Observations finales concernant le sixième rapport périodique de l’Azerbaïdjan *

Le Comité a examiné le sixième rapport périodique de l’Azerbaïdjan (CEDAW/C/AZE/6) à ses 1885e et 1886e séances (voir CEDAW/C/SR.1885 et CEDAW/C/SR.1886), le 16 juin 2022. La liste de points et de questions soulevées par le groupe de travail de présession figure dans le document publié sous la cote CEDAW/C/AZE/Q/6, et les réponses de l’Azerbaïdjan dans le document publié sous la cote CEDAW/C/AZE/RQ/6.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’État partie. En outre, il le remercie pour son rapport de suivi sur les précédentes observations finales du Comité (CEDAW/C/AZE/CO/5) et pour ses réponses écrites à la liste de points et de questions soulevés par le groupe de travail de présession. Il remercie également l’État partie pour l’exposé oral de sa délégation et les éclaircissements complémentaires donnés en réponse aux questions que le Comité a posées oralement au cours du dialogue.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir constitué une délégation multisectorielle, qui était menée par la Présidente du Comité d’État pour la famille, les femmes et les enfants, Bahar Muradova, et comprenait des représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la santé, du Ministère de l’éducation, du Ministère de l’économie, du Ministère du travail et de la protection sociale de la population, du Ministère de la jeunesse et des sports, du Ministère de l’agriculture, du Ministère de la justice, du Comité d’État des statistiques et de la Mission permanente de l’Azerbaïdjan auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis depuis l’examen, en 2015, du précédent rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/AZE/5) en matière de réformes législatives, en particulier l’adoption des textes suivants :

a)Décret no 71 sur l’élimination de la sélection prénatale en fonction du sexe du fœtus (2020) ;

b)Décret no500 sur le Programme d’État pour le développement socioéconomique des régions de l’Azerbaïdjan, prévoyant des mesures expressément destinées à améliorer le développement des petites entreprises appartenant à des femmes et à renforcer la formation professionnelle (2019) ;

c)Ordonnance no 602 sur la stratégie pour l’emploi pour la période 2019-2030 visant à promouvoir l’emploi inclusif et à réduire le chômage des femmes (2018).

Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et stratégique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des genres, notamment l’adoption des textes suivants :

a)Plan d’action national de prévention de la violence domestique pour la période 2020-2023 (adopté en 2020) ;

b)Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes pour la période 2020-2024 (adopté en 2020) ;

c)Plan d’action national de prévention de la sélection prénatale en fonction du sexedu fœtus pour la période 2020-2025 (adopté en 2020).

Le Comité se félicite que durant la période écoulée depuis l’examen du rapport précédent, l’État partie ait ratifié (en 2019) la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite du soutien apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et préconise le respect de l’égalité des genres en droit (de jure ) et dans les faits ( de facto ), conformément aux dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il souligne l’importance de l’objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d’égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il encourage vivement l’État partie à reconnaître le rôle moteur joué par les femmes dans le développement durable du pays et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s’agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite l’Assemblée nationale, dans le cadre de son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Cadre législatif

Le Comité note avec préoccupation que l’État partie préfère les politiques et programmes neutres du point de vue du genre, ce qui risque d’aboutir à une protection insuffisante des femmes contre la discrimination et à une approche fragmentée de la reconnaissance et de l’application des droits fondamentaux des femmes et d’entraver la réalisation de l’égalité formelle et réelle entre les femmes et les hommes. Le Comité s’inquiète également du fait que ni la Constitution ni la loi relative à l’égalité des genres ne couvrent la discrimination tant directe qu’indirecte dont les femmes font l’objet dans les sphères privée et publique. Il constate également avec préoccupation que la Convention (voir A/65/38, deuxième partie, annexe VI) n’a pas été directement appliquée ou invoquée dans des procédures judiciaires, malgré les dispositions constitutionnelles (art. 148 II) et 151) prévoyant la primauté des traités internationaux sur la législation nationale.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) d ’ adopter, selon un calendrier précis, un ensemble de lois qui interdise la discrimination à l ’ égard des femmes et qui englobe la discrimination directe et indirecte, exercée dans la sphère publique comme dans la sphère privée, ainsi que les formes de discrimination croisée, conformément aux articles premier et 2 de la Convention, à la recommandation générale n o 28 (2010) sur les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention et à la cible 5.1 associée aux objectifs de développement durable (Mettre fin, partout dans le monde, à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et des filles)  ;

b) de renforcer les moyens dont disposent les membres de l’appareil judiciaire et les professionnels du droit pour appliquer et utiliser directement la Convention dans les procédures judiciaires et interpréter la législation nationale à la lumière de la Convention.

Accès à la justice

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie dans le cadre du Programme d’État pour le développement du système judiciaire pour la période 2019-2023. Il prend toutefois note avec préoccupation des obstacles qui continuent d’entraver l’accès des femmes et des filles à la justice, notamment la connaissance limitée que celles-ci ont de leurs droits et des recours disponibles pour les faire valoir, les moyens restreints dont disposent les membres du système judiciaire et des forces de l’ordre pour appliquer la Convention, et la persistance de stéréotypes de genre chez les magistrats.

Rappelant sa recommandation générale n o 33 (2015) sur l’accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l’État partie de s’attaquer aux obstacles qui entravent l’accès des femmes et des filles à la justice, notamment  :

a) d ’ organiser des formations judiciaires et des campagnes de sensibilisation visant à éliminer les préjugés et les stéréotypes liés au genre qui persistent chez les magistrats, les policiers et les autres représentants de la loi  ;

b) de renforcer les efforts de sensibilisation des femmes et des filles, notamment de celles qui vivent dans des zones rurales ou appartiennent à des groupes défavorisés comme les femmes déplacées à l ’ intérieur du pays, les femmes handicapées et les femmes âgées, pour qu ’ elles soient informées des recours juridiques qui leur sont ouverts pour dénoncer les violations de leurs droits  ;

c) de sensibiliser les chefs religieux et communautaires à la nécessité de mettre un terme à la stigmatisation des femmes qui demandent justice  ;

d) de garantir l ’ accès de toutes les femmes, en particulier des victimes de violences domestiques, indépendamment de leur niveau de revenu, à une aide juridictionnelle gratuite.

Les femmes et la paix et la sécurité, et les femmes déplacées à l’intérieurdu pays

Le Comité note qu’un grand nombre de femmes et de filles ont été touchées par le conflit du Haut-Karabakh, qui a duré trois décennies et s’est conclu par un accord de paix le 9 novembre 2020. Il s’inquiète de la situation des femmes et des filles, en particulier de celles qui sont déplacées à l’intérieur du pays, qui ont un accès limité à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé, au logement et à la protection contre la violence fondée sur le genre. Il salue la volonté de l’État partie d’appliquer la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, ainsi que les résolutions ultérieures sur le sujet. Il note néanmoins avec préoccupation que le projet de plan d’action national pour l’application de la résolution 1325 (2000) n’a toujours pas été adopté. Il note également avec préoccupation que les femmes ne sont pas pleinement associées aux processus de relèvement d’après-conflit. Il est également préoccupé par l’insuffisance de la participation des organisations internationales à la reconstruction après le conflit.

Le Comité souligne que la participation effective et inclusive des femmes à toutes les étapes des processus de paix et de reconstruction est importante pour garantir que les priorités des femmes et leur expérience du conflit sont pleinement prises en considération, comme le prévoient la Convention et la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, de manière à assurer une paix durable. Rappelant sa recommandation générale n o 30 (2013) sur les femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d’après-conflit, il recommande à l’État partie d’accélérer la finalisation et l’adoption de son projet de plan d’action national pour l’application de la résolution 1325 (2000) sur les femmes et la paix et la sécurité, en coopération avec les représentantes et représentants des organisations de femmes de la société civile, en veillant à  :

a) prendre en considération l ’ ensemble des priorités définies par le Conseil de sécurité en ce qui concerne les femmes et la paix et la sécurité, telles qu ’ elles ressortent des résolutions 1325 (2000) , 1820 (2008) , 1888 (2009) , 1889 (2009) , 1960 (2010) , 2106 (2013) , 2122 (2013) , 2242 (2015) , 2467 (2019) et 2493 (2019)  ;

b) adopter un modèle d ’ égalité réelle qui vise à combattre la violence fondée sur le genre et la discrimination à l ’ égard des femmes dans toutes les dimensions de leur vie, y compris les formes de discrimination croisée à l ’ égard des femmes, en particulier des veuves et des femmes déplacées ou réfugiées  ;

c) garantir la participation effective et inclusive des femmes de divers horizons, y compris des femmes appartenant aux minorités ethniques et des femmes déplacées, à toutes les étapes du processus de paix et à toutes les initiatives de reconstruction, en particulier en ce qui concerne l’application du plan d’action national  ;

d) prévoir un budget tenant compte des questions de genre, définir des indicateurs visant à assurer le suivi régulier de sa mise en œuvre et intégrer des mécanismes de responsabilisation  ;

e) prendre en compte la coopération et l ’ assistance technique des organisations internationales ainsi que leur appui au renforcement des capacités afin d’accélérer le processus de relèvement après le conflit et associer pleinement les femmes au processus.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité prend note des efforts déployés par le Comité d’État pour la famille, les femmes et les enfants aux fins de la promotion des femmes. Toutefois, il note avec préoccupation :

a)que le Comité d’État pour la famille, les femmes et les enfants n’a pas été élevé au rang de ministère, ce qui réduit sa capacité de garantir l’application effective des politiques d’égalité des genres et la prise en considération des questions de genre par tous les services gouvernementaux ;

b)que les plans d’action en la matière, en particulier le projet de plan d’action national sur l’égalité des genres pour la période 2022-2025, n’ont pas encore été définitivement établis ou dotés de ressources suffisantes et que les critères de référence et les calendriers correspondants n’ont pas encore été établis ;

c)qu’aucune information n’a été fournie au sujet des mécanismes de coopération intersectorielle et de l’organisation hiérarchique du mécanisme national, notamment en ce qui concernait les coordonnateurs et coordinatrices pour les questions de genre au niveau local ;

d)que les fonctionnaires ne suivent pas de formation portant expressément sur les droits des femmes et l’égalité des genres qui leur permettrait d’améliorer leur connaissance des questions de genre ;

e)que le mécanisme national de promotion des femmes coopère peu avec la société civile, en particulier dans les zones rurales.

Rappelant sa recommandation générale n o 6 (1988) sur les mécanismes nationaux et la publicité efficaces et les orientations fournies dans la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, en particulier en ce qui concerne les conditions nécessaires au bon fonctionnement des mécanismes nationaux, le Comité renouvelle ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 15) et recommande à l’État partie  :

a) d ’ élever le Comité d ’ État pour la famille, les femmes et les enfants au rang de ministère, en lui confiant un mandat clairement défini et en le dotant de ressources humaines, techniques et financières suffisantes  ;

b) d ’ adopter sans plus tarder le projet de plan d ’ action national sur l ’ égalité des genres pour la période 2022-2025 et d ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à sa mise en application, en veillant notamment à ce que la budgétisation tienne compte des questions de genre  ;

c) d ’ assurer une coordination efficace entre les coordonnateurs et coordinatrices pour les questions de genre de tous les ministères et services gouvernementaux et de définir clairement leurs mandats et responsabilités en ce qui concerne l ’ application de la législation et des politiques relatives à l ’ égalité des genres  ;

d) de dispenser systématiquement une formation sur les droits des femmes et l ’ égalité des genres aux fonctionnaires lors de leur prise de fonctions initiale, d ’ organiser périodiquement des cours de perfectionnement à leur intention et de suivre les progrès réalisés dans la prise en compte des questions de genre dans tous les secteurs  ;

e) de renforcer la coopération du mécanisme national de promotion des femmes avec les organisations de défense des droits des femmes et d’abroger la loi sur les organisations non gouvernementales (2014) qui empêche les organisations de femmes de recevoir une aide financière de l’étranger.

Institution nationale pour la promotion et la protection des droits humains

Le Comité note avec préoccupation que la Commission nationale des droits de l’homme a été rétrogradée au statut B par l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme en 2018.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer le Bureau de la Médiatrice en lui allouant des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour qu’il puisse s’acquitter de son mandat de manière efficace et en toute indépendance, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il lui recommande également de soutenir le Bureau dans l’application des recommandations du Sous-Comité d’accréditation de l’Alliance mondiale et de solliciter l’assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pour ce faire.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité note avec préoccupation que le caractère non discriminatoire de l’application de mesures temporaires spéciales, y compris de quotas, dans le secteur public comme dans le secteur privé, et le rôle important que jouent ces mesures dans l’accélération de l’instauration d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes, en particulier pour les femmes des zones rurales, les femmes et les filles déplacées, les femmes handicapées et les femmes âgées, sont mal compris dans l’État partie.

Invoquant le paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales et rappelant ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 19), le Comité recommande à l’État partie  :

a) de solliciter l ’ assistance technique régionale ou internationale pour faire mieux comprendre l ’ objet des mesures temporaires spéciales aux agents de l ’ État, aux parlementaires, aux décideurs, aux employeurs et au grand public  ;

b) d ’ adopter des mesures temporaires spéciales dans tous les domaines couverts par la Convention où les femmes sont sous-représentées ou désavantagées, dans le secteur public comme dans le secteur privé, et en particulier au niveau de la prise de décisions, à titre de stratégie d ’ accélération de l ’ instauration de l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes, en accordant une attention particulière aux femmes des zones rurales, aux femmes et aux filles déplacées, aux femmes handicapées et aux femmes âgées, et de fixer des objectifs assortis de délais  ;

c) de mettre en place des mécanismes pour suivre l ’ application des mesures temporaires spéciales et évaluer leurs effets sur l ’ instauration de l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes, et de réprimer le non-respect de ces mesures par des sanctions adéquates  ;

d) de collecter systématiquement des données sur les effets des mesures spéciales temporaires et de les faire figurer dans son prochain rapport périodique.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité prend note de l’adoption en 2020 du décret no 71, par lequel le plan d’action de prévention de la sélection prénatale en fonction du sexe du fœtus pour la période 2020-2025 a été approuvé. Il reste toutefois préoccupé par la pratique généralisée de l’avortement basé sur le genre du fœtus. Il est également préoccupé par :

a)la persistance des attitudes patriarcales et des stéréotypes discriminatoires concernant le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, qui font que les femmes sont essentiellement considérées comme des mères et des aidantes et qui continuent d’entraver les progrès en matière d’égalité des genres ;

b)l’absence de stratégie globale visant à lutter contre les stéréotypes de genre discriminatoires et le fait que les professionnels des médias et les agents de l’État ne sont pas formés à l’emploi d’un langage inclusif ;

c)le fait que les supports d’enseignement, les publicités et les médias continuent de véhiculer des stéréotypes de genre discriminatoires et des représentations stéréotypées des femmes.

Le Comité renouvelle ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 21) et recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ appliquer le décret récemment adopté et le plan d ’ action national de prévention de la sélection prénatale en fonction du sexe du fœtus afin de mettre fin à la pratique de l ’ avortement basé sur le genre du fœtus  ;

b) d ’ élaborer et d ’ appliquer une stratégie globale et des programmes porteurs de transformation en matière de genre, y compris en ligne, à l ’ intention des chefs communautaires, des chefs religieux, des enseignants, des filles, des garçons, des femmes et des hommes, pour éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, et d ’ établir un ensemble de cibles et d ’ indicateurs permettant d ’ évaluer de manière systématique les effets des mesures stratégiques adoptées  ;

c) de renforcer les capacités des professionnels des médias et des agents de l ’ État en ce qui concerne l ’ utilisation d ’ un langage inclusif de manière à lutter contre les stéréotypes de genre discriminatoires et la chosification des femmes, et de promouvoir dans les médias des représentations valorisantes des femmes en tant qu ’ actrices du développement  ;

d) de prendre des mesures ciblées, y compris des mesures de sensibilisation, pour promouvoir le partage égal des tâches domestiques et parentales ainsi que la paternité responsable, et d’accélérer l’adoption du projet de modification du Code du travail prévoyant un congé de paternité rémunéré de quatorze jours.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité prend note de la création en 2020 d’une ligne nationale d’assistance pour les victimes de violence domestique. Il demeure toutefois préoccupé par le grand nombre de cas de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre enregistré dans l’État partie, et notamment par la forte augmentation des cas de violence domestique constatée pendant le confinement lié à la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19). Il note avec préoccupation :

a)que la loi sur la prévention de la violence domestique (2010) ne donne pas de définition juridique de la violence domestique et que le Code pénal (2000) ne contient pas de dispositions incriminant expressément les différentes formes de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, y compris la violence domestique ;

b)qu’il n’existe pas de dispositions de droit pénal incriminant expressément toutes les formes de violence fondée sur le genre, en particulier la violence psychologique, et que les femmes et les filles exposées à des formes de discrimination croisée , notamment les femmes et les filles appartenant à des minorités religieuses ou ethniques, les femmes et les filles handicapées et les femmes déplacées, ne sont pas suffisamment protégées contre la violence fondée sur le genre ;

c)que, dans les affaires de violence domestique, la priorité est donnée aux procédures obligatoires de conciliation et de médiation et que le recours à l’article 7.4 de la loi sur la prévention de la violence domestique, qui porte sur le devoir de l’État d’« aider à la normalisation des relations entre les parties et à la reprise de la vie de famille », favorise l’impunité des auteurs de violences ;

d)que les ordonnances de protection sont peu et mal appliquées, malgré les dispositions de la loi sur la prévention de la violence domestique, que les auteurs de violence ne font pas l’objet d’ordonnances d’expulsion, que les services de soutien aux victimes font défaut et que les femmes et les filles ont des difficultés à accéder à la justice dans les affaires de violence fondée sur le genre et courent un risque de revictimisation pendant la procédure pénale.

Rappelant sa recommandation générale n o 35 (2017) sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de sa recommandation générale n o  19, le Comité recommande à l’État partie  :

a) de modifier le Code pénal, le Code de procédure pénale et la loi sur la prévention de la violence domestique de manière que toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, y compris la violence domestique, soient expressément incriminées, puissent faire d ’ office l ’ objet de poursuites et donnent lieu à des sanctions adéquates  ;

b) de modifier la loi sur la prévention de la violence domestique afin de définir la violence domestique et de prendre en compte les besoins de protection particuliers des groupes de femmes défavorisées ou marginalisées, notamment des femmes handicapées, des migrantes et des femmes déplacées  ;

c) d ’ abroger l ’ article 7.4 de la loi sur la prévention de la violence domestique et de privilégier les procédures pénales plutôt que les mesures obligatoires de médiation et de conciliation  ;

d) de veiller à ce que, dans les affaires de violence domestique, des ordonnances de protection, y compris, selon les cas, des ordonnances d ’ expulsion, soient rapidement et effectivement émises et appliquées et à ce qu ’ un suivi soit assuré, et d ’ imposer des sanctions adéquates et dissuasives en cas de non-respect de ces ordonnances  ;

e) d ’ encourager le signalement de toutes les formes de violence fondée sur le genre à l ’ égard des femmes et des filles, y compris la violence domestique et sexuelle, et de veiller à ce que tous les cas fassent l’objet d’une enquête, que les auteurs soient poursuivis d’office et sanctionnés de manière appropriée et que les agents de police qui découragent les victimes de porter plainte ou qui décident de ne rien faire soient tenus pour responsables  ;

f) de garantir l ’ accès des femmes et des filles à la justice, y compris au moyen d ’ aménagements procéduraux raisonnables, et d ’ encourager le signalement des cas de violence fondée sur le genre aux autorités responsables de l ’ application des lois, notamment en proposant à moindre coût et, si nécessaire, gratuitement, l ’ assistance d ’ un avocat ou d ’ une avocate  ; d ’ alléger la charge de la preuve pour les plaignantes  ; de permettre un accès abordable aux preuves scientifiques  ; de continuer à renforcer les capacités des juges, des procureurs, des policiers et des autres représentants de la loi en ce qui concerne les méthodes d ’ enquête et d ’ interrogatoire tenant compte du genre  ;

g) de renforcer les services de soutien aux victimes et la protection des victimes, notamment en mettant en place une ligne d ’ assistance téléphonique ouverte 24 heures sur 24, et en mettant à la disposition des victimes, sur l ’ ensemble du territoire, des foyers d ’ hébergement adaptés et accessibles, des traitements médicaux, un accompagnement psychosocial et une aide financière  ;

h) de mieux sensibiliser le grand public au caractère criminel de toutes les formes de violence fondée sur le genre, y compris la violence domestique et la violence sexuelle, et à la nécessité pour les femmes de pouvoir signaler les cas aux autorités responsables de l ’ application des lois sans crainte de représailles, de stigmatisation et de revictimisation  ;

i) de sensibiliser le grand public et les représentants de la loi à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (2011).

Traite des femmes et exploitation de la prostitution

Le Comité se félicite de l’adoption du plan d’action national de lutte contre la traite des personnes pour la période 2020-2024, de l’élaboration des règles (indicateurs) pour le repérage des victimes de la traite des personnes et de la création du Centre de soins pour les victimes de la traite dans le cadre du service d’aide sociale du Ministère du travail et de la protection sociale de la population. Il note toutefois avec préoccupation que l’État partie reste un pays d’origine, de transit et de destination pour la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle et d’exploitation par le travail. Il note également avec préoccupation :

a)que la mise en œuvre du plan national de lutte contre la traite des personnes pour la période 2020-2024 se heurte à des obstacles ;

b)qu’il n’existe pas de suivi indépendant des mesures prises pour combattre la traite au niveau national, ni de mécanisme national solide pour l’orientation des victimes ;

c)que l’État partie se repose sur les organisations non gouvernementales pour les services d’hébergement ;

d)qu’aucune mesure n’est prise pour réduire la demande de rapports sexuels rémunérés et qu’on manque de données sur la traite des femmes et des filles en provenance, à l’intérieur et à destination de l’État partie ;

e)qu’il n’existe pas de programmes d’aide aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

Rappelant sa recommandation générale n o 38 (2020) sur la traite des femmes et des filles dans le contexte des migrations internationales et ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 25), le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) d ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes aux fins de l ’ application et du suivi efficaces du plan d ’ action national de lutte contre la traite des personnes  ;

b) d ’ établir un bureau du rapporteur national indépendant sur la traite des êtres humains afin d ’ assurer la séparation des fonctions de contrôle et des fonctions d ’ exécution de manière à permettre une évaluation objective de la mise en œuvre de la législation et des politiques relatives à la lutte contre la traite  ;

c) d ’ établir un mécanisme national solide pour l ’ orientation des victimes de la traite afin de les repérer, de les prendre en charge, de leur allouer des fonds, de mettre à leur disposition des voies de recours et de leur donner accès comme il se doit à des services de soutien, y compris des centres d ’ hébergement, des services d ’ accompagnement et des programmes de réinsertion, et de financer de manière adéquate les organisations non gouvernementales qui gèrent des refuges et fournissent des services de soutien aux victimes ou de leur accorder des subventions pour les coûts liés aux locaux et aux services collectifs  ;

d) de veiller à ce que tous les cas de traite de femmes et de filles fassent l ’ objet d ’ enquêtes et donnent lieu à des poursuites, à ce que les auteurs soient dûment punis et à ce que les trafiquants condamnés purgent leur peine  ;

e) d ’ assurer la collecte et l ’ analyse systématiques de données sur la traite, ventilées par âge, sexe et nationalité des victimes et par forme de traite  ;

f) de mener des campagnes de sensibilisation au risque de traite et de donner aux femmes et aux filles migrantes et aux femmes déplacées accès à des activités rémunératrices, à un soutien financier, à une aide juridique, à des lignes d ’ assistance téléphonique et à des informations préalables à leur départ  ;

g) d ’ abroger les dispositions légales qui font des femmes qui se prostituent des délinquantes, d ’ incriminer l ’ exploitation sexuelle des femmes, y compris la demande de rapports sexuels rémunérés, de mettre en place des mesures d ’ éducation et de sensibilisation auprès du grand public, en particulier des hommes et des garçons, et de lutter contre toutes les formes de subordination et de chosification des femmes  ;

h) de proposer des programmes de soutien et des activités génératrices de revenus aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

Participation à la vie politique et à la vie publique

Le Comité note avec satisfaction que, aux élections municipales de décembre 2019, le nombre de femmes élues a sensiblement augmenté (38,8 %). Toutefois, il reste préoccupé par le fait que les femmes restent sous-représentées aux postes de décision, notamment à l’Assemblée nationale, dans les universités, dans l’appareil judiciaire, dans la fonction publique et dans le corps diplomatique. Il est également préoccupé par le manque de mesures ciblées, notamment de mesures temporaires spéciales visant à accroître la représentation des femmes dans la vie publique, dans l’esprit de sa recommandation générale no 23 (1997) sur la participation des femmes à la vie politique et publique.

Rappelant sa recommandation générale n o 23, le Comité recommande à l’État partie  :

a) de modifier sa loi électorale pour introduire des mesures ciblées, y compris, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o 25, des mesures temporaires spéciales telles que l ’ augmentation des quotas et le financement ciblé des campagnes électorales, afin d ’ accroître la représentation des femmes à tous les niveaux de l ’ administration, à l ’ Assemblée nationale, dans l ’ appareil judiciaire, dans les universités et dans le corps diplomatique, en particulier aux niveaux décisionnels  ;

b) d ’ adopter des mesures visant à combattre les attitudes négatives et les comportements discriminatoires à l ’ égard des femmes en politique, y compris par des campagnes de sensibilisation et d ’ éducation dans les écoles, à l ’ Assemblée nationale et auprès du grand public  ;

c) de mettre en place un recrutement préférentiel au profit des femmes dans la fonction publique et dans le corps diplomatique, en accordant une attention particulière aux femmes appartenant à des groupes défavorisés ou marginalisés  ;

d) de renforcer les capacités des femmes politiques et des candidates dans les domaines de la conduite des campagnes politiques, du leadership et de la négociation, et, en collaboration avec les médias, de sensibiliser les dirigeants politiques, les professionnels des médias, les chefs religieux et communautaires et le grand public à l ’ importance de la participation pleine, indépendante et démocratique des femmes, dans des conditions d ’ égalité avec les hommes, à la vie politique et publique, afin de garantir le plein exercice des droits humains des femmes et de promouvoir la stabilité politique et le développement durable dans l ’ État partie  ;

e) de former les femmes cadres et dirigeantes du secteur privé en vue de renforcer leurs compétences, et de travailler avec les entités du secteur privé pour qu ’ elles comprennent l’importance de la participation des femmes aux postes de direction dans des conditions d’égalité avec les hommes.

Éducation

Le Comité note avec satisfaction l’augmentation de la représentation des femmes (51 %) dans les programmes d’études universitaires supérieures et les postes d’enseignement dans le domaine des sciences, et l’introduction de cours sur les études de genre dans les universités et les établissements de formation du personnel enseignant. Il note également que l’État partie couvre les frais de scolarité des personnes présentant certains handicaps et des orphelins. Il est toutefois préoccupé par la persistance de la ségrégation horizontale et verticale des femmes et des filles dans l’éducation, qui s’est aggravée pendant la pandémie de COVID-19, notamment en ce qui concerne :

a)les taux élevés d’abandon des filles dans l’enseignement secondaire, imputables aux grossesses précoces et aux mariages d’enfants ainsi qu’à la préférence accordée à la scolarisation des garçons ;

b)la persistance des stéréotypes liés au genre dans le système éducatif et l’absence d’éducation sexuelle adaptée à l’âge ;

c)la concentration des femmes et des filles dans des domaines d’études traditionnellement dominés par les femmes et leur sous-représentation dans les domaines de la science, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques et des technologies de l’information et de la communication, ce qui réduit leurs perspectives d’emploi ;

d)l’utilisation limitée d’un langage inclusif dans les manuels scolaires et les supports pédagogiques, à tous les niveaux d’enseignement ;

e)la sous-représentation des femmes au niveau décisionnel dans le système éducatif (en 2020, seuls 16 % des recteurs étaient des femmes) et la diminution des publications de femmes universitaires pendant la pandémie en raison de la part excessive de tâches et de soins domestiques qu’elles assumaient ;

f)les difficultés d’accès des filles aux écoles dans les zones rurales et reculées, le manque d’infrastructures scolaires adéquates et l’absence d’éducation aux droits humains et à la paix dans les programmes scolaires.

Rappelant sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l’éducation et ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 29), le Comité recommande à l’État partie  :

a) de veiller à la scolarisation des filles à tous les niveaux d ’ enseignement, notamment en menant des campagnes d ’ information auprès des parents et des chefs religieux et communautaires sur l ’ importance de l ’ éducation des filles aux fins de leur autonomisation et en apportant aux familles à faibles revenus un soutien financier pour couvrir les coûts directs et indirects de l ’ éducation  ;

b) de s ’ attaquer aux causes de l ’ abandon scolaire chez les filles, notamment les mariages d ’ enfants, les mariages forcés et les grossesses précoces, et de veiller à ce que les jeunes mères puissent retourner à l ’ école après l ’ accouchement, en vue de terminer leur scolarité, d ’ obtenir un diplôme et d ’ accéder à l ’ enseignement supérieur ou au marché du travail  ;

c) d ’ intégrer dans les programmes scolaires  :

i) des contenus inclusifs et accessibles sur l’égalité des genres, notamment sur les droits des femmes, les femmes influentes dans la vie publique et les effets néfastes des stéréotypes sexistes et de la violence fondée sur le genre à l’égard des femmes et des filles  ;

ii) une éducation sexuelle adaptée à l’âge à tous les niveaux d’enseignement, portant en particulier sur le comportement sexuel responsable et la prévention des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles  ;

iii) l’éducation aux droits humains et à la paix  ;

d) de dispenser une formation sur les droits des femmes et l ’ égalité des genres au personnel enseignant à tous les niveaux du système éducatif et de réexaminer les manuels scolaires, les programmes et le matériel pédagogique en vue d ’ éliminer tous les stéréotypes discriminatoires liés au genre  ;

e) de prendre des mesures concertées, notamment des mesures temporaires spéciales, pour encourager les femmes et les filles à choisir des disciplines scolaires et des parcours professionnels non traditionnels, tels que les sciences, la technologie, l’ingénierie, les mathématiques et les technologies de l’information et de la communication, en mettant par exemple à leur disposition des services d’orientation, des bourses et des subventions destinées à couvrir les frais de scolarité indirects, et de faire en sorte que tous les domaines d’études et d’emploi soient ouverts aux femmes et aux filles.

Emploi

Le Comité note avec satisfaction la modification de la loi sur les pensions de retraite, qui harmonise l’âge de la retraite pour les femmes et les hommes à 65 ans. Il note également que, dans le cadre du Programme d’État pour le développement socioéconomique des régions de l’Azerbaïdjan, des mesures ont été adoptées pour promouvoir l’emploi des femmes dans l’économie formelle. Il observe toutefois avec préoccupation :

a)que 204 professions resteront interdites aux femmes à la suite des modifications qu’il est prévu d’apporter au paragraphe 2 de l’article 241 du Code du travail, lequel répertorie actuellement 674 professions interdites aux femmes dans certains secteurs d’activité ;

b)qu’il existe encore un important écart de rémunération entre les femmes et les hommes (63,3 % du salaire mensuel moyen des hommes en 2020), une ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail ainsi que des obstacles à l’accès des femmes à des postes de direction, à des emplois mieux rémunérés et à des postes décisionnels ;

c)que les possibilités de conciliation entre vie professionnelle et vie familiale sont inexistantes et que les efforts consentis pour garantir et favoriser un partage égal entre les femmes et les hommes des tâches domestiques et des responsabilités relatives à l’éducation des enfants, en particulier en période de pandémie de COVID-19, sont insuffisants ;

d)que les femmes continuent de faire l’objet d’une discrimination institutionnelle, malgré les garanties de protection de la maternité prévues par le Code du travail ;

e)que l’activité professionnelle des femmes se concentre dans le secteur non structuré de l’économie et dans les emplois faiblement rémunérés, souvent dans des conditions d’exploitation et sans accès à la protection du travail et à la protection sociale, en particulier depuis la pandémie ;

f)que le Code des infractions administratives ne réprime pas le harcèlement sexuel exercé sur le lieu de travail, bien que le harcèlement sexuel soit interdit par la loi sur l’égalité des genres (2006) ;

g)que les femmes qui font partie de groupes défavorisés ou marginalisés, notamment les femmes appartenant à des minorités ethniques, les femmes déplacées, les migrantes et les femmes handicapées, ont un accès limité à des emplois décents.

Le Comité rappelle que les progrès en matière d’emploi devraient aller de pair avec l’autonomisation des femmes et l’égalité au travail et recommande à l’État partie de recentrer sa politique de l’emploi sur l’égalité des genres et de veiller à ce qu’elle soit fondée sur des résultats, des indicateurs mesurables, des partenariats avec le secteur privé et des possibilités de formation professionnelle dans tous les domaines, notamment les secteurs innovants tels que celui des technologies de l’information et des communications. Il rappelle également ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/AZE/CO/5 , par. 31) et recommande à l ’ État partie  :

a) de supprimer la liste des professions déconseillées aux femmes, qui limite l ’ accès de ces dernières à certaines catégories d ’ emplois, de permettre aux femmes d ’ accéder plus facilement à ces professions et de veiller à ce que les restrictions soient proportionnées et s ’ appliquent au cas par cas et non pas de manière générale à toutes les femmes  ;

b) de prendre des mesures ciblées pour promouvoir l ’ accès des femmes à l ’ emploi formel, notamment à des postes de direction et à des emplois mieux rémunérés dans les professions traditionnellement dominées par les hommes, en proposant des formations professionnelles, en offrant des incitations pour le recrutement préférentiel des femmes, en améliorant la qualité des services de garde d ’ enfants et d ’ éducation préscolaire dans les zones urbaines et rurales et en augmentant le nombre de places, et en adoptant des mesures visant à atténuer l ’ impact de la pandémie de COVID-19 sur l ’ emploi des femmes  ;

c) d ’ adopter et d ’ appliquer un ensemble de lois et de règlements destinés à garantir l ’ application du principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, de revoir périodiquement les salaires dans les secteurs où les femmes sont surreprésentées et de prendre des mesures visant à combler l ’ écart de rémunération entre les femmes et les hommes, notamment par l ’ adoption de méthodes analytiques de classification et d ’ évaluation des emplois qui soient neutres du point de vue du genre, et par la réalisation d ’ enquêtes régulières sur les salaires  ;

d) de garantir la protection de la maternité pour les femmes travaillant dans le secteur non structuré de l ’ économie, de faciliter le retour au travail des jeunes mères, de promouvoir le partage équitable des responsabilités domestiques et parentales entre les hommes et les femmes, notamment en généralisant le congé de paternité, et d ’ adopter des dispositions spécifiques concernant la responsabilité de l ’ employeur en cas de discrimination à l ’ égard des femmes en matière d ’ évolution de carrière, de recrutement, d ’ avancement et de formation professionnelle  ;

e) d ’ adopter une législation interdisant expressément le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, de veiller à ce que les victimes aient la garantie d ’ accéder à des recours effectifs et de faire en sorte que les plaintes pour harcèlement sexuel fassent l ’ objet d ’ enquêtes efficaces, que les auteurs soient poursuivis et dûment sanctionnés et que les victimes soient protégées contre les représailles  ;

f) d ’ améliorer l ’ accès aux possibilités d ’ emploi et de formation pour les groupes de femmes défavorisées ou marginalisées, comme les femmes appartenant à des minorités ethniques, les femmes déplacées, les migrantes et les femmes handicapées  ;

g) de ratifier la Convention de 2019 sur la violence et le harcèlement (n o 190) de l’Organisation internationale du Travail.

Santé

Le Comité note avec préoccupation :

a)que ni le projet de loi sur la protection de la santé procréative de la population et la planification familiale ni le nouveau cycle de la stratégie nationale relative à la santé procréative n’ont encore été adoptés ;

b)que les femmes ont un accès limité au système de santé, en raison du sous-développement du régime d’assurance maladie, et qu’elles subissent de manière disproportionnée les effets de la pandémie de COVID-19 ;

c)que l’avortement demeure l’une des principales formes de régulation des naissances, que l’accès des femmes et des filles à des contraceptifs modernes et abordables, en particulier dans les zones rurales, reste limité et que les adolescentes se heurtent à des difficultés lorsqu’elles souhaitent avoir des informations sur la santé sexuelle et procréative et les droits connexes ;

d)que les avortements basés sur le genre du fœtus sont nombreux, comme en témoigne la distorsion du rapport de masculinité des nouveau-nés (114 garçons pour 100 filles) ;

e)que le taux de mortalité maternelle est élevé (15,8 pour 100 000 naissances vivantes en 2020) et qu’il l’est encore davantage parmi les femmes des zones urbaines et les femmes déplacées ;

f)que le nombre de grossesses précoces est élevé, en raison des mariages forcés et précoces, que les programmes scolaires ne prévoient pas un enseignement obligatoire adapté à l’âge sur la santé sexuelle et procréative et les droits connexes et que la formation des enseignants fait défaut dans ce domaine ;

g)que les services de santé mentale accessibles aux femmes, en particulier aux femmes déplacées, sont insuffisants et que cette situation s’est aggravée avec la pandémie de COVID-19.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé et recommande à l’État partie  :

a) d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur la protection de la santé procréative de la population et la planification familiale, ainsi que l ’ approbation du nouveau cycle de la stratégie nationale relative à la santé procréative  ;

b) d ’ augmenter le budget alloué aux soins de santé et d ’ instaurer la couverture médicale universelle obligatoire afin de garantir à toutes les femmes et les filles, en particulier aux femmes rurales et à celles qui appartiennent à des groupes défavorisés ou marginalisés, l ’ accès à des services de santé abordables  ;

c) d ’ adopter des mesures visant à garantir pour les femmes et les filles, y compris les groupes de femmes défavorisées ou marginalisées, les femmes rurales et les femmes déplacées, la disponibilité et l ’ accessibilité de contraceptifs modernes à un coût abordable  ;

d) d ’ éliminer la pratique des avortements résultant de la détermination prénatale du sexe du fœtus  ;

e) de s ’ attaquer aux causes de la mortalité maternelle, en particulier celle des femmes déplacées, en garantissant l ’ accès aux soins obstétriques et en augmentant le nombre d ’ accoucheurs qualifiés  ;

f) de renforcer l ’ accès des femmes et des filles à des soins de santé adaptés et abordables en faisant en sorte qu ’ il y ait un nombre suffisant d ’ établissements de santé dotés d ’ un personnel dûment formé, y compris dans les zones rurales et reculées  ;

g) d ’ intégrer dans les programmes scolaires un enseignement obligatoire, adapté à l ’ âge et inclusif, sur la santé sexuelle et procréative et les droits connexes, y compris sur les méthodes contraceptives modernes, la prévention des infections sexuellement transmissibles et les risques liés à un avortement non sécurisé  ;

h) d ’ adopter des mesures pour garantir la disponibilité et la qualité de services de santé mentale accessibles dans les zones urbaines comme dans les zones rurales.

Avantages économiques et sociaux

Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour renforcer la position des femmes dans le secteur privé. Cependant, il est préoccupé par le fait qu’au cours de la période 2012-2017, seuls 4,5 % des prêts octroyés par le Fonds national d’aide à l’entrepreneuriat ont été accordés à des femmes. Il est également préoccupé par :

a)la charge de travail disproportionnée assumée par les femmes en matière de tâches et de soins domestiques non rémunérés, qui s’est encore alourdie pendant la pandémie de COVID-19 ;

b)le taux de pauvreté disproportionné chez les femmes, en particulier les femmes rurales, les femmes chefs de famille monoparentale et les femmes assurant des soins domestiques non rémunérés ;

c)l’absence de mesures visant à adopter une protection sociale minimale tenant compte de la dimension de genre, conformément aux normes fixées par l’Organisation internationale du Travail, et le manque de coordination et de suivi des programmes de protection sociale, notamment en ce qui concerne l’autonomisation sociale et économique des femmes ;

d)la concentration d’entrepreneuses dans les secteurs à faible profit, tels que le commerce de gros et de détail et l’agriculture, et dans l’entrepreneuriat à domicile.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de renforcer les politiques et les stratégies porteuses de transformations de sorte à réduire la charge de travail domestique non rémunéré qui pèse sur les femmes, en particulier les femmes rurales, de faciliter l ’ accès à des services publics de bonne qualité et abordables tenant compte de la dimension de genre, notamment dans les domaines de la santé, de l ’ éducation, de la garde d ’ enfants, des transports, de l ’ eau, de l ’ utilisation des terres, du logement et de l ’ énergie et de produire des données sur le travail domestique non rémunéré et de le monétiser, afin qu ’ il puisse être reconnu et indemnisé  ;

b) de lutter contre la féminisation de la pauvreté, notamment en revoyant les régimes discriminatoires de retraite et de sécurité sociale, par la prise en compte de toutes les interruptions survenant dans le parcours professionnel des femmes lorsqu ’ elles se consacrent à l ’ éducation des enfants ou assurent des soins et des travaux domestiques non rémunérés  ;

c) de mettre en place des incitations et des mesures ciblées, notamment des subventions pour la facilitation du commerce, des dispositifs de pépinière d’entreprises, des services d’inclusion financière et d’autres mesures de stimulation, afin de promouvoir l’entrepreneuriat des femmes, d’élargir leurs perspectives économiques et de prendre en compte leur participation à la vie économique de l’État partie.

Femmes rurales

Le Comité note les efforts faits par l’État partie pour soutenir le développement social et économique des femmes rurales, notamment avec la création en 2019 de l’Association des femmes rurales d’Azerbaïdjan, couvrant 16 régions de l’État partie. Il reste toutefois préoccupé par le fait que les femmes et les filles vivant en milieu rural ont un accès limité aux services de base, à la terre, à l’éducation, aux possibilités d’emploi et aux soins de santé. Il s’inquiète également de l’absence de prise en compte de la dimension de genre dans les politiques agricoles et de la sous-représentation des femmes rurales aux postes de décision et de direction.

Le Comité recommande à l’État partie de lutter contre la pauvreté qui touche les femmes rurales en leur garantissant l’accès à l’éducation, à l’eau potable et à l’assainissement, à l’emploi dans le secteur structuré, à des prêts à faible taux d’intérêt sans garantie et à d’autres formes de crédit financier pour les entreprises agricoles, ainsi qu’à la propriété et à l’exploitation foncières. Il recommande également à l’État partie de prendre en compte la dimension de genre dans ses politiques agricoles et de veiller à ce que les femmes rurales accèdent sur un pied d’égalité aux prises de décision concernant les politiques agricoles et aux postes de direction.

Groupes de femmes défavorisées et marginalisées

Le Comité reste préoccupé par le fait que les femmes âgées, les femmes et les filles handicapées, les femmes et les filles appartenant à des groupes ethniques minoritaires ainsi que les femmes et les filles déplacées, réfugiées, demandeuses d’asile ou migrantes continuent de subir des formes croisées et aggravées de discrimination dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures ciblées, notamment des mesures temporaires spéciales, afin que les groupes de femmes défavorisées, telles que les femmes âgées, les femmes handicapées, les femmes appartenant à des groupes ethniques minoritaires ainsi que les réfugiées, les demandeuses d’asile et les migrantes aient accès à la justice, à l’emploi et aux soins de santé, notamment aux services de santé sexuelle et procréative, à la protection sociale et à la sécurité alimentaire, en tenant compte de leurs besoins spécifiques.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité note avec préoccupation :

a)que le nombre de mariages d’enfants est élevé, bien que l’âge minimum du mariage soit fixé à 18 ans pour les femmes et les hommes ;

b)que les femmes mariées par une cérémonie religieuse (kabin) sans enregistrement du mariage civil ne bénéficient pas de la protection conférée par le Code de la famille et sont démunies en cas de dissolution du mariage ;

c)que la pratique répandue du simple mariage religieux (kabin) donne lieu à un nombre important d’enfants nés hors mariage civil, qui ne bénéficient pas de la protection du Code de la famille et qui n’ont pas droit à une pension alimentaire lors de la dissolution du mariage de leurs parents ;

d)que la pratique consistant à ne pas enregistrer officiellement les biens, y compris les parcelles de terrain, a pour conséquence de priver les femmes de toute propriété immobilière qu’elles ont acquise pendant le mariage et de toute protection économique en cas de dissolution du mariage.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) de réviser le Code de la famille de manière à supprimer toutes les exceptions à l ’ âge minimum légal du mariage, fixé à 18 ans pour les femmes comme pour les hommes, et de poursuivre ses efforts pour lutter contre les mariages d ’ enfants et les mariages forcés, en particulier dans les zones rurales, notamment en s ’ attaquant aux causes profondes de cette pratique néfaste, en encourageant son signalement, en sanctionnant les membres de la famille, les chefs religieux ou communautaires et les agents de la force publique qui s ’ en rendraient complices, en mettant en place des mécanismes qui permettent de repérer ces cas et en veillant à ce que les responsables soient poursuivis et dûment punis, conformément à sa recommandation générale n o 31 et à l ’ observation générale n o 18 du Comité des droits de l ’ enfant sur les pratiques préjudiciables, adoptées conjointement (2019)  ;

b) de veiller à ce que les mariages religieux ne puissent être célébrés qu ’ après leur enregistrement civil et de protéger les droits des femmes dans le cas de la dissolution des mariages religieux et coutumiers, conformément à sa recommandation générale n o  29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, et des liens familiaux et de leur dissolution  ;

c) de veiller à ce que dans le mariage et les rapports familiaux et dans le cas de leur dissolution, les femmes et les hommes aient les mêmes droits et responsabilités, y compris les mêmes droits parentaux, quelle que soit leur situation matrimoniale, et les mêmes droits de choisir un nom de famille, une profession et un domicile, conformément à l ’ article 16 de la Convention  ;

d) de veiller à ce qu ’ en cas de divorce, les femmes reçoivent les biens, y compris les parcelles de terrain, acquis pendant le mariage, conformément à la recommandation générale n o 29 du Comité  ;

e) de veiller à ce que les enfants, y compris ceux nés dans le cadre d ’ une union de fait, reçoivent une pension alimentaire en cas de dissolution de cette union  ;

f) de mener des activités de formation et de sensibilisation à l ’ intention des juges, des procureurs, des autorités de police et des autorités locales sur la prévention et l ’ interdiction des mariages forcés et des mariages d ’ enfants  ;

g) de réformer le système de collecte des données et les procédures d ’ enregistrement pour l ’ application de la législation pénale et administrative sur les mariages forcés et les mariages d’enfants.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l’État partie à s’appuyer sur la Déclaration et le Programme d’action de Beijing et à continuer d’évaluer la réalisation des droits consacrés par la Convention dans le contexte de l’examen après 25 ans de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing en vue de parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Diffusion

Le Comité demande à l’État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la ou les langue(s) officielle(s) de l’État partie, aux institutions publiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, à l’Assemblée nationale et au corps judiciaire, afin d’en permettre la pleine application.

Ratification d’autres traités

Le Comité constate que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits humains contribuerait à favoriser l’exercice effectif par les femmes de leurs droits individuels et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il l’invite donc à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, à laquelle il n’est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l’État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 12 d), 14 e), 16 b) et 32 a) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à soumettre son septième rapport périodique en juillet 2026. Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée, jusqu’à la date à laquelle il sera soumis.

Le Comité invite l’État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits humains, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).