Observations finales concernant le huitième rapport périodique de Sri Lanka *

1.Le Comité a examiné le huitième rapport périodique de Sri Lanka (CEDAW/C/LKA/8) à ses 1484e et 1485e séances, le 22 février 2017 (voir CEDAW/C/SR.1484 et CEDAW/C/SR.1485). La liste des questions et des points soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/LKA/Q/8 et les réponses de Sri Lanka, dans le document CEDAW/C/LKA/Q/8/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité remercie l’État partie d’avoir présenté son huitième rapport périodique.Il le remercie également de ses réponses écrites à la liste des questions et des points soulevés par le groupe de travail présession et accueille avec satisfaction l’exposé oral de sa délégation et les précisions supplémentaires apportées en réponse aux questions posées oralement par le Comité pendant l’échange de vues.

3.Le Comité rend hommage à la délégation de l’État partie, dirigée par Chandrani Senarathne, Secrétaire du Ministère des femmes et de l’enfance, et composée également par le Représentant permanent de la Mission permanente de Sri Lanka auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et d’autres organisations internationales, l’Ambassadeur de Sri Lanka auprès de la République de Corée, ainsi que des représentants du Ministère des affaires étrangères et du ministère public.

* Adopté par le Comité à sa soixante-sixième session (13 février-3 mars2017).

B.Aspects positifs

4.Le Comité se félicite des progrès accomplis depuis l’examen, en 2011, du rapport unique valant cinquième, sixième et septième rapports périodiques de l’État partie (CEDAW/C/LKA/5-7), en ce qui concerne la réforme législative, en particulier l’adoption :

a)Du dix-neuvième amendement à la Constitution, qui a rétabli le Conseil constitutionnel et sa capacité de recommander des nominations aux plus hauts postes dans la hiérarchie judiciaire et au sein d’institutions indépendantes clefs, y compris la nomination de membres éminents à la Commission des droits de l’homme de Sri Lanka, en 2015;

b)De la loi no 4 de 2015 relative à l’assistance aux victimes et témoins de crimes et à leur protection et portant création de l’Autorité nationale pour la protection des victimes et des témoins de crimes;

c)De la modification, en 2016, de la loi no 22 de 2012 sur les élections locales, comprenant la mise en place d’un quota de 25 % de femmes dans les collectivités territoriales.

5.Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique afin d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, notamment par :

a)L’achèvement, en 2017, du plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme pour la période 2017-2021, qui comprend un chapitre distinct portant sur la protection et la promotion des droits des femmes;

b)L’adoption, en 2016, du plan stratégique national visant à surveiller et à combattre la traite des personnes;

c)L’adoption, en 2016, du plan directeur et du plan d’action national de lutte contre la violence sexuelle et sexiste pour la période 2016-2020;

d)Le coparrainage de la résolution 30/1 du Conseil des droits de l’homme, intitulée « Favoriser la réconciliation et l’établissement des responsabilités et promouvoir les droits de l’homme à Sri Lanka », et les mesures prises pour mettre en œuvre les engagements pris à cet égard, en 2015;

e)L’envoi, en 2015, d’une invitation permanente à tous les titulaires de mandats au titre de procédures spéciales à se rendre dans l’État partie.

6.Le Comité se réjouit du fait que, depuis l’examen du précédent rapport, l’État partie a ratifié les instruments internationaux énumérés ci-après ou y a adhéré :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, tous les deux en 2016;

b)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2016;

c)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2015.

C.Parlement

7. Le Comité souligne que le rôle du pouvoir législatif est déterminant pour assurer la pleine exécution de la Convention (voir la déclaration du Comité relative à ses relations avec les parlementaires, adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement à prendre, conformément à son mandat, les dispositions nécessaires à la mise en œuvre des présentes observations finales d ’ ici à la présentation du prochain rapport au titre de la Convention.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Statut juridique de la Convention

8.Le Comité note la réponse de la délégation selon laquelle les articles 12, 17, 27 et 126 de la Constitution et plusieurs lois et règlements législatifs nationaux fournissent un cadre adéquat pour donner effet à la Convention. Toutefois, le Comité reste préoccupé par le fait que le cadre juridique national existant est insuffisant pour garantir l’exercice de tous les droits des femmes énoncés dans la Convention.

9. Le Comité réitère sa recommandation précédente ( CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 13), dans laquelle il priait l ’ État partie d ’ incorporer dans le droit national toutes les dispositions de la Convention sans plus tarder.

Cadre juridique pour l’interdiction de la discrimination à l’égard des femmes

10.Le Comité se félicite du processus de réforme en cours de la Constitution. Il demeure toutefois préoccupé par la faible participation des femmes au processus. Il prend note de la réponse de l’État partie concernant la proposition du sous-comité pour les droits fondamentaux de l’Assemblée constituante visant à faire figurer explicitement l’orientation et l’identité sexuelles parmi les motifs de non-discrimination, afin que ne subsiste aucun doute sur l’interdiction de ce type de discrimination en vertu du droit à l’égalité. Toutefois, le Comité relève un manque de clarté quant à l’acceptation de la proposition de l’État partie. En outre, bien que la Constitution, au paragraphe 2 de son article 12, garantisse l’égalité des femmes et des hommes, le Comité note avec préoccupation ce qui suit :

a)Le paragraphe 2 de l’article 12 n’interdit pas la discrimination directe et indirecte à l’égard des femmes, comme l’exige l’article premier de la Convention;

b)Le paragraphe 1 de l’article 16 de la Constitution ne permet pas le contrôle judiciaire des lois discriminatoires qui existaient avant la promulgation de la Constitution;

c)Les lois et les politiques ne traitent pas de la discrimination croisée.

11. Le Comité recommande que, dans des délais clairement définis, l ’ État partie :

a) Assure la pleine participation des femmes dans le processus d ’ élaboration de la nouvelle Constitution;

b) Prenne dûment en considération la proposition faite par le Sous-Comité pour les droits fondamentaux de l ’ Assemblée constituante visant à faire figurer l ’ orientation et l ’ identité sexuelles parmi les motifs de discrimination;

c) Incorpore dans la législation nationale le principe d ’ égalité et de non-discrimination, conformément aux articles 1 et 2 de la Convention, comme il a été recommandé précédemment ( CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 15);

d) Abroge le paragraphe 1 de l ’ article 16 de la Constitution visant à introduire un contrôle judiciaire de toutes les lois;

e) Adopte et mette en œuvre des politiques et des programmes qui prennent en compte la discrimination croisée, y compris la discrimination fondée sur la caste.

Lois discriminatoires

12.Le Comité note les recommandations formulées dans le plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme visant à examiner et abroger, dans un délai de cinq ans, toutes les lois discriminatoires portant atteinte aux droits fondamentaux. Il note également a) que le projet d’amendement portant abrogation des dispositions discriminatoires de l’ordonnance sur la mise en valeur des terres applicable aux successions, à l’héritage et à la communauté de biens a été transmis au Département de rédaction des textes juridiques et b) qu’un sous-comité du Conseil des ministres chargé de proposer des modifications à la loi sur le mariage et le divorce musulmans a été créé en octobre 2016. Le Comité est préoccupé par l’absence de progrès en ce qui concerne la réforme des dispositions discriminatoires du droit kandyan et du régime thesawalamai.

13.  Le Comité appelle l ’ attention sur les liens entre l ’ article premier et l ’ article 2 de la Convention et la cible 5.1 des objectifs de développement durable, qui consiste à mettre un terme à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et des filles. Le Comité réitère ses précédentes recommandations ( A/57/38 , première partie, par. 275 et CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 17) et recommande à l ’ État partie d ’ accélérer son processus de réforme législative, avec la pleine participation des femmes, et de procéder, dans un délai précis, à l ’ examen et à l ’ abrogation de toutes les lois discriminatoires qui violent les droits fondamentaux, et en particulier :

a) D ’ abroger les dispositions discriminatoires de l ’ ordonnance sur la mise en valeur des terres applicable aux successions, à l ’ héritage et à la communauté de biens;

b) De modifier toutes les dispositions du droit des personnes, y compris le droit musulman et kandyan et le régime thesawalamai, en supprimant les dispositions discriminatoires qui régissent la propriété, l ’ héritage, le transfert et la cession de biens fonciers, ainsi que les dispositions régissant la capacité juridique, le mariage, le divorce et la garde des enfants.

Accès à la justice

14.Le Comité est préoccupé par les obstacles persistants qui entravent l’accès des femmes à la justice, notamment :

a)Le manque de connaissances concernant l’égalité des sexes chez les fonctionnaires chargés de l’application des lois et les juristes;

b)Les barrières linguistiques auxquelles se heurtent les femmes qui veulent faire valoir leurs droits, en particulier les femmes tamoules;

c)Les préjugés sociaux et culturels qui découragent les femmes et les filles victimes de dénoncer la violence sexuelle et sexiste, ainsi que la crainte de représailles.

15. Rappelant sa Recommandation générale n o  33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De procéder à un renforcement systématique des capacités des juges, des procureurs, des avocats, des agents de police et autres responsables de l ’ application des lois en vertu de la Convention et des recommandations générales du Comité et sa jurisprudence en vertu du Protocole facultatif afin de garantir que le pouvoir judiciaire soit indépendant, impartial et professionnel et qu ’ il tienne compte des disparités entre les sexes en tant que moyen de protéger les droits des femmes;

b) D ’ accroître le nombre d ’ agents de la force publique parlant le tamoul dans le nord et l ’ est du pays;

c) D ’ améliorer la culture juridique des femmes et sensibiliser les femmes et les hommes à leurs droits afin d ’ éliminer la stigmatisation des femmes et des filles qui revendiquent leurs droits.

Les femmes et la paix et la sécurité : mécanismes de justice transitionnelle

16.Le Comité se félicite de l’élaboration de programmes de justice transitionnelle, de réinstallation et de réforme constitutionnelle, notamment la constitution en 2016 d’une équipe spéciale de consultation sur l’élaboration et la mise en œuvre des mécanismes de recherche de la vérité, de justice, de réparation et de non-répétition, conformément à la résolution 30/1 du Conseil des droits de l’homme. Le Comité note que l’équipe spéciale a rédigé la version définitive de son rapport en janvier 2017. Il note toutefois avec préoccupation :

a)La sous-représentation des femmes dans les processus de consolidation de la paix, de reconstruction et de réconciliation et l’absence d’une version définitive d’un plan d’action national pour l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et des résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité en vue de guider les processus d’après-conflit dans l’État partie;

b)La lenteur des progrès accomplis dans la mise en place de structures permettant l’élaboration et la mise en œuvre des différentes composantes d’une stratégie globale de justice transitionnelle;

c)Les retards pris dans la promulgation de la loi no 14 relative au Bureau des personnes disparues, et dans les rapports signalant que la loi pourrait être modifiée en supprimant l’alinéa a) du paragraphe 11, qui prévoit une coopération internationale.

17. Le Comité rappelle ses Recommandations générales n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales et n o  30 (2013) sur le rôle des femmes dans la prévention des conflits et les femmes dans les situations de conflit et d ’ après-conflit et recommande à l ’ État partie :

a) D ’ associer pleinement les femmes à toutes les étapes de la reconstruction après un conflit, conformément à la résolution 1325 (2000) , de mettre en œuvre les recommandations de l ’ équipe spéciale de consultation préconisant une représentation supérieure à 50 % de femmes dans tous les mécanismes de justice transitionnelle, de finaliser un plan d ’ action national global pour cette résolution prévoyant une feuille de route assortie d ’ un calendrier précis, de points de référence, d ’ un budget spécial et d ’ un mécanisme de suivi régulier et de prendre en considération l ’ éventail complet des résolutions ultérieures 1820 (2008) , 1888 (2009) , 1889 (2009) , 2122 (2013) et 2242 (2015) du Conseil de sécurité et la Recommandation générale n o  30 du Comité;

b) D ’ assurer la participation des juges, des procureurs, des enquêteurs et des avocats dans les mécanismes d ’ application du principe de responsabilité comme garantie nécessaire de l ’ indépendance et de l ’ impartialité du processus, conformément au paragraphe 6 de la résolution 30/1 du Conseil des droits de l ’ homme;

c) D ’ accélérer l ’ examen et la modification de la loi sur l ’ aide et la protection des victimes de crimes et des témoins afin d ’ y incorporer de meilleures garanties d ’ indépendance et d ’ efficacité du pouvoir judiciaire et des programmes de protection des témoins, conformément aux normes internationales.

Mécanisme national de promotion de la femme

18.Le Comité se félicite de l’approbation par le Conseil des ministres d’une proposition relative à la création d’une commission nationale indépendante des femmes en 2017, d’une politique sur les ménages dirigés par des femmes et d’une proposition visant à créer des comités pour l’égalité des sexes en 2016. Il est préoccupé par le fait que la fragmentation du cadre national peut nuire gravement à l’efficacité de la promotion des droits des femmes dans l’État partie. Il note avec préoccupation que tous les plans, critères et échéanciers finalisés n’ont pas été rendus publics ni leurs ressources allouées, et que les travaux du Comité directeur interministériel chargé du suivi de ces plans sont peu connus, malgré l’existence de la loi no 12 de 2016 sur le droit à l’information. Le Comité réitère sa préoccupation (CEDAW/C/LKA/CO/7, par. 16) en ce qui concerne l’absence de calendrier prévoyant la mise en place de la Commission nationale des femmes.

19. Rappelant sa Recommandation générale n o  6 (1988) sur les mécanismes nationaux et la publicité efficaces, ainsi que les orientations contenues dans la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, notamment en ce qui concerne les conditions nécessaires au fonctionnement efficace des mécanismes nationaux, le Comité réitère ses précédentes recommandations ( A/57/38 , première partie, par. 277 et CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 19) et recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les différents plans d ’ action existants et les consolider dans une stratégie cohérente et d ’ assurer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à leur mise en œuvre;

b) D ’ assurer, selon un calendrier donné, l ’ établissement législatif et le fonctionnement efficace d ’ une commission nationale indépendante des femmes;

c) D ’ assurer la participation active de la société civile et de la Commission nationale des femmes dans le suivi et l ’ évaluation du plan d ’ action consolidé pour la promotion des droits de la femme dans l ’ État partie.

Mesures temporaires spéciales

20.Le Comité réitère sa préoccupation antérieure (CEDAW/C/LKA/CO/7, par. 20) en ce qui concerne l’absence d’informations sur l’utilisation de mesures temporaires spéciales pour accélérer la réalisation de l’égalité réelle entre les hommes et les femmes dans tous les domaines visés par la Convention.

21. Conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et de sa Recommandation générale n o  25, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, assorties de cibles et de mesures d ’ encouragement explicites, de programmes d ’ information et d ’ appui, de sanctions juridiques, de crédits budgétaires spéciaux et d ’ autres dispositions préventives axées sur les résultats pour accélérer la concrétisation de l ’ égalité matérielle entre les hommes et les femmes, en particulier dans la vie publique et politique et dans la prise de décisions et dans les domaines de l ’ éducation et de l ’ emploi, en accordant une attention particulière aux femmes des minorités ethniques, religieuses et sexuelles, aux femmes chefs de ménage, aux femmes déplacées et aux femmes handicapées.

Stéréotypes et violence sexiste à l’égard des femmes

22.Le Comité se félicite des stratégies adoptées pour éliminer les stéréotypes dans les médias, qui figurent dans le plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme et le plan d’action national de lutte contre la violence sexuelle et sexiste, des recommandations de haut niveau visant à ériger le viol conjugal en infraction lorsque les circonstances révèlent l’absence de consentement d’un conjoint, quel que soit le degré de violence que cela implique, et des modifications proposées en vue de renforcer la prévention de la loi sur la violence familiale, notamment en éliminant les dispositions discriminatoires sur la crédibilité des éléments de preuve apportés par les femmes de l’ordonnance relative aux éléments de preuve. Le Comité demeure toutefois préoccupé par la persistance d’attitudes patriarcales et de stéréotypes discriminatoires qui cautionnent une culture d’impunité pour les actes de violence sexuelle et sexiste. Il note avec préoccupation :

a)Le niveau élevé de violence sexiste à l’égard des femmes dans l’État partie et le fait que les cas de violence contre les femmes ne sont pas signalés en raison de l’absence de législation adéquate et de l’accès limité des femmes à la justice pour diverses raisons, y compris la peur des représailles, la confiance limitée envers la police et le système judiciaire, les retards excessifs pris dans les enquêtes et le jugement de ces affaires, les résultats arbitraires et les taux très faibles de condamnation;

b)Dans les cas de violence familiale, l’obligation des victimes de participer à un processus de médiation, condition préalable pour engager des poursuitesdevant un tribunal, ce qui se traduit chez les femmes par un retrait de leurs plaintes en raison d’actes d’intimidation;

c)L’absence de collecte systématique de données relatives aux enquêtes, aux poursuites et à la condamnation concernant des actes de violence sexiste contre les femmes, l’accès limité pour les femmes et les filles à l’assistance et à la protection des victimes et le nombre de refuges dans l’État partie.

23. Rappelant ses Recommandations générales n o  19 (1992) sur la violence contre les femmes et n o  33, le Comité réitère ses précédentes recommandations ( A/57/38 , première partie, par. 289 et CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 23 et 25) et recommande à l ’ État partie :

a) D ’ ériger le viol conjugal en infraction et d ’ élargir la définition de la torture dans la loi sur la torture pour y inclure des formes graves de violence sexuelle;

b) De modifier la loi sur la prévention de la violence familiale pour veiller à ce que les ordonnances de protection émises par le tribunal soient immédiatement communiquées aux parties et effectivement appliquées et de supprimer toute obligation de participer à un processus de médiation avant de porter une affaire devant les tribunaux;

c) De mettre en place une unité spéciale au sein du ministère public pour accélérer le traitement des affaires de violence sexuelle et d ’ adopter une loi pour interdire les peines avec sursis et prévoir des peines minimales obligatoires pour les actes de violence contre les femmes;

d) De mettre en œuvre efficacement le plan d ’ action national pour lutter contre la violence sexuelle et sexiste et prévoir des ressources suffisantes afin d ’ assurer sa mise en œuvre coordonnée et efficace, notamment en augmentant le nombre de refuges et en fournissant un traitement médical, un soutien juridique, des services de réadaptation psychosociale, des programmes de réinsertion et une indemnisation aux victimes;

e) D ’ intensifier les efforts de sensibilisation du public par le biais de campagnes médiatiques stratégiques et de programmes éducatifs pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires à l ’ égard des femmes et la violence sexiste;

f) D ’ assurer la collecte et l ’ analyse systématiques des données sur toutes les formes de violence sexiste contre les femmes, ventilées selon l ’ âge, le groupe ethnique, la région et la relation entre la victime et l ’ auteur, comme il a été recommandé précédemment par le Comité ( A/57/38 , première partie, par. 285).

Violence sexuelle et sexiste liée aux conflits

24.Le Comité note avec préoccupation :

a)Le climat d’insécurité incessant, en particulier pour les femmes, dans les zones touchées par un conflit;

b)Les graves allégations selon lesquelles des membres des forces armées et de la police auraient commis des actes de harcèlement, de violence, y compris des viols, des enlèvements, de la torture, de la corruption et de l’esclavage sexuels, et auraient exercé une surveillance injustifiée, y compris des violations de domicile, en particulier de femmes dans des provinces du nord et de l’est, en ciblant spécifiquement des femmes tamoules, des femmes chefs de ménage, d’anciennes combattantes, des veuves de guerre et des membres de la famille des femmes de disparus qui recherchent la vérité, la justice et la responsabilité, ainsi que des défenseurs des droits fondamentaux des femmes;

c)Le fait que l’État partie n’a pas été en mesure de fournir au Comité les données demandées sur le nombre d’enquêtes, de poursuites, de condamnations et de peines prononcées pour des actes de violence sexuelle et sexiste contre les femmes perpétrées par les forces armées et la police.

25. Conformément à la Convention et à la Recommandation générale n o  30, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en œuvre la politique de tolérance zéro à l ’ égard des violences sexuelles perpétrées par l ’ armée et la police, en accélérant la procédure d ’ enquête sur toutes les allégations de violence perpétrée contre les femmes et les filles, y compris les arrestations arbitraires, la torture et la violence sexuelle, ainsi que la surveillance et le harcèlement, aux fins de poursuite et de condamnation éventuelles des responsables;

b) De renforcer les capacités nationales d ’ enquête et de poursuite et la protection et le soutien des victimes et des témoins, notamment en assurant la sécurité de ces derniers et la confidentialité de leur témoignage, y compris ceux vivant à l ’ étranger, et en veillant à ce que les poursuites soient menées de manière impartiale, objective et en temps opportun selon les normes internationales, et de garantir le droit des victimes à réparation, le droit des victimes et des sociétés à connaître la vérité sur les violations et les garanties de non-répétition des violations, conformément au droit international;

c) De réaliser une cartographie complète de toutes les enquêtes pénales en cours, des habeas corpus et des pétitions des droits fondamentaux relatifs à des cas de violence sexuelle et des conclusions de toutes les commissions d ’ enquête, en particulier lorsque les affaires impliquent les forces armées et la police.

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

26.Le Comité se félicite de l’adoption, en 2016, du plan stratégique national 2015-2019 pour surveiller et combattre la traite des personnes. Il note toutefois les défis que représente sa mise en œuvre et réitère sa préoccupation (CEDAW/C/LKA/CO/7, par. 26) au sujet du faible nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations des auteurs. Le Comité note également avec préoccupation le recours au délit de proxénétisme, conformément à l’alinéa a) de l’article 360 du Code pénal, dans les poursuites plutôt qu’à l’alinéa c) de l’article 360, qui érige la traite en infraction pénale. Il est également préoccupé par le fait que les limites d’âge minimal pour la migration des travailleuses domestiques puissent perpétuer la traite. Le Comité constate à nouveau avec préoccupation (CEDAW/C/LKA/CO/7, par. 28) que la police invoque l’ordonnance sur le vagabondage pour arrêter arbitrairement des travailleuses du sexe, en utilisant le fait de posséder des préservatifs comme preuve qu’elles se livrent à la prostitution, et soumettre ces femmes au harcèlement, à la corruption sexuelle et à l’extorsion.

27. Le Comité réitère ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 27 et 29) et attire l ’ attention sur la cible 5.2 des objectifs de développement durable visant à éliminer toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes et des filles dans les sphères publique et privée, y compris la traite et l ’ exploitation sexuelle et autres formes d ’ exploitation, et recommande à l ’ État partie :

a) De fournir les ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour la mise en œuvre et le suivi efficaces du plan stratégique national visant à prévenir et combattre la traite des êtres humains;

b) De continuer à renforcer les capacités des responsables de l ’ application des lois et autres agents publics concernés concernant l ’ identification précoce, l ’ orientation, la réadaptation et l ’ intégration sociale des victimes de la traite, notamment en leur donnant accès à des refuges et à une assistance judiciaire, médicale et psychosociale;

c) De prévenir la traite, d ’ en poursuivre les auteurs, de les punir comme il se doit et d ’ adopter des mesures de protection adaptées aux besoins spécifiques des femmes et des filles qui en sont victimes;

d) De combler les lacunes juridiques qui entravent la poursuite des auteurs de la traite en vertu de l ’ alinéa a) de l ’ article 360 du Code pénal;

e) De recueillir systématiquement des données ventilées par sexe sur l ’ exploitation de la prostitution et la traite des personnes;

f) D ’ intensifier les efforts en matière de coopération bilatérale, régionale et internationale en vue de prévenir la traite, notamment en exécutant des protocoles d ’ entente avec d ’ autres pays de la région et en harmonisant les procédures juridiques pour poursuivre les auteurs, en particulier avec des États voisins et d ’ autres États concernés membres de l ’ Association sud-asiatique de coopération régionale;

g) D ’ abroger l ’ ordonnance sur le vagabondage et, dans l ’ intervalle, imposer des sanctions aux agents de police qui abusent de l ’ ordonnance pour harceler les prostituées et les femmes des minorités sexuelles et veiller à ce que les victimes bénéficient d ’ une protection et d ’ un soutien tenant compte de la problématique hommes-femmes, y compris des programmes pour les femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

Participation à la vie politique et publique et à la prise de décisions

28.Le Comité se félicite de l’introduction d’un quota de 25 % de candidatures féminines au niveau des collectivités territoriales dans la loi portant modification de la loi sur les élections locales et de l’approbation par le Conseil des ministres, en 2016, d’une proposition visant à modifier la loi no 2 de 1988 sur les élections des conseils provinciaux, instaurant un quota d’au moins 30 % de femmes sur les déclarations de candidature des partis politiques pour chaque province. Il note toutefois avec préoccupation que les femmes n’ont représenté que 5 % des parlementaires nationaux au cours des 15 dernières années et que le nombre de femmes ministres reste très faible. Il déplore également l’absence d’informations sur la représentation des minorités, notamment des femmes tamoules et musulmanes et des femmes handicapées, dans des postes de prise de décisions.

29. Conformément à sa Recommandation générale n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, le Comité réitère ses précédentes recommandations ( A/57/38 , première partie, par. 279 et CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 31). Il recommande à l ’ État partie de mener des politiques durables visant à promouvoir la pleine participation des femmes, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, à la prise de décisions aux niveaux national et local et recommande également :

a) D ’ assurer, dans les délais fixés, l ’ adoption du quota minimum proposé de 30 % de candidatures féminines au sein des partis politiques au niveau provincial et d ’ introduire un quota similaire pour les femmes candidates au niveau national;

b) D ’ adopter des mesures, notamment des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la Recommandation générale n o  25 du Comité, sous la forme de quotas pour les candidates, y compris les femmes des minorités, en vue d ’ assurer la représentation requise des femmes, notamment des groupes minoritaires;

c) D ’ entreprendre des activités de sensibilisation à l ’ intention du public en général et des partis politiques sur l ’ importance de la participation des femmes à la prise de décisions afin d ’ éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles des femmes et des hommes dans la famille et la société;

d) De mettre en place un système de collecte de données ventilées sur la participation des femmes représentant diverses minorités à des postes de décision dans tous les secteurs et à tous les niveaux.

Éducation

30.Le Comité se félicite du taux d’alphabétisation élevé des femmes, de l’inscription quasi universelle des filles et des garçons au niveau de l’enseignement primaire et de l’augmentation de l’âge de la scolarité obligatoire de 14 à 16 ans. Il déplore toutefois :

a)Le faible niveau d’instruction des femmes de familles à faible revenu, en particulier celles de groupes ethniques minoritaires et celles dont les écoles sont situées à proximité des activités de pêche et des plantations dans les provinces du nord et de l’est et dans les zones urbaines et rurales pauvres, des enfants de travailleurs migrants dont les parents travaillent à l’étranger, des filles des ménages dirigés par des femmes, des victimes de mariages d’enfants et de mariages précoces et des filles handicapées;

b)L’absence de programmes visant à assurer l’éducation comme moyen de réparation et de réconciliation et de protection des filles vivant dans une zone touchée par un conflit contre le harcèlement, l’exploitation et la violence dans les écoles;

c)La sous-représentation des femmes et des filles dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques dans l’enseignement supérieur et des enseignantes et des chercheuses dans ces disciplines;

d)Le faible nombre d’écoles professionnelles dotées d’infrastructures adéquates pour les filles, en particulier dans les zones touchées par un conflit;

e)Le fait qu’une grossesse précoce demeure une cause d’abandon scolaire des filles.

31. Le Comité, conformément à la cible 4.5 des objectifs de développement durable consistant à éliminer les inégalités entre les sexes dans le domaine de l ’ éducation, rappelle ses recommandations antérieures ( A/57/38 , première partie, par. 281 et CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 33) et recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place des mesures temporaires spéciales visant à éliminer les disparités dans l ’ accès à une éducation de qualité, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la Recommandation générale n o  25 du Comité;

b) D ’ assurer la mise en œuvre, le suivi et l ’ évaluation des droits de l ’ homme et de l ’ éducation pour la paix dans les programmes scolaires à tous les niveaux d ’ enseignement;

c) De lutter contre les stéréotypes sexistes dans l ’ éducation et intégrer une démarche soucieuse d ’ égalité entre les sexes dans les politiques nationales d ’ éducation, y compris le cadre et le programme de développement du secteur de l ’ éducation, et intégrer l ’ enseignement sur l ’ égalité des sexes dans les programmes scolaires au niveau primaire;

d) D ’ élaborer et élargir des programmes tenant compte de la problématique hommes-femmes, y compris des mesures temporaires spéciales, dans le domaine des technologies de pointe, l ’ enseignement technique et la formation professionnelle, afin d ’ orienter les programmes d ’ études et le cheminement professionnel des femmes et des filles vers des domaines techniques et leur permettre ainsi d ’ occuper des emplois dans ces secteurs;

e) D ’ institutionnaliser une éducation complète, adaptée à l ’ âge, sur les droits et la santé en matière de sexualité et de procréation, portant sur les comportements sexuels responsables et accordant une attention particulière à la prévention des grossesses précoces.

Emploi

32.Le Comité attire l’attention sur le niveau historiquement faible de participation des femmes dans le marché du travail et le taux de chômage féminin élevé. Il est préoccupé par l’écart de rémunération important entre les sexes, l’application limitée et l’absence de suivi du principe du salaire égal pour un travail de valeur égale et la concentration des femmes dans le secteur de l’emploi informel. Le Comité est également préoccupé par le manque de données ventilées sur les cas de harcèlement sexuel sur le lieu de travail et sur les mesures prises pour y remédier. Il note avec préoccupation l’absence de mesures globales pour faciliter le retour au travail des anciennes combattantes, compte tenu de leurs compétences particulières.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter des mesures visant à faciliter l ’ accès des femmes à des domaines traditionnellement dominés par les hommes;

b) D ’ appliquer des lois et des politiques destinées à protéger et promouvoir les droits des femmes qui travaillent dans des secteurs informels et des zones de libre-échange;

c) De réduire l ’ écart de rémunération entre les hommes et les femmes en réalisant périodiquement des enquêtes sur la rémunération et en mettant en place des mécanismes de surveillance et de réglementation efficaces des pratiques d ’ emploi et de recrutement;

d) De recueillir des données ventilées sur le harcèlement sexuel dans les secteurs public et privé, y compris sur les sanctions infligées aux auteurs;

e) D ’ aider les anciennes combattantes à avoir accès à un emploi approprié et à des possibilités de formation professionnelle non stéréotypée;

f) De ratifier la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o  189) de l ’ Organisation internationale du Travail.

Santé

34.Le Comité félicite l’État partie de son investissement dans la santé, notamment de la fourniture de services médicaux gratuits pour tous les citoyens. Il se félicite également de la diminution de la mortalité maternelle et infantile. Il prend note des recommandations d’un comité nommé par le Ministre de la Justice en 2016 sur la décriminalisation de l’avortement. Il est toutefois préoccupé par l’absence d’informations ou de données précises sur les points suivants :

a)La disponibilité de services de qualité en matière de soins de santé pour les femmes dans les zones touchées par un conflit et le secteur des plantations et l’existence de programmes et de soutien pour faire face au traumatisme psychosocial des femmes touchées par la guerre;

b)La disponibilité et l’accessibilité des informations sur la santé sexuelle qui prennent en compte tous les besoins des femmes et des filles;

c)Le manque de données sur la prévalence du VIH dans l’État partie, y compris parmi les femmes et les filles, et l’existence de programmes de prévention et de détection précoce du VIH.

35. Le Comité, rappelant sa Recommandation générale n o  24 (1999) sur les femmes et la santé, attire l ’ attention sur les cibles 3.1 et 3.7 des objectifs de développement durable sur la réduction des taux de mortalité maternelle mondiaux et l ’ accès universel aux services de santé en matière de sexualité et de procréation, et recommande à l ’ État partie :

a) De modifier sa législation pour légaliser l ’ avortement, non seulement dans les cas où la vie de la femme enceinte est menacée, mais aussi dans tous les cas de viol, d ’ inceste et de malformation fœtale sévère, et décriminaliser l ’ avortement dans tous les autres cas;

b) De supprimer les obstacles à l ’ accès des femmes à des services d ’ avortement sans risque, comme l ’ exigence d ’ une enquête judiciaire pour déterminer s ’ il devrait y avoir une interruption médicale de la grossesse et la nécessité d ’ un certificat médical autorisant un avortement;

c) De prévoir des budgets suffisants pour répondre aux besoins de santé des femmes dans les zones touchées par un conflit et le secteur des plantations, en particulier en matière de santé de la sexualité et de la procréation;

d) De veiller à ce que toutes les femmes et les filles aient accès à l ’ information sur la sexualité;

e) De fournir des données spécifiques à la région sur la transmission et la prévalence du VIH et sur la disponibilité et l ’ accessibilité des programmes de prévention et de détection précoce pour les femmes et les filles vivant avec le VIH.

Femmes chefs de ménage

36.Le Comité se félicite de la politique nationale sur les femmes chefs de ménage, qui a été approuvée en 2016, et du plan d’action national qui l’accompagne pour la période 2017-2019. Le Comité note la forte proportion de femmes chefs de ménage dans l’État partie, représentant 24 % de la population féminine, et craint que leur vulnérabilité soit aggravée par leur exposition à des formes croisées de discrimination. Le Comité note avec préoccupation :

a)Le fait que les définitions variées et restrictives utilisées par les autorités pour désigner « les ménages dirigés par des femmes » en excluent beaucoup des avantages sociaux et des programmes d’aide sociale;

b)L’insuffisance des fonds alloués à ces programmes d’aide sociale, leur mise en œuvre limitée, le manque d’information à leur sujet et l’abus de pouvoir administratif par le biais de demandes de faveurs sexuelles chez les femmes chefs de ménage;

c)La vulnérabilité des femmes chefs de ménage à la pauvreté et l’impact négatif des programmes de construction de logements qui ont exacerbé le niveau d’endettement de nombreux ménages dans les provinces du nord et de l’est;

d)L’exploitation des femmes par des sociétés financières privées en raison de leur accès limité au crédit;

e)L’incapacité de bon nombre de femmes dans le nord et l’est du pays à avoir accès à des subventions au logement, à la terre et aux services sociaux en raison de la perte de certificats de naissance, de titres fonciers et de cartes d’identité nationale pendant la guerre.

37. Le Comité réitère ses recommandations formulées en 2002 ( A/57/38 , première partie, par. 297) et recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place une base de données ventilées sur les femmes chefs de ménage dans l ’ État partie qui tient compte de l ’ hétérogénéité au sein du groupe et de l ’ utiliser pour établir une classification claire et inclusive des femmes chefs de ménage devant être utilisée de manière uniforme dans les politiques et les programmes d ’ aide sociale et de réinstallation;

b) De modifier la loi sur la corruption pour y inclure l ’ infraction de corruption sexuelle, en veillant à ce que les auteurs soient dûment sanctionnés;

c) De créer un système de sécurité sociale pour les femmes chefs de ménage et d ’ assurer une large diffusion des informations relatives aux programmes d ’ aide sociale;

d) D ’ assurer l ’ égalité des sexes dans les critères d ’ admissibilité aux prêts bancaires, aux prêts hypothécaires et autres formes de crédit financier auprès des institutions publiques et privées en supprimant les exigences supplémentaires imposées aux femmes;

e) D ’ introduire des systèmes de crédit sans intérêt ou à faible taux d ’ intérêt pour les femmes chefs de ménage et de famille vivant dans la pauvreté, ainsi que des plans de relèvement adaptés à leurs activités rémunératrices;

f) De mettre en place un système bien coordonné et systématique pour la délivrance de documents personnels et de titres de propriété afin d ’ assurer aux femmes l ’ égalité d ’ accès aux moyens de subsistance, au logement et à la terre en leur nom propre.

Femmes migrantes

38.Le Comité est préoccupé par l’existence de règlements discriminatoires imposant des restrictions uniquement aux femmes migrantes, à savoir, la désignation de tuteurs pour tous les enfants de moins de 6 ans. Il note également avec préoccupation l’interdiction faite aux femmes qui ont des enfants ayant des besoins spéciaux de migrer.

39. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abolir la présentation d ’ un rapport sur la situation de famille, en vue de lever les restrictions fondées sur le sexe relatives à la migration.

Femmes rurales

40.Le Comité prend note des efforts de l’État partie visant à promouvoir le développement rural, notamment l’approbation du Conseil des ministres, en 2016, d’une proposition suggérant de consacrer au minimum 25 % de tous les investissements au développement économique des femmes en zones rurales. Il note également que 77 % de la population vit dans les zones rurales et que les femmes soutiennent activement les industries rurales. Le Comité est préoccupé par la faible participation des femmes rurales àla direction des syndicats des industries rurales, leurs conditions de travail difficiles et les bas salaires, ainsi que le niveau élevé de toxicomanie chez les femmes dans le secteur de la pêche. Le Comité se préoccupe en outre du fait que l’ordonnance sur la mise en valeur des terres (1935) continue de limiter l’accès des femmes à la terre en donnant la préférence aux héritiers mâles en ce qui concerne l’héritage de biens fonciers.

41. Rappelant sa Recommandation générale n o  33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place un mécanisme pour assurer la réalisation, le suivi et l ’ évaluation des investissements du développement économique rural au profit des femmes;

b) D ’ utiliser des mesures temporaires spéciales pour assurer la participation des femmes à la direction des syndicats des industries rurales;

c) De s ’ attaquer aux mauvaises conditions de travail dans l ’ industrie de la pêche et de fournir aux femmes toxicomanes un soutien et des conseils en matière de santé;

d) De s ’ attaquer aux problèmes de l ’ écart de rémunération et du refus d ’ accorder un congé de maternité dans les industries rurales.

Militarisation des terres

42.Le Comité est préoccupé par la militarisation continue de vastes zones de terres privées dans les régions du pays touchées par un conflit, l’usurpation des responsabilités de l’administration civile par les militaires et les déplacements à grande échelle d’hommes et de femmes en résultant dans l’État partie, où 32 camps de personnes déplacées sont toujours en activité. Il est particulièrement préoccupé par le fait que cette militarisation constitue un obstacle à la réinstallation des femmes déplacées, à la recherche de solutions durables en matière de logements et à leur capacité à retrouver leurs moyens de subsistance.

43. Le Comité rappelle sa Recommandation générale n o  34 et recommande à l ’ État partie :

a) De démilitariser d ’ urgence les terres, en particulier dans le nord, de les restituer aux femmes et aux hommes déplacés pour leur permettre de récupérer leurs terres et d ’ avoir à nouveau accès à leurs moyens de subsistance et d ’ interdire aux militaires d ’ assumer des fonctions relevant de l ’ administration civile;

b) De cartographier adéquatement les terres actuellement occupées par les militaires et celles qui ne sont pas en cours d ’ utilisation ou qui sont utilisées de manière injustifiable à des fins militaires, en vue de retourner ces terres sans plus tarder à leurs propriétaires légitimes;

c) De mettre en œuvre la recommandation du plan d ’ action national pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme afin de veiller à ce que les femmes chefs de ménage et les personnes déplacées jouissent d ’ un accès adéquat et durable au logement;

d) De veiller à ce que les plaintes concernant l ’ accaparement des terres, notamment par l ’ armée, soient étudiées et que les auteurs soient dûment sanctionnés.

Lois discriminatoires dans le mariage et les relations familiales

44.Le Comité croit comprendre qu’un sous-comité du Conseil des ministres a été nommé en 2016 pour modifier la loi sur le mariage et le divorce musulmans. Il note cependant que le comité créé par le Ministre de la Justice en 2009, chargé d’examiner le droit musulman de la personne et les tribunaux quazi et de proposer des réformes à cet égard n’a formulé aucune recommandation. Le Comité réitère ses préoccupations antérieures (CEDAW/C/LKA/CO/7, par. 44) et, étant donné que la loi impose une compétence exclusive et obligatoire en matière de mariage musulman, se dit expressément préoccupé par le fait :

a)Qu’elle ne fixe aucun âge minimum pour le mariage et que les filles de moins de 12 ans sont autorisées à se marier;

b)Qu’elle réserve les postes d’huissier de justice et de juriste des quazi, de membre du Conseil des quazi et d’officier d’état civil aux musulmans de sexe masculin;

c)Que la loi sur le viol ne s’applique pas aux filles de moins de 16 ans légalement mariées en vertu du droit musulman qui ont des rapports sexuels avec leur mari sans qu’il y ait eu séparation légale.

45. Rappelant ses Recommandations générales n o  21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux et n o  29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, des rapports familiaux et de leur dissolution et la Recommandation générale/observation générale conjointe n o  31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et la Recommandation générale n o  18 du Comité des droits de l ’ enfant (2014) sur les pratiques préjudiciables, le Comité réitère ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/LKA/CO/7 , par. 45) et recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer un code de la famille unifié, conformément à la Convention, qui assure l ’ égalité des droits des femmes et des hommes dans les rapports familiaux, notamment en ce qui concerne le mariage, le divorce, l ’ héritage, les biens et les terres;

b) De modifier l ’ ordonnance générale sur l ’ enregistrement des mariages pour donner aux musulmanes le libre choix de se retirer du droit musulman de la personne afin d ’ être inscrites en vertu du droit commun;

c) De veiller à ce que les droits de propriété soient régis par le droit civil contractuel et le droit de propriété plutôt que par le droit religieux;

d) De porter à 18 ans l ’ âge minimum du mariage pour les femmes dans l ’ État partie;

e) D ’ éliminer toute restriction à la nomination de femmes comme quazi, membre du Conseil des quazi et officier d ’ état civil;

f) De modifier l ’ article 363 du Code pénal pour faire en sorte que le crime de viol s ’ applique à toutes les filles de moins de 16 ans, sans exception.

Collecte et analyse des données

46. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ améliorer la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données complètes, ventilées par sexe, âge, handicap, origine ethnique, lieu géographique et statut socioéconomique, et l ’ utilisation d ’ indicateurs mesurables pour évaluer les tendances dans la situation des femmes et des progrès accomplis par les femmes vers la réalisation d ’ une égalité réelle dans tous les domaines couverts par la Convention.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

47. Le Comité demande à l ’ État partie de tenir compte de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing dans ses efforts de mise en œuvre des dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

48. Le Comité appelle à la réalisation de l ’ égalité effective entre les sexes, conformément aux dispositions de la Convention, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

Diffusion

49. Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à ce que les présentes observations finales soient diffusées en temps voulu, dans les langues officielles de l ’ État partie, auprès des institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier le Gouvernement, les ministères, le Parlement et l ’ appareil judiciaire, afin d ’ en assurer la mise en œuvre intégrale.

Assistance technique

50. Le Comité recommande à l ’ État partie de lier la mise en œuvre de la Convention à ses efforts de développement et de faire appel, à cet égard, à une assistance technique régionale ou internationale.

Ratification d’autres traités

51. Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suivi des observations finales

52. Le Comité demande à l ’ État partie de lui communiquer dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour donner suite aux recommandations énoncées aux alinéas a) et b) du paragraphe 13, à l ’ alinéa d) du paragraphe 23 et à l ’ alinéa c) du paragraphe 25 ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

53. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son neuvième rapport périodique en mars 2021. En cas de retard, le rapport devra couvrir toute la période allant jusqu ’ à la date de sa soumission.

54. Le Comité demande à l ’ État partie de suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, y compris des directives relatives à un document de base commun et à des documents spécifiques à chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).