* Adopté par la Commission à sa cinquante-septième session (10-28 février 2014).

Observations finales concernant les troisième et quatrième rapports périodiques du Kazakhstan, soumis en un seul document *

Le Comité a examiné le rapport unique du Kazakhstan valant troisième et quatrième rapports périodiques (CEDAW/C/KAZ/3-4) à ses 1193e et 1194e séances, le 14 février 2014 (voir CEDAW/C/SR.1193 et 1194). La liste des questions et points soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/KAZ/Q/3-4) et les réponses du Gouvernement du Kazakhstan figurent dans le document CEDAW/C/KAZ/Q/3-4/ADD.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite que l’État partie ait présenté ses troisième et quatrième rapports périodiques en un rapport unique. Il se félicite également des réponses écrites que l’État partie a apportées à la liste de questions et points soulevés par son groupe de travail de présession. Il salue l’exposé oral fait par la délégation et les précisions que celle-ci a apportées en réponse aux questions qu’il a posées pendant le dialogue.

Le Comité félicite la délégation de l’État partie, qui était conduite par la Présidente de la Commission nationale des femmes et de la politique familiale et démographique. La délégation comprenait également des représentants du Majilis (chambre basse du Parlement), de la Commission nationale des femmes et de la politique familiale et démographique, du Ministère de la justice, du Ministère de l’éducation et de la science, du Ministère de l’économie et de la planification budgétaire, du Ministère du développement régional, du Ministère de la culture et de l’information, du Ministère de l’intérieur, du Ministère du travail et de la protection sociale, du Bureau du Procureur général, du Ministère de la santé et du Ministère des affaires étrangères.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis par l’État partie depuis l’examen, en 2007, de son deuxième rapport périodique (CEDAW/C/KAZ/2), grâce à l’adoption des mesures législatives suivantes :

a)La loi relative aux garanties de l’État concernant l’égalité des droits et des chances des hommes et des femmes, en 2009;

b)La loi la loi relative à la violence dans la famille, en 2009;

c)La loi sur les pensions, en 2013, qui a fixé le même âge de départ à la retraite pour les hommes et les femmes.

Le Comité salue les efforts entrepris par l’État partie pour améliorer le cadre de ses politiques visant à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité des sexes, comme en témoigne l’adoption des mesures suivantes :

a)La Stratégie pour l’égalité des sexes (2006-2016);

b)Le Programme Salamatty Kazakhstan (2011-2015), portant sur la prestation de soins de santé aux femmes;

c)La mise en place du fonds de développement de l’esprit d’entreprise « Damu », destiné à financer des projets visant à encourager l’esprit d’entreprise chez les femmes.

Le Comité se félicite que l’État partie ait adhéré aux instruments internationaux suivants :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2009;

b)Le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en 2009;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2008;

d)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2008;

e)Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, en 2008.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Parlement

Le Comité souligne le rôle primordial que doit jouer le pouvoir législatif pour assurer la mise en œuvre intégrale de la Convention (voir la déclaration faite par le Comité sur sa relation avec les parlementaires, adoptée à sa quarante-cinquième session en 2010). Il invite le Parlement, conformément à son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de la mise en œuvre des présentes conclusions finales d’ici à la période couverte par le prochain rapport exigé au titre de la Convention.

Diffusion de la Convention et des recommandations générales du Comité

Le Comité note qu’en vertu du paragraphe 3 de l’article 4 de la Constitution de l’État partie, la Convention et les autres instruments internationaux ratifiés par l’État partie sont directement applicables et priment la législation interne, mais il est préoccupé par le manque de visibilité et d’application directe de la Convention et par le fait que les recommandations générales du Comité sont mal connues, malgré les efforts fournis par la Cour suprême pour faire mieux comprendre les dispositions de la Convention. Le Comité est particulièrement préoccupé par l’absence d’affaires judiciaires relatives à des actes de discrimination fondée sur le genre ou le sexe et par les informations indiquant que les dispositions de la Convention n’ont été directement invoquées ou appliquées par les tribunaux nationaux que dans peu d’affaires.

Le Comité invite l’État partie :

a) À intensifier les programmes en vigueur visant à assurer la diffusion adéquate de la Convention et des recommandations générales du Comité auprès des parties prenantes concernées, notamment les agents de l’État, les parlementaires, les magistrats, les avocats, les agents des forces de l’ordre et les responsables locaux afin de faire mieux connaître les droits des femmes dans l’État partie;

b) À prendre toutes les mesures nécessaires pour mieux informer les femmes de leurs droits et des moyens de les faire respecter, notamment en facilitant l’accès au recueil des instruments des Nations Unies relatifs aux questions d’égalité entre hommes et femmes qui a été publié sur le site Web de la Cour suprême de l’État partie;

c) À dispenser aux membres de la magistrature et du barreau une formation sur la jurisprudence établie par le Comité au titre du Protocole facultatif et à les encourager à appliquer et à invoquer la Convention dans les procédures judiciaires, si nécessaire.

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité note que la loi sur les garanties de l’égalité des droits et des chances pour les hommes et les femmes adoptée en 2009 prévoit l’interdiction de la discrimination à l’égard des femmes fondée sur le genre ou le sexe. Toutefois, il relève avec préoccupation que la définition de la discrimination fondée sur le sexe qui figure dans la loi n’englobe pas à la fois la discrimination directe et la discrimination indirecte, comme le prescrit l’article premier de la Convention.

Le Comité réitère ses observations finales précédentes ( CEDAW/C/KAZ/CO/2 , par. 12) et invite l’État partie à adopter, dans sa Constitution ou dans d’autres textes législatifs nationaux pertinents, une définition juridique complète de la discrimination à l’égard des femmes qui soit conforme à l’article premier de la Convention et couvre tant la discrimination directe que la discrimination indirecte dans les sphères publiques et privées, et à interdire et réprimer cette discrimination, conformément à la Convention.

Accès à la justice

Le Comité constate avec préoccupation que les femmes qui sont victimes de violence ou de discrimination fondée sur le genre ou le sexe saisissent rarement la justice pour que les responsables répondent de leurs actes et que celles qui engagent une procédure judiciaire se heurtent souvent à de multiples obstacles, comme la stigmatisation sociale et les stéréotypes négatifs persistants. Le Comité est de plus préoccupé par l’absence d’aide juridictionnelle dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De mener des campagnes de sensibilisation visant à mettre fin à la stigmatisation et aux stéréotypes négatifs concernant les femmes qui cherchent à obtenir justice;

b) De dispenser systématiquement aux juges, aux procureurs et aux avocats une formation sur l’application de la loi interdisant la discrimination et la violence à l’égard des femmes;

c) De veiller à ce que les femmes aient un accès effectif à la justice, notamment en fournissant des services d’aide juridictionnelle, en particulier aux femmes qui appartiennent à des groupes défavorisés, et d’appuyer, s’il y a lieu, les organisations non gouvernementales qui facilitent l’accès des femmes à la justice, dans l’ensemble du pays.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité se félicite que l’État partie se soit fixé pour objectif de porter à 30 % la proportion de femmes dans les postes de responsabilité des organes pourvus par voie d’élection ou de nomination et que celui-ci ait fait quelques progrès dans ce domaine. Il constate toutefois avec préoccupation que les mesures temporaires spéciales ne sont pas utilisées dans d’autres domaines visés par la Convention pour accélérer la réalisation de fait de l’égalité entre femmes et hommes.

Le Comité invite l’État partie à envisager de prendre des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25 du Comité sur les mesures temporaires spéciales, en tant que stratégie nécessaire pour accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention où les femmes sont sous-représentées.

Stéréotypes et pratiques néfastes

Le Comité rappelle ses observations finales précédentes (CEDAW/C/KAZ/CO/2, par. 13) et demeure préoccupé par la persistance de pratiques culturelles et de traditions néfastes, ainsi que d’attitudes patriarcales et de stéréotypes profondément enracinés concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, en particulier ceux qui réduisent les femmes au rôle de dispensatrice de soins. Le Comité note que ces stéréotypes contribuent à la progression de la pratique néfaste du mariage des enfants et de la polygamie chez certains groupes ethniques et, par conséquent, au maintien du statut défavorable et inégal de la femme dans la société.

Le Comité réitère ses observations finales précédentes ( CEDAW/C/KAZ/CO/2 , par. 14) et exhorte l’État partie :

a) À veiller à ce que la Commission nationale des femmes et de la politique familiale et démographique ainsi que les autres parties prenantes redoublent d’efforts pour informer et sensibiliser la population aux stéréotypes fondés sur le sexe qui persistent à tous les niveaux de la société, dans le but de les éliminer;

b) À étendre la portée des programmes d’éducation du public concernant les effets négatifs de ces stéréotypes sur la jouissance de leurs droits par les femmes, en particulier dans les zones rurales et pour des communautés ciblées;

c) À prendre des mesures juridiques efficaces pour lutter contre les mariages d’enfants et la polygamie;

d) À suivre et examiner périodiquement les mesures prises pour éliminer les stéréotypes fondés sur le sexe afin d’en évaluer les effets.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité salue l’adoption en 2009 de la loi relative à la violence dans la famille, mais il est préoccupé par l’absence de loi pénalisant toutes les formes de violence à l’égard des femmes, y compris la traque furtive. Il constate avec préoccupation que la définition du crime de viol donnée à l’article 120 du Code pénal et dans la résolution de la Cour suprême est limitée à la pénétration vaginale, et que la violence ou la menace de la violence sont des éléments nécessaires de ce crime. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que les centres d’accueil d’urgence et les foyers pour les femmes victimes de violence ne bénéficient pas d’un financement suffisant et régulier. Le Comité constate aussi avec préoccupation que le Code pénal prévoit une distinction entre les actes de violence commis contre des femmes, qui peuvent donner lieu à un règlement lorsque l’auteur présumé se réconcilie avec la victime et entreprend de «faire le bien pour réparer le préjudice subi» et les autres infractions, qui entraînent des poursuites. Le Comité est aussi préoccupé par le fait que des poursuites ne peuvent être engagées contre les auteurs d’actes de violence que si la victime porte plainte. Il est particulièrement préoccupé par les informations indiquant que nombre de cas de violences dans la famille ne sont pas déclarés en raison d’une culture du silence qui conduit à l’impunité. Il note que l’État partie envisage de réviser la loi de 2009 sur la violence dans la famille et qu’il prévoit de ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul).

Rappelant sa recommandation générale n o  19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes et la recommandation qu’il a déjà faite ( CEDAW/C/KAZ/CO/2 , par. 16), le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’utiliser la Convention, la recommandation générale n o  19 du Comité et la jurisprudence du Comité pour réviser son cadre législatif afin de veiller à ce que la loi de 2009 sur la violence dans la famille et le Code pénal couvrent intégralement toutes les formes de violence à l’égard des femmes, y compris la traque furtive;

b) De mettre en place un système de collecte de l’ensemble des données sur toutes les formes de violence à l’égard des femmes et d’encourager le signalement de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, y compris la violence dans la famille et la violence sexuelle;

c) De veiller à ce que toutes les plaintes donnent lieu à une enquête efficace et à ce que les auteurs d’actes de violence à l’égard des femmes soient poursuivis d’office et sanctionnés par des peines appropriées, et d’écarter toute forme de médiation et de réconciliation en cas de violence à l’égard des femmes;

d) De réviser sa législation de sorte que la définition du crime de viol soit conforme à la Convention et à la jurisprudence établie par le Comité au titre du Protocole facultatif;

e) De veiller à ce que le projet de loi visant à modifier le financement des centres d’accueil d’urgence et des foyers prévoie un financement suffisant et régulier de ces structures par l’État partie;

f) D’envisager de ratifier la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité accueille avec satisfaction l’entrée en vigueur en juillet 2013 de la loi portant modification de la loi sur la traite et les modifications apportées en 2007 à la loi sur le tourisme pour interdire d’utiliser l’industrie touristique pour organiser le départ illégal de citoyens kazakhs vers des pays étrangers, mais il reste préoccupé par le fait que l’État partie est un pays d’origine, de transit et de destination pour les femmes et les filles victimes de la traite, principalement à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé. Le Comité est aussi préoccupé par le faible taux de signalement des infractions en rapport avec la traite. Il constate en outre avec préoccupation que, bien que les femmes qui se livrent à la prostitution aient accès aux services de soins de santé, il n’existe aucune donnée sur les programmes visant à lutter contre la prostitution, notamment les programmes de soutien aux femmes qui veulent sortir de la prostitution.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour lutter contre les causes profondes de la traite des femmes et des filles et pour assurer la réadaptation et la réinsertion sociale des victimes, notamment en leur donnant accès à des foyers, à une assistance juridique, médicale et psychosociale et à d’autres sources de revenus;

b) De renforcer la sensibilisation visant à encourager le signalement des infractions se rapportant à la traite et le repérage précoce des femmes et des filles victimes de traite;

c) De redoubler d’efforts pour développer la coopération bilatérale, régionale et internationale afin de prévenir la traite, y compris par l’échange d’informations et l’harmonisation des procédures judiciaires visant à poursuivre les trafiquants, en particulier avec la Communauté d’États indépendants et les autres pays de la région;

d) De fournir dans son prochain rapport périodique des données sur les programmes existants qui visent à lutter contre la prostitution, notamment les programmes de soutien aux femmes qui veulent sortir de la prostitution.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité salue les progrès faits par l’État partie pour ce qui est de promouvoir la participation des femmes à la vie politique et publique et note que l’État partie a créé un fichier de candidates qui permet de nommer des femmes très qualifiées à des postes de responsabilité. Il note également que la Stratégie pour l’égalité des sexes (2006‑2016) fixe comme objectif de porter à 30 % la proportion de femmes dans les organes pourvus par voie d’élection et de nomination. Toutefois, le Comité constate avec préoccupation que les femmes restent sous‑représentées dans les organes législatifs (parlement et autorités locales), dans les instances dirigeantes des partis politiques, dans la fonction publique et dans le corps diplomatique, en particulier au niveau de la prise de décisions. Le Comité est en outre préoccupé par le fait qu’aucun quota, volontaire ou obligatoire, n’est prévu par la législation relative aux élections.

Le Comité réitère ses observations finales précédentes ( CEDAW/C/KAZ/CO/2 , par. 22) et recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes pour garantir la mise en œuvre effective de la Stratégie pour l’égalité des sexes (2006-2016) aux niveaux national et local, et d’adopter des mesures temporaires spéciales plus prescriptives, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et aux recommandations générales du Comité n o  25 sur les mesures temporaires spéciales et n o  23 sur la vie politique et publique, afin que la participation pleine et égale des femmes au sein des organes pourvus par voie d’élection et de nomination, y compris le corps diplomatique, devienne plus vite une réalité. Le Comité recommande aussi à l’État partie d’envisager de revoir la législation en vigueur sur les élections pour faire en sorte que des mesures temporaires spéciales ou des quotas soient fixés dans le cadre législatif. Il recommande en outre que des mesures concrètes soient prises à l’égard des partis politiques pour que les femmes soient davantage présentes dans les instances dirigeantes des partis politiques.

Nationalité

Le Comité prend note des progrès réalisés par l’État partie pour ce qui est d’enregistrer les personnes de nationalité indéterminée et d’assurer leur accès aux services essentiels, mais il constate avec préoccupation qu’il existe encore des apatrides, y compris des femmes et des filles, qui rencontrent des difficultés pour accéder à l’éducation, aux soins de santé et à d’autres services parce qu’elles n’ont pas de documents d’identité ni de preuve de résidence dans l’État partie. Le Comité est aussi préoccupé par le fait qu’un grand nombre de naissances ne sont pas enregistrées dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter des programmes visant à accélérer la régularisation des femmes et des filles apatrides et d’assurer à celles-ci un accès adéquat à l’éducation, aux soins de santé et aux autres services essentiels;

b) De renforcer ses campagnes de sensibilisation du public et de prendre des mesures concrètes pour que les femmes pauvres et vivant en milieu rural soient informées des prescriptions concernant l’enregistrement des naissances et puissent accéder facilement aux services d’enregistrement des naissances mis en place par les pouvoirs publics et obtenir des certificats de naissance.

Éducation

Le Comité prend note du niveau d’instruction élevé des femmes et des filles dans l’État partie, mais il est préoccupé par les choix stéréotypés des sujets et des cours dans l’enseignement, qui se reflètent dans l’emploi, où les femmes sont concentrées dans les secteurs traditionnellement très féminisés, comme la santé et les services. Le Comité s’inquiète en outre du nombre croissant de filles qui abandonnent l’école, ce qui est en partie dû aux mariages d’enfants.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’encourager les filles et les jeunes femmes à choisir des domaines d’étude et des professions qui ne leur sont pas traditionnellement ouverts, y compris par l’adoption de mesures temporaires spéciales, et de mettre en œuvre des programmes d’orientation scolaire à l’intention des filles et des garçons portant sur l’ensemble des choix éducatifs;

b) De réduire le taux d’abandon scolaire chez les filles en luttant contre les mariages d’enfants par l’élaboration d’une stratégie globale qui devrait notamment être axée sur la sensibilisation des parents, des responsables locaux et du grand public au caractère néfaste de la pratique du mariage d’enfants;

c) De prévoir dans les programmes scolaires des cours d’éducation à la santé sexuelle et procréatrice adaptés à chaque âge, y compris une éducation sexuelle complète pour les adolescents, filles et garçons, qui traite des comportements sexuels responsables.

Emploi

Le Comité prend note des progrès réalisés par l’État partie, comme en témoignent l’augmentation des salaires dans les secteurs où les femmes sont très nombreuses, et l’adoption en juin 2013 de la loi sur les pensions, qui fixe le même âge de départ à la retraite pour les femmes et les hommes. Toutefois, il demeure préoccupé par la persistance de l’écart salarial entre hommes et femmes, par le taux élevé de chômage chez les femmes, ainsi que par la longue liste des activités professionnelles interdites aux femmes, 299 au total. Le Comité demeure aussi préoccupé par la persistance de la ségrégation en matière d’emploi entre les femmes et les hommes sur le marché du travail et par le fait que les femmes sont principalement employées dans les secteurs où les salaires sont peu élevés. Il est en outre préoccupé par l’absence, dans la législation interne, de dispositions interdisant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail

Le Comité réitère ses observations finales précédentes ( CEDAW/C/KAZ/CO/2 , par. 24) et invite l’État partie :

a) À renforcer les mesures prises au titre de la Feuille de route pour l’emploi à l’horizon 2020 afin de réduire le chômage chez les femmes, notamment en offrant des programmes de formation professionnelle et technique;

b) À redoubler d’efforts pour éliminer les inégalités structurelles et la ségrégation horizontale et verticale dans l’emploi et à adopter des mesures pour réduire, puis combler, l’écart salarial entre les femmes et les hommes, notamment en revoyant constamment les salaires dans les secteurs où les femmes sont très nombreuses;

c) À revoir la liste des domaines de travail interdits aux femmes et à envisager d’améliorer les conditions de travail dans les secteurs considérés comme dangereux pour la santé des femmes, de manière à faciliter l’accès des femmes à ces activités professionnelles;

d) À adopter d’urgence une législation complète visant à lutter contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, conformément à la recommandation générale n o  19 du Comité sur la violence à l’égard des femmes.

Santé

Le Comité salue les progrès réalisés par l’État partie dans le domaine de la lutte contre la transmission du VIH/sida grâce à la mise en place de programmes prénatals visant à prévenir la transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant et du programme intitulé Salamatty Kazakhstanpour 2011-2015, qui est axé sur la fourniture de soins de santé aux femmes. Toutefois, le Comité constate avec préoccupation que, si le nombre de personnes vivant avec le VIH/sida est faible, le taux d’augmentation des nouveaux cas d’infection à VIH dépasse de beaucoup le taux d’accroissement de la population, et les femmes continuent de courir un risque élevé d’être infectées par le VIH. Le Comité est aussi préoccupé par l’absence de données sur les femmes toxicomanes, dans la société et en prison, qui ont besoin d’un traitement contre la toxicomanie et qui vivent avec le VIH/sida. Il est en outre préoccupé par le fait que l’accès gratuit aux contraceptifs ne figure pas sur la liste des services médicaux assurés par l’État.

Le Comité invite l’État partie :

a) À renforcer la mise en œuvre des stratégies visant à lutter contre le VIH/sida, en particulier les stratégies préventives, et à continuer de fournir gratuitement des traitements antirétroviraux à toutes les femmes et à tous les hommes qui vivent avec le VIH/sida, y compris les femmes enceintes, afin de prévenir la transmission de la mère à l’enfant;

b) À réunir des données sur les femmes toxicomanes en prison et dans la société en général, pour déterminer l’étendue du problème, de manière à mettre en place des programmes appropriés de traitement contre la toxicomanie et à recenser les personnes vivant avec le VIH/sida qui ont besoin de soins médicaux;

c) À envisager d’ajouter, à la liste des services médicaux assurés gratuitement par l’État, l’accès gratuit des femmes, notamment les femmes qui vivent dans les zones rurales et les femmes handicapées, et des adolescents à une large gamme de moyens de contraception.

Groupes de femmes défavorisées

Le Comité note que l’État partie prévoit d’adopter un plan d’action pour les personnes âgées et qu’il s’efforce d’améliorer la vie des femmes handicapées et des femmes qui vivent dans les zones rurales, mais il demeure préoccupé par le fait que les femmes âgées, les femmes handicapées et les femmes des zones rurales continuent de rencontrer des difficultés pour accéder aux soins de santé, à la formation et à d’autres services essentiels.

Le Comité prie l’État partie :

a) D’accorder une attention particulière aux besoins des femmes âgées, des femmes handicapées et des femmes vivant dans les zones rurales pour veiller à ce qu’elle jouissent de l’égalité d’accès aux soins de santé, à la formation, à l’emploi et d’autres droits;

b) D’élargir l’accès des femmes au microfinancement et au microcrédit à faible taux d’intérêt pour qu’elles puissent se lancer dans des activités génératrices de revenus et créer leur propre entreprise.

Mariage et relations familiales

Le Comité s’inquiète de l’existence de mariages traditionnels et religieux qui ne sont fondés que sur des cérémonies religieuses et des coutumes traditionnelles, y compris les mariages polygames de fait qui, lorsqu’ils sont dissous, privent les femmes et les enfants de protection juridique et économique.

Le Comité recommande à l’État partie de faire appliquer sa législation de manière effective, conformément à la recommandation générale n o  29 du Comité sur les conséquences économiques du mariage, et des liens familiaux et de leur dissolution, et de protéger le droit des femmes après la dissolution de ces mariages religieux ou coutumiers, quel que soit leur statut du point de vue de l’enregistrement.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité encourage l’État partie à accepter dès que possible l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant le temps de réunion du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l’État partie de tenir compte de la Déclaration et Programme d’action de Beijing dans ses efforts de mise en œuvre des dispositions de la Convention.

Objectifs du Millénaire pour le développement et cadre de développement pour l’après-2015

Le Comité préconise de prendre en compte la problématique hommes-femmes, conformément aux dispositions de la Convention, d’intégrer systématiquement une démarche soucieuse d’équité entre les sexes dans les efforts visant à réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement et dans le cadre de développement pour l’après-2015.

Diffusion

Le Comité rappelle l’obligation faite à l’État partie d’appliquer systématiquement et de façon permanente les dispositions de la Convention. Il engage l’État partie à accorder une attention prioritaire à la mise en œuvre des présentes observations finales et des recommandations d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Le Comité demande par conséquent que les présentes observations finales soient diffusées en temps voulu dans les langues officielles de l’État partie, à l’intention des institutions publiques compétentes à tous les niveaux (local, provincial et national), en particulier au Gouvernement, aux ministères, au parlement et à l’appareil judiciaire, en vue de permettre leur pleine application. Il encourage l’État partie à collaborer avec toutes les parties concernées, notamment les associations d’employeurs, les syndicats, les organisations de défense des droits de l’homme, les organisations de femmes, les universités, les institutions de recherche et les médias. Il recommande en outre que ses observations finales soient diffusées de manière appropriée au niveau des collectivités locales, en vue de permettre leur application. En outre, le Comité demande à l’État partie de continuer de diffuser la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le Protocole facultatif s’y rapportant et la jurisprudence connexe, ainsi que les recommandations générales du Comité, à toutes les parties prenantes.

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribuerait à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l’État partie à envisager d’adhérer aux instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Suivi des observations finales

Le Comité prie l’État partie de fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations formulées aux paragraphes 19 et 29 b) et c) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à présenter son cinquième rapport périodique en février 2018.

Le Comité demande à l’État partie de suivre les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, y compris les directives relatives au document commun de base et au document spécifique à un instrument international ( HRI/MC/2006/3 et Corr.1 ).