à l’égard des femmes

* Adopté par le Comité à sa cinquantième session (3-21 octobre 2011).

** Conformément aux informations communiquées aux États parties concernant le traitement de leurs rapports, le présent document n’a pas été revu par les services d’édition.

Observations finales sur le rapport unique du Lesotho valant rapport initial et deuxième, troisièmeet quatrième rapports périodiques *

Additif

Informations communiquées par le Lesothoau titre de la procédure de suivi des observations finales **

Avant-propos

Il y a 30 ans, le 18 décembre 1979, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, connue également sous le nom de Charte des droits de la femme et de Convention sur les femmes, a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies. Le Lesotho a ratifié la Convention en 1995.

La Convention impose de déterminer et d’éliminer tous les facteurs et toutes les formes interdépendants de discrimination à l’égard des femmes, qu’ils soient de nature institutionnelle, juridique ou idéologique. La Convention est un « traité antidiscrimination » qui vise à assurer la protection et la promotion des droits de la femme ainsi que l’égalité des sexes. Cela signifie que les États parties doivent non seulement veiller à ce que leur législation ne soit pas discriminatoire à l’égard des femmes, mais aussi garantir que toutes les dispositions nécessaires soient prises pour que les femmes puissent jouir de l’égalité dans la pratique.

À ces fins, conformément à l’article 18 de la Convention, le Gouvernement du Lesotho a tout fait pour établir un rapport complet, en juillet 2010, qui fasse apparaître les difficultés rencontrées et les progrès réalisés dans la voie de la reconnaissance et de la réalisation des droits de la femme. Le rapport appelle l’attention sur les mesures constitutionnelles, juridiques et administratives qui ont été prises pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention. Il s’agit notamment de l’adoption des lois et des politiques sectorielles requises. Le rapport donne en outre un aperçu des obstacles d’ordre social, culturel et autres qui entravent la promotion de l’égalité des sexes dans les domaines prioritaires visés dans la Convention. Il témoigne clairement de l’existence d’un partenariat, d’une coordination et d’une synergie durables entre le gouvernement, les partenaires dans le processus de développement et les organisations et réseaux de femmes, qui tendent à assurer la prise en compte du point de vue et des aspirations des femmes dans les programmes nationaux de développement.

Motsoahae T. ThabanePremier Ministre

Historique

Après avoir examiné le rapport unique valant rapport initial et deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques du Lesotho* à ses 1007e et 1008e séances le 11 octobre 2011, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a fait les observations finales ci-après. Le paragraphe 47 des observations finales contient une disposition relative au suivi de leur mise en œuvre demandant au Lesotho de fournir par écrit, dans les deux ans suivant la présentation de son rapport, des informations sur les mesures prises pour :

a)Abroger le paragraphe 4 b) et c) de l’article 18 de la Constitution;

b)Inclure dans la Constitution et autres mesures législatives appropriées des dispositions interdisant la discrimination directe et indirecte à l’égard des femmes dans les domaines public et privé et les questions telles que l’adoption, le mariage, le divorce, les funérailles, la transmission des biens, le décès ou autres questions qui relèvent du statut personnel;

c)Préparer un code unifié traitant les problèmes que posent l’inégalité en matière de droits successoraux, de propriété et de droits fonciers et la polygamie;

d)Modifier sans délai toutes les dispositions et règles administratives discriminatoires, notamment celles qui concernent la famille, le mariage et le divorce, et prendre toutes les mesures législatives qui s’imposent pour garantir que les femmes aient une part égale de l’ensemble des biens matrimoniaux, quelle qu’ait été leur contribution monétaire ou non monétaire, à ceux-ci;

e)Interdire la polygamie conformément à la Recommandation générale n° 21 du Comité.

Résumé

Introduction

Le Royaume du Lesotho reconnait que les droits des femmes sont encore lésés et qu’elles font toujours l’objet de discrimination en particulier dans les domaines coutumier et culturel; il est pourtant solidement établi dans le paragraphe 4) b) et c) de l’article 18 de la Constitution que, même si une règle de droit coutumier peut être discriminatoire, de facto elle ne le sera pas si elle appliquée à des personnes qui sont assujetties à cette loi. L’aspect discriminatoire est encore renforcé par l’article 10 de la Chieftainship Act (Loi relative à la dignité de Chef) de 1968 et l’article 11 des lois de Lerotholi de 1903 qui, toutes deux, sont discriminatoires à l’égard des femmes dans les domaines de la succession à la dignité de Chef et au trône et des droits successoraux.

Inégalité en matière de droits successoraux

Mesures constitutionnelles

L’article 26 du chapitre III de la Constitution du Lesotho stipule que le Lesotho adopte des politiques visant l’édification d’une société fondée sur l’égalité et la justice pour tous ses citoyens, notamment sans distinction fondée sur le sexe. Cet article oblige aussi le Lesotho à prendre les mesures appropriées afin de promouvoir l’égalité des chances pour les groupes défavorisés de la société en vue de leur permettre de participer pleinement dans tous les domaines de la vie publique.

Selon une condition énoncée au paragraphe 4 de l’article 18, rien de ce qui figure à la sous-section 4) n’empêche de légiférer conformément au principe de la politique de promotion d’une société fondée sur l’égalité et la justice pour tous les citoyens du Lesotho adoptée par l’État et, partant, d’éliminer toute loi discriminatoire. Cette partie de la Constitution permet au Parlement de promulguer des lois concernant des pratiques ou des lois coutumières discriminatoires et qui perpétuent l’inégalité. La loi de 2006 sur la capacité juridique des personnes mariées, la loi de 2010 sur le régime foncier, la loi de 1968 sur la dignité de Chef, la loi de 2012 sur les institutions financières, la loi de 1967 sur le registre des actes notariés, la loi de 2011 portant modification de la loi sur les élections locales et la loi de 2011 sur les élections à l’Assemblée nationale sont des exemples des lois que le Parlement a promulguées et amendées en application de cette condition.

Le 6e amendement à la Constitution du Lesotho prévoit la création de la Commission des droits de l’homme et le deuxième projet de texte de la législation y relatif est déjà élaboré. La Commission a en partie pour mandat d’encourager l’harmonisation des lois, politiques et pratiques nationales avec les instruments internationaux des droits de l’homme auxquels le Lesotho est partie. C’est une occasion de mettre en conformité toutes les lois nationales qui ne sont pas conformes aux engagements internationaux ou régionaux pris par le pays.

Mesures législatives

Le Ministère du genre a proposé d’harmoniser les lois de Lerotholi avec la loi sur la capacité juridique des personnes mariées (LCMPA) et ce processus en est au stade d’un projet de loi qui sera soumis au Parlement à sa prochaine session en août 2013. Cette harmonisation a pour objectif d’abroger l’article 11 des lois de Lerotholi qui est discriminatoire à l’égard des femmes en matière de droits successoraux et de donner aux veuves le contrôle du patrimoine commun après le décès de leurs époux conformément aux dispositions de la LCMPA. En vue d’élaborer un code unifié sur les droits successoraux, la Commission de la réforme législative examine actuellement la Proclamation n° 19 de 1935 relative à l’administration des biens, la loi n° 26 de 1873 sur les successions, la Proclamation n° 2 de 1953 sur la succession ab intestat, la loi de 1876 sur les testaments, la loi de 1974 sur le mariage afin de redresser la situation en ce qui concerne l’inégalité en matière de droits successoraux.

Un autre fait tout aussi important est la promulgation, par le Lesotho, de la loi foncière de 2010 dont le paragraphe 3) de l’article 4 rend inapplicable toute pratique coutumière qui serait incompatible avec ses dispositions; ainsi, toute pratique de droit coutumier qui serait discriminatoire dans le cas de problèmes fonciers devient inapplicable.

Mesures administratives

Outre des mesures constitutionnelles et législatives, le Lesotho a également créé la Land Administration Authority (LAA) (Administration foncière) qui est responsable de l’établissement efficace des baux et qui a aussi aidé à mettre effectivement en œuvre les dispositions de la loi sur la capacité juridique des personnes mariées et de la loi foncière de 2010 qui donnent aux femmes le droit de posséder des biens fonciers sans avoir besoin d’en hériter et de les faire enregistrer. Cette année, l’Administration foncière a organisé une série de réunions publiques dans tout le pays pour sensibiliser les hommes et les femmes Basotho à leurs droits fonciers et à leur enregistrement, en particulier les femmes qui en étaient privées avant la promulgation de la loi sur la capacité juridique des personnes mariées, celle-ci ayant influencé la promulgation de la loi foncière de 2010, ainsi que pour les informer sur les procédures à suivre. En même temps que cette initiative, le Gouvernement du Lesotho a également mis en place des tribunaux chargés des conflits fonciers pour accélérer l’accès à la justice et promouvoir la protection des droits économiques.

Le Département du genre a tenu et continue de tenir des réunions avec les Conseils communautaires afin de veiller à ce que les femmes ne soient pas confrontées à des problèmes d’attribution des terres au sein de ces Conseils. Le Gouvernement du Lesotho a aussi mis en place des programmes sur les droits relatifs à l’égalité des sexes et sur les droits économiques en sensibilisant, entre autres, les banques commerciales et les institutions financières au droit des femmes mariées à avoir accès au crédit comme le prévoit la loi de 2006 sur la capacité juridique des personnes mariées en utilisant la terre comme garantie si nécessaire.

Le Lesotho a également créé le Département de l’identité nationale et du registre de l’état civil dans le cadre du Ministère de l’intérieur qui procèdera entre autres à l’enregistrement des mariages coutumiers afin de garantir et d’assurer aux femmes les droits suivants concernant :

1.Les biens matrimoniaux lors du décès de leurs époux;

2.Les biens matrimoniaux en cas de divorce ou d’annulation du mariage;

3.Les funérailles;

4.La transmission des biens.

Le Département du genre a mené des campagnes mobiles, des réunions, des rassemblements publics et des consultations dans tous les Districts afin de sensibiliser l’opinion public et d’avoir ses vues sur l’inégalité des droits en matière d’héritage et de succession à la dignité de chef. En conclusion, la grande majorité des hommes et des femmes Basotho ont convenu que la loi devrait leur donner les mêmes droits successoraux avec des réserves en ce qui concerne les terres arables. Seuls quelques-uns étaient d’avis que les femmes, en particulier les fillettes, ne pourraient bénéficier des droits successoraux que s’il n’y avait pas d’enfant mâle dans la famille. En ce qui concerne la succession à la dignité de chef, la majorité des hommes et des femmes Basotho ont maintenu catégoriquement que la chefferie les définit comme Basotho de sorte que les femmes célibataires, qu’elles soient ou non issues de sang royal, ne peuvent accéder à la dignité de chef par succession afin d’éviter toute incertitude dans l’ordre de succession. Un petit nombre acceptaient l’idée que les femmes célibataires pourraient accéder à la dignité de chef par succession seulement si la loi était amendée pour les obliger à ne pas convoler par crainte qu’elles épousent un homme n’appartenant pas à une famille royale ce qui nuirait à l’ordre de succession. Quelques autres considéraient que la chefferie est une forme d’héritage et que les lois sur l’héritage devraient être amendées pour assurer l’égalité des droits dans ce domaine.

Chefferie

Mesures législatives

Le Ministère des autorités locales, de la chefferie et des affaires parlementaires a également lancé des consultations à l’échelon nationale en vue de réexaminer la Chieftainship Act dans son ensemble, son article 10 faisant partie de ceux qui seront examinés; ceci donne donc une occasion de faire avancer l’amendement de l’article 10 qui fait une distinction entre les femmes mariées et les femmes célibataires dans les cas de succession, donnant aux premières seulement le droit d’accéder à la dignité de chef par succession.

Mesures judiciaires

Le 29 août 2012, la Cour suprême du Lesotho siégeant en qualité de Cour constitutionnelle a été saisie d’une demande constitutionnelle dans laquelle Senate G. Masupha (fille unique de feu le Chef principal Masupha et ‘Masenate’) contestait l’article 10 de la Chieftainship Act qui exclut les femmes célibataires de la succession à la chefferie au motif que la discrimination fondée sur le sexe est contraire à la Constitution; elle s’appuyait sur les articles 18 3) et 19 de la Constitution qui interdisent notamment cette forme de discrimination et sur le principe de l’égalité devant la loi et de la protection égale qu’elle garantit. Au paragraphe 4) de l’article 10, la Chieftainship Act accorde à l’épouse survivante d’un chef le droit de lui succéder à titre personnel au cas où, à sa mort, son époux ne laisse pas d’enfants mâles; elle refuse cependant ce droit aux femmes célibataires même si elles sont les filles uniques des défunts. C’est sur cette base que Melle Senate a attaqué la loi.

À l’appui du jugement qu’elle a rendu le 3 mai 2013, la Cour constitutionnelle a présenté les arguments suivants :

a)La loi n’exclut pas les femmes ou les filles de la succession à la fonction de chef dans tous les cas puisque les femmes mariées peuvent encore accéder à cette fonction par succession comme régentes ou à titre individuel;

b)Tous les hommes et tous les garçons ne sont pas habilités à succéder à la chefferie; la loi dispose en effet que seul le fils premier-né, ou un oncle du chef défunt au cas où il n’aurait pas de fils, peuvent lui succéder;

c)L’article 10 a pour objectif de garantir la clarté dans l’ordre de succession;

d)L’article 10 fait une « simple distinction » par opposition à une « nette préférence »;

e)L’article 10 fait la distinction entre femmes mariées et femmes célibataires de sorte que Senate ne pourrait invoquer la discrimination que sur la base de son « statut » et non sur celle du « sexe »;

f)Les tribunaux ne peuvent ignorer la réserve émise par le Lesotho à l’Article 2 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes à moins de ne pas prendre en considération l’avis délibéré et dûment considéré de l’Exécutif;

g)L’article 10 n’est pas contraire à la Constitution du fait que les alinéas b) et c) du paragraphe 4) de l’article 18 permettent de faire une différence de traitement pour des questions de coutume.

Bien que cette affaire n’ait en rien modifié le statut des femmes dans les affaires de succession, elle a donné des orientations en ce qui concerne les domaines sur lesquels les défenseurs de l’égalité des sexes doivent se concentrer lorsqu’ils plaident en faveur de l’égalité des droits de succession et de l’élimination de la réserve à l’Article 2 de la Convention.

Adoption

Mesures législatives

Au Lesotho, l’adoption relève de la loi de 2011 sur la protection et le bien-être des enfants dont l’article 51 établit des conditions non-discriminatoires pour les personnes qui satisfont aux critères et l’article 55 donne aux femmes et hommes mariés le droit présenter une demande conjointe d’adoption assortie de preuves à cet effet.

Polygamie

Mesures législatives

Les lois de Lerotholi ne sanctionnent pas la polygamie mais reconnaissent cette pratique et apportent des éclaircissements sur la façon dont les questions de succession et d’héritage devraient être traitées dans les cas de polygamie.

Mesures administratives

Afin de protéger les droits des femmes, en particulier leurs droits de propriété, des réunions publiques continuent à être organisées afin de mieux faire connaître les procédures qu’il y a lieu de suivre pour les mariages polygames, certaines de ces procédures impliquant une consultation de la première épouse. L’Association Women and Law in Southern Africa (Les femmes et le droit en Afrique australe) effectue une étude de référence sur la polygamie dont le résultat permettra d’informer le pays sur les mesures à prendre dans la pratique.

Citoyenneté

Au Lesotho, les conditions régissant l’acquisition de la citoyenneté par mariage donnent nettement la préférence aux hommes Basotho par rapport aux femmes de la même ethnie. Selon la pratique, qui s’est en quelque sorte transformée en loi, tout homme qui n’est pas un Mosotho mais qui épouse une femme Mosotho et souhaite acquérir la citoyenneté du Lesotho devrait attendre jusqu’à cinq ans avant d’être naturalisé alors qu’une femme qui n’est pas une Mosotho et qui épouse un Mosotho acquiert la citoyenneté du Lesotho dès les formalités administratives nécessaires accomplies.

Mesures constitutionnelles et législatives

Par l’intermédiaire du Ministère de l’Intérieur, le Gouvernement du Lesotho a constitué un groupe spécial pour étudier les articles 40 et 41 de la Constitution de 1993 qui se rapportent à la citoyenneté et pour conseiller le Ministère sur les mesures à prendre en ce qui concerne la restriction relative à la double nationalité et à la discrimination à l’égard des femmes dans la mesure où elle touche à l’acquisition de la citoyenneté par mariage.