Observations finales sur le quatrième rapport periodique de l’Albanie

Additif

* La version originale du présent document n’a pas été revue par les services d’édition.

Renseignements reçus de l’Albanie au sujet de la suite données aux observations finales *

[Date de réception : 27 janvier 2019]

Informations communiquées par les institutions albanaises sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations énoncées aux paragraphes 13 b) et d) et 23 a) et d)

13 b) Prendre des mesures pour renforcer la capacité de la Commission de l’aide judiciaire du Ministère de la justice à fournir une aide juridictionnelle primaire et secondaire, notamment en mettant en place des cabinets locaux d’aide juridictionnelle

Jusqu’en juin 2018, une aide juridictionnelle gratuite était fournie par l’État en vertu de la loi no 10039/ du 22 décembre 2008 sur l’aide juridictionnelle. Au cours de la période à l’étude, une nouvelle loi sur l’aide juridictionnelle a été approuvée et la loi sur la violence à l’égard des femmes et la violence domestique a été modifiée. Les institutions albanaises sont résolues à assurer une aide juridictionnelle gratuite aux femmes victimes de violences. Dans l’intervalle, quelques cabinets d’aide juridictionnelle ont été mis en place avec l’aide de la société civile et d’organisations internationales.

Pendant la période 2016-2017, et entre janvier et mai 2018, 1 844 personnes ont fait appel à la Commission de l’aide judiciaire, à savoir :

•2016 : 613 cas ; 2017 : 828 cas ; janvier- juin 2018 : 403 cas. Au total, 1 658 de ces demandes ont été approuvées ;

•528 cas en 2016 ; 771 en 2017 ; 359 demandes de janvier à mai 2018 ;

•Parmi ces affaires, 456 étaient d’ordre pénal (111 en 2016 ; 213 en 2017 ; 132 de janvier à juin 2018) ;

•1 080 étaient d’ordre civil (393 en 2016 ; 495 en 2017 ; 192 de janvier à mai 2018) ;

•122 étaient d’ordre administratif (24 en 2016 ; 63 en 2017 ; 35 de janvier à mai 2018).

Les institutions nationales de défense des droits de l’homme ont soumis des affaires à la Commission de l’aide judiciaire. Au cours de la période 2016-2017, la Défenseuse du peuple a renvoyé devant la Commission 45 requêtes émanant de diverses sources. Elle a recommandé au Ministère de la justice d’augmenter le budget de la Commission de l’aide judiciaire afin qu’un plus grand nombre de personnes puissent bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite.

Le 4 décembre 2017, l’Assemblée de la République d’Albanie a approuvé une résolution sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles et l’amélioration de l’efficacité des dispositifs juridiques de prévention, et a mis en place le sous-comité parlementaire permanent pour l’égalité des sexes et la prévention de la violence à l’égard des femmes.

Le 14 décembre 2017, l’Assemblée de la République d’Albanie a adopté la loi no 111/2017 sur l’aide judiciaire garantie par l’État, qui est entrée en vigueur le 1er juin 2018. L’adoption de cette loi s’est inscrite dans le cadre de la réforme en cours de l’appareil judiciaire et vise à améliorer l’accès à la justice des personnes qui connaissent des difficultés économiques et de certaines catégories de la population, notamment les groupes défavorisés. Les femmes et les enfants victimes de violences domestiques et sexuelles et de la traite bénéficieront à la fois du nouveau régime d’accès à une aide judiciaire gratuite et de l’élargissement des mesures de protection applicables aux victimes de la criminalité, prévus par la nouvelle loi sur l’aide judiciaire gratuite et des modifications apportées au Code de procédure pénale (juillet 2017). Des campagnes de sensibilisation ont été organisées pour lutter contre les stéréotypes sexistes qui perpétuent la violence et pour informer les femmes des services disponibles.

La loi définit les formes, les conditions, les procédures et les règles de l’organisation et de l’administration de l’aide judiciaire garantie par l’État, en garantissant à tous les individus un accès égal à la justice, une aide judiciaire professionnelle de qualité, efficace et efficiente, et en veillant au bon fonctionnement des institutions nationales chargées d’administrer l’aide juridictionnelle. La loi protège également les ressortissants étrangers, les apatrides et les demandeurs d’asile.

La nouveauté de cette loi tient à l’exonération des personnes qui bénéficient d’une aide juridictionnelle secondaire pour le règlement des frais de justice et le paiement anticipé des frais afférents à l’exécution des jugements (art. 25).

Cette loi désigne les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle garantie par l’État, quels que soient leurs revenus et leurs biens, qui sont expressément les victimes de la violence domestique, de sévices sexuels et de la traite d’êtres humains, mais qui comprennent également d’autres catégories, comme par exemple les enfants maltraités et les jeunes en conflit avec la loi, les personnes qui reçoivent une aide sociale, les personnes privées de la capacité juridique d’agir et les victimes de comportements discriminatoires.

Le Défenseur du peuple a recommandé au Ministre de la justice et au comité parlementaire des affaires juridiques, de l’administration publique et des droits de l’homme d’inclure les victimes de la discrimination parmi les bénéficiaires de ce droit juridique, conformément aux recommandations de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI).

La loi prévoit une aide juridictionnelle primaire, qui devrait être assurée par des personnes ayant une formation spéciale, des ONG autorisées, des cabinets juridiques dans les établissements d’enseignement supérieur, mais aussi une aide juridictionnelle secondaire, qui devrait être assurée par des juristes inscrits sur la liste agréée par la Chambre des avocats. La requête d’une personne qui souhaite bénéficier d’une aide juridictionnelle secondaire doit être rédigée conformément au formulaire approuvé par le Ministre de la justice.

Les institutions chargées de mettre en application la loi no 111/2017 sont les suivantes : le Ministère de la justice, les avocats qui sont inscrits au répertoire de l’aide judiciaire gratuite de la Chambre des avocats et les tribunaux compétents. L’article 36 de la loi prévoit la cessation de l’activité de la Commission de l’aide judiciaire de l’État et l’établissement du répertoire des avocats chargés d’assurer l’aide judiciaire gratuite dont la loi prévoit la mise en place.

Le Gouvernement albanais a entrepris l’élaboration d’une série de textes juridiques qui permettront la mise en application de cette loi, qui devrait avoir pour effet d’accroître sensiblement le nombre des femmes victimes de la violence qui seront en mesure de bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite.

Mise en place de centres d’aide juridictionnelle primaire

Des centres d’aide juridictionnelle primaire seront mis en place dans un délai de trois mois après la création de la direction de l’aide juridictionnelle gratuite. Quelques-uns ont déjà été créés avec l’appui d’organisations internationales et d’organisations de la société civile. Le Défenseur du peuple s’inquiète du fait qu’il n’existe toujours pas de budgétisation à cet égard et appelle l’attention sur l’obligation juridique, pour la direction de l’aide juridictionnelle gratuite, de coopérer avec les cabinets d’aide juridictionnelle conformément aux conditions et aux critères fixés par les accords de coopération relatifs à la formation et à l’amélioration des connaissances des étudiants qui participent à ces cabinets pour les questions liées à l’aide juridictionnelle primaire.

Entre septembre et décembre 2017, avec l’appui de Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), quatre cabinets pilotes ont été mis en place dans les locaux des tribunaux de district de Tirana, Durrës, Fier et Lezha. Ces cabinets ont reçu 168 demandes d’aide juridique (90 femmes et 78 hommes). Celui de Tirana a entrepris l’examen de ces demandes dès le début novembre 2017.

Le Bureau de coordination de la lutte contre la violence domestique, qui a commencé à opérer en mars 2018, a été créé au sein du Ministère de l’intérieur et se compose de représentants du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la justice et du Ministère de la santé et de la protection sociale. Les services qu’il offre sont notamment les suivants : accueil des femmes et autres victimes de la violence, communication précise des problèmes aux institutions responsables, conseils juridiques, coordination entre les institutions et les structures concernées aux niveaux central et local en vue de la prestation d’un appui juridique, social et psychologique. Entre mars et juin 2018, le représentant de la Direction nationale des services sociaux a traité trois affaires de violence domestique, six autres concernaient les procédures à suivre pour la prestation d’une aide juridique aux services sociaux et les services sociaux eux-mêmes. Le Bureau a saisi la police de neuf affaires qui appelaient une décision de justice.

Avec le soutien de la Open Society Foundation pour l’Albanie, trois cabinets d’aide juridictionnelle ont été mis en place (à l’Université Aleksander Moisiu de Durrës et dans les établissements d’enseignement Ismail Qemali de Vlora et de Shkodra). Cette fondation a également apporté son appui à la création du bureau d’aide juridique au sein du Ministère de la justice. De nombreuses organisations fournissent gratuitement une aide juridictionnelle. Avec l’appui de l’Union européenne et d’ONU-Femmes pour l’Albanie, un réseau d’organisations de la société civile a été constitué pour la surveillance de la violence fondée sur le genre ; il se compose de 46 membres (représentants d’organisations de la société civile et membres du réseau à Tirana, Durrës, Elbasan, Peshkopia, Pogradec, Vlora, Saranda). Ce réseau a pour mission de traiter officiellement des affaires de violence et d’engager des poursuites contre leurs auteurs, mais aussi de mener une action de plaidoyer, d’organiser diverses formations sur la violence fondée sur le genre et la violence domestique, et de constituer une base de données qualitatives et quantitatives sur les comportements relatifs à l’égalité des sexes et à la violence fondée sur le genre .

13 d) Renverser la charge de la preuve en faveur des plaignantes dans les cas présumés de discrimination fondée sur le sexe ou le genre

Au cours de l’examen du quatrième rapport périodique, en 2016, la délégation albanaise a signalé à l’attention du Comité que les modifications récemment apportées au Code du travail avaient transféré la charge de la preuve de la plaignante au défendeur dans les cas de litiges sur le lieu de travail.

Un nouveau Code de procédure administrative (loi 44/2015) a été approuvé par l’Assemblée de la République d’Albanie le 30 avril 2015 et a pris effet le 28 mai 2016. Un élément important en est la disposition qui renverse la charge de la preuve dans les cas de discrimination (art. 82/ 2). Le ministère public devrait être guidé par les principes d’égalité et de non-discrimination pour les questions visées par la loi, notamment le genre et l’identité sexuelle.

À cet égard, le Commissaire pour la protection contre la discrimination a recommandé d’une part au Ministère de la justice d’inclure les principes d’égalité et de non-discrimination et d’autre part au Comité parlementaire chargé des affaires juridiques, de l’administration publique et des droits de l’homme de renverser la charge de la preuve dans les cas présumés de discrimination. Ces recommandations ont été pleinement prises en compte dans le Code de procédure administrative.

En 2014, le Commissaire avait recommandé d’apporter au Code de procédure civile des modifications au sujet du déplacement de la charge de la preuve dans les cas de discrimination qui n’ont pas été prises en considération dans les amendements apportés à la loi no 38/2017. Les autorités albanaises ont fait valoir que la loi no 10221 sur la protection contre la discrimination, en date du 4 février 2010, qui prévoyait le transfert ou le partage de la charge de la preuve lorsque le tribunal est saisi d’une affaire de discrimination, l’élargissement de son application au secteur privé, le Code de procédure administrative et les récents amendements apportés au Code du travail, avaient déjà eu pour effet d’introduire la répartition de la charge de la preuve dans les affaires de discrimination dans le secteur public.

23 a) Prendre des mesures pour encourager les femmes à signaler les cas de violence fondée sur le genre en leur fournissant une aide juridictionnelle gratuite, notamment dans les zones rurales et les zones reculées, et en mettant en place une ligne téléphonique ouverte 24 heures sur 24

La tolérance zéro face à la violence à l’égard des femmes et à la violence domestique est la devise du Gouvernement albanais. Le 23 juillet 2018, à l’issue d’un long processus de consultations, la loi no 9669 du 18 décembre 2006, sur les mesures à prendre pour lutter contre la violence dans les relations familiales, a été modifiée afin de garantir sa compatibilité avec la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et avec la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), et afin de tenir compte des besoins, des lacunes et des enseignements mis en lumière par sa mise en œuvre. Ces modifications portaient sur les questions suivantes : prévention et réduction des cas de violence domestique, élaboration du projet d’ordonnance de protection en cas d’urgence et appel à un psychologue qui serait chargé d’établir un rapport lorsque la police est saisie d’une affaire, ce qui aurait notamment pour effet d’accroître l’efficacité et la collaboration des structures concernées et de renforcer le soutien judiciaire conditionnel pour les victimes de la violence familiale.

Le Gouvernement albanais a adopté la loi no 22/2018 sur les logements sociaux, qui prévoit la mise en œuvre de programmes de construction de logements sociaux. Cette loi prévoit d’attribuer en priorité des logements sociaux aux victimes de la violence domestique, aux victimes de la traite d’êtres humains et aux victimes potentielles de cette traite.

23.La stratégie nationale sur l’égalité des sexes et le Plan d’action pour la période 2016-2020 comportent des objectifs précis, accompagnés d’indicateurs de suivi, et des budgets détaillés pour chaque activité. L’un des objectifs stratégiques porte sur la réduction de la violence fondée sur le genre et de la violence domestique.

24.La Police nationale a mis en place une ligne téléphonique pour tous les appels d’urgence (129 ou 11), qui fonctionne 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Au cours de la période à l’étude, 7 182 appels relatifs à des cas de violence domestique ont été enregistrés, soit 3 567 appels en 2016, 2 463 appels en 2017 et 2 607 appels en 2018.

Le 2 février 2017, la ligne de conseil (116-117) a commencé à fonctionner ; elle offre gratuitement un service primaire de soutien psychologique et émotionnel, des conseils et une aide pour le traitement de la violence dans des conditions de sécurité et de confidentialité. Par la décision no 430, du 8 juin 2016, le Conseil des ministres a adopté des normes nationales en matière de conseils aux victimes de la violence domestique. Pendant l’année 2017, cette ligne gratuite a reçu 1 489 appels et assuré 636 séances de soutien psychologique. La plupart des appels concernent des demandes de renseignements sur un soutien économique, ou sur l’emploi. Les cas ont un caractère émotionnel (835), physique (506), économique (390), ou relèvent de la violence sexuelle (6). Les cas de violence sexuelle sont encore parmi ceux qui le plus souvent ne sont pas signalés. La plupart d’entre eux sont transmis à la police (201).

Le Gouvernement a pris des mesures et collabore avec la société civile pour mettre au point des programmes à l’intention des délinquants. Le programme qui s’adresse aux hommes et aux garçons est à l’étude, même si, dans les cas de violence à l’égard des femmes, les coupables sont principalement le mari, le partenaire, le père ou un autre membre de la famille de la victime. Les programmes à l’intention des délinquants ont été multipliés dans le pays. À ce stade, la permanence téléphonique de conseil destinée aux hommes et aux garçons, qui est gérée par une organisation non gouvernementale, a permis de traiter les cas d’environ 200 délinquants.

Données sur la violence à l’égard des femmes et la violence domestique

Au cours de la période 2016-2018 sur laquelle porte le rapport, une augmentation des affaires signalées et traitées, notamment pour ce qui est de la violence domestique, a été mise en évidence. Voici les données fournies par la Police nationale :

•Au cours de la période 2016-2018, un total de 13 661 cas de violence domestique ont été signalés : 4 163 cas en 2016, 4 547 cas en 2017, 4 951 cas en 2018 ;

•6 187 ordonnances de protection en cas d’urgence et ordonnances de protection ont été prononcées – 7 837 femmes et jeunes filles ont été reconnues victimes de violences ;

•2016 : 2 207 procédures engagées pour des ordonnances de protection en cas d’urgence et des ordonnances de protection ; 2017 : 2 593 procédures ont été engagées à cette fin ; 2018 : 3 037 procédures ont été engagées à cette fin ;

•Nombre d’épouses victimes de violence : 3 934 au total, soit 1 532 en 2016, 1 627 en 2017, et 775 entre janvier et juin 2018 ;

•En 2017, des informations ont été communiquées aux procureurs en vue de l’ouverture de poursuites pénales dans 1950 affaires de violence et autres délits commis dans le cadre des relations familiales, soit 56 procédures de moins qu’en 2016 ;

•S’agissant de l’article 130 a), 1412 cas ont été signalés, soit 76 cas (5,1 %) de moins qu’en 2016. Un total de 855 délinquants ont été arrêtés. Un total de 1 684 personnes ont été arrêtées au motif de violence domestique : 742 en 2016, 654 en 2017, et 288 entre janvier et juin 2018 ;

•13 056 femmes ont été victimes de délits/infractions de caractère pénal, et 36 d’entre elles (femmes/jeunes filles) ont perdu la vie ;

•28 femmes/jeunes filles parmi celles qui ont été tuées l’ont été par des membres de la famille, dont 19 par leur conjoint (9 en 2016, 6 en 2017, et 4 entre janvier et juin 2018) ;

•Pendant l’année 2017, le nombre d’homicides a reculé de 18,75 % par rapport à l’année 2016.

D’après le Bureau du Procureur général, s’agissant de l’infraction pénale de « violence domestique » telle que visée à l’article 130 a) du Code pénal, le nombre de procédures pénales enregistrées a été le suivant :

•Année 2016 – 1 355 procédures pénales, soit une augmentation de 12,4 % par rapport à l’année 2015 ;

•Année 2017 – 1 310 procédures pénales, soit une diminution de 3,3 % par rapport à l’année précédente (2016) ;

•Année 2018 – 901 procédures pénales.

Le Bureau du Procureur a saisi les tribunaux de plus de 79 % des affaires pénales. Selon les données disponibles :

•En 2016 – 1 157 procédures pénales ont donné lieu à un procès, et 1 099 des accusés (sur 1 238) ont été condamnés par une décision de justice ;

•En 2017 – 1 057 procédures pénales ont donné lieu à un procès, et 982 accusés (sur 1 104) ont été condamnés par une décision de justice.

Pendant les neuf premiers mois de 2018, 625 procédures pénales ont été engagées, et 569 accusés (sur 669) ont été condamnés par une décision de justice.

L’Institut national de statistique (INSTAT) a publié un document intitulé « Les hommes et les femmes en Albanie en 2018 », qui donne des données ventilées par sexe pour chaque secteur de la justice, de la police, du Bureau du Procureur, du Ministère de la justice, du service des probations et des prisons :

•Le district de Tirana connaît le plus fort pourcentage de femmes victimes de violence domestique, avec 35,8 % ; il est suivi par la région de Durres, où ce pourcentage atteint 13,9 %;

•Les régions de Kukes et de Dibra ont le plus faible pourcentage, avec respectivement 0,5 % et 1,9 % de femmes victimes de violences ;

•En 2017, on a dénombré 94 victimes de violence domestique (36 garçons et 58 filles) ;

•Les homicides parmi les personnes ayant des liens de parenté représentaient 22,5 % des homicides intentionnels en 2016 et 26 % en 2017 ;

•Au cours de la période 2016-2017, sur les 2 813 auteurs présumés de ces actes (sur un ensemble de 3 093 délinquants), 280 étaient des femmes.

Mécanisme de lutte contre la violence domestique au niveau local

Un système d’enregistrement en ligne pour la saisie de données statistiques sur la violence domestique au niveau local est opérationnel. Ce système national de données sur les cas de violence domestique au niveau local (REVALB) est utilisé par 22 municipalités. Dans chaque municipalité, des coordonnateurs locaux recueillent des données sur les affaires de violences qui sont traitées par le mécanisme d’orientation pour le traitement des cas de violence domestique au niveau local. Le système enregistre chaque cas de violence reconnu et traité par le mécanisme d’orientation local. Depuis l’entrée en service de ce système, 2 649 cas de violence domestique ont été enregistrés, soit 861 en 2016 et 758 en 2017. Ce système prend en considération les données démographiques, économiques, sociales et géographiques relatives aux victimes et aux auteurs de violences. Ces données sont ventilées notamment en fonction des critères suivants : auteurs de violences, victimes de viol, groupes vulnérables, ethnie, genre, emploi et handicap.

Au cours de la période 2016-2018, dans 60 (sur 61) des municipalités considérées, des responsables de l’égalité des sexes ont été désignés pour jouer le rôle de coordonnateurs locaux dans la lutte contre la violence domestique. Cela a contribué à accroître les capacités du mécanisme d’orientation au niveau local. Une approche multidisciplinaire, rapide et efficace n’en reste pas moins nécessaire afin de sensibiliser les services des autorités nationales et locales à la budgétisation des priorités relatives à l’égalité des sexes dans les demandes de moyens de financement qui permettraient d’assurer des services sociaux aux victimes de la violence domestique.

À l’occasion de la Journée internationale contre la violence domestique, le 25 novembre 2017, le Bureau de la coordination de la lutte contre la violence domestique a été créé au sein du Ministère de la justice avec pour mission de prévenir la violence domestique et de protéger les victimes de cette violence.

Il existe 6 centres privés d’hébergement (2 à Tirana, 1 à Berat, 1 à Korca, 1 à Elbasan, 1 à Vlora). Le centre « Vatra », à Vlora, est en partie financé par le budget de l’État. En décembre 2018, un centre de gestion de crise destiné aux victimes de violences sexuelles, « Lilium », a été ouvert dans les locaux du centre hospitalier « Mère Teresa » de l’hôpital de l’Université de Tirana. Ce centre assure 24 heures sur 24 et sept jours sur sept des services intégrés aux victimes de violences sexuelles grâce à une équipe multidisciplinaire. Les normes de fonctionnement de ce centre ont été approuvées en novembre 2018 par une instruction du Ministre de la santé et de la protection sociale.

Surveillance des centres nationaux d’hébergement pour les victimes de la violence. En 2017, le Défenseur du peuple a autorisé la surveillance du Centre national pour le traitement des victimes de la violence domestique à Kamza, et celle du centre psycho-social Vatra à Vlora, et a recommandé d’apporter aux victimes une aide professionnelle (avocats et psychologues) de manière continue.

Suivi des victimes après leur sortie du centre. Pendant le processus d’intégration de tous les résidents qui bénéficient d’une ordonnance de protection, les services administratifs, tout comme le commissariat de police local, sont tenus informés.

Des activités de sensibilisation sont organisées chaque année par le Ministère de la santé et de la protection sociale pendant les 16 journées de mobilisation contre la violence fondée sur le genre et la violence domestique (25 novembre-10 décembre), en étroite collaboration avec les ministères compétents, des organisations de la société civile et des organisations internationales. Ces activités périodiques de lutte contre la violence domestique ont contribué à sensibiliser le public, notamment en éveillant les jeunes, les étudiants et les écoliers à la nécessité de lutter contre les préjugés et de multiplier les dénonciations de la violence domestique.

Au nombre des résultats de cette campagne figurent une sensibilisation à la problématique femmes-hommes, un débat plus ouvert et une plus grande facilité à aborder des sujets tabous, un plus grand nombre de dénonciations des cas de violence domestique aux structures d’appui par des femmes, une évolution des comportements traditionnels et une augmentation du nombre de cas de violence à l’égard des femmes et de violence domestique signalés aux services chargés de l’application des lois. Ces campagnes de sensibilisation visent à éliminer les stéréotypes sexistes, la violence fondée sur le genre et la violence domestique.

23 d) Faire encore mieux respecter les décisions des tribunaux, en particulier les ordonnances de protection ou de protection en cas d’urgence des femmes victimes de violences fondées sur le genre , notamment en renforçant les capacités des membres du personnel judiciaire, tels que les huissiers de justice

Il ressort du rapport du Conseil supérieur de la justice sur les questions judiciaires liées à la violence domestique de janvier 2018 qu’un faible nombre de cas de violence à l’égard des femmes font l’objet d’une procédure d’appel devant des instances supérieures, tandis qu’un nombre élevé de ces cas sont classés sans suite. Le rejet de ces affaires en raison de l’absence de la plaignante ou de sa décision d’abandonner les poursuites comme conséquence de la normalisation des relations entre les parties est un sujet de préoccupation.

Au cours de la période sur laquelle porte le présent rapport, 6 187 décisions de justice sur l’émission d’une ordonnance de protection ou de protection en cas d’urgence n’ont pas été respectées, à savoir :

•119 en 2016 ;

•129 en 2017 ;

•148 en 2018.

Pendant les années 2016 et 2017, et entre janvier et juillet 2018, la Direction générale des huissiers de justice a enregistré et exécuté 351 ordonnances de protection (84 en 2016, 201 en 2017, et 66 entre janvier et juin 2018) et 89 ordonnances de protection en cas d’urgence (toutes entre janvier et juillet 2018). Par ailleurs, 23 ordonnances de protection sont en cours d’exécution.

Afin d’améliorer la qualité de l’exécution des ordonnances judiciaires, des huissiers supplémentaires devront être recrutés et il sera nécessaire de prévoir des formations dans certains domaines, mais principalement en ce qui concerne les questions liées aux ordonnances de protection et aux ordonnances de protection en cas d’urgence.

Le Ministère de la santé et de la protection sociale, avec le soutien du PNUD, a organisé quatre stages de formation sur l’informatisation des données et l’utilisation du système en ligne relatif à la violence domestique à l’intention de 58 coordonnateurs locaux de la lutte contre la violence. Plusieurs activités de renforcement des capacités ont été organisées à l’intention du personnel du dispositif d’orientation.

Un poste de spécialiste de la diversité a été créé au sein de la Direction générale de la Police nationale. Environ 36 cours de formation ont été organisés et ont été suivis par 750 officiers de police dans 12 comtés. En 2017, sept formations portant sur la diversité, les crimes motivés par la haine et la violence domestique ont été organisées (139 policiers en ont bénéficié). La Police nationale a régulièrement organisé des formations (8 sessions) pour tout le personnel de direction sur le thème de la problématique femmes-hommes dans la police ; ces formations ont été suivies par 69 officiers supérieurs, y compris des membres de la direction du service de protection des témoins et des collaborateurs de la justice (47 employés).

Au cours de la période étudiée, des formations sur les questions relatives à la violence et au cadre institutionnel de protection contre la discrimination ont régulièrement été organisées par l’École de la magistrature à l’intention des juges et des procureurs ; 90 personnes les ont suivies, soit 58 juges et 32 procureurs.