NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/GBR/CO/630 juillet 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMEQuatre‑vingt‑treizième sessionGenève, 7‑25 juillet 2008

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L ’ ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l ’ homme

ROYAUME-UNI DE GRANDE ‑BRETAGNE ET D ’ IRLANDE DU NORD

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le sixième rapport périodique du Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord (CCPR/C/GBR/6) à ses 2541e, 2542e et 2543e séances, les 7 et 8 juillet 2008. Il a adopté les observations finales ci‑après à ses 2558e et 2559e séances, le 18 juillet 2008.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique détaillé de l’État partie et se félicite de ce qu’il contienne une description exhaustive des mesures prises pour donner suite à chacune des observations finales du Comité adoptées à l’issue de l’examen du rapport précédent. Il accueille avec intérêt les réponses écrites communiquées à l’avance par la délégation, ainsi que les réponses franches et concises apportées par la délégation aux questions écrites et orales du Comité.

B. Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi de 2006 sur la haine raciale et religieuse.

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi de 2008 sur la justice pénale et l’immigration qui supprime l’infraction de blasphème en common law, en Angleterre et au pays de Galles.

5.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi de 2004 sur le pacte civil, de la loi de 2004 sur la reconnaissance du genre, de la loi de 2006 sur l’égalité et du règlement de 2008 (amendement législatif) contre la discrimination fondée sur le sexe.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité note que le Pacte n’est pas directement applicable dans l’État partie. À ce sujet, il rappelle que plusieurs droits consacrés dans le Pacte ne sont pas énoncés dans les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme, qui a été incorporée dans l’ordre juridique interne par la loi de 1998 relative aux droits de l’homme. Le Comité relève aussi que l’État partie est le seul État membre de l’Union européenne à ne pas avoir adhéré au Protocole facultatif (art. 2).

L ’ État partie devrait veiller à donner effet dans son droit interne à tous les droits que protège le Pacte et devrait faire des efforts pour obtenir que les juges connaissent les dispositions du Pacte. Il devrait envisager, à titre prioritaire, d ’ adhérer au premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

7.Le Comité regrette que l’État partie ait l’intention de maintenir ses réserves, dont certaines n’ont peut‑être plus de raison d’être. Il note en particulier que la réserve générale visant à soustraire à l’examen les questions disciplinaires dans le cas des membres des forces armées et des prisonniers a une portée très large.

L ’ État partie devrait réexaminer ses réserves au Pacte en vue de les retirer. En particulier, l ’ État partie devrait réexaminer sa réserve générale concer nant la discipline dans le cas des membres des forces armées et des prisonniers.

8.Le Comité note qu’en dépit d’améliorations récentes, la représentation des femmes et des minorités ethniques au sein de la magistrature reste faible (art. 3 et 26).

L ’ État partie devrait reconsid érer, en vue de les renforcer, l es efforts entrepris afin d ’ encourager une plus grande représentation des femmes et des minorités ethniques au sein de l ’ appareil judiciaire. Il devra suivre les progrès réalisés dans ce domaine .

9.Le Comité reste préoccupé par le fait qu’alors qu’une très longue période s’est écoulée depuis les assassinats (y compris de défenseurs des droits de l’homme) commis en Irlande du Nord, dans plusieurs de ces affaires, des enquêtes n’ont pas encore été ouvertes ou achevées, et que les responsables de ces décès n’ont pas encore fait l’objet de poursuites. Même lorsque des enquêtes ont été ouvertes, le Comité constate avec préoccupation que plusieurs d’entre elles, au lieu d’être conduites sous le contrôle d’un magistrat indépendant, sont menées dans le cadre de la loi de 2005 sur les enquêtes qui permet au ministre ayant décidé l’ouverture d’une enquête de contrôler d’importants aspects de celles‑ci (art. 6).

L ’ État partie devrait conduire de toute urgence, vu le temps déjà écoulé , des enquêtes indépendantes et impartiales pour rendre compte de manière complète, transparente et crédible, des circonstances qui ont entouré les violations du droit à la vie en Irlande  du Nord.

10.Le Comité est préoccupé par la lenteur de la procédure engagée pour établir les responsabilités dans l’homicide de Jean Charles de Menezes et les circonstances dans lesquelles il a été abattu par la police à la station de métro de Stockwell.

L ’ État partie devrait veiller à ce que les résultats de l ’ enquête du coroner , qui doit être ouverte en septembre 2008, soi en t suivis énergiquement, y compris sur les questions de responsabilité individuelle et sur les questions des défaillances du service du renseignement et de la formation de la police .

11.Le Comité est préoccupé par l’utilisation que font la police et les forces armées, depuis le 21 juin 2005, de projectiles à impact atténué, et par des rapports médicaux faisant apparaître qu’ils peuvent causer de graves blessures (art. 6).

L ’ État partie devrait suivre de près l ’ utilisation de projectiles à impact atténué par la police et les forces armées et envisager d e l ’ interdire s ’ il est établi que ces projectiles peuvent causer de graves blessures.

12.Le Comité note avec préoccupation que jusqu’à la décision récente de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Saadi c. Italie, l’État partie défendait la position selon laquelle des personnes soupçonnées de terrorisme pouvaient, sous certaines conditions, être renvoyées vers des pays sans garanties suffisantes pour prévenir un traitement interdit par le Pacte. En outre, alors que l’État partie a signé un certain nombre de mémorandums d’accord sur l’expulsion assortie d’assurances diplomatiques, le Comité note que ceux‑ci ne garantissent pas toujours dans la pratique que les intéressés ne seront pas soumis à un traitement contraire à l’article 7 du Pacte, comme cela a été reconnu dans les décisions récentes de la cour d’appel dans les affaires DD and AS v. Secretary of State for the Home Department et Omar Othman (aka Abu  Qatada) v. Secretary of State for the Home Department (2008) (art. 7).

L ’ État partie devrait veiller à ce que des individus , y compris des personnes soupçonné e s de terrorisme, ne soient jamais renvoyés vers un pays s ’ il existe des motifs sérieux de craindre qu ’ ils risqueraient d ’ y être soumis à la torture ou à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L ’ État partie devrait en outre avoir à l ’ esprit que plus la pratique de la torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants est systémati que , moins il est probable qu ’ un risque réel d ’ être soumis à un tel traitement puisse être évité par l ’ obtention d ’ assurances diplomatiques, aussi vigoureuse que puisse être la procédure de suivi convenue. L ’ État partie devra it faire preuve de la plus grande circonspection avant de recourir à de telles assurances et mettre en place des procédures claires et transparentes permettant l ’ exercice d ’ un contrôle par des mécanismes judiciaires adéquats avant d ’ expulser une personne, ainsi que des moyens efficaces pour suivre le sort des personnes concernées.

13.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie a autorisé l’utilisation, à deux reprises au moins, du territoire britannique de l’océan Indien comme point de transit aérien pour des personnes faisant l’objet de «transferts illégaux» vers des pays où ces personnes risquaient d’être soumises à la torture ou à des mauvais traitements (art. 2, 7 et 14).

L ’ État partie devrait enquêter sur les informations faisant état de l ’ utilisation de son territoire pour le transit de vols utilisés pour des «transferts illégaux» et établir un système d ’ inspection pour garantir que s es aéroports ne servent pas à de telles fins.

14.Le Comité est préoccupé par l’affirmation de l’État partie selon laquelle les obligations que lui impose le Pacte ne sont applicables aux personnes placées en détention par les forces armées et détenues dans des centres de détention de l’armée britannique hors du Royaume-Uni que dans des circonstances exceptionnelles. Il note aussi avec regret que l’État partie n’a pas fourni d’informations suffisantes concernant les poursuites engagées, les jugements prononcés et les réparations accordées aux victimes de torture et de mauvais traitements en détention à l’étranger (art. 2, 6, 7 et 10).

L ’ État partie devrait affirmer clairement que le Pacte s ’ applique à tous les individus soumis à sa juridiction ou à son contrôle. Il devrait mener des enquêtes rapides et indépendantes sur toutes les allégations de décès suspect, de torture ou de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants infligés par ses agents (y compris le personnel d ’ encadrement), dans les centres de détention en Afghanistan et en Iraq. L ’ État partie devrait faire en sorte que les responsables soient poursuivis et punis en fonction de la gravité de leur crime. Il devrait adopter toutes les mesures requises pour empêcher la récurrence de tels comportements, en particulier en dispensant la formation voulue et en donnant des directives claires à ses agents (y compris aux responsables) et à ses employés sous contrat au sujet de leurs obligations et responsabilités respectives, conformément aux articles 7 et 10 du Pacte. Le Comité souhaite être informé des mesures prises par l ’ État partie pour assurer le droit des victimes à réparation.

15.Le Comité note avec préoccupation que, dans le but de lutter contre les activités terroristes, l’État partie envisage d’adopter de nouvelles mesures législatives qui pourraient avoir des effets majeurs sur les droits garantis par le Pacte. En particulier, s’il est préoccupé par le fait que la loi de 2006 sur le terrorisme permet de porter de quatorze à vingt‑huit jours la durée maximale de la détention sans inculpation dans le cas de personnes soupçonnées de terrorisme, il l’est encore davantage par le fait que le projet de loi antiterroriste propose de porter cette durée maximale de détention de vingt‑huit à quarante‑deux jours. Rappelant le retrait, le 15 mars 2005, de la notification de la suspension de l’application de l’article 9, faite le 18 décembre 2001, le Comité note que l’article 9 est donc maintenant de nouveau pleinement applicable dans l’État partie (art. 9 et 14).

L ’ État partie devrait veiller à ce que toute personne arrêtée soupçonnée de terrorisme soit promptement informée de toute charge portée contre elle et jugée dans un délai raisonnable ou re mis e en liberté .

16.Le Comité continue à être préoccupé par les attitudes publiques négatives à l’égard des membres musulmans de la société, qui ne cessent de se développer dans l’État partie (art. 18 et 26).

L ’ État partie devrait prendre des mesures énergiques en vue de juguler et d ’ éliminer c e phénomène et de faire en sorte que les auteurs de discriminations fondées sur la religion soient dissuadés et sanctionnés de manière adéquate. L ’ État partie devrait faire en sorte que la lutte contre le terrorisme ne conduise pas à jeter la suspicion sur l ’ ensemble des musulmans.

17.Le Comité est préoccupé par le régime des ordonnances de contrôle institué en vertu de la loi de 2005 sur la prévention du terrorisme qui prévoit l’imposition d’une large gamme de restrictions, notamment un couvre‑feu d’une durée maximum de seize heures, à des individus soupçonnés d’avoir des activités terroristes, mais qui ne sont inculpés d’aucune infraction pénale. Si la Chambre des lords a décidé que les ordonnances de contrôle avaient un caractère civil, elles peuvent néanmoins entraîner une responsabilité pénale en cas de violation. Le Comité est également préoccupé par le fait que la procédure judiciaire permettant de contester l’imposition d’une ordonnance de contrôle soulève un problème puisque le tribunal peut examiner à huis clos des documents secrets ce qui, dans la pratique, prive la personne faisant l’objet de l’ordonnance de contrôle de la possibilité directe de contester effectivement les allégations portées contre elles (art. 9 et 14).

L ’ État partie devrait revoir le régime des ordonnances de contrôle institué en vertu de la loi de 2005 sur la prévention du terrorisme afin d ’ assurer sa conformité avec les dispositions du Pacte. Il devrait en particulier faire en sorte que la procédure judiciaire permettant de contester l ’ imposition d ’ une ordonnance de contrôle soit conforme au principe de l ’ égalité des armes qui exige que la personne concernée et le conseil de son choix aient accès aux éléments sur lesquels est fondée l ’ ordonnance de contrôle. L ’ État partie devrait aussi faire en sorte que les personnes soumises à des ordonnances de contrôle soient rapidement inculpé e s d ’ une infraction pénale.

18.Le Comité reste préoccupé par le fait qu’en dépit de l’amélioration de la situation de l’Irlande du Nord sous l’angle de la sécurité, certains éléments de la procédure pénale en Irlande du Nord continuent d’être différents de ceux en vigueur dans le reste du territoire de l’État partie. En particulier, le Comité est préoccupé par le fait qu’en vertu de la loi de 2007 sur la justice et la sécurité (Irlande du Nord), le Directeur des poursuites pénales pour l’Irlande du Nord peut certifier dans certains cas qu’une affaire doit être jugée sans jury. Le Comité est également préoccupé par le fait que la décision du Directeur des poursuites pénales pour l’Irlande du Nord n’est pas susceptible d’appel. Il rappelle son interprétation du Pacte selon laquelle les autorités chargées des poursuites doivent justifier par des motifs objectifs et raisonnables l’application de règles de procédure pénale différentes dans des cas particuliers (art. 14).

L ’ État partie devrait vérifier de près et en permanence si les exigences de la situation en Irlande du Nord continuent de justifier de telles distinctions, en vue de les supprimer. Il devrait en particulier veiller à ce que, pour chaque affaire dans laquelle le Directeur des poursuites pénales pour l ’ Irlande du Nord certifie qu ’ elle doit faire l ’ objet d ’ un procès sans jury, des motifs objectifs et ra isonnables soient avancés, et à  ce qu ’ il existe un droit de contester ces motifs.

19.Le Comité note avec préoccupation qu’en vertu de l’annexe 8 de la loi de 2000 sur le terrorisme il est possible de différer l’accès à un avocat pendant un délai pouvant atteindre quarante‑huit heures si la police conclut que cet accès risquerait, par exemple, de permettre d’altérer des éléments de preuve ou d’alerter un autre suspect. Le Comité considère que l’État partie n’a pas justifié ce pouvoir, eu égard en particulier au fait qu’il a apparemment été exercé très rarement en Angleterre et au pays de Galles ainsi qu’en Irlande du Nord ces dernières années. Vu que le droit de toute personne d’avoir accès à un avocat immédiatement après son arrestation constitue une garantie fondamentale contre les mauvais traitements, le Comité estime qu’un tel droit devrait être accordé à toute personne arrêtée ou détenue soupçonnée de terrorisme. (art. 9 et 14)

L ’ État partie devrait veiller à ce que tout e personne arrêté e ou détenu e du chef d ’ une infraction pénale , y compris toute personne soupçonnée de terrorisme, ait immédiatement accès à un avocat.

20.Le Comité note avec préoccupation que bien que les ordonnances pour comportement antisocial soient des mesures civiles, leur violation constitue une infraction pénale punissable d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que de telles ordonnances peuvent être imposées à des enfants dès l’âge de 10 ans en Angleterre et au pays de Galles et dès l’âge de 8 ans en Écosse, et par le fait que certains de ces enfants peuvent ensuite être détenus pour une période maximale de deux ans s’ils les enfreignent. Le Comité est également préoccupé par la façon dont les noms et photographies de personnes soumises à des ordonnances pour comportement antisocial (dont des enfants) sont souvent largement diffusés dans le domaine public (art. 14, par. 4, et 24).

L ’ État partie devrait revoir sa législation relative aux ordonnances pour comportement antisocial , y compris la définition de ce qu ’ est un comportement antisocial, afin d ’ assurer sa conformité avec les dispositions du Pacte. Il devrait en particulier veiller à ce que de jeunes enfants ne soient pas placés en détention pour avoir enfreint les conditions d ’ une ordonnance pour comportement antisocial et à ce que les droits au respect de la vie privée des enfants et des adultes soumis à de telles ordonnances soient respectés .

21.Le Comité reste préoccupé par le fait que l’État partie a persisté dans sa pratique consistant à mettre en détention un grand nombre de demandeurs d’asile, dont des enfants. En outre, il réaffirme qu’il considère comme inacceptable toute détention de demandeurs d’asile dans des établissements pénitentiaires et il s’inquiète de constater que, si la plupart des demandeurs d’asile sont placés dans des centres de rétention, une petite minorité d’entre eux continue d’être détenue dans des établissements pénitentiaires, sous prétexte de raisons de sécurité et de contrôle. Il est préoccupé par le fait que certains demandeurs d’asile n’ont pas rapidement accès à une assistance juridique et qu’ils ignorent ainsi probablement leur droit de demander une libération conditionnelle, qui n’est plus automatique depuis l’entrée en vigueur de la loi de 2002 sur la nationalité, l’immigration et l’asile. Le Comité est également préoccupé par l’absence de statistiques concernant les personnes susceptibles d’expulsion qui sont transférées d’Irlande du Nord en Grande‑Bretagne, ainsi que par leur détention provisoire dans des cellules de garde à vue (art. 9, 10, 12 et 24).

L ’ État partie devrait revoir sa politiqu e de placement en détention des  demandeurs d ’ asile, notamment des enfants. Il devrait prendre des mesures immédiates et efficaces pour que tous les demandeurs d ’ asile qui sont détenus en attente d ’ expulsion soient placés dans des centres spécifiquement conçus à cette fin, étudier des mesures de substitution à la détention et mettre fin au placement de demandeurs d ’ asile dans des établissements pénitentiaires. Il devrait aussi faire en sorte que les demandeurs d ’ asile aient pleinement accès et le plus tôt possible à une assistance juridique gratuite afin d ’ assurer la pleine protection des droits qui leur sont reconnus par le Pacte. L ’ État partie devrait créer des établissements appropriés de rétention en Irlande du Nord pour les personnes susceptibles d ’ expulsion.

22.Le Comité regrette qu’en dépit de ses précédentes recommandations, l’État partie n’ait pas inclus le territoire britannique de l’océan Indien dans son rapport périodique au motif que, ce territoire étant dépeuplé, le Pacte ne s’y applique pas. Il prend note de la décision rendue récemment par la cour d’appel dans l’affaire Regina (Bancoult) v. Secretary of State for Foreign and Commonwealth Affairs (no 2) (2007) indiquant que les habitants de l’archipel des Chagos qui ont été illégalement expulsés du territoire britannique de l’océan Indien devraient être en mesure d’exercer leur droit au retour dans les îles périphériques de leur territoire (art. 12).

L ’ État partie devrait faire en sorte que les anciens habitants de l ’ archipel des Chagos puissent exercer leur droit au retour dans leur territoire et devrait faire savoir quelles mesures ont été prises à cet effet . Il devrait envisager une indemnisation pour la privation de ce droit durant une longue période. Il devrait aussi inclure le territoire dans son prochain rapport périodique.

23.Le Comité reste préoccupé par le fait que, bien que le Gouverneur des îles Caïmanes n’ait pas récemment exercé son pouvoir d’expulser toute personne qui est «sans ressources» ou «indésirable», l’article 89 de la loi sur l’immigration (révision de 2007) n’a pas été modifié (art. 17 et 23).

L ’ État partie devrait revoir la législation sur l ’ expulsion en vigueur dans les îles Caïmanes afin de la mettre en conformité avec les dispositions du Pacte.

24.Le Comité reste préoccupé par le fait que les pouvoirs conférés par la loi de 1989 sur les secrets officiels ont été exercés afin d’empêcher d’anciens fonctionnaires de la Couronne de divulguer des questions indéniablement d’intérêt public, et qu’ils peuvent être exercés pour empêcher les médias de publier de telles questions. Il note que les divulgations d’informations tombent sous le coup de la loi pénale même si elles ne sont pas préjudiciables à la sécurité nationale (art. 19).

L ’ État partie devrait veiller à ce que l ’ exercice des pouvoirs qu ’ il détient de protéger des informations véritablement liées à des questions de sécurité nationale soit étroitement circonscrit et limité aux cas où la divulgation de ces informations serait préjudi ciable à la sécurité nationale.

25.Le Comité est préoccupé de constater que l’application pratique par l’État partie de la loi sur la diffamation a servi à dissuader des organes de presse critiques de rendre compte de sérieuses questions d’intérêt général, ce qui compromet la faculté pour les chercheurs et les journalistes de publier leurs travaux, notamment par le phénomène du «tourisme de la diffamation». L’avènement de l’Internet et la diffusion internationale de médias étrangers font aussi naître le risque que la législation excessivement restrictive d’un État partie en matière de diffamation porte atteinte à la liberté d’expression dans le monde entier sur des questions véritablement d’intérêt public (art. 19).

L ’ État partie devrait réexaminer les principes techniques de la loi sur la diffamation, et envisager l ’ utilité d ’ une exception relative aux «figures publiques», exigeant que le plaignant démontre l ’ existence d ’ une réelle malveillance pour poursuivre une action concernant des informations relatives à des responsables publics et des figures publiques de premier plan, et limitant l ’ obligation pour les défendeurs de rembourser aux plaignants les frais et honoraires de justice quel que soit le montant, y compris les conventions d ’ honoraires conditionnels et les honoraires subordonnés au succès, en particulier dans la mesure où cela a pu contraindre les publications défenderesses à transiger sans avoir fait valoir des moyens de défense valables. La possibilité de régler les affaires par le biais d ’ un renforcement des règles régissant les actes de procédure (par exemple, en exigeant qu ’ un plaignant produise un commencement de preuve de fausseté et d ’ absence de normes journalistiques ordinaires) pourrait aussi être envisagée.

26.Le Comité note avec préoccupation que l’infraction d’«encouragement au terrorisme» est définie à l’article premier de la loi de 2006 sur le terrorisme en des termes généraux et vagues. En particulier, une personne peut être coupable de l’infraction, même si elle n’a pas l’intention d’encourager directement ou indirectement, par ses propos, des personnes à commettre des actes de terrorisme, mais si ses propos sont compris par certaines personnes comme un encouragement à commettre de tels actes (art. 19).

L ’ État partie devrait envisager de modifier l ’ article premier de la loi de 2006 sur le terrorisme portant sur «l ’ encouragement au terrorisme» afin que son application n ’ entraîne pas une atteinte disproportionnée à la liberté d ’ expression.

27.Le Comité note avec préoccupation que les châtiments corporels infligés aux enfants ne sont pas interdits à l’école aux Bermudes, dans les îles Vierges britanniques, à Gibraltar, à Montserrat et dans les dépendances de la Couronne (art. 7 et 24).

L ’ État partie devrait expressément interdire les châtiments corporels infligés aux enfants dans la totalité des établissements scolaires de tous les territoires d ’ outre ‑mer et dépendances de la Couronne.

28.Le Comité reste préoccupé par le fait que l’État partie maintient l’article 3 1) de la loi de 1983 sur la représentation du peuple interdisant à des détenus condamnés d’exercer leur droit de vote, en particulier à la lumière de l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Hirst c. Royaume-Uni (2005). Le Comité estime que la privation de l’exercice de tous les droits électoraux des détenus condamnés peut ne pas répondre aux conditions du paragraphe 3 de l’article 10, lu conjointement avec l’article 25 du Pacte (art. 25).

L ’ État partie devrait revoir sa législation privant du droit de vote tous les détenus condamnés à la lumière du Pacte.

29.Le Comité a noté que l’État partie mène actuellement une enquête sur la pratique des interpellations et des fouilles pour vérifier qu’elle est appliquée de façon équitable et appropriée à l’égard de toutes les communautés, mais il reste préoccupé par le recours à la caractérisation raciale dans l’exercice des pouvoirs d’interpellation et de fouille et par son incidence négative sur les relations interraciales (art. 26).

L ’ État partie devrait veiller à ce que les pouvoirs d ’ interpellation et de fouille soient exercés d ’ une manière non discriminatoire. À cette fin, il devrait entreprendre un réexamen de ces pouvoirs en vertu de l ’ article 44 de la loi de 2000 sur le terrorisme.

30.L’État partie devrait diffuser largement le texte de son sixième rapport périodique, des réponses écrites qu’il a apportées à la liste des points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales.

31.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait présenter, dans un délai d’un an, les informations requises sur l’évaluation de la situation et l’application des recommandations du Comité figurant aux paragraphes 9, 12, 14 et 15.

32.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport, qui doit lui parvenir d’ici au 31 juillet 2012, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations formulées et sur l’application du Pacte dans son ensemble.

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