Trente-cinquième session

15 mai-2 juin 2006

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a examiné le rapport unique valant deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques du Malawi (CEDAW/C/MWI/2-5) à ses 727e et 728e séances, le 19 mai 2006 (voir CEDAW/C/SR.727 et CEDAW/C/SR.728). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/MWI/Q/5 et les réponses du Malawi dans le document CEDAW/C/MWI/Q/5/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie de son rapport unique, valant deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques, qui est conforme à ses directives relatives à l’établissement des rapports périodiques mais a malheureusement été soumis avec beaucoup de retard et ne mentionne nullement les recommandations générales du Comité. Il prend note avec satisfaction de la qualité de ce rapport qui rend compte avec précision et franchise de la situation d’ensemble des femmes et des défis à relever pour parvenir à l’égalité des hommes et des femmes. Il remercie l’État partie de ses réponses à la liste de points et questions soulevés par le groupe de travail présession tout en déplorant que certaines d’entre elles soient incomplètes ou insuffisantes. Il apprécie l’exposé qui lui a été présenté et les précisions qui lui ont été apportées en réponse aux questions qu’il a posées oralement.

Le Comité apprécie le niveau de représentation élevé de la délégation de l’État partie qui était dirigée par la Ministre de l’égalité des sexes, de la protection de l’enfance et des services communautaires et était composée de représentants d’autres ministères participant à l’application des dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, ainsi que de la Présidente de la Commission malawienne des droits de l’homme. Il apprécie le dialogue franc et constructif qui a pu avoir lieu entre ses membres et la délégation qui l’a informé des faits nouveaux intervenus depuis la présentation du rapport en 2004 et a donné une idée plus précise de l’état d’avancement de l’application de la Convention.

Le Comité félicite le Gouvernement d’avoir retiré ses réserves aux dispositions de la Convention, réserves qui portaient sur les coutumes et pratiques traditionnelles, et note que le Malawi a signé le Protocole facultatif à la Convention en septembre 2000.

Aspects positifs

Le Comité se félicite que l’État partie se soit lancé dans un processus de révision constitutionnelle. Il salue les efforts faits par le Gouvernement pour faire le point de sa législation afin de la revoir au besoin ou de la compléter de façon à s’acquitter des obligations que lui impose la Convention, et en particulier le projet de loi sur le mariage, le divorce et les relations familiales et les lois sur la citoyenneté, sur l’immigration et sur le testament et l’héritage.

Le Comité prend acte avec satisfaction de l’adoption récente de la loi sur la prévention de la violence conjugale.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir créé un Ministère de l’égalité des sexes, de la protection de l’enfance et des services communautaires ayant des pouvoirs de représentation et de décision renforcés et constituant le mécanisme national de promotion de la femme.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant que l’État partie a l’obligation d’appliquer systématiquement et continuellement toutes les dispositions de la Convention, le Comité estime que les préoccupations et recommandations énoncées dans les présentes observations finales doivent faire l’objet d’une attention prioritaire de la part de l’État partie entre le moment présent et la présentation du prochain rapport périodique. Par conséquent, le Comité demande à l’État partie de centrer son attention sur ces domaines dans ses activités de mise en œuvre et d’indiquer les mesures prises et les résultats obtenus dans son prochain rapport périodique. Il demande également à l’État partie de transmettre les présentes observations finales au Parlement et à tous les ministères concernés afin d’assurer leur pleine application.

Le Comité déplore que, bien que la Convention ait été ratifiée par le Malawi en 1987, son statut vis-à-vis du droit national ne soit toujours pas clair. Il note avec préoccupation que tant qu’elle n’aura pas été intégralement transposée dans le droit interne, sa primauté sur ce droit demeurera incertaine et on ne saura pas si elle peut être invoquée devant les tribunaux du Malawi et appliquée par ces derniers.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de s ’ assurer à titre prioritaire que la Convention peut être invoquée devant les tribunaux nationaux et appliquée par ces derniers. Il lui demande de veiller à ce que les dispositions de la Convention et des lois nationales y relatives fassent partie intégrante du programme d ’ enseignement du droit et de la formation des professionnels de la justice, y compris les juges, les avocats et les procureurs, de façon à bien ancrer dans le pays une culture juridique fondée sur les principes de l ’ égalité des femmes et de la non-discrimination.

Le Comité déplore qu’alors que la section 12 v) de la Constitution malawienne de 1994 garantit l’égalité de droit entre les hommes et les femmes, la législation de l’État partie ne donne pas de définition précise de la discrimination à l’égard des femmes, comme le demande l’article premier de la Convention qui interdit toute discrimination directe au indirecte.

Le Comité encourage l ’ État partie à faire figurer dans la Constitution, ou dans la loi sur l ’ égalité des sexes qui est en cours d ’ élaboration, une définition détaillée de la discrimination aussi bien directe qu ’ indirecte, comme le prévoit l ’ article  premier de la Convention, qui interdit explicitement la discrimination par des acteurs privés, conformément à l ’ alinéa  e) de l ’ article  2 de la Convention. Il l ’ encourage également à adopter des mesures temporaires spéciales, comme prévu au paragraphe  1 de l ’ article  4 de la Convention et dans sa recommandation générale 25, et à fixer un calendrier précis pour l ’ élaboration et l ’ adoption de la loi sur l ’ égalité des sexes.

Tout en saluant la réforme juridique en cours sous la direction de la Commission juridique spéciale sur les lois relatives à l’égalité des sexes qui a pour but d’éliminer la discrimination contre les femmes dans différents domaines tels que le mariage, le divorce, la nationalité et la succession, le Comité s’inquiète du manque d’harmonisation persistant entre ces lois et la Convention ainsi que du conflit entre certaines lois existantes et la Constitution. Il est particulièrement préoccupé par les contradictions entre la loi sur le mariage qui fixe à 21 ans minimum l’âge du mariage et la Constitution qui autorise les mariages d’enfants. Il est aussi alarmé par les contradictions entre la Constitution et les lois sur la nationalité et l’immigration en vertu desquelles le mariage avec un étranger entraîne la perte de sa nationalité pour la femme malawienne et la femme mariée ne peut émigrer si elle n’est pas sous la garde de son mari.

Le Comité engage vivement l ’ État partie à accélérer la réforme de son droit et à aligner rapidement sa législation à caractère discriminatoire sur la Convention pour assurer l ’ égalité de droit de la femme. Il le prie instamment de fixer un calendrier précis pour la révision des lois sur la nationalité, sur l ’ immigration et sur le testament et l ’ héritage et pour l ’ adoption du projet de loi sur le mariage, le divorce et les relations familiales qui vise à éliminer la discrimination contre les femmes. Il encourage l ’ État partie à concevoir et lancer de vastes campagnes d ’ éducation et de sensibilisation lorsque la réforme sera terminée de façon à faire connaître la nouvelle législation et à l ’ appliquer comme il se doit.

Le Comité déplore l’absence de conception intégrée des politiques et programmes en faveur de l’égalité des sexes et notamment de prise en considération des inégalités entre les hommes et les femmes à tous les niveaux de la part de l’État partie. Il déplore en outre l’insuffisance des données ventilées par sexe qui sont indispensables à une bonne analyse des inégalités entre les hommes et les femmes et à l’élaboration de politiques et programmes efficaces en vue de l’application de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que les divers programmes et politiques participent d ’ une démarche intégrée tendant à réaliser l ’ égalité entre les femmes et les hommes. Il recommande qu ’ une démarche soucieuse de l ’ égalité des sexes soit adoptée dans l ’ ensemble des institutions publiques, des politiques et des programmes, qu ’ une formation aux sexospécificités soit dispensée et que des coordonnateurs pour les questions concernant l ’ égalité des sexes soient désignés. Il prie l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données ventilées par sexe sur tous les domaines couverts par la Convention et d ’ obtenir, si besoin est, une assistance internationale pour produire ces données.

Le Comité s’inquiète que, bien que la loi prévoie l’accès des femmes à la justice, celles-ci n’arrivent pas dans les faits à exercer ce droit et à porter les cas de discrimination devant les tribunaux à cause de facteurs tels que l’absence de renseignements sur leurs droits, le manque d’assistance dans l’exercice des droits, les difficultés d’ordre pratique éprouvées à atteindre les tribunaux et les frais de justice. Il est en outre préoccupé que la plupart des femmes soient encore assujetties à la juridiction des tribunaux traditionnels qui appliquent le droit coutumier, lequel est discriminatoire à l’égard des femmes.

Le Comité prie l ’ État partie d ’ éliminer les obstacles susceptibles d ’ entraver l ’ accès des femmes à la justice. Il engage en outre l ’ État partie à prendre des mesures spéciales pour mieux faire connaître aux femmes leurs droits, leur faire acquérir des notions élémentaires de droit et leur donner accès aux tribunaux, de sorte qu ’ elles puissent se prévaloir de l ’ ensemble de leurs droits. Il recommande que l ’ État partie donne un caractère constitutionnel aux tribunaux coutumiers et que les décisions de ces derniers ne soient pas discriminatoires à l ’ égard des femmes.

Le Comité est préoccupé par la prédominance d’une idéologie patriarcale caractérisée par des stéréotypes fortement ancrés et la persistance de normes, coutumes et traditions culturelles profondément enracinées, notamment les mariages forcés et les mariages précoces, le lévirat, le « nettoyage sexuel » et l’« initiation » ainsi que d’autres pratiques énumérées dans le rapport de l’État partie qui sont discriminatoires à l’égard des femmes et constituent de graves obstacles à la jouissance par elles de leurs droits fondamentaux.

Le Comité demande instamment l ’ adoption sans retard, et en conformité avec les articles 2 f) et 5 a) de la Convention, de mesures concrètes visant à modifier ou à éliminer les coutumes et pratiques culturelles ou traditionnelles néfastes qui établissent une discrimination à l ’ égard des femmes, afin que ces dernières puissent jouir pleinement de leurs droits fondamentaux. En particulier, il exhorte l ’ État partie à éliminer des pratiques telles que les mariages forcés et les mariages précoces ainsi que des formes discriminatoires de lévirat tendant à hériter de veuves, et d ’ autres pratiques énumérées dans le rapport de l ’ État partie qui constituent des violations des droits fondamentaux des femmes au regard de la Convention. Il l ’ invite à redoubler d ’ efforts pour concevoir et exécuter des programmes complets d ’ information et de sensibilisation à l ’ intention des femmes et des hommes à tous les échelons de la société, y compris des chefs de village et des chefs traditionnels, en vue de faire évoluer les comportements sociaux et culturels discriminatoires et d ’ instaurer un environnement propice à l ’ exercice par les femmes de leurs droits fondamentaux. Il l ’ encourage à entreprendre les efforts nécessaires en collaboration avec les organisations de la société civile, les organisations non gouvernementales féminines et les notables des collectivités. Il demande en outre à l ’ État partie de revoir périodiquement les mesures prises pour évaluer les résultats de ces efforts, de prendre les mesures correctives appropriées et de lui rendre compte dans son prochain rapport des résultats obtenus.

Tout en se félicitant de l’adoption récente de la loi pour la prévention de la violence dans la famille, le Comité regrette que le viol conjugal n’ait pas été criminalisé en vertu de cette nouvelle loi. Le Comité continue de s’inquiéter de la forte prévalence de la violence à l’égard des femmes et des filles et reste tout particulièrement préoccupé par la persistance de coutumes et de pratiques culturelles qui constituent ou perpétuent des formes de violence contre les femmes. Il déplore également que l’exploitation sexuelle des jeunes filles par les enseignants dans les établissements d’enseignement primaire aussi bien que secondaire prenne de l’ampleur et que le rapport ne contienne pas de renseignements et de données sur la prévalence et les formes de la violence à l’égard des femmes.

Le Comité exhorte l ’ État partie à envisager en priorité d ’ adopter des mesures complètes pour faire face à la violence à l ’ égard des femmes et des filles conformément à sa recommandation générale 19 sur la violence à l ’ égard des femmes et à la Déclaration sur l ’ élimination de la violence contre les femmes. Il demande à l ’ État partie de promulguer le plus tôt possible des lois interdisant les coutumes et pratiques discriminatoires et criminalisant le viol conjugal, ainsi que des lois concernant toutes les formes d ’ abus sexuels, notamment le harcèlement sexuel. De telles lois doivent disposer que la violence à l ’ égard des femmes et des filles constitue une infraction pénale, que les femmes et les filles qui sont victimes d ’ actes de violence disposeront immédiatement de moyens de recours et de protection et que les auteurs de ces actes seront traduits en justice et condamnés. Il recommande de donner une formation aux sexospécificités au personnel judiciaire, aux agents de la force publique, ainsi qu ’ aux prestataires de soins de santé et aux enseignants afin de s ’ assurer qu ’ ils sont sensibilisés à toutes les formes de violence contre les femmes et peuvent réagir comme il convient. Il invite instamment l ’ État partie à prendre immédiatement des mesures pour mettre fin à toutes les formes d ’ exploitation des écolières par les enseignants et à poursuivre en justice comme il se doit les auteurs des actes concernés. Il l ’ exhorte également à prendre des mesures concrètes, y compris par des exemples visibles à l ’ échelon le plus élevé de l ’ État, afin de modifier les attitudes sociales, culturelles et traditionnelles qui constituent ou tolèrent des formes de violence contre les femmes. Il lui demande de fournir, dans son prochain rapport, des informations sur les lois et mesures mises en place pour lutter contre la violence à l ’ égard des femmes et sur les résultats obtenus.

Le Comité juge préoccupant que la pauvreté continue de pousser les femmes et les filles à la prostitution. Il s’inquiète également de l’exploitation des prostituées, en particulier des jeunes filles des rues et du manque d’information au sujet des actions menées pour lutter contre ce phénomène. Il s’inquiète aussi du manque d’information au sujet de l’ampleur de la traite des femmes et des mesures prises pour lutter contre le problème.

Le Comité exhorte l ’ État partie à adopter une approche intégrée de façon que les femmes et les filles reçoivent une éducation leur permettant de gagner leur vie autrement qu ’ en se prostituant, que la réinsertion sociale des prostituées soit facilitée et que des programmes de réadaptation et d ’ autonomisation économique soient proposés aux femmes et aux filles victimes de la prostitution. Il demande en outre à l ’ État partie de prendre les mesures qui s ’ imposent pour réprimer l ’ exploitation de la prostitution des femmes, notamment en décourageant la demande dans ce domaine. Il prie l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport des renseignements et des données sur les mesures prises pour lutter contre ce phénomène. Il le prie également de lui fournir des informations détaillées sur la traite des femmes, sur les mesures, notamment législatives, adoptées pour prévenir cette pratique, protéger les victimes et punir les trafiquants, et sur les résultats donnés par ces mesures.

Tout en se félicitant des progrès accomplis récemment, le Comité exprime sa préoccupation devant le nombre toujours faible de femmes occupant des postes de décision dans la sphère politique, la vie publique, notamment au Parlement, dans la fonction publique et dans le système judiciaire. Il est également préoccupé par la faible représentation des femmes à des postes de décision dans le Service diplomatique national.

Le Comité recommande que l ’ État partie prenne des mesures concrètes en vue d ’ accroître le nombre de femmes à des postes de décision dans toutes les sphères et à tous les niveaux, y compris au Parlement, dans les partis politiques, dans le système judiciaire, la fonction publique et la vie publique. Le Comité invite l ’ État partie à s ’ inspirer de sa recommandation générale 23 concernant les femmes dans la vie politique et dans la vie publique. Il recommande également que l ’ État partie adopte des mesures spéciales temporaires, conformément au paragraphe  1 de l ’ article  4 de la Convention et à la recommandation générale 25 concernant les mesures spéciales temporaires. Les mesures devraient consister notamment à fixer des objectifs clairs et à établir des calendriers visant à accélérer la participation des femmes, sur un pied d ’ égalité, à la vie publique et à la vie politique. Le Comité prie l ’ État partie de mettre en œuvre des programmes destinés à encourager les femmes à participer à la vie publique. Il demande également à l ’ État partie de mener des campagnes de sensibilisation afin de bien faire comprendre à la société dans son ensemble à quel point il est important pour le développement du pays que les femmes participent pleinement, sur un pied d ’ égalité à des postes de direction, et à tous les niveaux de la prise de décisions.

Tout en reconnaissant que certains progrès ont été accomplis dans le domaine de l’éducation, comme par exemple la représentation égale des enseignantes (mentionné oralement au Comité) et l’adoption de la politique relative au recrutement de 30 % d’étudiantes, le Comité est préoccupé par le fait qu’il existe toujours un écart entre les garçons et les filles dans le système éducatif. Le Comité est spécialement préoccupé par le taux d’analphabétisme extrêmement élevé chez les femmes, en particulier les femmes des zones rurales et les femmes âgées, le fort taux d’abandons scolaires dû aux mariages précoces, aux grossesses et aux faibles taux d’inscription scolaire des filles.

Le Comité prie l ’ État partie de sensibiliser à l ’ importance de l ’ éducation en tant que droit humain et base pour l ’ autonomisation de femmes. Il encourage également l ’ État partie à prendre des mesures pour éliminer les attitudes traditionnelles qui constituent des obstacles à l ’ éducation des filles. Il recommande que l ’ État partie prenne des mesures visant à assurer l ’ accès, sur un pied d ’ égalité, des filles et des femmes à tous les niveaux de l ’ éducation, à garder les filles à l ’ école et à appliquer plus vigoureusement les politiques de réadmission afin que les filles puissent retourner à l ’ école après la grossesse. Le Comité recommande que l ’ État partie fasse tout pour améliorer le taux d ’ alphabétisation des filles et des femmes, particulièrement des femmes des zones rurales et des femmes âgées, en adoptant des programmes d ’ ensemble, en collaboration avec la société civile, dans les systèmes d ’ enseignement classique et non classique et par le biais de l ’ éducation et de la formation des adultes.

Le Comité se dit préoccupé par la discrimination dont les femmes sont victimes dans le domaine de l’emploi, comme le montrent les procédures de recrutement, l’écart entre les salaires et la ségrégation dans l’emploi. Le Comité est préoccupé par les difficultés que connaissent les femmes lorsqu’elles essaient de s’engager dans une activité économique viable dans le secteur formel, et qui les forcent à travailler dans le secteur formel. Il exprime également sa préoccupation devant la discrimination indirecte à l’égard des femmes du fait qu’elles ont un accès limité au crédit, ne disposant pas de garanties.

Le Comité prie l ’ État partie d ’ assurer des chances égales aux femmes et aux hommes sur le marché du travail conformément à l ’ article  11 de la Convention ainsi que l ’ application intégrale, par les secteurs public et privé, des dispositions de la loi sur l ’ emploi et de la loi sur les relations du travail. Le Comité recommande en outre que l ’ État partie accorde une attention particulière aux conditions d ’ emploi des femmes dans le secteur informel en vue de garantir à ces dernières l ’ accès aux services sociaux. Le Comité exhorte l ’ État partie à redoubler d ’ efforts pour faire en sorte que tous les programmes générateurs d ’ emploi tiennent compte des sexospécificités et que les femmes profitent pleinement de ces programmes. Il invite l ’ État partie à améliorer l ’ accès des femmes au crédit, en accordant une place particulière aux femmes des zones rurales. Il demande à l ’ État partie de présenter dans son prochain rapport des renseignements détaillés assortis de données sur la situation des femmes dans les domaines de l ’ emploi et du travail, notamment dans le secteur informel, ainsi que sur les mesures prises et l ’ impact qu ’ elles ont eu sur la réalisation de chances égales pour les femmes.

Le Comité exprime sa préoccupation devant le manque d’accès des femmes et des filles à des services de santé adéquats, notamment à l’information sur les soins de santé prénatals et postnatals et la planification familiale, en particulier dans les zones rurales. Le Comité est également préoccupé par le taux alarmant de grossesses d’adolescentes et de grossesses multiples, qui constituent un obstacle de taille aux opportunités d’éducation et à l’autonomisation économique des femmes. Le Comité est alarmé par le taux de mortalité maternelle chroniquement élevé, en particulier le nombre de décès résultant d’avortements à risques, les taux de fécondité élevés et les services de planification familiale insuffisants, spécialement dans les zones rurales, ainsi que par les faibles taux d’utilisation des contraceptifs et le manque d’éducation sexuelle. Le Comité est également alarmé par l’augmentation des taux d’infection de femmes par le VIH/sida et le lien direct entre les pratiques traditionnelles néfastes et la propagation du VIH/sida.

Le Comité prie l ’ État partie de poursuivre ses efforts visant à améliorer l ’ infrastructure sanitaire du pays et à mettre en place un budget suffisant qui assure des services accessibles. Il demande à l ’ État partie d ’ intégrer systématiquement le souci de l ’ égalité des sexes dans toutes les réformes du secteur de la santé, tout en veillant à répondre aux besoins des femmes dans les domaines de la sexualité et de la santé en matière de reproduction. Le Comité recommande en particulier que l ’ État partie prenne les mesures qui s ’ imposent pour améliorer l ’ accès des femmes aux soins de santé et aux services de santé ainsi qu ’ à l ’ information connexe, notamment pour les femmes vivant dans les zones rurales. Il exhorte l ’ État partie à améliorer la disponibilité des services en matière de sexualité et de santé de la reproduction, notamment l ’ information et les services de planification familiale ainsi que l ’ accès aux services prénatals, post-natals et gynécologiques afin de réduire la mortalité infantile et réaliser l ’ objectif du Millénaire relatif à la réduction de la mortalité maternelle. Il encourage l ’ État partie à solliciter l ’ appui technique du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) dans ces domaines. Il recommande également que l ’ éducation sexuelle soit largement encouragée et s ’ adresse aux filles et aux garçons, un accent particulier étant mis sur la prévention des grossesses précoces et la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et le VIH/sida. Il demande à l ’ État partie d ’ assurer la mise en œuvre intégrale de la législation et des politiques concernant le VIH/sida, de solliciter l ’ assistance technique de l ’ Organisation mondiale de la santé et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida. Il encourage l ’ État partie à intensifier sa collaboration avec les dirigeants communautaires et les agents sanitaires afin de réduire et éliminer les conséquences néfastes des pratiques traditionnelles sur la santé des femmes.

Le Comité craint que la pauvreté répandue chez les femmes et leurs piètres conditions socioéconomiques ne comptent parmi les causes de la violation des droits humains des femmes et de la discrimination dont celles-ci font l’objet. Il est particulièrement préoccupé par la situation des femmes rurales, compte tenu surtout de leurs conditions de vie précaires et de leur manque d’accès à la justice, aux soins de santé, à la propriété de la terre et à l’héritage, à l’éducation, au crédit et aux services de proximité.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de faire de la promotion de l ’ égalité des sexes une composante spécifique de ses plans et politiques de développement national, en particulier les plans et politiques visant à réduire la pauvreté et en faveur du développement durable. Il le prie aussi d ’ accorder une attention particulière aux besoins des femmes rurales, en faisant en sorte qu ’ elles participent aux processus de prise de décisions et qu ’ elles aient pleinement accès à la justice, à l ’ éducation, aux services de santé et au crédit. Il le prie en outre de prendre des mesures appropriées pour éliminer toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes au niveau de la propriété et de l ’ héritage de terres. Il invite l ’ État partie à mettre l ’ accent sur les droits humains des femmes dans tous les programmes de coopération avec des organisations internationales et des donateurs bilatéraux aux fins du développement, de façon que tout soit mis en œuvre pour s ’ attaquer aux causes socioéconomiques de la discrimination contre les femmes, et notamment les femmes rurales.

Tout en félicitant l’État partie des efforts qu’il fait pour accueillir des réfugiés de pays voisins, le Comité se déclare préoccupé par l’absence d’informations concernant les femmes réfugiées dans les camps du Malawi. En particulier, il s’émeut des cas présumés de traite et de trafic de femmes réfugiées et craint que les femmes ne se voient refuser la possibilité de demander le statut de réfugiée en tant qu’individu à part entière. Le Comité est aussi préoccupé par les informations concernant la protection insuffisante des femmes contre les violences sexistes dans les camps de réfugiés et la quasi-impossibilité pour celles-ci d’obtenir réparation.

Le Comité prie l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur la situation des femmes réfugiées dans des camps au Malawi, en particulier sur le processus d ’ enregistrement des réfugiés et les moyens utilisés pour protéger les femmes réfugiées contre les violences sexistes et les voies qui sont ouvertes en matière de réparation et de réhabilitation aux victimes présumées de la traite et du trafic. Il lui recommande également de demander plus d ’ appui aux organismes internationaux compétents dans le domaine de la protection des réfugiés, en particulier le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, et de continuer à coopérer étroitement avec eux.

Le Comité est préoccupé par la faiblesse de la coordination aux fins de l’application de la Convention entre les autorités et les organisations non gouvernementales et associations de femmes.

Le Comité invite l ’ État partie à améliorer la coordination et les collaborations avec les organisations non gouvernementales et les associations de femmes aux fins de l ’ application de la Convention, et notamment de l ’ exécution des mesures visant à donner suite aux observations finales. Il lui recommande d ’ avoir des consultations plus poussées avec les organisations non gouvernementales durant l ’ élaboration de son prochain rapport périodique.

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et à accepter, dès que possible, l ’ amendement à l ’ article  20, paragraphe  1, de la Convention concernant la durée de ses sessions.

Il prie instamment l ’ État partie d ’ utiliser pleinement, pour s ’ acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention, la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et lui demande d ’ inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Il souligne également que l ’ application intégrale et effective de la Convention est indispensable à la réalisation des objectifs de développement du Millénaire. Il demande l ’ intégration dans toutes les actions menées en vue de la réalisation des objectifs de développement du Millénaire d ’ une perspective de genre et la prise en compte des dispositions de la Convention et prie l ’ État partie d ’ inclure, dans son prochain rapport périodique, des informations à ce sujet.

Le Comité note que l ’ observation par les États des sept grands instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme favorise la jouissance par les femmes de leurs droits humains et de leurs libertés fondamentales dans tous les domaines de la vie. Il encourage donc le Gouvernement du Malawi à envisager de ratifier l ’ instrument auquel il n ’ est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Il demande une large diffusion au Malawi des présentes observations finales de façon que la population, et notamment les agents publics, les politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de protection des droits de l ’ homme aient connaissance des mesures qui ont été prises pour assurer l ’ égalité de jure et de facto des femmes et sachent quelles autres mesures sont encore nécessaires à cet égard. Il prie l ’ État partie de continuer à diffuser largement, en particulier auprès des organisations de femmes et de protection des droits de l ’ homme, la Convention, le Protocole facultatif, ses recommandations générales, la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et le document final de la vingt-troisième session extraordinaire de l ’ Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l ’ an 2000 : égalité des sexes, développement et paix pour le XXI e siècle ».

Le Comité prie l ’ État de répondre, dans son prochain rapport périodique au titre de l ’ article  18 de la Convention, qu ’ il devrait présenter en avril 2008, aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales.