dispensaires mobiles sont en mesure de traiter les mères et les enfants qui auraient autrement été obligés de parcourir des kilomètres à pied pour se faire soigner.
National Hospital Insurance Fund (couverture d’assurance santé hospitalière)
Le NHIF a élargi sa gamme de services, y compris en enjoignant aux hôpitaux conventionnés classés en catégories A, B et C à fournir une couverture médicale aux patients, ceux-ci bénéficiant d’une prise en charge ambulatoire et hospitalière complète qui couvre les soins de maternité ainsi que les affections médicales, notamment les interventions chirurgicales. Le Ministère de la santé va coopérer au niveau du pays et des comtés avec le Procureur de la République et d’autres parties prenantes afin d’entreprendre la révision qui s’impose des articles 158, 228, 240 et 260 du Code pénal.
Femmes des zones rurales
Législation
L’article 60 de la Constitution kényane énonce la politique foncière nationale. Cet article affirme qu’il ne devrait y avoir aucune discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne l’accession à la terre et à la propriété. La loi sur les successions a également été utilisée pour garantir que les filles et les femmes ne soient pas désavantagées en matière d’héritage et de succession. Par exemple, dans l’affaire Lerionka Ole Ntutu, la cour a invoqué la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et est allée à l’encontre des dispositions de la loi sur les successions pour faire en sorte que les filles du défunt aient la possibilité d’hériter de terres.
Cette affaire reflète la précédente décision de la cour d’appel dans l’affaire Rono c. Rono qui a invalidé le droit coutumier masaï. La loi sur les successions (chap. 160) a été utilisée pour parvenir à cette décision, en affirmant que la loi de 2001 relative aux enfants (révisée en 2011) inclue les garçons et les filles et, qu’en outre, il n’existe aucune discrimination entre les fils et les filles ni aucune distinction entre les filles mariées et les filles non mariées. La Commission de la réforme du droit kényan est également en train de modifier la loi sur les successions afin de l’aligner sur la Constitution en supprimant les dispositions discriminatoires.
Femmes déplacées et marginalisées
Discrimination positive
Parmi les mesures que l’État a prises pour répondre aux besoins de groupes spécifiques de femmes défavorisées, il faut citer la mise en place de l’Affirmative Action Social Development Fund (fonds de discrimination positive en faveur du développement social) qui vient compléter l’actuel Constituency Development Fund (CDF). L’objectif du fonds est de favoriser l’autonomisation socioéconomique des femmes, des jeunes, des personnes handicapées, des enfants et des personnes âgées vulnérables. Depuis l’année financière 2014/15, le Gouvernement a versé 6,29 milliards de shillings kényans au fonds (soit 610 679 611 dollars des États-Unis). Jusqu’à 20 % du fonds est consacré à la mise à disposition d’un mécanisme de financement à l’intention des femmes, grâce à un fonds autorenouvelable; à l’appui aux initiatives en faveur de la valeur ajoutée (par exemple, les industries légères et la construction de marchés et d’installations de stockage); à la mise en œuvre d’initiatives d’éducation civique et de sensibilisation destinées aux communautés et portant sur les programmes et politiques de l’État tels que l’obligation faite aux gouvernements de comté de réserver 30 % des achats aux femmes.
Établissement d’un groupe de travail
L’État a mis en place un groupe de travail chargé d’appliquer la décision de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Le groupe de travail devrait donner des orientations sur les retombées politiques et économiques ainsi que sur les incidences en matière de sécurité de cette décision; examiner les effets potentiels que pourrait avoir l’application effective de la décision sur l’environnement du lac Bogoria et de ses environs; étudier la faisabilité de la restitution du lac Bogoria et de ses environs à la communauté des Endorois, compte tenu du fait qu’il est classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO et évaluer le montant de l’indemnisation à verser à la communauté des Endorois pour les pertes subies et pour le règlement des redevances liées aux activités économiques existantes menées sur le lac et dans la région avoisinante.
Mariage et rapports familiaux
Polygamie
Il s’agit d’une pratique fermement ancrée dans le droit coutumier et dans les mariages contractés dans le cadre du droit islamique, ce qui a conduit à son enchâssement dans la Constitution et dans la loi de 2014 sur le mariage. Il y a lieu d’espérer que cette pratique disparaîtra avec le temps. La plupart des jeunes considèrent qu’un mariage polygame représente un fardeau économique, ce qui devrait conduire à la disparition progressive de ce phénomène. Il n’en reste pas moins que le Gouvernement kényan, par le biais de la loi de 2014 sur le mariage, a pris des mesures pour garantir la protection des femmes se trouvant en situation de polygamie (mariages contractés dans le cadre du droit coutumier ou du droit islamique), en les assortissant des exigences que sont l’enregistrement des mariages et l’égalité de traitement devant la loi. Ainsi, les femmes ayant contracté une union polygame bénéficient d’une sécurité en matière de régime matrimonial, puisque la loi reconnaît leur mariage et qu’elles peuvent en conséquence jouir de droits et de responsabilités comparables à ceux de leurs homologues ayant contracté un mariage monogame.
Législation
La loi de 2013 sur les biens matrimoniaux garantit également la protection des propriétés des épouses ayant contracté des unions polygames. L’article 8 dispose qu’en cas de divorce ou de toute autre dissolution d’un mariage polygame, les biens matrimoniaux acquis par l’homme et la première épouse, avant que celui-ci ne se marie avec une autre femme, seront répartis également entre l’homme et la première épouse uniquement. À l’inverse, les biens matrimoniaux acquis par l’homme après que celui-ci se soit marié avec une autre femme, seront réputés appartenir à l’homme et aux épouses en proportion des contributions de chacune des parties. La loi dispose également qu’une épouse peut détenir des biens matrimoniaux avec son mari distincts de ceux des autres épouses. La loi implique que toute épouse peut posséder des biens matrimoniaux à parts égales avec son mari sans participation aucune de l’autre (ou des autres) épouse(s). Les conjoints (le mari et l’une de ses épouses dans le cas d’un mariage polygame) ont une participation dans les biens matrimoniaux qui peuvent être protégés par une mise en garde, un avis ou toutes autres dispositions en vigueur relatives à l’enregistrement des titres de propriété. Un conjoint ne peut, pendant la durée du mariage, être expulsé du domicile conjugal par l’autre conjoint ou à la demande de celui-ci, à moins que cette mesure ne résulte d’une décision judiciaire. Un conjoint ne peut être expulsé du domicile conjugal par quiconque, sauf dans l’exécution d’une décision judiciaire, par un syndic de faillite, un créancier hypothécaire ou un créancier privilégié exerçant son pouvoir de vendre ou toute autre voie de recours, tel qu’énoncé à l’article 2 2) de la loi.
En ce qui concerne la loi de 2013 relative aux biens matrimoniaux, il y a obligation pour les femmes de faire la preuve de leur contribution à l’acquisition des biens pendant la durée du mariage, y compris dans l’acquisition du foyer conjugal. Une modification importante intervient toutefois, puisque la loi tient compte à la fois des contributions monétaires et non monétaires. Le travail domestique, la garde des enfants, la compagnie, les travaux agricoles et la gestion des entreprises familiales sont prises en compte par cette loi en tant que contributions non monétaires. Cette disposition améliore la situation des femmes par rapport à celle qui prévalait auparavant. En outre, l’obligation pour les femmes de faire la preuve de leur contribution à l’acquisition des biens est contestée devant les tribunaux et, avec un peu de chance, ceux-ci se prononceront en faveur d’un partage égalitaire rigoureux des biens matrimoniaux entre maris et femmes.
La nouvelle loi sur les biens matrimoniaux a introduit la préséance de la jurisprudence sur cette question vitale. La magistrate Mary Gitumbi a statué en faveur d’une femme dans une affaire où le mari avait pris en charge à 100 % la construction du foyer familial. L’éminente magistrate a réaffirmé que les dispositions juridiques en vigueur s’appliquaient sur la base du principe d’égalité. En outre, dans U. M. c. I. M. (procédure civile 39 de 2012), Tuiyott J. a estimé que « les dispositions de cette loi atténuent la sévérité manifestée dans la décision rendue dans l’affaire Priscilla Njeri Echaria ». La loi reconnaît désormais la contribution non monétaire d’un conjoint. Elle ne va pas toutefois aussi loin que ce que la Cour d’appel avait indiqué concernant l’affaire Agnes Nanjala William où on a fait valoir que le paragraphe 3 de l’article 45 était peut-être « une déclaration constitutionnelle du principe selon lequel les biens matrimoniaux font l’objet d’un partage égalitaire au cas où le mariage prend fin ». « Pour autant que je puisse en juger, ce sont les dispositions des Sections 2, 6 et 7 de la loi de 2013 sur les biens matrimoniaux qui contribuent à préciser le droit prévu au paragraphe 3 de l’article 45 de la Constitution. En reconnaissant que les contributions monétaires et non monétaires doivent être l’une et l’autre prises en compte, il y a conformité avec les dispositions énoncées au paragraphe 3 de l’article 45 de la Constitution selon lequel les parties à un mariage ont les mêmes droits au moment du mariage, pendant le mariage et lors de sa dissolution. J’estime qu’à la dissolution du mariage chaque partenaire devrait se retirer avec ce qu’il (ou elle) mérite ». Cette décision appporte des précisions sur les questions relatives à l’égalité dans le mariage et à la répartition des biens matrimoniaux.
Protocole facultatif et modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention
Au Kenya, la ratification des Protocoles facultatifs et des Conventions est régie par la loi de 2013 relative à la conclusion et à la ratification des traités. Le Kenya a pris des mesures pour donner effet aux dispositions de la loi en procédant récemment à la nomination d’un Greffier des traités comme le prévoit la législation. Le Greffier devrait faciliter la ratification des protocoles facultatifs.