Observations finales concernant le rapport d’Antigua-et‑Barbuda valant quatrième à septième rapports périodiques *

Le Comité a examiné le rapport d’Antigua-et-Barbuda valant quatrième à septième rapports périodiques (CEDAW/C/ATG/4-7) lors de ses 1663eet 1664eséances (voir CEDAW/C/SR.1663 et CEDAW/C/SR.1664), qui se sont tenues le 20 février 2019. La liste de points établie par le Comité figure dans le document CEDAW/C/ATG/Q/4-7/Add.1 et les réponses de l’État partie, dans le document CEDAW/C/ATG/Q/4-7/Add.2.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport unique valant quatrième à septième rapports périodiques de l’État partie. Il remercie l’État partie des réponses écrites apportées à la liste de points établie par le Groupe de travail de présession, qui ont été complétées oralement par la délégation, et des éclaircissements complémentaires donnés en réponse aux questions orales posées par le Comité pendant le dialogue. Le Comité note cependant avec regret qu’il s’est écoulé vingt ans depuis l’examen, en 1997, de son précédent rapport périodique, le rapport unique valant premier, deuxième et troisième rapports périodiques (CEDAW/C/ANT/1-3).

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau, qui est dirigée par Samantha Nicole Marshall, Ministre de la transformation sociale, du développement des ressources humaines et des questions liées à la jeunesse et au genre, et qui comprend un représentant de la Direction des questions de genre.

B.Aspects positifs

* Adoptées par le Comité à sa soixante-douzième session (18 février-8 mars 2019).

Le Comité salue les progrès accomplis par l’État partie dans la réalisation de réformes législatives depuis l’examen, en 1997, de son rapport périodique valant premier à troisième rapports périodiques, et notamment l’adoption des textes suivants :

a)La loi de 2017 sur le handicap et l’égalité des chances, qui interdit la discrimination à l’égard des femmes et des hommes handicapés ;

b)La loi de 2015 sur le statut des enfants, qui garantit l’égalité des droits pour les enfants nés de mères non mariées ;

c)La loi révisée de 2015 sur la violence domestique, et la loi de 1999 sur la violence domestique (procédure sommaire) ;

d)La loi de 2015 portant modification de la loi sur la prévention du trafic de migrants, et la loi de 2010 sur le trafic de migrants ;

e)La loi de 2015 portant modification de la loi sur la prévention de la traite des personnes, et la loi de 2010 sur la prévention de la traite des personnes ;

f)La loi de 2008 sur l’éducation, qui garantit l’égalité des garçons et des filles dans l’accès à l’éducation et entend éliminer la discrimination fondée sur le genre ;

g)La loi de 2008 sur la pension alimentaire et l’accès aux enfants, qui garantit des droits égaux aux mères et aux pères en ce qui concerne l’entretien des enfants ;

h)La loi de 2005 sur l’égalité des chances, qui consacre l’égalité des femmes et des hommes devant la loi et interdit la discrimination fondée sur le genre ;

i)La loi de 2003 sur les soins aux enfants et la protection de l’enfance ;

j)La modification, en 1998, du Code du travail pour garantir un salaire égal pour le même travail auprès du même employeur.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, notamment :

a)La juridiction modèle pour les affaires d’infractions sexuelles, en 2019 ;

b)Le plan stratégique national pour la santé pour la période allant de 2016 à 2020, qui définit des objectifs concernant l’amélioration des services de santé maternelle et de santé sexuelle et procréative ;

c)Le plan d’action stratégique national pour la période allant de 2013 à 2018 qui vise à mettre un terme à la violence sexiste ;

d)La politique nationale d’éducation à la santé et de préparation à la vie de famille, en 2010 ;

e)L’initiative de l’Organisation des États des Caraïbes orientales concernant le droit de la famille et la violence domestique, en 2001.

Le Comité se félicite de ce que, durant la période écoulée depuis l’examen du précédent rapport, l’État partie ait ratifié les instruments internationaux et régionaux ci-après, ou y ait adhéré :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2016 ;

b)Le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 2006 ;

c)La Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme, en 1998.

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite de l ’ appui apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et invite l ’ État partie à réaliser l ’ égalité de jure (dans la loi) et de facto (effective) des femmes et des hommes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il rappelle l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il exhorte l ’ État partie à reconnaître que les femmes sont la force motrice de son développement durable et à adopter des politiques et des stratégies pertinentes à cet effet.

D.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement, dans le cadre de son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Conséquences de l’ouragan Irma

Le Comité rappelle que les conséquences du passage, en septembre 2017, de l’ouragan Irma, qui a entraîné l’évacuation de l’ensemble de la population de Barbuda vers Antigua, continuent de menacer l’éducation, la santé et les moyens de subsistance des femmes et des filles touchées. Le Comité prend note avec satisfaction de l’action menée par l’État partie pour aider les femmes et les filles frappées par l’ouragan Irma et d’autres ouragans récents, mais craint que les prises de décisions en cours concernant la redistribution des terres à Barbuda ne privent les femmes de la propriété foncière commune.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De lutter contre les conséquences des ouragans sur l ’ environnement et l ’ éducation, la santé et les moyens de subsistance des femmes et des filles touchées, notamment en leur garantissant un accès physique et économique à des infrastructures de haute qualité et à des services essentiels, et de promouvoir leur autonomisation économique  ;

b) D ’ élaborer une stratégie globale visant à faire en sorte que les femmes de Barbuda participent à la conception et à la mise en œuvre de la phase de relèvement après les catastrophes, en particulier en ce qui concerne les décisions relatives à la redistribution des terres  ;

c) D ’ allouer suffisamment de ressources au fonds mis en place par l ’ État partie pour soutenir la population de Barbuda et de veiller à ce que celui-ci soit disponible et accessible à toutes les femmes touchées, en particulier celles qui appartiennent à des groupes défavorisés, comme les femmes âgées, les femmes handicapées et les femmes actives dans les secteurs de l ’ agriculture et de la pêche  ;

d) De continuer de solliciter l ’ assistance technique et financière de la communauté internationale dans le cadre des programmes de relèvement après les catastrophes.

Visibilité de la Convention, du Protocole facultatif s’y rapportant et des recommandations générales du Comité

Le Comité se félicite des différents programmes d’éducation et de sensibilisation sur les droits des femmes qui ont été mis en place. Il est toutefois préoccupé par la méconnaissance générale de la Convention et de son Protocole facultatif dans l’État partie, en particulier parmi les femmes et les agents de l’État et des forces de l’ordre.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les connaissances du pouvoir judiciaire, des avocats, des fonctionnaires et des agents de la force publique au sujet de la Convention et de la jurisprudence du Comité pour veiller à ce que la notion d ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui figure dans la Convention, soit bien comprise, et pour leur permettre d ’ appliquer la Convention dans les lois et politiques relatives à l ’ égalité des sexes et à la promotion des femmes  ;

b) De redoubler d ’ efforts pour sensibiliser les femmes, y compris les femmes migrantes, les femmes âgées, les femmes handicapées et les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres, aux droits que leur reconnaît la Convention et aux voies de recours dont elles disposent en cas de violation desdits droits, et de veiller à ce que des informations concernant la Convention, son Protocole facultatif et les recommandations générales du Comité soient communiquées à toutes les femmes.

Définition de la discrimination et cadre législatif

Le Comité prend note de l’interdiction de la discrimination fondée sur le genre en vertu de la loi de 2005 sur l’égalité des chances. Il est néanmoins préoccupé par l’absence d’une définition détaillée de la discrimination à l’égard des femmes conforme à l’article 1 de la Convention, et ce, malgré les recommandations des Commissions de réforme de la Constitution convoquées en 1999 et 2018. Le Comité s’inquiète également de l’absence d’une législation nationale interdisant toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Rappelant sa recommandation générale n o  28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention, et conformément à la cible 5.1 des objectifs de développement durable, à savoir mettre fin, partout dans le monde, à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et des filles, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire figurer dans sa législation une définition détaillée de la discrimination à l ’ égard des femmes et des filles qui soit en phase avec l ’ article 1 de la Convention, qui englobe la discrimination directe et indirecte par des acteurs étatiques et non étatiques dans les sphères privée et publique, et qui reconnaisse les formes de discrimination croisées, et de veiller à ce que ladite définition interdise expressément la discrimination à l ’ égard des femmes, conformément au paragraphe b) de l ’ article 2 de la convention, et énonce tous les motifs de discrimination interdits  ;

b) De veiller à faire respecter l ’ interdiction de la discrimination à l ’ égard des femmes au moyen des sanctions et des mesures d ’ exécution adaptées.

Harmonisation de la législation

Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie, qui a ratifié la Convention en 1989, n’a pas encore pleinement intégré cet instrument dans la législation nationale, et que cette dernière contient encore des dispositions discriminatoires à l’égard des femmes, notamment dans la loi sur l’égalité des chances et la loi sur les infractions sexuelles. Cela étant, il prend note de la révision en cours de la législation, qui porte sur les dispositions discriminatoires qui y figurent.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire en sorte que les organisations de la société civile participent pleinement à la révision de la législation, et que toutes les lois fassent l ’ objet d ’ une analyse approfondie sous l ’ angle de la problématique femmes-hommes afin de repérer celles qui sont incompatibles avec la Convention et de les harmoniser avec celle-ci  ;

b) D ’ intégrer pleinement les dispositions de la Convention dans sa législation nationale, notamment en procédant à la modification ou à l ’ abrogation de toutes les lois incompatibles avec les principes d ’ égalité et de non-discrimination consacrés par la Convention.

Accès à la justice

Le Comité félicite l’État partie pour la création du Centre d’appui et d’orientation, en 2017, ainsi que de la juridiction modèle pour les affaires d’infractions sexuelles, en 2019, qui est le premier dispositif de la région des Caraïbes orientales destiné à offrir aux victimes de violence sexiste un large éventail de services de soutien et un accès à un tribunal spécialisé dans le traitement des infractions sexuelles. Il note également que la Constitution garantit aux femmes le droit d’avoir accès à la justice, et que les femmes peuvent bénéficier d’une aide juridique pour les questions civiles et familiales grâce au Centre de conseil et d’aide juridiques du Ministère de la justice et des affaires juridiques. Le Comité demeure toutefois préoccupé par :

a)Les informations faisant état de lenteurs et d’arriérés importants dans les affaires soumises à la juridiction modèle pour les affaires d’infractions sexuelles ;

b)L’absence de services d’aide juridique gratuits, notamment pour les questions pénales, accessibles aux femmes dépourvues de moyens suffisants.

Conformément à sa recommandation générale n o  33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accroître les ressources humaines, techniques et financières allouées à la juridiction modèle pour les affaires d ’ infractions sexuelles, de manière à améliorer l ’ efficacité et l ’ utilité des procédures judiciaires et à garantir aux femmes l ’ accès à la justice, en particulier à la protection et aux réparations, en cas de violation de leurs droits de la personne  ;

b) De faire le nécessaire pour que le Centre de conseil et d ’ aide juridiques propose également, parmi ses services, une aide juridique gratuite pour les femmes et les filles dépourvues de moyens suffisants, et une représentation juridique pour les femmes et les filles dans les procédures pénales, civiles et administratives en lien avec la violence et la discrimination sexistes .

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité se félicite de l’augmentation des crédits budgétaires accordés à la Direction des questions de genre au cours des cinq dernières années, et de l’information fournie par l’État partie selon laquelle un plan d’action national en faveur des femmes et une stratégie de prise en compte des questions de genre sont en cours d’élaboration. Il félicite l’État partie pour les efforts considérables déployés par la Direction des questions de genre pour combattre la violence sexiste à l’égard des femmes et des filles. Le Comité déplore toutefois la capacité restreinte du mécanisme national de promotion des femmes à coordonner de façon satisfaisante la prise en compte des questions de genre dans tous les domaines visés par la Convention.

Rappelant sa recommandation générale n o  6 (1988) sur les mécanismes nationaux et la publicité efficaces, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les mécanismes nationaux de promotion des femmes, y compris la Direction des questions de genre, en veillant à leur conférer l ’ autorité institutionnelle requise et à leur fournir les ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour leur permettre d ’ œuvrer efficacement à la défense des droits des femmes  ;

b) D ’ achever en priorité, avec la participation active de la société civile, la politique et le plan d ’ action nationaux pour l ’ égalité des sexes afin de parvenir à une égalité systématique et réelle entre les femmes et les hommes, et de procéder à une évaluation et à un suivi réguliers  ;

c) De consolider son appui aux coordonnateurs pour les questions d ’ égalité des sexes au sein des ministères d ’ exécution et de l ’ administration publique, notamment grâce à un renforcement constant des capacités, pour veiller à ce qu ’ ils soient en mesure d ’ intégrer les questions de genre et de coordonner les politiques et programmes relatifs aux droits des femmes pour répondre aux normes de performance convenues en ce qui concerne la problématique femmes-hommes.

Institution nationale de défense des droits de l’homme

Le Comité note que le Bureau du Médiateur examine les questions relatives au harcèlement sexuel et à la discrimination à l’égard des femmes. Il déplore néanmoins l’absence d’une institution nationale de défense des droits de l’homme indépendante dotée d’un vaste mandat de promotion et de protection des droits des femmes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place, dans un délai clairement fixé, une institution indépendante de défense des droits de l ’ homme dotée de compétences de protection et de promotion des droits des femmes, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris). Il lui recommande également de veiller à ce que le Bureau du médiateur tienne compte des questions de genre dans ses travaux.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité s’inquiète de l’absence de mesures temporaires spéciales visant à instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines relevant de la Convention où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées, notamment les sphères politique et publique, l’éducation, l’emploi et la santé.

Conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et rappelant sa recommandation générale n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en œuvre des mesures temporaires spéciales, telles que des quotas et d ’ autres mesures volontaristes, assorties d ’ objectifs et de délais précis, pour parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines où les femmes restent défavorisées ou sous-représentées, à savoir les sphères politique et publique, l ’ éducation, l ’ emploi et la santé  ;

b) De sensibiliser les citoyens et tous les agents de l ’ État et décideurs concernés au caractère non discriminatoire des mesures temporaires spéciales et à l ’ importance qu ’ elles revêtent pour la réalisation de l ’ égalité de fait entre femmes et hommes.

Stéréotypes discriminatoires fondés sur le genre

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie, telles que des campagnes de sensibilisation, pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires fondés sur le genre. Il est toutefois préoccupé par les attitudes patriarcales profondément enracinées et les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, qui non seulement constituent des obstacles à l’accès des femmes à l’emploi et à la participation à la vie politique et publique, mais comptent également parmi les causes profondes de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter une stratégie globale visant à éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, et d ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour sa mise en œuvre  ;

b) D ’ étendre la portée des programmes d ’ éducation du public, en collaboration avec les médias, concernant les effets négatifs des stéréotypes sexistes discriminatoires sur l ’ exercice de leurs droits par les femmes et les filles, en vue d ’ éliminer les attitudes stéréotypées et de ne plus tolérer la violence à l ’ égard des femmes et des filles fondée sur le genre  ;

c) De suivre et d ’ examiner régulièrement, avec la participation des organisations de la société civile, les mesures prises pour éliminer les stéréotypes sexistes discriminatoires afin d ’ en évaluer les effets.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité se félicite de l’examen en 2015 de la législation et des politiques relatives à la violence fondée sur le genre, de la révision ultérieure de la loi sur la violence familiale, de la création de l’unité spéciale de soutien aux victimes au sein du Centre d’appui et d’orientation, et d’une base de données informatique nationale pour suivre tous les cas signalés de violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre. Il est toutefois préoccupé par :

a)La sous-déclaration des cas de harcèlement sexuel et de violence sexiste à l’égard des femmes, y compris de violence familiale et sexuelle, malgré la forte prévalence de ces cas ;

b)La portée limitée de la législation existante sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, qui donne une définition étroite du viol et n’incrimine pas le viol conjugal, et l’absence de cadre juridique régissant le harcèlement sexuel ;

c)L’absence d’un laboratoire médico-légal dans l’État partie ;

d)L’insuffisance des mesures de réparation pour les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre ;

e)Le manque de refuges ou de services de soutien adéquats pour les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre ;

f)Le manque de données concernant les poursuites engagées et les peines prononcées à l’encontre des auteurs d’actes de violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre.

Rappelant sa recommandation générale n o  35 (2017) sur la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de sa recommandation générale n o  19, et vu la cible 2 de l ’ objectif 5 des objectifs du développement durable, consistant à éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures pour encourager le signalement des actes de harcèlement sexuel et de violence à l ’ égard des femmes et des filles fondée sur le genre, notamment en lançant des campagnes de sensibilisation dans les médias et d ’ éducation du public, et de veiller à ce que les allégations fassent l ’ objet d ’ enquêtes efficaces et que les auteurs d ’ infractions soient dûment punis par des peines proportionnées à la gravité de leurs actes  ;

b) De modifier les lois pertinentes pour incriminer expressément le viol conjugal et de veiller à ce que la définition du viol englobe tout acte sexuel non consenti  ;

c) De promulguer le projet de loi sur le harcèlement sexuel et de veiller à ce qu ’ il interdise toutes les formes de harcèlement sexuel  ;

d) De garantir l ’ accès des femmes et des filles victimes de violence fondée sur le genre à un examen médico-légal gratuit, en établissant rapidement un laboratoire doté de ressources suffisantes et d ’ un personnel dûment formé, et d ’ apprendre aux professionnels de la santé à déceler la violence sexuelle et à en traiter correctement les conséquences  ;

e) De mettre en place des programmes obligatoires de renforcement des capacités à l ’ intention des membres de l ’ appareil judiciaire, des avocats et des forces de l ’ ordre pour veiller à ce qu ’ ils appliquent les dispositions pertinentes du droit pénal aux affaires de violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, y compris des ordonnances de protection contre les partenaires violents et des mesures de réparation pour les victimes  ;

f) De créer des refuges pour les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre, y compris de violence familiale et sexuelle, qui soient pleinement accessibles, et de veiller à ce que ces victimes bénéficient de services de conseil, de réadaptation et de soutien pour se réinsérer dans la société  ;

g) De veiller à ce que la base de données couvre toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes et des filles fondée sur le genre, avec des données ventilées par âge, sexe, situation géographique, handicap et nature de la relation entre la victime et l ’ auteur, y compris des données concernant le nombre d ’ ordonnances de protection adoptées, les poursuites engagées et les peines imposées.

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

Le Comité se félicite de l’adoption et de la modification de la loi sur la prévention de la traite des personnes en 2010 et 2015, respectivement, et de la création du Comité de prévention de la traite des personnes qui est chargé de veiller à l’application de la législation. Il constate toutefois avec préoccupation que les auteurs de la traite des femmes et des filles ne sont ni poursuivis ni condamnés et que les agents de l’État font l’objet de sanctions administratives plutôt que pénales lorsque leur complicité dans des affaires de traite est reconnue, ce qui entrave les efforts de lutte contre ce phénomène. Le Comité est également préoccupé par les risques potentiellement encourus par les femmes prostituées en ce qui concerne leur sécurité et leur santé et par l’absence de données sur le nombre de femmes et de filles qui ont été exploitées dans la prostitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ appliquer la législation contre la traite en menant des enquêtes approfondies et en poursuivant et en punissant les trafiquants, y compris les agents de l ’ État complices des infractions commises et ceux qui aident et encouragent l ’ exploitation des femmes et des filles dans la prostitution  ;

b) De continuer à veiller à ce que les femmes et les filles qui sont exploitées dans la prostitution soient exonérées de toute responsabilité pénale et bénéficient d ’ une protection et d ’ une réparation adéquates, notamment l ’ accès à des services de conseil, à un traitement médical, à un soutien psychosocial et à une indemnisation  ;

c) D ’ adopter et de mettre en œuvre des programmes dotés de ressources suffisantes pour créer des possibilités d ’ éducation et d ’ emploi pour les femmes qui risquent de se prostituer et des programmes de sortie pour celles qui souhaitent quitter la prostitution, notamment des stratégies de réinsertion sociale et professionnelle  ;

d) De rassembler et d ’ analyser des données ventilées par sexe et par âge sur l ’ exploitation des femmes et des filles dans la prostitution.

Participation à la vie politique et publique et à la prise de décisions

Le Comité félicite l’État partie pour l’augmentation du nombre de femmes occupant des postes de décision dans la vie politique depuis les élections générales de 2018. Il constate toutefois que les femmes sont encore sous-représentées aux postes de décision dans les secteurs public et privé, y compris au Conseil des ministres, à la Chambre des représentants, dans la fonction publique et le service diplomatique, dans l’appareil judiciaire et dans la police. Le Comité est également préoccupé par l’absence de mesures, notamment de quotas obligatoires, destinées à promouvoir la participation des femmes à la vie politique et publique, et par les cas signalés de harcèlement de femmes participant à la vie politique et publique par des hommes politiques, des commentateurs politiques et des professionnels des médias.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place des mesures temporaires spéciales, telles que des quotas, pour les nominations politiques et le recrutement accéléré de femmes aux postes de décision, afin d ’ accélérer la pleine et égale participation des femmes au sein des organes dont les membres sont élus ou nommés  ;

b) D ’ organiser des programmes de formation et de renforcement des capacités à l ’ intention des femmes qui souhaitent entrer dans la vie politique ou occuper une charge publique  ;

c) De renforcer la capacité des professionnels des médias à s ’ abstenir de perpétuer les stéréotypes sexistes discriminatoires à l ’ égard des femmes dans la vie politique et publique, et de faire en sorte que les femmes et les hommes candidats à un poste de représentant ou élus bénéficient de la même couverture médiatique, en particulier en période électorale  ;

d) De sensibiliser les personnalités politiques, les médias et l ’ opinion publique en général au fait que la participation pleine, libre et démocratique des femmes à la vie politique et publique, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, est indispensable à la bonne application de la Convention, ainsi qu ’ à la stabilité politique et au développement économique du pays.

Nationalité

Le Comité félicite l ’ État partie pour son cadre juridique régissant l ’ acquisition de la nationalité et lui recommande de ratifier la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Éducation

Le Comité se félicite de la parité atteinte dans l’enseignement primaire et secondaire, du taux élevé d’alphabétisation des femmes et des programmes visant à encourager les femmes à occuper des emplois non traditionnels. Il prend note des politiques relatives à la réintégration des filles à l’école après l’accouchement et au signalement des cas de violence sexuelle dans les écoles. Néanmoins, il est préoccupé par :

a)Le fait que les questions relatives au genre ne sont pas prises en considération dans la mise en œuvre de la loi sur l’enseignement ;

b)Le faible niveau d’instruction concernant la santé sexuelle et procréative et les droits y relatifs ;

c)L’insuffisance des mesures prises pour assurer le retour et le maintien des filles à l’école après l’accouchement, ces élèves abandonnant souvent l’école pour cause de stigmatisation ;

d)Les informations insuffisantes sur les mécanismes de protection des femmes et des filles victimes de violences sexuelles et de harcèlement sexuel à l’école ;

e)La pratique répandue et l’acceptation culturelle des châtiments corporels à l’école ;

f)La concentration persistante des femmes et des filles dans des domaines d’étude traditionnellement dominés par les femmes et leur sous-représentation dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques, malgré des taux d’inscription supérieurs dans l’enseignement postsecondaire ;

g)L’absence de mesures visant à garantir l’accès des femmes et des filles handicapées à l’enseignement ordinaire.

À la lumière de sa recommandation générale n o  36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire en sorte que le contenu et la méthodologie des programmes d ’ études à tous les niveaux de l ’ enseignement tiennent compte des questions relatives au genre et se fondent sur les dispositions de la Convention, et de veiller à ce que tous les enseignants et toutes les autorités scolaires reçoivent une formation sur l ’ égalité réelle des hommes et des femmes  ;

b) D ’ intégrer à tous les niveaux de l ’ éducation des filles et des garçons des programmes d ’ enseignement complets, obligatoires et adaptés à l ’ âge du public visé, sur la santé sexuelle et procréative, qui soient fondés sur les droits et abordent les questions relatives au pouvoir, au comportement sexuel responsable et à la prévention de la grossesse précoce, y compris par la planification familiale et les formes modernes de contraception  ;

c) De renforcer les mesures de rescolarisation des filles et des femmes qui ont abandonné l ’ école pour cause de grossesse, notamment en adoptant des politiques de rescolarisation qui permettent aux jeunes mères de retourner à l ’ école, en sensibilisant les enseignants et les autorités scolaires à ces politiques et en facilitant le retour à l ’ école des jeunes mères par des services de soutien, y compris des services de garde et des indemnités  ;

d) D ’ adopter une politique de tolérance zéro à l ’ égard de la violence et du harcèlement sexuels à l ’ égard des femmes et des filles à l ’ école, de former les autorités scolaires et les enseignants à traiter de tels actes en toute confidentialité et d ’ une manière qui tienne compte des considérations liées au genre, de veiller à ce que les auteurs soient poursuivis et dûment punis, et d ’ offrir une aide psychologique, médicale et juridique appropriée à toutes les victimes  ;

e) D ’ interdire explicitement les châtiments corporels dans les écoles et de dispenser aux enseignants et aux parents une formation sur les formes de discipline non violente  ;

f) D ’ encourager les femmes et les filles à s ’ orienter vers des domaines d ’ études traditionnellement dominés par les hommes, notamment en recourant à des mesures temporaires spéciales telles que des bourses d ’ études, des programmes de stages et des conseils professionnels non stéréotypés  ;

g) De garantir l ’ accès des femmes et des filles handicapées à un enseignement ordinaire inclusif et de qualité, et d ’ adopter un protocole pour la mise en place d ’ aménagements raisonnables dans les établissements d ’ enseignement.

Emploi

Le Comité note que le principe de non-discrimination est inscrit dans le Code du travail et qu’une politique nationale contre le harcèlement sexuel au travail est en cours d’élaboration. Il est toutefois préoccupé par :

a)La ségrégation professionnelle horizontale et verticale importante, la sous-représentation des femmes dans les domaines d’emploi traditionnellement dominés par les hommes, comme les secteurs de la construction et de la pêche, et la surreprésentation des femmes dans le secteur informel ;

b)Les informations selon lesquelles des employeurs feraient état d’une préférence pour les candidats masculins, et l’absence de système de transport public dans l’État partie, qui constitue un obstacle à l’accès des femmes à l’emploi formel ;

c)Le paragraphe 1 de l’article E8 du Code du travail, qui ne garantit que l’égalité de rémunération pour une même profession par le même employeur ;

d)Le manque d’informations sur la discrimination fondée sur le sexe sur le lieu de travail, notamment concernant les cas de harcèlement sexuel et l’écart de rémunération entre femmes et hommes.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter des mesures efficaces pour lutter contre la ségrégation professionnelle horizontale et verticale dans les secteurs public et privé, notamment en offrant aux femmes une formation professionnelle et en les faisant bénéficier de mesures d ’ incitation pour qu ’ elles occupent des emplois dans des secteurs traditionnellement masculins  ;

b) De rendre les employeurs et les syndicats des secteurs public et privé attentifs à l ’ interdiction de la discrimination à l ’ égard des femmes en matière d ’ emploi et de promouvoir l ’ accès des femmes à l ’ emploi formel, notamment en faisant bénéficier les employeurs des secteurs public et privé de mesures qui les incitent à recruter des femmes, en mettant en place des formules d ’ organisation du travail modulables et en investissant dans les infrastructures et les services sociaux tels que des garderies et un système de transport public qui offre un moyen de transport sûr et accessible aux femmes vivant à l ’ e xtérieur de Saint John ’ s  ;

c) De modifier le Code du travail pour garantir le principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale dans tous les secteurs, conformément à la C onvention (n o 100) sur l ’ égalité de rémunération, 1951 de l ’ Organisation internationale du Travail, et de revoir régulièrement les salaires dans les secteurs où les femmes sont concentrées  ;

d) D ’ évaluer, à l ’ aide de données statistiques ventilées par sexe, l ’ ampleur de la discrimination fondée sur le sexe sur le lieu de travail, notamment en ce qui concerne les salaires dans les secteurs public et privé et les cas de harcèlement sexuel, afin de prendre des mesures propres à combler l ’ écart de rémunération entre femmes et hommes et d ’ étayer l ’ élaboration d ’ une politique nationale contre le harcèlement sexuel au travail.

Santé

Le Comité félicite l’État partie pour son système de soins de santé inclusif et universel, notamment son régime d’assurance maladie, le faible taux de mortalité maternelle et la baisse du taux de grossesses précoces, et pour le fait que le secteur de la santé représente le poste le plus important du budget de l’État. Il est toutefois préoccupé par le fait que :

a)La criminalisation de l’avortement et le fait que des exceptions ne sont prévues qu’en cas de menace à la vie de la femme enceinte ;

b)Les services de soins de santé sont limités pour les femmes de Barbuda, qui doivent se rendre à Antigua pour être traitées en cas de problèmes médicaux graves ;

c)Les femmes migrantes et les femmes travaillant dans le secteur informel sont exclues du régime d’assurance maladie ;

d)Des informations font état de la réticence des femmes et des filles vivant avec le VIH/sida à demander un traitement médical en raison de la stigmatisation.

Rappelant sa recommandation générale n o  24 (1999) sur les femmes et la santé et la cible 3.7 des objectifs du développement durable concernant l ’ accès universel à des services de soins de santé sexuelle et procréative, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De légaliser l ’ avortement lorsque la grossesse est la conséquence d ’ un viol ou d ’ un inceste, lorsque la vie ou la santé de la femme enceinte est en danger et dans les cas de malformation grave du fœtus, de le dépénaliser dans tous les autres cas et de garantir aux femmes l ’ accès à des soins de qualité, sûrs et d ’ un coût abordable, y compris des soins après avortement en cas de complications résultant d ’ interventions non médicalisées  ;

b) D ’ allouer des ressources budgétaires suffisantes pour la création d ’ un hôpital à Barbuda, doté de médecins et d ’ installations adéquates, afin d ’ assurer aux femmes l ’ accès à des soins de santé de qualité à Barbuda  ;

c) De veiller à ce que tous les groupes de femmes défavorisées, y compris les migrantes et les femmes travaillant dans le secteur informel, aient accès au système national de soins de santé et au régime d ’ assurance maladie, notamment en révisant les critères d ’ enregistrement volontaire  ;

d) D ’ assurer l ’ accès des femmes et des filles vivant avec le VIH/sida à des services de santé adéquats, y compris aux médicaments antirétroviraux, en accordant une attention particulière aux femmes prostituées, et d ’ inclure dans le p lan stratégique national 2016-2020 pour la santé une stratégie, y compris des actions de sensibilisation, pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination dont les femmes et filles atteintes du VIH/sida sont victimes.

Autonomisation économique des femmes

Le Comité prend note avec satisfaction des diverses initiatives prises pour promouvoir l’autonomisation économique des femmes. Il s’inquiète toutefois de l’absence de mesures visant à répondre aux besoins particuliers de groupes de femmes défavorisées, dont les femmes du secteur agricole et les femmes qui exercent une activité non rémunérée ou qui travaillent dans le secteur de l’hôtellerie ou le secteur informel. Le Comité est également préoccupé par le fait que les femmes, y compris les femmes célibataires et les femmes qui ne possèdent aucun bien, se heurtent souvent à des obstacles en matière d’accès aux ressources financières et à l’acquisition de biens, et que les processus décisionnels en cours concernant l’utilisation des terres et la planification du développement peuvent avoir un impact négatif sur les femmes du secteur agricole.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ améliorer l ’ accès des femmes aux services financiers, y compris aux systèmes de crédit et d ’ épargne à faible taux d ’ intérêt, indépendamment de leur situation de famille ou de leur situation financière, et de promouvoir leurs activités entrepreneuriales en leur fournissant une assistance technique, des conseils et une formation à la création et à la gestion d ’ entreprise  ;

b) D ’ élargir et de faciliter la participation des femmes aux processus de prise de décisions concernant l ’ utilisation des terres et la planification du développement, et de veiller à ce que les femmes du secteur agricole aient accès à la terre et en aient le contrôle, conformément à sa recommandation générale n o  34 (2016) sur les droits des femmes rurales  ;

c) De veiller à ce que les femmes qui exercent une activité non rémunérée ou qui travaillent dans le secteur de l ’ hôtellerie ou le secteur informel puissent bénéficier de droits à pension et de prestations sociales, notamment en révisant les critères de participation, et de réaliser des inspections du travail pour s ’ assurer que ces femmes travaillent dans des conditions décentes.

Femmes âgées et femmes handicapées

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la loi de 2017 sur le handicap et l’égalité des chances, qui prévoit la création du Conseil national des/pour les personnes handicapées et du Tribunal des droits des personnes handicapées et de l’égalité des chances. Il relève également que les femmes âgées et les femmes et les filles handicapées ont accès aux prestations sociales et aux prestations de santé. Le Comité est toutefois préoccupé par l’absence de politiques nationales visant à protéger les droits des femmes âgées et des femmes et des filles handicapées, ainsi que par l’absence de mécanismes visant à les protéger des formes croisées de discrimination, de la violence et des mauvais traitements. Il est également préoccupé par le placement en institution d’un grand nombre de femmes âgées et de femmes handicapées.

Conformément à sa recommandation générale n o  27 (2010) sur les femmes âgées et la protection de leurs droits, ainsi qu ’ à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter des politiques et des programmes globaux pour protéger les droits des femmes âgées et des femmes et des filles handicapées, en particulier de celles qui font face à des formes de discrimination croisées  ;

b) D ’ appliquer des mesures, y compris des mesures temporaires spéciales, pour répondre aux besoins particuliers des femmes âgées et des femmes et des filles handicapées, en leur assurant une protection sociale, la participation à la vie politique et publique et l ’ accès à une éducation inclusive de qualité, aux soins de santé, à l ’ emploi et à des activités rémunératrices  ;

c) De respecter et de reconnaître la pleine capacité juridique de toutes les femmes handicapées, quel que soit leur handicap, et de veiller à ce que toutes les femmes âgées et les femmes handicapées vivant dans des établissements de soins aient le droit de vivre de manière autonome dans la société, avec la même liberté de choix que les autres femmes.

Femmes réfugiées et demandeuses d’asile

Le Comité salue l’adoption de la loi de 2015 portant modification de la loi sur l’immigration et les passeports, la création en 2015 d’un Comité spécial chargé d’évaluer les demandes d’asile et l’engagement pris de renforcer la coopération régionale en faveur de la protection des réfugiés. Il est néanmoins préoccupé par l’absence de législation nationale sur l’asile et les réfugiés, notamment pour ce qui est de garantir le respect du principe de non-refoulement des personnes apatrides.

Conformément à sa recommandation générale n o  32 (2014) sur les femmes et les situations de réfugiés, d ’ asile, de nationalité et d ’ apatridie, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter une législation nationale sur l ’ asile et les réfugiés, conforme aux normes internationales, qui devrait garantir le principe du non-refoulement  ;

b) D ’ adopter dans l ’ accueil des femmes réfugiées et des demandeuses d ’ asile et dans l ’ examen de leur demande d ’ asile une approche qui tienne compte de leurs besoins spécifiques.

Femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres

Le Comité est préoccupé par la criminalisation des relations homosexuelles entre adultes consentants, l’absence d’une législation interdisant la discrimination fondée sur tous les motifs interdits en vertu de la Convention, et les informations faisant état de discrimination et de stigmatisation à l’égard des femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres.

Le Comité recommande à l ’ État partie de promulguer une législation antidiscrimination globale interdisant toutes les formes de discrimination et garantissant l ’ égalité des droits et des chances aux femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres, notamment au moyen de la dépénalisation des relations homosexuelles entre adultes consentants. Il lui recommande également de faire en sorte que les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenre aient accès, entre autres, à l ’ emploi, aux soins de santé et aux services sociaux sans discrimination ni stigmatisation.

Mariage et relations familiales

Le Comité prend note de l’assurance donnée par la délégation de l’État partie que le mariage d’enfants n’est pas courant dans le pays. Il constate pourtant avec préoccupation que la loi sur le mariage de 1925 autorise encore le mariage à partir de 16 ans. Le Comité s’inquiète également du fait que la législation ne reconnaît pas les unions de fait ou consensuelles et ne régit pas la répartition des biens matrimoniaux en cas de séparation.

Rappelant ses recommandations générales n o  21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux et n o  29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, et des liens familiaux et de leur dissolution, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De relever l ’ âge minimum du mariage à 18 ans pour les hommes et les femmes, sans exception, pour toutes les formes d ’ union de fait  ;

b) De modifier l ’ ordonnancement juridique régissant le mariage et les relations familiales, en particulier la loi sur le divorce de 1997, en vue d ’ y intégrer le principe de répartition égale des biens matrimoniaux en cas de divorce et d ’ accorder le même poids aux contributions financières et non financières apportées aux biens acquis durant le mariage  ;

c) De prendre des mesures, notamment législatives, pour veiller à ce que les unions de fait soient enregistrées par les bureaux de l ’ état civil et permettre aux femmes de bénéficier d ’ une protection juridique adéquate durant les unions de fait et lors de leur dissolution, notamment en reconnaissant leurs droits s ’ agissant des biens acquis pendant la relation  ;

d) De ratifier la Convention sur les aspects civils de l ’ enlèvement international d ’ enfants.

Incidence des changements climatiques et des catastrophes naturelles sur les femmes

Le Comité se félicite de la mise au point d’un plan de réduction des risques de catastrophe et d’un dispositif d’alerte rapide tenant compte des questions de genre, ainsi que des efforts déployés par le Bureau national des services en cas de catastrophe et par le Ministère de l’environnement pour faire participer les femmes à la planification et à la budgétisation nationales relatives à la réduction des risques de catastrophe, ainsi qu’à la résilience aux changements climatiques et à leur atténuation. Il demeure toutefois préoccupé par l’absence de renseignements sur le nombre de femmes qui participent à la prise de décisions sur les stratégies de réduction des risques de catastrophe compte tenu de la vulnérabilité de l’État partie face aux graves répercussions des changements climatiques et des catastrophes naturelles, qui touchent les femmes de façon spécifique et disproportionnée.

Conformément à sa recommandation générale n o  37 (2018) relative aux aspects liés au genre de la réduction des risques de catastrophe dans le contexte des changements climatiques, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les droits des femmes et des filles soient une considération primordiale dans la conception des mesures relatives aux changements climatiques, aux interventions en cas de catastrophe et à la réduction des risques, et de s ’ assurer que lesdites mesures tiennent compte des besoins particuliers des groupes de femmes défavorisés, notamment des femmes âgées, des femmes handicapées et des femmes migrantes  ;

b) De continuer de veiller à ce que l ’ ensemble des politiques et programmes de lutte contre les changements climatiques, d ’ intervention en cas de catastrophe et de réduction des risques de catastrophe tiennent compte de la problématique femmes-hommes  ;

c) De renforcer les mesures visant à garantir la participation réelle des femmes à l ’ élaboration et à la mise en œuvre des politiques et des plans d ’ action relatifs à la réduction des risques de catastrophe, à la gestion des situations consécutives à une catastrophe et aux changements climatiques, ainsi que leur représentation dans la prise de décisions à tous les niveaux.

Collecte et analyse de données

Le Comité est préoccupé par le défaut général de données statistiques actualisées, ventilées par sexe, âge, origine ethnique, handicap, situation géographique et situation socioéconomique, alors qu’elles sont indispensables pour évaluer avec précision la situation des femmes, étayer la définition des politiques destinées à éliminer la discrimination à leur égard, et assurer le suivi et l’évaluation des progrès accomplis dans la réalisation d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de concevoir un système d ’ indicateurs sur la problématique femmes-hommes pour améliorer la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données ventilées par sexe, âge, origine ethnique, handicap, situation géographique et situation socioéconomique, qui sont indispensables pour évaluer les retombées et l ’ efficacité des politiques et programmes destinés à généraliser l ’ égalité femmes-hommes et à favoriser l ’ exercice par les femmes de leurs droits de la personne. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa recommandation générale n o  9 (1989) sur les données statistiques concernant la situation des femmes, et l ’ encourage à solliciter l ’ assistance technique des organismes compétents des Nations Unies, et à renforcer sa collaboration avec les associations de femmes qui pourraient l ’ aider à rassembler des données exactes et à utiliser des indicateurs mesurables.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité invite l ’ État partie à accepter la modification apportée au paragraphe 1 de l ’ article 20 de la Convention concernant la durée des réunions du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing dans l ’ action qu ’ il mène pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Diffusion

Le Comité prie l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la langue officielle de l ’ État partie, aux institutions concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, au Parlement et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un lien entre l ’ application de la Convention et l ’ action qu ’ il mène en faveur du développement, et de faire appel à cette fin à l ’ assistance technique régionale ou internationale.

Ratification d’autres instruments

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à favoriser l ’ exercice effectif par les femmes de leurs droits individuels et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il l ’ invite donc à ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, auxquels il n ’ est pas encore partie.

Suivi des observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 10 b), 20 b), 28 b) et 37 d).

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son huitième rapport périodique au plus tard en mars 2023. Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée, jusqu ’ à la date à laquelle il sera soumis.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I ).