NATIONS UNIES

CMW

Convention internationa le sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr.

GÉNÉRALE

CMW/C/SR.89

15 janvier 2010

FRANÇAIS Original: ANGLAIS

COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DE TOUS LES TRAVAILLEURSMIGRANTS ET DES MEMBRES DE LEUR FAMILLE

Neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 89e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le lundi 24 novembre 2008, à 15 heures

Président: M. EL JAMRI

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES AU TITRE DE L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial d’El Salvador (suite)

La séance est ouverte à 15 h 05 .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES AU TITRE DE L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial d’El Salvador (suite) (CMW/C/SLV/1; CMW/C/SLV/Q/1 et Add.1)

À l’ invitation du Président , les membres de la délégation d’ El Salvador prennent place à la table du Comité.

M. LARIOS LÓPEZ (El Salvador), notant qu’un grand nombre de migrants du Salvador vivent à l’étranger et un nombre appréciable de ressortissants étrangers au Salvador, dit que la migration constitue un moteur du développement, puisque les migrants apportent des contributions à la fois économiques, sociales et culturelles à leur pays d’accueil. L’État partie a la ferme volonté de respecter les droits des migrants quelle que soit leur situation. Dans la lutte contre la traite des personnes, il importe en effet de ne pas criminaliser les migrants en situation irrégulière. En outre, à la lumière des efforts actuels sur les plans régional et international pour promouvoir le dialogue et la coopération en matière de migration, il est nécessaire que les pays disposent de mécanismes et de structures qui répondent aux besoins et aux droits de leurs ressortissants expatriés.

En tant que pays d’origine, l’État partie a progressé dans de nombreux domaines. Le Bureau des Salvadoriens de l’étranger du Vice‑Ministre des affaires étrangères, dont la mission et les domaines d’activité sont exposés dans les paragraphes 14, 117 et 118 du rapport initial (CMW/C/SLV/1), a été créé en 2004. Des résolutions ont été adoptées et des accords signés aux niveaux international, régional et bilatéral en matière de droits de l’homme et d’assistance juridique dans des domaines tels que le rapatriement et la lutte contre la traite des personnes. Des déplacements à l’étranger ont été effectués pour vérifier les conditions de vie des migrants salvadoriens et leur situation en matière de droits de l’homme et pour évaluer les risques qu’ils prennent en émigrant sans disposer des documents nécessaires. Les progrès en termes d’assistance consulaire incluent l’établissement de «consulats de protection» au Mexique et aux États-Unis d’Amérique, la mise en place d’un système de visioconférence pour des entretiens avec les migrants aux États-Unis et l’introduction d’un système informatisé pour la délivrance électronique de passeports provisoires. Le Département des activités humanitaires et de l’assistance aux migrants est un organisme qui a été créé pour entreprendre de répondre aux besoins des Salvadoriens de l’étranger dans des domaines tels que les soins médicaux et le rapatriement des personnes malades ou vulnérables, et un centre pour migrants a été créé en 2005 à la frontière, à La Hachadura, pour dispenser des soins médicaux, distribuer de la nourriture et des vêtements et offrir un lieu de repos aux migrants salvadoriens rapatriés par voie terrestre. Dans le domaine de la stabilité des migrants et du regroupement familial, les activités se poursuivent dans le cadre du Programme du statut de protection temporaire avec les États-Unis d’Amérique, statut sous lequel 240 000 Salvadoriens sont enregistrés, et selon d’autres programmes et mémorandums d’accord avec le Guatemala, le Mexique, le Nicaragua et l’Espagne. En outre, le Salvador met en œuvre des programmes pour les travailleurs saisonniers salvadoriens en Australie, au Canada, en Italie et en Espagne, et il entreprend de promouvoir l’accès aux soins de santé et au logement pour les migrants salvadoriens à l’étranger.

En tant que pays de transit et de destination, l’État partie ne considère pas l’entrée irrégulière dans le pays comme une infraction pénale, mais comme une violation administrative du projet de loi sur la migration et les étrangers, qui entraîne une expulsion du territoire national et le paiement d’un amende qui peut être acquittée en nature sous la forme d’un travail d’intérêt général. La loi de 1958 sur la migration et la loi de 1986 sur les étrangers, ainsi que la Constitution, sont les principaux instruments législatifs pour traiter les questions qui font l’objet de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le projet de loi sur la migration et les étrangers, qui reprend les principes, les dispositions et les prescriptions de la Convention, a été préparé pour aligner le cadre juridique sur la Convention, et il est actuellement examiné avant d’être soumis à l’Assemblée législative. Le Centre d’assistance générale aux migrants a été créé en juillet 2008 pour fournir un abri aux personnes ayant émigré au Salvador et qui sont en voie d’être rapatriées dans leur pays d’origine; des informations sont données dans la réponse écrite de l’État partie à la rubrique 10 d) de la liste de questions. Le recueil de règles administratives et de procédure pour le Centre prend en compte des principes tels que l’égalité et la non-discrimination, ainsi que les droits à la vie, à la protection, à une procédure régulière et à une détention réduite au minimum. Le Ministère de la sécurité publique et de la justice, par l’intermédiaire du Département de la migration et des étrangers, est chargé du contrôle des migrations, tandis que la Police civile nationale est chargée de garder les frontières, les ports et les aéroports.

Il décrit une série de mesures qui ont été prises pour assurer le respect des droits de l’homme, éviter tous les types de discrimination et lutter contre les passeurs de migrants. Les passeports sont devenus en août 2006 les seuls documents de voyage légaux pour les enfants et les adolescents salvadoriens, et des progrès ont été faits dans le rapatriement des enfants conformément au manuel de procédures pour le rapatriement, un guide destiné aux fonctionnaires qui met l’accent sur les droits de l’homme et la défense optimale des intérêts des enfants. Dans le cadre du Programme de régularisation des travailleurs saisonniers, qui souligne que les travailleurs saisonniers peuvent plus facilement régulariser leurs papiers que les migrants qui sollicitent une autorisation de résidence à long terme, la situation de 2 282 travailleurs temporaires du Honduras et du Nicaragua a été régularisée. Le Ministère du travail et de la protection sociale et le Département de la migration et des étrangers procèdent à des inspections sur les lieux de travail pour mieux informer le personnel de ses droits, contrôler les pratiques sur les lieux de travail et prévenir la discrimination. Le Programme Bienvenue au pays, décrit dans les paragraphes 76 à 80 du rapport initial, apporte une aide d’urgence aux Salvadoriens vulnérables qui retournent dans leur pays d’origine. Le Centre des migrants salvadoriens fournit une assistance dans des domaines tels que l’emploi, l’éducation et les soins médicaux. Un total de 88 312 Salvadoriens, dont 12 % de femmes et 78 % d’hommes, ont reçu une assistance entre le début du Programme Bienvenue au pays en 1999 et octobre 2008. Un comité national a été créé pour coordonner la lutte contre la traite des personnes. Un refuge a été mis en place en 2006 pour offrir une prise en charge, une protection et une assistance immédiates aux victimes des passeurs, y compris les enfants et les adolescents, et à ce jour cette infrastructure a apporté une aide à 141 enfants, adolescents et femmes de différentes nationalités, notamment des Salvadoriens, des Guatémaltèques et des Mexicains.

Dans le cadre des activités destinées à faire mieux connaître la Convention, on a organisé des cours et des ateliers de formation pour les nouveaux fonctionnaires chargés de la migration et préparé une stratégie de communication complète pour mettre en évidence les risques d’émigrer sans posséder les documents requis. En outre, un projet pilote de standardisation des documents de passage de la frontière entre le Salvador et le Honduras a été établi en commun par l’État partie et le Honduras; des détails sur ce programme sont donnés dans la réponse de l’État partie à la rubrique 25 de la liste de questions.

Il décrit brièvement les progrès accomplis au niveau régional. Une politique de liberté de circulation par la voie terrestre entre les pays du CA-4 (groupe de quatre pays de l’Amérique centrale: El Salvador, Guatemala, Honduras et Nicaragua) a été mise en place en juin 2006 et concerne des domaines tels que la simplification des procédures de contrôle des migrations entre les pays et la création de documents de voyage intrarégionaux. De même, une politique de liberté de circulation par air a vu le jour en octobre 2007. Le visa unique pour l’Amérique centrale a été introduit en novembre 2007 et le permis de séjour CA-4 a été mis en place en juin 2008.

M. ALBA (Rapporteur de pays) félicite l’État partie pour son rapport initial qui apporte la preuve des progrès faits par cet État sur le plan de la stabilité économique et politique comme sur celui des droits de l’homme. Il constate avec satisfaction que l’État partie est ouvert au dialogue avec le Comité et qu’il prend au sérieux ses responsabilités relativement à la Convention. L’État partie s’efforce apparemment de traiter les migrants sur son territoire comme il souhaiterait que ses propres migrants, qui représentent 20 % de sa population, soient traités à l’étranger. Le rapport initial est cependant assez formaliste et insuffisant sur le plan des faits, et on a demandé des informations complémentaires qui permettraient de montrer comment fonctionnent en pratique les politiques adoptées par le pays. Il ressort clairement des réponses écrites et de la déclaration initiale de la délégation que l’État partie a pris de nombreuses initiatives pour protéger les travailleurs migrants à l’étranger comme à l’intérieur de ses frontières et que des efforts sont faits pour aligner la législation existante concernant la migration et les étrangers sur les obligations contenues dans la Convention. Comme la première des obligations qui incombent aux États parties aux conventions internationales est de les appliquer, l’État partie devrait poursuivre ses efforts pour aligner l’ensemble de son cadre juridique sur les dispositions de la Convention. À cet égard, le Comité attend avec impatience l’approbation du projet de loi sur la migration et les étrangers.

Il demande à la délégation de préciser l’emplacement exact du Centre d’assistance générale aux migrants créé en juillet 2008 et de donner des informations complémentaires sur les procédures officielles et les délais pour traiter les cas des migrants en situation irrégulière. Il fait observer qu’apparemment les décisions administratives sur les expulsions ne peuvent faire l’objet d’aucune forme de recours et qu’en la matière la législation de l’État partie entre en conflit avec les principes de la Convention. Il apparaît qu’on accorde aux entreprises de l’industrie de la canne à sucre des pouvoirs discrétionnaires considérables en ce qui concerne le traitement des travailleurs saisonniers, et il aimerait donc savoir si la législation considère ces travailleurs comme une catégorie à laquelle des règles spécifiques s’appliquent. Il note que les travailleurs migrants sont souvent blessés lors du transit vers d’autres pays et également pendant leur travail, en raison de la nature de celui-ci. Il souligne qu’il appartient à l’État partie de passer des accords avec d’autres pays sur le partage de la charge financière liée aux accidents et aux incapacités occasionnés sur le lieu de travail et pour lesquels les entreprises peuvent être poursuivies et, ce qui est plus important, de trouver des crédits pour couvrir les coûts des accidents et des incapacités occasionnés lors des transits. En ce qui concerne le problème toujours plus grave des migrants enfants, il suggère que le moment est venu pour le Salvador de constituer avec d’autres pays un front uni pour coordonner la recherche d’une solution à ce problème.

Les réponses écrites ne soulignent pas suffisamment le droit pour les travailleurs migrants et les membres de leur famille de participer aux affaires publiques, de voter et d’être élus dans leur pays d’origine. Les États parties ont l’obligation de considérer les moyens par lesquels leurs ressortissants pourraient exercer ce droit, et si la Constitution n’y pourvoit pas déjà, il conviendrait peut-être de l’amender. Les réponses écrites sur la traite des personnes et les poursuites contre les passeurs manquent de clarté, car il existe des différences entre les statistiques fournies par la Police civile nationale et le Département de la migration et des étrangers. Une plus grande clarté serait possible si leurs efforts étaient coordonnés et les statistiques standardisées. Une explication sur les responsabilités de chacun de ces organismes serait également utile.

M. KARIYAWASAM fait observer que l’État partie est un pays d’origine, de transit et de destination et qu’environ 30 % de sa population travaille à l’étranger. Le fait que l’État partie ait adhéré à la Convention apporte clairement la preuve de son désir de veiller à ce que ses ressortissants à l’étranger exercent leurs droits. Bien que tous les pays de destination ne soient pas parties à la Convention, les autorités de l’État partie demeurent responsables des droits des travailleurs migrants, qu’ils se trouvent sur son territoire, en transit ou à l’étranger.

L’expulsion de travailleurs migrants a un impact considérable sur les individus et leur famille et cette question revêt une importance cruciale pour le Comité. L’augmentation du nombre des expulsions sans procédure régulière est particulièrement préoccupante. La majorité des expulsions concerne des travailleurs migrants en situation irrégulière dans un pays, mais il convient de souligner que la Convention reconnaît les droits de tous les travailleurs migrants, quel que soit leur statut juridique. Il aimerait donc savoir si l’État partie apporte, par l’intermédiaire de ses consulats, sa protection et son assistance à ses ressortissants qui vivent et qui travaillent illégalement à l’étranger et, dans ce cas, si ces personnes reçoivent les mêmes niveaux de protection et d’assistance que les ressortissants qui vivent et travaillent légalement à l’étranger. Il sollicite également des informations complémentaires sur les arrangements existants et sur les installations et les services de protection prévus à cet effet.

Le Comité serait intéressé à savoir comment l’État partie collabore avec les pays de destination pour faire en sorte que les expulsions se fassent dans la dignité et que les expulsés ne soient pas criminalisés. A cet égard, il demande comment l’État partie traite le retour sur son territoire de membres de gangs du crime organisé, et si des occasions leur sont données d’être réintégrés en tant que citoyens normaux à leur retour ou s’ils sont traités comme des criminels. Le Programme Bienvenue au pays est louable, mais il aimerait savoir s’il existe des exceptions, par exemple dans le cas des personnes tatouées.

Il demande à l’État partie de donner des informations sur sa stratégie face à l’importance du nombre de ses ressortissants qui sont mutilés ou tués dans des trains de marchandises vers le Mexique. Il demande également comment l’État partie tient compte au mieux des intérêts des enfants lors du rapatriement de mineurs non accompagnés, s’il existe une procédure permettant d’entendre l’enfant et combien d’enfants ont été expulsés de l’État partie vers leur pays d’origine depuis 2003. Il aimerait savoir enfin selon quelles modalités les enfants de travailleurs migrants en situation irrégulière ont accès au système scolaire et il demande davantage d’informations sur les règles qui régissent la régularisation de leurs parents.

M. EL-BORAI dit que s’il accueille favorablement la création en 2004 du Bureau des Salvadoriens de l’étranger du Vice‑Ministre des affaires étrangères, il est préoccupé de constater qu’un nombre significatif de Salvadoriens vivant à l’étranger n’ont toujours pas le droit de vote. Il demande des éclaircissements sur le statut juridique de la Convention. Si la Constitution du Salvador prévoit l’intégration de la Convention dans la législation nationale, il n’est pas nécessaire de modifier la loi de 1958 sur la migration. La règle selon laquelle les membres des conseils d’administration des syndicats doivent être Salvadoriens par la naissance est contraire à la Convention no 87 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical, que le Salvador a ratifiée en 2006, ainsi qu’à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Mme DIEGUEZ demande des informations supplémentaires sur les fonctions et les services des «consulats de protection» que les services consulaires salvadoriens ont établis dans différents pays. Elle aimerait connaître les mesures prises par le Gouvernement pour identifier les enfants laissés au Salvador par des parents qui ont émigré et pour répondre à leurs besoins.

M. SEVIM juge alarmant que le nombre de Salvadoriens vivant à l’étranger représente près de la moitié de la population totale du pays. Il serait utile d’avoir des statistiques sur les groupes d’âge de ces personnes et de connaître l’impact de cette forte émigration sur le marché national du travail. Il demande si le Gouvernement envisage de prendre des mesures pour dissuader les travailleurs salvadoriens d’émigrer ou pour inciter ceux de l’étranger à retourner au Salvador.

Concernant les expulsions, il aimerait savoir si le Salvador a conclu des accords de réadmission avec des pays de destination comme les États‑Unis, le Canada ou les États membres de l’Union européenne, et dans ce cas quelles sont les dispositions de ces accords. Il se demande s’ils comportent des garanties procédurales.

Il aimerait savoir si le Salvador envisage d’adhérer à la Convention no 97 de l’OIT sur les travailleurs migrants (révisée, 1949), la Convention no  143 de l’OIT sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l’égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants et la Convention no 118 de l’OIT sur l’égalité de traitement des nationaux et des non-nationaux en matière de sécurité sociale.

Mme POUSSI KONSIMBO constate que plusieurs dispositions de la législation du Salvador, y compris la Constitution, établissent le principe d’une absence de discrimination entre les nationaux salvadoriens et les migrants étrangers. Elle demande si les migrants concernés et les personnes chargées d’appliquer la loi connaissent ces dispositions. Elle est préoccupée de voir qu’un grand nombre de personnes, représentant une proportion élevée de la population totale, vivent à l’étranger, parmi lesquelles beaucoup sont privées du droit de voter et donc de participer aux affaires de leur pays. Elle aimerait savoir quelle est exactement la principale objection à l’octroi du droit de vote à ces personnes. Elle demande si la législation comporte des dispositions particulières sur les transferts de fonds des migrants salvadoriens vivant à l’étranger pour leur permettre de contribuer au développement de l’économie nationale.

M. BRILLANTES dit que les «consulats de protection» institués par le Salvador sont un dispositif novateur qui pourrait servir de modèle à d’autres États parties. Il demande si, dans le cadre des services qu’ils assurent, ces consulats offrent une assistance juridique aux migrants salvadoriens de l’étranger ou si, à l’inverse, ils ont l’obligation de faire appel à des juristes locaux. Il demande si le Salvador règle la totalité ou une partie seulement des dépenses associées à l’expulsion ou au rapatriement de ses ressortissants vivant à l’étranger. Il aimerait savoir si les responsables salvadoriens ont envisagé d’utiliser des «bons de rapatriement», qui pourraient être utilisés lorsqu’il deviendrait nécessaire à un citoyen salvadorien de retourner dans son pays. Les dispositions nécessaires pour ces bons pourraient être prises par les agences de recrutement qui envoient les travailleurs à l’étranger avant le départ de ces derniers, et le retour des travailleurs pourrait être organisé automatiquement et sans frais vers le pays d’origine ou le pays de destination.

La séance est suspendue à 16 h 35 ; elle est reprise à 16 h 55 .

M. LARIOS LÓPEZ (El Salvador) dit que l’article 144 de la Constitution du Salvador stipule que les traités internationaux conclus par le Salvador avec d’autres États ou avec des organisations internationales sont reconnus comme partie intégrante de la législation salvadorienne dès leur entrée en vigueur. La législation ne peut pas modifier les dispositions d’un traité en vigueur au Salvador ni leur apporter des dérogations. En cas de conflit entre le traité et la législation, c’est le traité qui prévaut.

Mme FLAMENCO (El Salvador) dit que des travaux se poursuivent depuis plusieurs années pour préparer le projet de loi sur la migration et les étrangers et assurer sa conformité avec les principes de la Convention. Le projet de loi est examiné actuellement par le Bureau du Président. Son examen est également en cours au Département de la migration et des étrangers, au Ministère de la sécurité publique et de la justice et dans d’autres organismes gouvernementaux concernés. Après sa mise au point définitive, le projet de loi sera transmis aux organisations de la société civile et au Bureau du Procureur pour la protection des droits de l’homme pour recueillir leurs observations avant d’être soumis à l’assemblée législative.

Le fait qu’on ait entrepris d’apporter des modifications à la loi de 1958 sur la migration et à la loi de 1986 sur les étrangers ne signifie pas que le Salvador n’applique pas les dispositions de la Convention. Il applique certaines dispositions automatiques de celle-ci et d’autres qui ne nécessitent pas de modifications du droit ou de la procédure. C’est ainsi qu’on a mis en œuvre l’année passée certaines décisions qui s’appuient sur les principes de la Convention, mais qui ne sont pas prévues par la loi sur la migration. Par exemple, alors que précédemment les permis de séjour des travailleurs étaient invalidés lorsqu’il était mis fin à leur emploi et que ces personnes devaient quitter le pays, une décision de ce type prévoit que les travailleurs dont le contrat est venu à expiration ont entre soixante et quatre‑vingt‑dix jours pour déposer une nouvelle demande de permis de séjour avec un autre employeur.

Il résulte de l’inauguration du Centre d’assistance générale aux migrants en juillet 2008 que les personnes en attente d’un rapatriement ne sont plus laissées à la garde de la police des frontières, mais envoyées au Centre. Comme celui-ci est situé dans le département de San Salvador, les personnes détenues par des agents de la force publique peuvent être transportées vers le Centre en trois heures seulement. Le Centre peut recevoir 80 personnes, mais il est rarement complet et actuellement 5 personnes seulement y sont logées. On voit donc que le nombre de personnes en attente d’un rapatriement est peu élevé. Le Centre est divisé en unités distinctes pour loger les hommes, les femmes, les familles et les personnes vulnérables. Il fournit de la nourriture, un logement, des soins médicaux et une aide psychosociale. Un emplacement spécial est réservé pour permettre aux services consulaires étrangers d’assister leurs nationaux. Le Centre a jusqu’à présent apporté ses services à 96 migrants. Un manuel administratif exposant les règles et les procédures du Centre a été préparé en collaboration avec la police nationale.

Les étrangers arrêtés par la Police civile nationale ont le droit d’être entendus. Ils sont informés du délit dont ils sont accusés, de la peine qu’ils encourent et des dispositions légales qu’ils ont violées, et on leur donne la possibilité de présenter des témoignages. Si nécessaire, ils ont droit aux services d’un interprète. Lorsqu’une décision a été prononcée, ils ont le droit de faire appel. De nombreuses affaires ne se terminent pas par un rapatriement, et plusieurs alternatives à la détention ont été instituées.

Bien que la loi sur la migration ne se réfère pas aux travailleurs saisonniers, le Gouvernement a commencé à utiliser ce terme après la ratification de la Convention par le Salvador, lorsqu’il a constaté qu’un grand nombre d’ouvriers agricoles originaires d’Amérique centrale ne venaient travailler que pendant les récoltes de canne à sucre. Une régularisation de ces travailleurs est nécessaire, parce qu’ils ne séjournent pas au Salvador et qu’ils n’y sont pas établis. On leur accorde des permis de travail pour une période maximum de six mois. Les formalités pour l’octroi d’un permis de travail saisonnier sont accomplies par l’intermédiaire de l’employeur ou à la demande du travailleur. La loi ne concerne pas exclusivement les travailleurs des plantations de canne à sucre ou de café, elle peut s’appliquer aussi à d’autres catégories de travailleurs saisonniers, comme le précise la loi sur la migration. Des amendements à cette loi sont nécessaires pour tenir compte des travailleurs saisonniers d’autres secteurs et établir une réglementation spécifique.

Le Programme Bienvenue au pays a été exécuté en tant que projet pilote de 1999 à 2004, avec l’aide de fonds octroyés par les États-Unis. En 2004, le programme a été repris par le Ministère des affaires étrangères et le Ministère de la sécurité publique et de la justice et financé sur le budget de ce dernier. Après 2006, il a été transféré au Ministère de la santé publique et de la protection sociale. Le programme permet d’apporter une assistance aux Salvadoriens expulsés des États‑Unis. À leur arrivée au Salvador, on leur demande pourquoi ils sont allés aux États‑Unis et ce qu’ils y ont fait, on leur donne de la nourriture et on les informe sur la situation dans leur pays. Le programme sert également à donner des informations sur les autres services disponibles pour ceux qui retournent dans leur pays. Un centre d’assistance juridique a été ouvert en 2008, en coopération avec l’Institut des droits de l’homme de l’Université José Simeón Cañas d’Amérique centrale (IDHUCA). Des mesures sont également en place pour aider les personnes à trouver du travail après leur retour, grâce à un service de recrutement assisté par le Ministère du travail et de la protection sociale. Des formations professionnelles dans des domaines tels que la boulangerie, la mécanique ou les technologies de l’information leur sont proposées également et, dans le cadre d’un accord avec le Ministère de l’éducation, la possibilité leur est donnée de reprendre des études secondaires, dans un établissement ou avec un enseignement à distance. Une assistance psychologique est apportée, et une équipe de travailleurs sociaux est disponible pour aider les personnes accueillies dans le cadre du Programme Bienvenue au pays. Des soins de santé de base et une assistance médicale sont assurés, et un médecin se rend chaque jour auprès de ces personnes et les fait hospitaliser pour un traitement si nécessaire.

M. GUERRA (El Salvador) précise que des fonctionnaires peuvent rendre visite aux migrants en situation irrégulière dans le nouveau Centre d’assistance générale aux migrants, qui a été construit pour remplacer les locaux de la police situés aux frontières, où ces personnes étaient gardées jusqu’alors. La plus grande distance entre un point de passage à la frontière et le Centre est de 440 kilomètres, de sorte que les migrants en situation irrégulière peuvent être transférés rapidement au Centre après avoir été appréhendés à la frontière. Les cas de migration irrégulière sont annoncés immédiatement au Département de la migration et des étrangers.

Les membres de gangs qui retournent au Salvador ne font pas l’objet d’une discrimination. Des problèmes se posent cependant si les gangs recourent à la violence, et dans ce cas il peut être demandé à la police d’intervenir. Un grand nombre de membres de gangs rapatriés ont accès au Programme Bienvenue au pays et à d’autres programmes sociaux. Une procédure a été établie pour faire disparaître leurs tatouages et faciliter leur réintégration dans la société.

M. CASTRO GRANDE (El Salvador), répondant à une question de M. Sevim, indique que le Salvador n’a pas ratifié les Conventions nos 97 et 143 de l’OIT. Le Gouvernement a donné la priorité à la ratification de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qu’il juge plus complète que les deux conventions de l’OIT. Le Salvador pourrait néanmoins ratifier ultérieurement ces dernières.

MmeRIVAS POLANCO (El Salvador) dit qu’un Département des activités humanitaires et de l’assistance aux migrants a été créé au Ministère des affaires étrangères et qu’il offre des services pour protéger les Salvadoriens de l’étranger. Des efforts sont faits pour encourager les services consulaires salvadoriens à l’étranger à mettre en place des services adéquats de gestion sociale et humanitaire pour répondre aux besoins des Salvadoriens expatriés. Le Département est habilité à signer des accords avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) sur les dispositions à prendre pour le retour des migrants décédés, blessés ou malades, ou victimes des passeurs. De 2005 à 2008, un total de 407 corps, 200 personnes malades et 2 224 mineurs ont été rapatriés. Des allocations de subsistance sont accordées à certaines familles expatriées. La situation juridique des Salvadoriens en détention à l’étranger est contrôlée périodiquement; actuellement, 3 655 Salvadoriens attendent leur expulsion. Le nouveau Centre d’assistance générale aux migrants est administré par le Département des activités humanitaires et de l’assistance aux migrants.

Le Bureau des Salvadoriens de l’étranger du Vice‑Ministre des affaires étrangères commence à organiser des activités pour informer les 2,3 millions de Salvadoriens expatriés au sujet des élections présidentielles et des candidats et pour leur permettre de voter. On s’efforce également de leur fournir des cartes d’identité, bien que la procédure soit complexe et onéreuse. Jusqu’à présent, 32 000 cartes d’identité ont été délivrées à des Salvadoriens vivant à Washington, Los Angeles et New York. Le coût du programme a été estimé à environ 34 millions de dollars.

La situation des enfants laissés au Salvador par des parents qui ont émigré est particulièrement préoccupante. Le Gouvernement entreprend actuellement une étude qualitative et quantitative pour évaluer le véritable impact sur les enfants abandonnés ainsi que leurs perspectives pour l’avenir. Trois grands projets de recherche ont été entrepris dans ce domaine au niveau national en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l’OIM, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et d’autres organisations. La féminisation de la migration est également examinée, et on envisage une étude pour évaluer l’incidence de la migration pour les migrantes qui sont en transit, qui vivent dans le pays de destination ou qui seront prochainement contraintes au retour. Cette étude devrait permettre d’évaluer les changements dans les schémas migratoires et leur action sur la société salvadorienne. Le Gouvernement a demandé l’avis d’organisations internationales sur les politiques et les programmes susceptibles de convenir à cet égard. Une attention particulière est accordée à la communication avec les jeunes au Salvador, pour savoir s’ils souhaitent émigrer et, dans ce cas, pour examiner les raisons pour lesquelles ils le souhaitent.

M. LARIOS LÓPEZ (El Salvador) dit que le grand nombre de bureaux consulaires salvadoriens qui ont été ouverts dans le monde entier montre que les effectifs des émigrants salvadoriens sont en augmentation. Le Gouvernement communique périodiquement avec ces bureaux et s’efforce de maintenir les liens entre les expatriés et leur pays d’origine.

Le PRÉSIDENT demande si les études sur les enfants abandonnés par les émigrants et sur les schémas migratoires des jeunes ont été achevées ou se poursuivent encore. Il désire des informations complémentaires sur le code de conduite pour la Police civile nationale, qui a apparemment été publié. Il aimerait savoir en particulier comment les capacités opérationnelles et fonctionnelles des personnes travaillant dans le secteur des migrations ont été renforcées et quelle est la coordination entre les codes de conduite des différents organismes.

La séance est levée à 17 h 55.

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