Nations Unies

CMW/C/SR.129

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

17 août 2010

Français

Original: anglais

NATIONS UNIES Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Dou zième session

Compte rendu analytique (partiel)* de la 129 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 27 avril 2010, à 10 heures

Président:M. El Jamri

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 73 de la Convention (suite)

Rapport initial de l’Algérie (suite)

La séance est ouverte à 10 h 15.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 73 de la Convention (suite)

Rapport initial de l’Algérie (suite) (CMW/C/DZA/1; CMW/C/DZA/Q/1 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.127)

1.Le Président invite la délégation algérienne à prendre place à la table du Comité et à continuer de répondre aux questions posées à la séance précédente.

2.M. Jazaïry (Algérie) dit que la délégation a regroupé les questions qui restent par thème.

3.M. Gaouaou (Algérie) dit que l’Algérie a conclu plusieurs accords bilatéraux en matière de migration avec les États du Maghreb dans les années 1960 et 1970. Des accords de ce type ont été ultérieurement conclus avec des États subsahariens voisins, notamment le Mali, et plus récemment avec la France, l’Espagne, l’Allemagne, l’Italie, la Suisse et le Royaume-Uni. Les accords conclus avec ces quatre derniers États tiennent pleinement compte des dispositions de l’article 22 de la Convention qui concernent, entre autres, l’expulsion collective et la notification des ordres d’expulsion.

4.M. Bourbia (Algérie) dit que des accords bilatéraux de sécurité sociale ont été conclus avec la Belgique, la France, la Jamahiriya arabe libyenne, la Roumanie et la Tunisie. Ils couvrent des questions telles que l’assurance maladie, le congé maternité, les accidents du travail et les maladies professionnelles, et les allocations familiales.

5.M. Kaci (Algérie) dit qu’il existe une coordination entre les différents ministères concernés par la migration illégale, tels que le Ministère des affaires étrangères, le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la défense et le Ministère de la santé. Un comité intersectoriel de suivi a été créé à cette fin dans les années 70. Il publie des rapports sur les entrées et sorties d’étrangers. Il existe également des comités intersectoriels au niveau des wilaya (départements) mais le Ministère des affaires étrangères n’y est pas représenté.

6.M. Haidid (Algérie) dit que conformément à la loi no 08-11 relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie, l’expulsion d’étrangers du territoire algérien doit être prononcée par le Ministère de l’intérieur. Conformément à l’article 30 de cette loi, les intéressés doivent se voir notifier leur expulsion et disposent d’un délai de quarante-huit heures à quinze jours pour quitter le territoire. Ils peuvent faire appel de l’ordre d’expulsion dans un délai de cinq jours à compter du jour où ils reçoivent la notification de l’ordre d’expulsion, l’appel ayant un effet suspensif. Les tribunaux sont tenus de se prononcer sur l’appel dans un délai de vingt jours; leur décision a également un effet suspensif. Conformément à l’article 32 de la loi, l’exécution de l’ordre peut être différée en cas de force majeure, par exemple lorsque les personnes concernées apportent la preuve qu’elles financent l’éducation d’enfants nés sur le territoire algérien ou subviennent à leurs besoins, ou si elles sont orphelines ou enceintes quand l’ordre est émis. Elles peuvent demander l’assistance des autorités diplomatiques ou consulaires présentes sur le territoire algérien et ont droit à l’assistance d’un avocat ou d’un interprète. Lorsque l’impossibilité pour les intéressés de quitter le territoire algérien est établie, ils sont assignés à résidence par le Ministère de l’intérieur jusqu’à ce que l’ordre puisse être mis à exécution.

7.M. Jazaïry (Algérie) dit que les motifs d’exemption de l’expulsion, comme le fait d’être enceinte, doivent être pris en compte par les autorités administratives avant l’émission de l’ordonnance d’expulsion. Si tel n’a pas été le cas, les personnes qui font l’objet d’un ordre d’expulsion bénéficient toutefois de la garantie supplémentaire consistant dans la possibilité de faire appel avec effet suspensif.

8.M. Kaci (Algérie) dit que la législation algérienne garantit la protection des biens des travailleurs migrants, quel que soit leur statut, conformément aux accords internationaux et bilatéraux pertinents. En réalité, chaque fois que l’Algérie conclut un accord relatif au rapatriement ou au renvoi de réfugiés, elle demande des garanties de protection des personnes concernées et de leurs biens.

9.M. Jazaïry (Algérie) dit que les autorités algériennes n’ont été saisies d’aucune plainte relative à des mauvais traitements infligés à des femmes migrantes mais qu’elles sont prêtes à examiner toute information du Comité sur de tels cas. L’Algérie n’a pas entrepris d’étude sur les conditions sociales des migrants − une lacune à laquelle elle doit remédier en temps utile.

10.M. Gaouaou (Algérie) dit qu’il existe un Comité interministériel qui s’occupe des migrants algériens qui rentrent en Algérie. Il leur accorde une aide de courte durée dans le domaine de la santé, des procédures administratives et du transport, et favorise leur réintégration sociale et économique en fonction des possibilités d’emploi et de la qualification des intéressés.

11.M. Jazaïry (Algérie) dit que la première préoccupation du Gouvernement algérien est de protéger la vie des étrangers et des ressortissants algériens qui tentent de quitter illégalement le pays. Certains d’entre eux prennent de très grands risques en traversant la Méditerranée sur des embarcations de fortune, ce qui entraîne de nombreux décès. Pour décourager de telles entreprises, ceux qui les organisent ou qui y participent sont passibles de sanctions pénales.

12.Passant aux questions relatives aux biens vacants, M. Jazaïrydit que l’article 42 de la loi de finance du 31 décembre 2009 ne distingue pas entre nationaux et étrangers. Il s’agit d’une disposition générale qui traite certaines des conséquences de la colonisation de l’Algérie, notamment les demandes d’indemnisation relatives à des biens laissés vacants émanant d’anciens colons, y compris de personnes ayant déjà reçu une indemnisation d’une autre source. Il convient de relever que bon nombre d’affaires de ce type ont été portées devant le Comité des droits de l’homme qui a déclaré les requêtes irrecevables, au motif que les faits invoqués s’étaient produits avant la ratification par l’Algérie du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

13.M. Gaouaou (Algérie) dit que la délégation algérienne comprend l’article 3 d) de la Convention comme signifiant que l’instrument ne s’applique pas aux réfugiés et apatrides. La récente hausse des flux migratoires vers l’Algérie et du transit par son territoire a montré qu’il y avait une certaine confusion entre les migrants ayant la qualité de réfugiés et les migrants en situation irrégulière. Pour remédier à cela, les organismes de l’État qui s’occupent des réfugiés et des apatrides font actuellement l’objet d’une réorganisation et de nouvelles règles sont en cours d’élaboration pour préciser leurs responsabilités et fonctions respectives.

14.M. Jazaïry (Algérie) dit que la falsification de passeports fait partie intégrante du problème de la migration clandestine et illégale.

15.M. Kaci (Algérie) dit que l’Algérie a adopté plusieurs mesures pour se conformer aux règles de l’Association internationale du transport aérien concernant les documents de voyage. Des fonds considérables ont été consacrés à l’émission de passeports biométriques, à la formation du personnel et à la création de services chargés du traitement de ces documents.

16.M. Bourbia (Algérie) dit que les conditions de travail des étrangers sont régies par la loi no 81-10 du 11 juin 1981 sur les conditions d’emploi des travailleurs, et par les textes d’application y relatifs. Conformément aux dispositions de cette loi, les travailleurs étrangers doivent avoir un permis de travail. À défaut, leurs employeurs sont passibles d’une amende de 5 000 à 10 000 dinars algériens. Les travailleurs sont eux aussi passibles d’une amende, mais cette disposition est rarement appliquée. Les migrants clandestins sont soumis aux dispositions de la loi no 08-11.

17.M me Driss  (Algérie) dit que les relations familiales et les questions telles que le mariage, le divorce, la garde et la succession sont régies par le Code de la famille. Conformément à ce code, le divorce est généralement une décision unilatérale prise à la demande du mari mais il peut être accordé à la demande de l’épouse dans des cas précis visés par le Code, par exemple en cas de désaccords persistants. Les étrangers qui vivent en Algérie et souhaitent divorcer sont soumis à leurs propres lois nationales.

18.M. Kaci (Algérie) dit que les questions relatives à l’octroi et au retrait de permis de séjour aux étrangers présents en Algérie sont régies par l’article 16 de la loi no 08-11. En cas de décès du chef de famille titulaire principal du permis de résidence, les membres de la famille ne se voient pas automatiquement retirer leur autorisation de séjour s’ils continuent de remplir les conditions nécessaires. Les permis de séjour sont accordés à titre individuel et non à la famille dans son ensemble. Cela étant, les situations litigieuses sont réglées au cas par cas.

19.M. Jazaïry (Algérie) dit que les membres de la famille concernés continuent de vivre comme avant et que la durée de leur permis de séjour n’est pas affectée. Les demandes de renouvellement de permis de séjour sont examinées dans les mêmes conditions que les demandes émanant des autres étrangers présents en Algérie.

20.M. Gaouaou (Algérie) dit que le Gouvernement algérien a conclu un accord de coopération sur les questions relatives à l’expulsion avec les ambassades étrangères et les représentations diplomatiques présentes sur son territoire. Conformément à cet accord, les représentations doivent être informées dans un délai de huit jours des ordres d’expulsion émis à l’encontre d’un de leurs ressortissants.

21.M. Saadi (Algérie) dit que les personnes qui ont la double nationalité jouissent de l’ensemble des droits politiques, à l’exception du droit de constituer des partis politiques. Concernant l’expulsion de ressortissants marocains en 1975, M. Saadi pense que le Comité ne dispose pas de tous les faits. Un grand nombre de ressortissants algériens ont été expulsés du Maroc pendant la même période. Conformément au principe de non-rétroactivité qui régit l’application des traités, le Comité n’est pas compétent pour examiner cette question.

22.M. Kaci (Algérie) dit que l’on dénombre environ 107 000 migrants disposant de papiers en Algérie. La plupart d’entre eux travaillent dans les secteurs de la santé, des affaires, de l’investissement, de l’éducation, de l’agriculture et du bâtiment.

23.M me  Driss (Algérie) dit que conformément au Code pénal, la qualité de migrant n’a pas de conséquence sur l’obligation qu’ont les intéressés de respecter la loi. Chaque juge est libre de tenir compte de la qualité de migrant s’il l’estime judicieux dans le cadre d’une affaire.

24.M. Jazaïry (Algérie) dit que les étrangers ne peuvent pas participer aux élections algériennes. Tous les étrangers et migrants ont le droit de s’affilier à des associations mais ils ne peuvent constituer ou présider des associations algériennes. Ils peuvent en revanche constituer ou présider des associations d’étrangers.

25.M. El-Borai demande des précisions sur le droit des travailleurs migrants de constituer des syndicats et de s’y affilier. Il note que l’État partie a ratifié la Convention (no87) de l’Organisation internationale du Travail concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical qui contient, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, des dispositions garantissant la liberté d’association des travailleurs migrants.

26.Notant que l’État partie a conclu des accords bilatéraux en matière de prestations de sécurité sociale avec la Belgique, la France, la Jamahiriya arabe libyenne, la Roumanie et la Tunisie, M. El-Borai voudrait savoir si les travailleurs migrants originaires d’autres pays ont droit à la sécurité sociale ou peuvent s’affilier à un système de couverture sociale.

27.L’expert demande s’il y a eu des cas d’expropriation de biens appartenant à des travailleurs migrants. Dans l’affirmative, il voudrait savoir dans quelle mesure la législation de l’État partie est conforme avec l’article 15 de la Convention.

28.M me Dicko voudrait savoir s’il existe un mécanisme permettant aux travailleurs migrants de transférer des fonds sans frais élevés.

29.M. Alba voudrait davantage d’informations sur le sort des migrants en situation irrégulière avant leur expulsion. Existe-t-il des statistiques concernant les plaintes déposées par les travailleurs migrants auprès des autorités?

30.M. Carrión-Mena demande si les accords bilatéraux conclus entre la France et l’État partie contiennent des dispositions relatives au contrôle des flux migratoires entre les deux pays. Compte tenu du faible nombre de travailleurs migrants disposant de papiers qui résident dans l’État partie, il voudrait également savoir s’il existe des estimations fiables du nombre total de travailleurs migrants en Algérie, y compris les migrants en situation irrégulière.

31.M. Sevim se réjouit que les accords de réadmission conclus par l’État partie prévoient des garanties procédurales. Il voudrait savoir si des sanctions sont appliquées aux nationaux algériens qui rentrent en Algérie en application de ces accords, que les intéressés aient ou non des papiers. Des renseignements complémentaires sur les procédures suivies lorsque des ressortissants d’États tiers rentrent en Algérie dans le cadre d’accords de réadmission seraient les bienvenus.

32.Des informations détaillées sur la situation des femmes migrantes dans l’État partie seraient également les bienvenues.

33.Il serait utile de savoir si les travailleurs migrants sans papiers ont droit à des prestations de sécurité sociale et s’ils conservent le bénéfice de ce droit lorsqu’ils rentrent dans leur pays d’origine.

34.M me Miller-Stennett demande si le Ministère du travail est représenté au sein du Comité intersectoriel de suivi de l’immigration clandestine. Elle voudrait également savoir s’il existe des critères écrits permettant aux autorités de déterminer la qualité de réfugié, de demandeur d’asile ou de migrant d’un particulier.

35.M. Tall voudrait savoir quelles mesures ont été prises pour favoriser l’intégration sociale des enfants de travailleurs migrants, que leurs parents aient ou non des papiers. Il voudrait également savoir si la législation de l’État partie concernant le trafic illicite de personnes contient des dispositions relatives à la protection des victimes.

36.Le Président demande quelles mesures ont été prises par l’État partie pour sensibiliser les migrants algériens qui vivent à l’étranger et les migrants d’origine étrangère qui vivent en Algérie aux dispositions de la Convention. Il serait utile de savoir si des tribunaux ont invoqué la Convention dans leurs décisions et si les juges et les fonctionnaires reçoivent une formation sur les dispositions de la Convention. Des informations sur la contribution de la société civile à l’élaboration du rapport seraient en outre les bienvenues.

37.Le Président voudrait également savoir comment le Gouvernement considère les Algériens qui se sont vu accorder l’asile territorial, notamment en France, après avoir fui l’Algérie où ils étaient persécutés par des groupes armés. Il serait utile de savoir si les intéressés sont considérés comme des migrants et sont pris en compte dans les statistiques relatives aux migrants vivant à l’étranger, et s’ils ont des liens avec les consulats ou missions diplomatiques.

38.Le Président voudrait savoir si le Gouvernement a pris ou envisage de prendre des mesures visant à accorder une protection sociale à ses ressortissants vivant à l’étranger, lorsque cette protection n’est pas disponible dans les pays de résidence concernés.

39.L’Algérie est un des plus grands États de la région du Sahara, laquelle est connue comme une zone de transit pour les migrants où la traite des êtres humains et le trafic illicite de personnes sont courants, et où nombre de migrants sont exploités dans le cadre du trafic de stupéfiants et d’armes. Quelles mesures sont prises par l’État partie pour se tenir informé de la situation des migrants présents dans cette région et pour faire en sorte qu’ils soient protégés contre l’exploitation?

40.M. Ibarra González demande si les migrants légaux peuvent participer aux élections. Dans la négative, des informations sur toute mesure visant à leur accorder ce droit seraient les bienvenues. Il voudrait également savoir si les étrangers naturalisés peuvent voter aux élections algériennes.

41.M. Ibarra González voudrait également savoir si les migrants illégaux ont le droit d’épouser des ressortissants algériens. Dans l’affirmative, il serait utile de savoir si le fait pour un migrant d’origine étrangère d’épouser un ressortissant algérien lui confère un statut légal.

La séance est suspendue à 11 h 20; elle est reprise à 11 h 45.

42.M. Jazaïry (Algérie) dit que les travailleurs migrants et les membres de leur famille n’ont pas le droit de constituer des syndicats mais qu’ils peuvent s’y affilier et les présider. Ils peuvent participer aux scrutins nationaux dans leur pays d’origine par l’intermédiaire de leurs missions diplomatiques en Algérie. Ils ne disposent pas du droit de vote aux élections algériennes; aucun changement n’est actuellement envisagé à cet égard. Le droit de propriété des migrants n’est soumis à aucune restriction particulière. M. Jazaïry dit qu’il n’y a eu, à sa connaissance, aucun cas de confiscation de biens appartenant à des migrants depuis l’entrée en vigueur de la Convention.

43.M. Kaci (Algérie) dit que les ressortissants étrangers peuvent être propriétaires de biens en Algérie, même s’ils sont tenus d’obtenir une autorisation à cette fin. Cette condition est une mesure visant à prévenir la vente de biens appartenant à l’État. En vertu de la Constitution, les propriétaires ont droit à une indemnisation en cas d’expropriation.

44.M. Jazaïry (Algérie) dit que conformément à la loi algérienne, les migrants peuvent transférer des fonds s’ils sont en situation régulière. Une autorisation de transfert est demandée par l’employeur à la banque centrale et les fonds sont transférés par le biais de la Western Union, qui prélève une commission très élevée. C’est pourquoi le Gouvernement étudie la possibilité d’établir un réseau de banques algériennes à l’étranger de sorte que le coût de ces transferts soit raisonnable.

45.Il n’y a pas de statistiques sur les plaintes déposées par des migrants puisque aucune distinction n’est faite à cet égard entre migrants et ressortissants algériens.

46.M. Gaouaou (Algérie), répondant à une question relative aux accords bilatéraux conclus par l’État partie avec la France, dit qu’il n’y a actuellement aucun mécanisme de régularisation du statut des migrants entre la France et l’Algérie. Plusieurs accords sur la question ont été conclus par le passé, notamment des accords relatifs à l’emploi signés dans les années 60, en application desquels les Algériens se sont vu accorder le droit de travailler en France. Au début des années 70, le Gouvernement algérien a décidé de dénoncer ces accords à la suite d’actes xénophobes commis à l’encontre de la communauté algérienne en France. Dans les années 80, des accords relatifs au retour volontaire d’Algériens vivant en France ont été conclus; ils prévoyaient l’octroi d’une aide aux intéressés par les autorités françaises mais très peu d’Algériens en ont bénéficié dans la pratique. Le Gouvernement français a récemment proposé un nouveau type d’accords de coordination de la gestion des flux migratoires. Des accords ont ainsi été conclus par la France avec plusieurs pays africains mais le Gouvernement algérien ne les a pas signés parce qu’il jugeait contestables plusieurs de leurs dispositions, notamment celles relatives à l’expulsion de ressortissants étrangers par la France.

47.M. Jazaïry (Algérie) dit que les migrants d’origine algérienne qui rentrent en Algérie ne font l’objet d’aucune sanction ou autre mesure judiciaire, quelles que soient les circonstances dans lesquelles ils ont quitté le pays et qu’il existe ou non des accords de réadmission entre l’Algérie et le pays de destination concerné. Les migrants algériens qui rentrent dans leur pays ont droit à une couverture sociale de base et ils peuvent également bénéficier des avantages qu’ils ont acquis lorsqu’ils travaillaient et résidaient à l’étranger, conformément aux accords bilatéraux en matière de sécurité sociale conclus avec certains pays. En ce qui concerne la couverture sociale des travailleurs migrants algériens dans les pays où celle-ci fait défaut, il y a lieu d’indiquer que l’Algérie n’est pas un pays riche et que le Gouvernement ne peut donc pas se permettre d’accorder une telle couverture à ses ressortissants à l’étranger. Toutefois, ceux dont la rémunération est suffisamment élevée peuvent souscrire une police d’assurance privée.

48.M. Jazaïry confirme que le Ministère du travail est bien représenté au Comité intersectoriel de suivi.

49.M. Saadi (Algérie), répondant à une question relative à la distinction entre migrants en situation irrégulière et réfugiés, dit que pour déterminer la qualité de réfugié des migrants, le Gouvernement applique les procédures et critères établis par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

50.M me  Driss (Algérie) dit que les enfants migrants accompagnés par leurs parents ont les mêmes droitsque les enfants de ressortissants algériens, y compris en matière de santé et d’éducation.

51.La législation adoptée en 2009 prévoit des sanctions sévères à l’encontre des auteurs de la traite d’êtres humains. Les victimes de la traite et du trafic illicite de migrants se voient accorder une pleine protection en application de la loi algérienne.

52.M. Saadi (Algérie) ajoute qu’il n’y a pas de centres spécialement consacrés aux victimes de la traite mais que celles-ci peuvent être hébergées et aidées par les centres pour les femmes et enfants en situation de détresse ou de risque gérés par le Gouvernement ou des organisations de la société civile.

53.M. Jazaïry (Algérie) dit que les migrants qui font l’objet d’une mesure d’expulsion sont tenus de se présenter chaque jour aux autorités jusqu’à ce que la procédure d’expulsion soit menée à son terme, mais qu’ils ne sont pas placés dans des centres de rétention.

54.M. Kaci (Algérie), répondant à une question sur la lutte contre la migration clandestine à travers le Sahara algérien, dit que les autorités algériennes ont intensifié leurs mesures de contrôle aux frontières dans cette région désertique auxquelles elles consacrent d’importants moyens humains et financiers. Un bureau central de lutte contre l’immigration clandestine a été créé et des patrouilles spéciales ont été déployées dans les régions frontalières. Des comités binationaux de coopération transfrontière ont été créés avec le Niger et le Mali pour favoriser le partage d’informations sur l’immigration clandestine et la collaboration des autorités aux fins du démantèlement des réseaux de trafic illicite de migrants.

55.M. Jazaïry (Algérie) dit que l’État partie ne dispose pas de mécanismes spéciaux visant à informer les migrants de leurs droits conventionnels, mis à part les journaux, l’Internet, le Journal officiel et autres médias de ce type. Toute suggestion du Comité concernant d’autres moyens de faire connaître le contenu de la Convention serait la bienvenue.

56.M me  Driss (Algérie) dit que la ratification de conventions internationales par l’Algérie fait toujours l’objet d’une couverture médiatique et que des conférences, séminaires et tables rondes sur les droits de l’homme sont régulièrement organisés lors des journées internationales des droits de l’homme, notamment la Journée internationale des migrants.

57.M. Kaci (Algérie) dit qu’en décembre 2009, le Gouvernement a célébré, en partenariat avec la société civile, la Journée internationale des migrants, lors de laquelle la Convention a été largement diffusée. Cet événement a fait l’objet d’une importante couverture médiatique.

58.M me  Driss (Algérie) dit que la formation de base dispensée aux juges comporte des cours sur les instruments relatifs aux droits de l’homme et les recours qui peuvent être intentés par ceux dont les droits ont été violés. Le Ministère de la justice offre une formation continue sur la protection et la promotion des droits de l’homme aux juges et autres fonctionnaires chargés de l’application des lois. En 2009, lors de la Journée des droits de l’homme, le Ministère de la justice a publié une brochure expliquant le contenu de toutes les conventions relatives aux droits de l’homme auxquelles l’Algérie est partie; cette brochure a été distribuée aux juges et autres auxiliaires de justice. À ce jour, la Convention n’a pas été directement appliquée par les tribunaux algériens et les autorités administratives, mais d’autres instruments internationaux, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politique, y ont été invoqués.

59.M. Jazaïry (Algérie) dit que la société civile a participé à l’élaboration du rapport initial de l’État partie par l’intermédiaire de ses représentants au Conseil consultatif des droits de l’homme.

60.M. Kaci (Algérie), répondant à la question sur le mariage entre migrants sans papiers et algériens, dit que les étrangers n’ont pas le droit de se marier en Algérie, sauf s’ils sont en situation régulière. Le fait de contracter mariage avec un Algérien ne permet donc pas à un migrant sans papiers de régulariser sa situation.

61.M. Saadi (Algérie) dit que l’Algérie vient de confirmer que l’article 42 de la loi de finance ne concerne nullement les biens des travailleurs migrants présents en Algérie. Cet article concerne les biens dont sont par exemple propriétaires les entreprises laissées vacantes ou abandonnées en Algérie. La loi de finance prévoit que ces biens peuvent être revendiqués par l’État.

62.M. Jazaïry (Algérie) dit que son gouvernement n’est peut-être pas parvenu à une application parfaite de la Convention; il est toutefois fermement déterminé à faire en sorte que les droits de l’homme de toutes les personnes résidant en Algérie, qu’elles aient ou non la nationalité algérienne, soient respectés. Il faut espérer que les Algériens qui travaillent ou vivent à l’étranger soient aussi bien traités que les ressortissants étrangers en Algérie, et que les autres pays − en particulier certains pays occidentaux où les migrants algériens sont victimes d’une discrimination de vaste envergure − ratifieront la Convention et respecteront ses dispositions aussi strictement que le Gouvernement algérien.

63.M me  Poussi Konsimbo (Rapporteuse pour l’Algérie) fait observer que l’Algérie est un pays d’origine, de transit et de destination pour les migrants, et que la question des migrations y est posée à différents égards. Il ne fait pas de doute que le Gouvernement a déployé d’importants efforts pour mettre ses lois en conformité avec la Convention. Mme Poussi Konsimbo est convaincue que le dialogue avec le Comité permettra à l’Algérie d’améliorer à la fois sa législation et ses pratiques à l’égard des travailleurs migrants, ainsi que la protection de leurs droits. Plusieurs questions appellent une attention particulière de la part de l’État partie. L’une d’entre elles est la prolifération de réseaux de trafic illicite de migrants dans la région du Sahara. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour endiguer ce phénomène. Il devrait également faire des efforts pour améliorer ses systèmes de collecte de données sur les migrants et les victimes de la traite. À cet égard, la proposition visant à créer un observatoire des flux migratoires dans la région méditerranéenne devrait être suivie d’effet. Enfin, l’Algérie devrait redoubler d’efforts pour informer les travailleurs migrants en Algérie et les migrants algériens à l’étranger sur leurs droits au titre de la Convention et de la législation algérienne.

64.Le Président dit que le Comité a ainsi achevé l’examen du rapport initial de l’État partie. Il remercie la délégation de ses réponses écrites à la liste des points à traiter et des précisions complémentaires données au cours du dialogue, notamment l’information sur la manière dont la Convention et la législation relative aux travailleurs migrants sont appliquées dans la pratique. Ce dialogue a mis en relief les succès enregistrés par l’État partie dans l’application de la Convention, mais également les défis auxquels il reste confronté. Il a également mis en évidence le rôle important de l’Algérie dans la coopération régionale en matière de migrations. Cette coopération est essentielle parce qu’aucun État ne peut gérer les flux migratoires seul. Le Président encourage l’État partie à promouvoir la Convention dans les forums régionaux et internationaux, en particulier dans les pays qui accueillent des travailleurs migrants algériens.

La partie publique de la séance prend fin à 12 h 35.